Tout était différent depuis l'incident. La trahison de McGready avait été particulièrement douloureuse, aussi bien physiquement que mentalement. Jamais Ambrosias n'avait été aussi mal depuis l'attaque de Mizukawa sur Tanuki. Si à l'époque elle s'en était sorti avec des brûlures, cette fois, les choses étaient plus grave. Enfoncée dans la fauteuil de son bureau, la jeune femme tourna la tête vers la gauche pour regarder le vide qui se trouvait dorénavant à la place de son bras. Une douleur lancinante la tirailla tandis qu'elle grimaçait. Son moignon lui faisait un mal de chien depuis des jours, et même avec les anti-douleurs, cela ne semblait pas vouloir passer. L'air morose, la militaire se servit un verre d'eau avant de soupirer. La mort de Dario lui faisait plus mal encore que la perte de son membre. Par sa faute, par son incompétence, son premier officier, celui qui l'accompagnait depuis des mois, celui qui était devenu un ami, était mort. Donnant sa vie pour sauver la sienne, il avait seulement été remercié par une promotion de trois grades à rang posthume. Quelle ironie pour un homme incapable de monter autrement les échelons. Inspirant longuement, la colonelle tourna les pages du dossier de la traîtresse, comme si elle y cherchait des réponses. Elle faisait cela depuis des semaines, sans succès. Le bruit d'une personne frappant à la porte tira la jeune femme de sa torpeur. Redressant la tête, elle vit la lieutenant-colonel Ligéia, sa seconde, entrer dans la pièce. La sirène ne manqua pas de remarquer la présence du dossier sur le bureau.
« Nous la retrouverons.
- Cela ne fait aucun doute, et elle paiera.
- Oui...
- Lieutenant-colonel ?
- Le compte rendu des rondes de la semaine, colonelle.
- Hum, merci. »
Sans cérémonie aucune, Constance posa le dossier et les deux femmes commencèrent à en discuter. Il n'y avait pas grand chose à en dire. McGready restait introuvable, Bradley se terrait toujours et son organisation commençait à sérieusement battre de l'aile. Après quelques minutes, un bruit sourd à l’horizon surprit les deux militaires. Se levant de son fauteuil, Ambrosias se tourna vers la fenêtre et vit une épaisse fumée noire au loin.
« Qu'est-ce que... »
Avant qu'elle ne termine sa phrase, une nouvelle explosion eut lieu, rapidement suivie par deux autres. De son bureau dans la caserne de Kikai no Shima, la vue en hauteur permettait rapidement de se rendre compte que de tels incidents étaient en train de survenir un peu partout en ville. Les yeux écarquillés, la colonelle ne comprit pas de suite ce qui se passait.
« Ligéia, la salle de crise, faites venir tout le monde !
- À vos ordres »
En courant, la sirène sortit de la pièce tandis qu’Ambrosias continuait d'observer les nouvelles explosions. Fermant les yeux, elle se servit de ses pouvoirs pour sonder le cœur des nombreux animaux alentours et comprendre ce qui se passait. Il était assez difficile d'obtenir de vraies informations au travers de leur panique et leurs élucubrations, mais ce qui ressortait rapidement était effective que plusieurs explosions avaient eu lieu. Elle crut également comprendre que des hommes méchants, selon les dires de ses sources, étaient à l’œuvre. En conclure qu'il s'agissait d'une attaque perpétrée par le Chinamire Kitsune semblait peut-être un peu facile, mais Ambrosias ne voyait pas qui d'autre serait assez fou pour faire une telle chose.
Se rendant dans la grande salle en longueur qui servait généralement aux réunions et autres briefings de mission, la militaire retrouva ses officiers quelques minutes plus tard, du moins pour ceux qui n'étaient pas déjà en ville. Leur mission serait de prendre avec eux trois quarts des effectifs de la base pour se disperser en ville et tâcher de régler au mieux la situation. Ambrosias était persuadée qu'il s'agissait là de l’œuvre de King Bradley, mais pourquoi ? Une telle attaque ne lui ressemblait pourtant pas, il y avait quelque chose de louche. Dilapidant ses effectifs, elle envoya ses meilleurs hommes aux quatre coins de l'île, restant seule à la caserne avec une défense particulièrement réduite. Confiante en ses capacités, elle estimait être en mesure de défendre seule l'endroit en cas de besoin.
Supervisant les opérations depuis le PC radio du QG, la colonelle donnait ses ordres à distance tout en tâchant au mieux de garder une vision globale de la situation. Plusieurs casinos avaient été pris pour cible, ainsi que le port et l'arène. Les attaques étaient éloignées les unes des autres, ce qui obligeait les marins à se séparer en groupes réduits. Au total pas moins de vingt explosions étaient à dénombrer. Une telle attaque était absolument sans précédents et Ambrosias tâcha de gérer ses hommes au mieux. Rapidement, il ressortit que les marins qui intervenaient se faisaient attaquer par des gros bras. L'hypothèse d'une attaque du Chinamire Kitsune devint alors de plus en plus probable. Fort heureusement, la commodore de St Just avait au moins en main la situation sur le port. Après une heure de chaos, Ambrosias fut forcée d'admettre que les forces locales étaient dépassées par l'ampleur de l'attaque. Elle savait que tout ou tard l'ordre serait rétabli, mais à quel prix ? Soucieuse de limiter au plus possible les dommages collatéraux chez les civils, elle devait régler la situation rapidement, raison pour laquelle elle donna l'ordre de lancer un signal d'alerte. Si par chance des membres de la Marine étaient dans les parages, ils pourraient lui venir en aide d'urgence.
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Dernière édition par Ambrosias le Mar 16 Mai 2023 - 18:43, édité 2 fois