Posté Mar 7 Juin 2011 - 19:18 par Winchester D. Arthur
Je gardais le fusil posé contre ma clavicule droite, la clope au bec, tout en fixant l'avancée des choses. Mon coéquipier de fortune sembla, pendant un court instant, plutôt surpris et pas très à l'aise suite à ma réaction. Faut dire aussi gamin, que quand tu commences à prendre de la bouteille, t'en as assez de perdre ton temps avec les guignols qui font leur introduction pendant cent-sept ans. Plus le temps passe, plus je me rapproche de ma mort. Alors c'est pas pour perdre de précieuses minutes que je vais écouter le premier guignolo venu me faire son speech à trois berry six sous. Si au final, il finit avec la gueule en sang, je ne vois pas en quoi savoir qu'il s'appelle Jean Marc Dupré, descendant de Machin-Chose Dupré, cuistot en chef des cuisines d'un petit restaurant depuis six générations, va m'avancer. Si tu viens pour te battre, tu torgnoles à tout va et tu cherches pas à afficher ton pédigrée. C'est une baston de rue tout ce qu'il y a de plus commun, pas un tournoi entre chevaliers bon sang. Quand bien même savoir à qui j'ai à faire m'intéresserait, ce n'est ni le lieu ni le moment de faire un pareil étalage.
Izanagi me fixa avec un air décontenancé en voyant le géant se relever. Pour ma part, je trouvais juste ce fait intéressant. Au moins, il n'allait pas s'étaler d'un simple coup. C'était un Colonel quand même, pas le premier troufion venu. J'ignorais néanmoins ce que branlait le petit jeunot à côté de moi, mais il s'amusait à préparer une seringue pleine d'un étrange liquide. Je doutais qu'il s'agisse d'une injection de morphine pour se faire un shoot, mais étrangement, cela ne m'alerta pas plus que cela. Jugeant qu'il fallait bien que jeunesse se fasse, je laissais Yoshiro se jeter dans la mêlée pour foutre son petit bordel. Et pour ça, il était doué le bougre. Bon, son style était encore un peu brouillon, mais au moins, on sentait qu'il n'en était pas à ses premières armes. Et vas-y que je te taloche d'un coup de coude, et vas-y que je te file un niattage maison dans les roubignoles. Alors qu'il agissait ainsi, l'un des quelques Marines près de lui tenta de lever son sabre pour l'attaquer dans le dos. Logique que tout le monde me laisse tranquille... contrairement au gamin, je suis resté dans mon coin. Forcément, aller au contact des soldats fait que l'on devient la cible principale. Je n'aimais tout de même pas voir un militaire agir comme un poltron en s'attaquant au dos d'un homme. Ni une, ni deux, j'utilisais la dernière cartouche du fusil pour lui tirer un bon coup dans le dos. Bah oui... je ne suis pas Marine moi que je sache. Je peux donc me permettre ce genre de bassesse.
Quant à Iza, il était désormais seul face au grand gaillard, encore un peu sonné par le headshot qu'il s'était pris. Cela expliquait pourquoi il était encore un peu groggy en portant son coup avec une certaine lenteur. Bien entendu, cela obligea le moutard à reculer et prendre ses distances, alors que le Colonel secoua sa tête de gauche à droite pour reprendre ses esprits. Il ne semblait plus véritablement sonné, et le fait qu'il récupère l'ensemble de ses moyens n'était pas encourageant. A cela s'ajouta la demande du petit brun me demandant d'étaler une fois de plus le géant. Est-ce que j'ai l'air de m'appeler Capitaine Planète ? Si j'avais réussi à foutre le malabar au sol une fois, c'était uniquement parce que je l'avais pris par surprise. Là, en l'occurrence, je n'avais plus ni cartouche, ni élément de surprise. Puis il était drôle ce môme. Il ne pouvait tout simplement pas faire à nouveau usage de son gadget qui lui avait permis de démembrer six ou sept marines précédemment ? Ces jeunes, je vous jure, faut vraiment leur mâcher leur compote avant de la leur cracher à la gueule pour qu'ils puissent la bouffer.
Poussant un profond soupir en levant les yeux au ciel, je jetais le fusil vide sur le côté, avant de porter ma main à ma bouche pour y retirer ma cigarette. L'écrasant contre ma semelle, je la jetais sur le côté, avant de me redresser et faire craquer ma nuque en tournant la tête. J'allais devoir y aller sérieusement si je voulais étaler le molosse. Au moins, je n'étais pas chargé de l'occire. Si c'était juste le faire tomber, cela devait être possible. Mon regard amusé se plissa légèrement, donnant enfin une impression de sérieux. L'atmosphère étouffante à cause de l'incendie qui se propageait semblait encore plus lourde que précédemment. Impossible de voir le ciel à cause de la fumée, et seules les teintes rouge-orangées mettaient un peu de couleur dans le paysage, à cause des flammes dansant de plus en plus violemment. On crevait de chaud, mais ce n'était pas pour me déplaire. Le temps était venu pour David de se confronter à Goliath.
Mon pied s'enfonça dans le sol, laissant un peu de sable s'accumuler autour de ma chaussure, donnant une idée de la pression que je mettais dans mon appui. Et c'est parti ! Winchester D. Arthur s'élance, il est en tête, le Colonel le suit de près en levant sa main ! Et oui, cette course palpitante est à son tournant décisif ! Winchester qui s'approche ! Oui ! Vas-y Winch ! Winchester qui fonce, Winchester toujours plus rapide ! Winchester approche de la ligne d'arrivée ! Winchester en tête ! Et... Winchester qui dégage suite à la torgnole magistrale du Colonel. Résultat, je n'ai même pas un foutu numéro de ce putain de tiercé, et je m'envole droit dans la taverne en feu comme un boulet de canon. Le bougre avait été plus rapide que ce que j'avais pensé. Son mouvement contre Yoshiro était dix à quinze fois plus lent que la torgnole que je venais de me manger dans les gencives, et punaise, je peux vous dire que vous manger un poing géant dans la face, ça fait tout sauf du bien. De l'extérieur, on put voir des éclats de bois voler ainsi qu'un gros nuage de fumée témoignant du choc avec la taverne. Au moins, l'impact eut l'effet bénéfique de faire s'effondrer tout le bâtiment sur ma trogne, étouffant en majeure partie l'incendie du bâtiment.
Moi ? Bah, j'étais visiblement sous plusieurs centaines de kilos de décombres. Il m'aurait fallu une sacrée dose de potion magique pour retrouver mes forces. Seulement allez savoir, la volonté du D ou je ne sais quelle autre truc du genre se manifesta en cet instant bénéfique. Effectivement, je m'étais crashé dans les réserves de la taverne. J'étais ensevelis sous du bois, et au-dessus de moi, qu'est-ce qui coulait à flot ? Toute sorte d'alcool dont les barils étaient percés. Et vers où cela coulait-il ? Non, pas dans ma bouche, mais carrément sur toute ma personne. Dieu que j'allais puer après ça. Levant la tête, la bouche ouverte sans que j'y sois pour quelque chose, je commençais à avoir ma vue qui se brouillait. Quant à mon esprit, c'était à peu près la même chose. Atterrir ici était à la fois une malédiction et une bénédiction. La bière coulait à flot, j'étais tranquille, que demande le peuple ? Bah, vengeance pour la côte brisée que je sens me lancer dans le flanc droit. Enfin... Que je sens... disons plutôt "que je sens de moins en moins" pour être plus pertinent. Mon esprit commence alors à sombrer dans la joyeuseté qu'est l'ébriété et en moins de deux, je perds conscience.
Comment pouvais-je savoir que cet évènement n'allait pas me mettre hors course mais au contraire, recharger mes batteries ? D'un seul coup, une partie des décombres au-dessus de moi dégagea dans tous les sens. Qui c'est qui sort des décombres et qui n'a pas l'air content ? C'est bibi bien sûr. Bon, je ne sais pas si je peux vraiment dire que je n'ai pas l'air content. J'ai certes les sourcils froncés, mais j'ai le regard plutôt vitreux, un peu de sang qui coule sur le côté droit de ma bouche et qui me pique à cause de l'alcool. Seulement voilà, Astérix vient d'avoir sa potion magique, et il est prêt à défoncer le romain qui lui a marché sur les pieds quelques instants plus tôt. M'avançant en titubant légèrement pour faire face au Colonel, je le pointe du doigt... enfin du moins j'essaie parce que c'est qu'il bouge en se dédoublant le salopard. Ma voix retentit alors et l'on a très peu de mal à deviner l'état dans lequel je suis.
- You sOn oF a bItCh... LstEn to mE ! I'm gOnnA... Hips... kIck yOur arSe so... so... so HARD...YoU GonnA kIss thE mOon ! Hic...
Ah merde, c'est vrai. Quand je suis rond comme un coin, mon cerveau déconnecte et je ne prends plus la peine de traduire mes phrases. Du coup je parle le langage ancestral de Nosgoth, le Chac-Spirien. Bon, même si certains ignorent cette langue, vu mon intonation et mon air pas content, on se doute de ce que peuvent bien dire ces mots. La scène pouvait tout de même sembler pathétique, mais ce qui suivait l'était tout de même moins. D'un seul coup, je pris mes appuis et parti comme une balle de fusil. J'étais sensiblement plus rapide que lors de mon premier assaut, ce qui dû surprendre l'assistance. Le Colonel, bien qu'étonné, va pour abattre sa grosse paluche en espérant me tarter une seconde fois. Malheureusement pour lui, mon style de combat en état d'ébriété est beaucoup plus "souple" que lorsque j'attaque en ayant toute ma tête. Du coup quoi ? Je me mets carrément à me pencher en arrière, laissant le membre du Marine passer à ras de mon ventre et de mon visage. Est-ce que je stoppe mon action pour autant ? Pas vraiment. Je lève d'un seul coup mon pied en y mettant toute ma force, laissant entendre un craquement des plus effrayants, témoignant que le pauvre bougre vient d'avoir le radius brisé. Voilà qui explique pourquoi il retire sa main d'un seul coup pour se tenir le bras ainsi frappé avec l'autre en poussant un cri de douleur.
Je me redresse aussitôt et me remet à courir dans sa direction, pour profiter de la douleur. Arrivé à six mètres, je me mets à tournoyer sur moi-même, comme un véritable tourbillon humain. Les quelques Marines armés n'arrivent pas à me viser et trois d'entre eux sont dégagés en essayant de s'approcher et de stopper ma course. Arrivé à seulement un mètre et demi, je prends une impulsion en continuant de tournoyer, m'élevant dans les airs pour tendre ma jambe. Ni une ni deux, celle-ci s'écrase lourdement derrière le genou du Colonel, le faisant s'étaler de tout son long. Le choc de la masse s'écrasant soulève un nuage de poussière. Impossible pour lui de se rattraper avec ses bras étant donné que l'un d'entre eux est pour ainsi dire hors-service. Du coup le voilà, nez contre le sol, à renifler la poussière. Le souffle produit par l'impact de son corps massif suffit à souffler les flammes aux alentours et à éteindre les débuts d'incendie environnant. Essayant de regarder le résultat de mon Chaotic Maelström, je lève l'index, titubant, non seulement à cause de mon ébriété, mais aussi à cause du tournis que je venais de me chopper.
- And dOn't... Hic... CoMe... Come b... cOme ba... coMe Bwargh...
Et oui. Alcool mélangé à attaque tourbillonnante égal dégueuli en abondance. Je me mets à mon tour à genou pour dégobiller l'ensemble de l'alcool que je viens d'ingurgiter. Le rendu donne une couleur ocre dorée, parsemé de morceaux de lapins à la crème à moitié digérés. Mais au moins, je rends une bonne partie de l'alcool que j'ai ingurgité, même si la simple odeur de ma veste imbibée suffirait à faire tituber le moindre gaillard manquant d'endurance dans les concours de boisson. Je secoue la tête, sentant que j'ai l'estomac dans les talons maintenant. Cependant, alors que je reprends mes esprits, j'ai un peu de mal à percuté ce que fout le géant devant moi, complètement étalé sur le sol et essayant de se relever en criant comme un taureau qui se serait fait prendre par son congénère en manque. Le dernier souvenir que j'avais en mémoire était celui du coup de poing géant qui m'avait propulsé sur la Lune alors bon... comprenez ma perplexité face à ce spectacle. Assez dubitatif, je fixe ce dernier, avant de voir ce qu'Izanagi va faire et s'il va pouvoir me donner une explication convenable sur ce qui vient de se passer.