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Les apparences sont parfois trompeuses (vol. 2)

CRAC !
 Je regardai le muret face à moi, émietté et fissuré à l'endroit de l'impact. Je regardai ensuite ma main, abîmée elle aussi, et la douleur me fit grimacer.

  Cela faisait seulement quelques jours que j'avais fait la connaissance de Matt et que j'avais décidé d'en faire mon premier compagnon. Ce laps de temps avait permis à mon ami de se rétablir de ses blessures : il ne souffrait plus mais je continuais de lui appliquer des pansements, par sécurité. Cela l'avait d'ailleurs beaucoup amusé et il ne cessait de m'appeler "Tonton" depuis lors... Je ne savais pas trop si le fait d'être plus jeune que lui était en cause mais l'appellation me dérangeait. Surtout quand venait la nuit.

  Nous nous étions installé dans une auberge proche du Golden Port, moins attractif qu'auparavant. L'endroit ne manquait pourtant pas de charme, malgré les travaux incessants pour rendre les quais plus accueillants. "Ce qui ne tue pas rend plus fort !" répétait souvent l'un des chefs de chantier que je croisais.
Nous avions choisi cette auberge car il restait un entrepôt à moitié détruit à seulement trois pas de là, dans lequel nous nous rendions pour que je m'entraîne. Car oui : le temps que Matt se rétablisse pleinement, je devais en profiter pour m'améliorer. Je n'irai pas loin sur Grandline avec ma force actuelle et j'en étais conscient. Face aux quelques Martico présents à Manshon, j'avais failli y rester. Certes, je les avais vaincu, mais c'était surtout grâce à ma chance et à la présence de Matt Denis. Peu importe l'aide que j'avais pu lui apportée, ma dette envers lui ne s'effacera pas pour autant !

- Tu sais Arhye, je nous considère comme quittes. Mais s'il devait bien y avoir quelqu'un pour remercier l'autre, ce serait moi : tu es le seul qui m'ait accepté et qui l'ait affirmé haut et fort.

  Peu m'importait. Il était la première personne à m'avoir tendu la main depuis que j'étais parti de chez moi. Bon mis à part le Marine de Rubeck mais lui ne comptait pas : il m'avait envoyé travaillé sur les quais sans me demander mon avis ! Au moins assis à faire la manche ne risquait pas de m'esquinter ! Je pouvais me reposer quand je le désirais... Par contre je ne me sentais pas différent de "Sweety" à ce moment-là : inexistant. Hors ce n'était pas mon but.

  C'était pour ces raisons que je m'entraînais chaque jour, matin et soir, afin de devenir un grand pirate, à la fois respecté et craint. Par les autres pirates, mais aussi par la Marine et le Gouvernement. En l'état actuel, je n'étais qu'un sale gosse fouteur de troubles. Je voyais cependant mal un sale gosse fouteur de troubles se mettre à dos la pègre. Mais je m'en fichais...
C'était drôle : plus je prenais conscience de ma situation, plus ma façon de parler changeait... Peut-être n'était-ce qu'une impression.

  J'enchaînais les tractions sur l'une des barres de fer qui sortaient des murs brisés, travaillais mes abdominaux, portais 200 coups de chaque pied sur un pylône chancelant, puis 200 coups de poing, puis de paumes... Mes phalanges étaient écorchées, mon dos, mes genoux et mes bras douloureux, mais une chose était certaine : j'étais trop fatigué la nuit pour qu'une attaque de mafieux m'inquiète et m'empêche de me reposer. Et puis Matt m'avait assuré que nous étions en sécurité désormais : le siège des Martico se trouvaient sur l'archipel de Sander.

  Aujourd'hui, je m'étais attaqué à l'apprentissage d'un nouveau mouvement : la Fracture. Il s'agissait d'un des rares coups de la Voie du Corbeau à être purement et simplement offensif. En somme un coup de paume et de phalanges qui concentrait la force de l'impact sur un point précis, causant de graves dommages internes en plus de laisser des traces visibles sur le corps. J'avais donc pris mon élan et cogner le muret qui me faisait face, tout en cherchant à me concentrer et à oublier la douleur. Malheureusement, il me fut impossible de le détruire entièrement. J'ai eu beau réessayé une fois, deux fois... l'impact restait le même. Avec mon pied j'étais certain d'y parvenir mais ça n'aurait alors plus aucun intérêt ! Je m'agrippai littéralement les cheveux et les tirai en arrière.

- Tss. Ça me saoule !
- Je trouve que tu t'en sors bien ! Personnellement j'en serais incapable.
- D'accord, mais je n'ai pas progressé d'un pouce, par rapport à avant !
- Si : à chaque fois que j'essaie de te prendre ton argent tu es capable de m'en empêcher.

  Ah. Effectivement Matt m'avait appris à être plus vigilant et plus sensible à mon environnement. Je n'en étais qu'à la phase expérimentale, mais bon : impossible de produire des miracles en seulement quatre jours. Cela restait tout de même très utile contre les vols à a tire... Naïf comme j'étais !

- Bon ! Une pause s'impose !
- Aucun problème : j'ai prévu le coup.

  "Sweety" sortit d'un sac deux bentos qu'il posa sur un banc improvisé et les ouvrit devant moi. Mes yeux eurent droit à une ribambelle de couleurs toutes plus appétissantes les unes que les autres.

- Waouh. Et combien pour tout ça ?
- A peu près 1500 berrys. Préparé avec amour ! Comme quoi, il en faut peu pour se faire plaisir.
- Décidément : tu es parfait !
- Tu veux bien m'épouser dans ce cas ?
- Oublie ce que je viens de dire.

 Nous mangions en silence, savourant le repas préparé avec... "soin" par Matt. Il avait même pris la peine de rajouter quelques épices dans les pâtes au saumon. Je ne savais pas exactement ce que c'était mais j'étais trop occupé à nettoyer le fond de ma gamelle pour le lui demander.

  TOC.
 Nous fîmes volte face et vîmes un caillou tomber depuis le rebord d'une des fenêtres brisées de l'entrepôt. Près de cette fenêtre se tenait quelqu'un. Une jeune femme à la chevelure flamboyante portant une chemise rose et un pantalon noir à bretelles. Elle pointait un pistolet dans notre direction et s'approchait. Une fois qu'elle fut suffisamment proche, je compris que la couleur de sa chemise ne provenait pas d'une faute de goût : le vêtement était entièrement imbibé de sang, lequel avait été nettoyé et séché de nombreuses fois. Mais ce genre de tâches ne disparaissait jamais entièrement... Nous nous levâmes afin de mieux reculer. Que faire d'autre dans ces cas-là ? La rousse s'arrêta enfin et posa ses yeux sur moi. Des yeux vides et grands ouverts. Les yeux d'une folle.

- Ainsi donc c'était vrai : Timuthé Tempiesta est revenu à Manshon.
- Quoi ?

  Oh ! Pas encore ça ! De nouveau le visage de ce maudit bandit allait me jouer des tours. Mais je me posais tout de même une question :

- Mais... comment savez-vous que...
- L'information est la base même de notre business. Tu devrais le savoir, non ? Ta famille possède de nombreux espions et tout autant de contacts. Il m'a suffit de laisser traîner mon oreille dans les parages et de demander aux bonnes personnes.
- Mais alors : tu n'es pas une Tempiesta ?
- Pas vraiment non. Le boss ne les apprécie pas trop d'ailleurs...
- Dans ce cas, pourquoi venir me voir ?

  La jeune femme me fixait toujours, sans changer d'expression. Elle ne cligna pas une seule fois des yeux. Flippant !

- T'es con ou tu le fais exprès ? Je viens de te le dire : mon patron ne les aime pas. Il sera donc ravi de savoir que j'en ai abattu un au cours d'une mission. C'est dommage pour toi : je n'étais pas venu pour ça à la base...
- Attend un peu ! Je ne suis pas Timuthé Tempiesta ! Je lui ressemble, c'est tout ! Je...
- Alors prouve-moi que tu n'es pas TNT.
- Comment ?
- Débrouille-toi.

  Elle fit mine d'appuyer sur la gâchette, puis s'amusa à faire tourner son doigt autour du déclencheur histoire de me faire peur. Il fallait réfléchir et très vite.

- Je suis trop jeune ! Je ne peux pas être le frère du chef de la famille Tempiesta à seulement 16 ans !
- D'accord je te crois.
- Déjà ?!
- Oui : tu as dit "le chef de la famille Tempiesta". Timuthé n'aurait jamais reconnu son frère comme étant le parrain. Il est réputé pour avoir tenté de prendre sa place.

 Mes sentiments vis à vis de TNT allaient désormais de la haine à la plus profonde des reconnaissances. Je me tournai vers Matt qui affichait un demi-sourire, livide. Il leva le pouce comme pour me dire "Bien joué !". Ce salaud n'avait même pas tenté de m'aider ! Mais je ne pouvais pas vraiment lui en vouloir. Aucun de nous deux n'était maître de la situation. La jeune femme regardait mon compagnon cette fois-ci.

- Toi là. Ta tête me dit quelque chose... Tu ne serais pas un de ces voleurs de la famille Martico ?
- Je ne le suis plus ! Je les ai quitté en le rencontrant.
- Oh ? Alors c'était vous.
- Comment ça ?
- J'ai entendu dire que récemment les membres de la famille Martico présents à Manshon avaient été évincés. Certains parlent d'un règlement de compte qui aurait mal tourné. Alors je suppose que vous y êtes pour quelque chose...

  Nous restâmes muets. La situation ne se présentait pas bien du tout. Une tueuse de la mafia avec des yeux de folle nous questionnaient sur les problèmes que nous avions causé à la pègre locale. Si seulement elle s'était approchée davantage, Matt et moi l'aurions désarmée sans problème mais...

- Ça me donne une idée.

 La folle nous fixait, passant de l'un à l'autre à toute vitesse. Elle aurait pu être jolie si elle n'affichait pas un faciès aussi étrange... et si son arme n'était pas braquée sur nous.

- Je vais vous enrôler avec moi.
- De quoi ?
- Oui : vous allez travailler avec moi. J'ai une mission importante à remplir et elle concerne les Martico ; notre boss, Filipe Venici, souhaite faire d'eux ses alliés. Puisque je ne peux plus demander leur soutien à ceux que vous avez mis hors-jeu, autant que vous preniez vos responsabilités en les remplaçant.
- Et si on refuse ?

  Matt regrettait déjà ses paroles. Aussi blanc qu'un linge, il vit le canon du pistolet se tourner lentement vers son visage, menaçant. La tueuse répondit froidement :

- Dans ce cas je vous élimine. C'est aussi simple que ça.


Dernière édition par Arhye Frost le Mar 11 Oct 2016 - 23:09, édité 4 fois
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Nous étions de retour à l'auberge. La tueuse, qui disait s'appeler Natalia, nous y avait reconduis en compagnie de ses hommes. Lorsque nous les vîmes, armés jusqu'aux dents et l'air meurtrier, nous pensâmes la même chose : la mission qui lui avait été confiée n'avait rien à voir avec un cambriolage ou un simple règlement de comptes. Ils étaient une douzaine, des costauds à la mâchoire carrée, avec un même tatouage : une rose aux pétales flétris. Les Venici comptaient de nombreux travailleurs et ouvriers dans leurs rangs, il n'était donc pas rare de voir de solides gaillards parmi eux.

  Deux de ces armoires à glace étaient restés avec Natalia et nous dans la chambre, tandis que les autres squattaient le couloir et les pièces voisines. La rousse s'assit en face de nous. Sur mon lit :

- Bien. Il est temps que je vous explique notre mission.
- D'accord mais...
- Nous allons nous introduire dans la base de la Marine pour y dérober de précieux documents.
- Attendez, vous êtes sérieux ?!
- Ces documents se trouvent dans les quartiers de Jonas Portefoudre, le vice-lieutenant. Ici, à Manshon, tout le monde sait qu'il s'est fait de nombreux amis dans la mafia. Grâce à ses relations, il a su se procurer d'importantes informations sur la plupart des familles, qui sont toutes autant de moyens de pression que de traités commerciaux approuvés par la Marine pour éviter que la situation ne s'envenime entre le Gouvernement et les 7 familles.
- D'accord mais...
- Nous devons absolument mettre la main dessus, car chacun de ces dossiers est une arme que nous pourront retourner contre les Tempiesta ou leurs alliés. Les Venici ont été trop longtemps méprisés. Nous allons prendre la place qui nous revient de droit et faire tomber le faible qu'est devenu Don Carbopizza.
- Oh là ! Pas si vite ! Ça veut dire qu'on va devoir infiltrer un endroit rempli de soldats prêts à tirer sur n'importe quel intrus ? Est-ce que vous êtes au courant des événements de ces dernières années ? Il y a encore quelques mois, la Marine a fait face à de graves incidents sur l'île ! Sans parler du nouveau colonel qui...
- Nous le savons. Mais il est impossible de refuser un ordre du boss. Je ne reviendrai qu'avec ces documents. Ou alors je ne reviendrai pas.
- Bon, d'accord. Mais...
- Qu'y a-t-il ?
- Tu... Vous comptez rester ici cette nuit ?
- Oui. Un problème avec ça ?
- Eh bien : pour mon lit je fais comment ? Parce que celui-ci, c'est le mien.

  Natalia conserva son air indifférent en me fixant. Elle tourna lentement la tête vers mon oreiller, puis sous elle, comme pour vérifier la véracité de l'information. Ses yeux revinrent dans ma direction :

- Ton nom n'est écrit nul part. Débrouille-toi avec ton ami.

 En temps normal, la répartie m'aurait vexé et fait réagir. Mais j'étais bien trop surpris par l'indifférence que traduisait le ton de sa voix et par le contexte dans lequel nous nous trouvions en disant cela pour répondre quoi que ce soit. Ses deux hommes, eux, ne se firent pas prier et ricanèrent en me pointant du doigt. Décidément je l'appréciais de moins en moins, la jolie rousse !

- Bon. Il se fait tard : je vous conseille de dormir. Demain sera une dure journée. Bonne nuit.

  Sur ces mots, la folle se leva, ferma les volets, posa son pistolet sur la table de chevet et commença à... se déshabiller ?!
Les sentinelles penchaient la tête en avant, comme si l'allonge de leur cou énorme leur permettait d'améliorer la vue sur cette scène incroyable : Natalia avait retiré sa veste et ses bretelles. Puis ses chaussures et ses chaussettes... Elle commença à déboutonner sa chemise... Puis ses yeux retombèrent sur moi. Aïe.

- Qu'est-ce que tu attends ?
- Euh... hum pardon ?
- Je t'ai dit de te coucher. Toi, là  pareil.
- Et les deux gros, à l'entrée ?
- C'EST QUI LES GR...
- Ils dorment ici. Mes hommes se relaieront pour surveiller les lieux, histoire que vous ne fassiez pas de bêtise. Ils ont un oreiller chacun, sur le pas de la porte. Maintenant plus un bruit, et dodo.

  Ah oui, effectivement ils en avaient un. Mais attend... Elle venait pas de nous parler comme à des enfants, à l'instant ? Oh, alors elle j'allais me la...

- Bonne nuit.
- Ah euh oui, bonne nuit.

 La rousse enleva sa chemise et son pantalon et s'enfila dans mon lit. Je me retrouvai comme un idiot, assis à côté de Matt qui avait déjà commencé à retirer son haut. La situation ne le dérangeait donc pas ? Je le regardai bouche bée et il finit par me remarquer. Il se contenta de m'adresser un sourire et termina sa tâche, puis il écarta les draps et tendit la main, comme pour m'inviter à prendre place. Cette fois c'était sûr : je ne devais surtout pas fermer l’œil de la nuit !

  Je soupirai, passai la main dans mes cheveux et retirai mes affaires pour m'installer à côté du voleur aux allusions douteuses. Je me trouvai du côté gauche, celui qui me permettait de voir la pièce dans son ensemble : les deux gorilles chuchotaient entre eux, la main sur l'étui de leur arme ; les habits de la folle étaient éparpillés au pied du lit, sauf les chaussures qui étaient parfaitement rangées sous la table de chevet ; sur celle-ci, le pistolet reposait, le canon pointé dans ma direction, à la fois inoffensif et menaçant ; je levai les yeux pour voir ceux de la rousse grands ouverts, perçants, qui me fixaient toujours ! Bon sang, elle était pire que ma mère ! Si elle n'était pas si jolie, il y aurait de quoi faire des cauchemars...

  Déconfis et déjà en sueur, je me retournai, préférant faire face à Matt. Cette andouille me regardait aussi. Il osa même me faire un clin d’œil ! Bon, c'en était trop : je fermai les miens et essayai de me concentrer sur quelque chose d'autre que toutes les menaces présentes dans la pièce. Un mouton, deux moutons, trois moutons...

- Psst.
- Grmmblff...

  "Sweety" me donnait des petits coups d'index sur le front pour me réveiller... Me réveiller ? Zut.
Il plaça son doigt sur ma bouche et hocha la tête en direction de Natalia. Je me tournai le plus discrètement possible et la vis. Endormie.

- Souhaite-moi bonne chance...

  Matt se redressa silencieusement et posa lentement pied au sol. Je regardai furtivement en direction des hommes à la porte. Eux aussi fermaient les yeux.
Mon compagnon fit un pas, puis un deuxième. Au troisième pas, le plancher grinça. Nous serrions les dents conjointement, le regard allant de la belle aux deux bêtes. Aucune réaction. Ouf. Il continua d'avancer jusqu'à être suffisamment proche de l'arme de la mafieuse pour l'attraper. A ce moment-là, il se permit un petit coup d’œil dans ma direction pour lever son pouce en signe de victoire. Je le lui rendis, l'encourageant à continuer. Plus que quelques centimètres et nous aurions une chance de recouvrer notre liberté...
Au moment où ses doigts se posèrent sur le pistolet, la main de la rousse se referma brutalement dessus.

  Matt devenait de plus en plus blanc dans l'obscurité de la chambre tandis que Natalia le transperçait de son regard troublant. Elle utilisa son autre main pour arracher l'arme des doigts du voleur blond et la pointa sur son cœur. Au bout de quelques secondes, elle finit par le pousser vers moi. Hébétés, nous attendions sa sentence.

- Je vous ai dit de dormir. C'est pourtant pas si compliqué.

  Et la belle se retourna, s'enfilant confortablement dans ses draps, le pistolet serré contre elle à la manière d'une peluche. Nous nous regardions avec Matt, sans vraiment comprendre le... sans comprendre.
Le pire, c'est que tout ce stress m'avait donné envie de fumer.


Dernière édition par Arhye Frost le Ven 14 Oct 2016 - 18:26, édité 5 fois
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Plus tard dans la nuit, je me levai discrètement, suivi par Matt, et nous allumions notre cigarette. Nous aurions presque pu sauter par le balcon, mais les hommes de Natalia s'étaient réveillés à cause des grincements et des chuchotements. Ils s'étaient rapprochés et nous collaient littéralement, avec un petit sourire en coin. J'aurai pu les trouver sympathiques s'ils ne nous braquaient pas leurs pistolets directement dans les côtes. Je tentai néanmoins de détendre l'atmosphère :

- Elle ne doit pas être facile à vivre tous les jours.
- Natalia ? Et comment ! C'pas pour rien qu'on la surnomme "la Rossa".
- La quoi ?
- La Rouge si tu préfères. C'pour ça qu'on a ce tatouage d'ailleurs : on bosse directement sous ses ordres. Mais attention, y a pas plus fidèle à la famille qu'elle. Le boss lui fait entièrement confiance.
- Et... pourquoi la Rossa au juste ?
- Ah ça : chaque mission dont elle s'occupe se termine avec des morts, du sang et des tâches. T'as vu ses cheveux ? Et sa chemise ? C'est mérité c'nom-là !
- Hé ! On est pas là pour faire ami-ami ! J'te rappelle qu'on les engage seulement pour la mission.
- Et alors ? Ça ne nous empêche pas de nous montrer un minimum civilisés !
- D'ailleurs si nous apprenons à communiquer ensembles, votre mission n'en sera que plus simple. Et puis je ne pense pas que nous tuer maintenant vous rapporte grand chose, sinon vous ne nous auriez pas "engagés".
- Mouais... faîtes pas trop les malins, tous les deux !
- Allez ça va, ça va. Bon d'toute façon : Natalia, c'pas une tendre c'est vrai. Mais on s'y fait ! Et puis elle a ses bons côtés, vous verrez ! C'pas comme si...
- Vous voulez ben vous taire ? J'aimerai dormir tranquillement.

  Nous nous retournâmes tous les quatre et vîmes la jeune femme qui nous observait du coin de l’œil, toujours emmitouflée dans sa couverture. Elle ne semblait pas en colère, mais je sentais se dégager d'elle une autorité et un charisme que n'aurai pas su expliquer. Ce qui était certain, c'est qu'à cet instant je n'envisageais pas une seule seconde de lui désobéir. Matt et moi finîmes notre cigarette aussi vite que possible et retournâmes au lit. Les deux chiens de garde retournèrent quant à eux s'asseoir à l'entrée.

 Au petit matin, Natalia nous réveilla tous d'une petite claque sur la joue.
Toute la bande se retrouva dans la pièce principale de l'auberge pour discuter du plan et de ses préparatifs. Bizarrement, nous étions les seuls clients présents.

- Nous allons faire cinq équipes de trois. Chacune d'entre elles devra s'approcher de la base et étudier les déplacements des patrouilles, les horaires d'échange, la répartition des soldats et des structures... En somme tout ce qui semble nécessaire à la réussite de l'infiltration.
- Pourquoi seulement trois ? On serait plus en sécurité en formant deux groupes..
- Tout d'abord : quatre groupes s'occuperont de l'espionnage des murs et des portes. Le dernier groupe s'occupera de mettre en relation les informations recueillies et d'un éventuel remplacement, voire d'une diversion si nous nous faisions repérer. Et justement : il nous sera plus simple de passer inaperçus, en pleine journée, si nous sommes moins nombreux.
- Comment répartissons-nous les équipes alors ?

  Lorsque la jolie rousse me toisa avec son air indifférent, je compris que je venais de perdre une occasion de me taire.

  Natalia, Matt et moi étions tous les trois sur le toit d'un bâtiment proche de la base. Nous espionnions le mur Est en faisant attention à rester discrets : il y avait trois tours de garde, annexées à une double-porte en métal. La base était située près des faubourgs, non loin de la rive. Il s'agissait d'une caserne munie de locaux pour les officiers, de dortoirs pour les soldats et de garages et réserves pour les chariots de convoi et pour le stock de munitions et de poudre. Le tout était encadré par quatre murs de près de quinze mètres de haut chacun. La seule façon de voir au-delà était de se placer sur les bâtiments construits sur des monticules de terre, proches de la falaise. Chaque tour de garde était comptait deux soldats munis de jumelles.

- Pourquoi autant de sérieux ? Ce n'est pas comme s'ils risquaient de se faire attaquer sous peu !
- Peut-être, mais ils vont se faire infiltrer sous peu.
- Oui, mais ils ne sont pas censés le savoir !
- Ça doit venir du colonel Corazon : depuis qu'il est en poste ici, la 257e division s'est déjà retrouvée mêlée à deux incidents graves. Je pense qu'il tient à conserver l'ordre et la discipline dans sa division, afin de décourager d'éventuels causeurs de troubles voulant semer la pagaille à Manshon.
- Tss... Ca me saoule.

  Notre séance de commérage dura presque six heures. Lorsque Natalia se décida à partir, j'eus l'impression qu'une fourmilière s'était installée dans mes jambes. La sensation d'engourdissement ne s'acheva que lorsque je me fus assis à une table, de retour à l'auberge. Nous discutâmes longtemps de ce que nous avions découvert : une patrouille de quinze individus sortait par les quatre portes en métal à intervalles d'1h30. D'abord par la porte Nord, enfin par la porte Ouest. Les gardes des miradors se relayaient toutes les 3h. Sur deux des murs se trouvaient des bouches d'aération, assez récentes, servant à aérer l'intérieur des remparts. Les portes ne s'ouvraient que pour laisser passer les patrouilles à l'entrée, puis à la sortie. Exceptionnellement, elles s'ouvraient pour accueillir un ou deux civils, certainement de bonne famille ou ayant un rôle d'indicateurs. La cinquième équipe s'était chargée d'arrêter l'un d'entre eux : il s'agissait d'un marchand de jouets, travaillant pour le compte des Tempiesta.

- Apparemment, il ne vendrait pas que des jouets pour enfants.
- Pour enfants... C'est à dire ?
- La Marine est au courant : il s'agit de poudre et de munitions. La mafia et la 257e division peuvent se fournir sous couverture d'un marché légal à moindre frais pour avoir de quoi caresser la gâchette à n'importe quel moment. Si une bataille d'envergure devait avoir lieu sur l'île, ils ne manqueraient jamais de rien pour repousser l'adversaire.
- C'est une bonne information, mais qu'est-ce que ça nous apporte de le savoir ?
- Si nous parvenons à pénétrer dans la base : ils hésiteront encore moins à gâcher des balles pour nous éliminer.

  Réjouissant.
 Au bout d'une bonne heure, la folle décida de nous laisser "quartier libre", expliquant que nous recommencerions le lendemain. Je regardai l'horloge qui indiquait 20h30. Il n'était pas tellement tard et je ressentais le besoin de me défouler. Je demandai à Matt de m'accompagner au vieil entrepôt, immédiatement suivi par nos deux gardes du corps attitrés.

  J'inspirai profondément. Puis j'expirai. Je regardai le muret abîmé face à moi en me concentrant. Je devais faire abstraction de toute pensée néfaste : allais-je avoir mal ? Allais-je réussir ? Allais-je insuffler ma force dans la pierre afin de la détruire ? Toutes ces questions, je les chassais de mon esprit pour ne penser qu'à mon objectif. Je contractai les muscles de mes jambes tout en penchant mon corps vers l'avant. J'allai foncer sur ce muret et rapidement le réduire en miette ! Lorsque je fus suffisamment penché, je m'élançai à toute vitesse et arrivai en un instant sur ma cible. Pied gauche e avant, arrêtant ma course, je dépliai le bras droit et frappai de toutes mes forces la pierre qui me faisait obstacle.

CRAC !

  J'avais mal. Le bout de mes phalanges était écorché. Le muret en face de moi était détruit, certes, mais ce n'était dû qu'à ma force brute, alimentée par la frustration et la nervosité. Me retrouver ainsi, aux services d'une criminelle, avait réussi à me mettre hors de moi. L'un des mafieux derrière moi siffla, impressionné par la démonstration. "Sweety" me dévisagea longuement, soucieux. Je retournai m'asseoir à côté de lui en sortant les pansements qui se trouvaient dans ma sacoche, ainsi qu'une cigarette. J'avais fini par m'y habituer, bien malgré moi...

- Tu sais, je ne pense pas que ce soit forcément un mal.

  A mon tour je regardais Matt, en haussant les sourcils.

- Qu'est-ce que tu veux dire ?
- Je ne te contredirais pas sur le fait que cette Natalia est dangereuse. Je ne dirais pas non plus que la situation me plaît, même si nous partageons enfin la même couche.
- Tu m'énerves.
- Mais je crois que tu devrais en profiter.
- En profiter ? Pour quoi ? Pour expérimenter le syndrôme de Stockholm ?
- En profiter pour trouver des informations sur ce que sont devenus tes parents et pour tester ta résolution.
- Ma résolution ? Mais qu'est-ce que tu...
- Tu veux être un pirate, non ? Tes parents ont été emmenés sur ordre du Gouvernement. Et tu m'as dit que si cette voie te convenait, c'était parce que tu pensais faire bouger le système.
- J'aurais pu devenir révolutionnaire si ça ne tenait qu'à ça.
- Je termine : tu veux provoquer des débordements suffisamment importants pour que le Gouvernement réagisse. Et même si c'est naïf et incorrect, j'admire le courage qu'il t'a fallu pour choisir ce chemin-là. Je te l'ai dis, Arhye. Je te soutiendrai quoi qu'il arrive à partir de maintenant. Mais si tu dois agir pour tes convictions, n'hésite pas à saisir toutes les opportunités qui s'offrent à toi, même si elles impliquent d'obéir un temps à la mafia.

  J'ouvrai la bouche pour répondre, mais je ne trouvai rien. En y réfléchissant, il avait raison. Je ne me projetais pas assez dans l'avenir pour anticiper les avantages et les inconvénients. J'avais même mis de côté des éléments importants, comme la corruption évidente de la 257e division, parce que je me souciais davantage de ma situation que des résultats obtenus en tant qu'espion temporaire. Chaque action entraîne une conséquence... à l'avenir il me faudrait davantage y songer. Et mettre en application les conseils de Matt.
Je lui offris un sourire plein de reconnaissance, qu'il me rendit avec un air satisfait. Je terminai de fumer et me tournai vers les deux hommes de Natalia, assis la tête entre les mains.

- Bon, les deux gros, on rentre ? Il commence à faire frais ici.
- C'EST QUI LES GR...
- Allez, allez : on en discutera à l'intérieur. Pour l'instant, on avance !


Dernière édition par Arhye Frost le Ven 7 Oct 2016 - 14:36, édité 2 fois
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La deuxième journée d'observation était terminée. Nous étions enfin tombés d'accord sur un plan d'action. L'atmosphère était tendue. Natalia se penchait sur la table où nous étions ; une bougie éclairait son visage par en dessous, lui donnant un air lugubre.

- Nous devrons encore former des équipes. La première sera composée de mes hommes : ils mettront en place des explosifs au niveau de la bouche d'aération près de la porte Ouest. L'explosion devrait suffire à faire une brèche dans le mur pour que tout le monde puisse rentrer.
- Pas de problème, Nat' !
- Bien entendu vous serez notre diversion, car Matt sera chargé de pénétrer à l'intérieur du bâtiment par la bouche d'aération près de la porte Nord. Puisqu'il s'agît de l'entrée principale, la surveillance y est plus légère : beaucoup de va-et-viens routiniers, une vue imprenable sur l'ensemble du quartier... La monotonie sera notre alliée. Tu t'en sens capable ?
- Je suppose que la réponse doit être "oui" ?
- En effet.
- Eh bien j'y veillerai.
- Et moi, qu'est-ce que je fais ?
- Toi, tu viens avec moi. Nous allons nous faire passer pour des indicateurs des Tempiesta. Nous demanderons à voir Jonas Portefoudre, le vice-lieutenant.
- Mais... tu n'avais pas dit qu'il avait de nombreuses relations au sein de la mafia ? Il verra tout de suite que nous sommes des imposteurs !
- Pas si tu joues le jeu correctement. Et puis c'est aussi pour ça que nous avons une diversion : une fois que les bombes auront explosé, nous profiterons de l'effet de surprise pour éliminer nos réceptionnistes avant d'atteindre l'officier et infiltrerons la base. Nous n'aurons plus qu'à rejoindre Matt  pour s'assurer que tout se passe pour le mieux.

 Je ne pouvais pas me leurrer : le risque zéro n'existait pas. Personne à cette table n'espérait s'en sortir sans problème. Même les deux gorilles qui nous servaient de nounous tatouées savaient qu'ils risquaient leur peau, malgré le peu de cervelle dont ils étaient dotés.
Natalia termina la réunion en annonçant l'heure du début de l'opération : midi pile. Il s'agissait de l'heure à laquelle presque tous les surveillants des miradors se faisaient remplacer, ainsi que la patrouille de la porte Nord. L'occasion rêvée ! Une occasion trop belle... Non Arhye, ce n'était pas le moment de te mettre ce genre d'idées en tête ! Tout ira bien car le plan de la folle était parfait. Du moins le plus réalisable qui soit.

 Je n'arrivais pas à dormir. Je me tournai et me retournai dans le lit, failli par deux fois effleurer la joue de Matt du bout des lèvres, me cognai autant le bras contre la rambarde en bois, puis fini par m'étendre sur le dos, les yeux grands ouverts. La pièce était sombre, mais j'avais fini par m'habituer à la pénombre : sur la table face à moi, un vieux livre était posé, ainsi qu'un pot de fleurs garni de tulipes ; un tableau représentant une chaloupe sur l'océan, soleil couchant à l'horizon, était accroché au mur de gauche ; sur celui de droite, trois assiettes en porcelaine de manufacture ancienne ; au pas de la porte, toujours les deux Venici qui ronflaient en rythme, chacun leur tour ; dans l'autre lit, "la Rossa", les yeux clos et la respiration lente et presque inaudible. J'étais certain de pouvoir redessiner cet endroit les yeux fermés, si l'occasion se présentait. Mais ce ne serait qu'une faible distraction.

 En vérité j'avais peur. Je redoutais les épreuves du lendemain : je ne me sentais pas prêt à m'attaquer à une base de la Marine, moi qui aspirait à y rentrer autrefois. Un rêve de gosse vite effacé par la réalité des choses... C'était d'ailleurs à cause de cette réalité que j'en étais là aujourd'hui. Un pseudo-pirate aux mains d'une tueuse. Mais je n'avais pas le droit de m'apitoyer sur mon sort alors que Matt se trouvait à côté de moi. Lui avait connu l'amour, la perte et le mépris le plus total. L’inexistence. Il était mon compagnon et mon ami désormais et je pouvais compter sur lui pour m'épauler. Sa présence me donnait de la force... J'espérais sincèrement qu'elle serait suffisante pour ce que nous réservait le lendemain. Je regardai le voleur, endormi à quelques centimètres de moi. Il souriait.

 Les 12 hommes de Natalia s'étaient regroupés à l'endroit indiqué, cachés derrière l'un des postes de reconnaissance extérieurs. Matt attendait patiemment de son côté que les gardes se relaient. Deux minutes plus tard, nous le vîmes s'élancer sans bruit vers le mur d'enceinte. Une fois arrivé, il longea la paroi jusqu'à atteindre la fameuse bouche d'aération. Celle-ci ne se trouvait pas au niveau du sol, mais à un peu plus de deux mètres en hauteur. Le voleur regardait sa cible, dubitatif. Puis il tourna la tête dans ma direction et prit un air gêné. Je le vis me faire signe de venir.

- Quoi, sérieusement ?!

 Je me tournai vers Natalia qui se contenta de hausser des épaules en me poussant en avant. J'allais devoir courir le rejoindre avant que les nouveaux soldats n'arrivent aux miradors et que la patrouille ne sorte de la porte Nord. Un jeu d'enfants !

- Bordel de m...

 Je fonçai à toute vitesse et arrivai aux pieds du mur. Là, le blond me gratifia d'un sourire empli de reconnaissance et me désigna la bouche en hauteur :

- Tu veux bien me porter sur tes épaules, le temps que je l'ouvre et que je m'y enfile ?
- Oui d'accord d'accord, mais dépêche-toi !
- Ca marche. Vas-y penche-toi... parfait ne bouge plus, j'y vais.
- Aïe ! Mais fais doucement ! T'es beaucoup plus brutal qu'il n'y parait !
- Excuse-moi, je me suis trompé de...
- Allez, qu'on en finisse !
- Bien, dans ce cas...
- ...
- ...
- Euh... c'est bon ?
- Encore un et c'est bon.
- Comment ça encore un ? Dépêche !
- Je risque de faire du bruit si je me dépêche !
- Parce que tu fais pas du bruit, là ?
- Oh écoute si t'es pas content, t'as qu'à prendre ma place et tu v...

 "Hé ! T'as vu ça ?"

 Nous nous figeâmes sur place. Au dessus de nous, des voix s'élevaient. L'échange dans les miradors était terminé.


Dernière édition par Arhye Frost le Dim 9 Oct 2016 - 15:40, édité 1 fois
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Les deux gardes s'étaient penchés par dessus la rambarde. Le premier indiquait du doigt un nuage noir à l'horizon loin derrière nous et le deuxième ajoutait :

- Le temps se gâte... On va encore avoir droit à un après-midi dégueulasse !

  Nous n'osions plus respirer. Matt tremblait sur mes épaules, mais je ne voulais pas lever la tête, de peur que ce simple mouvement attire l'attention sur nous.
Finalement, les marines rentrèrent la tête à l'abri de leur cabane à oiseaux et nous pûmes souffler. "Sweety" retira le dernier vis maintenant les grilles de la bouche d'aération et commença  s'y engouffrer, sans bruit, à la manière d'un félin. Pas de doute, il connaissait son travail et il le faisait bien. Il prit même soin de remettre la grille derrière lui.

- Bon, on se retrouve tout à l'heure. Bon courage, l'ami !
- Bon courage à toi, sois prudent.

  Sur un dernier clin d’œil, il disparut dans l'obscurité.
Bon, une bonne chose de faite. Le problème était maintenant que je ne pouvais plus retourner auprès de Natalia, laquelle était assise tranquillement derrière un arbre. J'avais envie de la tuer.

  Je réfléchissais, collé contre la paroi en pierre. Mais je craignais tellement de me faire prendre que les idées se mélangeaient dans ma tête. Histoire de m'achever : ma baignoire était pleine et le liquide impropre frappait violemment contre ma vessie. Bon en fait je paniquais carrément ! "Dieu, si tu existes je t'en prie ! Fais en sorte que les portes s'ouvrent et..."

CROUIIC.

  Les portes s'ouvraient.
Non sans blague : elles s'ouvraient vraiment !
Tout à coup mon désir sauvage d'uriner s'estompait. Non pas parce que j'étais heureux, mais parce que si elles s'ouvraient, c'était pour laisser sortir la patrouille.
Par pur réflexe, je me tournai rapidement vers le mur et baissai mon pantalon, les mains jointes sur l'arrosoir qui m'avait lâchement abandonné au moment le plus important. C'était vraiment pas le moment d'avoir un choc émotionnel... Non mais comme si mon engin était capable d'avoir un choc émotionnel ! De ma vie je n'avais jamais entendu parler de vessies ayant subi une crise de tétanie.
Les premiers hommes sortaient et celui de tête tourna la sienne dans ma direction.

- Toi là ! Mais qu'est-ce que tu fiches ici ?!
- Ben ça se voit pas ? J'essaie de me soulager !

  Oh bordel, mes nerfs avaient lâché eux aussi ! La patrouille commença à m'encercler. Oppressée, ma vessie s'agitait à nouveau. "Enfin ! Tu vois quand tu veux !"

- Depuis quand t'es ici ?
- Un petit moment déjà... J'ai eu une panne. Mais là ça va mieux.

  Comme pour confirmer mes dires, une giclée dorée jaillit, me libérant d'un de mes principaux soucis. Ô bonheur éphémère...

- Mais.. tu te rends compte que t'es devant la base de la 257e division ?!
- Ah euh... oui ! Tout à fait.
- Et tu ne crains pas les conséquences ?
- Eh bien en fait : je suis justement venu pour voir l'un de vos supérieurs, avec une collègue. Mais sur le chemin j'ai eu une envie pressante alors j'ai couru pour me soulager avant de me présenter.
- Et où est-elle, ta collègue ?
- Je suis là.

  Je remontais mon pantalon et vis Natalia passer entre les soldats pour se placer à côté de moi. Avant que notre interlocuteur n'ait le temps de dire quoi que ce soit, elle continua :

- Nous sommes venus pour parler au vice-lieutenant Jonas Portefoudre. Nous avons des informations urgentes à lui transmettre.
- Eh bien : dîtes-moi de quoi il s'agit et j'aviserai avec lui.
- Ces informations concernent votre supérieur et votre supérieur seulement.

  Je ne savais pas si je devais être impressionné par la tension des soldats, les mains fermement serrées sur leur mousquet, ou par l'assurance de la rousse, mais j'attendais avec appréhension de voir comment les choses allaient se passer. Finalement le marine soupira :

- C'est toujours la même chose avec les indic' ! Il faut absolument que ce soit le vice-lieutenant... A chaque fois... Bon suivez-nous, on va rouvrir les... Attend un peu toi : ta tête me dit quelque chose. C'est quoi ton nom ?

  Pendant un temps, je regardai autour de moi, cherchant la personne ainsi interpellée. Le regard du marine me fit comprendre que je n'avais plus besoin de chercher. Mais où avait-il bien pu voir ma tête ? A moins que... Oh : Timuthé. Encore.
J'essayais de penser à un maximum de mensonges possibles. Devant moi, l'homme s'impatientait, alors je me lançai :

- Little Brother ! Je m'appelle Little Brother.
-"Little Brother" ? Mais c'est pas un nom !
- C'est ainsi que le parrain et les autres me surnomment depuis tout petit. Parce que je ressemble un peu à son frère.
- Le parrain... Tu veux dire Manuel Tempiesta ?
- Oui ! Voilà, je suis un... "proche" du Don.
- Un proche ? C'est à dire ?
- Oh, on n'entend pas beaucoup parlé de moi. Je ne fais que servir le Don de toutes les manières possibles. J'exauce le moindre de ses désirs, je cède à ses caprices, je l'accompagne au bain, je...
- Oh là, attend ! Qu'est-ce que tu racontes ?!

  En effet, il fallait que je me calme, sinon je risquais d'aller trop loin.

- Eh bien... Je suis là pour assouvir les fantasmes du Don.

  Et voilà.
Devant moi, la patrouille entière avait des yeux ronds. Même "la Rossa" entrouvrait la bouche, un sourcil froncé, traduisant sa stupéfaction la plus intense.

- Hé ? Quoi ? Que...
- Hum, c'est gênant d'en parler ici. On ne pourrait pas rentrer, s'il vous plaît ?
- Alors ça ! Le fameux Don Carbopizza serait de ce bord-là ? Incroyable ! Alors ça...

  Finalement, la patrouille nous suivait jusqu'aux portes, lesquelles commençaient à se rouvrir. Mais qu'est-ce qui m'avait pris de raconter ça moi ? Faire passer le parrain le plus réputé des 7 familles pour un dépravé et pour un... Je ressentais les effets malsains qu'avait l'influence de Matt sur moi. Une raison supplémentaire de lui en coller une quand l'occasion se présenterait. Mais au moins ce genre d'histoires farfelues avaient l'avantage de détourner suffisamment l'attention de ses interlocuteurs pour obtenir ce que l'on souhaitait. Nous commencions donc à franchir le seuil de la porte...

BOUM !
Nous nous figeâmes. Tous.

BRAOUM !

D'énormes explosions venaient de faire sauter un morceau du mur Ouest. L'assaut des Venici commençait.
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- Qu'est-ce que...

 Le soldat ne termina jamais sa phrase. Natalia venait de lui planter son couteau dans la gorge. Lorsqu'elle le retira, la vue du sang qui suintait en abondance nous figea, marines et moi-même.

- Qu'est-ce que tu attends ? Ça a commencé.

 "La Rossa" me ramena sur terre et en profita pour dégainer son pistolet. Elle tira dans la tête des deux ennemis les plus proches tandis que leurs camarades reprenaient leurs esprits. L'un d'eux tenta de dégainer son sabre. Je lui tordis le poignée, l'empoignai par les cheveux de ma main libre et encastrai sa tête dans celle de son voisin. Natalia égorgea un épéiste alors qu'il fondait sur elle, pas assez vite malheureusement, et tira sur un fusilier prêt à faire feu. Plus que huit.

- Tu vas voir !

 Quatre autres pointèrent leurs mousquets dans notre direction. Malgré la faible distance, je parvins à me baisser juste à temps, tandis que mon alliée bondit sur le côté. Elle en abattit deux. Remarque personnelle : ne devenir son ennemi que si elle devient aveugle ou manchote. Sa précision était démoniaque... Je profitai d'être à terre pour tourner sur moi-même, jambes étirées, et fis trébucher le duo restant. J’enchaînai en plaçant mes mains au sol, en me tenant en équilibre et en écrasant d'un seul coup de pied la cage thoracique des tireurs.

 Tout allait très vite. Je me relevai et une balle me frôla la joue. La sensation de brûlure me fit passer la main dessus, par réflexe, alors que mon agresseur tombait, un trou à la place de la nuque. La rousse lança son couteau sur l'un des survivants qui s'écroula.

 Il ne restait que deux marines, les mains tremblantes alors qu'ils nous mettaient en joue. Leurs yeux faisaient des va-et-viens frénétiques entre nous et les cadavres de leurs compagnons. Le courage les avait quitté :

- N'a... N'approchez pas ! Plus un geste ! Sinon nous...
- Sinon quoi ?

 La folle les fixait, aussi neutre qu'à son habitude, ce qui ne rassurait en rien les patrouilleurs. Ils ne devaient pas être habitués à ce genre d'intervention musclée. Sans doute cette base était-elle leur première affectation... Pas de chance pour eux. Mais je me méfiais de leur réaction probable : aux vues de leur effroi, ils risquaient soit d'être paralysés en dépit de nos mouvements, soit de tirer, dans une ultime détresse. C'était quitte ou double. Je tentai pourtant le coup et m'approchais d'eux, le plus confiant et le plus serein possible. Père ne disait-il pas que l'état d'esprit était contagieux, en situation de crise ? Quoique je n'étais pas certain d'avoir bien saisi où il voulait en venir...

- Je te préviens, je vais tirer ! Arrête-toi...
- Vous n'allez quand même pas tirer sur un homme désarmé ?

 La remarque les fit hésiter. Pendant un temps ils ne tremblaient plus, mais leurs doigts avaient desserré leur étreinte sur la gâchette. C'était ma chance ! Désolé, mais je ne comptais pas mourir, de plus j'avais une mission à accomplir.
Je fondis sur eux, agrippai le canon de leurs fusils et poussai de toutes mes forces, profitant de l'élan. La crosse de leur arme vint se ficher dans leur front et les envoya se cogner l'arrière du crâne sur le mur d'enceinte. Je vérifiai qu'ils étaient bien inconscients puis soufflai :

- Woah, la pression ! Au départ, je le sentais pas, à deux contre quinze !
- Seulement au départ ?

 Ouch ! Touché. Vite : on se rabat sur les cheveux. Décidément, les combats n'étaient pas faits pour les mèches longues. Natalia m'attrapa par la main et courut jusqu'au bâtiment à notre gauche, un immense pavillon collé au mur. D'abord, je crus qu'elle voulait se cacher des soldats qui arrivaient de toute la caserne pour s'approcher du lieu de l'explosion. Je compris ensuite en voyant l'écriteau en fer au dessus de la porte du bâtiment : "Quartier des officiers". De toute manière, l'ennemi était bien trop absorbé par les dégâts causés par les Venici pour nous remarquer. Les choses sérieuses allaient commencé dès à présent.

 La rousse ouvrit la porte. Elle avait lâché ma main pour reprendre son pistolet, se préparant au pire. Une fois qu'elle fut à l'intérieur, rien ne se produisit. J'entrai à mon tour et la suivis de près. Nous courûmes dans les couloirs sans croiser personne. Tous devaient se trouver en extérieur, ou en haut des murs. Cette pensée fut vite balayée par des ordres et des bruits de pas nombreux venant dans notre direction. Nous nous bifurquâmes rapidement sur la droite pour éviter l'attroupement et je vis au dessus de moi une indication :"Escaliers - à droite ; bureaux - en face". J'invitai Natalia à me suivre et nous fonçâmes en direction des escaliers. Nous trouverions forcément les quartiers des officiers supérieurs là-haut !

 PAN !

 Une balle passa à côté de moi. En haut des escaliers nous attendaient trois hommes. Celui du milieu tenait un sabre dans la main droite et un livre dans la gauche. Il fit un pas en avant, couvert par les deux fusiliers :

- Il est interdit de courir dans les couloirs. Article 3 du Code en vigueur dans la plupart des établissements scolaires et professionnels du Gouvernement.

 Cet officier, un quarantenaire à la mine sévère et au buste droit, affichait un visage renfrogné. S'il n'avait pas les mains prises, je l'aurai certainement imaginé les placer sur ses hanches tout en tapant du pied. Cela me donnait également envie de lui poser une question.

- J'ai bien fait de me montrer suspicieux ! Tous nos hommes sont censés aller en direction de la sortie.
- Et pourquoi vos hommes ont le droit de courir, eux ?
- C'est une situation d'urgence ! Nous n'obéissons qu'au Code Civil de la Mar...
- Pour nous aussi c'est une situation d'urgence ! Si on ne court pas, vous allez nous tirer dessus !
- N'essaie pas de te payer ma tête !

 Il leva le bras. Je perçus le danger et sautai sur le côté. L'officier baissa le bras et ses deux hommes tirèrent. Natalia avait bondi, elle aussi, et en profita pour tirer sur l'un d'eux. L'autre pointait désormais son arme sur elle et la rousse comprit qu'elle n'aurait pas le temps de se redresser. Je me relevais pour l'aider mais une lame vint se coller contre ma gorge. Ce type au Code était rapide !

- Ecoutez-moi bien : moi, Alec Kaloupalekis, sous-lieutenant de la 257e division, refuse catégoriquement que l'on vienne semer le désordre au sein de cette base ! Et comme le stipule l'article 98 C, alinéa 3, du Code Civile de la Marine, jamais, au grand jamais un soldat ne devra faire preuve d'oisiveté ou de nonchalance lorsque la survie ou l'honneur de ses compagnons ou du symbole qu'est la Marine sera en jeu. Toute personne portant atteinte à l'armée sera aussitôt considérée comme...

 Il se tut aussitôt et chuta. Derrière lui, le deuxième fusilier était à terre, assommé. La cause de cela se tenait devant moi, tout sourire, un pistolet à la main.

- Matt ?
- J'arrive à temps, on dirait !
- Oui, mais par contre...

 Le sous-lieutenant à mes pieds remuait, la main serré sur son épée. Il était sonné, mais pas hors d'état. Je lui colla mon pied dans la figure, le faisant rouler au passage. Gémissant, il bougeait encore. Coriace ce type ! Je l'attrapai par les épaulettes et lui fit rencontrer mon front. Puis je le jetai dans les escaliers, le laissant descendre à la manière d'un vieux tapis.

- Tu devrais toujours finir le travail correctement avant de te lancer des fleurs. Ce manque de professionnalisme de ta part me surprend !
- Monsieur n'est jamais content ! Tu pourrais, au moins une fois, me dire merci !
- Eh bien merci ! Là, t'es content ?
- Mouais. Je te pardonne.
- Parfait.
- Mais seulement si tu m'embrasses tendrement.
- Plutôt mourir.
- Excusez-moi de ne pas donner suite à votre scène de ménage mais nous n'avons pas la journée devant nous. Je ne sais pas combien de temps mes hommes tiendront.

 La folle était dans le vrai. Nous nous ressaisîmes et courûmes à nouveau. Matt passa devant nous et nous fit tourner sur la droite à l'embranchement suivant, sûr de lui.

- J'ai déjà repéré où était la chambre du vice-lieutenant ! Mais les soldats à l'instant m'ont obligé à faire un détour. Quand j'ai entendu les coups de feu, j'ai préféré vérifier que vous n'aviez rien !
- Tu aurais dû te concentrer sur ta tâche.
- Au fait : ce pistolet, d'où est-ce qu'il vient ?
- Le bavard de tout à l'heure me l'a gentiment prêté pendant qu'il te faisait la morale.
- Eh bien, garde-le ! Ça pourra toujours servir.

  Nous étions arrivé à destination. "Sweety" sortit un crochet de sa poche et commença à triturer l'intérieur de la serrure. Nous le pressions chacun notre tour, ce qui l'agaça. Il est vrai qu'à sa place, j'aurais détesté me faire pousser, sachant que nous risquons d'être pris à n'importe quel moment. J'étais bien content de ne pas être voleur ! C'était un métier beaucoup trop stressant... Ah mais j'étais un pirate. Le pillage était-il si différent du vol ? Zut.
Un cliquetis nous alerta de la réussite de l'opération. Mon ami ouvrit la porte, fier de lui et...

- Ils arrivent !

 Deux hommes apparurent à l'autre bout du couloir, en tenue d'officiers. L'un d'eux était grand, le crâne rasé, les yeux plissés, presque doux. Il portait un fusil à l'épaule et... un canon portatif entre les mains ! L'autre était immense, avec une casquette, joufflu. Au départ, je crus que sa taille était due à une forte croissance, mais mon regard se porta ensuite sur ses jambes. Elles n'en finissaient pas.

- Tu vois, Jonas ? Je t'avais dit qu'à deux ça suffirait.
- En effet, mon colonel. Mais les coups de feu de tout à l'heure... Je suppose qu'Alec s'est montré négligeant.
- Bah ! Il est à peu près aussi dégourdi qu'un puceau dans une maison close ! Allez, finissons-en rapidement.
- Bien, mon colonel. Hep ! Vous là-bas ! Ne bougez plus, vous êtes en état d'arrestation.

 A ces mots, il arma son canon et le pointa vers nous. Je tournai la tête vers Natalia, qui avait la main sur son arme, hésitante. Puis vers Matt qui... n'était plus là. Je constatai alors que la porte du vice-lieutenant était fermée.

- Oh l'enfoiré !
- Je vais attirer le colonel Corazon à l'extérieur. Toi, débrouille-toi avec Jonas Portefoudre.
- Et comment je suis censé faire ça ?
- Débrouille-toi.
- Et tu es sûre qu'il va te suivre ?
- Regarde ses jambes. C'est certain.

 Aussitôt elle s'élança vers la fenêtre et sauta au travers.

- Hey !
- Je m'en occupe. Je te laisse le gosse.

 Et le colonel passa devant à toute allure. A chacun de ses pas, un son métallique résonnait. En regardant ses pieds, je remarquai des crampons pointus, avec une étrange coquille au centre des semelles. Je n'eux pas le temps de m'inquiéter pour "la Rossa", car le vice-lieutenant s'approchait de moi, tranquillement, prêt à faire feu.

- Allez, mon garçon : tu vas te rendre bien sagement, n'est-ce pas ?


Dernière édition par Arhye Frost le Jeu 13 Oct 2016 - 2:21, édité 1 fois
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Le vice-lieutenant avait un visage serein, confiant. Il me faisait penser à ces pères de famille à la compassion évidente et à la correction... frappante. Je repensais au mien qui me criait dessus avant d'asséner son coup de poing. Il avait l'avantage d'être honnête dans sa démarche ! L'autre n'était rien de plus qu'un hypocrite. Je fis un pas en arrière et il redressa davantage son arme.

- Sois pas idiot. Ça me briserait le cœur d'avoir à blesser un gosse.

 Me blesser ? Un seul boulet de son engin pouvait me décapiter ! Je cherchais autour de moi de quoi m'aider à me sortir de là. Le couloir était étroit : à peine assez large pour laisser passer un couple et leur enfant en bas âge. Sur ma gauche, la porte derrière laquelle s'était enfermé Matt, m'abandonnant à mon triste sort. Je le maudissais. Mais hors de question de l'en faire sortir, car sa tâche n'était pas terminé. Nous ne pouvions prendre le risque de réduire tous ces efforts à néant maintenant. Cette fois c'était certain : je détestais faire diversion. Ça ne m'apporte jamais rien de bon ! Sur ma droite, plus en arrière, une autre porte sur laquelle était écrit :"Sous-lieutenant Alec Kaloupalekis". Pourvu qu'elle soit ouverte !

 Je regardai à nouveau Jonas Portefoudre, lequel continuait d'avancer, affichant un regard jovial, presque détaché. Ça ne collait absolument pas avec la situation, et c'était ce qui me perturbait. Il n'oserait jamais faire feu... Impossible.
Au diable la réflexion ! Je fis volte-face et fonçai vers la porte et tirai sur la poignée.

*Siffle*
BANG !

 J'ouvris les yeux, mais je ne vis rien. Enfin au départ.
Tout était flou autour de moi. Mes oreilles sifflaient. La poussière et la fumée m'irritait. J'apercevais vaguement un mur blanc, gris, beige... Une armoire de rangement à structure métallique, avec des cartons et de la paperasse voletant ça et là, et je crus lire à un moment "archives Trovahechnik... Un nom tellement bizarre que j'étais certain de l'avoir mal lu. A mes pieds, une porte à moitié détruite. Ma vue revenait, mais l'ouïe était encore bien affectée. Je tentai de me redresser.

- Aah ! Aïe... Bordel de merde !

 Mon corps me faisait souffrir. Je devais avoir quelques côtes cassées. Je passai la main sur le sommet de mon front et sentis couler quelque chose de chaud et de légèrement poisseux. Je m'appuyai contre l'une des barres de soutien de l'armoire pour me relever. C'était à cet instant que je le vis, devant moi, enjambant les débris et le trou béant causé par son projectile. Le vice-lieutenant ne souriait plus. J'avais presque l'impression qu'il m'en voulait.

- Je t'avais pourtant prévenu ! Mais tu dois être sacrément résistant pour avoir survécu à ça. Ou sacrément chanceux ?
- Ah... Parle pour toi, c'est pas ta gueule qui a ramassé !

 Le simple fait de remuer les lèvres me faisait mal. Mais je n'allais certainement pas lui faire le plaisir de fermer mon clapet alors que ce sale con avait essayé de me faire sauter la cervelle à coup de boulet ! La politesse ? J'étais bien plus inquiet pour ma vie que pour mon langage. Jonas lâcha le canon, s'empara de son fusil et, arrivé à mon niveau, m'enfonça la crosse dans l'estomac. Voyant le coup venir, je contractai mes muscles. Mauvaise idée.

- Allons, cesse de gémir ! T'es pas une gonzesse !
- Mes côtes, put... Je croyais que tu voulais pas blesser un gosse ?
- De près, tu fais plus vieux. Maintenant, tu vas me suivre sagement, d'accord ?

 L'officier fit tourner la crosse, ce qui me fit lâcher un hoquet de douleur. Bon sang, ce que ça faisait mal ! Et le pire, c'était qu'il y prenait du plaisir... Je comprenais d'où venaient ses affinités avec la mafia. Mais je n'avais pas dit mon dernier mot. J'avais mal, certes, mais je pouvais encore bouger.
Rapidement je retenais son fusil d'une main, attrapai son crâne rasé de l'autre, pris appui contre le mur derrière moi avec mes jambes et lui décochai un coup de tête monumental. L'effort fourni me fit grimacer. Sonné par l'impact, je me précipitai tant bien que mal vers la sortie alors que le vice-lieutenant, à terre, tentait de se relever.

- Espèce de...

  Je sortis de la pièce et disparus derrière le mur au moment où...

PAN !
Une balle ripa contre la jointure disloquée de l'entrée, à l'endroit exact où se situait ma tête un instant plus tôt. J'arrivai au fond du couloir et, sans prendre le temps de regarder par la fenêtre brisée, je tournai à gauche. Après deux virages, j'arriverai à l'escalier d'où nous étions venus. Courage...

PAN !
La balle déchira une partie de ma veste, laquelle était en piteux état. Je m'en débarrassai, trop heureux d'avoir tourné au bon moment. Je courrai du mieux que je pouvais et atteignis enfin les escaliers où gisaient toujours les deux marines.

- Pourquoi tu cours, gamin ? Reviens par ici !

 Comme si c'était possible ! Je descendis les escaliers, dévalant les marches deux par deux et marchant sur la main du sous-lieutenant au passage.
Même au meilleur de ma forme, je me voyais mal tenir tête à un type capable de m'abattre à distance. Je n'avais pas assez d'espace pour esquiver convenablement et ce type visait plutôt bien. Mon seul espoir était de l'attirer à l'extérieur et de l'y prendre par surprise...
PAN !

- Ah !

 Cette fois, j'étais touché. Je m'étalai à terre, les mains tenant ma cuisse gauche. Du sang coulait entre mes doigts. Je ne pensais pas avoir aussi mal après tous les coups que j'avais reçu plus jeune ! Au dessus de moi, Jonas Portefoudre tirait sur le manche de son arme pour charger une nouvelle munition. Il avait l'air déçu... Il comptait vraiment me tuer.

 Avec toute l'énergie du désespoir, je me relevai et me dirigeai à cloche-pied vers la sortie. Elle n'était plus très loin ! Enfin je l'atteignis et, au lieu de continuer ma course, m'adossai au mur de droite. Je déchirai un morceau de ma chemise et fit un bandage autour de ma jambe.

- Gnnn ! Fais chi...
- Gamin ! Cesse de courir : tu te fais plus de mal qu'autre chose !

 Je l'entendais s'approcher. Lentement. Il marchait... Sûr de sa victoire, il allait dans ma direction comme on irait à la boulangerie du coin. C'était vexant. Plus que ça, c'était rageant ! Il suffisait qu'il s'approche encore un peu...
Dès qu'il pointa le bout de son nez hors du bâtiment, je le cueillis au niveau de la mâchoire avec mon coude. Je pivotai ensuite pour frapper de toutes mes forces le côté de son genou avec ma jambe valide. Un craquement sourd se fit entendre.

- Aah ! Sale morveux de m...
- Maintenant, on est quitte, ducon !

 Je lui décochai une droite en pleine arcade. J'allai pour enchaîner lorsqu'il fit tournoyer la crosse de son fusil comme une masse et m'asséna un violent coup à l'épaule, m'envoyant cogner contre la paroi en pierre. Il m'attrapa par la gorge et me souleva de terre. Je voyais les veines enfler sur ses tempes. Son visage n'exprimait plus que la rage. Je tentais de me dégager, lui assénant des coups de pied dans le ventre, mais il ne desserra pas son étreinte et le souffle commença à me manquer. Non seulement ses capacités à l'arme à feu étaient dangereuses, mais sa force physique était tout autant redoutable.

- Je crois que t'as pas bien compris à qui t'avais à faire. Gamin.
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Je manquais d'air. La carence en oxygène et les multiples douleurs qui me parcouraient le corps faisaient monter les larmes à mes yeux. J'allai mourir, là, ici, dans cette caserne, pour le compte d'une tarée de la famille Venici. Je ne cessais de la maudire alors que la dernière image qui s'imprimait sur ma rétine était le visage sadique du vice-lieutenant.
Ses yeux se plissèrent. Il se radoucit brutalement :

- C'est beaucoup trop facile...

Il me jeta à terre. Je passai les mains sur mon cou meurtri, inspirant à m'en faire éclater les poumons. Je me relevai avec peine, alors que Jonas croisait les bras, le fusil rangé.

- Si tu tiens tant que ça à vivre, divertis-moi. Montre-moi un peu ce que tu vaux !
- Facile à dire ça, après m'avoir tiré dessus.
- Te plains pas, tu tiens encore debout. Ça prouve que t'en as dans le ventre, et je pense qu'avec ça tu mérites de crever debout poings serrés plutôt qu'assis mains jointes. T'es pas de mon avis ?
- Comme si la pitié allait me sauver de toute manière !
- Hé ! T'es pas bête. Mais si tu veux, on peut faire autrement.
- C'est à dire ?
- Tu réponds à mes questions et je te laisse vivre. T'auras plus qu'à te rendre bien gentiment, comme je te l'ai demandé au début.
- Et si je refuse ?
- N'abuse pas d'ma bonté, gamin : c'est la dernière fois que je fais preuve de gentillesse avec toi. Si t'étais pas encore un môme, je t'aurais canardé jusqu'à faire croire à ta mère qu'elle a accouché d'un gruyère.

 Sa main s'était reposée sur la crosse de son arme, prête à dégainer. J'étais trop loin du mur pour l'atteindre sans me prendre une balle et le bâtiment le plus proche était celui d'où nous sortions, maintenant derrière lui. Les coups de feu et les cris alentours me faisaient savoir que personne n'était suffisamment proche pour me venir en aide. Ma seule autre chance aurait été la bâtisse à moins de dix mètres de moi, dont l'entrée se définissait par un hall soutenu par des colonnes, derrière l'une desquelles se trouvait un fragment du mur qu'avaient explosé les Venici, aussi gros qu'une assiette. Je n'avais pas le choix, et c'était ce que mon visage lui indiquait :

- Bien... Alors : qui êtes-vous ?
- Tu ne devrais pas aider tes collègues à stopper l'attaque, avant ça ?
- On ne tutoie pas un inconnu, surtout lorsqu'on est encore un enfant et qu'il s'agit d'un adulte. Qui plus est, un officier armé. Ceci mis à part : ils n'ont pas besoin de mon aide. Nous sommes assez nombreux pour endiguer ce genre d'attaques. Et puis je me doute bien qu'il s'agissait d'une diversion puisque t'es là, avec ta copine.

 Bien joué, inspecteur.

- On m'a contacté tout à l'heure... une bande d'individus en noir. Complets, costards, chemises... Bref la mafia, quoi. Pour quelle famille travaillez-vous ? Ça m'étonnerait que vous soyez des Tempiesta.
- Je... J'ai été enrôlé de force par les Venici.
- "Enrôlé de force" hein ? Bah ! C'est pas mes oignons. Pour quelles raisons vous êtes-vous introduits dans les quartiers des officiers ? Sûrement pas pour de l'espionnage ! Un assassinat peut-être ?
- Une... récupération.
- Tiens donc ? Des informations ?
- Des documents.
- Quels genres de documents ?
- Des dossiers sur...
- Oui ?

 J'entendis un nouveau cri au milieu du brouhaha. Quelqu'un venait de mourir. Tout à coup j'éprouvais une forme de sympathie pour les Venici. Ces types étaient des criminels, mais ils n'hésitaient pas à mettre leur vie en jeu pour le bien de cette mission. Pour un peu, je leur pardonnais presque de nous avoir pris à partie, Matt et moi. Après tout, nous augmentions leurs chances de réussite. Et de survie. De quoi avais-je l'air, moi, à répondre gentiment aux questions de ce marine ? N'étais-je pas pathétique, comparé à eux ? Et je me prétendais pirate ?

- Je t'écoute !
- Avant, ça, j'aimerai savoir une chose.
- Quoi ? Si je t'épargnerais ? Je ne reviens jamais sur ma parole, sache-le.
- Je voulais savoir : quand la Marine est-elle devenue si pitoyable ?
- ... J'te demande pardon ?
- Quand est-ce que la Marine a accepté de travailler avec la pègre ? Quand les supérieurs ont su qu'ils pourraient arrondir leurs fins de mois avec de l'argent sale, ou simplement parce qu'ils se sont rendus compte de leur incompétence ?
- Petit, ne joue pas à ça avec moi, tu veux...
- Pourquoi ? Des choses à se reprocher ? Des dettes ? Un amour non-réciproque avec une fille de mafieux ? De l'impuissance peut-être ?
- Tais-toi !
- Et qu'est-ce qu'il va me faire, le vendu ? Me rapporter le bâton, comme le bon toutou qu'il est ?

 Jonas Portefoudre, soudain fou de rage, braquait son fusil sur moi. Mais je m'en fichais : l'enivrement causé par mes propos me faisait oublier le reste. Merci, Adrénaline.

- C'est tout ce que tu sais faire ? Tirer sur un gosse désarmé ? Elle est belle, l'armée du Gouvernement Mondial. Une armée de falsificateurs et d'opportunistes. Et de lâches !
- Petit fumier !

 Le vice-lieutenant tenait l'arme par le canon et fonçait sur moi, le teint cramoisi et les yeux plus noirs que jamais. La chance allait tourné. Après tout : les apparences étaient parfois trompeuses.
"Approche un peu pour voir..."
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Au moment où la crosse allait s'abattre sur moi, je fis un pas de côté. L'attaque fendit l'air près de ma joue et j'en ressentis toute la puissance. Au passage, je plaçai un uppercut, plus rapide qu'efficace, et enchaînai avec un coup dans les reins. En proie à la colère, Jonas ne broncha pas. Il me repoussa d'un revers de la main et me me renvoya son arme à la figure. Je m'empressai de bloquer, mais le choc me fit reculer davantage. Déséquilibré je reçus une nouvelle attaque, cette fois à l'épaule, et le choc me renvoya à terre.

 Je roulais sur la droite pour esquiver le troisième assaut et effectuai une chandelle pour me relever. Je parai le quatrième et attaquai à mon tour : les deux paumes en avant, je frappai le plexus de mon adversaire pour l'obliger à prendre un peu de distance. J'obtenais ainsi la place nécessaire pour bondir :

Corbeau ascendant

 Mon pied percuta son menton. Malheureusement ma blessure m'empêcha de me réceptionner correctement et je terminai mon salto arrière genou à terre. Jonas rencontra le sol tête la première. Malgré mon état, le coup restait puissant, suffisamment pour mettre hors-jeu un combattant aguerri. Je n'étais pas peu fier de ma maîtrise de cette technique. Mais avec une cuisse en moins...

Jonas bougeait encore. Il se releva en se tenant la mâchoire, la lèvre enflée. Bon sang, quelle plaie ce type. Il pouvait au moins faire semblant, que je puisse souffler un moment !

- C'est quoi ton nom, gamin ?
- Arhye.
- Hé ! Eh bien tu sais quoi Arhye ? J'vais te dire un truc qui va t'faire réfléchir : je ne sais pas ce que tu crois, je ne sais pas ce que tu sais, je ne sais pas non plus ce que tu veux vraiment. Mais vois-tu, la Justice n'a pas de limite.
- Quoi ? Qu'est-ce que t'essaie de me...
- La Marine est l'armée du Gouvernement Mondial. Mais le Gouvernement Mondial est ce monde ! Ce monde est constitué de bonnes personnes, de mauvaises personnes, de jeunes, de moins jeunes, de gens saints, de gens malsains, même de soldats et de mafieux ! Et il est grand temps que ce monde en prenne conscience ! Sans le Gouvernement, ce monde ne serait que chaos. Sans Marine, il n'y aurait pas de Justice. Sans Justice, aucun acte ne serait excusable.

 Je pris un temps pour comprendre ce qu'essayait de me dire Jonas. Lorsque ce fut le cas, mon coeur fit un bond dans ma poitrine.

- T'essaie de me dire que les malversations et les arrangements entre la Marine et la mafia sont justifiées parce que vous incarnez la Justice ?
- Exactement. Depuis mon affectation sur cette île, je n'ai eu de cesse de recueillir des précieuses informations, faisant des pieds et des mains, parfois des morts, pour obtenir ce que je désirais. Tout cela pour le bien-être de tous. Je me suis lié d'amitié avec des bandits, des truands. J'ai même léché les bottes du colonel pour qu'il ferme les yeux ! Cet imbécile est beaucoup trop droit... Mais la Justice est flexible. Comme nous le sommes tous d'ailleurs ! Grâce à moi, cette île retrouve un semblant d'équilibre... Je ne prétends pas n'avoir aucun remord, seulement tout ce que j'ai fait, je l'ai fait pour la Justice ! La seule ! La vraie ! Et toi, Arhye, un pauvre gosse pathétique, un petit rebelle effronté, un sale voleur : tu oses me faire la morale ? Tu oses m'insulter alors que tu ne sais rien ? Tu n'es qu'un ignorant et j'ai presque pitié de toi.

 Il me foudroyait du regard alors qu'il ramassait son fusil et qu'il vérifiait son contenu. Je ne savais pas trop comment réagir après m'être fait sermonner de la sorte.

- Seulement vois-tu : la pitié ne te sauvera pas. Car ma colère est grande. Mais rassure-toi, car ma colère n'est... que Justice.

 Il leva son fusil et, par pur réflexe, je fermai les yeux.

PAN !
PAN !

 Je tâtais mon torse, meurtri. La douleur était accrue par l'émotion, mais cette souffrance...
Je n'avais rien. Rien de plus que des côtes cassées. Je levai la tête et vis Jonas Portefoudre me tourner le dos en se tenant le bras droit. Il regardait quelqu'un, blessé lui aussi au niveau de l'épaule, tenant un pistolet et avachi contre la porte du grand pavillon d'où nous étions sorti.

- Matt !
- Ah... T'inquiète pas pour moi, Arhye : cours !
- Fais pas l'imbécile ! Ce type est...
- J'ai dis cours ! Maintenant !

 Il tira une nouvelle fois mais rata sa cible. Jonas en profita pour répondre et il se cacha derrière le mur. Je cherchais désespérément un moyen de venir en aide à mon ami. Foncer sur le vice-lieutenant ? La distance qui nous séparait était largement suffisante pour qu'il ait le temps de se retourner et de me plomber la cervelle. Lui lancer des pierres peut-être ? J'allais juste l'énerver davantage ! Je regardai derrière moi et remarquai le bâtiment aux colonnes. Sans m'en rendre compte, notre combat m'avait permis de m'en rapprocher. Alors une idée me vint. Ça pouvait marcher...

 Je courrai me cacher derrière le premier pylône.
PAN !
 La balle s'écrasa contre la pierre. Je pouvais encore voir "Sweety" du coin de l’œil. Il restait caché, effrayé à l'idée de se faire tirer comme un lapin. Assis là, le souffle court et la cuisse rouge, je commençais à partager son ressenti. Je doutais de l'efficacité de mon plan, tout à coup.
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J'entendais le bruit des pas du vice-lieutenant. Il tournait en rond, attendant patiemment que l'un de nous deux sorte de son coin. En tendant l'oreille davantage, je finis par entendre ce que je souhaitais savoir.

Clinc. Tchac.
 Jonas avait ouvert son fusil et glissé une munition. Une seule munition.

- Sortez de là. Vous savez pertinemment que c'est fini.

 Pourquoi une seule munition ? Nous étions deux adversaires et... Oh ! Je saisis la situation. Je fis un signe à Matt, qui tourna la tête vers moi. Je lui mimai de retourner à l'intérieur chercher un leurre. Devant son air interrogatif, je lui fis un clin d’œil, fit un signe de tête dans la direction de l'officier et pointa mon doigt en direction de mes pieds. Il finit par comprendre et profita du fait que Jonas continue sa ronde pour s'enfoncer discrètement dans le pavillon.

- Si ça ne tenait qu'à moi, j'irai vous cueillir derrière vos petits refuges, mais ce ne serait pas très... diplomatique. Nous pourrions jouer à un jeu ! Le premier qui arrive jusqu'à moi reste en vie. Enfin, c'est une façon de parler : le premier qui sort mourra dans tous les cas. Reste à savoir lequel se sacrifiera pour que l'autre survive.

 Alors il n'aurait qu'une seule balle dans son maudit fusil ?! Il jouait avec nos nerfs. Il comptait en terminer sans faire le moindre effort.

- Arhye ? Qui de nous deux est le plus lâche d'après toi ? Tu sais tes paroles m'ont vraiment blessé tout à l'heure. Mais je ne t'en veux pas : dans quelques instants, je ferais pénétrer la Justice dans ton cœur et ton esprit s'excusera de m'avoir appelé "vendu". Car tu n'es pas un lâche, Arhye ! Tu peux sauver ton honneur en offrant courageusement ta vie pour sauver ton compagnon ! A moins que les bandits de votre espèce soient dépourvus de sens moral...
- Je ne suis pas un bandit. Ni un mafieux.
- Alors qu'es-tu donc ?
- Tu veux vraiment le savoir ?

 Je pris le temps de souffler. Regardant à mes pieds. Je commençais à me redresser, toujours caché par la colonne. Tendu, je savais que le vice-lieutenant était tourné dans ma direction, obnubilé par ce que j'allais dire, ou faire. Je me focalisais sur le but à accomplir et la douleur diminua légèrement. Le son des fusillades avaient presque cessé ; bientôt tous les Venici seraient morts. J'étais impressionné que seule une douzaine d'entre eux aient pu tenir aussi longtemps. Sans doute la Marine jouait-elle la carte de la prudence en optant pour une bataille aux allures de guérilla.
Matt était revenu, je le voyais me regarder depuis sa porte. Je lui lançai le signal :

- Je suis un pirate !

 "Sweety" jeta ce qu'il tenait dans les mains au dehors, sans sortir de sa cachette. Attiré par le bruit, Jonas fit volte-face et tira sur l'épée d'Alec qui atterrit à ses pieds, presque fendue au niveau du manche. Je sortais à mon tour de mon refuge, prêt et concentré, tête penchée. L'officier se retourna à nouveau et pointa le canon de son arme dans ma direction. "Alors il lui en restait bien une...".

PAN !
 Je courrai encore, sans ralentir. Cette fois, il s'agissait bel et bien de sa dernière chance. Dommage.

- Qu'est-ce que... Non !

 Oh si ! Je jetai sur lui le fragment du mur que j'avais ramassé derrière le pylône, à moitié perforé par la balle qu'il avait tiré. J'avais raison de croire qu'il viserait le cœur, comme il me l'avait dis. J'étais encore étonné de voir que ces morceaux aient atterri aussi loin dans la base. Mais je n'allais pas m'en plaindre. Je me ruai sur lui, qui tarda à réagir. Au moment où il leva les bras pour me fracasser le crâne avec son fusil, j'étais déjà à son niveau, en position. Cette fois, je ne raterai pas :

FRACTURE

 Ma paume appuyée contre son plexus, les phalanges repliées vers le centre de la main, comme des serres, le bras tendu, l'autre replié, le corps penché vers l'avant. La sensation de creuser l'air... Tout était différent de mes précédents essais. J'avais réussi.
Les vêtements de Jonas étaient collés à sa peau, comme poussés par le vent. Un craquement sourd, ainsi que le creux qui se formait sous ma main m'indiquaient que sa cage thoracique avait éclaté. Ses poumons étaient certainement touchés, eux aussi. Lui ne bougeait plus, debout les bras levés, laissant tombé sa masse, la bouche entrouverte. Du sang perla au coin de ses lèvres et ses yeux se révulsèrent. J'entendais un imperceptible souffle : l'oxygène quittait son corps petit à petit, en même temps que sa vie.

- Tu t'es battu pour ce que tu pensais être juste. Je respecte cela et je m'excuse pour tout ce que j'ai dis. Mais je ne partage pas ta vision. En réalité... Elle me dégoûte. Ta justice n'était qu'une apparence, une illusion. Et comme toute illusion, elle t'a trompé. Puisse la mort réparer tes erreurs.

 J'espérais que mes dernières pensées l'atteignent. Son corps se relâcha enfin. Ses jambes se plièrent et ses mains retombèrent. Au passage, l'une d'elle caressa mon corps, du haut de l'épaule jusqu'au bas de la hanche. Dans un ultime effort, il avait tenté de m'empoigner.

- Arhye ! On se tire d'ici !
- J'arrive !

 Matt était sorti du bâtiment et courrait vers les portes restées ouvertes. Je le rejoignis, soudain fatigué et le corps plus douloureux que jamais. Nous avions survécu.
Dans les mains du voleur, un pistolet, un coffret et plusieurs porte-vues remplis de documents. Je l'aidais à en transporter une partie. Nous étions proches de la double-porte quand :

- J'ai vraiment besoin d'un massage !
- Tu crois vraiment que c'est le moment d'y penser ?! Tirons-nous de là et on verra ça après !
- Alors ça veut dire qu'une fois en sécurité...
- Dans tes rêves !
- Argh ! Reviens là, saloperie de guenon !

 Nous franchîmes les portes et vîmes Natalia courir aussi vite que ses jambes amochées le lui permettaient vers nous. Ça et là, des vêtements à moitié déchirés, des bleus, des contusions et des écorchures multiples. Elle avait une sérieuse blessure à l'avant-bras et ne cachait pas sa souffrance. Derrière elle, un colonel aux longues jambes furieux et boiteux. La rousse était parvenue à lui faire de jolis trous dans la cuisse et le mollet gauche, réduisant fortement sa mobilité.

 Une fois qu'elle fut à notre hauteur, elle nous attrapa par le bras et, sortis du champ de vision de l'élite, nous poussa contre le mur et nous força à nous asseoir. Je lui aurais bien demandé la raison de son comportement, mais l'air grave qu'elle affichait me laissa sans-voix.
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Natalia respirait fort, ses vêtements étaient plus rouges qu'à l'accoutumée et elle semblait peiner à garder les yeux ouverts. Je la voyais mal se relever d'elle-même et courir à nouveau. Son corps vacilla et Matt la rattrapa, tout en me faisant signe de l'aider à la transporter. La rousse nous fit signe d'arrêter :

- Chut... Il ne nous suivra pas... Il ne peut pas se le permettre tant que...
- Mais on ne peut pas rester là ! Tes hommes sont sûrement tous morts maintenant ! Ils vont forcément venir !
- Tais-toi et... écoute.

 Cette fois, la jeune femme semblait vraiment exprimer quelque chose. De l'inquiétude... elle voulait croire que certains de ses hommes survivraient à l'attaque. Je tendis l'oreille, sans rien entendre. Aucun bruit de pas, rien, à part quelques coups de feu au loin, sans doute les derniers, confirmant la fin de la mission suicide des Venici. Le colonel ne nous suivait pas.
Au bout d'un moment, un soldat se mit à crier :

- Mon colonel ! Le vice-lieutenant est mort !
- Quoi ?!
- Le vice-lieutenant est m...
- J'ai compris, crétin ! Mais comment ça a pu arriver ?
- Aucune blessure par balle. Mais il semblerait que ses poumons aient éclaté et que son cœur ait subi un choc violent. Quelques unes des ses côtes sont cassées également.
- Bordel de m...
- Que faisons-nous, mon colonel ? Devons-nous suivre ceux qui se sont enfuis ?

 Nous retenions tous les trois notre souffle.

- Non... ils doivent être loin maintenant. Occupez-vous plutôt des blessés ! Et préparez rapidement les hommes valides pour refermer la brèche ! De quoi aurions-nous l'air, si les supérieurs voyaient ça ? Je vous rappelle que l'un d'eux vient dans deux semaines ! Il va être beau le rapport du mois, tiens !
- Mon colonel !
- Allons bon ! Quoi encore ?

 Nous nous étions relevés. Plus rien ne nous retenait ici maintenant que la mort des mafieux était confirmée. Matt tenait encore Natalia par le bras et commençait à avancer avec délicatesse.

- Je reviens des quartiers du vice-lieutenant Portefoudre. Les intrus y sont entrés !

 Oh, ça s'annonçait mal. Je me levai à mon tour et plaçai mon bras sous l'épaule de "la Rossa".

- Son coffre a été vidé !
- De qu... Oh putain, les fils de... Sales... Ils nous ont eu. Je vais me les faire !

PELEPELEPELEPELE. PELEPELEPELEPELE.

 Tout le monde s'était arrêté de bouger. Sauf Matt et Natalia qui continuaient à avancer sans moi. Je ne m'étais même pas rendu compte que j'avais lâché son épaule. La sonnerie de l'escargophone m'intriguait : sans pouvoir me l'expliquer, mon intuition me disait d'écouter cet appel. Il devait être... Non, il était important. Cette histoire n'allait pas s'arrêter maintenant.

PELEPELEPE ! Catcha.

- Colonel Enrique Corazon, j'écoute !
- Colonel. Ici le Commandant Archibald, garnison de Rubeck.
- Et que me voulez-vous, commandant ?
- Vous informer personnellement de l'arrivée d'une photographie. Celle du jeune Arhye Frost, du Royaume de Luvneel.
- Frost... le fils du colonel Kristian Frost ?
- Et de Lady Orenna Crow. Tous deux arrêtés pour trahison. Leur fils est en fuite. Je l'ai croisé à Rubeck et il est parvenu à m'échapper. J'en ai informé le G-6 et ai relayé l'information à toutes les bases de North Blue.
- Vous êtes bien prudents, commandant... Ce n'est qu'un gamin !
- Ce gamin m'a... il a échappé à notre garnison. Devant témoins... Ce n'est pas à la portée de n'importe quel adolescent. Ce garçon est dangereux.

 Est-ce qu'il portait vraiment sur lui un escargophone ? Pas un mini-escargophone ? N'était-il donc jamais dans son bureau ? Non plus important : le colonel discutait avec Archi' ![/color] Il lui parlait de moi... Et si ce qu'il disait était vrai, je devais rapidement fuir l'île, le bassin, puis North Blue. En tournant la tête, je vis les deux autres me faire des signes depuis l'arrière d'un arbre, m'incitant à me dépêcher.

- Mon colonel ! Nous venons de recevoir cette photographie.
- Faîtes voir.

 Je courrai, tête baissée. Ma jambe me faisait mal mais ce n'était franchement pas le moment de se plaindre. J'étais aux côtés de mes compères lorsque j'entendis la voix d'Enrique Corazon exploser dans la cour de la caserne :

- C'était lui ! Ce sale petit con ! Soldats : je veux qu'un maximum d'hommes leur colle au cul !
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Nous étions de retour dans les rues de la ville. Seulement nous avions la Marine aux trousses. Heureusement que nous avions une légère avance, car nos blessures étaient particulièrement incommodantes. Au bout d'un moment et après quelques virages, à la recherche d'un lieu sûr, je regardai Matt et Natalia : l'un n'était ni un combattant, ni un bon tireur et l'autre était blessée et affaiblie par son duel avec le colonel. Je rassemblais le courage qui me restait et leur annonçai :

- Je vais faire diversion. Retournez au plus vite à l'auberge ! Je vous y rejoins sans faute...
- C'est trop risqué, Arhye ! Laisse-moi t'aider !
- Non ! Assure-toi que Natalia et les informations soient en sécurité. Si je ne reviens pas, ça pourra toujours t'être utile pour te racheter auprès de la pègre.

 Comme si je comptais mourir ici ! Des fois je pouvais vraiment raconter n'importe quoi... J'avais même réussi à me faire peur. Et puis je voyais mal "Sweety" travailler à nouveau pour la mafia après tout ça.

- Prends au moins mon pistolet...
- Je ne peux pas, Matt. Les coups de feu risquent d'attirer l'attention.
- Mais eux vont te tirer dessus !
- Pas si je les en empêche.

 Et sur un dernier clin d’œil, je repartais en sens inverse.
Je me faufilais dans une ruelle adjacente tandis que les deux autres fuyaient en direction de notre refuge. Je m'étais agenouillé derrière une pile de déchets, posée là entre des caisses, des planches à moitié pourries et une cagette à légumes. Au bout de quelques secondes, trois marines passèrent devant moi, balayant l'endroit avec le canon de leurs fusils. Je respirais un coup et me redressai discrètement pour les prendre à revers.

 Je brisai une planche sur la tête du premier. Lorsque le deuxième se retourna je mis un coup de pied dans le tube de son arme, lui faisant percuter la crosse avec son nez. J'attrapai celle du troisième et le frappai avec à la manière de Jonas. Le premier reprenait ses esprits. Je frappai de plus belle afin de l'assommer à son tour. Ceci fait, je passai la main dans mes cheveux. Ça faisait longtemps... Vivement que j'aille dormir !

 Je courrai encore pendant une bonne heure, esquivant la plupart des patrouilles sur ma route. Je neutralisai deux autres trios de soldats qui m'empêchaient de progresser. Essoufflé et endolori, j'arrivai enfin à l'auberge et m'écroulai sur notre lit, à Matt et moi. Quand est-ce que j'avais accepté de dire "notre lit" d'ailleurs ?

- Plus jamais ça !
- Contente de te voir en vie.

 Je rêvais où bien Natalia venait de faire preuve de sympathie à mon égard ? Je croisai le regard de la rousse et y lus un mélange de bienveillance et de... tristesse ? Je repensais alors à tous ses hommes qui étaient morts. Au cours de cette mission, non : au cours de ces quelques jours passés avec elle, j'avais fini par apprendre à l'apprécier, ainsi que son caractère étrange. Comme l'avait dit l'un des gorilles qui nous surveillaient, elle n'était pas si mauvaise dans le fond. Rigoureuse, fanatique, mais pas plus méchante que moi ou que le voleur qui me faisait office de compagnon.

- Natalia, je suis désolé pour...
- Ils connaissaient les risques. Et c'est moi qui le leur ait demandé, tout en sachant ce que cela impliquait. Vous n'avez pas à vous sentir responsable ; je vous ai vous aussi utilisés.
- Mais tu avais besoin de notre aide.
- Je vous ai utilisés. Je me suis servie de vous.
- Il ne faut pas te sentir coupable de quoi que ce soit...
- Je ne me sens pas coupable.

 Ah...

- Seulement je dois vous remercier comme il se doit.
- Mais pourquoi ?
- Parce que même s'il s'agissait d'une contrainte, vous vous êtes battus à nos côtés pour le bien de notre mission. Vous avez fait preuve de plus de volontarisme que je ne l'aurais cru. Je pensais sincèrement être obligée de vous éliminer au moindre mouvement suspect. Je m'attendais à ce que vous tentiez tout pour vous échapper.
- Ahah... Hum, eh bien...
- Mais vous êtes restés. J'ai alors décidé de mettre ça sur le compte de la stupidité, puis de la soumission.
- Euh pardon ?
- Pour au final me dire que cela n'avait pas d'importance. Car grâce à vous, nous avons réussi. En réalité : sans vous, mes hommes seraient morts pour rien.

 Bien que Natalia reste Natalia, je sentais mon affection pour elle grandir davantage. Je n'irais certainement pas jusqu'à l'embrasser pour ces propos, je tenais encore un temps soit peu à la vie, mais sa gratitude m'allait droit au cœur. S'il y avait eu un autre moyen que d'envoyer les douze Venici à une mort certaine, je lui en aurais fait part sans hésiter. Mais ce qui me consolait, c'était que ce que nous avions accompli avait un sens. Je me remémorais alors les paroles du vice-lieutenant. Lui aussi se battait pour protéger un idéal, quitte à faire des sacrifices. Mais cet idéal le consumait, tout autant que les méthodes gouvernementales. Qu'était la Justice sans une juste conclusion ?

 "La Rossa" se pencha du mieux qu'elle put, les mains sur les genoux, en signe de gratitude. La voir ainsi nous laissa pantois. Elle nous paraissait d'un coup hautement vulnérable.

- Je vous remercie du fond du coeur. Felipe Venici, tout comme la famille Martico, sera ravi de savoir que la mission est une réussite.
- Allons, nous avons agis comme il se devait. Maintenant, je suppose que nous obtenons quelque chose en retour ?
- Quelque chose en retour ? Eh bien, des excuses et des remerciements.
- Oui c'est très bien mais : en "remerciements" justement ?
- Oh, dans ce cas vous obtenez... votre liberté.
- Quoi ?!
- Vous croyez que je gagne quelque chose d'autre que de la gratitude avec ce genre de boulots, vous ? Je vous offre au moins la possibilité d'être "blanchis" aux yeux des familles, et donc le droit de rester en vie. Et puis qui sait : nous aurons peut-être d'autres offres plus alléchantes à vous faire à l'avenir. Qui mériteront notre amitié à votre égard. Qu'en dîtes-vous ?

 Long silence.

- Je prends ça pour un oui. Bon, je vous remercie encore, mais il faut filer. Je vous conseille de faire de même. Ça m'étonnerait que la Marine cesse les recherches durant les jours à venir. Tâchez de survivre encore un peu. Sur ce !

  Et elle était partie. Comme ça, en nous laissant tous les deux avec nos pansements et quelques ustensiles et outils que nous avions emprunté au propriétaire de l'auberge. Matt enleva ses gants et mit ses mains dans la petite bassine d'eau posée sur la table.

- Bon, ben... allonge-toi maintenant.
- Quoi ? Là tout de suite ? Je sais pas si...
- Faut bien que j'aille extraire la balle dans ta cuisse. Et elle a raison : on a pas le temps de s'éterniser ici. Une fois qu'on se sera occupé de nos blessures, on se tire.
- D'accord d'accord. En attendant, passe-moi une cigarette, tu veux ?
- Tiens. Maintenant tiens-toi tranquille.
- Bien, c'est toi qui dirige. Pour une fois.
- Et je compte bien en profiter !
- Ouais mais évite de prendre le chouaAÏE ! Bordel mais fais gaffe ! T'es sûr que c'est "Sweety" ton surnom ?!
- Cesse de geindre ! Je me concentre là... Je suis voleur, pas médecin !
- Mais et la délicatesse merde !
- Oh je t'en prie ! Dis-toi qu'après c'est ton tour. Pour mon bras.
- Tss... Puisque tu le dis. En plus ma chemise est foutue.
- Ta veste aussi.
- Je croyais que tu devais te concentrer ?
- Ça serait plus simple si tu arrêtais de causer ! Et puis j'ai une bonne nouvelle.
- Quoi donc ?
- Le coffre de ce cher Jonas Portefoudre ne contenait pas seulement des informations sur la mafia.

 A ces mots, il retourna se laver les mains dans la bassine puis se dirigea vers son sac. Il en sortit... des liasses de billets. En grande quantité.

- Alors ça...
- Y en a pour 10M de berrys. J'ai pris le temps de compter.
- Pendant que nous on se... Bon oublie. Tout cet argent... Matt tu es génial.
- Ah tu vois ! Reste plus qu'à aller chercher ton père.
- Comment ça ?
- Bah j'ai bien de quoi payer la dot maintenant !
- ... Je ne sais pas comment tu fais pour, à chaque fois, raconter des conneries dans ce genre de moments.
- Tu peux dire le talent.

 Il n'y avait pas à dire, Matt était énervant au possible. Mais je ne pourrais le remplacer pour rien au monde. En peu de temps, nous avions noué un lien fort. En tout cas, ce petit trésor me donnait un sursaut d'orgueil. Un excès de fierté et d'assurance que je ne m'étais pas retrouvé depuis un certain temps. C'était une victoire pour notre duo, après avoir échappé aux Martico puis survécu aux Venici et à la Marine. Je me surpris à sourire. Pas du sourire habituel, celui que j'offrais à Matt ou aux gens de passage, celui que j'affichais par satisfaction. Non : mon sourire d'autrefois. Malicieux et fier. J'observais les bagues à mes doigts et réfléchissais à l'usage premier de notre fortune.

- Bon. Et si nous faisions les boutiques ? Hors de question de fuir Manshon dans cette tenue, tu ne crois pas ?
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