- Oups ! Oh pardon !
La pièce sent le vieux, les murs sont flous. Je n’ai pas mal, ni à la cuisse ni à la tête, ni nulle part en fait. La lumière de dehors est froide à travers les persiennes des fenêtres bien comme il faut. Blanche comme un jour d’hiver, blanche comme la mousse en haut de mon verre encore plein. La tache de lait sur ma chemise sombre, la peau de celle qui a renversé sa conso sur mon très cher serviteur.
Elle n’est pas à l’aise, je la mets.
- Rien de grave, ce ne sont pas vraiment mes frusques...
Son regard hésite, cherche à comprendre. Je ne devrais peut-être pas lui expliquer que je les ai empruntées à un mari. Ce serait sans doute une approche assez moyenne, quoique la sienne n’aie pas vraiment été des plus subtiles non plus. Et la voilà qui enchaîne.
- J’ai cru entendre que vous étiez colonel, je suis confuse !
Colonel ? Ha ! J’ai un petit ricanement fat en l’invitant à s’asseoir dans mes règles, sans me lever. Elle est bien élevée, croise les chevilles et non les genoux, lesquels demeurent serrés et légèrement de travers pour quand même qu’on ne regarde pas sous ses jupons, ça ne se fait pas. Qui porte encore des jupons à notre époque ? Ses yeux verts forêt me fixent comme si j’avais la réponse à une question qu’elle n’a pas encore posée. Quel âge elle a, trente ? Plus ?
- Tahar.
Mon nom la fait à peine redresser le regard derrière ses cils mal à l’aise. Elle est absente en étant là, cherche dans son verre triste comment on fait la parade habituellement chez le commun des mortels. Mais il n’y a pas de manuel, juste à se lancer. Elle balance d’une formule à l’autre, essaie, se reprend.
- Comment vous
Malpolie, on commence par le prénom.
- Comment puis-je me faire pardonner.
Un soupir, chuchoté plus que questionnant. Maintiens le contact visuel, personne ne t’aidera alentour. Moi ?
- J’ai bien quelques idées.
Je suis aimable, c’est parce que tu m’es sympathique. Tu n’as pas la lourdeur des baronnes locales qui savent ce qu’elles viennent chercher ici. Tu respires l’exotisme, et ce n’est pas que dans ton parfum aéré. Si tu n’avais pas ce petit froncement décidé de sourcils, on pourrait même dire que tu t’es trompée de monde en franchissant la porte de ce troquet pour gigolades. Tu n’es ni d’Esperanza ni de cette mer, hein ? Ni de ma vie.
Allons, lutine, il est temps de changer de penderie. Où sont les escaliers ?
- De ce côté-ci je crois...
Ils sont bien à gauche, mais soudain par tribord l’ombre des murs se gondole et bientôt ils ont perdu de leur gris pour revêtir un bleu transparent, chatoyant au soleil. La jolie rouquine dépressive fait place au coquin apeuré qui rame pour sa vie sur le banc d’en face. Il n’a pas osé me réveiller en me touchant l’épaule alors c’est de son pied qu’il me chatouille la botte. Je regarde de plus en plus dans mon passé ces derniers temps. Il paraît que ça aide pour savoir où aller, je me demande si c’est inconscient. En tout cas les siestes ne soulagent pas grand-chose, et la douleur physique revient à peine le sommeil me quitte.
- N-Nous arrivons monsi, Saigneur...
La pièce sent le vieux, les murs sont flous. Je n’ai pas mal, ni à la cuisse ni à la tête, ni nulle part en fait. La lumière de dehors est froide à travers les persiennes des fenêtres bien comme il faut. Blanche comme un jour d’hiver, blanche comme la mousse en haut de mon verre encore plein. La tache de lait sur ma chemise sombre, la peau de celle qui a renversé sa conso sur mon très cher serviteur.
Elle n’est pas à l’aise, je la mets.
- Rien de grave, ce ne sont pas vraiment mes frusques...
Son regard hésite, cherche à comprendre. Je ne devrais peut-être pas lui expliquer que je les ai empruntées à un mari. Ce serait sans doute une approche assez moyenne, quoique la sienne n’aie pas vraiment été des plus subtiles non plus. Et la voilà qui enchaîne.
- J’ai cru entendre que vous étiez colonel, je suis confuse !
Colonel ? Ha ! J’ai un petit ricanement fat en l’invitant à s’asseoir dans mes règles, sans me lever. Elle est bien élevée, croise les chevilles et non les genoux, lesquels demeurent serrés et légèrement de travers pour quand même qu’on ne regarde pas sous ses jupons, ça ne se fait pas. Qui porte encore des jupons à notre époque ? Ses yeux verts forêt me fixent comme si j’avais la réponse à une question qu’elle n’a pas encore posée. Quel âge elle a, trente ? Plus ?
- Tahar.
Mon nom la fait à peine redresser le regard derrière ses cils mal à l’aise. Elle est absente en étant là, cherche dans son verre triste comment on fait la parade habituellement chez le commun des mortels. Mais il n’y a pas de manuel, juste à se lancer. Elle balance d’une formule à l’autre, essaie, se reprend.
- Comment vous
Malpolie, on commence par le prénom.
- Comment puis-je me faire pardonner.
Un soupir, chuchoté plus que questionnant. Maintiens le contact visuel, personne ne t’aidera alentour. Moi ?
- J’ai bien quelques idées.
Je suis aimable, c’est parce que tu m’es sympathique. Tu n’as pas la lourdeur des baronnes locales qui savent ce qu’elles viennent chercher ici. Tu respires l’exotisme, et ce n’est pas que dans ton parfum aéré. Si tu n’avais pas ce petit froncement décidé de sourcils, on pourrait même dire que tu t’es trompée de monde en franchissant la porte de ce troquet pour gigolades. Tu n’es ni d’Esperanza ni de cette mer, hein ? Ni de ma vie.
Allons, lutine, il est temps de changer de penderie. Où sont les escaliers ?
- De ce côté-ci je crois...
Ils sont bien à gauche, mais soudain par tribord l’ombre des murs se gondole et bientôt ils ont perdu de leur gris pour revêtir un bleu transparent, chatoyant au soleil. La jolie rouquine dépressive fait place au coquin apeuré qui rame pour sa vie sur le banc d’en face. Il n’a pas osé me réveiller en me touchant l’épaule alors c’est de son pied qu’il me chatouille la botte. Je regarde de plus en plus dans mon passé ces derniers temps. Il paraît que ça aide pour savoir où aller, je me demande si c’est inconscient. En tout cas les siestes ne soulagent pas grand-chose, et la douleur physique revient à peine le sommeil me quitte.
- N-Nous arrivons monsi, Saigneur...
Dernière édition par Tahar Tahgel le Ven 7 Nov 2014 - 8:39, édité 2 fois