L’océan, le calme, la solitude, l’ennui. Une tempête, la débandade, un naufrage, la solitude à nouveau, et un satané serpent que rien n’atteint. Des sauveurs, des marchands. Un nouveau navire, un nouveau voyage, et toujours cette solitude qui nous empoigne…
Depuis quelques temps déjà, Cameron ne voyageait plus seule. Suite à un naufrage de ce petit navire, elle avait été recueillie par un équipage de marchands, dont les hommes non insensibles au charme mystérieux de ses grands yeux bleus l’avaient chaleureusement accueillis à bord et lui permettaient depuis lors de voyager gratuitement avec eux. Une aubaine sur laquelle la jeune femme n’allait certainement pas cracher même si elle avait bien dans l’idée de ne pas rester indéfiniment sur ce navire. Elle avait d’autres objectifs mais en attendant de savoir un peu mieux comment s’y prendre pour y parvenir, ou ne serait-ce que trouver les prémices d’une piste à suivre, profiter de l’hospitalité de ces honnêtes, du moins le semblaient-ils, marchands lui apparaissait comme un bon compromis. Plus besoin pour elle de chercher ni comment se nourrir, ni comment voguer d’une île à l’autre. Car la demoiselle était fort curieuse, si elle poursuivait un but bien précis, elle ne saisissait pas moins là l’occasion de découvrir le monde et à chaque escale, elle s’en allait sur le port pour partir en exploration de l’île où le bateau avait accosté. En principe, elle revenait toujours à temps, si elle avait un peu de retard, il y avait toujours au moins un des marchands pour rappeler à ses camarades de l’attendre. La jeune fille était un peu devenue l’égérie de l’équipage. Une jolie poupée de porcelaine dont ils pouvaient se targuer auprès de leurs collègues et rivaux.
Puisqu’ils la surent femme d’entrée de jeu, Cameron avait hésité quant au nom sous lequel elle se présenterait à eux. Cependant, elle avait décidé de tirer un trait définitif sur son appellation de naissance, d’autant plus que révéler son identité pouvait s’avérer risquer à tout instant, même s’il était fort peu probable que de simples marchands aient pu avoir vent de cette histoire un jour. Son choix se reporta donc sur le nom de Cameron Edward qu’elle avait déjà définit auparavant et auquel il lui était d’ors et déjà plus usuel de répondre. Ce voyage à bord du navire marchand scella cette habitude.
Il arrivait parfois que les hommes acceptent de transporter quelques voyageurs en échange d’une rémunération bien sûr, ou d’un service selon les cas. Pour sa part, Cameron ne prêtait guère attention à ces « intrus », d’ailleurs, c’était à peine si elle adressait la parole aux membres de l’équipage, juste le strict minimum pour leur être agréable et continuer à être aimée. Machistes, ils essayèrent bien de profiter de cette présence féminine pour lui faire faire la cuisine, après un repas, ils ne s’y risquèrent pas deux fois. Dans un sens, ils n’attendaient pas grand-chose de sa part à bord, presque devait-elle se contenter de faire joli. D’une certaine façon, la jeune femme trouvait cela agaçant. D’un autre côté, elle en profitait bien. La seule chose qui troublait son sommeil était le glissement imperceptible du serpent, « son » serpent, sur les planches du bateau, qui rôdait dans l’ombre. Elle redoutait qu’il passe à nouveau à l’attaque, mais qui serait sa prochaine victime ? Elle ou s’en prendrait-il à un des malheureux marchands pour la punir de son inactivité ? Peut-être devait commencer à se préparer à trouver une nouvelle offrande…
Par une fin de journée où le ciel grisâtre laissait présagé des risques de pluie au cours de la soirée, le navire marchand arrivait à proximité de sa prochaine destination : une île nommée Troop Erdu. Si Cameron s’interrogeait sur l’origine de cette appellation, elle ne se posa plus la question bien longtemps dès lors que le bateau s’engagea dans le canal qui menait à ce qui s’apparentait à un semblant de port. La jeune femme commençait sincèrement à penser que les îles de ce monde rivalisaient non pas de pittoresque mais de par leur aspect pitoyable, et encore, elle était loin de s’imaginer ce qui l’attendait dans ce qu’on pourrait probablement qualifier de trou le plus perdu de tout West Blue. Après tout, l’île ne portait pas ce nom pour rien.
A peine le navire était-il amarrer au port que la jeune femme revêtait déjà sa cape sans laquelle elle ne s’aventurait jamais en ville. Cameron jouait de son apparence dissimulée et de son nom pour se faire passer pour un homme le plus souvent possible. La raison serait bien longue à exposer et fort peu utile en cet instant, d’autant plus que jusqu’à présent, son identité féminine avait été chaque fois découverte et au final, lui avait d’avantage rendu service. Exceptionnellement, la curieuse se munit uniquement de son poignard qu’elle gardait à la ceinture, par mesure de précaution si besoin est. Il ne prit pas son sabre avec elle. D’une part, elle avait la certitude que personne ne viendrait essayer de le lui dérober tant que le serpent veillerait sur l’objet qui lui semblait particulièrement précieux, comme si le reptile savait tout ce que cette lame pouvait représenter. D’autre, elle s’assurait par la même occasion que ce fameux reptile reste à bord pour monter la garde et ne la suivrait donc pas sur terre.
Alors qu’elle avait déjà coiffé sa tête de la capuche de sa cape afin de dissimuler son visage et qu’elle s’apprêtait à sauter sur le port - car elle trouvait bien plus exaltant de sauter par-dessus la rambarde plutôt que de se contenter de descendre sur la passerelle d’embarquement comme tout le monde - l’un des marchands l’interpela :
« Tu ferais peut-être mieux de rester à bord, Cameron. Les gens d’ici ne sont pas très accueillants. Ils n’aiment pas les étrangers !
- Ne vous inquiétez pas, leur assura-t-elle en voyant trois des membres de l’équipage la regardait avec une moue légèrement renfrognée. Je ne ferais qu’un petit tour pour me promener et au besoin, je sais me défendre ! »
Sur ces mots, elle bondit par-dessus bord et atterrit avec agilité sur le port, enfin ce qui était censé être le port, avant de s’éloigner d’un pas assuré.
« Un jour, elle ne reviendra pas, n’est-ce pas ? soupira l’un des marchands à son collègue.
- C’est probable ! Mais c’est sans doute ici qu’elle va avoir envie de rester ! lui lança-t-il en lui donnant un coup de coude dans les côtes. Je lui donne pas plus d’une demie heure avant qu’elle ne revienne en nous suppliant de partir le plus vite possible tant elle ne supportera plus l’odeur nauséabonde qui plane dans l’coin ! »
Il est vrai que de son côté, l’odeur pestilentielle qui régnait dans les parages irritait déjà grandement les narines de Cameron. Outre ce parfum, le sol boueux presque vaseux et visqueux sous ses pieds la répugnait également. Elle avait appris à vivre à la dure au cours des dernières années, mais dans la crasse pour autant. Alors qu’ici, elle avait l’impression que la saleté avait étendu sous joug sur le moindre fragment qu’il soit naturel ou artificiel sur lequel elle posait ses yeux. En effet, son excursion allait peut-être un peu plus brève qu’elle ne l’aurait pensé à la base.
La question à présent était de savoir si la demoiselle - qui espérait passer pour homme - allait se risquer à prendre contact avec les autochtones ou non. Malgré l’avertissement qu’elle avait reçu, telle une enfant intrépide qu’elle était toujours, la curiosité la titillait de justement s’y essayer. Et quel meilleur endroit qu’un bar, taverne ou autre appellation selon les goûts et les couleurs, pour rencontrer les indigents ?
Cameron poussa donc la porte de l’un de ces établissements ordinairement si bruyant où un silence glacial se répandit à son apparition. La jeune femme capée sentit tous les regards méprisants de ces individus à l’apparence tous plus disgracieuse les uns que les autres.
« Dites-moi qu’il n’existe pas d’endroit plus affligeant que celui-ci sur terre ! » pensa-t-elle en son for intérieur, se retenant de lever les yeux au ciel.
Le son des talons de ses bottes résonna sur les planches du sol à chacun de ses pas en direction du comptoir. Poliment, elle demanda qu’on lui serve quelque chose à boire. Cameron avait remarqué qu’il semblait plus aisément d’entamer les conversations avec les hommes dès lors qu’il y avait quelque chose à boire entre eux.
« ‘ sert pas les étrangers ‘ci ! » lui rétorqua grossièrement le propriétaire du lieu.
Cameron soupira, puis dans la nécessité, elle ôta sa capuche pour révéler son joli visage de jeune femme. Cependant, cette fois-ci la révélation n’eut pas l’effet escompté.
« Qu’es’ce t’attends ?! T’as pas compris ?! D’gage d’là ! »
Et avant qu’elle n’ai le temps de répondre quoi que ce soit, on vint « gentiment » lui montrer par où trouver la sortie. Décontenancée et atterrée, Cameron se laissa faire jusqu’à ce qu’on la jette dehors, assise dans la boue. Il lui fallut quelques instants pour se remettre des manières de ces rustres qu’elle n’aurait même pas imaginé possible. Puis, quand elle se releva enfin, elle s’apprêtait à pester et haute voix après cette bande de gueux malodorants et… Elle ne disposait pas encore beaucoup d’insulte dans son vocabulaire pour illustrer le fond de sa pensée. Elle vit alors deux hommes sortant du commerce se diriger vers elle. Aussi répugnants que les autres, la carrure plutôt frêle, ils arboraient un sourire, semblerait-il, révélant les dents gâtées.
« B’soin d’aide P’tite dame ? l’aborda le premier en donnant un discret coup de coude dans le bras de son compère.
- Non, merci ! siffla-t-elle, bien assez agacée comme cela.
- C’est c’mme v’ la P’tite dame, mais s’elle a b’soin d’aid’ elle d’vrait aller voir l’fils Nekke !
- Ouais ! Junior aide t’jours les p’ tites dam’ !
- Nekke Junior ? répéta-t-elle septique. Et où pourrais-je le trouver si jamais j’avais l’idée de vouloir le rencontrer ?
- A c’t’heure-ci, i’ doit ronfler ent’ deux paires d’miches, s’il a pas confondu av’ le cochon ! »
Le premier écrasa le pied de son compère qui venait de parler un peu trop vite pour le faire taire et se pressa de corriger le tir :
« J’sais pas où ‘ est, y d’vrait pas être dur à trouver ! A’ voir vers l’nord !
- Euh… eh bien, merci… » hésita l’étrangère.
Puis ces deux-là s’en allèrent en ricanant, fiers du sale coup dont ils avaient eu l’intelligence d’avoir l’idée, chose rare parmi les imbéciles qui peuplaient cette île. Envoyer l’agneau dans la gueule du loup, voilà qui devrait les faire bien voir par le fils du chef de clan dominant sur l’île. Cameron sentit bien le coup fourré, cependant, elle ne disposait pas d’autres pistes à suivre. De plus, curieuse et intrépide, ce n’était pas quelques bouseux qui allait l’impressionner. Si elle pouvait espérer voir un visage propre parmi cette population qui la répugnait un peu plus à chaque instant, elle ne serait pas contre non plus.
Ainsi, elle partit donc à la recherche de ce fameux Junior, sans vraiment savoir comment s’y prendre une fois de plus. Mais quand elle s’adressa aux individus qu’elle croisa en chemin, soit ils l’ignorèrent, soit ils esquissèrent un sourire disgracieux à l’entende de sa requête. Cameron commença peu à peu à s’interroger sur le fait de savoir si ce qu’elle faisait était vraiment une bonne idée ou non …
Depuis quelques temps déjà, Cameron ne voyageait plus seule. Suite à un naufrage de ce petit navire, elle avait été recueillie par un équipage de marchands, dont les hommes non insensibles au charme mystérieux de ses grands yeux bleus l’avaient chaleureusement accueillis à bord et lui permettaient depuis lors de voyager gratuitement avec eux. Une aubaine sur laquelle la jeune femme n’allait certainement pas cracher même si elle avait bien dans l’idée de ne pas rester indéfiniment sur ce navire. Elle avait d’autres objectifs mais en attendant de savoir un peu mieux comment s’y prendre pour y parvenir, ou ne serait-ce que trouver les prémices d’une piste à suivre, profiter de l’hospitalité de ces honnêtes, du moins le semblaient-ils, marchands lui apparaissait comme un bon compromis. Plus besoin pour elle de chercher ni comment se nourrir, ni comment voguer d’une île à l’autre. Car la demoiselle était fort curieuse, si elle poursuivait un but bien précis, elle ne saisissait pas moins là l’occasion de découvrir le monde et à chaque escale, elle s’en allait sur le port pour partir en exploration de l’île où le bateau avait accosté. En principe, elle revenait toujours à temps, si elle avait un peu de retard, il y avait toujours au moins un des marchands pour rappeler à ses camarades de l’attendre. La jeune fille était un peu devenue l’égérie de l’équipage. Une jolie poupée de porcelaine dont ils pouvaient se targuer auprès de leurs collègues et rivaux.
Puisqu’ils la surent femme d’entrée de jeu, Cameron avait hésité quant au nom sous lequel elle se présenterait à eux. Cependant, elle avait décidé de tirer un trait définitif sur son appellation de naissance, d’autant plus que révéler son identité pouvait s’avérer risquer à tout instant, même s’il était fort peu probable que de simples marchands aient pu avoir vent de cette histoire un jour. Son choix se reporta donc sur le nom de Cameron Edward qu’elle avait déjà définit auparavant et auquel il lui était d’ors et déjà plus usuel de répondre. Ce voyage à bord du navire marchand scella cette habitude.
Il arrivait parfois que les hommes acceptent de transporter quelques voyageurs en échange d’une rémunération bien sûr, ou d’un service selon les cas. Pour sa part, Cameron ne prêtait guère attention à ces « intrus », d’ailleurs, c’était à peine si elle adressait la parole aux membres de l’équipage, juste le strict minimum pour leur être agréable et continuer à être aimée. Machistes, ils essayèrent bien de profiter de cette présence féminine pour lui faire faire la cuisine, après un repas, ils ne s’y risquèrent pas deux fois. Dans un sens, ils n’attendaient pas grand-chose de sa part à bord, presque devait-elle se contenter de faire joli. D’une certaine façon, la jeune femme trouvait cela agaçant. D’un autre côté, elle en profitait bien. La seule chose qui troublait son sommeil était le glissement imperceptible du serpent, « son » serpent, sur les planches du bateau, qui rôdait dans l’ombre. Elle redoutait qu’il passe à nouveau à l’attaque, mais qui serait sa prochaine victime ? Elle ou s’en prendrait-il à un des malheureux marchands pour la punir de son inactivité ? Peut-être devait commencer à se préparer à trouver une nouvelle offrande…
Par une fin de journée où le ciel grisâtre laissait présagé des risques de pluie au cours de la soirée, le navire marchand arrivait à proximité de sa prochaine destination : une île nommée Troop Erdu. Si Cameron s’interrogeait sur l’origine de cette appellation, elle ne se posa plus la question bien longtemps dès lors que le bateau s’engagea dans le canal qui menait à ce qui s’apparentait à un semblant de port. La jeune femme commençait sincèrement à penser que les îles de ce monde rivalisaient non pas de pittoresque mais de par leur aspect pitoyable, et encore, elle était loin de s’imaginer ce qui l’attendait dans ce qu’on pourrait probablement qualifier de trou le plus perdu de tout West Blue. Après tout, l’île ne portait pas ce nom pour rien.
A peine le navire était-il amarrer au port que la jeune femme revêtait déjà sa cape sans laquelle elle ne s’aventurait jamais en ville. Cameron jouait de son apparence dissimulée et de son nom pour se faire passer pour un homme le plus souvent possible. La raison serait bien longue à exposer et fort peu utile en cet instant, d’autant plus que jusqu’à présent, son identité féminine avait été chaque fois découverte et au final, lui avait d’avantage rendu service. Exceptionnellement, la curieuse se munit uniquement de son poignard qu’elle gardait à la ceinture, par mesure de précaution si besoin est. Il ne prit pas son sabre avec elle. D’une part, elle avait la certitude que personne ne viendrait essayer de le lui dérober tant que le serpent veillerait sur l’objet qui lui semblait particulièrement précieux, comme si le reptile savait tout ce que cette lame pouvait représenter. D’autre, elle s’assurait par la même occasion que ce fameux reptile reste à bord pour monter la garde et ne la suivrait donc pas sur terre.
Alors qu’elle avait déjà coiffé sa tête de la capuche de sa cape afin de dissimuler son visage et qu’elle s’apprêtait à sauter sur le port - car elle trouvait bien plus exaltant de sauter par-dessus la rambarde plutôt que de se contenter de descendre sur la passerelle d’embarquement comme tout le monde - l’un des marchands l’interpela :
« Tu ferais peut-être mieux de rester à bord, Cameron. Les gens d’ici ne sont pas très accueillants. Ils n’aiment pas les étrangers !
- Ne vous inquiétez pas, leur assura-t-elle en voyant trois des membres de l’équipage la regardait avec une moue légèrement renfrognée. Je ne ferais qu’un petit tour pour me promener et au besoin, je sais me défendre ! »
Sur ces mots, elle bondit par-dessus bord et atterrit avec agilité sur le port, enfin ce qui était censé être le port, avant de s’éloigner d’un pas assuré.
« Un jour, elle ne reviendra pas, n’est-ce pas ? soupira l’un des marchands à son collègue.
- C’est probable ! Mais c’est sans doute ici qu’elle va avoir envie de rester ! lui lança-t-il en lui donnant un coup de coude dans les côtes. Je lui donne pas plus d’une demie heure avant qu’elle ne revienne en nous suppliant de partir le plus vite possible tant elle ne supportera plus l’odeur nauséabonde qui plane dans l’coin ! »
Il est vrai que de son côté, l’odeur pestilentielle qui régnait dans les parages irritait déjà grandement les narines de Cameron. Outre ce parfum, le sol boueux presque vaseux et visqueux sous ses pieds la répugnait également. Elle avait appris à vivre à la dure au cours des dernières années, mais dans la crasse pour autant. Alors qu’ici, elle avait l’impression que la saleté avait étendu sous joug sur le moindre fragment qu’il soit naturel ou artificiel sur lequel elle posait ses yeux. En effet, son excursion allait peut-être un peu plus brève qu’elle ne l’aurait pensé à la base.
La question à présent était de savoir si la demoiselle - qui espérait passer pour homme - allait se risquer à prendre contact avec les autochtones ou non. Malgré l’avertissement qu’elle avait reçu, telle une enfant intrépide qu’elle était toujours, la curiosité la titillait de justement s’y essayer. Et quel meilleur endroit qu’un bar, taverne ou autre appellation selon les goûts et les couleurs, pour rencontrer les indigents ?
Cameron poussa donc la porte de l’un de ces établissements ordinairement si bruyant où un silence glacial se répandit à son apparition. La jeune femme capée sentit tous les regards méprisants de ces individus à l’apparence tous plus disgracieuse les uns que les autres.
« Dites-moi qu’il n’existe pas d’endroit plus affligeant que celui-ci sur terre ! » pensa-t-elle en son for intérieur, se retenant de lever les yeux au ciel.
Le son des talons de ses bottes résonna sur les planches du sol à chacun de ses pas en direction du comptoir. Poliment, elle demanda qu’on lui serve quelque chose à boire. Cameron avait remarqué qu’il semblait plus aisément d’entamer les conversations avec les hommes dès lors qu’il y avait quelque chose à boire entre eux.
« ‘ sert pas les étrangers ‘ci ! » lui rétorqua grossièrement le propriétaire du lieu.
Cameron soupira, puis dans la nécessité, elle ôta sa capuche pour révéler son joli visage de jeune femme. Cependant, cette fois-ci la révélation n’eut pas l’effet escompté.
« Qu’es’ce t’attends ?! T’as pas compris ?! D’gage d’là ! »
Et avant qu’elle n’ai le temps de répondre quoi que ce soit, on vint « gentiment » lui montrer par où trouver la sortie. Décontenancée et atterrée, Cameron se laissa faire jusqu’à ce qu’on la jette dehors, assise dans la boue. Il lui fallut quelques instants pour se remettre des manières de ces rustres qu’elle n’aurait même pas imaginé possible. Puis, quand elle se releva enfin, elle s’apprêtait à pester et haute voix après cette bande de gueux malodorants et… Elle ne disposait pas encore beaucoup d’insulte dans son vocabulaire pour illustrer le fond de sa pensée. Elle vit alors deux hommes sortant du commerce se diriger vers elle. Aussi répugnants que les autres, la carrure plutôt frêle, ils arboraient un sourire, semblerait-il, révélant les dents gâtées.
« B’soin d’aide P’tite dame ? l’aborda le premier en donnant un discret coup de coude dans le bras de son compère.
- Non, merci ! siffla-t-elle, bien assez agacée comme cela.
- C’est c’mme v’ la P’tite dame, mais s’elle a b’soin d’aid’ elle d’vrait aller voir l’fils Nekke !
- Ouais ! Junior aide t’jours les p’ tites dam’ !
- Nekke Junior ? répéta-t-elle septique. Et où pourrais-je le trouver si jamais j’avais l’idée de vouloir le rencontrer ?
- A c’t’heure-ci, i’ doit ronfler ent’ deux paires d’miches, s’il a pas confondu av’ le cochon ! »
Le premier écrasa le pied de son compère qui venait de parler un peu trop vite pour le faire taire et se pressa de corriger le tir :
« J’sais pas où ‘ est, y d’vrait pas être dur à trouver ! A’ voir vers l’nord !
- Euh… eh bien, merci… » hésita l’étrangère.
Puis ces deux-là s’en allèrent en ricanant, fiers du sale coup dont ils avaient eu l’intelligence d’avoir l’idée, chose rare parmi les imbéciles qui peuplaient cette île. Envoyer l’agneau dans la gueule du loup, voilà qui devrait les faire bien voir par le fils du chef de clan dominant sur l’île. Cameron sentit bien le coup fourré, cependant, elle ne disposait pas d’autres pistes à suivre. De plus, curieuse et intrépide, ce n’était pas quelques bouseux qui allait l’impressionner. Si elle pouvait espérer voir un visage propre parmi cette population qui la répugnait un peu plus à chaque instant, elle ne serait pas contre non plus.
Ainsi, elle partit donc à la recherche de ce fameux Junior, sans vraiment savoir comment s’y prendre une fois de plus. Mais quand elle s’adressa aux individus qu’elle croisa en chemin, soit ils l’ignorèrent, soit ils esquissèrent un sourire disgracieux à l’entende de sa requête. Cameron commença peu à peu à s’interroger sur le fait de savoir si ce qu’elle faisait était vraiment une bonne idée ou non …
Dernière édition par Cameron Edward le Mar 28 Oct 2014 - 9:54, édité 1 fois