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En mission pour le Saint


Station thermale de luxe, quelque part dans les hauts de Marijoa.

Et voila mesdames, c’est réparé.

Éloignant d’un geste l’esclave réparateur de den den, Ike Basara s’avance en souriant au milieu du parterre de gérontes confits dans le luxe ambiant comme des fruits dans une gelée. Affichant un sourire hypocrite à la blancheur parfaite, il esquive en souriant les mains avides et les moues aussi fausses que fardés des vieilles saintes. Ne guettant que l’approbation d’une seule des ancêtres étalés ici. Elizabeth Eleanore Ludmilla Albenas. Reine de ce club select de vieilles Tenryubitto quasiment sénile et dont l’âge avancé, le veuvage et diverses maladies vénériennes n’ont entamés ni l’influence ni le gout pour les potins et les intrigues de cour. Un atout indispensable pour celui qui compte bien devenir le plus jeune des Dragons Célestes à accéder au titre de Vénérable.

Vous êtes si galant. Notre divertissement va pouvoir reprendre, voulez vous que  nous la regardions ensemble ?
Ce serait avec un plaisir immense, hélas, je me vois forcé de décliner. Le devoir vous comprenez…

Le devoir. Et un mépris profond pour ceux de ses semblables incapable de rien d’autre que de profiter de leurs privilèges. A part quelques rares éléments les Dragons célestes n’ont plus de Dragons que le nom. Pas d’ambitions, pas de volonté, juste une richesse que le commun des mortels peine à imaginer et une passivité de bovins.

Allons Ike, vous n’allez pas nous abandonner si vite. Il est si rare de recevoir la visite d’un homme aussi charmant que vous. Nous tenons à en profiter autant que possible… Restez donc encore un peu.
Comment refuser une si charmante demande... Je crois que le devoir attendra alors. Mesdames, je suis tout à vous…

L’écran géant se rallume en même temps que l’escargophone et un concert de gloussements et de piaillement de joie salue la réapparition de l’image. Dans le baroque tape à l’œil des meilleurs bains thermaux des hauts de Marijoa  la mode est au voyeurisme par escargophone interposé.  On se nourrit de tranches de vie venant des blues intercalés de brides de réclames et de publicité, drames du quotidien, méchanceté et bêtise ordinaire. Les vieilles saintes appellent ça Den den réalité et se repaissent de cette misère comme d’horribles vampires. Et elles ne peuvent pas plus s’en passer qu’un vieux camé de sa dose quotidienne de blanche.  

N’accordant qu’une attention distraite à l’écran Ike s’installe confortablement dans un des fauteuils à la droite de la doyenne et fais mine de s’intéresser, alimentant soigneusement la conversation en lâchant de temps en temps un « Oh » ou un «Ah ? » bien appuyé. Jusqu'à ce qu’au détour d’une image l’octogénaire lui pose une question qui le laisse perplexe.

Comment ?
C’était à l’écran, Don Patillo prétend que sa recette vient directement du siècle oublié et que c'est pour ça qu'elle est si bonne. Directement du siècle oublié. Vous pensez que c’est vrai ?

Une recette du siècle oublié ? Mystère… Et une colle qui ne plait pas du tout au futur grand ordonnateur du Gouvernement Mondial. Après tout, s'il y a bien un homme qui ne doit rien ignorer, c'est bien lui.

Hélas, je crois que finalement je vais devoir vous quitter. Au plaisir de vous revoir très chère.

Ike n’a pas fait deux pas hors de la salle qu’il a déjà son den den en main et compose rapidement le numéro d’un correspondant qu’il obtient dés la seconde sonnerie.

Oui monsieur ?
Je veux savoir si Don Patillo tient vraiment se recette du siècle oublié. Vérifiez.

Puis il raccroche.


Dernière édition par Red le Lun 23 Mar 2015 - 8:55, édité 1 fois

    Royaume de Luvneel, quelques heures plus tard

    Ou tu vas ?
    Au boulot.

    Red finit d’enfiler son costard, rajuste sa cravate et abandonne la chambre ou il stagne depuis quelques mois. Un bref arrêt sur le pas de la porte pour vérifier consciencieusement que rien ne cloche, chapeau, cravate, lunettes noires, chaussures cirés, lames dissimulées dans leurs étuis, puis il se met en branle. Quittant rapidement l’immeuble pour s’engouffrer dans une calèche noire modèle classe et confort ou l’attendent trois autres types sortant de chez le même tailleur.

    La cible habite dans le quartier du Temple. Elle est chez elle. On y sera dans une quinzaine de minutes.

    Et comme on ne plaisante pas avec l’exactitude au Cipher Pol, quinze minutes précises plus tard, la calèche s’immobilise devant l’adresse. Laissant Red et ses acolytes monter jusqu'à l’étage ou se trouve l’appartement de la cible. Gontran Dieuleveult alias Don Patillo pour la dendenvision.

    Ouais, c’est pourquoi ?
    Service royal de l’architecture monsieur. Nous vous prions de bien vouloir excuser le dérangement que nous allons occasionner, mais l’avis que vous avez du recevoir indiquait que nous passions aujourd’hui pour vérifier le bon état de votre immeuble.
    Ah bon ? Bah, si vous le dites. Entrez mais faites vite.

    Efficace et disciplinés, les trois hommes se dispersent immédiatement dans l’étage pour en inspecter les moindres recoins pendant que Red reste obligeamment avec la cible pour l'occuper le temps que les collègues reviennent.

    Vous pouvez y aller, je suis seul et je vous dérangerais pas.
    Et personne ne risque de nous entendre si on fait un peu de bruit ?
    Non.

    Un mot de trop pour Don Patillo qui se retrouve instantanément collé sur une chaise par deux agents pendant que Red lui colle une lumière dans le visage.

    Don Patillo, je vais vous demander de répondre sans mentir à une question. Je vous assure que si vous le faites, tout s’arrêtera la. Est-ce que votre recette provient réellement du siècle oublié ?
    Bordel mais vous êtes qui ?
    Ne vous occupez pas de nous. Concentrez vous sur la question. Est-ce que votre recette provient réellement du siècle oublié ?!
    Du siècle oublié ? Mais c’est idiot comme question, je ne suis qu’un acteur de den den vision !
    Nous avions prévu que vous pourriez avoir ce genre de réaction... Allons, soyez raisonnable, dites nous la vérité.
    Mais vous êtes malades ! Vous sortez de l'asile ou quoi ?!
    Je vous préviens que si vous nous forcez à changer de méthode ça ne va pas vous plaire.

    Red plonge la main dans son costard pour en sortir une lame mais n'a pas le temps de la coller sous l'œil de l'acteur que celui se secoue. Dopé par la peur il se libère de l'agent qui le tient et plante son pied dans la bas ventre de celui qui lui fait face avant de plonger vers une fenêtre suivi par Red. Mais l'agent n'attrape que la veste pendant que Don Patillo traverse la vitre et fait une chute de quatre étages, miraculeusement amorti par le toit de tissu de l'étal de fruits juste en dessous.

    Merde !
    Le con !
    Faut le rattraper avant que ça dégénère, bougez vous !

    Las quatre agents dévalent l'escalier en courant et ne surgissent dehors que juste à temps pour voir un Gontran mi boitant mi courant franchir le coin de la rue en appelant à l'aide de toutes ses forces.

    Je sens que ça va chier !
    Courez !

    Et dans les rues de Luvneel c'est une poursuite inégale qui s'engage, l'avance et la connaissance du quartier de Gontran contre la parfaite condition physique de quatre agents surentrainés. Un virage, un autre, implacablement les agents gagent du terrain jusqu’à ce que, débouchant sur une avenue plus large que les autres, l'acteur voit son salut dans une bande de miliciens en patrouille et va s'effondrer à leurs pieds en hurlant, immédiatement suivi par les quatre hommes en noir qui se figent face aux troufions.

    Au Secooouurs ! On m'enlève !
    Halte !
    Et voila, ça chie...

    Hésitantes comme seules les jeunes recrues savent l'être, les soldats braquent les hommes en noir, et Red n'a pas le temps de prononcer un mot d'apaisement qu'un des mômes plus nerveux que les autres appui sur la gâchette, logeant immédiatement une balle dans le crane de l'agent le plus proche qui s'effondre et dont le partenaire riposte sur le champ.

    A couvert !

    Les trois agents plongent comme ils peuvent derrière les obstacles les plus proches pendant qu'en face toute la brigade ouvre le feu. Red sort une grenade, un autre agent déplie hâtivement une mallette et entreprend de monter une arme plus lourde pendant que son collègue se met à rendre coup pour coup à la maréchaussée. Et en quelques minutes la rue se met a ressembler à Marinford après guerre. De la fumée partout, des gens qui crient, des balles qui sifflent à tout va entre les agents couchés derrière leurs massifs de fleurs et les poulets derrière les calèches d'en face, avec entre les deux un Gontran terrorisé qui, mains sur la tête, tente désespérément de ramper vers une zone sure sans se manger un pruneau dans la face. Très vite les trois agents se retrouvent presque acculés par la milice pendant que de partout se rapprochent les coups de sifflets stridents des renforts arrivant de tout le quartier.

    Les projectiles explosifs de Red volatilisent une calèche, puis une autre. Noyant un coté de la rue dans un joli feu de joie et de fumée noire et ajoutant les hurlements des chevaux fous de terreurs à la cacophonie ambiante. Juste le temps de rouler jusqu'aux collègues terrés quelques mètres plus loin.

    Paulo est mort putain !
    Sur ?
    Sur de sur ouais, j'ai sa cervelle partout sur mon costard ! Qu'est ce qu'on fait putain ?!
    Le patron a dit de vérifier, alors on vérifie ! Ou est passé le guignol qui nous a trainés dans cette merde ?
    La bas, juste sous la charrette de fruits. A vingt mètres.
    Ok j'y vais. Couvrez-moi !

    Profitant de la réunion et de l'accalmie soudaine dans la grêle de plombs les miliciens s'organisent. Raffermis par des renforts et du matériel lourd, la milice reprend du poil de la bête et revient à la charge. Boucliers antis émeutes devant, canons à mains derrière, forçant Red a sacrifier ces dernières grenades fumigènes pour traverser la rue en courant sans se faire déchiqueter et truffer de plomb par les projectiles des locaux remontés à bloc, et enfin se laisser tomber à coté de la charrette qui sert de refuge à Gontran.

    Quelques secondes de plus pour choper l'acteur aux chevilles, le tirer de sa planque et lui coller une lame juste sous l'œil avec un regard on ne peut plus porteur de menaces de mort.

    Alors Don Patillo. Tu réponds ou j'te créve !
    Pitié pitié !
    Parle !
    C'est vrai c'est vrai ! Si mes pâtes sont si bonnes c'est parce que la recette vient du siècle oublié !

    Derrière l'agent Red un autre agent se fait truffer de plomb et le survivant de l'équipe décide qu'il est temps de foutre le camp. Pas loin. Léché par les flammes depuis un petit moment l'étal du marchand de liqueurs décide d'exploser pour participer aussi à la fête, lâchant une boule de feu dans la rue qui fait voler en éclats toutes les vitres intacts de la rue et carbonise arbres agents tissus de tout en lançant alentour un joyeux début d'incendie. A moitié sonné et roussi Red se jette dans la porte la plus proche, s'empressant de mettre autant de maisons que possible entre lui et l'armée de miliciens et de pompiers qui s'empare victorieusement des lieux. Et ne s'arrêtant que le temps d’attraper son escargophone pour y lâcher une phrase laconique.

    Si, c'est vrai.

      Station thermale de luxe, toujours quelque part dans les hauts de Marijoa.

      Un petit sourire satisfait aux lèvres, Ike traverse rapidement les différentes zones des thermes pour arriver dans les appartements ou les gérontes s'adonnent comme d'habitude à leur passe temps favori.
      Juste le temps de revenir s'installer à droite de l'énorme trône sofa ou le corps de l’ancêtre s'étale comme une méduse sur une plage pour lui glisser un mot à l'oreille.

      Pour votre question sur Don Patillo. C'est vrai.
      Qui était à l'escargophone ?
      Oh. Une erreur.

      Et rangeant son den den, c'est un Ike Basara sur d'avoir marqué des points qui quitte la salle d'un pas assuré, sourire aux lèvres.

      Qu'il est bon d'tre le fidéle serviteur du gouvernement Mondial...