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L'aventure au bout du tunnel [PV: Ashlinn]

Ashlinn s’y employa avec une extrême minutie. C’était à la fois touchant et très étrange, personne d’autres que mon père et moi n’avait encore eu accès à cette zone, eu la possibilité d’actionner ces câbles et ces engrenages ni admirer le soin qui avait été apporter à toute cette machinerie qui me maintenait en vie depuis maintenant plusieurs années.
Les mots de la jeune femme ne tombèrent pas non plus dans l’oreille d’une sourde, si je préférai sourire et rester muette durant l’opération, il était clair que cela me touchait. Je tournai même le regard dans la direction opposée de peur qu’elle ne puisse apercevoir un rougissement à travers le blanc de mes pommettes. Et cela ne s’arrangea nullement avec l’approche de sa poitrine dénudée. Difficile de détacher les yeux de ces monts pâles surplombés d’un sommet rosi, surtout à une telle proximité.
La gêne s’installa rapidement jusqu’à ce que la Capitaine termine et recule en se rhabillant.
Je fermai les yeux et pris une profonde inspiration, ce nouveau fluide s’immisçait rapidement dans tout mon organisme, se mélangeant au peu d’huile d’olive qu’il me restait et réhydratant tout le reste. Un intense frisson me parcouru tout le dos jusqu’aux orteils tandis que la mixture prenait ses aises à travers tous mes tubes et boulons, réactionnait les pistons endoloris et les soulageait les moteurs fatigués.

« Aaah … fiou … je ne vais pas vous le cacher Capitaine, ça fait du bien. J’étais tellement à cours, c’en est presque orgasmique. Mais un peu de tenue voyons, même si de votre côté le top less vous va plutôt bien, héhé. »

Toujours cette petite marque d’humour.
Je me redressai et fus moi-même surprise par la vitesse et l’aisance du mouvement. Alors que j’avais commencé à m’habituer au poids monstrueux de mon corps métallique, sentir chaque parcelle réagir comme à la sortie du laboratoire me fit presque sauter sur mes jambes. Toute ma force était revenue, et même si je sentais encore au fond qu’une amélioration serait la bienvenue, après tant d’heures passées à vide c’était malgré tout fantastique.

« Ça a l’air de fonctionner, je pense que vous pouvez demander votre diplôme de chimiste. » Dis-je en remuant les bras et me mettant à faire des squats sur place. « Ouaip c’est pas mal. Merci. Je vais enfin pouvoir être utile, prochaine étape : le campement. »

Plus que ravie de me sentir à nouveau vivante et remplie d’énergie, je ne me fis pas prier pour remplir un maximum de taches et même soulager régulièrement la jeune femme dès que j’en avais l’occasion. Les heures s’écoulèrent rapidement, avoir l’esprit occupé évitait de faire attention à la courbure du soleil. Et le crépuscule arrivant, nous avions déjà établit un solide plancher de bois, avec moults cordes végétales et rochers pour assurer une certaine stabilité au-dessus du sable. Le toit d’abord constitué de simples branches épaisses pour nous protéger des intempéries fut progressivement remplacé au fil des jours par d’autres planches de bois récupérées ici et là dans le cimetière de navire non loin.
Ces journées furent autant rythmées par la construction du campement que par les premières réparations sur notre futur navire. Cet immense pavillon prévu initialement pour des géants nous permettait de part les dimensions folles d’un champ de possible fantastique, mais également aussi énormément de travail. Chaque fin de journée était ainsi épuisante, éreintante et heureusement que l’effort soudait autant les planches et les rouages que notre duo.

Je l’avais remarqué, ses regards quand je tournai le dos, les miens à son attention lorsqu’elle ne regardait pas. Certains mots lancés au détour d’une conversation, certaines remarques aussi. Vous me direz chers lectrices et lecteurs que je me faisais des idées, que tout n’était que le fruit de mon imagination. Pourtant …
Je voulu vérifier quelque chose. La fin de journée approchant, une pause bien méritée, j’observai ma capitaine un instant après m’être abreuvée d’eau fraiche. Un pas après l’autre, je me glissai dans son dos et refermai les bras autour d’elle, la joue couchée contre son omoplate.
Pas un mot, pas un commentaire, pas une explication ne sortit de mes lèvres, je me contentai de la serrer contre moi, de respirer son odeur malgré la journée d’effort et d’absorber sa chaleur dans le froid de mon métal.

« Merci de m’avoir prise avec vous Capitaine. Shell Town reste mon île natale mais sans vous je n’aurais jamais osée prendre la mer. Et je n’avais jamais pris le temps alors merci. Merci. »
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Ash

L’aventure part en sucette

Le contact de sa peau métallique nous arracha un frisson le long de notre colonne vertébrale. Après tout, nous étions toutes les deux de température différente. Cette étreinte sortait de nulle part. Pourtant, cette dernière était incroyablement bienvenue. Aussi forte mentalement que nous pussions être, nous ne nous rendions pas compte que les jours passés, égarée sur ce coin perdu des blues, commençaient à avoir raison de notre moral.

Et les sous-entendus que nous nous laissions l’une et l’autre n’aidaient pas à garder les idées claires. Alors, ce câlin, ce contact humain se révéla salutaire. Nous fermâmes les yeux et lui saisîmes la taille, toujours dos à elle, emprisonnée dans ses bras. Un long soupir d’aise s’échappa avant que nous lui répondissions.— Avec plaisir Lucy, cela nous fait chaud au cœur de vous savoir près de nous. Nous sommes heureuse de vous avoir choisie parmi toutes les propositions qui s’offraient à nous. Et si nous parvenons à nous en sortir, nous continuerons l’aventure à vos côtés sans hésiter. Si vous le désirez, évidemment.Nous restâmes dans cette étrange position un moment. Nous n’étions que deux sur cette plage, personne pour nous juger ou nous déranger. Alors, nous profitâmes.

Mais quand cela devint un peu gênant, nous toussâmes pour rompre le lien. Pourtant, la morsure de son métal nous manqua bien vite. Nous nous retournâmes pour lui faire face et lui caressâmes la joue.— Ainsi, n’hésitez jamais à venir nous parler de quoi que ce soit si vous en ressentez le besoin.Cette parenthèse, cette bulle, dans cette journée éreintante, nous rapprocha un brin encore plus que ce que le début de notre collaboration aurait pu le laisser présager. Mais nous devions continuer à travailler d’arrache-pied.

Nous ne nous arrêtâmes qu’au soir tombé, partageant à nouveau le reste de la carcasse d’un volatile que la providence nous offrait. Enfin, nous étions persuadée qu’il y avait bien plus que cela. Tous les deux à trois matins, une volaille plumée atterrissait dans notre coin et le jour même nous sentions une paire d’yeux nous observer, cachée dans la lisière de la forêt.

Les nuits étaient fraîches. Et malgré le feu que nous faisions pour nous réchauffer, il s’avérait toujours de plus en plus insuffisant. Alors, soir après soir, Lucy et nous nous rapprochions un peu plus l’une de l’autre. Parfois nos épaules collées, parfois le bout de nos doigts. Mais encore cette gêne existante entre nous.

Une semaine était déjà passée et la seconde fila comme de rien. Le camp s’était transformé lentement en véritable base opérationnelle. Nous ne manquions presque de rien, sauf peut-être de la présence de nos amis perdus. La réparation du bateau était longue. Un tel navire à deux était un réel défi. Nous colmations les fissures et les avaries. Nous fixions tout ce qui était à notre portée, mais cela prendrait sûrement des mois pour tout faire. Cependant nous ne perdions pas espoir.

Et alors que nous pensions que rien n’allait changer, en milieu de semaine, un évènement inattendu se produisit. Une silhouette drapée de rouge sortit des fourrées et se rapprocha de notre feu. C’était une jeune femme, aux courts cheveux blancs, à la complexion hâlée et aux traits tirés. Elle s’assit près des flammes et s’y réchauffa. Nous n’avions rien dit, Lucy et nous, pendant une dizaine de minutes, ne sachant pas trop comment réagir à la situation. Jusqu’au moment où nous rompîmes le silence.— Qui êtes-vous ? Et d’où venez-vous comme ça ? nous lui demandâmes un brin perplexe.L’étrangère ne répondit rien pendant quelques instants encore, laissant planer le doute.— Ruby D. Schnee. Ca n’a pas d’importance qui j'étais. J’suis coincée depuis cinq ans. Ma vie publique n'est plus.— Vous êtes là depuis cinq ans ! Seule ? Nous… Et vous n’avez jamais réussi à trouver le moyen de vous échapper d’ici ?
— Non. J’ai eu de la compagnie. Inespérée, mais indéfectible.
D’un bruit de bouche, elle appela une créature cachée plus loin. Après un moment, une immense bête se rapprocha. Cette dernière passa près de nous. D’instinct, nous mîmes notre bras en protection de la jeune femme à nos côtés, même si nous savions qu’elle était apte à se défendre.— Nulle crainte, Blake ne vous fera rien.Et alors qu’elle l’affirmait, l’animal alla s’étendre contre sa maîtresse.— Qu’est-il ?
— Une créature endémique de l’île, rejetée de ses congénères après une blessure handicapante. C’est par son intermédiaire que je vous faisais parvenir la volaille.
Ainsi, l’explication de la survenue de cette nourriture miraculeuse nous apparaissait.— Nous ne serions jamais vous remercier pour ça. C’était providentiel.
— L’humain est vil et égoïste. Il ne mérite même pas ma pitié. Pas après ce qu’il m’a fait. Mais, je vous ai bien observé. Ne pas tuer ce félin. Voilà ce qui m’a motivé à vous aider. Il fallait que je gagne votre confiance.
Nous la contemplions avec attention, pressentant qu’elle en disait peu. Malgré les apparences, nous la sentions très renfermée, presque taciturne. Elle devait fournir un effort extrême pour parler avec nous. Que lui était-il arrivé ? Nous nous le demandions.



Dernière édition par Ashlinn Widdershins le Dim 18 Juin 2023 - 1:38, édité 1 fois
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Même si je ne doutais pas que de tels mots lui fasse plaisir, je ne pensais pas à ce qui se présageait pour nous. Ce rapprochement au fil des nuits, cette complicité au fil des jours, ces regards, ces attentions. J’avais ouvert la voie à toujours plus de liens et de proximité. Et pour tout vous dire, je ne m’en plaignais pas. Elle était pourtant ma supérieure hiérarchique, ma Capitaine, ma patronne je me surprenais parfois au milieu de la nuit à nous imaginer amantes. Quelle idée saugrenue n’est-ce pas ? D’une part le règlement l’interdisait pour des raisons en plus tout à fait valable. La loyauté, le respect des ordres, l’autorité et le regard des autres membres de l’équipage. D’autre part il n’était jamais bon de mélanger vie privée et vie professionnelle, l’histoire l’avait prouvée à maintes reprises, les ouvrages au QG en recensait une multitude.

Mais alors que je savais tout ça, alors que j’avais appris par cœur toutes les erreurs et fautes commises par le passé de la Marine afin de ne pas les reproduire moi-même, pourquoi est-ce qu’à chaque contact de sa peau contre mon métal je sentais mon cœur se serrer ? Pourquoi cette nuit encore, alors qu’elle dormait comme une ourse en pleine hibernation j’étais restée là à regarder fixement ses lèvres gercées par le sel et le sable, plutôt qu’à faire le guet ? Pourquoi diable alors que nous nous blottissions l’une contre l’autre pour combattre le froid nocturne je ressentais l’envie de plus ?
Toutes ces questions qui m’envahissaient pour la première fois de toute ma courte existence, je ne les comprenais pas. Elles n’avaient aucun sens, aucune raison rationnelle, aucune explication parfaitement logique et mathématique.

Deux semaines étaient ainsi passée, à me torturer les méninges ou redoubler d’effort pour me changer les idées. Nous avions tant à faire que cela aidait grandement à maintenir un esprit occupé. Ce jour-ci c’était à moi de préparer le repas, à base de noix de coco encore et toujours mais il fallait malgré tout faire ça bien. Mais alors que j’apportai son fruit à ma Capitaine je me figeai sur place car un élément étranger venait d’apparaitre. Une silhouette encapuchonnée accompagnée d’une énorme bête.
Courir les rejoindre risquerait d’énerver l’animal, mais ne pas bouger laissait Ashlinn à la merci de cet individu. Approchant alors pas à pas, en douceur et sans lâcher la créature du regard je tendais mes oreilles à capter leur conversation. Très curieusement cela avait l’air de bien se passer. De ce que je comprenais, les quelques fois où nous trouvions de la viande littéralement offerte au bord de notre camp, cela venait de cette femme ? Incroyable. Si nous avions si bien survécu ces derniers jours c’était grâce à elle ?
Je fini par totalement me rapprocher, les noix ouvertes en deux toujours dans les mains.

« C’était donc vous … personne ne vous a apprit combien c’était mal polie d’espionner les gens ? »

Cela voulait également sous-entendre qu’elle avait été là, cachée dans les ombres, alors que nous nous lavions. Bon dieu …

« Malgré tout merci. Je doute que nous aurions pu faire autant de choses avec exclusivement des noix de coco et des baies dans l’estomac. » Prononçant ces mots je tendis son met végane à ma Capitaine. « Cependant pourquoi nous aidez ? Cela ne peut pas être simplement parce qu’on a épargner ce carnivore. Vous dites vouloir gagner notre confiance mais à quelles fins ? Quitter cette île ? Votre créature ne semble pas particulièrement faite pour la vie en mer, et au regard de sa taille elle doit sans doute engloutir régulièrement des quantités notables de viande fraiche. Avez-vous déjà navigué en haute mer Mademoiselle Schnee ? »
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L’aventure part en sucette

—S’il en avait été du péril de cette île, peu me chaut des convenances. Mais vous visez juste, j’y vois une occasion pour quitter cette terre. N’est-ce pas naturel ?repliqua-t-elle d'un ton égale, mais distant, à notre seconde. Vous deux n’avez pas non plus l’intention de rester ici alors que cela ne fait que quelques semaines. Et ma compagne ne se nourrit pas exclusivement de viande. C’est une omnivore. Donc vous n’avez pas à vous en faire pour ça. Je n’ai pas de l’expérience personnelle pour la navigation. Mais j’ai côtoyé des gens qui en possédaient. Cela aura pu ruisseler sur moi.
— Votre présence est la bienvenue.  Vous nous avez été d’une aide précieuse. Et nous ne nous voudrions pas vous laisser moisir ici. Qu’importe qui et ce que vous avez été.
Elle hocha la tête en guise de remerciement et se terra dans le mutisme, regardant avec insistance le feu qui crépitait, comme perdue dans ses songes.

Nous étions admirative de sa force de caractère. Combien n’auraient pas fini fous en restant seuls sur l’île ? Ou même simplement mort en vérité. Et elle n’était rien de tout cela. Vraiment impressionnant.— Qu’est-il arrivé à votre bras ? Et à la mâchoire de cet animal ? nous lui demandâmes, intriguéeElle scruta son moignon au niveau de la moitié de son humérus ainsi que la gueule de Blake. Après quelque instant, elle s’expliqua.— Quand nous avons échouée ici, ce ne fut pas sans heurt. Le prix à payer pour notre survie fut ce bras. Nous nous estimons chanceuse. Notre tortionnaire, en comparaison, n’a pas réchappé. Quant à elle, ce fut cette blessure qui lui valut l’exclusion de sa meute. Un animal dont la mâchoire n’est presque plus fonctionnelle… un déshonneur pour la nature.C’était à notre tour de nous murer dans la réflexion. Nous souhaitions lui rendre la pareille.




Les choses changèrent pour un mieux depuis que Ruby nous avait officiellement rejointe. La volaille et autres viandes ne manquaient plus, mais toujours avec parcimonie. La préservation de la nature lui importait plus que tout. En retour de sa venue et de son aide, nous lui avions confectionné un bras cybernétique rudimentaire, au style très brut, avec mes moyens du bord et un maxillaire de soutien pour Blake. Elles furent toutes deux ravies par ce cadeau.

Grâce à elles deux, les réparations se déroulèrent un brin mieux. Nous pûmes accélérer la réfaction de la coque, la réhabilitation de l’intérieur. Pourtant à trois, il faudrait un miracle pour que cela se résolve en moins de quelques mois.

Au milieu de la troisième semaine, cependant, un espoir impensable naquit dans notre cœur. Là au loin, un navire marchand se profilait. Nous fîmes tout pour attirer leur attention. Nous brûlâmes des feuilles de palmier, de rondins de bois, de planches de vaisseaux, dans un grand feu de joie. Une immense fumée noire s’en dégagea, assez pour diriger quiconque regardait dans notre sens dans tous horizons.

Et pendant un temps, nous crûmes que cela avait marché. Enfin, un temps. Bien vite, l’espoir se mua en colère et puis en tristesse. Nous ne pouvions compter que sur nous-même pour nous sortir de cet endroit infâme.

Si c’était ainsi, alors soit ! Il faudrait que nous redoublions d’efforts pour nous extirper et revoir le visage de ceux que nous aimions. Lucy à nos côtés, Ruby en appui, nous parviendrons à quitter ce bout de terre ! Nous en faisons le serment !

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La réponse était non, ça commençait mal. Et elle appelait cette énorme créature sa compagne ? Comment cela ? Compagne comme dans un couple ? Qu’est-ce que c’était encore que cette absurdité ? Et bien évidemment elle voulait également quitter cette satanée île. Sur l’échelle de suspicion elle n’était pas loin du sommet alors hors de question de la prendre avec nous.

« Votre présence est la bienvenue. Vous nous avez été d’une aide précieuse. Et nous ne nous voudrions pas vous laisser moisir ici. Qu’importe qui et ce que vous avez été. »

L'aventure au bout du tunnel [PV: Ashlinn] What-h10

Ashlinn approuvait aussi simplement que si on lui proposait un café ! Mais pourquoi ? Comment ? Mais enfin ! Mais non ! Mais !
Je fixais ma capitaine avec des yeux exorbités, choquée par sa réponse mais sans faire le moindre commentaire. Certes elle était ma supérieure direct et ses choix prévalaient toutes les lois. Mais était-ce bien sérieux d’accepter parmi nous une totale inconnue et sa monstruosité à quatre pattes dans un moment aussi chaotique et vulnérable que celui-ci ? Omnivore mes fesses oui ! Vous avez vu ses crocs, ses griffes ? Elle était peut-être domestiquée mais ça ne la rendait pas moins dangereuse, surtout sans connaitre la personne qui tenait la laisse. Il y avait beaucoup trop de paramètres inconnus pour simplement accepter là comme ça, comme s’il suffisait de sourire pour passer toutes les portes. Vous l’aurez compris chers lectrices et lecteurs, je désapprouvais grandement.
Et je n’eu pas besoin de l’exprimer, obéissant aux choix de ma capitaine, je ne pouvais malgré tout m’empêcher de ne dormir que d’un œil la nuit. A toujours garder en vue la femme ou la bête. A l’espionner quand elle disparaissait dieu sait où, et cela n’aidait pas à faire avancer nos projets de départ de cette satanée île.
Les jours passèrent ainsi et même si cette Schnee et son monstre se révélait particulièrement utile pour garantir notre survie comme le remplissage de nos estomacs, je ne pouvais m’empêcher de la trouver de plus en plus louche. Il n’était clairement pas dans son intérêt de nous laisser mourir ici certes. Elle avait besoin de nos connaissances et compétences, mais de là à lui confectionner un nouveau bras ? N’était-elle pas déjà suffisamment dangereuse ? Ashlinn bon sang, qu’est-ce qu’il te passe par la tête ?

La survie restait malgré tout une activité de tous les instants, où la cohésion et l’esprit d’équipe devaient primer sur l’individualité. Alors je ravalai mes aprioris, me concentrant sur le travail à accomplir pour me changer les idées. En vain. Où que j’aille cette Schnee était là, et quand ce n’était pas elle sa bête la remplaçait. Vous me direz que je me faisais certainement des idées, que je devenais parano. Et pourtant !

« Capitaine. » Vins-je chuchoter à l’oreille d’Ashlinn au cours d’une nuit.

C’était la pleine lune, la plage et le cimetière d’épaves resplendissaient comme en plein jour d’une douce lumière blafarde. Le navire était bientôt prêt à reprendre la mer, nous avions abattu un travail de titan en si peu de temps. Et même s’il restait toujours quelque chose à améliorer il allait tout prochainement être officiellement capable de nous ramener à la civilisation.
Mais alors que je rentrais dans la nouvelle petite et sommaire chambre de bois de ma supérieure, mon cœur battait la chamade. J’avais besoin de lui poser la question, avant le départ, avant le moment fatidique, avant qu’il ne soit trop tard.
Pourtant une fois devant elle je restais assise à son chevet plusieurs minutes durant, à la regarder dormir, à observer ses lèvres frémir à chaque souffle, sa cage thoracique s’élever et se réduire dans un rythme lent et apaisé. Les rares spasmes de ses mains usées par le travail manuel exténuant. Mais ses lèvres, surtout ses lèvres. Malgré le sel dans le vent elles avaient toujours ce petit quelque chose d’attirant.
Accroupie à côté de sa paillasse je fini par me pencher en avant et m’approcher, m’approcher encore. Nous n’étions plus qu’à quelques centimètres, assez proche pour sentir son souffle glisser sur mes joues. Assez proche pour qu’un rien ne clôture la distance, une brise, un léger déséquilibre. Le cœur martelait ma poitrine à une rythme effréné. Quelques secondes à peine s’écoulèrent mais cela me parut être une éternité avant que la raison et la bienséance me fasse plutôt allonger le cou jusqu’à son oreille.
D’abord un chuchotement doux et chaleureux, presqu’une caresse. Aucune chance qu’elle se réveille de la sorte. Alors je recommençai avec un peu plus de conviction.

« Capitaine. Pardon de vous réveiller. Si tout va bien nous pourrons bientôt reprendre la mer, il reste encore mal de détails comme le moteur mais au moins il flotte bien et la direction fonctionne à nouveau, alors je voulais vous parler avant … c’est … c’est à propos de Ruby et son molosse. »

Je me rassis sur les genoux, proprement et respectueusement avant de répondre. Cela me donna par la même occasion le temps de choisir mes mots.

« Je … Pour aller droit au but et avec tout l’énorme respect que je vous dois, je ne pense pas qu’il soit une bonne idée de la garder avec nous. » C’était dit, c’était fait, maintenant il fallait préciser. « Emmenons-là jusqu’au port le plus proche pour la remercier de nous avoir nourri notamment. Mais je ne pense pas qu’il soit judicieux d’en faire un réel membre d’équipage … Je ne peux pas m’empêcher d’avoir un très mauvais pressentiment à son encontre. »

Nous étions bien toutes les deux, seulement et rien que toutes les deux. Nous n’avions pas besoin d’elle. Était-ce de la jalousie ? Peut-être, mais surtout de la peur. De la peur et de la méfiance pour Ashlinn qui accordait bien trop vite sa confiance face à une parfaite inconnue rencontrée sur une île déserte. Et j’avais terriblement peur de ne pas être en mesure de la protéger de sa propre bonté.
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L’aventure part en sucette

Nous nous relevâmes avec difficulté de notre torpeur un peu trop lourde, au vu de l’état avancé de fatigue que nous avions accumulé. L’ouverture de nos paupières fut presque une épreuve afin de comprendre ce qu’il se passait.— Lucy ? C’est vous ?Nous entendîmes ses propos, ses inquiétudes face à l’arrivée de notre nouvelle compagne d’infortune. Encore légerment dans les vapes, nous ne pûmes pas vraiment réfléchir et seulement nous laisser porter par nos sentiments.— Ecoutez, ma chère. Nous appréhendons grandement vos angoisses la concernant. Mais songez, elle est ici depuis cinq interminables années. Quel genre de menace voulez-vous qu’elle nous fasse subir ? Si réellement nous étions en danger, il y a bien longtemps qu’elle aurait pu nous sauter à la gorge et nous tuer par exemple. Nous ne pensions pas l’intégrer à l’équipage à l’origine. Mais maintenant que vous évoquez l’idée. Testons là. Si vraiment elle s’en montre digne, cela fera un atout en plus. Sinon, tant pis.Le sommeil nous regagna bien rapidement. Nous bâillâmes et nous allongeâmes sur notre paillasse. Alors que la torpeur prenait le dessus sur notre esprit nous laissâmes échapper une dernière parole.— En attendant…. Venez-vous coucher… Une bonne… nuit de repos…Et à partir de ce moment-là, nous n’avions plus conscience de rien. Nous avait-elle rejoins ? Nous avait-elle quitter ? Mystère, d’autant que le matin même, nous étions seule au réveil. Enfin quoi qu’il en soit, une journée productive s’annonçait. Comme toutes les autres en vérité.

Nous sentîmes toute la méfiance dont pouvait faire preuve notre seconde suinter par tous les ports de sa peau. Elle regardait en coin et avec des éclairs dans ses yeux le jeune diaphane qui nous aidait vaille que vaille. C’en était touchant en un sens. Mais nous l’invitâmes à un peu plus de retenue et de sang-froid. Nous étions deux combattantes émérites. Nous pouvions nous défendre contre elle et Blake.

En milieu d’après-midi, une surprise de taille tomba sur notre groupe hétéroclite en compétence. Alors que nous retapions une énième pièce dans la maison longue du drakkar, un brouhaha distant nous parvint. D’abord très diffus, nous pûmes finalement discerner un aboiement familier et la clameur des discussions. Notre sang ne réalisa qu’un tour dans ses veines. Nous lâchâmes tout ce que nous tenions et accourûmes dehors, en quatrième vitesse.— Lucy ! Ruby ! Venez voir !Derrière les rochers et les arbres qui dessinait la côté est de notre position, un groupe s’extrayait d’un pas lent. Nous en reconnûmes certains. Et là, à leur tête. Naoko et Tric ! Électron les devançait d’une bonne allure, autant joueur qu’à son habitude.

Nous nous jetâmes sur le sable et accourûmes aussi vite que nous le pouvions vers nos hommes. En nous apercevant, des vivats résonnèrent rapidement de la foule, mais celui qui nous fit la plus grande fête, c’est notre chien. Il nous sauta dessus et nous poussa à la renverse. Notre visage devint le lieu de privilégier de sa langue tant il nous lécha pour affirmer sa joie. Nous nous laissâmes faire, et rîmes même aux éclats.

Un sentiment de félicité mâtiné de soulagement nous envahit en cet instant. Nous étions littéralement heureuse de retrouver tout ce petit monde. Après quelques minutes, nous écartâmes notre animal pour nous redresser et faire face à notre meilleure amie. Après avoir essuyé notre figure, nous la saisîmes dans nos bras et plaquâmes notre front contre le sien.
Des larmes coulèrent sans que nous puissions les maîtriser. Nous avions tant redouté de la perdre que nous avions intériorisé cette douleur. Alors le barrage céda.— Nous avions cru ne jamais te retrouver, Princesse.
— De même, Barbare… de même, s’autorisa-t-elle à dire, dans un état pareil au notre.
— Co-Comment êtes vous arriver ici  ?
— La fumée que vous avez faite. Elle nous a guidée jusqu’ici. L’équipage pensait vous avoir perdu pour de bon. Et nous ne savions pas vraiment comment nous en sortir. Ainsi nous avons joué le tout pour le tout en venant ici.
— D’accord. Nous voyons. Heureux hasard que nous voulions attirer l’attention de ce bateau dans ce cas, nous expliquâmes avant de nous retourner vers notre médecin de bord. Contente de vous récupérer, Tric. Nous aurions été déçue de ne plus vous revoir.
— Moi aussi, Capitaine. Je m’étais enfin habitué à l’idée de vous parler plus régulièrement qu’une fois en coup de vent, plaisant-a-t-il en me tendant la main tandis que nous la sérions en réponse.
Il est vrai que la vie nous avait souvent placé l’un sur la route de l’autre, sans nous permettre de nous côtoyer réellement. Un peu un running gag que le sort aimait répéter. Nous lui sourîmes et invitâmes l’équipée exténuée par le voyage à venir occuper l’espace de notre pauvre camp.

Il était clair qu’il allait falloir faire des aménagements. Agrandir, construire et surtout planifier. Car avec leur arrivée, force était de constater que les réparations du bateau allaient prendre trois fois moins de temps que prévu. Les retrouvailles avec Lucy furent aussi chaleureuses et émouvantes. Mais les interrogations se massèrent bien vite quand on remarqua Ruby et sa créature pour la première fois.

Alors nous entreprîmes de raconter notre aventure sur l’île des quelques semaines. Cela nous demanda l’après-midi et franchement c’était pas plus mal. Nous n’avions pas vraiment la tête à travailler, mais bien à profiter de l’instant. Nous aurions bien à faire demain. Ainsi, nous ripaillâmes une bonne partie de la nuit. Les noix de coco, et les volailles chassées par Blake coulèrent à flots. Mais nous vîmes quand même l’air renfrogné de Lucy.

Alors nous nous approchâmes et passâmes un bras autour de ses épaules et rîmes avec elle. Essayant de la rassurer de notre mieux, même si nous ne pouvions pas vraiment deviner pourquoi elle tirait la tête. C’était un délicieux moment. Peut-être le plus beau depuis quelques semaines. Privé de vie sociale, nous en profitions tous pleinement.

Ruby s’était longtemps tenue à l’écart de cette foule. Évidemment, nous pensions bien qu’après tant de temps, seule, récupérer une proximité devant être difficile pour elle. Mais finalement, elle se laissa porter par la fête et accepta de partager nourriture et boissons avec le reste des matelots.

À quelle heure avions-nous fini ? Bah ce n’était pas important. Le plus crucial, c’était la gaieté des retrouvailles. Pourtant, le reste de la semaine ne fut pas tendre avec l’équipage. Nous nous montrions exigeante avec eux. Surtout dans la manipulation des pièces sensibles des moteurs des différents bateaux environnants. Naoko nous avait rendu les outils de notre maîtresse, que nous pensions à tout jamais perdus en mer. Là aussi ce fut avec un certain émoi que nous les saisîmes.

Au bout de cette semaine, nous touchions au but. Noir de graisse, nous donnions les derniers coups de clef pour ajuster les boulons du moteur. Nous en avions assemblé de zéro. Il constituait même une œuvre unique vu qu’il était calibré pour un vaisseau de cet acabit. Nous soupirâmes de satisfaction, en frottant notre front de suie, un sourire extatique sur le visage.

Tric se souciait de revitaliser les hommes sur le terrain. Après tout, cette expérience commune nous avait fragilisés tous physiquement. Nous avions tous perdu quelques forces et kilos. Il allait falloir se réadapter et se remplumer. Naoko s’occupait de Lucy. Enfin plus précisément de son ravitaillement en huile de noix de coco. Elle avait affiné la recette, affirmant que notre travail n’était qu’un palliatif presque convaincant, mais perfectible.

Nous avions ri. C’était son domaine après tout, pas le nôtre. Enfin, les choses s’achevaient. Enfin, nous voyons l’aventure au bout du tunnel.

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Sa proposition me rassura, nous pouvions la mettre à l’épreuve au moins pour être sûr et nous assurer qu’elle était prête à suivre les consignes sans animosité ni tromperie. Le respect de la hiérarchie restait importante, même sans navire en état sous la main. Si elle voulait nous rejoindre, il allait falloir nous assurer que toutes ces années passées loin de toute civilisation ne l’aient pas transformer en sauvage. Pour le moment cela allait, je voulais voir sur le long terme.
Ashlinn se rendormit peu après, complétement épuisée elle ne savait plus ce qu’elle disait.
Un sourire tendre étira mes joues, du bout des doigts je lui replaçai les quelques mèches sauvages derrière l’oreille, avant déposer en silence trois baisés. Un de chaque côté de ses lèvres, le dernier sur son front.

« Faites de beaux rêves Capitaine. »

Bien que l’envie de me blottir contre elle et d’y rejoindre Morphée fut très tentante, je retournai plutôt dans ma propre couchette, non sans prendre un moment pour observer les étoiles quelques minutes et me demander ce que mes parents avaient fait de leur journée. Est-ce que je leur manquais ? Est-ce que papa avait enfin réussi à réparer son bidule ? Est-ce que les olives poussaient bien ?
J’avais depuis longtemps voulu prendre la mer, vivre mon aventure et aider les gens à travers le monde. Mais au final ils me manquaient atrocement, alors que j’étais là, perdue autant physiquement que moralement. Et puis cette histoire avec Ashlinn maintenant, pourquoi mon cœur s’emballait sitôt que je la voyais. J’étais perdue …

La nuit ne fut pas très reposante, et le réveil grognon. Seulement le destin avait décidé de nous jouer un tour, et quel tour ! La surprise fut immense quant au milieu de l’après-midi, je pu reconnaitre un chien nous arriver dessus, suivi par une multitude de visages parfaitement connus et identifiables ! L’équipage avait survécu ! Un miracle, c’était tout bonnement un miracle !
Ashlinn ne pu contenir sa joie et les rejoignit dans une étreinte multiple qui donnait le sourire.

« Mademoiselle Schnee, voici vos nouveaux compagnons d’aventure. » Résumai-je à son attention, un peu à l’écart de la troupe. « Le reste de l’équipage. Vous verrez ce sont des gens sympas, un peu bruyant et tactile mais ils ne sont pas méchants. »

Le reste de la journée échappa aux travaux manuels, une si bonne nouvelle ne pouvait être gâcher par l’immense travail qu’il nous restait à faire. Il fallait fêter ça. Et même si je n’étais pas réputée pour mon côté extraverti, loin de là, comment rester de marbre face à tout ça ?
Les jours suivants furent bien moins festifs, mais profitant de cette soudaine main d’œuvre supplémentaire les travaux reçurent un fulgurant coup de boost. A tel point que je pu même me permettre un peu de repos et voir avec Naoko mon souci d’huile et la substitution qu’avait pu bricoler Ashlinn.
Vous n’imaginez pas à quel point on se sent bien sitôt pleinement nourrie et alimentée. Fini les grincements et les courbatures !
Et pour couronner le tout, le nouveau moteur fonctionnait enfin ! L’équipage se rejoignit sur le pont après toutes ces journées et ses semaines de labeur. Nous avions voulu marquer le coup, alors la barre avait été recouverte d’un tissu que je tenais en place contre le vent.

« Capitaine Ashlinn Widdershins. » Annonçai-je toute souriante face à la jeune femme. « La mer est à vous. »

Et d’un mouvement de bras l’imposante structure de bois se révéla aux yeux de tous. Les applaudissements éclatèrent, rapidement accompagnés de rires et de sifflets enthousiastes.
L’aventure pouvait reprendre !
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Widdershins
Ash

L’aventure au bout du tunnel

C’était le regarde porté à l’horizon que nous quittions cette île infernale. Un soulagement ambiant parcourait les membres de l’équipage. Même les officiers, dont Ruby à qui nous n’avions pas encore donné de poste officiel, arboraient des sourires satisfaits sur leurs visages. Nous rentrions. Enfin ! Un mois perdu en pleine mer, cela nous avait tous indéniablement affectés. Pourtant, nous en ressortions vivants et grandis.

La manœuvre de ce bateau se montrait bien différente vis-à-vis d’un navire traditionnel. La taille hors norme de sa coque, sa barre atypique, la vue bouché non pas par une rangée de voiles, mais par une maison longue et une proue en hauteur. Nous allons nous y adapter. Sans aucun doute.

Nous avions réussi par des moyens colossaux à mettre cette nef dans un parti de mer sans obstacle pour nous en extraire. Et, une fois le moteur démarré, nous avions enfin pris le large. La première terre habitée se trouvait à moins de 3 jours de navigation. Cela nous laissait pleinement le temps de nous familiariser avec notre nouvelle embarcation.

Tandis que nous avancions mille nautique après mille nautique, nous inventorions et réfléchissions avec nos gradés à des dispositions des pièces importantes qui pourrait venir constituer l’intérieur de la skalar. L'essentiel, c’était un laboratoire dernier cri. D’ailleurs, cela sera ça le nom de ce navire. Le Labo’. Et nous en ferions une sommité dans les lieux d’expérimentation mobile.

Les commodités actuelles se montraient sommaires. Nous dormions sur des lits de paille sur des sommiers rudimentaires. Nos besoins étaient évacués dans la mer par des sauts. Enfin, ce ne sera que de courte durée. Une fois de retour à Koneashima, nous aurions tout le loisir de faire réparer de fond en comble ce rafiot.

Ruby D. Schnee. Bien que cette ancienne noble demeurât beaucoup en retrait, surtout avec Blake en fait, l’équipage avait l’air de l’apprécier et de l’intégrer au mieux. Lui laissant l’espace qu’il lui fallait. Sa présence était la plus grande interrogation de ses derniers jours. Lucy se montrait toujours retissant, alors que Tric et Naoko me rejoignaient et voulaient lui donner sa chance. Ce n’était certes pas une militaire de formation, mais nous pouvions très bien lui trouver une utilité.

Ces trois jours se révélèrent une épreuve constante de patience. Nous désirions en terminer, retrouver la civilisation. Lorsque la vigie sonna la cloche et commença à crier « Terre ! Terre ! », un sentiment d’allégresse nous envahit tous sur le pont. Nous entamâmes les manœuvres d’accostage. Mais le port serait-il disposé à recevoir le Labo’ ? Ses dimensions non conventionnelles rendaient toute approche novatrice pour nous. Alors nous redoublâmes de précaution.

Nous dépassions de dix mètres les bateaux déjà amarrés aux quais de Poiscaille. C’était la première fois que nous débarquions et nous n’avions pas prévu de planche pour cela. Ainsi, c’est la capitainerie qui nous en fournit un. Après avoir enregistré notre navire, la première chose que nous fîmes avec l’équipage fut la plus importante de toutes. Aller au pub des docks !

Ouais l’amertume de l’alcool et de la bonne beuverie entre équipages nous manquait un peu. Alors, avec le peu de deniers qu’il nous restait, surtout ce que nous avons retrouvé dans les carcasses de nef, nous payâmes la tournée aux matelots. Oui, encore la fête, mais pourquoi se priver !?

Alors que nous descendions bières et rhums avec un plaisir non dissimulé, un type assez bourru entra dans la salle du bar.— Il est à qui ce drakkar dans la baie ? Il déchire gueula-t-il pour l’assemblé.
— A nous ! Plus tard il deviendra le meilleur de la flotte de la marine ! nous répliquâmes un peu trop enjouée.
— Et tu l’as dégoté où ?  
— Alors… assied toi… faut qu’on te raconte !

Alors qu’il s’approchait, nous hoquetâmes et posâmes une bière devant lui avant de nous concentrer pour lui raconter cette aventure rocambolesque.

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