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That's Fish Theory




Las Camp ne changeait pas vraiment. Toujours les mêmes rues crasseuses. Toujours les mêmes habitants crasseux. Toujours les mêmes truands crasseux. Toujours la même ambiance crasseuse, loin de la loi. La survie du plus fort, du plus malin, du plus utile.
Kurn marchait d’un pas lourd, son sac de marin sur l’épaule. A peine quelques frippes, dedans. Il n’avait même pas encaissé de paiement, celui-ci ayant eu lieu à l’avance. Car il venait de terminer une nouvelle mission de mercenariat. Un client régulier de sa compagnie, qui plus était. C’était davantage de la routine, mais qui disait routine ne voulait pas dire facilité.

D’ailleurs, il boîtait, et un bandage couvrait une bonne moitié de son avant-bras. Je vais me nettoyer de toute la crasse de Las Camp et de la sueur de mes efforts une fois en mer. Un petit bain dans l’océan me fera le plus grand bien. Puis le sel nettoiera les blessures.
Croisant une patrouille marchant tranquillement au milieu de la rue, Kurn se déporta le long d’un mur, tout en évitant une rigole d’urine et un rat. L’heure tardive faisait qu’une grande partie des habitants étaient dans leurs masures, en train de manger la maigre pitance de la journée. Effrayé par l’ombre de l’homme-poisson, le rongeur partit au quart de tour, en zigzagant au milieu des Marines. L’un d’eux poussa un juron en sentant les griffes à travers le pantalon de son uniforme.

La rascasse avait déjà dépassé la patrouille de quelques mètres quand on l’interpella :
« Hé, l’homme-poisson !
- Oui ? Demanda-t-il en se retournant.
- Tu as vu ce que tu viens de faire ?
- Non, monsieur l’agent.
- Je suis Marine, poiscaille.
- Pardon, monsieur le Marine.
- Ce sera Sergent, pour toi. C’est moi où tu fais le malin ?
- Quoi ? Non, pas du tout, d’ailleurs je…
- Hep, les gars, on l’emmène au poste. »
Des rires gras et des menaces retentirent. Ils sortirent les fusils. Ce n’est qu’alors que Kurn remarqua les vestes déboutonnées, les teints rougeauds, les démarches un poil vacillantes et mal assurées. Mais surtout les fusils, armés, pointés sur lui avec suffisamment d’assurance pour décourager toute tentative de fuite qui serait vouée à se terminer dans une effusion de sang. Du sien.

Je suis fatigué. Je vais les suivre au poste. Dans le pire des cas, ils me garderont quelques heures avant de me relâcher au petit matin. C’est encore le mieux.

Les pétoires toujours pointées sur lui, Kurn leva les bras au ciel après avoir posé son sac de marin à ses côtés. Les Marines essayèrent de l’attraper aux épaules, puis, à cause de la différence de taille, lui ordonnèrent de mettre ses mains dans son dos. Kurn obtempéra.
Il sentit un grattement sur ses poignets, comme si on tentait de lui passer quelque chose. Il mit du temps à comprendre qu’il s’agissait des menottes. Le problèmes, c’est qu’elles étaient trop petites, et ne parvenaient pas à faire le tour de ses poignets. Quelques jurons plus tard, il prit la parole :
« Messieurs les officiers, je vous assure que je suis tout disposé à vous suivre au poste.
- Vaut mieux pour toi, face d’écailles. »

Les mains serrées dans le dos pour simuler l’existence de menottes, la rascasse marchait, entouré par les membres de la patrouille. Ils s’engouffraient à peine dans une rue perpendiculaire qui se dirigeait droit vers la base de la Marine que Kurn entendit un bruit derrière lui, puis reçut un coup brutal derrière la tête. Un bout de bois vola devant ses yeux.
Il tentait à peine de se retourner qu’un deuxième gourdin s’abattait sur son crâne et l’envoyait au tapis.

Hein ?

Quelques heures plus tard, Kurn se réveilla avec un sacré mal de tête, deux bosses et un mur contre son dos. Il tenta de lever la main pour palper son crâne, mais le tintement de chaînes et l’impossibilité de remuer plus que ça l’en empêcha. L’homme-poisson ferma très fort les yeux, puis les rouvrit, confirmant par là sa situation.

Des voix un peu plus loin.
« Vous le prenez ?
- Yep. Tarif habituel.
- C’est quand même un sacrée bestiole.
- Tarif habituel, y’a des risques, en ce moment.
- Pff. Faites gaffe à ce que les risques augmentent pas brusquement.
- C’est une très mauvaise idée de me menacer, la mouette. Très mauvaise.
- Oui, bon, pardon. Bonne soirée.
- C’est ça, bonne soirée, et souvenez-vous. »

Un regard autour de lui confirma la situation. Une cave exigue, sombre, et encore plus crasseuse que le reste de Las Camp.
« Bon, les loulous, on vous vend bientôt, restez sages. »

Capturé…



Dernière édition par Kurn le Sam 20 Juin 2015 - 13:31, édité 1 fois
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Fantine se balançait d'avant en arrière sur son tabouret, regardant le plafond. Les doigts se tenant aux barreaux de sa chaise, les jambes battant le vide, elle n'écoutait rien du tout de l'activité autour. P'tit Louis, un jeune homme rondouillard qui ressemblait à s'y méprendre à un castord, tentait bon gré malgré de lui expliquer ce qu'ils avaient comme tâche. Depuis quelques mois, Fantine travaillait pour un homme riche des beaux quartiers qui embauchaient du petits personnels pour ses quelques affaires crasses. Il payait bien, même si la jeune fille ne l'avait jamais vu en personne. Jusqu'ici, elle avait toujours eu à faire à ses conseillers, ou ses hommes de mains qui le côtoyaient régulièrement. Et ça lui importait peu en définitive, tant qu'elle recevait son salaire. La réciproque était la même : Ce type se moquait bien de savoir qui il faisait bosser, tant que le travail était fait, et de préférence, bien fait.

« Il veut qu'on aille chercher sa cargaison.
D'accord.
Et il veut être livré à l'heure aussi.
D'accord.
Et il a dit que s'il manquait quelque chose, il nous ferait la peau.
D'accord.
Tu m'écoutes quand je te parle ?
D'accord. »

Le P'tit Louis poussa un long soupir. Il se pinça l'arête du nez avant de se relever. Puis, il tapa sur l'épaule de Fantine pour l'inviter à le suivre. Elle fit retomber les quatre pieds au sol et se mit alors sur les siens en sautillant. Et sur la route, elle redemanda à Louis toutes les informations qu'il lui avait déjà passé pour s'organiser. Elle n'en retint pas la moitié de toute façon, trop distraite par ce qu'il se tramait autour d'elle. De toute façon, Louis connaissait le chemin, le lieu de rendez vous, et même ce qu'ils devaient récupérer. Ils arrivèrent bien assez vite au bon endroit, une « salle de vente aux enchères » où justement une « soirée » était organisée. De grands mots pour décrire un bousin merdique. Mais ils ne rentrèrent pas avec le beau monde qui attendait devant les portes. Non, ils firent le tour pour rejoindre l'entrée arrière.
Fantine se demanda alors pourquoi est-ce qu'on appelait ces gens « le beau monde » ? La plupart des gens dont elle avait croisé le regard ne s'accordait pas au qualificatif « beau ». Il y avait systématiquement un détail, sinon un fait, quelque chose de pourrie chez eux qui empestaient le fric, le danger et l'égoïsme. Son compère la sortit de ses pensées en grognant, enfonçant ses mains boudinées dans les poches de sa veste :

« Les ventes n'ont pas encore commencé, lui confia Louis en râlant. Il faut qu'on attende juste ici que son homme ait réglé les achats. »

Attendre ? Sérieusement ? Dans cette rue crasseuse près de ce bâtiment qui empestait l'alcool, la sueur et la merde ? Fantine fit la moue en se balançant sur ses appuies :

« On peut pas aller regarder ? Moi, j'ai envie de voir ce qu'il y a à vendre ! Peut-être que je pourrais me payer quelque chose ! Peut-être qu'il y a des vêtements! »

Ses yeux s'éclairèrent rien qu'en envisageant l'idée ; des fringues partout, et d'autres trucs cool ! Elle n'avait pas l'argent pour l'obtenir, mais elle trouverait bien un moyen d'en avoir. Il suffisait de faire deux trois poches pour ça, non ? Qu'importait s'il s'agissait de gens dangereux, elle était assez maline pour s'en tirer à bon compte.

« Je peux dis, je peux, je peux ?
Ouais... Fit Louis à contre cœur. Va y. Mais reviens ici à l'heure et fais pas de conneries...
Hihihi ! »

Elle revint sur ses pas rapidement, rejoignant l'entrée principale qui venait de s'ouvrir. Les hommes s'engouffrèrent à l'intérieur et la jeune fille réussit à se faire une place au milieu de tous. Elle était remarquable, bien différentes des masses qui l'entouraient, des visages burinés ou encore des costumes trop propres de ses voisins. Elle passa la porte pour s'enfoncer dans une pièce sombre et encombrée. Fouillant le fond de ses poches, elle n'en sortit que quelques billets, lui laissant penser qu'elle n'aurait pas l'occasion d'acheter grand chose. Il lui faudrait donc bien choisir. En relevant le nez, elle distingua des rangées de chaises et de fauteuils dépareillés, puis une scène juste en face. Le parquet grincé sous ses pieds, la poussière qui recouvrait certain meubles faisait presque la taille d'un doigt, mais qu'importait. La jeune fille ne se gêna pour prendre place pile devant. Elle contrastait totalement avec le lien, et s'imaginait sans doute des choses qui n'allaient pas avec le décor. Tombant sur sa chaise, un grand sourire aux lèvres, elle avait hâte que le spectacle commence. Puisqu'il s'agissait de ça, non ?

D'un spectacle. Avec des vêtements !
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Assis –enchainé, dans sa cave, Kurn attendait. De toute façon, il n’y avait pas grand-chose d’autre à faire. Les personnes à ses côtés se contentaient de se morfondre, ou d’attendre placidement. Des esclaves, tous. Et s’ils ne l’étaient pas encore totalement physiquement, leur esprit avait déjà accepté l’horreur de la chose.
Vivre toute leur vie en voyant l’esclavage et la misère, tout en étant en permanence sur le point de basculer fait qu’ils ont toujours accepté l’idée que ce sort pouvait leur échoir. Ils n’ont pas la force de s’insurger contre leur sort. Ils ont déjà touché le fond.

Mais je suis Kurn T’Erlhitan, fils de Vrarr, fils de Torl. Je ne suis pas un esclave, et jamais je ne laisserai ma condition physique d’un instant m’en faire devenir un. Car, alors, je ne serais plus celui que je suis aujourd’hui.


Sa résolution raffermie, la rascasse ferma les yeux. Il ne servirait à rien de tenter de tirer sur les chaînes qui l’emprisonnaient pour le moment : celles-ci étaient suffisamment épaisses et bien assujetties au mur pour qu’en tentant de les déloger, il se fût déjà salement égratigné les poignets. Malgré les écailles.
Le front en appui sur ses genoux remontés devant lui, Kurn contemplait ses options. En l’état actuel, pas grand-chose. Il était solidement attaché, et probablement tout aussi bien surveillé. Mieux vaut attendre un transport, ou que la surveillance se relâche chez celui se targuera d’être mon maître.

Finalement, des voix et des coups de pique sur ses épaules lui signalèrent que c’était à son tour.
« Sois sage, poiscaille, et tout ira bien. T’inquiète pas qu’on se gênera pas pour te stimuler, si tu fais le poisson mort. Personne aime ça, le poisson mort, ça pue, tu piges ? Et quand ça pue, nous, on encaisse pas.
- Hrm.
- Magne-toi. »

Kurn grimpa un escalier lugubre dont les marches manquaient rendre l’âme à chaque qu’il pesait un peu dessus. Puis, quittant brusquement la pénombre et l’obscurité des caves, il arriva sur une scène qui l’éblouit une bonne dizaine de battements de cœur, le temps que ses yeux se fassent à la lumière des projecteurs pointés sur lui.
La rascasse avait les chevilles enchainées entre elles, et une autre chaîne aux maillons épais y reliait ses menottes. Un homme d’une quarantaine d’années portant un complet pourpre défraichi et une canne à pommeau d’argent entra dans son champ de vision.

« Mesdames, mesdemoiselles, messieurs ! Vous avez devant vous un incroyable homme-poisson ! Et je puis vous assurer qu’il est tout frais pêché de ce matin ! Cria l’homme d’une voix de stentor avant d’éclater de rire avec la foule.
Tourne sur toi-même, Poisson, laisse nos charmants acheteurs te reluquer sous tous les angles ! Comme vous pouvez le voir, il est en parfait état de santé ! Regardez-moi cette taille, cette carrure ! Il n’y a pas à dire, il s’agit d’une affaire en or ! »
Kurn montra les dents à la salle, au présentateur.
« Bien entendu, il n’est pas encore dressé, mais je sais que certains d’entre vous aiment s’en charger eux-mêmes. Nul doute qu’ils trouveront là de quoi les occuper ! Car oui, un représentant de la race des hommes-poissons fera un parfait serviteur, un excellent garde du corps, un redoutable gladiateur, ou même, pour les gourmets en quête d’exotisme qui se trouvent parmi nous ce soir, un plat de poisson tout-à-fait-u-ni-que ! »

Alors qu’il faisait face à la salle, dont il ne distinguait rien si ce n’était des formes vagues de têtes humaines, Kurn se retourna brusquement pour jeter un regard interdit au commentateur, qui lui adressa un sourire radieux et un clin d’œil. Dans un coin, un piano se mit à jouer une musique entrainante d’atmosphère.
« Et on commence les enchères à 200 000 berries, autant dire une bouchée de pain, certainement pas de poisson ! Qui dit mieux ? »

Et la rascasse dut marcher de long en large sur scène, montrer les dents, se laisser palper. Puis il se fit enfin acheter pour une somme qu’il préféra ne pas entendre.

C’est maintenant que les évasions peuvent commencer.

A la sortie l’attendaient un homme et une jeune fille qu’il n’avait pas vu depuis plusieurs mois, et dont il se souvenait distinctement. C’était qu’elle n’avait pas beaucoup changé depuis l’année précédente.

Fantine.

A l’aide ?



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Le spectacle auquel elle assistait ne répondait pas vraiment à ses attentes. Là où elle s'attendait à voir des trucs super chouettes et tout plein de beaux bijoux et d'or, il n'y avait qu'un défilé d'hommes et de femmes enchaînées les uns aux autres souvent. La jeune fille lança un regard à son voisin en s'agitant sur sa chaise. Elle gigota un bon moment et soupira dans toutes les positions, jusqu'à ce que l'un deux la foudroie du regard et qu'un organisateur lui demande de quitter la pièce.

Elle ne se fit prier, trainant les pieds néanmoins en grommelant, elle regagna la chaleur lourde et moite du dehors en râlant. Ses longues tresses se balançaient au rythme de ses pas, les épaules courbées vers l'avant, la tête penchée vers le bas, la jeune fille revint vers P'tit Louis en pestant toujours contre tout et rien. Elle marmonna plusieurs fois en croisant les bras sur sa poitrine inexistante, la moue boudeuse sur le visage qui exprimait clairement sa déception et son mécontentement.

« C'était nul... fit-elle d'une voix terne.
Mouaif. Reste tranquille maintenant, hein. On en a pour un bout. »

Un bout. Des heures, oui. Des heures à se balancer sur ses appuies en comptant ses doigts. Fantine poussa soupir sur soupir avant qu'enfin, la porte arrière ne s'ouvre et que la marchandise n'arrive. Le gonds grincèrent sensiblement et firent que la jeune fille se retourna avec la moue aux lèvres vers les protagonistes qui apparurent. Le premier, l'escorte d'un autre, d'une taille conséquente, rasé de près, l'air intraitable sur le sujet. Et le second, elle le connaissait. Elle le fixa un temps long avant de réagir.

Et lui, il comprit très vite qui elle était. Son regard en disait long sur ses pensées. La jeune fille ne calcula pas les chaînes à ses poignets et à ses chevilles, ni son air suppliant, ni les gros bras à côté qui le gardaient pour assurer l'échange et la transaction. La jeune fille bondit comme un chaton, les deux bras tendues avant de rentrer violemment dans son meilleur ami pour la vie qu'elle venait à peine de retrouver. La dernière fois qu'elle l'avait vu remonté à un an, tout juste. Ils s'étaient séparés sans penser se revoir...

Et là, elle était accrochée à son cou en essayant de lui faire un câlin.

« ♥ GROOOOOOOOOOOOT ! ♥ »

C'était absurde. Elle avait au moins deux mètres de vide sous ses pieds, un air totalement benet sur le visage

« Oh Groot, tu m'as trop manquééé ♥... fit-elle sans calculer le monde autour.
La cargaison du Sir, fit l'homme de main en fixant Fantine qui enlaçait tendrement Kurn en frottant son nez contre sa joue de poisson.
Euh... Ok.
Assurez la livraison dans la soirée, on vous attend là-bas.
Rouloulou ♥ Jotem d'amour Groot, d'amoooour ! ♥
Vous serez payé en arrivant...
Je te quitte plus jamais de la vie ♥ »

Kurn fut laissé à ses petits bras et à l'air surpris de P'tit Louis. L'homme de main referma la porte derrière lui sans se soucier du reste, il avait terminé son travail de son côté et n'était plus tenu par rien. Fantine, par contre, toujours pendu au cou de son ami, était mise dans une drôle de situation qu'elle ne comprenait pas vraiment.
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Kurn, toujours enchainé solidement, avec en plus de ses maillons précédents, avait également un collier en acier forgé autour de son cou de taureau, marchait légèrement voûté. A côté de lui, Fantine sautillait gaiement, lui tenant la main et babillant sans s’arrêter. De l’autre côté, Louis tenait la longe du collier et maintenant un pistolet pointé sur lui.

Autant dire que je ne me sens toujours pas de prendre le risque de prendre une balle. Surtout attaché comme je le suis. Je n’irais pas loin, et je ne peux certainement pas partir comme ça.

« Et toi, Groot, t’as fait quoi ?
- Je m’app… J’ai travaillé, à droite à gauche. Je venais juste de finir une mission quand j’ai rencontré une patrouille de Marines qui m’a lach…
- Regarde, une boulangerie ! C’est celle où t’avais acheté à manger la dernière fois !
- Oui, c’est… super. »

La rascasse avait beau tenter de faire clinquer ses menottes le plus fort possible, de se prendre ostensiblement les pieds dans les chaînes, tous ces détails semblaient passer bien au-dessus de la tête de la petite fille. Et pour cause, elle avait à peine grandi, gardant la taille minuscule qui était la sienne.
Toujours continuer à faire profil bas en attendant d’une occasion de s’enfuir, se rassura Kurn pour la énième fois.
« Hm. Louis ?
- Oui ? Groot c’est ça ?
- Il fait quoi, Sir ?
- Comment ça ?
- Il gère des esclaves de quel domaine ?
- Tu verras quand tu arriveras et qu’on te répartira. Moi, je n’en sais rien, répondit l’homme en haussant les épaules. »
Tentative d’extorquer des informations utiles : échec.
« Ah. Tais-toi, maintenant. Et Fantine, aussi, un peu de calme. On arrive. »

La maison qui les surplombait était entourée d’un petit jardin qui faisait une zone tampon avec la rue. Une haie cachait l’intérieur aux éventuels voyeurs. Après avoir passé une grille d’entrée en fer forgé et sculpté de multiples gargouilles, ils passèrent une pelouse agrémentée de massifs floraux. Même dans l’obscurité, difficile de ne pas sentir la différence d’odeur entre le reste de la ville et le jardin.
Kurn tenta de lever la main pour gratter ses branchies, irritées par le collier, mais les chaînes l’en empêchèrent. Il laissa retomber sa main en essayant d’attirer discrètement l’attention de Fantine. Sans succès : elle se roulait dans l’herbe, applatissant quelques fleurs au passage.
« Fantine, viens ici ! Réclama Louis. »

Puis l’homme toqua. Après à peine une vingtaine de secondes, un majordome à l’air averti, dans un costume tiré à quatre épingles, ouvrit avec une courbette.
« Pour les colis de Monsieur, je vous prierai de passer par l’entrée arrière. Bonne soirée, monsieur. »
Et il referma la porte aussi sec. Pas très sympathique, le majordome. Louis n’a pas l’air placé très haut dans la hiérarchie. Typiquement, plus bas que le serviteur.
Le dénommé Louis essuya la sueur qui perlait sur son front, grommella dans son double menton, et prit une petite allée qui longeait le manoir pour arriver à la porte de service. Et frappa à nouveau à la porte, beaucoup plus fort que la première fois. Devant les regards que Fantine et Kurn lui lançaient, il se sentit obligé de se justifier :
« Je pensais que cela ferait plaisir au Sir de recevoir le colis qu’il attendait depuis si longtemps en main propre, par l’entrée principale. Il semblerait que non… »

Sur ces entrefaites, la porte s’ouvrit sur une cuisinière à l’embonpoint prononcé.
« Le colis ? Mettez-le dans la cave. On le récurera en bas, et on lui apportera à manger. Puis retournez dans vos quartiers, Louis, Fantine. On vous donnera aussi. Faut que tu manges, Fantine, t’as que la peau sur les os. C’est pas comme ça que tu vas grandir, prendre des formes et trouver un mari, c’est moi qui te l’dis !
- J’veux pas de…
- Allez ouste ! »

Docilement, la rascasse suivit la matrone à travers une cuisine dans laquelle plusieurs serviteurs s’échinaient à préparer le repas, avec également une souillon, une petite fille qui devait avoir à peine six ans et qui, accroupie au fond d’une gigantesque marmite, s’acharnait à la décrasser.
Devant lui, il vit la chevelure brune attachée en chignon lâche se tourner à droite, à gauche, pour contrôler le travail des autres. Et distribuer coups de louches de-ci de-là. Ils s’engouffrèrent ensuite dans un nouvel escalier en bois qui descendait dans les escaliers, puis dépassèrent sans ralentir un garde-manger amplement garni de dizaines de bocaux, avec des jambons et autres pièces de gibier qui pendaient du plafond. La rascasse manqua de se pendre avec un chapelet de saucisses et décida rapidement de marcher plié en deux pour ne pas heurter les poutres apparentes en vieux bois.

Descendant encore un étage, il arriva dans un endroit sensiblement moins sympathique. Des barres de fer, menottes et autres chaînes étaient fixées aux murs. Et on y entreposa l’homme-poisson à côté du reste, quelques autres esclaves dont il identifiait difficilement la forme dans la pénombre. La fatigue commençait également à lui peser.
A priori, on devrait me laver et me nourrir. Pas un si mauvais programme, si je veux reprendre des forces. Oui, je vais attendre ça.

Puis je partirai.

Foi de T’Erlhitan.


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Manger. Fantine adorait faire ça. Planter ses crocs dans de la viande, mettre tout ce qu'elle pouvait dans ses joues et se remplir l'estomac comme si elle avalait du plomb. Elle ne se sentait bien que lorsque son propre ventre n'était plus capable d'ingurgiter quoique ce soit, la laissant satisfaite et comblée, pour des heures. Elle ne vivait pas de la bonne manière pour pouvoir se satisfaire d'une assiette pleine tous les soirs, il n'empêchait qu'elle se délectait de ce que la cuisinière, Josette, lui avait servi. Cette dernière s'inquiétait toujours de savoir si elle prenait du poids. Elle lui gardait les fins de buffets que son maître servait dans sa demeure pour lorsqu'elle passait pour un travail dans le coin. Ça n'était pas régulier, mais Josette s'organisait toujours. Et Fantine en profitait avec un sourire jusqu'aux oreilles (pour l'heure couvertes de sauce tomate).

Elle engloutit une troisième cuisse de poulet avant de redresser le nez de son plat, l'os encore dans la bouche, les deux mains prises par autre chose, et heureusement habillée d'un tablier pour éviter de se tâcher :

« Vont en faire quoi, de Groot ? Demanda-t-elle entre deux bouchées.
De qui ?
Groooot... Mon ami Groot ! ♥
Tu ne devrais pas lui donner un nom, Fantine.
Et pou'quoaaa ?
Ni parler la bouche pleine...
Gnagnagnah... »

Fantine avala rapidement, sans trop se faire prier, et fit passer le tout grâce à une bonne gorgée d'eau fraîche. De la nourriture jusqu'aux joues, le nez tâché aussi, et les mains pleines de sauces et de gras, elle retourna vers Josette l'air de rien :

« Alors ?! Demanda-t-elle en se redressant sur sa chaise. »

La cuisinière semblait agacée. Pas plus que Louis qui grommela dans sa barbe sans lui prêter plus attention. Ça faisait un moment que Fantine prenait des missions pour le Sir. Transportant des paquets pour lui, jusqu'à sa demeure de Las Camp. Mais c'était bien la première fois qu'elle devait lui amener ce qu'elle appelait « un ami ». Et pour une fois, son sort l'intéressait presque.

« Le Sir veut l'exposer, puis le ramener dans son autre maison, sur Grand Line. »

Fantine ne comprit pas vraiment ce que ça impliquait. Ce fut pour cette raison qu'elle demanda en toute innocence :

« J'pourrais aller l'voir alors ?
Qui ça ? Le sir ? Fit Josette en arquant un sourcil surpris par la demande.
Non ! Groot !
Pourquoi faire ?
Beh, c'est mon ami. Je veux l'voir !
Il fait parti des biens du Sir, désormais...
Gneh ?
Bon, termine ton assiette et déguerpis ! »

Josette s'impatienta, tandis que Fantine posait ce qu'elle avait dans les mains pour se redresser à nouveau. Elle fit reculer sa chaise en interrogeant les protagonistes du regard.

« Ça veut dire non, traduisit Louis en s'essuyant la barbe dans une serviette en soie.
Ah mais nan ! Et pourquoi d'abord ? C'est pas juste !
Il l'a acheté, reprit Louis simplement en haussant les épaules. C'est son bien, on te l'a dit. Maintenant arrête tes bêtis-
Beh je lui rachète ! Trancha Fantine la main tendue vers le plafond, empoignant une côte de bœuf. Comme ça je lui prêterais s'il veut à l'occasion, mais je veux garder Groot !
Et avec quel argent tu vas lui racheter ?! Hein ?!
Celui qu'il m'doit pour la commission, et tout ce que j'ai ! »

La jeune fille retourna ses poches sur la table, sortant les quelques berries qu'elle avait pour les pousser au centre, sous le regard mitigé de Louis et désespéré de Josette. Décidément..

« Je vais aller voir Groot ! Je vais lui annoncer que je l'achète ! Lança la jeune femme en se dirigeant vers la sortie, persuadée que ça ferait très plaisir à son ami. »

Sans se soucier du fait que cette conversation allait probablement être très bizarre. Fallait déjà trouver l'endroit où ils avaient rangé son compagnon d'infortune. Ce qui, dans un repère aussi grand pour quelqu'un qui n'y connaissait rien et qui avait un sens de l'orientation limité, n'était pas tout à fait une mince affaire. Qu'importait, car Fantine était déjà partie en hurlant dans les couloirs :

« Groooot, j'ai une bonne nouvelle ! ♥ »

La côte de boeuf toujours en main et vraiment très fière d'elle.
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Kurn avait effectivement eu droit à un récurrage intensif. Mais loin d’un temps de repos et de délassement, une bonne était descendue, équipée d’un seau d’eau chaude dont les bulles indiquaient qu’il s’agissait de savon. Elle remonta sans lui adresser la parole, pour redescendre avec une deuxième seau qui, à son clapotis, devait contenir également du liquide. Elle avait avec elle un balais.

J’ai un mauvais pressentiment…

Elle trempa le balais dans le seau d’eau chaude puis le lui fourra droit dans la tête. La rascasse n’eut même pas le temps d’émettre un son de protestation que les poils de l’outil de ménage s’engouffraient dans sa bouche avec plein de savon. Kurn cracha tout ça dès que la bonne décida de se concentrer sur le reste de son visage, le récurrant du plus loin possible, sans douceur.
« Allez-y doucement, s’exclama l’homme-poisson.
- Taisez-vous, vous êtes un bien du Maître, maintenant. »
Quand il tenta d’exprimer davantage son ressenti, elle lui mit à nouveau le balais dans la bouche. Et le pire, c’est que je ne peux pas me défendre, vu comme mes mains sont coincées. Kurn abandonna. Et se contenta de se tourner quand c’était demandé, de se contorsionner quand il le fallait. Le poil rêche du balais irritait presque ses écailles, mais au moins, il se sentait un peu plus propre. Juste un peu, il y a des manières plus efficaces de se nettoyer.

Et ce fut le seau d’eau froide en pleine tête, brusquement, alors qu’il regardait ailleurs, pensant à autre chose. Cela eut le mérite de lui remettre les idées en place, et d’hydrater un peu ses branchies irritées par le collier. L’humidité restante ferait aussi davantage glisser et coulisser la bête, évitant qu’il ne se blesse stupidement.
De toute façon, mon nouveau ‘’Maître’’ doit probablement s’inquiéter un tout petit peu de mon état de santé, sinon je risque de perdre de la valeur…
« Le gruau de poisson viendra plus tard, quand les autres auront fini de manger.
- Ah, merci.
- Vous ne parlerez plus très longtemps. »

Sur cette phrase sybilline, elle prit ses seaux, son balais, ses cliquess et ses claques et l’escalier. Hein ? Qu’a-t-elle voulu dire ? On va m’apprendre à ne plus parler ? Me… Me couper la langue ?

Alors que Kurn ressassait des idées noires dans le noir de sa cave, ignorant toujours les formes prostrées à ses côtés tout comme elles l’ignoraient lui –Sans doute sont-elles vraiment muettes, il entendit un piaillement. Et crut y reconnaître son nom. Non, pas mon nom. Surtout pas mon nom. Un surnom affectueux idiot, voilà ce dont il s’agit. Idiot, oui. Je m’appelle Kurn.
L’homme-poisson se racla la gorge et éjecta un crachat qui avait encore goût de savon, avant de se passer la langue sur les lèvres. Puis il prit une grande inspiration qui gonfla ses poumons et cria de toutes ses forces :
« FANTIIIIIIIIIINE ! LA CAAAAAAAAVE ! »

La suite ne fut l’affaire que de quelques minutes.

La porte du deuxième sous-sol claqua contre le mur en s’ouvrant, et des pas inégaux retentirent sur les marches.
« Grooooooot ! T’étais parti où ? Enfin, je t’ai retrouvé, maintenant !
- Merveilleux, Fantine, tu me sors de là ?
- Oui, je vais t’acheter ! On sera toujours ensemble, comme ça ! Regarde tout l’argent que j’ai ! Fit la fillette en montrant une poignée de berries.
- Je… Comment t’expliquer cela… J’ai été acheté pour un peu plus cher que ça. Il faut plus d’argent.
- Je dois aussi toucher la commission pour t’avoir amené ici !
- Je reformule : beaucoup plus cher que ça. Tu ne vas pas pouvoir me racheter surtout que je dou…
- Elle est descendue dans la cave ! Venez, rattrapez-là ! »

Le débit de Kurn s’accéléra, le volume de sa voix baissa jusqu’à n’être plus qu’un grondement sourd.
« Laisse tomber l’idée de l’achat. A la place, vole-moi, d’accord ? Comme le colis. Tu te souviens du colis que tu voulais voler ?
- Le colis, il était à moi, d’abord ! C’est juste que j’ai bien voulu partager avec toi, dit-elle en faisant la moue.
- Voilà, donc moi aussi, il faut que tu me prennes, tu comprends ? Et comme ça tu m’emmènes ailleurs, hein ?
- Hmmmm… »

La réflexion de Fantine fut interrompue par l’arrivée de la cavalerie, celle du mauvais camp. La matrone attrapa la fillette aux cheveux bleus par l’oreille et la traina dans les escaliers en ignorant ses tentatives puériles de se libérer. Les autres serviteurs se contentèrent de lui adresser des regards méfiants, sans un mot, auxquels il répondit en haussant simplement les épaules.
Ce n’était que maintenant qu’il reprenait conscience de la douleur à sa jambe et à son avant-bras, toujours vaguement couvert d’un bandace. Il réfléchit quelques secondes à une manière d’utiliser le pansement, mais, rien ne venant, Kurn décida d’attendre la suite des événements.

Soit je trouve une occasion de m’échapper, soit je compte sur Fantine pour venir me libérer.

Compter sur Fantine.

Par les Abysses.


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Elle aurait dû réfléchir plus vite, ou alors simplement écouter Kurn lorsqu'il lui avait suggéré très fort de le voler. D'ordinaire, elle n'hésitait pas bien longtemps pour prendre et se servir chez les gens, mais là... Là, elle était en fait tellement fière de son idée de pouvoir l'acheter qu'elle n'avait pas envisagé autre chose. Sauf qu'elle avait été rapidement rattrapé par l'activité dans la demeure, et traîné en dehors de la cave par les cheveux par Josette qui n'en pouvait plus de ses bêtises. Groot disparut rapidement de son champ de vision lorsqu'elle fut sortie de la cave puis ramené dehors où on la jeta avec un coup de pied aux fesses ainsi que sa commission dans u sac qui s'éparpilla au sol.

Elle se frotta l'arrière train avec dépit en se redressant. Interdiction de revenir qu'on lui disait. Et Louis, qui pourtant n'avait rien fait, eu droit au même tarif. Le garçon lui lança un regard assassin lorsqu'il foula la crasse de la ruelle sans réussir à se rattraper au vol. Indésirables désormais, et qui perdaient un bon filon tout ça pour des bêtises que Fantine ne voyait pas ainsi. Louis avait des raisons de lui en vouloir, mais il se contenta de partir comme un prince en se promettant de ne plus jamais faire appel à elle pour quoique ce soit.

De son côté, la jeune fille resta à quelques pas du portail qui se referma sous son nez. Privée des repas de Josette pour une durée indéterminée (et probablement pour toute sa vie en fait), Fantine regarda simplement la demeure imposante et gardée, avant que ses yeux ne se baissent vers la côte qu'elle avait toujours en main et à laquelle elle s'était agrippée comme à sa propre vie. Elle la balança par dessus son épaule par frustration.

Si acheter Kurn n'était plus une possibilité, il en restait bien d'autres à envisager. Essuyant son visage couvert de crasses d'un revers de manche, elle fit quelques pas en arrière et se mit à courir dans une ruelle opposée. Elle ne s'arrêta que près d'une plaque d'égout fumante qu'elle eut pas mal de peine à soulever. Une odeur nauséabonde émanait d'elle, mais qu'importait pour Fantine qui était suffisamment habitué à ce parfum insupportable pour la plupart. La crasse, elle vivait dedans depuis des années, et elle se moquait bien de finir les deux pieds dans la merde. D'ailleurs, elle plongea dedans sans trop s'en soucier quand elle réussit finalement à se faire une entrée.

Elle remonta l'égoût avant de bifurquer soudainement, et atterrit devant des barreaux. La jeune fille y passa la tête puis finalement le reste du corps sans trop de difficultés. Ça avait des avantages d'être maigrichonne et petite, qu'elle se dit avec un petit sourire aux lèvres. Poursuivant sa route, elle se perdit bien une ou deux fois avant de revenir sur ses pas et trouver des accès vers les sous sol de la maison d'où on l'avait chassé. Plusieurs fois, elle s'attarda pour essayer de distinguer ce qu'il se tramait à l'intérieur, jusqu'à reconnaître une forme caractéristique à peine éclairée à la bougie.

Alors, Fantine l'appela. Mais par son vrai nom cette fois. « Kurn ! » La voix venait de sous le sol de pierre qui recouvrait les caves. Par une grille hermétiquement fermée, que Fantine ne chercha pas à soulever en sachant pertinemment qu'elle n'en aurait pas la force. Les doigts passant par les ouvertures tout de même, elle se plaqua presque contre le fer pour tenter de mieux discerner l'intérieur.

« J'ai bien réfléchi, genre au moins trois minutes ! Fit la jeune fille avec une certaine fierté. Je vais te voler ! »

Ça sonnait comme l'aventure, tout ça. Et ça lui plaisait bien, à la Fantine.

« Tiens toi prêt et sois patient. »

Deux ordres un peu contradictoire, mais qu'importait ! Ça sonnait bien à ses oreilles alors qu'elle tournait les talons pour repartir dans l'autre sens.
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Et Kurn patienta. De toute façon, il n’avait pas grand-chose à faire : ses maigres tentatives pour engager la conversation avec les autres esclaves attachés dans la cave s’étaient soldées sur des réponses monosyllabiques qui lui firent rapidement comprendre qu’ils n’étaient pas là pour discuter. Tant pis pour eux.

De toute façon, Fantine a dit qu’elle ferait quelque chose pour me voler. Elle comprend vite et a de bonnes idées, pourvu qu’on les lui souffle. Kurn se contenta de s’installer confortablement et de se préparer à dormir. Mais la maigre pitance, du gruau de poisson comme prévu, arriva, et il en profita pour gober ce qu’il put, avant de se remettre en position de repos.
Non pas que la position soit particulièrement agréable, mais… Je n’ai pas mieux.

Après un temps qui lui parut indéfinissable, des serviteurs qui n’avaient de serviteurs que le costume, et dont l’attitude, torve et menaçante, rappelait davantage celle de gardes-chiourmes, vinrent tous les chercher. Kurn en profita pour détailler ses camarades de galère. Les quatre autres esclaves étaient tous des hommes, d’un bon gabarit, qui pour la plupart semblaient avoir un corps taillé par la vie au grand air et les arts martiaux. Des hommes que j’aurais pris plaisir à affronter, si nous étions libres. Si l’éclat de leurs yeux n’était pas mort.
Un nerf de bœuf claqua sur son épaule :
« Bouge-toi, la poiscaille, en rang avec les autres. »

Un des esclavagistes passa entre les esclaves, les liant tous avec une chaîne unique qui passait par les chevilles. Il était déjà malaisé de marcher normalement, il faudrait maintenant se séparer des autres avant de pouvoir fuir. Voilà qui compliquera singulièrement les choses. Les cinq gardes leur firent ensuite monter les escaliers, puis sortir par la porte de service déjà empruntée à l’aller, dans l’indifférence générale de la cuisine que Kurn traversait pour la seconde fois.

Et ils furent à nouveau dehors. Le début de soirée, encore. Les rues bruissaient de l’activité des gens qui rentraient chez eux après une dure journée de travail. Les rues teintaient des vendeurs et marchands qui faisaient leur chiffre pile à ce moment-là. Les rues sonnaient des interventions des truands défendant leur terrain sans défendre les habitants.

Et la crasse, toujours la crasse. Je n’aimais déjà pas beaucoup Las Camp. Je crois que cette île commence m’être franchement aussi antipathique que la grande majorité de ses habitants.

Leur convoi, quatre hommes enchainés à une rascasse surveillés par six gardes armés jusqu’aux dents, ne suscita pas la moindre curiosité. Je crois que j’attire davantage de regards quand je marche libre plutôt que couvert de chaînes… Cette pensée avait quelque chose de déprimant pour Kurn, qui relâcha peu à peu son attention.
De toute façon, le quatuor d’esclaves ne semble pas disposer à se rebeller, alors que je pense que nous aurions parfaitement nos chances contre les esclavagistes. A moins qu’une patrouille de la Marine arrive pour leur prêter main-forte… La Marine, ces parjures qui m’ont assommé sous un prétexte fallacieux !

Tout d’un coup, une tornade bleue au ras-du-sol apparut derrière le garde qui fermait la marche. Le premier coup de poing fut pour les cervicales, suivi d’un coup de pied dans l’entrejambe. S’il n’était pas mort, c’était tout comme, prostré comme il l’était. Les surveillants, attentifs tout de même, réagirent au quart de tour. Le plus proche se jeta sur Fantine en dégainant sa lame courte. La fillette entra dans sa garde comme dans un moulin et, saisissant son poignet, prit appui dessus pour lui coller un coup de genou dans le nez, qui craqua horriblement.
Les troisième et quatrième gardes arrivèrent en même temps sur Fantine, mais l’un d’eux n’eut le temps de rien faire : Kurn attrapa son crâne entre ses deux énormes mains et le fracassa deux fois contre le mur le plus proche. L’odeur du sang, métallique, et celle de la peur, âcre, se mêlèrent rapidement aux cris de la foule qui tentait de s’éloigner au plus vite.

Le cinquième garde en était encore à les mettre en joue quand un des esclaves lui abattit ses menottes sur le coin de tête, le coup le touchant à la tempe et le mettant instantanément hors d’état de nuire.
« Je suis venue te sauver, Groot !
- Vite, Fantine ! Les clefs ? Ou on les embarque avec nous ?
- Euh… »

Déjà, des bruits de sifflets retentissaient plus loin.


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Rapide, furtive, mesquine et efficace. C'était ainsi qu'évoluait Fantine lorsqu'elle se battait. Comme un chat, toutes griffes dehors, qui bondissait et se faufilait sans jamais se laisser attraper. Sa petite taille était un fait dont elle tirait avantage, et si elle ne frappait pas forcément très fort avec ses petits poings, elle s'amusait (oui, s'amusait) à frapper là où ça faisait mal. La puissance était inutile lorsqu'il suffisait de cogner les points sensibles. Par chance, les hommes en avaient des tonnes, et elle était assez rapide pour s'épargner les désavantages du fait d'être humain.

Poussant un long soupir, elle se retourna vivement vers Kurn en lui offrant un sourire qui dévoilait toutes ses dents pointues. Un autre problème se posait alors à eux... Et la question que Groot lui posa lui arracha une grimace :

« Bon bon bon... »

Non, elle n'avait aucunement l'intention de prendre toute la smala juste pour récupérer son meilleur ami pour la vie. Elle tira d'une pochette à sa ceinture des pétards qu'elle alluma à la suite. Voilà. Et elle en cala un dans la serrure des chaînes aux pieds de Kurn. Allumant les autres, elle les lança aux esclaves autour d'eux, qui la remercièrent. Les mèches se consumèrent à grandes vitesses, et presque simultanément, elles allumèrent la petite charge de poudre. Pas assez forte pour faire mal, mais suffisamment pour endommager le petit loquet d'acier. Kurn était libre de courir, c'était tout ce qui importait désormais pour Fantine alors qu'elle terminait de le débarrasser de ses menottes.

Sauf que bon, ils n'étaient pas forcément tous seuls. Et Fantine s'en était prise à un convoi protégé, un bien coûteux d'un homme avec le bras probablement long. Elle esquissa un sourire amusé alors que les marins n'étaient qu'à quelques mètres d'eux, et qu'elle tira sur le bras de Kurn pour qu'il la talonne de près.

Elle avait pensé à un plan jusqu'ici, mais pas plus loin. Et elle le regretta amèrement quand une balle frôla son oreille en manquant de lui faire un trou au lobe. Grimaçant, elle lança un petit regard à son voisin, en l'entraînant dans une ruelle qui menait vers une autre rue bien plus fréquentée.

La jeune fille bondit par-dessus un étalage, glissant avec la marchandise présentée par-dessus. Souplement, elle retomba sur ses jambes. Les marins les plus proches se prirent le présentoir et ralentirent sensiblement le rythme des autres, pas de quoi pourtant les arrêter en si bon chemin.

De son côté, Kurn avait trouvé un autre moyen de leur faire gagner du temps. Une charrette chargée à ras bord de tonneaux de rhums vides, empilés les uns sur les autres et calés grace à une simple barre qu'il retira d'un coup sec. Évitant de se faire bêtement à voir, l'homme s'esquiva comme il le put en laissant les tonneaux dévalés en direction de la petite unité qui les talonnait, jusqu'à ce que Fantine le choppe par le coude et le tire jusqu'à une ruelle adjacente.

Un cul de sac.
Pour qui ne connaissait pas l'endroit.

Car en déboulant à quelques pas du mur qui leur barrait la route, Fantine s'arrêta et s'accroupit, glissant ses doigts entre les grilles d'une bouche d'égout et en tentant à bout de bras de la retourner.

« Soulève ça !
Euh, d'accord, fit-il en s'éxecutant, un peu dubitatif cependant. La plaque d'égout sortit de son trou, tandis que Kurn se redressait en l'interrogeant du regard.
Et maintenant, rentre !
Mais je passe pas !
Si !
Euh... Non !
Rah ! »

Le trou était en effet étroit, mais Fantine n'entendait pas saboter son idée. Elle attrapa simplement Kurn par l'une de ses épines et l'envoya au sol de toutes ses forces, droit dans le trou, tête la première. Et après avoir un peu aidé la manœuvre, elle sauta à l'intérieur en semant de justesse les quelques marines arrivés jusqu'à eux.

« On s'arrête pas ! Ordonna-t-elle en prenant les devants. Faut partir d'ici ! »

D'ici. Des égouts, où ils n'étaient pas encore à l'abri. De Las Camp éventuellement... Enfin. Fantine était totalement en train d'improviser. Et pour l'instant, ça marchait presque.
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Coincé dans la bouche d’égoût, Kurn sentit quelque chose pousser contre son derrière, puis des coups de ce qui semblait être des bottes, et enfin les deux pieds joints de Fantine sauter sur ses fesses pour le faire rentrer. Avec un bruit de chuintement, il tomba tête la première dans la rigole qui courait quelques mètres plus bas, la jeune fille le suivant de près par l’échelle.
Il faisait à nouveau sombre, puisque l’habitante de l’île avait refermé la plaque sur eux. Mais Kurn se disait bien que ça ne rendrait pas leurs poursuivants perplexes bien longtemps. Et ils étaient à peine un peu plus loin que le bruit distinctif de l’ouverture résonna dans les tunnels étroits. Et ils avaient les pieds dans toutes les saletés de Las Camp, ce qui ne gênait absolument pas Fantine, et pas trop Kurn.

Si la liberté est au prix d’un bon récurrage des pieds et d’un froncement des narines, ainsi soit-il. Je dois une fière chandelle à Fantine. Si on s’en sort encore.

En effet, les Marines qui les poursuivaient étaient armés de fusils, mais surtout de lanternes qui leur permettaient d’avancer rapidement à leur poursuite alors qu’eux se retrouvaient à tâtonner dans le noir sur les pierres inégales des sous-sols de la ville.
Et ils avaient beau trotter aussi vite que possible, prendre les virages de manière totalement aléatoire, ils ne parvenaient pas à semer les patrouilles. De plus, le clapotis maintenant omni-présent de l’eau leur faisait craindre, ou plutôt faisait craindre à Kurn l’arrivée imminente des mouettes. En face ? A côté ? Juste derrière nous ?

Au détour d’un couloir, trois Marines. Une paire de baffe plus tard, ils s’étaient écartés de quelques pas et les pointaient de leurs fusils. A leurs cris d’appel, d’autres surgirent par-derrière. Le karaté aquatique. Je peux peut-être monter un mur d’eau qui… Non, je n’en suis pas capable… Mais avec l’adrénaline, on ne sait jamais, et pour l’amitié…
Fantine pointa un trou dans le mur et le poussa dedans. Sans effet.
« Par là, Groot ! »
Puis Kurn comprit qu’il était censé sauter dedans, et prit l’impulsion, la fillette juste à sa suite. Les balles ricochèrent sur le mur à leur suite.

Le boyau, tellement étroit que la rascasse craignit quelques secondes de s’y coincer, s’élargit rapidement pour constituer un toboggan au fond duquel coulait un petit filet d’eau. Fantine, qui était juste derrière lui, grimpa sur son dos, tandis que lui se faisait raboter le nez par les pierres mal ajustées tout le long de la glissade.
D’abord assise, riant aux éclats, elle se leva, l’utilisant comme planche de surf, et pointant l’index vers l’avant, droit vers leur destination : une tache plus noire que les autres. Un trou. C’est profond, Las Camp ?

Il eut sa réponse rapidement. A peine trois mètres plus bas, ils firent ‘’pouf’’ dans genre de lac souterrain. Des champignons luminescents illuminaient les murs qui étaient globalement recouverts d’une mousse blanchâtre, probablement à cause du manque de lumière, si profondément.
Mais si l’eau semblait saumâtre, cela n’allait pas plus loin, plus crasseusement, plus salement. Somme toute, ç’aurait pu être pire. Battant vigoureusement des pieds, Kurn hissa Fantine hors de l’eau puis la jucha sur ses épaules, là où ils avaient pu avoir une de leurs premières discussions.
« Attention aux piquants, hein ?
- Oui Grooooooot ! »

Quelques brasses énergiques les amenèrent à un semblant de rive, qu’ils escaladèrent sans difficulté aucune. Un homme les attendait sur la rive. Cheveux rouges pétants, au moins autant que ceux de Fantine, et sculptés en pics.
« B’jour ou b’soir, peu importe l’heure en surface, n’veaux v’nus.
- Hum, où sommes-nous ?
- A vous d’m’l’dire. Qu’cherchez-vous ‘ci-bas ?
- Nous voulions échapper à la Marine.
- Et aux méchants esclavagistes qui avaient capturé Groot !
- Dans c’cas, m’semble qu’v’s êtes les bienv’nus à Keupontopie, le paradis des punks qu’ont quitté Las Camp pour vivre d’ssous, ent’nous !
- Ah, euh, vous nous acceptez comme ça ?
- B’sûr ! V’s êtes des punks aussi, non ? Ca se voit. L’tifs en pointes d’l’homme-p’sson, l’mèches bleues d’la keupone. S’vez-moi. »

Le duo lui emboîta le pas, un peu perplexe, tandis qu’il détaillait un peu la genèse du lieu, et autres babillages.
« Au fait, la sortie, c’est par où ?
- Sortie ? V’s sortez pas, v’s êtes là pour t’jours avec nous, l’copains keupons ! »

Ce week-end, c’est l’anniversaire de Grand-Père. Il faudrait que je rentre.

Kurn avait le sentiment que cette raison ne suffirait pas à les convaincre.

Allez savoir pourquoi.


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Elle n'en croyait pas ses yeux. A peine sur le quai qu'on venait les accueillir et qu'on leur parlait avec un accent carrément tranché au couteau. Fantine admira son vis-à-vis, sa crête incroyable et ses piercings trop nombreux pour être comptés. Les fringues sales, mais qu'il portait avec flegme, la démarche agressive et nonchalante à la fois. Un mélange qu'elle avait du mal à saisir, et qu'elle tenta bien d'imiter en talonnant leur guide.

Du reste, elle ne sut plus trop où poser l'oeil. Ils passèrent près des quais, dans les profondeurs pourries de Las Camp, pour frôler des tentes qui s'entassaient sur la merde qu'ils recevaient, ou des bâtiments (si ça en méritait le nom) difformes dans lesquels on vivait très probablement. Personne ne viendrait s'aventurer ici. Eux si, par le plus grand des hasards. Mais pas la marine. Alors, ils étaient à l'abri désormais, et c'était tout ce qui comptait aux yeux de Fantine...

Pas aux yeux de Kurn, cependant.

« Fantine ?
Ouuuiii ?
Comment on sort d'ici ?
Sais pô.
Sérieusement ?
J'étais jamais venue jusqu'ici, murmura la jeune fille. Mais au moins, on est à l'abri maintenant ! »

Elle s'enjouait de tout ça, et n'arrivait pas du tout à le cacher. Ses yeux brillaient d'une malice légèrement mauvaise alors qu'elle se rendait compte qu'elle avait découvert une véritable fourmilière dans laquelle mettre des coups de pieds. C'était un peu son petit plaisir. Mais une fourlière de punks et d'anarchistes qui fuyaient le soleil et la crasse de Las Camp pour rejoindre les tréfonds et la merde de Las Camp. Tout un concept.
Les maisons et squattes étaient surtout des taudis améliorés, rien de bien fameux. On vivait dans les ordures, et on se construisait un royaume avec les poubelles. Ils firent le tour. Ou un tout cas, un petit tour qui fascina complètement la jeune fille. Accélérant parfois la cadence, elle fut néanmoins gênée par l'odeur parfois très forte dans certains endroits. Mais elle se contenta de se pincer le nez en grimaçant, jusqu'à ce que leur guide, les mains enfoncées dans les poches, ne se tourne finalement vers eux :

« Bon, v'là l'endroit. Pas d'règle, pas d'loi, pas d'foi. Ici, c'l'anarchie du punk, la crète qui dit qui est. Alors c'tout c'qu'ya à savoir. »

Et il décampa. Purement et simplement. D'un je-m'en-foutisme incroyable qui fit rire Fantine. Elle l'admira un temps avant de se tourner vers Groot. Et lui semblait bien moins convaincue qu'elle sur la marche à suivre désormais. Oh, elle était partie pour vivre ici. Dénicher une tente, ou une connerie du genre et s'y installer pour oublier les conneries du dessus. Tant qu'il y avait à manger, c'était jouable. Sauf qu'un doute la prit : Est-ce que la nourriture était vraiment de la nourriture ?
Après un temps de réflexion, elle préféra ne pas savoir.

« Bon, très bien. On va trouver une sortie, Kurn. Y'en a forcément une. Elle tourna sur elle même : Sinon, c't'endroit serait bouché et invivable depuis bien longtemps. Faut juste trouver la bonne voie, et on ressortira bien quelque part ! »

C'était de la logique pure. Mais de la logique à la Fantine. L'endroit était un grand dôme de crasse et de champignon, et eux se trouvaient sur un amas d'ordure en plein centre de ce dôme. Mais il y avait un découpage claire du reste. De longs tunnels, partant de tous les côtés et dans tous les sens, se trouvaient là où ils pouvaient poser les yeux. L'eau croupie était pour l'instant à un certain niveau. Il suffisait d'attendre qu'elle s'évacue pour suivre le courant. Et ce fut ce qu'elle suggéra à Kurn : En partant avec elle, ils retrouveraient l'extérieur.

CQFD.
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Mais à peine leur guide était-il parti qu’un nouveau fit son apparition à leurs côtés. Là où le premier était grand, celui-ci était petit. Quand l’autre était élancé, celui-là était râblé. Si l’autre avait des tatouages, il avait des piercings. Mais tous deux arboraient une crête de bon aloi qui les rangeaient indubitablement dans la catégorie des habitants du dôme d’ordures caché sous les égoûts.

« B’jour, b’soir, les nouveaux. Vous voulez un p’tit tour du propriétaire ? La nourriture de la zone est devrait pas tarder à tomber. »
Après s’être brièvement regardés, le duo acquiesca. Même si Fantine avait eu un repas relativement récent, ce n’était pas le cas de Kurn. Et, dans tous les cas, aucun des deux n’avait l’habitude de refuser de la nourriture, que ce soit en prévision de temps plus difficiles pour Fantine ou pour ne pas froisser l’auteur d’un cadeau pour Kurn.
Ils suivirent donc l’inconnu, qui leur expliqua brièvement comment il était arrivé ici, une histoire de fugue après avoir eu maille à partir avec la mafia de l’île, sans que la Marine ne réagisse véritablement.
« … C’est là qu’j’ai compris que c’était chacun pour sa gueule là-haut. Et comme j’supporte pas l’océan, pasque j’ai le mal de mer, j’ai suivi les légendes qui disaient que y’avait des trucs tout en bas. Et me v’là ! Et nous y v’là aussi, d’ailleurs. »

Une sortie d’égoût arrivait dans le bord du dôme juste au-dessus d’eux.
« ‘Ttendez, on va s’mettre un peu par-là. Voilà, ici tout pile. »
Ils n’attendirent que quelques secondes. Des objets divers et variés se mirent à tomber juste devant eux. Leur nouveau compagnon en attrapait certain au vol, laissant la plupart s’entasser par terre. Mais dès que quelque chose qui semblait édible passait à sa portée, ses mains se détendaient comme des serpents, les saisissant avec une vélocité impressionnante.
La seule fois où Kurn tenta la même chose, une poêle cassée lui tomba sur le poignet, déclenchant un mouvement de retrait dû à la douleur. Fantine se contentait de regarder la pile d’objets jetés qui grandissait à vue d’œil avec une lueur de fascination dans le regard.

Ce ne fut l’affaire que de quelques minutes avant que cela ne s’achève.
« En fait, le type qui gère les égoûts, il faut toujours vers la même heure, v’voyez.
- Mais comment vous gardez l’heure ici ? Sans lumière ?
- L’habitude, fit-il en haussant les épaules. Tenez, voilà ce que j’ai ramassé. Prenez ça. J’garde la viande rassie, par contre. Et vous d’vriez trouver une tente par-là. Pfiou, j’vais m’pieuter, j’fatigué. »

Est-ce que c’est leur manière de montrer leur accueil et leur affection ? Mais ensuite ils ont honte et s’en vont l’air de rien ? Remarque, comme leur communauté semble bâtie sur l’individualisme et l’anarchie, c’est relativement normal, je suppose…

L’homme-poisson se gratta la tête. L’ambiance est particulière, quand même.
« On prend un peu de repos avant de suivre le courant ? Proposa-t-il.
- D’accord, Groot ! On va par là !
- Mais les tentes sont dans cette direction, là-bas.
- On va par là quand même !
- Hm. D’accord, Fantine. »

Après avoir fouillé une bonne trentaine de minutes, le poisson déjà assez pourri pourrissant encore davantage dans les bras de Kurn, Fantine consentit à aller dans la direction indiquée par le punk. Ils trouvèrent assez rapidement un abri pour la nuit, qu’ils bâtirent tout aussi prestement. Par contre, la tente m’arrive aux genoux. Peut-être que…
Après avoir gobé sans trop y penser ce qu’ils avaient à se mettre sous la dent, la jeune fille fila se lover à l’intérieur et s’endormit instantanément, roulée en boule comme un chat. La rascasse entra tête la première, puis tenta de se mettre en position fœtale pour que l’ensemble de son corps massif soit également à l’intérieur.

Sans succès. Ses pieds continuaient à dépasser dehors alors même qu’il était dans une position totalement inconfortable.

Kurn soupira, ouvrit l’entrée de la tente et s’allongea sur le dos. Puis il croisa les mains sur son torse et ferma les yeux. De l’extérieur, cela doit avoir l’air bizarre. Tout le bas de mon corps dépasse de la petite tente.

Enfin, tant pis.

Je dois prendre un peu de repos.

Demain, nous nous échapperons.



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Dormir lui avait fait du bien, et Fantine ne calcula pas s'il en était de même avec Kurn. Les jambes dehors toute la nuit, sans place pour vraiment bouger, avec une boule d'énergie à ses côtés qui elle ne s'était pas faite prier du tout pour gigoter dans tous les sens en lançant les jambes, les bras, les poings et même la tête parfois. La jeune fille avait ce petit côté très envahissant qui prenait absolument toute la place. Du coup, elle avait dormi comme un loir, quand Kurn s'était contenté d'un sommeil relativement médiocre.

La tête dans les choux, Groot avait décrété de bon matin (ou ce qui pouvait être le matin, sans certitude) qu'ils devaient partir et mettre en application la solution de Fantine ; cette solution demandait qu'ils se trempent d'emblée, dans une eau pas des plus claires. Sans doute qu'il y avait de la vie, là-dessous, un autre éco-système, mais ça laissait globalement la jeune fille parfaitement indifférente. Elle avança assez loin sans regarder en arrière, entendant juste le clapotis de l'eau quand Kurn la suivit.

« Ayé, fit-elle l'air de dire qu'il n'y avait plus qu'à attendre.
Bon... »

Fantine se tourna doucement vers Kurn. Quand elle en avant jusqu'à la poitrine, lui avait à peine immergé ses jambes. Elle lui lança un regard qui disait « tu pourrais faire un effort, quand même ! » alors que ce n'était absolument pas de son fait.
Ils restèrent un temps seulement, jusqu'à ce que Fantine se sente entraîner au niveau de ses cuisses. Une caresse peu ragoûtante du mouvement de l'eau s'évacuant dans une direction. C'était le moment !

« Par là !... fit-elle en désignant l'une des sorties.
Va pas trop vite.
Ouais bah tu veux sortir ou tu veux camper encore ici, hein ?
Hm... On ne sait pas dans quoi on s'engage...
Gnagngn le courage, railla-t-elle. »

Mais au bout de quelques pas, elle sentit tout de même une certaine force derrière elle. L'eau jusqu'en haut presque, elle n'avait pas trop la chance d'avoir des appuies stables, ou de pouvoir lutter trop longtemps. La seule chose qu'elle pouvait faire compte tenu de sa taille était nager, mais pas revenir en arrière. Groot avait de la chance

« Ouh... C'est fort... Grommela Fantine une première fois sans aviser Kurn plus longtemps sur le phénomène. Lui ne devais pas vraiment sentir la différence. Pas la saisir de la même manière. Sauf qu'elle se sentit poussé, porté et soulevé par le courant, sans réussir à s'accrocher à quoique ce soit au passage. Son cœur fit un bond dans sa poitrine lorsqu'elle s'en rendit compte, et l'affolement la prit quand d'ordinaire elle était bien la dernière à se laisser submerger par ça : OUH C'EST VRAIMENT FORT ! »

Son premier réflexe fut de vouloir attraper la main de Groot, de l'escalader et de rester sur ses épaules, mais elle n'en eut pas vraiment le temps. En se retournant, elle perdit juste l'appui qu'elle avait et se retrouva tiré en arrière par le courant l'évacuant vers arrière, droit vers quelque part, sans trop savoir vers où, loin de Groot aussi et avec comme dernière parole :

« Glou »

Non, vraiment, il y avait mieux. Elle réussit à ressortir la tête de l'eau avant qu'une vague la remette dessous. Et à chaque fois qu'elle retrouvait la surface, c'était pour se voir éloignée de Kurn, et plus engagée encore à l'intérieur de ces gros tuyaux d'évacuation.

Bon.
Zut.
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A peine eut-il le temps de jeter un coup d’œil en arrière à la recherche des bons conduits d’évacuation, ceux qui menaient vers la surface, la sortie, n’importe où sauf les toilettes de la base de la Marine que Fantine avait disparu. Kurn tourna sur lui-même. C’était tout à fait son genre de vouloir lui faire une blague, de surgir par derrière, de l’éclabousser ou de bondir sur son dos.
Dans le doute, la rascasse plongea la main sous l’eau et fouilla autour de lui. Hm, pas un signe. Le courant, tumulteux autour de ses bras, venait de se rappeler à lui. Avec le courant qui me mouille à peine les jambes, il faut dire que j’étais davantage concentré pour ne pas me cogner la tête au plafond. Et plié en deux comme je l’étais, difficile de prêter attention à tous les détails. C’est une erreur de ma part. Bon…

« Fantine ? »
Seul le silence de l’eau s’engouffrant dans les conduits lui répondit. Elle m’a sauvé, quand même. Et puis, même si cela n’avait pas été le cas…
Kurn plongea tout son corps dans l’eau, en s’accroupissant. Puis, les yeux toujours ouvert, il laissa son système de branchies prendre naturellement le dessus sur ses capacités pulmonaires humaines. Ses pupilles ne voyant rien dans l’obscurité relative du conduit, et Fantine était de toute façon hors de vue, il les ferma enfin.

Ses autres sens prirent mécaniquement le dessus. Le goût de l’eau des égoûts emplit davantage sa bouche, et il dut filtrer avec ses dents serrées. Une simple gêne, minime. Tous les sons étaient distordus, et les rebonds de l’eau dans la pierre faussaient de toute façon toute tentative de la retrouver. Ce qu’il fallait, c’était faire la même chose que le plan initial. Suivre le courant.
Kurn se concentra sur les mouvements de l’eau souillée autour de lui. La manière dont elle s’enroulait autour de ses membres, le léger reflux quand elle pénétrait dans un conduit plus étroit, quand le courant se fracassait contre un mur en pierre. Un bout de bois le heurta.

On aurait dit Fantine. Je n’ai qu’à…

Attrapant le déchet au vol, Kurn le replaça dans le courant, juste devant lui. Puis le laissa filer, nageant à sa suite : le faible flux d’eau était de toute façon bien insuffisant pour le déplacer à la même vitesse qu’une planche en bois ou qu’une Fantine. C’est pourquoi il déplia ses nageoires, habituellement collées le long de son corps, pour optimiser sa navigation sous-marine.

Comme par exemple freiner avant de taper dans la planche de bois. Heureusement, toute collision pouvant affecter sa course fut évitée, et la rascasse put reprendre sa poursuite, en espérant très fort trouver Fantine au bout. C’est qu’il lui manquait quelque chose d’utile pour nager dans les égoûts : des branchies. Et le moindre cul-de-sac ou zone submergée un peu trop longue risquait de lui être fatale.

Encore que vu son débit de paroles, elle doit avoir une grande capacité pulmonaire. Ou maîtriser la double-respiration, mais cela m’étonnerait fort.

Kurn, fatigué de sa non-nuit, avait laissé vagabonder ses pensées quelques intants de trop. Le bout de bois qui lui servait de test pour la jeune fille venait de s’enfoncer dans un tunnel étroit. Beaucoup trop étroit pour lui, comme il s’en rendit compte quand il se fracassa le nez la pierre. Le palpant précautionneusement, il s’aperçut heureusement qu’il n’était pas cassé. Par contre, il avait perdu la trace de son témoin, en plus de n’en avoir aucune de sa sauveuse.

Maintenant franchement anxieux, il prit appui sur le mur et partit aussi vite que possible dans une direction plus ou moins analogue à celle qu’il n’avait pu prendre. De toute façon, il y avait de fortes chances que tous les conduits d’égoûts finissent au même endroit. Donc il n’avait qu’à arriver au bout et tenter de remonter un des courants.

Cela marchera probablement. Peut-être, si tous les tuyaux ne sont pas trop petits. On ne sait jamais.

Kurn était franchement inquiet. Il envisagea un long moment de revenir sur ses nageoires et fracasser la pierre à coup de poings. Mais le temps qu’il se décide, il était déjà trop tard. Il était trop loin. Et il n’était pas certain d’en être capable. Ni que ça ne provoquerait pas d’effondrement généralisé de toute la zone.

On évoque rarement Las Camp comme capitale d’une architecture élégante et solide, après tout.

Tout de même, le courant doit être fort pour une fillette d’un mètre et quelques pour une trentaine de kilos. Ou une quarantaine, là n’est pas la question.

Et puis, est-ce qu’elle sait nager ? Retenir sa respiration ? Ne pas inspirer par le nez ?


Une grosse appréhension étreignait son cœur de poisson.


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Rien de tout ça. Même la tête sous l'eau et les poumons vides, Fantine était du genre à essayer de crier et de faire passer son mécontentement. Sauf qu'elle dut se contraindre bon gré mal gré à coller ses mains devant sa bouche pour s'empêcher de parler et retenir les quelques bulles d'air qui lui restaient. Sa survie en dépendait, visiblement. Elle se laissa porter. Au début évidemment, elle chercha à lutter, à revenir vers Kurn, sans jamais y parvenir. Poids plume porté par un courant trop fort pour elle.

Le plus sage était de se laisser faire. De ne pas lutter. En espérant que ça se termine rapidement. Fantine se fit néanmoins des frayeurs. Elle eut l'impression à un moment donné de se faire attirer totalement vers le centre de la terre, et la peur mêlée à la chute surprise qui l'attendit lui donnèrent le droit d'expérimenté la descente d'organes. Sordide. Il n'en fut rien... Car la chute passée, Fantine se retrouva comme sur un toboggan aquatique ! Portée par l'eau croupie, allant et venant dans des tuyaux, prenant des virages à l'envers, faisant des loopins en changeant de sens. Elle se retrouva sur le ventre, puis sur le dos, puis la tête en avant, en hurlant à plein poumon :

« Grooooooooot ! »

Kurn, de son côté, avait dû l'entendre. Progressant doucement dans le conduit plus gros qu'il avait emprunté, l'écho de la voix de Fantine avait dû lui donner l'impression qu'elle tournait autour de lui. C'était sans doute un peu le cas. Le manège ne s'arrêta pas et la jeune fille se marrait à s'en faire mal aux côtes. Passé la peur du moment, où elle s'était crue mourir, avalée par un égout... Sauf que toutes les bonnes choses avaient une fin, et elle le comprit à ses dépends. Le toboggan la projeta en avant, et elle ricocha sur une grande surface d'eau d'un calme troublé. S'enfonçant dans de la vase, ou des algues, elle se redressa en cherchant son air, toussant comme une mourante en se sentant prise au piège au milieu de toute cette végétation :

« Groot ? fit-elle par réflexe en se débattant toujours, appuyant sur son ventre pour recracher toute l'eau qu'elle avait absorbé par la bouche et le nez. Toussant de plus belle, elle appela à nouveau en entendant l'écho de sa voix, et ensuite une voix qui la fit se retourner vivement !
Fantine ! Tu es où ?
Là !
… Oui d'accord, mais où ça, là ? »

Elle alla pour répondre... Mais en vérité, elle n'en savait strictement rien. Fantine commençait juste à perdre pied et à s'affoler toute seule. Elle regarda à gauche, à droite, un tas d'algue sur la tête, cherchant une surface sur laquelle se mettre à l'abri. C'était dégoûtant ! Elle vit une plateforme non loin, une vieille porte qui flottait à la surface, vers laquelle elle commença à nager avant de boire la tasse.

« Ark ! Kof kof ! C'est salééééé ! Râla-t-elle pour elle-même. »

Mais Kurn avait dû l'entendre. Il ne devait pas être très loin d'elle, forcément. Tout comme tous les deux ne devaient pas être très loin de la sortie en fin de compte. La jeune fille s'approcha comme elle le put de son asile, se débattant maladroitement dans cette eau trouble et encombrée par les algues. Elle nageait mal, était gênée par toutes ces choses qui lui frôlaient la peau. Et encore plus lorsqu'elle sentit quelque chose s'enrouler autour de sa cheville droite et resserrer progressivement sa prise.

« Ohoh... furent les derniers mots qui suivirent son hurlement. »

Car ensuite, elle but la tasse, celle des autres et même la théière. Joie.
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Après avoir entendu la voix de Fantine, qui malgré son intonation lui remontait bien le moral, après tout, elle est en vie, c’est déjà un énorme coup de chance. Suivant le courant à toute allure, il arriva à un saut, après lequel se trouvait le lac dans lequel la jeune fille semblait se trouver. En tout cas, quelqu’un était là. Quelqu’un qui criait très fort et faisait de nombreuses éclaboussures.

Il doit s’être passé quelque chose.

Dès qu’il toucha la surface du plan d’eau, Kurn sentit la différence : c’était salé. Pas aussi salé que l’océan, mais cela s’en rapprochait suffisamment pour être notable. La blessure à son bras choisit ce moment pour se rappeler à son bon souvenir avec une vive douleur qui lui fit grincer des dents.
Il n’empêche, nous sommes proches de la mer. Nous nous en sommes sortis. Je n’ai plus qu’à récupérer Fantine et nous pourrons quitter cette île.

La rascasse se dirigea le plus rapidement possible vers le lieu des éclaboussures, qui s’arrêtèrent brusquement. Quelque chose avait dû arriver. La vase et les algues, en tout cas, glissaient sur son corps écailleux fait pour l’aérodynamique sous-marine. Il était dans son élément.
Cependant, au bord de l’océan, on peut parfois trouver des monstres marins stupéfiants. Des requins morts de faim, à moitié échoués, prêts à attaquer n’importe quoi pourvu que cela saigne. Des calamars géants, colossaux, qui, perdus près de la surface, s’en prennent à toutes les cibles à porter. Des colonies de serpents de coraux qui pèsent sur les membres de leurs victimes jusqu’à les noyer. Ou même des crocodiles de mer.

Les océans n’étaient vraiment pas hospitaliers pour les étrangers. Et même pour ses habitants, les hommes-poissons par exemple, il valait parfois mieux savoir se faire oublier.


Il ne fallut guère plus que quelques ondulations en une vingtaine de battements de cœur pour rejoindre la jeune fille qui se noyait. Les yeux écarquillés sous l’eau, insensibles à la morsure du sel et de la vase, fit le tour de Fantine, cherchant à identifier ce contre quoi elle luttait.
Finalement, étouffant un gloussement, il l’attrapa par le col de son haut et la souleva hors de l’eau en se mettant debout lui aussi. Il en avait jusqu’aux épaules, mais il pouvait parfaitement s’assurer des appuis stables, même sur le sable couvert d’algues qui était sous ses pieds.

Tenant Fantine en l’air, il la brossa rapidement pour enlever les algues qui l’alourdissaient et qui s’étaient emmêlées, l’empêchant de nager normalement, et ayant conduit à sa panique.
« Grooooot ! T’es venu me sauver !
- Oui. Tu t’es faite attaquer par la tribus des algues en colère.
- C’est pas drôle ! Y’a un truc qui s’est enroulé autour de ma cheville, aussi !
- Tu parles de ce calmar d’approximativement douze centimètres de long ?
- Oui ben… T’es méchant, Groot !
- Mais non, mais non. Nous allons nous en sortir, nous sommes presque arrivés. »

Marchant dans l’eau pleine d’algues, Kurn marcha vers la porte flottante, qui était arrivée là il ne savait comment. Et après avoir posé Fantine dessus, il en profita pour regarder où ils se trouvaient : une caverne ovale d’une cinquantaine de mètres de diamètre au maximum, avec une grande ouverture dans le plafond, qui se trouvait à plusieurs dizaines de mètres de hauteur.
Autant dire qu’on ne risque pas de grimper là-haut.

« L’eau et les algues doivent bien venir de quelque part. Il doit y avoir une ouverture sur l’océan, dans la muraille de pierre.
- Ben vas-y, Groot. Moi, je bouge plus de mon radeau. Je suis le capitaine ! »

L’homme-poisson se dirigea en souriant vers un des bouts de la caverne. De toute façon, il aurait probablement besoin de faire tout le tour avant de trouver leur porte de sortie. Elle devait être sous-marine, en prime, sinon il l’aurait vue auparavant. Et impossible que les pluies aient remplies la caverne d’algues par le haut.

Il y a forcément une sortie.

« AAAAAAAAAAAAAAH ! Hurla Fantine. »

Kurn, la tête sous l’eau, laissa échapper un petit rire plein de bulles. Après une trentaine de secondes, il leva la tête de l’eau pour voir que radeau et jeune fille avaient tous deux disparus, si ce n’était une petite main qui tenta d’attraper quelque chose –de l’air, une algue, une poigne salvatrice ? avant de disparaître dans les remous.

Oups.

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Fantine avait à peine penché la tête par-dessus bord. Ses doigts agrippant la porte en fixant le fond de l'eau. Et ce fut à cet instant précisément qu'elle la vit. Une langue gluante qui s'enroula autour de son poignet, et l'attira au fond avec elle. Elle n'eut le temps que d'un cri pour prévenir Kurn, le reste ne fut qu'un « glouglouglou » relativement confus, même pour elle.

Elle chercha à retrouver une prise, mais la surface de l'eau fut déserté par celles-ci, et elle sombra attiré toujours plus par le fond. Ses ongles se plantèrent dans ses langues toujours gluantes, même sous la flotte, et elle lutta de toutes ses forces pour s'en sortir. En ouvrant les yeux, malgré la crasse, le sel et les algues, elle croisa deux yeux jaunes et brillants, globuleux à souhait, qui la contemplait. Elle entrevit même son reflet. Restabilisant, mais pas trop pour la jeune fille, qui se décida plutôt à planter son doigt dans le globe de la créature. Et une impulsion plus tard, elle réussit à remonter à la surface.

Fantine sortit la tête, peinant à ouvrir les yeux. Le sel lui brûlait les mirettes, le fond de sa gorge. Elle avait l'impression que cette dernière avait gonflé, doublé de volume. Elle toussa en ayant l'impression de recracher des lames de rasoir. Ses poumons étaient faits de feu, mais elle trouva encore la force de hurler :

« Grooooot ! Groooot !
Je suis là, hé !
Me lâche pluuus ! Je veux pas y retourner ! On se casse d'ici ! Hurla-t-elle en grimpant sur ses épaules à toute vitesse, sans lui demander la permission, et s'accrocha du mieux qu'elle le put à lui, agrippant ses piques en faisant attention de ne pas s'ouvrir, pour lui faire tourner la tête. Un peu comme on le faisait avec un cheval pour qu'il aille dans la direction qu'on attendait... Mais Kurn n'était pas vraiment du genre à obéir :
Qu'est-ce qu'il y a ?! »

Heureusement qu'il était revenu vers elle. Heureusement qu'il l'avait trouvé. Mais dans tous les cas, Fantine refusa catégoriquement de répondre à Kurn. Elle releva même ses jambes pour les empêcher de toucher la surface de l'eau. Trempée jusqu'aux os,

« Je te l'avais dit qu'il y avait un truc mais tu t'es moqué ! C'est énorme ! C'est gros ! Moche ! Terrifiant ! J'ai lu dans son regard qu'il allait me tuer ! Il aurait pu me maaanger ! »

Même si dans les faits, il n'aurait pas eu grand chose à avaler.

Des bulles d'air remontèrent à la surface. Puis, une ombre. Qui grossit. Et grossit encore. Jusqu'à faire presque la taille de Fantine ; Kurn s'écarta légèrement, pour voir deux yeux globuleux apparaître à la surface. Une peau visqueuse et verte, une tête lisse surmontée d'un semblant de chapeau applatie par l'eau.

« C'est elle ! Cria Fantine dans les oreilles de l'homme poisson en la désignant du doigt. »

Elle se planqua derrière avant d'entendre un « Croa » ridicule. Croa ?

Et Kurn ? Il était en train de se marrer.

« Une grenouille...
Gngngnh. »

L'animal croassa à nouveau en se retournant. Elle nagea sur quelques mètres, puis sur quelques mètres encore, jusqu'à marcher. Le niveau du sable semblait s'être élevé à peine, et Kurn prit la décision de la suivre, avec Fantine toujours sur ses épaules. Si le plafond se rapprochait sensiblement et que la jeune fille heurta un rocher en manquant de s'assommer, ils trouvèrent tous deux ce qu'ils étaient venus chercher : une sortie.

D'un mètre sur un mètre, menant vers le dehors. Fantine soupira. Elle n'eut qu'à s'accroupir pour passer, suivant la dite grenouille qui les mena dehors. Quand à Kurn, après avoir rampé comme il le put en essayant de ne pas finir coincé, il retrouva l'air frais du dehors et l'odeur de l'iode.

« Et maintenant ? »

Fantine se redressa sur ses jambes, essayant de virer le sable de sur sa tenue dégueulasse. Maintenant ? Oui ! Elle savait déjà ! Elle allait partir avec Kurn, il le fallait ! Il lui parla bien vaguement d'un truc qu'elle n'écouta pas. Elle décampa furieusement en démarrant au quart de tour, gueulant plus ou moins un « attend moi ici ! je reviens ! » qu'il ne comprit probablement pas.

Sauf qu'elle ne revint pas. Ou en tout cas, pas à l'heure. Car la nuit tombée, son sac sur les épaules, Fantine eut du mal à retrouver là où elle avait laissé Kurn. Et quand enfin ce fut chose faite, il était déjà parti. Il n'y avait que la grenouille qui la regardait sans rien lui dire... Excepté...

« Croa ».
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