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À cause du clou, le fer fut perdu


À cause du clou, le fer fut perdu.
À cause du fer, le cheval fut perdu.
À cause du cheval, le cavalier fut perdu.
À cause du cavalier, le message fut perdu.
À cause du message, la bataille fut perdue.
À cause de la bataille, la guerre fut perdue.
À cause de la guerre, la liberté fut perdue.

Tout cela pour un simple clou.

Benjamin Franklin.
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Acte 1 : À cause du clou, le fer fut perdu.
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- Ça va, rien de cassé ?
- Oui, oui, j'suis solide, t'inquiètes. Les lumino ?  
- Tiens voilà.

Elle brandit les lumino-dails au-dessus de sa tête. Le couloir devant nous est exiguë, pas assez large pour deux humains côte à côte. Nos têtes effleurent le plafond et nous sommes obligés d'avancer en file indienne, l'échine courbée. Je suis derrière elle et cette position m'est très inconfortable. Le danger est devant et s'il déboule maintenant, elle sera la première exposée. Il nous faut sortir de cet endroit avant de rencontrer un obstacle déplaisant.

Pendant quinze à vingt minutes, nous progressons. Nous sommes sur la bonne voie, et plus nous avançons et plus les parois nous renseignent. Ils sont veinés d'une espèce de liane fluorescente qui diffuse une luminosité tamisée dans la galerie. Parfois, nous nous arrêtons pour observer et prendre en photo des pans du mur. La grande majorité des peintures murales ici transcrivent la scène du voyage dans l'eau delà. Le mort du roi, la traversée du fleuve des morts, sa résurrection en tant qu'entité de pure énergie et son dernier voyage vers les étoiles.

- Nous sommes bien dans le couloir que l'âme du défunt devrait emprunter pour rejoindre les cieux ?
- Ouais.  
- Nous faisons le chemin inverse de son parcours.
- Ouais.  
- Donc normalement nous devrions tomber sur le fleuve des morts ?
- Boah, soit pas si terre à terre. C'juste un mythe, on est dans une ziggourat j'te rappelle, il peut pas y avoir un fleeeeeeuuuuuuve AaAAAAaaaaaaaaaaaaah !    

Depuis le temps, j'ai appris à prendre au pied de la lettre certains des mythes et légendes Valantaines. Et ce dénouement, je l'ai vu venir comme un nez au milieu d'une figure. A peine eut-elle fini de balayer mon interrogation que le sol se dérobe sous ses pieds. Sous les miens également. Nous dégringolons dans le noir absolu, je ne repère Cathia que par ses hurlements. Bon sang, qu'est-ce qui peut bien se trouver en dessous ? Je déteste ce genre de saut dans l'inconnu. Rapidement, je fourre ma main dans mon sac en bandoulière et en extirpe deux fusées éclairantes.

- Oh putain !
- Aaaaaaaaaaaah ! Sauve-moi, Loooooooth ! hurle et pleure-t-elle.

Nous chutons vers un ban de crocodiles. Ils nous attendent dans l'obscurité, les gueules grandes ouvertes. Depuis combien de temps n'ont-ils pas soupé ?
Sous la lumière agonisante des artifices, j'irradie et vivifie mes cheveux qui décuplent de volume. J'envoie un appendice capillaire s'enrouler autour de Cat' puis densifie les muscles de mes jambes. L’éphémère luminosité m'a permis de "flasher" les lieux en moins d'une seconde et de tout ancrer dans ma mémoire. La mémoire eidétique est des plus utiles. Nous ne chutons pas vers un fleuve mais une espèce de grande cuvette. L'eau y a presque tari. J'ai aussi remarqué qu'à ses extrémités a été aménagée une sorte de passage piéton surélevé, trop haut et trop peu large pour soutenir un reptile.

Je concentre toute ma force dans mes jambes. « PLLAAAAAAAASH ! ! ! »
Nous atterrissons avec fracas sur une surface molle. Le dos d'un croco, sans doute. Avec cette force, il est déjà mort mais je n'attends pas pour le savoir. Je bondis, Cat' dans mes bras, vers le passage que j'ai repéré. Des dents claquent et embrassent l'air. Un bond, deux bonds, un dernier et j'y serai. En l'air, je ressens un étau se refermer sur mon tibia gauche. Dire que ces animaux ont survécu à l'extinction des dinosaures, je comprends pourquoi, ils sont trop tenaces. J'apponte tant bien que mal sur le passage, Cat' me saute des bras en hurlant frénétiquement. De mes mains, j'agrippe la gueule de la créature.

- Tu ne me trouves pas à ton goût hein ? Indigeste l'armure de poil ?

Le chasseur chassé. Un grand classique. Je plante un couteau dans la moelle épinière du croco. Mort instantanée. En bas, ses potes mâchouillent et font toujours des dents dans notre direction. Nous sommes hors de portée. « Il n’t’a pas bouffé la guibolle ? » s'enquiert Cat' d'une petite voix plaintive. Les rais de la bougie qu'elle vient d'allumer éclairent ma jambe recouverte d'une fine plaque noire. « C’quoi ça ? On dirait d’la chitine. » Presque ma vieille, c'est juste une fine couche de cheveux dont j'ai enrobé mes jambes. Elle a empêché de gros dommages sur mes tissus mous mais ça fait tout de même mal de se faire croquer par cette saleté de mâchoire. « Balance-le à ses potes, ils vont l'bouffer ! »

- Et nous, que mangerons-nous ?
- Tu n'veux quand même pas...  
- C'est une source de protéines. Et nous en avons besoin.
- J'crois qu'on a des soucis plus urgents.  
- Genre ?
- Sortir d'cet endroit !  
- Ça, c'est déjà fait.
- Où ça ?  
- La flamme de ta bougie nous indiquera le chemin.

Elle vacille, cette flamme. Ce qui indique que l'air s’engouffre. Pour plus de précision sur sa direction, Cat' sort une mini-girouette de sa besace pendant que je découpe la viande. Le sang excite les crocodiliens en bas, ils s'accumulent et sautillent. Bientôt, ils pourraient former un pont assez haut pour nous atteindre. Je finis de prendre les morceaux de choix et je balance le reste de la carcasse au loin pour les éloigner. Cat' montre le chemin et cette fois, nous avançons avec plus de prudence. Après le fleuve des morts, normalement nous devrions tomber sur la sépulture du Khan mais ce serait trop beau pour être vrai. Après un long moment de déambulation dans d'autres dédales obscures, nous émergeons enfin.

- Aaaaaah putain ! L'soleil est violent quand on sort d'l'ombre ! Combien d'temps on a été à l'intérieur ?
- Environ quatre heures si je n'ai pas trop perdu la notion du temps.
- On est sorti au sud d'la ziggourat, j'crois.

Ventre affamé n'a point d'oreilles. Peu m'importe actuellement que nous soyons au nord au centre de je-ne-sais-quoi. Je n'ai qu'une seule certitude, j'ai horriblement faim. Je m'éloigne vers la jungle environnante et y repère des bananiers. L'aubaine. Des pierres, des broches, une étincelle et quelques battements de cœur plus tard, mes entrecôtes de crocodile grésillent sous un feu doux. Je cueille ensuite les bananes -des plantains en fait-, les coupe en petites tranches qui finissent au bout de plusieurs brochent également. Sur le foyer, je les place en dessous des entrecôtes de telle sorte qu'elles recueillent le jus qui suinte de la viande. Une entêtante et appétissante odeur se répand et me fait saliver.

- J'vois que j'fais équipe avec un cordon bleu !  
- Tu ne peux pas te proclamer aventurier si tu ne peux te débrouiller seul face à la nature. Tu n'as pas faim toi, après toute cette débauche d'énergie ?
- J'ai gobé mes dernières tranches de bœuf séché y a pas longtemps.  
- Je ne t'ai pas vu manger depuis le début de ce calvaire.
- Comme tu n'pas pas vu pisser égal'ment.  
- Quand ça ?
- Et ben, tu vois ? Avant d'entrer dans la salle où on a failli s'faire embrocher par les flèches sorties d'nulle part. Les filles savent vite faire leurs affaires.  
- Je ne suis pas sûr de connaitre une seule femme qui pourrait uriner au détour d'un couloir dans un temple abandonné alors qu'on venait d'échapper à la mort, que je marmonne en pensant à Émeline et Zéro.
- Haha. Tu fréquentes trop d'citadines alors.  
- Ouais, surement. Bon appétit.  
- Vas-y, réserve m'en, là, j'suis pleine.

C'est une vraie délivrance dont je savoure lentement chaque seconde. Je me sens revivre et rependre des forces. J'avale les bananes et côtes grillées en silence, ne reprenant ma respiration que pour prendre une autre brochette. « Hey, vas-y mollo, tu vas finir par croquer ta langue ! » me fait-elle avec un sourire moqueur. Le Retour à la Vie est une technique qui brule énormément de calories et vampirise mes forces. Pour récupérer, une seule façon. Manger.

- Pioouf, là, je ne dirai pas non à un vingt ans d'âge pour accompagner tout ce transit.
- J'ai d'l'eau minérale.  
- Vendu.

La ziggourat du Khan Thékléthicamonphimonain

Je suis en fin en paix avec mon existence. Adossé à un bananier, un cure-dent de fortune entre les dents, je pose pleinement un regard neuf et analytique sur notre environnement. Retour à la case départ, si je peux dire ainsi. Nous sommes effectivement en face de la porte Sud de la ziggourat. Nous y étions rentrés par la porte Est en suivant les chemins funéraires et échappant à quatre sortes de mort violente, tout ça pour rien.

- J'sais c'que tu penses.
- Étonne-moi.
- On n'a pas perdu not'temps.  
- J'ai environ quatre heures de ma vie qui protestent contre ton affirmation.
- L'Œil est bel et bien quelqu'part dans c'te pyramide.    
- C'est une ziggourat, pas une pyramide. Tu es sûre que tu es archéologue ?
- Argh ! Au diable, c'pas l'moment d'chipoter sur les mots ! Une ziggourat est une pyramide à degré !  
- J'ai toute confiance en toi et tu le sais. Nous avons essuyé un blocus et une bataille marine pour arriver jusqu'ici alors pas moyen d'abandonner. Sans oublier le meurtre de Daniel Jackson à Logue Town. S'il a réellement dissimulé L'Œil de Râ dans cette ziggourat avant de mourir, elle ne peut être que dans le tombeau de son seul locataire. Le Khan Thékléthicamonphimonain. Il nous faut juste trouver sa chambre funéraire.  

Au loin, on entend la détonation caractéristique d'un pain de dynamite. De plusieurs pains.

- Arrrgh, on est r'péré ! C'est c'maudit Prince Ashenbrenner et sa Confrérie !
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- Ils sont loin. Sur l'autre berge du fleuve Othétie. A cinq voir sept kilomètres. Nous avons un peu de temps.
- Tu crois ? Ils s'frayent un passage à coup d'dynamites. La jungle n'les ralentira pas longtemps. Viens, faut s'magner.
- Avec plaisir, tu sais quoi faire ? Parce que j'ai l'impression qu'on a passé plus de deux heures dans la forêt et deux autres dans la ziggourat pour rien du tout.
- Oh arrête d'râler, c'moi la fille ici !

Elle m'entraine vers la façade Ouest de la ziggourat puis passe un long moment à observer les pierres qui la composent. Rien d'inhabituel ou de particulier de mon œil -plutôt expert-. C'est du granit découpé en gros dés et surement empilés via des leviers. Ces hommes antiques avaient tout de même du panache, cette pyramide à degré doit faire dans les cent mètres de haut sur plus de trois cent à la base. Peu de monument sont aussi hauts de nos jours. A savoir qui est réellement préhistorique dans l'affaire...

Elle continue son inspection, loupe à la main. Cathia n'a ni la dégaine, ni le phrasé d'un archéologue et pour cause, c'en est pas une. Enfin, pas tout à fait. Exclue de toutes les grandes institutions archéologiques des Blues pour ses théories farfelues dites des "Anciens Astronautes", Cat' est pour ses pairs une archéologue de troisième zone juste bonne à excaver des ordures. Pour moi, c'est d'abord une amie de longue date mais aussi une perle sans commune mesure qui m'a déjà permis de rafler plusieurs millions grâce à de belles découvertes. J'ai toute confiance.

- Tu penses qu'il y a un quelconque indice sur le positionnement de la tombe ici ?
- J'suis certaine qu'il doit y avoir un passage secret qui conduit à la piaule funéraire depuis l'extérieur. Si j'le trouve, on s'ra pas obligé d'tout casser.
- Tu veux casser quoi ? Attends, tu as trouvé la chambre ?
- C'toi qu'avait raison. L'couloir du dernier voyage, l'fleuve des morts et le caveau. C'tait évident.
- Pas pour moi.
- Et pourtant ! Dans l'livre des Morts, l'âme du défunt doit d'abord franchir l'fleuve des morts puis passer par l'couloir du dernier voyage pour atteindre les cieux. Dans ma vie, j'ai d'jà exploré six ziggourats sans compter celle-ci. Et toujours, l'fleuve était symbolisé par un serpent d'eau géant -un mocassin- illustré sur les parois intérieurs.
- Et pas seulement. Ils ont mis une grosse cuvette pour bien le représenter !
- Ouais. J'n'ai jamais rien vu d'tel dans une pyramide Valantaise aupar'vant. L'âme doit trav'rser l'fleuve des morts, on est d'accord ? Et une âme, c'est immatériel, et ça s'élève. Quoi d'mieux pour symboliser c'te traversée que d'placer l'dit fleuve juste au-dessus du tombeau ? Hmmm ?

C'est terre à terre comme déduction mais pas tirée par les cheveux. La présence de cette piscine d'au moins trente mètres de long est incroyablement inhabituelle. Je me demande comment je n'ai pas pu en arriver aux mêmes conclusions qu'elle. A y repenser, c'est comme si les bâtisseurs nous hurlaient "le tombeau est en dessous !". D'ailleurs, comment sont-ils arrivés là ces crocodiles ? Ç’aurait dû être la première question à me traverser l'esprit ! Je suis trop lent aujourd'hui. « Faut chercher du côté de l'Othétie, y a sur'ment un passage vers l'intérieur d'la pyramide » me dit Cat' comme si elle avait lu dans mes pensées.
C'est à quatre pattes sur les berges boueuses que nous cherchons les signes d'une galerie souterraine. Ce cours d'eau est un obstacle de taille. Cinq heures auparavant, nous avions dû le traverser sur un radeau de fortune et avions coulé deux fois. Ses eaux sont tumultueuses et infestées de piranhas et de crocodiles. Espérons que la Confrérie connaisse les mêmes désagréments que nous.

- C'bon, Loth, j'l'ai trouvé !
- Ce n'est pas trop tôt. Vingt minutes à peu près que nous galérons dans la vase.
- J't'ai dit qu'la fille ici c'est moi ! J'dois m'plaindre et toi m'border !
- Les hommes aussi ont le droit de râler.
- Qu'est-c't'as au bras gauche ? Pourquoi tu t'grattes ?
- J'ai dû être mordu par une tique ou une saloperie du genre, répondis-je en soulevant la manche de ma chemise.
- Ouh, c'vilain ça ! Y a une putain d'boursoufflure toute rouge sur ton biceps. Oh, on dirait d'l'urticaire.
- L'adrénaline de ces dernières heures m'a empêché de la ressentir mais maintenant que la tension est un poil retombée, je l'ai remarquée. Ce n'est pas grave, ça ne fait que me démanger. Trouvons l'Œil et rejoignons les autres.
- Comment ? Ça fait plus d'une d'mi journée qu'on est séparé.
- Chaque chose en son temps Cat'. Viens.

A l'aide de nos pelles, nous dégageons la terre. Être aventurier, chercher des trésors perdus est un boulot vraiment salissant. Où sont les costumes trois pièces sur mesure, mes manteaux en peaux de bestioles en voie de disparition, où est ma cave de vins anciens, où sont mes cigares ? Ah non, je ne fume que très rarement, la plus part du temps pour contenter un client. Le reste, à l'occasion, je m'enroule et me fume un aiguise-méninge, une plante tout ce qu'il y a de plus naturelle et exempte de substances addictives. Que ne faut-il pas faire pour engranger un maximum ! Même après m'être hissé à la tête de deux organisations criminelles, et même que je dispose de plus de mille cinq cents sbires, je ne rechigne toujours pas à mettre la main à la pâte. Enfin, dans la vase.

Nous excavons la berge et mettons au jour une structure rectangulaire ressemblant à un égout. Enfin, une sorte de canal bâtie pour drainer les eaux de l'Othétie vers la ziggourat. Il est juste assez grand pour permettre le passage de deux humains à plat ventre. Quant à l'odeur, ineffable. Beaucoup de reptiles doivent s'y décomposer pour que ça empeste autant. En parlant de crocos, il n'y en a aucun sur le rivage en ce moment. Bon sang, sont-ils tous en train de se reposer à l'intérieur ? J'ai perdu ma montre dans nos péripéties mais vu la position du soleil derrière son manteau nuageux, il doit être dix heures. Onze au maximum. Et mon thermomètre de poche m'indique qu'il fait dix-neuf degrés. L'intérieur de la ziggourat doit avoisiner les trente grâce à l'effet de serre. Un endroit rêvé pour ces animaux à sang froid.

- L'équation, on la connait.
- Oui mais ça va devenir problématique si la seule solution c'est de s'enfoncer tête la première dans un piège mortel.
- T'as une autre idée ? L'passage qu'on a pris pour échapper aux crocos est désormais impossible à emprunter en sens inverse.
- Oui, j'aimerais être une taupe et creuser ma propre galerie. On cherchait la voie secrète qui nous conduirait directement dans la chambre funéraire. Celle-là va juste nous faire juste débarquer dans la fosse aux centaines de reptiles. C'est du suicide.
- Dans c'cas, on va r'venir à ma première solution. Casser des trucs.

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Je comprends où elle veut en venir. Se servant du bout de la pelle, elle tapote le sol en avançant. Les bruits mats nous indiquent la présence de pierre, donc du caniveau. Nous progressons ainsi jusqu'à la base de la ziggourat, quelque part sur sa façade Sud. « J’crois que c’est l’moment d’refaire jouer tes muscles mon vieux » me dit-elle d'une voix sournoise. Tu plaisantes, j'espère ? C'est ça que tu voulais dire par "casser des trucs" ? Je n'ai jamais aimé les jeux de construction du type Jenga ou autres. Idem pour les jeux de démolition. Qu'est-ce qui se passe si je détruis le mauvais bloc ? « Bah, la Confrérie s’ra l’dernier d’nos soucis dans c’cas là. En fait, on n’aura plus d’problème du tout… On s’en ira au paradis voir si les anges ont des trous d’balles… »

- Tout à coup, je préfère ramper dans le canal.
- Pssss, j'ai passé dix piges à étudier les civilisations pré-Dakaranéennes. L'architecture des ziggourats n'a plus d'secret pour moi ! Allez pète ce bloc-là. Seulement c'lui là !
- Hmmm. Je me demande si je ne devrais pas réviser la confiance que j'ai en toi...
- Allez, vas-y !

Je me résous à lui obéir. Pour une portée plus chirurgicale, je m'arme de Crépuscule, mon wakizashi. Trois gestes secs et je débite le dé de granit qu'elle a indiqué. Anxieux, je porte mon regard sur la structure pyramidale, m'attendant à un inquiétant grincement. Rien. Bon, une seule pierre, ce n'est rien, elles doivent être de plus quatre millions à composer la bâtisse. Il nous faut juste éviter de détruire les blocs porteurs. « Tu sais qu’chaque bloc pèse au moins deux tonnes ? Comment tu fais pou’les trancher comme ça ? » S’enquiert-elle. « L'entrainement » que je lui réponds.

Se défouler sur ces inertes dés de granit ou de calcaire n'a rien d'amusant. Nous cheminons mètre par mètre, parfois obligés de créer un passage juste assez étroit pour nous permettre de passer en rampant. Quelque fois, nous tombons sur des espaces vides, entre deux murs où nous trouvons des cadavres de petits félins. Emmurés vivants durant la construction. C'était censé apaiser les esprits et causer moins de morts sur les chantiers. Notre unique lumino dial restant éclaire notre parcours. Je fractionne la caillasse en petits cubes pour nous faciliter le déblayage. Cat' sait vraiment ce qu'elle fait, nous avançons sans peine.

- Ouais, enfin ! hurle-t-elle quand nous émergeons sur une petite plateforme en terrasse qui surplombe la cuvette aux alligators. Il fait toujours aussi sombre et notre lumino dial ne nous donne que peu de visée.
- Pouuuh, c'était pas mal usant mais le pire est à venir. On les dégage comment ? Ils sont des centaines !
- On n'a pas l'choix, vieux.
- C'est-à-dire ?
- Génocide crocodilien, magne-toi !

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A trois kilomètres en amont de l'Othétie

La forêt tropicale est vraiment une horreur pour une expédition de leur taille, s'agace Kurt Ashenbrenner. Bien qu'il fasse moins de vingt degrés, l'important taux d'humidité rend l’atmosphère étouffante et moite. Transporté par dix esclaves, son palanquin tangue occasionnellement. Au moins se dit-il, à l'intérieur de sa litière, la moustiquaire le préserve de ces satanés insectes qui pullulent sous la canopée. Mais il y a pire que les moustiques. Qu'est-ce qu'il peut la haïr, cette Cathia Sanchez ! Sans son ingérence, il aurait déjà en sa possession trois des quatre Œil !

- Ne vous inquiétez pas, votre Altesse, ils sont surement morts à l'heure qu'il est, baragouine avec déférence l'homme en face.
- Tant que je n'aurais pas vu leurs corps de mes yeux, je n'y croirais pas une seconde ! Bien sot serais-je, si je venais à sous-estimer mes adversaires. Sanchez n'est qu'un grain de sable dans mes engrenages, mais Loth Reich... Reich... Maudit soit-il ! Il a récemment acquis une importance conséquente sur les Blues.
- Rien qui puisse vous inquiéter. Vous êtes tout de même...
- Merci ! Je sais qui je suis ! Vous m'avez convaincu d'engager des moyens considérables dans ces recherches, il serait très fâcheux pour vous si Reich et votre misérable collègue venaient à me coiffer sur le poteau !
- Je vous en prie, milord, soyez sans crainte. Et puis Cat' n'a jamais été ma collègue.
- Vraiment ?! Le fait que vous ayez été tous deux les élèves de ce vieux fou de Jackson ne serait-il qu'une vague coïncidence ?
- J'étais son aînée de quatre ans. Je soutenais mon Doctorat qu'elle préparait encore sa Maitrise. Ensuite, elle a eu la stupidité de publier ses théories fumeuses des Astronautes. Depuis, je ne l'ai plus jamais revue. Le courant n'est jamais passé entre nous. Même Jackson l'a reniée.
- Et pourtant ! C'est bien à elle qu'il a choisi de confier l'Œil ! Votre mentor se méfiait de vous. Et on ne peut pas l'accuser de manquer de jugeote vu vos activités annexes.
- Ce n'était qu'un vieux sénile, milord. Un vieux mort.
- Bien mort.

PULUPULUPULUPULUPULUPULUPULUPULUPULU !!!

- Ashenbrenner.
- Mon Prince, c'est Chandler.
- Dis-moi que tu as trouvé leur corps.
- On a repêché quatre corps dans la baie, Sérénissime, mais y a pas ceux d'la fille et du binoclard. On a trouvé beaucoup d'sang sur la plage. Tell'ment que j'doute que l'zig qu'a versé ça soit en vie. On a tenté d'suivre les traces mais ça a disparu dans la jungle. 'tout cas, ça s'dirigeait vers l'nord. On vous rejoint ?
- Non. Les hommes de Reich doivent être à sa recherche. Déployez-vous sur la côte et si vous les voyez, coulez-les.
- Bien r'çu.

Gatchan.

- Alors, vous pensez toujours qu'ils ne nous ont pas devancé ?
- Ils sont blessés selon ce rapport. Je suis persuadé qu'ils n'ont pas pu aller bien loin.
- Je me demande si votre optimisme à toute épreuve relève du déni ou de la bêtise ! Rendez vous utile et dites au Maître d'Armes de flageller les porteurs. Que cette procession avance plus vite, nos adversaires ont semble-t-il déjà de l'avance sur nous.

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J'abhorre le gaspillage, bordel.
Mais je ne peux que m'y résoudre après avoir soupesé toutes les solutions à ma disposition. Il n'y aucun autre moyen de débarrasser la cuvette de ces reptiles. Le mieux serait encore d'attendre que la température à l'intérieur soit inférieure à celle de l'extérieur pour qu'ils s'en aillent dorer leurs écailles sur la berge mais le temps nous est compté. Arf, je hais la gratuité et je ne pourrais pas tous les manger. Mais je déteste surement plus l'idée de laisser un trésor à plus de cent millions de Berry dormir quelque part parce que j'aurais préféré sauver des crocos. Je suis partisan de la cause animale, mais pas à ce point. Si j'avais le temps, je les aurais écorchés pour vendre leur cuir également, mais.

Quand ma jambe fend l'air, c'est une lame tranchante qui nait. Gigantesque, verticale, elle taillade tout sur son chemin et répand une cascade écarlate. La lumière diffuse du lumino illumine le massacre. Une frénésie meurtrière s'empare des lieux, elle est quasiment palpable. Alors que j'atterris sur le passage qui nous a sauvé auparavant, les animaux que ma première salve vient de tuer sont déchiquetés par les survivants. Ayez un peu de jugeote et comprenez que vous êtes tous en danger ! Aucun repas n'est servi, c'est vous tous le repas ! Je virevolte, exécute plusieurs saltos en lâchant d'autres ondes tranchantes. C'est la technique idéale pour éviter de trop se salir. Je cours sur le passage et balaie la piscine avec des ondes. Les survivants vagissent au fur et à mesure que le nombre de tués augmente. Pour eux, c'est juste un festin.

Si autrefois la cuvette fut remplie d'eau, cette fois-ci, elle baigne dans un immonde liquide vermillon. L'odeur de sang est puissante et vous irradie les narines. J'ai dosé mes lames de vent de telle sorte qu'elles n'abiment aucun bloc. Après un moment à en balancer en salves sporadiques, le silence de la mort étreint les lieux. Les rares survivants sont repérés grâce aux bruits de déglutition et achevés. J'ai eu bien des surnoms depuis que je fais ce métier. Moine Hérétique, Chien de Givre, Pachyderme Écarlate, maintenant, on pourrait ajouter la "Terreur des Crocodiles." Risible et dégueulasse. Avec mes cheveux, j'aide Cat' à descendre de la terrasse.

- C'tait très grisant. Pauvres bêtes.  
- Ne fais pas genre, ça ne te dérangeait pas.
- C'juste un mal nécessaire. L'caveau est en d'ssous et tout c'sang va nous aider à trouver où. Vérifie les dalles, l'sang qui s'insère dans les interstices, essaie d'repérer s'il y en a qui goutte.  

Ce n'est pas une bonne nouvelle que le sang puisse perler vers le bas. Ça voudrait dire qu'en période de crue, le caveau pourrait être inondé. Le temps aurait-il affaibli les matériaux de liaisons des blocs ? Pas trop, espérons-le. Nous pataugeons dans cette bouillie cramoisie, dégageant comme nous le pouvons cadavres et viscères à la recherche d'un quelconque indice d'une exsudation. Rien. Il est probable que nous l'ayons raté vu la taille de cette piscine. Nous devons adopter des mesures plus énergiques alors je demande à Cat' de sortir de la cuvette. Je me place au milieu, me concentre et saute. Je pirouette sur moi-même comme une toupie, les pieds joints. Mon mouvement engendre une lame d'air tourbillonnante autour de mes jambes. Première fois que j'essaie ce truc, je suis étonné que ça marche aussi bien. Je voulais une foreuse, je l'ai. Quand je touche la dalle, je m'y enfonce comme un couteau chauffé dans du beurre. Mes ondes continuent de forer puis je sens à nouveau ce vide familier sous mes semelles.

Je chute.

Et retombe sur mes pieds.

- J'ai trouvé le sépulcre, Cat' ! *tousse* *tousse*
- Attends, j'viens t'rejoindre. Fais attention, utilise le Ventio Dial pour aérer la pièce, tu sais pas quelle saloperie de bactérie est renfermée d'dans.
- N'est-ce pas de cette manière que meurent les archéologues qui découvrent pour la première fois des tombeaux millénaires et rapidement après, la presse accuse la "malédiction de la momie" ?
- Ouais. Oh c'pas profond. Trois, quatre mètres. Tiens allume les cierges, on va bien voir.  

La pièce est vaste, parfaitement carrée. Au milieu trône un massif bloc de pierre rectangulaire. C'est du grès, totalement blanc, on dirait de la craie. Il a été taillé et vidé pour accueillir le sarcophage qui lui même contient un autre cercueil, sûrement.  Nous nous contentons de regarder pour l'instant, forts de notre expérience passée. Des pièges et des flèches volantes pourraient être dissimulées quelque part. Dans les coins de la pièce sont entassés des tas de babioles. Du mobilier funéraire, de nombreux oushebtis et statues. « Eurk, j’crois que j’viens d’voir une momie d’fœtus » mâchonna-t-elle accroupie à examiner un tas de vases. « J'avais lu qu’Akouthicamonphimonain, la femme d’Thékléthicamonphimonain a accouché d'une fille mort-née. Maint’nant, j’sais c’qu’ils en ont fait… »

- J'ai trouvé les vases canopes. Y en a quatre. Il manque quelque chose dans cette chambre...
- Les pierreries. Les joyaux. J'vois rien qui r'ssemble à d'lor.
- C'est normal ? Même s'il fut le roi le plus haï de l'histoire de Valantis, je pense que son fils aura doté la dernière demeure de Théklé avec le nécessaire pour son voyage dans l'eau delà.
- Ouaip, c'sûr.  
- Ce serait le Professeur Jackson qui aurait dérobé les bijoux ? Nous sommes venus ici en supposant que sachant sa vie menacée, il aurait caché l'Œil dans un endroit que ses ennemis ne pourraient soupçonner. Il est le premier à avoir découvert cette pyramide il y a cinquante ans et malgré plus de vingt ans de fouille de différentes équipes d'archéologues, aucune tombe n'y a jamais été retrouvée. Et la plupart de ces recherches ont été parrainées par Jackson. Sans insulter sa mémoire, on pourrait légitimement supposer qu'il a conduit les recherches dans une impasse pour cacher le fait qu'il ait dérobé les objets de valeur dans la chambre.
- Non.  
- Je sais que pour toi c'était un mentor, voir même un père mais...
- Non j'dis ! Tu n'le connais pas aussi bien que je l'connais. Il n'vivait que pour l'archéologie, chaque babiole, chaque morceau d'vase était son enfant. Il aurait pu s'faire des milliards, des milliards j'dis ! Il n's'agit pas seul'ment d'l'Œil d'Râ, ou des trois autres Yeux, Loth. Durant sa vie, l'vioque a exhumé des trésors d'une pureté indécente sans jamais en toucher mot à qui que c'soit. C'taient ses enfants, il n'voulait pas les voir vendus ou fondus.  
- Ouais, je sens que je ne l'aurais pas aimé.
- Toi t'es un marchand et contrebandier d'art, normal. Crois-moi, jamais l'vieux aurait touché à ses bébés pour quelqu'raison que c'soit.  
- Donc quelqu'un d'autre a visité cette tombe ?
- Ouais. Ouvre l'bloc si t'plait.  

Je tonifie mes muscles et pousse le couvercle en grès. Ce n'est pas ma première exhumation de momie, c'est pour cela que je remarque immédiatement l'absence de cette odeur caractéristique. Un mélange de café et de parchemin moisi. Et pour cause, le bloc est vide. Aucun sarcophage à l'intérieur, aucun cercueil, aucune momie. Pantois, j'adosse le couvercle au mur et reviens inspecter l'intérieur creux avec Cat'. Le sarcophage y reposait bel et bien, il y a laissé sur la pierre une empreinte rectangulaire. Une momie au marché noir, c'est au bas mot trente millions de Berry alors je comprends la personne qui l'a déplacée. Sans compter les bijoux sertis et l'or qui devaient reposer en pagaille ici. De quoi faire tinter ses bourses pour très longtemps. Mais il y a quelque chose qui ne colle pas au modus operandi des pilleurs de tombes "normaux".

- Pourquoi ils ont laissé les statues et le mobilier ? Ça ne vaut pas l'or certes, mais ce n'est pas dénué de valeur.
- Cam'ron. C'est forcément lui.  
- Cameron ? Le Dr Cameron Mckay de l'institut archéologique de Koneashima ?
- Lui-même. C'mon ainé, on a tous été les élèves du vioque. C'tait son élève l'plus en vue en fait.  
- Oui, j'ai entendu parler de lui. Il a découvert la cité interdite Kelowna et les ruines de Langara.
- "J'ai" découvert Kelowna, rectifia-t-elle avec amertume en grinçant des dents.
- Ooh ! Il aurait volé ton succès ?
- J'tais en troisième année et j'faisais des fouilles dans les Atolls Kalbans à mes heures perdues. Quand j'lui ai parlé d'une piste prometteuse, p't'être d'la cité interdite d'Kelowna, il m'a assuré qu'il fallait tout vérifier avant d'faire une annonce. Qu'y avait des r'quins dans c'métier, et tout et tout. Alors que j'tais en exam à l'université, il en a profité pour aller dans les Atolls, continuer mon boulot et appeler la presse.  
- Il m'a l'air d'une belle pourriture. Tu en as parlé à Jackson ?
- Nan mais j'crois qu'il l'savait. J'aurais pas pu crier ça au monde, Cam'ron avait d'jà une p'tite célébrité avant Kelwona, on aurait pensé que j'voulais m’approprier son taff.  
- Attends, attends ! Ce ne serait pas lui qui aurait filé les infos concernant l'Œil au prince Aschenbrenner par hasard ?
- J'le soupçonnais d'puis l'début, mais j'voulais pas y croire. Qu'il soit pourri, ouais, mais il aurait pas... il aurait pas pu... marmonna-t-elle au bord des larmes, agenouillée dans la poussière millénaire.

J'avais déclenché une guerre dans la mafia de North Blue pour venger l'honneur de mon maître et lui, qu'a-t-il fait ? Il a fait kidnapper le sien, l'a fait torturer jusqu'à ce que mort s'en suive pour lui arracher des infos. Je savais que c'était surfait l'amour entre un maitre et son élève.  
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- On s'appesantira sur sa trahison plus tard. Allez relève-toi ma vieille, ressaisis-toi ! Si ça se trouve, ton Cameron accompagne le prince dans sa cabale contre nous. Tu dois venger ton maître et l'une des manières, c'est de trouver l'Œil avant eux.
- J'préfère lui arracher la langue et l'enfoncer dans sa gorge...  
- Tu étais plus douce avant de t'exiler chez cette tribu de chasseurs-cueilleurs. Réfléchissons. Si Cameron a effectivement visité cette tombe, c'est à l'insu de Jackson.
- Sans doute ! L'vioque notait tout c'qu'il faisait, c'tait compulsif chez lui. Sauf qu'il écrivait en code et pour décrypter, fallait la clé. J'pense que comme moi, Cam'ron a dû d'viner la clé d'décryptage. Ensuite, lui suffisait d'voler l'journal d'cette époque pour savoir où s'trouvait l'tombeau.  
- Comment ça "comme toi" ?
- Un jour, j'ai ramassé une vieille note du vieil homme, une feuille volante qu'il a jeté à la poubelle. J'ai passé trois mois d'ssus à essayer d'la déchiffrer. A la fin, j'ai trouvé qu'il utilisait un système par substitution alphanumérique.  
- Okey. Donc d'une manière ou d'une autre, Cameron Mckay a découvert l'emplacement du tombeau de Téklé grâce aux notes de Jackson et serait venu ici dans son dos pour tout piller. L'or, les bijoux, la momie.
- L'or, ça s'fond. Les pierres, ça s'retaille. La momie, ça s'vend à des collectionneurs. Mais la poterie, l'mobilier, c'plus commun, ça risquait d'se r'trouver sur l'marché noir chez n'importe qui. C'pour ça qu'il les a pas pris, pour pas que l'vioque tombe d'ssus un jour.  
- Intelligent. Reprenons. Je suis Daniel Jackson, plus éminent spécialiste des civilisations pré-Dakaranéennes des Blues. Je suis aussi le Grand Maître de l'Ordre de l'Œil.
- Y a aucune preuve qu'cet ordre existe.  
- Considérons que si. Je sais que ma vie est en danger, que des gens en veulent au plus précieux trésor en ma possession, l'Œil de Râ. J'ai quelques doutes, je n'ai pas totalement confiance en mon élève le plus proche. Je tente donc de contacter mon autre élève, celle en qui j'ai le plus confiance. Mais voilà, on a coupé les ponts, elle est injoignable, exilée depuis des années dans une forêt à l'écart du monde.
- Pfffff.  
- Je n'ai alors qu'une seule solution, cacher l'Œil dans un endroit sûr. Pourquoi pas dans la ziggourat de Thékléthicamonphimonain, le vingt-troisième Khan de la seizième dynastie de Valantis ? Après tout, moi seul ai percé le secret de sa chambre funéraire. Mais voilà, quand j'arrive ici et me faufile jusque dans le tombeau, je suis épouvanté. L'or, disparu. La momie, envolée. Je comprends que mes bribes de soupçons étaient fondés, que mon élève le plus célèbre est en fait receleur d'antiquités. Combien d'autres de mes trésors a-t-il dilapidé ? Je ne peux pas cacher l'Œil ici, sauf j'ai déjà laissé à Cathia des indices qui l'emmèneront en ces lieux. Fatalement, il me faut lui laisser un autre indice.  
- Mais qu'est-c'que tu glandes ?  
- Psychologie comportementale. Je me mets dans la peau de Jackson. Ce qu'il aurait fait et pensé. Je l'utilise souvent dans mes enquêtes criminelles pour me glisser dans la tête des tueurs.
- Et il fait beau dans leurs crânes ?  
- Nan. Horrible.  
- J'imagine.
- C'est l'indice écrit à l'encre invisible dans sa résidence d'été qui nous a conduit ici, Cat', et nous savons qu'il l'a gribouillé avant de partir. Il est venu là, a fait ce qu'il avait à faire, puis a été capturé à Logue Town et torturé par les hommes du Prince. Mais il ne leur a lâché aucune info', autrement, ils ne nous aurait pas poursuivi pour te mettre la main dessus.
- Donc s'il a changé d'plan en voyant que l'tombeau n'était plus sûr, il aura laissé un indice.  
- Forcément.
- J'hais c'vioque et sa culture du secret !  

Elle l'aimait comme un père plutôt. Quand elle publia sa célèbre et controversée théorie des Anciens Astronautes qui soutenait que les ziggourats et autres pyramides des civilisations antiques avaient en réalité été construites par des peuples technologiquement très avancés, venant de l'espace et de la lune, le Prof Jackson se désolidarisa d'elle, comme tous les autres universitaires. Que les autres lui tournassent le dos, elle devait s'en ficher, mais le rejet de son mentor fut une couleuvre difficile à avaler. A partir de ce moment où elle devint persona non grata dans la communauté des archéologues. Elle s'isola et coupa les ponts avec tout le monde pendant une décennie. N'empêche, quand elle apprit que le corps mutilé de Jackson fut découvert dans un égout de la "ville du Début et de la Fin", elle refit surface pour éclaircir ça.

Cat' fait les cents pas dans la pièce carrée. Ses pas soulèvent de petites volutes de poussières. Elle réfléchit si intensément que je peux entendre les rouages de son cerveau crisser. Un indice est là, juste sous nos yeux, quelque chose qu'elle seule peut déchiffrer. Elle commence par tâter les murs comme elle le fit sur la façade de la ziggourat. Nous avons dû démolir le plafond pour atterrir là, mais il y a un passage secret qu'ont emprunté Cameron et Jackson. Au bout de cinq minutes de palpation, elle le trouve finalement. Une porte coulissante arborant l'illustration d'un dieu glisse sur le coté, laissant entrevoir un petit passage étroit. « C’par ici que l’vioque est v’nu et parti. Y a encore des traces dans la poussière. Mais ça n'nous dit pas où il a laissé l'Œil. » Elle referme la paroi coulissante et recommence ses cents pas. Je me tais et la laisse réfléchir. Elle murmure des choses. « Ça colle pas…. Ça colle défintiv’ment pas ! J’l’pensais d’puis que j’ai vu c’te piscine mais là, c’trop flagrant. Oh non… Serait-ce possible que… » Dans ses yeux, je reconnais l'illumination de l'idée de génie. Mais il y autre chose, elle me regarde étrangement, intensément.

- J'hais c'vieillard putain !  
- Tu as trouvé où il aurait pu dissimuler l'oeil ?
- Ouais et tu vas pas y croire mais c'toi la clé !  
- Ah bon ? En quoi ?

Je ne le saurai peut-être jamais. Une explosion me martyrise les tympans et tout à coup, la chambre se remplit de gaz. Je ne dois pas respirer ça, je dois sortir. Sauf que mes muscles refusent de m’obéir, et que ma vision se trouble.
Merde, non !
Je ne vais pas me faire avoir comme ça !
Putain, mes muscles, mes cheveux, répondez !
Pourquoi tout devint noir, merde !
Cathiaaaaaa !
Cat....

________________________________________
   

La baie est jonchée de cadavres signe des violents combats qui y eurent lieu. Les vagues ramènent sur le rivage les morceaux épars de la nef coulée. Les Fumiers de Loth sont maîtres des lieux et sécurisent la plage. Un canoë à aube vient déposer deux femmes sveltes et élancées. Leur dissemblance est frappante. Émeline Reus est la moins grande, coiffée d'un chignon que transperce une longue aiguille et habillée d'un Furisode. Avec son long katana à la ceinture, elle semble tout droit provenir de Wa no Kuni alors que l'autre, Aella "Zéro" affiche une tenue résolument citadine -tailleur et hauts talons- et laisse ses cheveux châtains nonchalamment cascader sur ses épaules. Cette dernière est le Numéro Deux de l'organisation Shadow Law de contrebande de Dance Powder que dirige Loth. A leur rencontre vient Nox, alias Damask, le commandant des Fumiers.

- Tout est sous contrôle.
- Des pertes ? s'enquit Aella.
- Seulement la nef. On a sauté avant qu'ils nous la coulent mais une fois débarqués, ils n'ont pas fait l'poids. J'ai une très mauvaise nouvelle, venez voir.
- Oh non, non non non ! Putain !
- Non, inutile Eme'. Elle est morte. Depuis plus d'cinq heures si on s'en fit à la rigidité cadavérique. Elle a perdu beaucoup d'sang.
- Et l'Œil ?
- Et Loth, plutôt, tu veux dire non ???
- Aucun signe des deux, malheureusement. Le prince se dirige vers le nord où se trouve la pyramide. Il a tout une colonne de mercenaires avec lui.
- Serait-ce prudent de nous lancer à leur trousses ? Ça ne ferait qu'augmenter les risques de confrontation et inutile de rappeler qu'on y a déjà perdu un bateau. Vu la configuration de l'archipel, au lieu de perdre du temps dans la jungle, nous pouvons contourner l'ile pour rejoindre l'embouchure de l'Othétie et le remonter non ?
- Si c'était aussi simple, tu penses bien que c'prince geignard n'aurait pas ramené son cul dans cette jungle ? L'embouchure est parsemée de rapides et de caillasses, on ne peut pas remonter à contre courant.
- On a un bateau à aubes. Et puis, j'ai les navigateurs de Carci' dans mes hommes, les meilleurs des Blues. Il est primordial de gagner la ziggourat et de retrouver l'Œil avant eux.
- Attendez, attendez ! Je n'arrive pas à en croire mes oreilles ! C'est quoi votre priorité dans l'histoire ?
- Mettre le prince et sa clique hors d'état de nuire.
- Retrouver l'Œil de Râ.
- Quoi ? Et Loth ? Vous vous en fichez ? demanda Émeline éberluée. ON VIENT DE RETROUVER CAT' MORTE ! LOTH PEUT ÊTRE ÉGALEMENT BLESSÉ, A AGONISER SOUS UN ARBRE !
- Baisse d'un ton je t'en prie ! Les ordres de Loth ont été clairs, l'Œil est la priorité absolue.
- Ma mission à mes hommes et moi c'est d'circonscrire la menace que représente le Prince et pour l'instant c't'un échec cuisant. Je dois me rattraper, c'est ce que Loth aurait voulu.
- Je t'interdis de parler de lui comme s'il était mort ! Moi je vais le chercher, si vous n'en avez rien à foutre de lui.
- Les ordres...
- TU N'AS PAS D'ORDRE A ME DONNER ZÉRO ! Je le seconde dans toutes ses activités ! Toi tu n'es que son second dans Shadow Law !
- Mouais... Loth aurait vraiment dû hiérarchiser tout ça... Voilà qu'on part en couille dès qu'il n'est pas là, mâchonne-t-il en voyant Émeline s'éloigner d'un pas furieux telle une tornade.
- Plusieurs chemins mènent à Marijoa, Nox. Nous allons tous vers le nord, apparemment. Retrouvons-nous-y.
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Émeline fulmine. Jamais elle ne les comprendra ces deux-là, leurs principes à la noix, toujours attachés à leur "mission", leur "code", bref, que des conneries ! A quoi ça sert de suivre des ordres donnés par un mort ? Non, elle doit s'arrêter d'y penser en ces termes. Loth est vivant, c'est sûr, elle le sent. Non, elle le sait ! Il ne peut mourir ainsi, il en a vu d'autres et toujours, il s'est relevé.
En un coup de katana, elle éclaircit son chemin à travers la jungle. La végétation est touffue, l'atmosphère gorgée d'humidité et le sol, vaseux. Elle avance rapidement mais avec précaution, suivant les traces de sang qu'elle a repéré près du corps de Cathia. De petites gouttelettes séchées, tantôt sur le sol, parfois sur des écorces. Quelques fois, ce sont des branches cassées ou des herbes piétinées qui la renseignent sur la direction qu'a pris le blessé.

Elle est un peu soulagée, il n'y aucun épanchement massif de sang tendant à indiquer que Loth est sérieusement touché. D'ailleurs se dit-elle, plus pour se rassurer qu'autre chose, le sang qu'elle piste pourrait appartenir à Cathia. Ayant fait l'impossible pour la sauver, Loth serait recouvert de son sang qu'il transférerait passivement le long de sa route. C'est trop triste pour l'archéologue, elle ne méritait surement pas ça, pense Eme' avec émotion. Elles ne se connaissaient que depuis cinq jours mais elles avaient appris à s'apprécier. Drôle, directe et passionnée, Cat' était une personne magnétique, le genre qui s'attire directement la sympathie des autres. Elle désirait élucider et venger la mort de son maitre, sans savoir qu'elle creusait là son propre tombeau. Cet enfoiré de prince ! Il ne perd rien pour attendre !

Elle rage et s'inquiète de plus belle, et pour cause, la piste sanguine s'est rafraichie. Accroupie près d'un bosquet de mûres sauvages, Eme' contemple avec malaise la petite marre de sang qui teinte les végétaux. C'est tout frais, liquide et encore chaud. La personne qui a laissé ça saigne abondamment. Son cœur s'emballe, elle presse ses pas et suit la trainée qui se fait de plus en plus importante à chaque mètre. Ici, les fleurs sont écrasées, la personne a dû s'y laisser tomber. Mais elle s'est relevée, a titubé en écrasant ces lianes puis a continué son chemin. Voilà, dans cette clairière, Émeline aperçoit le blessé, avachi qu'il est au pied d'un séquoia géant.
Loth ?

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Par équipe de quatre de sorte à couvrir les points cardinaux, Nox et ses Fumiers avancent dans la jungle, fusils en avant. Le chef de la branche armée de Shadow Law rumine son échec. Son rôle est de prévenir toute menace contre Loth et ses avoirs mais dans ce cas-ci, il a été moins efficace qu'un pompier. Alors que la caravelle de Loth réussissait à s'extirper de l'étau ennemi, l'escadre de deux nefs transportant les cent Fumiers fut bêtement piégée dans les Cinquièmes Mordants par la flotte du Prince. Loth et Cathia prirent ainsi de l'avance sur eux, une avance vers la mort ? Il espère que non, il côtoie Loth depuis longtemps et le petit a de la ressource. Un jour, Nox en est certain, il sera aussi puissant que le fut le Gila au paroxysme de son génie.

En tête de pont de son escouade, il lève son poing gauche. Quelque chose a bougé par devant. Un animal ou une embuscade ennemie ? L'urgence de la situation a exclu l'utilisation d'éclaireurs, multipliant ainsi le risque que le gros de son armée ne tombe dans un guet-apens. Ce prince est vraiment retors et ambitieux. Il ne reculera devant rien pour s'approprier l'Œil de Râ. Déjà qu'il en a deux en sa possession ! Il complote pour s'emparer de la Principauté de Myranah et pour ce faire, récupérer les quatre Œil est une condition sine qua none.

Ce n'est pas un animal, ça se déplace de manière coordonnée. Un, deux, quatre, six. Ils sont six. Avec leur langage des signes, Nox éparpille sa propre escouade. Les vingt-quatre autres patientent, dissimulées dans la végétation. Tel une chouette dans la nuit noire, il se faufile sans bruit, furtif. La cible est cachée à ses trois heures, emmitouflée dans une combinaison noire qu'il remarque à travers les feuillages. Tout à coup, Nox sent derrière lui une présence. Il perçoit le sifflement caractéristique d'un couteau qui fend l'air. Il ne prend pas la peine de se retourner. Il continue sa progression, surprend l'ennemi tapi et lui plante une lame en travers de la gorge. Sa tête est maintenue dans la gadoue pour étouffer ses borborygmes. Des mercenaires, juste des amateurs ces gars, ils ne font pas le poids face à l'expertise des Fumiers. Nox jette un coup d’œil derrière, son subordonné est déjà en train de se débarrasser du cadavre de celui qui voulait le poignarder quelques secondes auparavant. Occupé à vouloir surprendre Nox par derrière, il n'a pas remarqué l'ombre dans le sillage de sa cible. Tel est pris qui croyait prendre.

De sa position, "Damask" entend les bruissements de l'Othétie. Il semblerait que le prince ait disposé des hommes pour les empêcher d'atteindre l'autre rive et la pyramide. Ils vont devoir progresser à tâtons et surtout en silence pour ne pas trahir leur arrivée. Et à ce jeu-là, les Fumiers sont parfaitement rodés. D'une pichenette, il ordonne l'émiettement de l'intégralité de son armée. Cent assassins furtifs se dispersent dans la jungle. Plus il éliminera les hommes du prince et plus facile sera la suite des opérations. Le mot d'ordre est simple.
Épurer.

________________________________________
   

L'émotion n'a pas sa place. Flanche, doute, et tu échoueras. Les sentiments sont des poisons qui émoussent l'esprit, cancérisent le sens critique et enfantent l'impulsivité. L'objectif, c'est tout ce qui importe. Oublie ce paramètre et tu laisseras le hasard et la barbarie décider du sort de Myranah. Tu n'as pas le choix, tu ne dois pas échouer.
Voilà que se profile l'embouchure de tous les dangers tant redouté par Nox. Risible. Tant que tu ne joues pas, tu ne peux pas gagner. L'Othétie prend sa source dans un mont à l'extrême Ouest de l'ile et vient se jeter dans East Blue via un large delta en pente parsemé d'une constellation de minuscules îlots colonisés par des herbes folles. Sans compter que l'inclinaison du lit crée des rapides.

- On est arrivé, m'dame Zéro.
- Arrête de souligner l'évidence ! Débarquez les boutres, on va couper par le delta pour accoster au plus près de la ziggourat.
- Combien d'boutres ?
- Toutes.

A quoi ça sert d'avoir les soi-disant meilleurs navigateurs des Blues s'ils ne peuvent pas franchir un petit rapide de rien du tout ? Dix boutres à aube sont déchargés du galion, elles peuvent accueillir douze personnes maximum. Tu prends place et tu ordonnes le départ. A l'unisson, les roues à aube tournoient, brassent la mer et font avancer les embarcations. Tu es au centre de la formation, tes hommes tiennent à te protéger. Soit, normal même, tu es le cerveau qui guide les opérations, tu dois être dorlotée, chérie car sans toi, c'est le corps entier qui dépérira. A l'approche des eaux tumultueuses de l'embouchure, le navigateur en chef lève l'index au ciel. Les roues à aubes sont arrêtées et des rames fusent de partout. Tu observes, calculatrice et attentionnée, les célèbres navigateurs du clan Wave de Carcinomia dans leurs œuvres. Heureusement que Loth, dans son désir brulant de vengeance, n'a éliminé que la famille dirigeante. Ç’aurait été du gâchis de se priver de tels talents. La vengeance... Encore un fibrome créé par les émotions.

Tu les voies, partagé entre admiration et satisfaction. Ils suent abondamment, leurs visages crispés par l'effort et la concentration. Les eaux ne sont pas faciles, remonter à contrecourant est une épreuve. Les pagaies s'enfoncent dans la flotte avec expertise, l'embrun te gifle le visage, tu ressens le sel sur tes lèvres. Tu es trempée par la cascade qui s'abat sur toi. Après une lutte acharnée où le courant a systématiquement refoulé les assauts des boutres, le fer de lance de la flottille trouve le point faible du delta. L'endroit par lequel passer pour optimiser la remontée. En file indienne, tous lui emboitent le pas. Ça c'est fait que tu te dis, la pente est derrière vous, le seul adversaire désormais, ce sont les rochers et comme toujours, le courant contraire. Il entraine un boutre en bordure de formation s'écraser contre un python rocheux. Le "Crac" est ignoble, l'équipage lâche un cri rapidement étouffé par l'eau qui l'emporte. Sans cure, tu ordonnes de poursuivre le chemin. Personne ne peut rien pour eux et s'ils sont de bons navigateurs, alors ils sont aussi de bons nageurs. Ils seront éjectés dans East Blue où le galion les récupérera. Si tant est qu'ils ne boivent pas la tasse avant.

Au loin, la ziggourat transperce la canopée, ses briques jaunes reflètent le peu de rayon de soleil qui s'échappe du manteau nuageux. L'Œil est là-bas et c'est tout ce qui compte. L'armée ennemie aussi. Mais tu n'as aucune crainte. Qui a dit que les navigateurs ne font pas de bons chasseurs ?

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Ce n'est pas Loth. Émeline déchante rapidement. C'est un ennemi, un des principaux hommes de main du Prince, celui qui commandait l'escadre qui a pris en chasse la caravelle de Loth après qu'elle ait réussi à s'échapper du blocus dans les Cinquièmes Mordants. C'est sans doute lui qui commandait l'équipe qui les attendait sur la plage, celle qui a coulé la nef des Fumiers. Est-ce lui également qui a tué Cathia ? Eme' pressent qu'il n'y est pas étranger. Qu'a-t-il fait de Loth ? Non, un minable comme lui ne pourrait même pas égratigner le Moine Hérétique.

- Tu n'en as plus pour longtemps, les Fumiers ne t'ont pas raté. Dis-moi où est Loth !  
- Pitié. Aide. Moi. qu'il baragouine, en pissant le sang.
- OU EST LOTH ?! qu'elle vocifère en réponse. Quelques oiseaux s'échappent à tire d'ailes.
- Py.py.ramide.
- Il est allé vers la pyramide ? Prévisible, mais il n'est pas blessé ? Et vous ne l'avez pas capturé ?! Hein ? Super, super ! Putain, j'suis soulagée ! Putain ! Mais, le prince en a toujours après lui, hein ? Dépêchons !
- Aide...
- Bien sûr ! Où avais-je la tête ? Je vais t'aider.

Iai.
Un crissement. Un reflet.
Quand la tête de Chandler dégringole sur le sol, Émeline est déjà loin. Ses seules pensées focalisées sur l'homme de sa vie.
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J'émerge. Ma vision est floue, je n'ai pas mes lunettes. Où suis-je ? Qu'est-ce que je fais là ? J'essaie de bouger, pas moyen. Par les poignets, je suis entravé à une chaise. Ma respiration est douloureuse, je tousse plusieurs fois. A mesure que je me dégage les bronches, des souvenirs reviennent, m'assaillent. La ziggourat. La chambre funéraire. Le gaz. « Cat’ ? Tu es là ? Cathiaaaaaaaaaaaa ! » Je hurle de tous mes poumons puis me tais la seconde d'après. Ma joue surchauffe, caressée par une claque. Je m'en prends une seconde sur l'autre joue. Mon tortionnaire rigole et place sur mon nez mes lunettes. Enfin, je vois clair. Je vois le prince Kurt Ashenbrenner et celui dont Cat avait deviné la présence, le docteur Cameron Mckay.

- Qu'avez-vous fait de Cathia ?  
- Qu'avez-vous fait de Cathia, m'imite-t-il avec une voix aiguë et des manières.
- Où est-elle ? Ma voix est égale à elle-même, calme, juste plus froide qu'à l'ordinaire. La colère est loin pour l'instant, et ils ont intérêt à ce qu'elle le demeure.
- On voulait vous demander la même chose. Nous vous avons entendu lui parler puis après plus rien, vous étiez seul dans le tombeau. Par où s'est-elle échappée ?
- Je l'ignore. Et je pense que vous la détenez et me faites marcher.  
- A quel escient ? C'est elle qui nous intéresse. Elle qui sait où est caché l'Œil.
- N'excluons aucune possibilité Docteur, il peut bien le savoir aussi. Loth Reich n'est pas n'importe qui, c'est l'un des tous meilleurs limiers des Blues. Alors, Sir Reich, allez-vous nous aider à trouver l'Œil de Râ ? Ou nous le remettre si vous le détenez déjà ?
- Ne posez pas de questions stupides, Kurt, vous valez mieux que ça.  

PAF !
Encore une gifle. Mes oreilles crépitent.

- Respecte son rang sale chien !
- Mckay, donc de professeur de renommée en archéologie, vous êtes passé à homme de main d'un prince gâté et comploteur ? satirisai-je, rictus en coin. J'expectore un épais glaviot sanglant.
- Tu ne sais pas à qui tu as affaire !
- Je crois que si. Kurt Ashenbenner, trente-cinq ans, troisième dans l'ordre de succession à la Principauté de Myranah, homme d'affaire très influent des Blues à Marijoa, a bâti sa fortune sur la commercialisation d'antiquités, de tableaux de maitres et de grands crus. A toujours comploté pour prendre le pouvoir à Myranah.  
- Voici un portait succinct et bien peint. Dommage que ça ne se vende pas. C'est hypocrite de votre part de dénoncer mes velléités expansionniste, Sir Reich. Ashura, vous avez marché dessus. Pour la justice, oui, enfin, c'est ce qui se dit. Dans le souterrain, il se dit plutôt que vous avez juste éliminé un rival.
- Ah non, je ne faisais que présenter ce que j'avais de vous. Je ne porte aucun jugement, je suis beaucoup de choses mais pas hypocrite. Si vous désirez Myranah et les quatre Œil, vous devrez nous passer sur le corps !  
- Mon cher, vous pensez vraiment que je ne suis pas prêt à tout ? Emmenez-le ! Où qu'elle se trouve, cette pouffiasse va devoir se montrer !

Ils m'ont drogué. Je ne sens plus mes membres, j'ai autant de force qu'un prématuré de six mois. Manu militari, ils me trainent hors de la tente. C'est un véritable camp de tentes qu'ils ont dressé au pied de la ziggourat. Une place fortifiée d'empilements de sac de sable et de troncs d'arbres arrachés à la forêt. C'est toute une armée qu'il a emmené avec lui. Je ne suis pas inquiet mais l'absence de mes forces m'ennuie fortement. D'ailleurs, je m'interroge sur mon état physique. Ce n'est pas normal que ce gaz ait eu raison de moi aussi rapidement, je me sentais diminué avant ça. Un effet de l'utilisation excessive du Retour à la Vie ? Ils n'auraient jamais pu me capturer en pleine possession de mes moyens. Mais ce bon repas d’alligator aurait dû me redonner de la vigueur. C'est incompréhensible...

Par les bras, deux gardes me tirent vers le littoral. Je ressens une gêne sur mon biceps gauche, là où j'avais remarqué la poussée d'urticaire. J'ignore toujours ce qui m'a mordu ou piqué mais tout à coup, je m'inquiète. Une créature venimeuse ? Nous n'avons affronté aucun animal de grande taille à part les crocodiliens mais un insecte autochtone doté d'un certain venin n'est pas à exclure. Venin, bactérie ou virus. Merde, oui là je commence à me faire du mouron. Je dois sortir de là et me faire examiner par Abigail. J'espère qu'elle est restée avec Eme' et les autres, ce ne serait pas le moment qu'elle parte en vadrouille de son côté.

- Allez, ligotez-moi ça ! Ordre du prince !

J'oppose de la résistance. Du moins j'essaie. Sans succès. Ça ne me ressemble pas de paniquer mais là, j'avoue que je me sens au pied du mur. Je n'ai pas peur d'eux, ni de ce qu'ils pourraient me faire ou pas. J'ai peur de ce qui est déjà en moi. Et c'est mon instinct de limier qui me l'affirme. J'aurais dû considérer cet hématome sur le bras quand j'en avais le temps. Et du temps, je n'en ai pas à perdre à jouer avec eux. Mais ils m'imposent leur force et moi, je suis toujours aussi faible. M'ont-ils vraiment injecté quelque chose où c'est le venin de la chose qui est à l’œuvre ? Impuissant, je les observe m'attacher à un mat couché. Je plante mes dents dans la main de celui qui essaie de m'entraver par la gorge. Il hurle et abat son autre poing sur mon front. Plusieurs fois. Putain.
Ils redressent le poteau, je me retrouve attaché, bien visible depuis l'autre rive. Je suis bien sonné. Mes oreilles continuent de tinter, du sang perle de mon front lacéré. J'ai le souffle court.

- CATHIA ! JE SAIS QUE TU M'ENTENDS. COMME TU PEUX LE VOIR, TON COPAIN A ÉTÉ CAPTURÉ. SI TU TIENS A SA VIE, VIENS GENTIMENT NOUS REJOINDRE D'ICI QUINZE MINUTES. J’ESPÈRE QUE TU SERAS PLUS RAISONNABLE QUE LE VIEUX JACKSON ET QUE TU NE FERAS PAS LA MÊME ERREUR DE NOUS DÉFIER. QUINZE MINUTE, PAS PLUS.

Un escar-mégaphone. Là, il est sûr que tout East-Blue l'a entendu. Je ne le laisserai pas ça se dérouler.
« Cat… CATHIA ! Putain ! » Qu'est-ce qui se passe bon sang ? Ma voix ne m'obéit plus, quelqu'un en a baissé le volume. Pas encore ce venin inconnu ? Putain, j'éructe, essaie de tousser pour me dégager la gorge, rien n'y fait. Je déteste être impuissant ! Je veux lui hurler de me laisser, de s'enfuir, de rejoindre mes hommes ! Mais ma voix semble éteinte, réduite au minimum. Non, putain ! Allez hurle ! Crie ! Aarrrrrghhhhh ! Je ressemble à chaton qui essaierait d'imiter un lion. Ne viens pas, Cat' ! Abandonne-moi !
L'agacement et la colère laissent place à la lassitude. C'est un piège dans lequel elle ne peut que tomber. Elle n'a jamais été du genre à fuir en laissant les siens. Elle va volontairement se jeter dans la gueule du loup. Merde.

Nox, bordel, où es-tu ?!

________________________________________

 
Loth capturé ? Le sang d’Émeline n'a fait qu'un tour. La rive est visible entre les branchages. Que doit-elle faire ? Le sauver, naturellement, mais pas se précipiter dans un piège aussi grotesque non plus, Loth ne le lui pardonnerait jamais. Mais autre chose l'inquiète, comment ont-ils fait pour le capturer ? Il est fort son binoclard, bien plus que ces minables alors comment ? Ses inquiétudes dissipées seraient-elles finalement avérées ? Serait-il blessé ?
D'ailleurs se dit-elle, pourquoi ce type hurle-t-il après Cathia ? Il ignore qu'elle est morte, c'est évident.
En un éclair, Eme' toupille sur ses talons, sa lame au clair. Même perdue dans de vaines réflexions et angoisses, son esprit reste alerte. Quelque chose a bougé près d'elle. Un bruit métallique et une étincelle plus tard, le tranchant de son katana est bloqué par... un jouet. Un scalpel, rien de plus. Celle qui le manie a les cheveux couleurs roux feu attachés en couette. Dans ses yeux émeraude, l'ombre de la mort.

- Non mais tu es cinglée d'apparaitre comme ça !
- Hey ! C'est p't'être toi la maboule à balancer ton épée comme un ferrailleur !
- Ne te fous pas de moi ! Tu faisais quoi à ramper dans les herbes ?! Et puis, d'où sors-tu même ? Je croyais que tu avais "des choses à faire " ?
- D'un, je travaille-là. Et deux, ouais, j'pensais que cette chasse à l'œil ou j'ne sais quoi était une perte d'temps puis il m'est apparu que ces ilots pouvaient abriter des ressources inconnues. Plantes, animaux etc... J'recueille des échantillons par terre.
- Tu sais que ton boulot c'est de soigner Loth ?
- Ouais, c'est pour ça que j'me traine dans la vase à chercher des trucs. Mais continue d'le marteler et ça va mieux m'rentrer dans l'crane !
- Non, je veux dire, tu n'as pas entendu ce type ? Ils ont capturé Loth ! Comment tu peux te trainer à ramasser je ne sais quoi en ce moment ?
- Tu l'as dit. J'le soigne. J'éteins le feu, parfois je le préviens avec des vaccins. J'suis que médecin, du soutien après l'action. C'est vous autres les gros bras, faites c'que vous savez faire d'mieux, arriver, défoncer... Hey !

En un battement de cœur, "Que médecin" plonge ses mains dans sa blouse, en sort des dizaines de scalpels de jet dont elle crible la végétation à sa droite. Elle n'a jamais été un simple toubib, au contraire, la plupart du temps elle est à l'attaque. Émeline ne l'aime pas trop. Loth ne lui a pas demandé son avis avant de l'engager, autrement, elle y aurait opposé son véto. Enfin, si elle en avait un.
Abigail Summers est une énigme, une bactériologiste amnésique dont ils n'ont jamais retrouvé le passé. Elle a tout oublié sauf son métier et ses capacités martiales.  

Du taillis s'extirpe un Fumier. Avec sa combinaison de camouflage en forme d'algues, il se fondait parfaitement dans le décor mais pas aux sens aiguisés du chirurgien personnel de Moine Hérétique. Les scalpels ont fait de lui un drôle de porc-épic mais heureusement qu'ils se sont figés dans sa combinaison. Nox émerge à son tour, contrarié par ce tir ami. « Mais vous fichez quoi là ?! » tempête-t-il avec de grands gestes.
« La même chose que vous a priori ! Et aux dernières nouvelles ta troupe et toi étiez à deux kilomètres à mes neuf heures ! » s’exclame Émeline tout aussi agacée. L'horloge tourne et eux, ils se marchent sur les pieds.

- Oui mais on a eu droit à un comité d'accueil camouflé, du coup, on a élargi notre champ pour couvrir toute la berge. Tu fous quoi là, Abi ?  
- La même que toi. "A priori".
- Nox, tu as un plan pour Loth ?
- Venez.

Planqués derrières quelques gros arbres, ils ont une vue dégagée sur la plage boueuse. L'Othétie n'est pas un long fleuve tranquille, ses eaux s'écoulent avec rage et vitesse. Il fait au moins cinquante mètres de large, ce qui parait tout à coup insurmontable quand on prend en compte l'accueil qui leur sera réservé de l'autre côté. Avec des troncs d'arbres, les mercenaires du prince ont fait des pieux qu'ils ont planté de biais dans le sol, tournés vers le sud comme s'ils escomptaient que les hommes de Loth viennent s'empaler dessus. Il y a aussi des sacs de sable et bien sûr des hommes qui protègent un camp monté à la va-vite. Surmontant toute cette installation, il y a Loth, saucissonné à dix mètres au-dessus du sol.

- J'suis navré d' dire ça mais, ils sont imprenables. Les canoës qu'on a transporté dans la jungle ne nous seront pas très utiles, j'tablais sur l'fait de les rattraper avant qu'ils n'traversent.
- Ils contrôlent la rive, ils nous canarderont dès qu'on sera sur l'eau. Ce sera du tir au pigeon. Et ceux qui survivront se feront massacrer une fois débarqués.
- Ce n'est pas une raison pour l'abandonner ! Il y a forcément une autre solution ! Allez, réfléchissez, le temps presse ! Plus que dix minutes !
- En fait, il n'y a pas une autre solution.
- Ne dis pas...
- Il y a "zéro" solution.
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- Zéro ? Ah bah ouais ! Mais...
- C'est pas une combattante et ses Oiseaux sont d'un piètre niveau...
- Je crois qu'il vaut mieux être borgne qu'aveugle. Là, tes hommes supers entrainés et toi n'êtes d'aucun secours à Loth.

PULUPULUPULUPULUPULUPULUPULUPULUPULU !

- J'ai un escargo blanc brouilleur.
- Finalement, mon option semble être la plus avantageuse, non, mademoiselle "la seconde" de Loth ?
- Ce n'est pas le moment ! Tu as réussi à accoster ?
- A quatre-cent mètres à l'est de la ziggourat, approximativement. J'ai perdu douze hommes dans la remontée. Il m'en reste cent-huit. Vous ne pouvez pas passer, c'est ça ?
- Pas s'ils n'sont pas occupés ailleurs. J'pense qu'on peut traverser en dix minutes maxi mais il nous faut une diversion.
- Je refuse de servir de bouclier.
- J'te demande pas d'rester planté là recevoir les balles ! Juste que tes hommes les attaquent puis se replient et les occupent un moment l'temps de...
- C'est toujours non. Si vous tentez quelque chose de stupide, ils pourraient supprimer Loth en représailles, et pour cause, ils n'ont pas réellement besoin de lui en vie vu qu'ils s'adressent à Cathia. Donc, je vais faire ça à ma manière.
- Et c'est quoi ta "manière" ?
- Demande à Émeline, elle secondait déjà Loth quand nous nous sommes affrontés par stratégie interposée, lui à Bliss, moi à Boréa. Laissez-moi faire et nous retrouverons intact notre binoclard.

Gatchan.

- Donc ? C'est quoi son truc ?
- Nous allons attendre. Je lui fais confiance, elle fera libérer Loth.
- T'es sûre ?
- Oui. Ça va être une boucherie si on traverse sous les feux et on mettra Loth en danger. On attend.
- Hey ! Tu vas m'répondre ? C'est quoi sa méthode à Zéro ?
- Le sacrifice.
- Quoi ?

________________________________________

Quinze minutes plus tard...

- LE TEMPS IMPARTI EST ÉCOULÉ CATHIA ! TU AS SOTTEMENT CHOISI DE NOUS DÉFIER, TRÈS BIEN, TU AURAS LA MORT DE TON AMI SUR LA CONSCIENCE ! AUX ARMES FUSILIERS ! LEVEZ ! CIBLEZ ! F...
- STOP !
- Qu'est-ce que c'est ?
- 'scuse Sérénissime, y a capturé une femme dans les bois. Y s'dirigeait vers l'camp. Y prétend savoir où s'trouve Cathia Sanchez.
- Quoi ? Quelle femme ? demanda Loth en se dévissant le cou pour regarder ses bourreaux.
- Toi, ta gueule ! Tu n'es qu'un homme en sursis ! Après vous, mon prince.

[...]

- Qui êtes-vous, madame ?

Tu viens de te jeter dans la cage aux lions. Amuse-toi, tant que tu es en scène.
Tu te redresses et tu croises tes longues jambes aguicheuses qu'ils ne peuvent s'empêcher de guigner. Ce ne sont que des hommes après tout. Un spécimen bateau en ce qui concerne l'autre criard de Docteur Mckay, avec son visage bouffi et sa pomme d'Adam proéminente. Quant au prince, il ressemble plus à l'idée que ce font les jeunes pucelles de leur prince charmant, cascade de cheveux blonds bouclés et brillants, lèvres fines et rosées, yeux pétillants de malice.

- Je suis quelqu'un qui a quelque chose que vous désirez. Et de votre côté, vous avez quelqu'un que je désire.
- Plait-il ?
- Sanchez et Reich. Je vous propose de les échanger.
- Genre vous avez Cathia ?
- L'avez-vous vu quelque part depuis votre ultimatum ? L'impulsive Cathia Sanchez que vous connaissez n'aurait-elle pas débarqué toute affaire cessante ?
- Donc vous l'avez sous bonne garde ?
- Disons ça.
- Et vous voulez Reich ?
- Un vieil ennemi de North Blue. J'étais le Numéro 2 du Réseau Ashura. A cause de lui, j'ai tout perdu. Et depuis, je ne rêve que d'une chose, lui coller une balle dans la tête.
- J'en serais presque jaloux de savoir qu'une vermine comme Reich occupe les pensées d'une aussi belle femme que vous.
- Vous me flattez.
- Mais vous savez quoi ? Je pense que vous travaillez en réalité pour lui et que tout ceci n'est qu'un stratagème pour gagner du temps !

Voilà, tu y es. La danse des armes.
Dans la tente, en plus du prince et de l'archéologue, il y a quatre gardes. Ils braquent immédiatement leurs armes sur toi. « Visez le cœur, pas la tête, je tiens à être belle, même dans la mort » que tu leur assènes avec vanité et sang-froid. Tu ne cilles pas, tu souris. C'est un jeu de dupe dans lequel tu es passée maitre. Avec Ashura, en quinze longues années à côtoyer les pires criminels des Blues, tu en as vu des vertes et des pas mures. De vrais criminels sanguins. Pour toi, le prince et ses hommes jouent encore aux pirates avec des glaives en bois. Du menu fretin, qu'ils sont tous. Tu es la meilleure marionnettiste des Blues. Et même Loth Reich ne fait pas mieux.

La tension retombe d'elle-même alors que tu continues de sourire avec sérénité. Les prunelles de Kurt Ashenbrenner le trahissent, le doute s'est insinué en lui. Et dès cet instant, tu sais qu'il a perdu. Il te testait, maintenant, il n'est plus sûr de rien. Il ordonne à ses hommes de baisser leurs armes et nonchalamment, tu demandes la permission de t'en griller une. Tu ne fumes pas d'habitude mais comme le dirait Loth, c'est pour le style. En plus, c'est juste une herbe aiguise-méninge qui augmente les connexions synaptiques, pas du tabac, ni de la drogue. Ils te demandent alors de prouver que tu ne travailles pas pour Reich sous peine de mourir dans la seconde. Tu souris de plus belle et leur indiques un endroit dans la forêt, un peu à l'Est de leur position.

Ça y est, tu tiens ta tragédie antique.
Cinq minutes plus tard, ils reviennent avec le cadavre mouillé de Cathia Sanchez. Tu l'avais embarquée sur le galion mais après avoir raccroché avec Émeline, tu envoyas ton chef navigateur descendre les rapides pour te le ramener. Ce corps est la seule clé de la situation. Comme prévu, ils sont estomaqués. Morte, elle est. Cameron Mckay n'en croit pas ses yeux et tire de toutes ses forces sur la joue de la morte, comme s'il essayait d'enlever un quelconque masque. De guerre lasse, il reconnait que c'est bien de l'épiderme. Alors leurs questions fusent, nombreuses, confuses. Comment est-elle morte ? Pourquoi l'avoir tuée ? Sais-tu dans quels ennuies tu t'es immiscée ? Ashenbrenner rage et jette sa coupe de vin au sol.

- Je crois vous l'avoir déjà dit. Je hais Loth Reich de toute mon âme. Et ça inclut ses proches.
- Mais putain ! Est-ce que vous... bordel... conscience... son importance ? souffle-t-il tel un bœuf.
- Inspirez, expirez, disciplinez votre esprit. Vous pensez vraiment que je serai venue ici sans savoir ce qui se joue ? J'ai autrefois dirigé la plus grande organisation de contrebande de Dance Powder des Blues, messieurs. Je ne suis pas une néophyte. Vous recherchez les quatre Œil des quatre grandes civilisations pré-Dakarannéenes. L’œil de Râ, de Tiamat, de Susanoo et d'Olokun. C'est pour cela que cette femme avait une telle importance. Mais rassurez-vous, avant de l'éliminer, j'ai pris soin de lui faire dire tout ce qu'elle savait.
- Vous prétendez savoir où est l’œil de Râ ?
- Je l'affirme même.
- Crachez le morceau !
- Ne vous faites pas plus stupide que vous ne l'êtes Mckay. Répondez à ma requête et je vous livrerai la cachette de votre Œil si précieux.
- Loth Reich ?
- Amenez-le à mes pieds et qu'il paie le prix de son impertinence !

Ashenbrenner continue de douter. Et toi, tu te réjouis de son désarroi intérieur. Son instinct lui dit que c'est un piège mais d'un autre côté, l'offre semble si alléchante ! Trop alléchante pour être vraie. Mais il n'arrive toujours pas à identifier la coquille. Il se contente de te fixer intensément comme si par ce seul fait il, il pourrait percer à jour tes intentions. Tu sais qu'il ne peut te tuer, tu l'as hameçonné en affirmant connaitre l'emplacement de l'objet de sa convoitise. Si primitif mais si efficace comme moyen de pression ! Il pourrait aussi te capturer là et tenter de te forcer à le lui dire mais quelque chose en lui l'en empêche. Ton assurance mortelle. Il sait par ton attitude que tu as vu la mort dans les yeux, l'a donnée à plusieurs reprises. Mais ce qu'il ne sait pas, c'est que tu ne t'es jamais directement salie les mains, en quinze ans de service dans le monde du crime organisé. Et tu n'as pas l'intention de commencer maintenant.

- Vu que vous désirez vous débarrasser de lui, madame, vous ne verrez aucun inconvénient à ce que ce soit un de mes hommes qui le fasse, ici, devant vous ? Il sourit, il pense te tenir enfin.
- Aucun souci. Je pensais d'ailleurs vous le demander. Répandez par terre sa cervelle et l’Œil sera à vous.

Ta réponse le sidère, il ne comprend plus rien. Finalement, serais-tu ce que tu prétends être ?
Dans la tente est ramené de force Loth Reich. On le jette à sa place, à tes pieds et sans hésitation, tu lui piétines la joue de ton talon à étage. Tu lui décoches ensuite un autre coup dans la face qui le projette près du cadavre de Cathia Sanchez. Dans les prunelles bleu-abysse du Moine, tu entraperçois la rage dans sa forme la plus bestiale. L'essence de son Hérésie. Et le rideau se baisse sur ta prestation.

A lui de faire de le reste maintenant.
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- Oh ! Elle a réussi, ils viennent de l'décrocher du mat ! Mais que voulais-tu dire par "sacrifice" ? Elle irait se sacrifier pour Loth ?
- Non, mais l'idée générale y est. Du temps où Loth cherchait à démanteler Ashura et qu'elle n'était pas encore son amie, Zéro utilisait ce qu'elle appelle des "Avatars". Pour faire simple, quand nous avons cherché à percer son identité à Boréa, nous sommes tombés sur une femme avec le même pédigrée qu'elle, qui correspondait en tout point au profil que Loth avait dressé du Numéro 2 d'Ashura. La Marine a d'ailleurs arrêté cette femme, convaincue que c'était elle Zéro. Même Loth a failli se faire avoir. Un seul élément l'a convaincu que c'était une illusion.
- Hmmm ?
- La femme avait un cancer en phase terminale. C'est ce que je veux dire par sacrifice. Elle utilise des gens qui ont le profil adapté et qui n'ont plus rien à perdre en promettant fortune ou sécurité à leur famille. Dans notre exemple, cette cancéreuse avait des triplés qu'elle souhaitait mettre à l'abri de tout besoin. Aella les a envoyés dans un autre royaume, avec cent millions chacun pour assurer leur avenir. Leur mère est morte une semaine après son incarcération.
- Mais là c'différent. Elle n'a rien que l'prince désire.
- C'est ça qui m'inquiète et le fait qu'ils aient fait descendre Loth encore plus. Prépare tes hommes, nous allons traverser le fleuve bientôt. Je crois savoir ce qu'elle prépare.
- Mais encore ?
- Là, elle ne veut pas engager ses hommes dans une confrontation armée. Et à moins qu'elle n'ait réussi à trouver l'Œil, elle n'a aucun moyen de marchandage. Mais elle peut toujours leur faire croire qu'elle sait.
- Hey, mais ça marchera jamais. C'est un truc à mords-moi-la-queue. Imagine qu'elle marchande ses présumées infos contre Loth. Ils le lui amènent et quand ils réclameront leurs dus, elle fera quoi ? Ils se feront tuer tous les deux.
- Ouais, c'bête !
- Sauf si Loth peut les sortir de là.
- S'il en était capable, il se serait déjà libéré non ? Et faut que le prince soit vraiment stupide pour ordonner qu'on désenchaine Loth devant lui alors qu'il n'a pas encore ce qu'il veut.

BOOOOOOOOUM !
Ce n'est pas une explosion, c'est quelque chose de plus... exotique. Comme si l'air se déchirait, comme s'il hurlait. Après seulement, vient un véritable hurlement. Un « NOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOONNNNNNNNN ! »
Une complainte déchirante qu’Émeline n'espérait plus jamais entendre. La lamentation d'outre-tombe la remplit d'effroi.

- Hey ! C'est Loth ça ? s'enquit-elle, inquiète.
- Non. C'est Shawn.  

________________________________________
Cinq minutes avant...

La réaction de Loth est au-delà de tes espérances et confirme toute tes prévisions. Il ignorait la mort de Cathia. Pourquoi, tu l'ignores encore mais peu importe. Il hurle le nom de son amie de vadrouille, rampe et se jette sur elle, essaie de la réanimer en la secouant. Mais il s'estompe immédiatement après, la tête sur l'épaule de la morte et sanglote doucement. Comme t'en doutais, il n'est pas lui-même, le Loth que tu connais est bien moins expressif que ça. Mais ce n'est pas Loth dont tu as besoin. C'est Shawn. Il faut qu'il le comprenne.

- Alors, ça fait mal ? As-tu l'impression d'avoir une épine plantée dans le ventricule ?! Tu l'invectives et feins la rage. Tu es une actrice plusieurs fois étoilée. Regarde-moi quand je te parle ! Je veux voir l'éclat du désespoir baigner ton regard !
- Comment ?
- Comment quoi ? Comment elle est morte ? Comment sont morts mes hommes ? Combien en as-tu tués exactement ? As-tu fait le compte ?
- Comment ?
- Deux cent soixante-huit ! C'est le nombre de sbires que j'ai perdu à cause de toi ! Du pied, tu le gifles et tu halètes, ta poitrine se soulevant au rythme de ta respiration. Tu l'agrémentes d'une autre série de coups de pieds dans les côtes alors qu'il est en position fœtale par terre. Finalement, Prince Ashenbrenner, accordez-moi encore une petite minute avec lui, il a une information que je désire.

Tu arraches un révolver des mains d'un garde et sans hésiter, tu décoches une balle dans la jambe de celui que tu es censée venir sauver. La blessure lui arrache un cri mais rien de comparable à ses lamentations intérieures, tu le sais. L'origine inconnue de son état de faiblesse en plus du choc de la réalité de la mort de Cathia l'a plongé dans une sorte d'état post-traumatique. Tu comptes sur la douleur pour l'éveiller. Elle vous ravive les sens et vivifie les cellules. C'est un excellent conducteur vers la colère. Loth, tu dois bouillir de colère, c'est le seul moyen pour tous les deux de vous en sortir vivant ! Mais il ne comprend pas tes messages sibyllins, où n'est pas encore assez éveillé pour les comprendre. Tu rages et tires une nouvelle balle, dans la même jambe ! Le prince et l'autre archéologue assistent médusés au spectacle. S'ils avaient encore des doutes que tu travailles pour lui, ils sont effacés.

- Alors, tu parles Reich ? Tu me dis où tu as enterré mon fiancé ? OÙ EST SHAWN ? JE VEUX SHAWN !

Tu t'époumones. Ta voix devient si aiguë que bientôt, seules les chauves-souris pourraient l'entendre. Loth saigne, mais tu savais ce que tu faisais, l'artère fémorale est sauve. Ça y est, la douleur l'a complètement éveillé. Et il comprend enfin ton message. Tu es soulagée. Place à Shawn.
Et tout à coup, tout devint ténèbres.

________________________________________


Avec frénésie, Émeline pagaie, comme si sa vie en dépend. Ils sont douze en tout, entassés dans cette barque à aube, essayant de couper tout droit à travers l'Othétie. Les eaux sont difficiles mais beaucoup moins que si l'opposition d'en face était à son paroxysme. Ils sont occupés à autre chose, "ils se cherchent" comme ça se dit à Boréa. Aella a réveillé Shawn, ce qui veut dire que Loth y a consenti. Avec recul, c'était vraiment le seul moyen pour eux de s'en sortir mais voilà... Shawn quoi.

Après dix minutes de lutte acharnée, ils s'échouent enfin sur la côte et sans perdre une seconde, se déploient par petits groupes. Le camp est dans un chaos innommable, une partie prend allègrement feu, une autre est totalement retournée, saccagée. Il y a des corps partout, tranchés nets pour la plupart. Shawn ne frappe jamais deux fois. Les abords immédiats du campement ne sont que désolations et carnage mais plus loin les rafales de feu crépitent toujours. Les forces du Prince se sont repliées vers le nord lointain. Cherchent-ils à regagner l'autre côté ?

Dans les décombres, Émeline aperçoit une silhouette familière. Aella. Elle est délicatement posée en position latérale de sécurité sur un coussin de tenture. Abigail s'approche pour l'examiner et te confirme qu'elle est juste évanouie. A ses côté, tout aussi bien installé, le corps de Cathia. Zéro est confiée à ses Oiseaux qui jaillissent de la forêt par centaine, armes aux poings. Le groupe des Fumiers progresse vers le Nord, Nox, Eme' et Abi en tête. Les échauffourées continuent dans la jungle, les balles sifflent toujours. Typique de Shawn. Il les poursuit pour les éliminer jusqu'au dernier.

Émeline et son groupe ne rencontrent que des cadavres, chemin faisant. Parfois, ils croisent, tapi derrière un bosquet, un pauvre mercenaire hagard, tout tremblant et épouvanté de l'horreur qu'il vient de vivre. C'est l'effet Shawn. Ils seront ramassés et faits prisonniers par les Fumiers en arrière-garde. L'odeur du sang est omniprésente et Eme' est plus inquiète que jamais. Shawn ne ressent pas la douleur, il continue à avancer vaille que vaille, jusqu'à ce qu'il s'écroule. La douleur est une alarme biologique qui signale à l'humain quand s'arrêter avant de subir des dommages irrémédiables. Shawn n'a pas cette conscience, sa seule limite si on le laisse faire, c'est la mort. Elle doit l'arrêter, pour le protéger de lui-même. Alors qu'elle taillade les entrelacs de lianes pour se frayer un chemin, elle entend hurler « ASHENBRENNER ! » La voix gutturale, râpée, n'est autre que celle de Shawn. Émeline frémit et s'engage dans cette direction.

- ASHENBRENNER ! continue de vociférer Shawn.

Dans la zone la plus septentrionale de l'ile, la forêt laisse place à une mince bande de côte argileuse qui la sépare d'East Blue. Shawn s'y tient. A ses pieds, des douilles et encore des corps. Il hurle après le prince qui de toute évidence a trouvé refuge dans son galion qui s'éloigne déjà vers la mer profonde. Shawn fulmine et se débat entre la renonciation ou la poursuite de ses ennemis. Quand Émeline et les autres débarquent, il s'arrache à la contemplation du bateau et fait volte-face. Dans ses pupilles, l'essence de la démence.

- Par tous les saints. C'est ça "Shawn" ?
- J'ne l'avais jamais vu.
- C'est juste Loth. Juste notre Loth.
- Ah non. Le corps peut-être mais...
- C'est ce que ses années en tant qu'esclave ont fait de lui. Shawn est juste une entité née des tortures et des brimades. Elle n'est que pure violence et folie destructrice.
- Ouais ça, on l'a tous vu avec les dizaines d'corps démembrés semés un peu partout. J'suis son médecin, il aurait dû m'le dire !
- On débattra d'ça plus tard. Il nous observe.
- Quand Shawn s'est manifesté pour la première fois à Carci, il a attaqué tout le monde sans distinction. Mais là, Loth le contrôle, plus ou moins.
- Comment tu sais ça ?
- Parce qu'il s'est pas encore j'té sur nous ?
- Entre autre. Aussi parce qu’Aella a été posée en position de sécurité, idem pour Cathia. C'est raisonné, c'est Loth. Je m'approche de lui. Restez à l'écart. Aucun mouvement brusque.

Émeline dépose délicatement son katana par terre et avance lentement vers Shawn. Comme l'a souligné Abi, c'est toujours Loth dans l'apparence, à l’exception de ce halo violet qui l'entoure comme un manteau. Ça ressemble à de l'air en grande vibration. D'ailleurs, ça vrombit tel un oiseau-mouche en vol stationnaire. A Carci', l'entité a dit s'appeler Shawn, du nom du premier et infortuné garçon qui tint compagnie à Loth dans les cachots du Conclave et qui mourut de sévices. Un choc qui laissa une empreinte indélébile sur le jeûne Loth.

Ami ou ennemi ? Semble-t-il se demander alors qu'Eme' se rapproche de plus en plus, un pas après l'autre. Shawn avance lui aussi, en dodelinant de la tête. Comme un enfant attiré par le feu.
Le reste se passe en quelques secondes. Shawn fuse. Quand sa main cingle l'air, c'est une lame de vent qui éclot et arrache un hoquet d'horreur à Émeline. Elle se baisse en catastrophe. L'attaque la frôle à tel point qu'elle sent son kimono se couvrir d'électricité statique. Elle tente de se relever mais une masse l'obombre déjà. Shawn. Derrière les verres rectangulaires, ses yeux sont veinés de sang. « Arrête Loth ! Je t’en prie ! C’est moi ! » qu'elle crie. Rien n'y fait, la main de Shawn plonge vers sa poitrine. Aux grands maux, les grands remèdes. « Impact ! »  

- Woh ! J'croyais que t'allais pleurnicher et l'supplier pour qu'il revienne à la raison ! Pas lui assener l'onde d'un Impact Dial en pleine tronche !
- Les sentiments ne marchent pas avec Shawn, marmonne-t-elle en se relevant à l'aide de Nox. Il fallait l'arrêter.
- Pour être arrêté, il est arrêté. On va même avoir du mal à l'faire repartir. Miséricorde ! Il a des balles dans l'corps… Hey, amenez-moi une civière ! On va établir notre camp ici, je dois l'opérer !
- Tu penses toujours qu'il y avait du Loth d'dans ?
- Assurément. Ce mode est autodestructeur, Shawn continue à avancer peu importe l'état de ses blessures. Jusqu'à ce qu'il s'écroule. S'il les avait poursuivis, il se serait sûrement évanoui dans l'eau et noyé. Il faut de la raison pour réaliser ce danger. Loth était là mais encore trop peu présent.
- Félicitation. Tu sais l'gérer. J'comprends pourquoi il t'garde près d'lui.
- Aella a été plus efficace. Il lui doit tout.
- On fait quoi pour le prince ?
- Ses gardes ont apparemment réussi à le sauver. Il doit être horrifié par le carnage auquel il a assisté. Il ne reviendra pas ici de sitôt. C'est inutile de le poursuivre puisque c'est nous qui viendrons à lui. Il détient l'Œil de Susanoo et d'Holokun. Chaque chose en son temps. Attendons que Loth récupère de ses blessures, je veux comprendre ce qui s'est passé ici.  
Sans oublier l'Œil de Râ.

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Une semaine plus tard...

- De. l'eau.
Merci. C'est bon.

- Abi ! Il est réveillé !
- Notre beau aux bois dormants. Tu ressens une quelconque douleur ?
- Non.
- Quelle est la dernière chose dont tu te souviennes ?
- Tout. J'ai tout en mémoire.
- Ah. Mémoire eidétique, j'ai tendance à oublier. Bon...
- Combien de jours se sont écoulés ?
- Sept.
- Aella. Merci pour tout.
- Que ferais-tu sans moi ? répondit-elle avec un sourire triste. Elle a été plus secouée par les évènements qu'elle ne l'admettra jamais, pensa Émeline.
- J'étais dans un si sale état ?
- C'mode du Berséker -c'est ça ?- t'a physiquement vampirisé, en plus tu as utilisé le Retour à la vie pour décupler tes forces donc. J't'ai plongé dans un coma artificiel pour faciliter la guérison rapide. J'ai extrait six balles d'ton corps.
- Deux de la part d'Aella.
- Avec du recul, c'était assez jouissif.
- Elle aussi a passé quatre jours dans l'coma. Elle souffrait d'un trauma crânien léger. Mais comme tout l'monde est sauf, j'aimerais bien avoir l'fin mot d'l'histoire.
- Abi ! Tout le monde n'est pas sauf ! Et on va attendre un peu avant de...
- Je vais très bien, l'interrompt Loth en se relevant. Il sentait parfaitement d'appoint. Je veux la voir.

Émeline a envie de s'y opposer mais finit par se plier au ton sans réplique de son ami.
En une semaine, les alentours de la ziggourat ont été transformés en un petit hameau de presque trois cent âmes. Des hommes de Loth, tous. De multiples maisons en bois sont sorties de terre, la forêt et l'Othetie colonisées pour fournir à tous ces gens de quoi se sustenter. Occupés à aiguiser leurs lames, à s'entrainer ou préparer le déjeuner, ils se figent tous à un moment pour regarder passer leurs Boss. Nox vient rejoindre la petite troupe et ouvre la marche vers le préfabriqué à l'écart du hameau. A la devanture veille un Oiseau que Loth reconnait fugacement comme un ingénieur recruté à Zaun et spécialisé dans le froid. Il aura réussi à créer une chambre froide avec les moyens du bord.

Cathia est là, posée sur une longue table recouverte de givre, les bras croisés sur la poitrine. Les autres attendent dehors pendant que Loth se recueille à genou devant le corps de son amie disparue. Émeline a la gorge nouée et l'impression d'avoir un pieu planté dans la poitrine. Loth connaissait Cathia depuis six ans, presque aussi longtemps qu'elle-même. Émeline se souvint que le Moine n'avait pas hésité à déclarer la guerre à tout Carcinomia parce qu'un de leur clan l'avait kidnappée. Il n'est pas homme à accepter qu'on s'en prenne aux siens. Comment doit-il se sentir là maintenant devant le corps sans vie de Cathia ? A quel point doit-il être accablé de chagrin ?

Renonçant à rester à l'écart, elle pénètre dans la petite morgue et vient lui tenir compagnie. C'est une épreuve qu'elle ne saurait le laisser traverser seul. Alors elle reste là, à ses côtés pendant très longtemps. Si longtemps qu'il fallut qu'on la couvre d'une couverture d'aluminium à sa sortie tellement elle grelotait. Pendant tout le temps qui s'écoula, un genou à terre, le Moine regarda fixement devant lui, ses pensées inaccessibles à Émeline. Méditait-il ? Priait-il ? Suppliait-il l'âme de la défunte de lui pardonner son échec à la protéger ? Lui seul le savait.
« J’ai faim » fut la seule chose qu’il dit à sa sortie.  

- Je vous dois tous une fière chandelle les gars. Et filles. Soyez-en remerciés.
- C'pour ça qu'on est là. Tiens goûte-ça. C'est du sanglier que j'ai moi-même abattu c'matin.
- Je délirais. Tout ce temps, je délirais. Vous vous en souvenez tous, j'ai réussi à extirper ma caravelle du blocus et ai pris les devants. Mais une de leur caraque nous a pourchassés. Nous avions une bonne avance puis nous avons été ralentis par une tempête soudaine à l'approche des archipels Valantaises. Tant bien que mal, j'ai réussi à aiguiller le navire vers ici, l'île principale. Cathia était sûre que l'Œil se trouvait dans la ziggourat de Théklé. Mais le temps était exécrable, il faisait noir, on ne voyait pas à cinq mètres. Donc pour plus de prudence, nous avons choisi d'accoster dans la baie au sud de l'ile.
- Nous avons choisi ça aussi, la mer sur tout le pourtour nord est constellée de rochers. C'était très risqué et audacieux pour le prince de s'enfuir par là. Mais il avait Shawn aux fesses.
- Ils nous attendaient dans la baie. J'étais concentré sur l'approche puis soudain, plus rien. Il y a eu une formidable explosion, le bateau éventré depuis le bas.
- Une mine marine non ? Ta nef "Madre" y a goûté aussi.
- Elle est détruite ?
- Oui, désolée.
- Quatre-vingt-cinq millions en valeur bateau détruit durant cette opération. J'espère que ce trésor est aussi gros qu'on l'espère. Qu'est-ce qui s'est passé après ?
- C'est un trou noir que ma mémoire ne peut éclaircir. La mine a explosé juste à la proue. J'étais à la barre, j'ai reçu le plein de l'onde de choc. J'ai dû m'évanouir sur le coup. Après, je ne peux qu'émettre des conjectures sur ce qui s'est passé. Ce qui est certain, c'est que j'ai été sujet à une substance hallucinogène. J'ai remarqué une piqure ou une morsure d'un animal sur le bras.
- Pas un animal, une plante. Toxicodendron radicans mortifero. C'est un genre de sumac qui contient un puissant psychotrope. J'pense qu'après l'explosion du navire, Cathia a dû t'ramener à la nage sur la côte, t'a tiré vers la jungle avant d's'écrouler dans un bosquet d'sumac. T'as dû t'réveiller rapidement après, assez pour semer les hommes du prince. Mais sous l'effet de l'alcaloïde, l'information d'la mort d'Cat' n'a pas été enregistrée et t'as continué la mission tout seul.
- Je n'étais pas seul. Je m'imaginais qu'elle était avec moi. Mon cerveau me donnait la réplique comme Cathia elle-même l'aurait faite. Nous avons exploré la façade Nord de la ziggourat, avons échappé à des pièges mortels, sommes tombés de haut dans une marre de crocos au sein de l'édifice, puis avons débattu sur l'emplacement de la tombe du Khan Téklé.
- Et l'hallucination te donnait des réponses sensées ?
- Oui, sur'ment, mais l'explication est toute simple en fait. Loth avait déjà ces informations, ou disposait d'pistes solides pour arriver à ces conclusions. Il s'rait arrivé au même résultat dans un processus d'réflexion en solitaire. Là, comme il dit, son hallucination lui a donné la réplique.
- Tout à fait. Comment est-elle décédée ?
- J'ai retiré une écharde d'bois d'dix centimètres dans son estomac. Elle n'a pas subi l'souffle d'l'explosion du navire mais les copeaux qui ont volé l'ont pas ratée. Navrée. C'est déjà un miracle qu'elle ait réussi à nager et à te tirer d'là avec l'ventre perforé. Tu lui dois la vie.
- C'tait une femme d'un immense courage et d'une grande âme. Elle va nous manquer. A Cathia !  

« A Cathia ! » répètent-ils tous en chœur autour de la table. Le reste du déjeuner se déroule dans le silence, seulement brisé par les bruits de mastication et de déglutition. Installée en face de Loth, Émeline surveille chacune de ses mimiques, comme si elle s'attend à le voir fondre en larme ou exploser à chaque seconde. Mais elle sait que ça n'arrivera pas, le Moine garde tout au fond de lui, ne démontre pas assez ses sentiments. Et quand ça explose, on a droit à des Shawn... Un comportement apathique qu'elle trouve tellement dommage, un caractère qui les empêche d'être ensemble. Enfin, autant elle est sûre de ses sentiments, elle ne parierait pas sur la réciproque. Loth est entouré de femmes, de très belles d'ailleurs et jamais elle ne l'a vu faire montre d'une quelconque démonstration d'affection au-delà de l'amitié pour aucune. Mais, se dit-elle pour se flatter, il n'a déclaré une guerre insensée pour aucune d'elle.

Le dessert est l'occasion de recommencer à parler. Le montage du hameau, les soins à apporter à Loth, les médicaments à aller chercher sur des îles lointaines ont occulté toute explication détaillée après les évènements. Abigail, nouvelle qu'elle est, demande de plus amples éclaircissements sur le bluff d'Aella. « Ma stratégie reposait sur un seul point : faire émerger Shawn » dit-elle, en se servant un gâteau aux crabes. « Appâter le prince était facile, il lui suffisait de lui faire croire que je connaissais l’emplacement de l’Œil et le corps de Cathia était une preuve en soi. Il ignorait de quelle manière elle était morte, il ignorait même qu’elle l’était avant que je ne vienne. A partir de là, j’avais toutes les cartes en main. Bien sûr, il me soupçonnait d’être aux ordres de Loth mais mon assurance l’a déstabilisé. C’est Shawn dont j’avais besoin et je savais qu’une fois qu’ils auraient fait venir Loth dans la tente, ce serait gagné. La vue du corps de Cathia aurait réveillé le monstre. Mais encore, j’ai dû accentuer ma comédie et lui tirer dans la jambe pour aider à son éveil. Ensuite, je ne sais pas, j’ai été surement frappée par une onde de choc et je me suis évanouie. »

- Mais à c'que j'ai compris, Shawn n'est pas plus fort qu'Loth ? Il est juste plus... sauvage, sanguinaire ?
- Oui. Mais il était évident que Loth n'était pas dans son état normal. J'ai supposé qu'ils avaient dû le droguer pour l'attacher ainsi. Et comme tu le sais maintenant, Shawn avance jusqu'à ce qu'il tombe raide mort. Aucune drogue n'aurait su l'arrêter. Je tablais sur ça.
- Et ça a marché. Merci.
- Mais pourquoi Ashenbrenner et Mckay sont en vie ?  
- Le chef de la garde personnelle du prince est plutôt bon. Il a réussi à les extraire de mes griffes. Enfin, en quelque sorte.  
- On a retrouvé un bras gauche bardé de bagues. Ashenbrenner ?
- Oui.
- Hahaha ! Bien fait pour sa gueule ! Quand on finira avec lui, il n'tiendra même pas en boite !
- Donc Loth, tu sais où se trouve l'Œil ?
- Je ne le savais pas. Mais maintenant si. Et je vais le trouver. Grâce à ton pouvoir.

Et à Émeline de sourire.
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Je suis assis en tailleur devant la ziggourat depuis un moment, comme si je retardais le moment de m'y confronter à nouveau. Le passage que j'ai ouvert en pensant obéir à Cathia est encore là. Elle n'était pas là en fin de compte, tout ça venait de moi, moi qui ai lu des tonnes d’œuvres sur l'architecture et les mathématiques aux Siècles d'Or, moi toujours qui me suis documenté jusqu'à devenir un presque expert des civilisations pré-Dakaranéennes. J'ai tout en Mémoire. J'ai toutes les clés pour comprendre le message sibyllin laissé à son élève par le Professeur Jackson. L'Œil  est là. Et je devine où. Cathia aurait sûrement compris plus vite que moi, après tout, le code lui était destiné.

- Nous sommes prêts.
- Hmmm ? Tu crois aller où comme ça ? C'est quoi ce gros sac ? Tu penses qu'on va camper cent ans dans la forêt où quoi ? Et c'est quoi cette armada ? Retournez à vos occupations les gars, j'y vais seul avec Émeline.  
- Quoi ? On vient pas ? J'suis ton toubib.
- Non, c'est d'elle seule dont j'ai besoin.
- Je voulais voir l'Œil moi !
- Et moi t'protéger.
- Je ne vais pas tomber raide mort. Toi, tu verras l'Œil quand on le ramènera. Et, les morts n'ont pas d'armes, je ne risque rien. La seule qui ait le pouvoir du fruit de la Cartographie ici, c'est elle. Donc oust, vaquez à autre chose et préparez notre départ. Ça ne va pas être long.
- C'est un rencart ?
- Pardon ?
- Ne fais pas attention à elle. On y va.
- Ouuuuuh. Faites pas d'bêtises, tous seuls dans l'noir des couloirs hein. Respectez les morts. Hoouuuuuuuuu.

Pourquoi ai-je l'impression de surveiller des gamins ?
J'ouvre le chemin à Émeline qui me suit en silence. J'entends presque son cerveau hurler de m'ouvrir plus. Elle aimerait ça, que je lui confie mes angoisses, mes chagrins, mes doutes ou que sais-je encore. Je n'ai pas été sans remarquer l'expression de tendresse qui confine à la pitié qu'elle me dessert à chaque fois que nos regards se croisent. Elle pense sûrement que je me morfonds à l'intérieur et que je refuse d'extérioriser mes sentiments. Enfin, non, elle se demande si je ressens réellement quelque chose par rapport à tout ça. « C’était une de mes plus vieilles amies. » lui dis-je. Elle sursaute tellement elle ne s’y attendait pas. « Comment tu penses que je me sens-là ? De savoir que c’est elle qui m’a sauvé et pas le contraire vu que de nous deux, c’est moi le "guerrier" ? Minable. Je me sens moins que rien. Elle n’avait pas à mourir de cette façon. Tu ne dis rien ? Je pensais que tu attendais que je me confesse. » Elle est réellement choquée et semble chercher ses mots. « C-ce n’est pas de ta faute » finit-elle par bégayer.

- Je n'ai jamais dit que ça l'était. Cathia avait choisi, comme toi ou n'importe qui dans ce camp, sa voie de vivre et les conséquences qui en résultent. Ensemble, nous sommes allés dans les coins les plus reculés de South Blue à la recherche de la mythique cité sous-marine de Gao-Ghoï, nous avons pillé et dérobé le Cœur de l'Océan à la flotte de guerre de l'Empire Zybamer, avons exploré les ruines souterraines d'Akatakor colonisées par un essaim de scorpions géants. Alors, oui, Cat' savait qu'un jour où l'autre ça se finirait comme ça. Je suis triste parce qu'elle n'est pas partie comme elle l'aurait voulu, en faisant ce qu'elle aime. C'est comme si moi je décédais en... jouant au golf.
- Mais ! L'aventure, l'exploration, l'histoire, c'était ça qu'elle aimait. C'est comme ça qu'elle est morte !
- Non. Nous n'explorions rien du tout là. C'était du déjà-vu pour elle. Nous sommes là parce qu'un complot se prépare au sein d'un état où nous avons de précieux amis. Nous sommes là parce que le Professeur Daniel Jackson est mort en protégeant une relique du passé. Cathia est morte parce qu'elle a suivi les dernières volontés de son professeur et désiré continuer son œuvre. Et c'est pour ça que ce prince Ashenbrenner, je jure sur ce qui m'est le plus cher au monde de le lui faire payer au centuple.
- Je t'aiderais. Je serai ce rocher sur lequel tu t'adosseras quand tu seras fatigué, fit-elle plus joyeuse.
- Lâche-moi le bras.
- Désolée.
- Parce qu'on rentre dans la Ziggourat. Attention à ta tête. Les passages sont étroits, on ne pourra jamais passer, bras-dessous, bras-dessus.
- Oh ! D'accord.

J'arrive à voir Cathia dans chaque dé de granit, dans chaque bloc de calcaire. Elle n'a plus jamais revu cette ziggourat. Tu étais seul Loth, me dis-je. Seul et délirant. L'odeur épouvantable qui nous viole les narines m'indiquent que le massacre des crocodiliens n'était finalement pas une hallucination. Nous revêtons des masques à gaz, ça fait une semaine qu'ils pourrissent là-dedans. Inutile de choper des bactéries dans l'air. Lentement, je descends de la plate forme vers la cuvette remplie de vers puis fait descendre Émeline grave à mes cheveux décuplés. Nos bottes de pluie en caoutchouc pataugent dans une mélasse de sang croupi, de chairs en décomposition et de mouches à viande. C'est absolument répugnant, d'autant plus qu'on doit tenir haut les flash-dials pour éclairer notre chemin. Nous retrouvons la dalle que j'ai fracassée et glissons dans la chambre funéraire. Mon estomac remue désagréablement. J'ai l'impression que c'est ici que j'ai perdu Cathia. Je parlais seul et ce con de prince a cru que je m'adressais à elle.  

- Le sarcophage est vide ! Le prince encore ?
- Non, il était vide depuis des années. Mckay, l'a pillé à l'insu de Jackson. Quand le vieux les fuyait, il est venu là pour cacher l'Œil mais s'est rendu compte que son endroit si secret n'était pas si inviolé que ça.
- Donc il a planqué l'Œil quelque part d'autre ?
- La Cathia-hallucination m'a dit que j'étais la clé pour retrouver l'Œil. Et juste après, ils gazaient la pièce.
- Que tu étais la clé ? Toi ? Mais Jackson ne te connaissait même pas ! Mais comme elle n'était pas vraiment là... Tu t'es donc dit que tu étais la clé ?
- Oui c'est ça. Mais ce n'est pas par rapport à moi mais à un point commun que je partage avec l'occupant de cette ziggourat.
- Attends, je vais me rappeler de son nom kilométrique. Thékléthi....
- Thékléthicamonphimonain. Il était le vingt-troisième Khan de la seizième dynastie de Valantis et on le surnommait "Le Khan Hérétique".
- Oh ! Ça c'est de la coïncidence en effet. Pourquoi on le surnommait ainsi ?
- Répondre à ça, c'est trouver la dite clé. Je vais t'expliquer.

Le Khan Hérétique.
Thékléthicamonphimonain fut le dernier Khan de la dynastie Monphimonain. Un roi atypique qui balaya d'un revers de la main, mille ans de croyance. Aux dieux multiples des Valantais, il substitua une divinité unique, "Thica", le dieu Soleil. Et au lieu de se nommer Monphimonain XXIII, il prit le nom de Théklé-Thica-Monphimonain, littéralement "celui qui reçoit la parole de Thica". Il fut le tout premier roi de l'antiquité à instaurer le monothéisme, un acte qui causa des bouleversements monstres et la Guerre de la Foi, cinq ans après son arrivée au pouvoir. Théklé réussit à garder son trône dix autres années dans un royaume au bord de l'implosion avant d'être balayé, non pas par la rébellion polythéiste, mais par une tuberculose. A sa mort, son fils lui succéda et rétablit immédiatement l'ancien régime religieux. Une paix moribonde revint à Valantis au moment où le Khan responsable de ce chaos était enterré.

- Selon les rites de quelle religion ? demande-t-elle en riant.
- Tu as toujours su poser les bonnes questions. Regarde cette peinture. C'est Valaah, le dieu suprême des dieux multiples Valantais.
- Un dieu corbeau. Donc ils l'ont enterré selon les rites de la religion qu'il s'est évertué à bannir ? Haha ! Ça devait être un puissant sentiment de revanche pour les prêtres polythéistes !
- On peut l'imaginer.
- Mais il y a un hic c'est ça ? C'est trop facile ?
- C'est ce que semblait penser le Professeur Jackson. Et la Cathia-hallucination. Et moi aussi maintenant. A l'instar des quatre grandes civilisations pré-Dakaranéennes, les Valantais étaient obnubilés par la vie après la mort. Pour ainsi dire, ils ne vivaient que pour préparer leur vie dans l'au-delà. Ce que je trouve absolument ridicule mais passons. En apparence, la religion monothéiste de Théklé disparut avec lui. Et pourtant, tout dans cette ziggourat semble subrepticement indiquer le contraire. Viens par là et scrute mieux l'oeil du dieu corbeau. Regarde avec ta loupe.
- Hum, c'est fait en jaspe on dirait. Oh mais... L’œil du corbeau est gravé de dessins ! Il faut un effet grossissant pour le voir, autrement c'est invisible ! Attends, comment ils ont fait pour graver des trucs de l'ordre du millimètre sur cette petite pierre ?
- Comment ils ont construit cette pyramide que même à notre ère, nous serions incapable de concevoir ?
- Touché.
- Détaille-moi les dessins incrustés. Que vois-tu ?
- C'est une scène. Un personnage à tête de... soleil, ouais c'est ça. A la place de la tête, il a un disque entouré de rayons, c'est le soleil. Donc, le personnage-soleil est accompagné d'un autre être. Une femme -elle a des seins- mais à la place de sa tête, elle a un croissant de lune. Normal. Ils se tiennent la main et sont debout sur une barque et semblent traverser un fleuve. Ça veut dire quoi ?
- Que l'amour d'un fils pour son père est très fort. Malgré les apparences, Théklé a en fait été inhumé selon les us de sa religion monothéiste. Toute cette décoration, ces dieux multiples, ce n'est que de la poudre aux yeux. La vérité a été incrustée en micro-caractères. Le dieu à tête de soleil c'est Thika, et la déesse-lune, Mikha. Sa compagne.
- Okey, d'accord. Mais ça nous indique où se trouve l'Œil de Râ ?
- Oui. Parce que vois-tu, le monothéisme n'est pas le seul changement radical que le Khan Théklé a opéré. Sa religion unique interdisait catégoriquement la polygamie.
- Aaaah ! C'est en fait pour ça que les hommes se sont rebellés ! Je parie que le dieu unique avait plus de succès auprès des femmes, haha !
- Devine-tu les vœux de mariage des monothéistes Valantais ?  
- C'est eux qui ont initié le "jusqu'à ce que la mort nous sépare" ?
- Ah non, c'était plus coriace que ça. "Mθ nouþ keɱ mi san, Thika dæɣah ʃui".
- Je savais que je n'aurais jamais dû sécher les cours de langues anciennes au lycée !
- Ça veut dire "Ce que Thika unit, même la mort ne saurait le désunir". Dans ce culte, le veuvage n'existe pas. On restait marié à son défunt conjoint jusqu'à sa propre mort. Après quoi, on était enterré près de sa tombe ou carrément dans le même caveau que lui. Très peu de spécialistes le savent, les polythéistes ont presque tout détruit de cette époque. Cathia et Jackson étaient les rares à avoir retrouvé des documents intacts. C'est elle qui me les a fait lire il y des années.  
- Attends, donc ce que tu veux dire c'est que Téklé n'est pas seul dans cette ziggourat ? Il y a une autre chambre funéraire ?!
- Ouais, celle de sa femme. Son âme sœur dans la mort. C'est incroyablement rare, il n'y a en fait aucun cas semblable dans le métier, j'en suis certain. Un khan, une ziggourat. Tous les archéologues te riront au nez si tu viens à prétendre qu'il y a plus d'une momie dans une ziggourat.
- C'est la cachette parfaite.
- Tu sais ce qui te reste à faire.

Émeline possède le pouvoir du fruit de la Cartographie. Concrètement, il lui suffit de poser sa main droite sur un édifice et de laisser passer le temps. Plus le contact dure et plus elle cartographie en profondeur et en détail le bâtiment. C'est un peu le pouvoir rêvé de tous les voleurs et je n'ai pas hésité à développer une lucrative affaire de conception de plans en tout genre avec. Musées, manoirs, bases secrètes ou souterraines, tout y passe. Qui plus est, elle peut projeter ensuite les plans en trois dimensions, comme s'ils étaient fait de pure lumière. Elle a appelé ça des hologrammes. J'aurais pu directement lui dire de me cartographier la Ziggourat mais comme moi, elle aime les explications détaillées. Et j'aurais eu l'impression de bafouer la mémoire de Cat' en expédiant tambour battant cette affaire. Un archéologue est un amoureux de l'histoire, en la racontant, il donne vie au passé et le revoit défiler devant lui.  

- Trouvé ! fit-elle après dix minutes de concentration. Il y a une chambre à notre midi, à douze mètres. Elle est aussi grande que celle-ci. Je ne peux pas dire si elle vide ou non.
- Ça nous suffira largement.

Et c'est le cas. Son pouvoir lui permet aussi de trouver le passage secret qui relit les deux chambres. Mari et femme, réunis dans la mort. La dernière demeure de la femme de Thékléthicamonphimonain ressemble en tout point à celle de son mari, à cette exception près que les pierreries et joailleries sont encore présentes. Elle n'a jamais été visitée par des pillards, seulement par un homme soucieux de préserver les reliques du passé. En temps normal, je suis plus du côté des pillards même si contrairement à eux, je connais l'histoire de ce que je dérobe et respecte profondément le passé. Enfin, si ça importe. Aujourd'hui pourtant, je ne troublerais pas le sommeil de la reine Akouthicamonphimonain, je ne prendrai aucune babiole, aucun joyau. Le seul qui m'intéresse est posé sur le sarcophage en grès.

L'Œil de Râ.


- Je ne m'attendais pas à cette forme. Un pentagone en quartz jaune. Regarde, des glyphes sont inscrits sur le sarcophage. Ho, c'est du feutre ! Les hommes de l'antiquité n'avaient pas feutres...
- C'est un message de Jackson. « ȝfʔl m'hȣp édut Ɔçùb. » "J'étais là et cet Œil te guidera vers la fin."
- C'est adressé à Cathia.
- Faisons en sorte de respecter leurs deux volontés posthumes.
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