Si vous êtes content de vivre et mourir, c'est que vous n'avez pas vécu à Manshon. C'est le genre de phrase que l'on peut souvent entendre dans les ruelles de cette ville mystifiée. Certains s'en amusent en guise d'humour, parce qu'il n'y a que ça pour contrebalancer avec la déchéance et il faut aussi rire, vous voyez. De l'extérieur, que voient vraiment les gens lorsqu'on leur parle de la ville mafieuse ? Un enfer régi par la mafia ? Des habitants qui ne font rien pour renverser la plèbe ? Une marine vendue ? Que ce soit des visions extrémes sans nuances, ou des paroles mesurées, toutes les pensées se rejoignent sur une idée : la vie est merdique à Manshon. Une si grande merde, tellement grande que, imaginez une ville moyenne, en-dessous, il y a des bidons-villes et 15m de merde plus profond, il y a Manshon. C'est ça, le quotidien de la cité emprisonnée dans sa propre incompétence, une justice crasse et moisie, et des cœurs enfermés. Léon arrive parfois à se souvenir du surnom que l'on donne à Manshon : « La terre sainte ». Les vestiges d'un passé glorieux ? Un lointain et immémorable passé, très passé dans ce cas, parce que personne n'arrive à se le projeter tellement leur vie actuelle les paralyse.
C'est dans ce paysage dramatique que Léon se dirigeait vers ce qui restait du port, après les nombreux combats l'ayant complètement ruiné, on pouvait encore apercevoir des bouts de bois brisé au sol, et ce, même une année après le début de la reconstruction. La veille, il avait été commissionné par son patron pour réceptionner la livraison, qui, d'après Le Vieux, contenait du bois, des matériaux de construction, de papiers et autres outils nécessaires pour créer et bâtir. Le tout devant être amené assez tôt dans la journée, après le matin, mais avant le midi. Un horaire assurément imprécis amenant Léon à soupirer sur le port en attendant le bateau. Vous savez ce que Lawliet raconte aux autres villes quand il est en déplacement ? « Manhson est un diamant pourri ».
Parce que même dans les contrées les plus nauséabondes, le jeune architecte ne laissait pas son optimisme perdre sa foi, il arrivait à déceler ce qu'on œil humain pessimiste jetait avec mépris. Eux, sur ce port, ils voyaient un pêcheur qui se dépêchait de partir parce que la vie mouvementée de la transaction allait bientôt commencer. Eux, sur ce port, ils voyaient une femme sur le point d'être amenée dans une ruelle pour se faire violer. Eux, sur ce port, ils voyaient des mafieux extorquer de l'argent aux magasins en gage de sécurité. Eux, sur ce port, ils voyaient un groupe de jeunes adultes se mettre à plusieurs sur ce même mafieux pour le battre, situation de guerre civile oblige.
Eux, sur ce port, ils fermaient les yeux.
Vêtu de son arsenal habituel mais néanmoins élégant et discret pour la ville, à savoir une chemise blanchâtre accompagnée d'un pantalon et costume noirs, Léon regardait avec amour la mer calme et douce. Accompagné d'une mallette contenant l'argent destiné au livreur, il observait son décor, en attendant de voir le temps passer doucement et lentement... Le levé de la journée à Manshon était tout le temps mouvementé, ça commençait d'abord par un brouhaha ronronnant, vous caressant les tympans avec miséricorde et bénédiction, puis s'enchaînait avec un vacarme criard et rugissant. La mer, elle, elle ne changeait pas comme les humains, au moins.
Les yeux noir jais de Léon se posèrent sur l'océan comme la main d'un amant sur l'épaule de sa maîtresse, avec douceur et admiration, et nonchalance. Lawliet n'était peut-être pas riche, ni spécialement pauvre, sa vie ne faisait peut-être pas rêver des nobles mais la richesse de son cœur était autre. Elle lui permettait de voir et d'appréhender des scènes et tableaux qu'aucun autre n'arrivait à réaliser, elle ne faisait pas la différence entre le mal couard et le bien, sinon d'essayer de la comprendre dans sa forme la plus pure. Les formes sinueuses de la mer jalonnèrent le port, côtoyèrent les bateaux en les amenant doucement vers la ville, puis s'en allèrent pour répéter encore et toujours le même spectacle, un immense bleu monotone qui s'enchaînait faisait vivre le port, le commerce, les arnaques et les échanges. Parfois, il lui arrivait d'être teintée de rouge, avec un bruit d'un objet lourd tombant dedans...
Une autre chose se passait à Manshon. Lorsque la vie active de la ville commençait, personne n'avait le temps de se perdre dans ses pensées, parce que vous pouviez soit perdre votre bien sur le moment, ou votre vie, ou les deux. Le vent frais et lourd fit tomber le rideau sur les yeux de l'architecte, qui commença à bailler pour mettre en actions toutes les parties de son corps, comme s'il était tétanisé et que les engranges avaient besoin d'énergie propulsant le mécanisme en chair et en sang. En boutonnant le costume, il s'actionna machinalement pour se diriger vers le capitaine du bateau qui semblait chercher quelqu'un de l’œil, c'était peut-être Léon, son client. Les cheveux longs du jeune se balancèrent comme la tige fragile d'une fleur naissante, elle venait caresser les joues blanchâtres et coupait la fumée opaque sortant de sa bouche. Il faisait assurément froid à Manshon, et on pouvait se servir du jeune ingénieur comme témoin visuel pour le prouver, en pointant ses mains et jambes tremblantes...
Du haut de son vieux rafiot qu'un jeune marin avait aidé à amarrer, le capitaine se redressait et fit appel au commercial tendrement logé à l'intérieur de sortir. Un homme d'un âge moyen dessina sa silhouette dans l'espace et ordonna au capitaine d'un mouvement de la tête énervé de mettre un truc pour qu'il puisse descendre de là où il était. On imaginait mieux comme vendeur, pas un homme avec les cheveux blancs et une barbe de trois jours lui grattant affreusement le visage, puisque sa main gauche pour le soulager ne s'en éloignait jamais. En essayant de se couvrir le torse avec son manteau gris épais, il sortit des papiers comme pour compter l'argent qu'il allait amasser dans la journée, et combien il allait perdre en se faisant voler par la mafia, et combien il allait avoir des faux billets.
C'est dans ce paysage dramatique que Léon se dirigeait vers ce qui restait du port, après les nombreux combats l'ayant complètement ruiné, on pouvait encore apercevoir des bouts de bois brisé au sol, et ce, même une année après le début de la reconstruction. La veille, il avait été commissionné par son patron pour réceptionner la livraison, qui, d'après Le Vieux, contenait du bois, des matériaux de construction, de papiers et autres outils nécessaires pour créer et bâtir. Le tout devant être amené assez tôt dans la journée, après le matin, mais avant le midi. Un horaire assurément imprécis amenant Léon à soupirer sur le port en attendant le bateau. Vous savez ce que Lawliet raconte aux autres villes quand il est en déplacement ? « Manhson est un diamant pourri ».
Parce que même dans les contrées les plus nauséabondes, le jeune architecte ne laissait pas son optimisme perdre sa foi, il arrivait à déceler ce qu'on œil humain pessimiste jetait avec mépris. Eux, sur ce port, ils voyaient un pêcheur qui se dépêchait de partir parce que la vie mouvementée de la transaction allait bientôt commencer. Eux, sur ce port, ils voyaient une femme sur le point d'être amenée dans une ruelle pour se faire violer. Eux, sur ce port, ils voyaient des mafieux extorquer de l'argent aux magasins en gage de sécurité. Eux, sur ce port, ils voyaient un groupe de jeunes adultes se mettre à plusieurs sur ce même mafieux pour le battre, situation de guerre civile oblige.
Eux, sur ce port, ils fermaient les yeux.
Vêtu de son arsenal habituel mais néanmoins élégant et discret pour la ville, à savoir une chemise blanchâtre accompagnée d'un pantalon et costume noirs, Léon regardait avec amour la mer calme et douce. Accompagné d'une mallette contenant l'argent destiné au livreur, il observait son décor, en attendant de voir le temps passer doucement et lentement... Le levé de la journée à Manshon était tout le temps mouvementé, ça commençait d'abord par un brouhaha ronronnant, vous caressant les tympans avec miséricorde et bénédiction, puis s'enchaînait avec un vacarme criard et rugissant. La mer, elle, elle ne changeait pas comme les humains, au moins.
Les yeux noir jais de Léon se posèrent sur l'océan comme la main d'un amant sur l'épaule de sa maîtresse, avec douceur et admiration, et nonchalance. Lawliet n'était peut-être pas riche, ni spécialement pauvre, sa vie ne faisait peut-être pas rêver des nobles mais la richesse de son cœur était autre. Elle lui permettait de voir et d'appréhender des scènes et tableaux qu'aucun autre n'arrivait à réaliser, elle ne faisait pas la différence entre le mal couard et le bien, sinon d'essayer de la comprendre dans sa forme la plus pure. Les formes sinueuses de la mer jalonnèrent le port, côtoyèrent les bateaux en les amenant doucement vers la ville, puis s'en allèrent pour répéter encore et toujours le même spectacle, un immense bleu monotone qui s'enchaînait faisait vivre le port, le commerce, les arnaques et les échanges. Parfois, il lui arrivait d'être teintée de rouge, avec un bruit d'un objet lourd tombant dedans...
Une autre chose se passait à Manshon. Lorsque la vie active de la ville commençait, personne n'avait le temps de se perdre dans ses pensées, parce que vous pouviez soit perdre votre bien sur le moment, ou votre vie, ou les deux. Le vent frais et lourd fit tomber le rideau sur les yeux de l'architecte, qui commença à bailler pour mettre en actions toutes les parties de son corps, comme s'il était tétanisé et que les engranges avaient besoin d'énergie propulsant le mécanisme en chair et en sang. En boutonnant le costume, il s'actionna machinalement pour se diriger vers le capitaine du bateau qui semblait chercher quelqu'un de l’œil, c'était peut-être Léon, son client. Les cheveux longs du jeune se balancèrent comme la tige fragile d'une fleur naissante, elle venait caresser les joues blanchâtres et coupait la fumée opaque sortant de sa bouche. Il faisait assurément froid à Manshon, et on pouvait se servir du jeune ingénieur comme témoin visuel pour le prouver, en pointant ses mains et jambes tremblantes...
Du haut de son vieux rafiot qu'un jeune marin avait aidé à amarrer, le capitaine se redressait et fit appel au commercial tendrement logé à l'intérieur de sortir. Un homme d'un âge moyen dessina sa silhouette dans l'espace et ordonna au capitaine d'un mouvement de la tête énervé de mettre un truc pour qu'il puisse descendre de là où il était. On imaginait mieux comme vendeur, pas un homme avec les cheveux blancs et une barbe de trois jours lui grattant affreusement le visage, puisque sa main gauche pour le soulager ne s'en éloignait jamais. En essayant de se couvrir le torse avec son manteau gris épais, il sortit des papiers comme pour compter l'argent qu'il allait amasser dans la journée, et combien il allait perdre en se faisant voler par la mafia, et combien il allait avoir des faux billets.
Monsieur ? C'est vous avec la marchandise pour l'Eterna ? [i]Fit Léon, en interpellant avec une vive voix l'homme pestant contre tout, le vent, le froid, cette ville, et contre ce jeune con qui l’appelait Monsieur. Il n'était pas si vieux que ça, selon sa propre opinion, même si sa peau légèrement fripée et ses yeux cernés disaient le contraire.
Dernière édition par Léon L. Lawliet le Mer 28 Déc 2016 - 1:03, édité 2 fois