Une odeur nouvelle.
On était en pleine après-midi, le cagnard brûlant de cette période estivale faisait coller ma peau à mon matelas. Mon front était recouvert de bandages et on m'avait fait enfiler mon pyjama pendant que j'étais inconscient. La fenêtre ouverte de ma chambre et les draps très léger de mon lit contribuaient à me rafraîchir. Mes parents avaient dû retourner au travail, malgré le fait que je m'étais blessé, pour ne pas perdre l'argent d'une journée. Cela resitue bien la situation économique dans laquelle nous nous trouvions. Et pas uniquement nous d'ailleurs, peu de villageois pouvaient se vanter d'avoir assez de moyens pour ne plus travailler au-delà d'une journée. Même le maire était fauché, c'est dire. La majorité des citoyens était pauvres et travaillait dans le domaine manuel, sauf pour le maire et une autre personne. Cette personne se nommait Himozuka, c'était un médecin que les pirates, qui rôdaient sur l'île depuis quelques temps déjà à l'époque, avaient ramené au village pour remercier les villageois de leur hospitalité. Le médecin l'ayant précédé s'était fait la malle, à ce qu'il paraît, plus personne n'était en mesure de payer les frais médicaux et il dû donc partir pour le bien de sa bourse. Himozuka, quant à lui, était payé par les villageois mais une partie des soins était acquittés par les pirates, ce qui faisait que les citoyens payaient moins cher leurs soins.
Ces pirates étaient en quelques sorte les héros de l'île, il renflouaient l'économie grâce aux marchandises qu'ils commerçaient avec nous et ils nous garantissaient une certaine protection contre... les autres pirates. Sans eux, nous aurions tous crevés de faim depuis longtemps. L'île ayant été miraculeusement épargné de l'influence du Gouvernement mondiale pendant des siècles, notre île était un lieu tout désigné pour la contrebande ou pour retaper les navires de la flibuste. Mais à mesure que les pirates investissaient les lieux, les navires de commerces et de transports furent de plus en plus rares, c'est un grand bien pour un petit mal en somme.
Mais revenons en à cette journée. J'attendais donc Himozuka pour qu'il puisse m'examiner, afin de voir si tout allait bien chez moi. Mon épaule était toute engourdie et j'entendais comme une sorte de bourdonnement lorsque je me couchais. Une poche de glace recouverte de tissu m'avait été laissé par ma mère avant qu'elle ne parte travailler. Deaxter venait tout juste de partir, c'était un grand jour pour lui, son père était très enthousiaste à l'idée de l'entraîner au combat à l'épée, surtout à son âge. Il était convaincu que son héritage allait perdurer et que Deaxter allait devenir un grand guerrier. Pensant à toute la peine que j'avais causé chez mes parents, je sortis de mon lit pour aller me servir à boire, en traînant des pieds. L'intérieur de notre petite maison était sobre, une petite cuisine avec l'essentiel pour survivre, un salon avec une vieille table en bois entouré de trois chaises de la même matière, ainsi qu'un petit cagibi avec un trou dans le sol servant de salle de bain.
J'avançais à travers le salon et la cuisine, pour atteindre une bouteille de jus à moitié vide qui était posée sur le poste de travail de la cuisine. J'étais encore un peu groggy, ne réalisant pas trop ce qui m'était arrivé. Une explosion dans une grotte, mais pourquoi ? Les questions foisonnaient dans ma tête tandis que je dégustais ce jus d'orange tiède. Après quelques gorgées, un mal de tête implacable et douloureux fît interruption dans ma boîte crânienne. Tout en posant rapidement mon gobelet sur la table, je tins ma tête à deux mains avec l'horrible impression qu'on me martelait le crâne, tout en lâchant des petits gémissement. Je me dirigeai ensuite vers la salle de bain pour plonger ma tête dans de l'eau bien glacée. La douleur était amoindrie mais toujours présente. Je partis ensuite dans ma chambre pour chercher la poche de glace que ma mère m'avait laissé préalablement.
Alors que je tapotais la poche de tissu contre ma tête, une personne vint toquer la porte.
Faisant du mieux que je pouvais pour aller ouvrir, je me précipitais à un tel point que je dérapai sur le sol. Je mis une chaise devant la porte, sur laquelle je montai pour voir qui était derrière la porte. Je vis deux gros verres de lunettes posés sur un nez grotesquement long. Reconnaissant les traits du docteur Himozuka, j'ouvris la porte avec l'enthousiasme qu'avais un malade qui attendais son médecin. Le docteur entra dans la maison, le pied entre la porte et le mur, comme un vendeur au porte-à-porte.
Il fit son entrée en me saluant poliment et en faisant une grimace perplexe.
- Jeune homme ! Tes parents ne sont pas là ?.
-Mon papa et ma maman ils sont partis travailler.
-Tu fais quoi debout ? Je pensais qu'ils t'avaient alité ?
-Ali quoi ?
-Je pensais qu'ils t'avaient laissé au lit.
-M'en rappelle pas.
-Bon, assieds-toi pendant que je prends mes affaires.
Maintenant que j'y pense, il était souvent contrarié quand on ne s'occupait pas bien d'un malade ou qu'on ne suivait pas ses directives. C'était pour ça que les villageois l'aimaient, parce que oui, il était vraiment aimé. Alors que j'allais nous chercher deux chaises pour que nous puissions nous asseoir, il extrayait des outils de sa mallette noire. Etant assis sur une chaise, je le laissais m'examiner. Il avait sortit une sorte de languette en bois qu'il mettait sur ma langue. Ensuite, il tapa sur ma tête avec un petit maillet métallique en examinant mes bandages. Il écrivait pleins de trucs incompréhensible sur son calepin, en même temps qu'il mâchait un morceau de chique puant. A ce moment, j'estimai bon de lui parler du petit incident qui s'était produit juste avant son arrivée, il barra plusieurs choses sur son bloc-note pour en écrire d'autres. L'odeur de son tabac à mâcher me répugnait, tandis que le mouvement de va-et-viens dû au mâchouillement faisait danser sa moustache rousse et poivre-sel. Il finit par me remettre un bout de papier que je devais transmettre à mes parents, avant de s'en aller en me conseillant de rester au lit.
Dernière édition par Waylon A. Rendão le Lun 18 Jan 2016 - 1:58, édité 2 fois