"Tout le matériel est embarqué Commandante Yanagiba."
"Très bien, vous pouvez nous laisser."
Un peu plus de deux semaines, c'est le temps qu'on va avoir en mer pour faire tous les branchements et les ajustements internes et le tout sans avoir le droit à l'erreur puisque, nous n'aurons pas le loisir de pouvoir tester le matériel plus d'une ou deux fois en route. Et ainsi sans que nous en soyons conscients, nous nous sommes embarqués dans un calvaire sans nom. Au début, ce n'était que des petits soubresauts et des sueurs froides en observant les hublots ou en écoutant le métal couiner comme s'il aller rompre à n'importe quel moment. L'impression que les murs enfin les parois plutôt se rétractent petit à petit et le tout doublé par le fait que la montre joue contre nous. Même si le plus gros du travail a été fait par les ouvriers à Navaronne, il faut maintenant installer tout le câblage et tout lier au sous-marin sans créer d'avarie trop grave qui aurait stoppé net le bâtiment et surtout aurait pis avoir de graves conséquences forcements.
La première nuit fut certainement l'une des pires depuis longtemps pour moi, je ne suis pas la seule à avoir le droit aux cauchemars et aux frayeurs nocturnes, j'imagine. En tout cas, le fait d'être sous l'eau a bien fait fleurir mon imagination pour me faire bien comprendre que le sommeil ne me laisserait pas être en paix. Multipliant les heures de travail pour rattraper les retards du calendrier de travail comme mes subordonnés et les techniciens, on avait l'air de plus en plus de morts-vivants, des machines qui ne tiennent qu'à l'effort comme une corde trop tendue qui finira par rompre.
Au début, j'ai essayé de m'offrir un semblant de loisir en travaillant sur un projet personnel quitte à ne pas pouvoir me reposer convenablement. Évidemment ce n'est pas dur de deviner que même pour une forcenée du travail comme moi, on ne peut pas tenir éternellement sans s'oxygéner le cerveau ou au moins avec une vraie distraction. C'est ainsi qu'au bout d'un certain nombre de jours une de mes paires de subordonnées que j'avais connue à Navaronne et sur le Léviathan a fini par venir me voir. Suite à dix minutes de négociation en vain, elles ont choisi de la jouer autrement :
"Nous avons notre tenue préférée en otage !"
"Mais, vous êtes malades ?!"
"Nous n'hésiterons pas à nous en servir !"
Effectivement, elles ont pris en otage ma tenue de travail, avec une tasse de café et elles semblaient déterminées à s'en servir. Évidemment dans un sous-marin, on ne peut pas se permettre de gâcher l'eau pour laver des vêtements, surtout pour une simple tâche de café... Du coup je suis prise entre l'alternative de devoir leurs obéir, ou simplement heurk... Porter un vêtement sale, je dois déjà supporter la transpiration et le gras je ne supporterai pas cela en plus ! J'ai déjà suffisamment pris de retard pour ne pas devoir ajouter à cela ma fixation handicapante des taches sur mes vêtements, c'est alors que je finis par céder à leurs chantages.
"Je vais discuter avec le médecin, s'il le veut... Ça ira ?"
"Discuter, comme dans faire connaissance et avoir une vraie conversation ?"
"Oui..."
"Et pourquoi lui ?"
"C'est le seul avec qui j'ai échangé plus d'une phrase sur l'Hypérion en dehors de vous deux et du capitaine."
Je déteste les gamines, surtout ces deux la quand elles pouffent de rire d'un regard entendu comme s'il y avait une vérité cachée à comprendre. Je tends le bras pour prendre mon uniforme elle recule en faisant un petit non de la tête. Sociabilisation mon œil, elles veulent juste rigoler en essayant de m'imaginer essayer d'avoir une activité qui ne concerne pas mon travail... Enfin soit, pour le peu que je l'ai vu, il semblait un minimum... Bref, le genre de personne avec qui je peux discuter sans envie de meurtre bien qu'à cause de mes préjugés j'ai du mal à être totalement détendu en sa présence. Bon je n'ai pas de jogging pour faire lieu de tenue détendue, donc je ressors la tenue folklorique de mon île natale ça m'aidera peut-être à ne pas trop penser au travail. C'est ainsi avec ma tenue rouge à fourrure blanche que je vais vers l'infirmerie. *lien* une fois devant, sans avoir fait encore lever quelques regards encore sans comprendre pourquoi :
"Ce n'est pas comme si je me promenai encore nue ou en sous-vêtements comme je l'ai fait sur le Léviathan... Enfin soit je ne comprendrai jamais, je pense."
Je tape à la porte, entre quand on m'indique de le faire. Je fais un salut par réflexe avant de lui demander l'air gêné.
"Est-ce que ça vous dérangerait de discuter un peu ? Enfin... Je ne souhaite pas vous déranger en plein travail, mais..."
Quand je pense que j'arrive à faire baisser les yeux à des hommes et des femmes deux fois plus épais que moi et que je n'arrive pas à aligner deux phrases intelligibles justes parce qu'on est en dehors du cadre professionnel.