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Va y avoir du spore !

Va y avoir du spore ! Ual-EGe-HTk8-X0-Aca-H9

戦 士

∆ feat. Alegsis ∆


Juché sur un rocher, Ualraig tenait sa lance dans la main droite. Au loin, il observait la course d'un cerf. Le pauvre animal, totalement affolé, cherchait tant bien que mal à fuir son prédateur. Gainant les muscles de son bras, l'homme envoya son arme en direction du corps de la bête. La pointe de la lance transperça sa chair et il s'écroula sur le côté, mort sur le coup. Un léger sourire traversa le visage dur du guerrier. D'ordinaire, une lance portait assez mal son nom. La lancer était une absurdité sans nom, ce n'était pas une arme de jet, contrairement au javelots. Ceci étant dit, pour un golgoth tel que le jeune Farghasdan, s'en servir de la sorte restait une option tout à fait valable. Sa mère lui avait toujours expliqué que la chasse à l'arc était plus noble, plus raffinée, mais il n'aimait pas cette arme. Tuer à distance avec de petits morceaux de bois était une pratique de lâche pour un guerrier comme lui. Sa lance était comme un prolongement de son propre corps, il ne voulait se servir d'aucune autre lame.


S'approchant de sa proie, l’Alban sortit sa dague pour trancher la gorge de l'animal. À priori, le cerf était mort, mais il préférait ne pas prendre de risques. Chasser était normal pour lui, faire souffrir inutilement un être innocent ne l'était pas. Ramassant sa lance, il souleva d'une main le corps de la bête qu'il posa sur son épaule. D'un pas lent mais décidé, il prit la direction de son village. Crannog se trouvait à vingt bonnes minutes de marche. Perdu entre les Cairn Gorom et Navi, le hameau était pauvre et la vie y était difficile. De puissants guerriers, tels Ualraig, sortaient de temps en temps des rangs du village, mais leurs effectifs restaient malheureusement faméliques. En tant que combattant le plus fort des environs, l'homme était empli de fierté. De retour sur la place centrale de Crannog, il remit le corps du cerf au seul et unique boucher du village. Padrig, le quinquagénaire chauve, bourru et légèrement ventripotent dont il était question, releva la tête en donnant un grand coup de hachoir dans un morceau de viande.



« Hum, pas mal.

- Mouais, c'tait pas l'plus gros.

- Bah, ça fera l'affaire. Merci mon garçon. »



Se contentant d'un raclement de gorge pour toute réponse, Ualraig s'éloigna. Il n'aimait pas le surnom que lui donnait le vieux Padrig, mais il n'était pas assez fou pour s'en prendre à un des anciens du village. Idiot, oui, mais pas suicidaire. De toute façon, le chef  l'avait à la bonne depuis toujours. Prenant la direction du puits, le guerrier tira un seau d'eau et commença à faire ses ablutions. Consciencieusement, il retira les tâches de sang laissées par le pauvre animal. S'aspergeant finalement le visage pour se rafraîchir, l'Alban soupira de contentement. Il aimait le contact de l'eau froide sur sa peau. Reniflant quelques secondes, il se moucha de l'index en s'éloignant. Sa lance à la main, le golgoth alla se poser quelques mètres plus loin sur un banc en granit. Sortant une petite pierre à aiguiser, le guerrier commença à s'occuper du fer de son arme. Se perdant dans ses pensées, il ne manqua pas de remarquer la présence d'un inconnu. Ualraig haussa un sourcil face à la mocheté de l'homme. Jamais il n'avait vu quelqu'un de si hideux. Il était littéralement laid comme l'inceste. Dévisageant l'étranger sans même chercher à s'en cacher, le blond continuait de s'occuper de sa lance en silence.



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Quelque peu éberlué qu’on manqua de civilité au point de s’afficher torse poil, Alegsis avait hésité un instant avant d’adresser la parole au bestiau humain qu’il trouva au beau milieu de son périple. Toutefois, soucieux de se faire passer pour guindé afin de mieux assurer sa supériorité civilisationnelle – lui qui n'était pourtant qu'un résidu d'eau croupie puisé du fin fond du Cimetière d’Épaves – le chasseur de primes, avec des airs recherchés qu’il ne trouva jamais, plus ridicule qu’il ne l’était au naturel, força des grands airs qui lui allaient bien mal afin de prendre de haut le gugusse qu’il trouva là.

- Bien le bonjouuuur jeune fille, est-ce que vous pourriez m’indiquer l’emplacement du tréso… enfin…, malaisée était la tâche consistant à se présenter comme brillant lorsqu’on était en réalité le dernier des imbéciles, disons l’endroit où vous cacheriez un trésor dans le coin ?

La requête, comme toujours quand pareil énergumène s’essaya à en formuler une, fut des plus incongru. Ce qui ne l’empêcha pas de l’avoir énoncé ingénument, se figurant en plus qu’il obtiendrait des résultats. À bien y regarder, on ne sut trop quelle erreur, par cette première approche d’un autochtone, fut la plus déplorable. Peut-être le « jeune fille » fut candidat à la palme de la plus tragique mégarde qu’il fut permise de proférer en cet instant.
L’individu qu’il trouva ici avait en effet une mâchoire ciselée au burin, des muscles si saillants qu’ils parurent presque irréels et une poitrine dévoilée d’où ne pendait pourtant aucun mamelle. La méprise était impardonnable, mais Alegsis, parce qu’il avait des idées bien arrêtées, se refusa à admettre qu’un homme puisse porter une natte. Aussi, ce ne pouvait être qu’une demoiselle qu’il trouva face à lui. La logique était alors d’autant plus imparable qu’elle se trouva purement inexistante.

En outre, qu’on quémanda un trésor, ou plutôt, la piste qui y conduisit, ne put mieux éveiller les soupçons que des aveux francs. S’il se trouvait à Alba, Alegsis, ce ne fut pas par plaisir. Il avait cependant, quelques jours auparavant, traîné dans une lointaine garnison d'East Blue, un pirate primé pour des broutilles. Tout du long du chemin où il l’avait conduit vers sa geôle, le boucanier, avec boucan, argua qu’il avait, avec des membres de son équipage de jadis, enterré un trésor à Crannog, petit village perdu au fin fond d’Alba ; là où les étrangers s’y faisaient rares du fait qu’ils se trouvaient indésirable. Sa tentative de le soudoyer, néanmoins, n’intima Alegsis à aucune mansuétude.
Par acquis de conscience cependant, le chasseur de primes s’en était allé vérifier si la rumeur avait dit vrai. Toutefois, assez mal versé dans les chasses au trésor, il accumula quelques maladresses dans son expérience.

Constatant qu’il avait quelque peu décontenancé son interlocuteur avec une question improbable – quoi que le « jeune fille » dut sans doute faire impression – Alegsis plissa ses yeux ronds et mornes tandis qu’il toisa le costaud.

- L’a pas l’air finaud le corniaud, se permit - à mots couverts cependant – le plus spectaculaire abruti qui se trouva dans la place, toi y’en a comprendre ? Et poursuivant ses outrances, cette fois en tonitruant, il ajouta, tout en plaquant sa paume sur sa propre poitrine, MOI ALEGSIS ! MOI CHERCHER OR À MOI ICI. MAIS MOI PLUS SAVOIR OÙ L’AVOIR MIS. Il espérait ainsi faire illusion en attestant de ses droits de propriété sur un trésor putatif caché sur la terre des autres.

Mettant alors toutes les chances de son côté, prompt à solliciter et même retourner le village tout entier où il n’était pourtant qu’un indésirable, Alegs, pareil à un vandale en campagne, poursuivit sa quête en exhortant son sauvage, le bout de son pinceau de combat braqué sous son nez :

- Jeune fille ! Trouvez-moi un vieux. Ces gens-là savent des choses.

Ainsi contribua-t-il une fois de plus – et avec brio – à mieux précariser sa situation. La prudence intimait à chaque visiteur sur Alba de ne jamais trop se faire remarquer, si ce n’est à ne pas accoster du tout. Alegsis, ses semelles à peine posées sur les quais, s’était déjà cru en territoire conquis et ne se fit pas prier pour se comporter en absolu goujat. Restait à espérer pour lui que la masse musculeuse qu’il s’était désigné comme guide ne fut pas soupe-au-lait. Les os, en effet, se brisaient bien facilement lorsque l’on babillait sans réfléchir.
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戦 士

∆ feat. Alegsis ∆


Décontenancé par une telle impudence, le guerrier fixa l'illustre inconnu l'air interdit. Ses sourcils se froncèrent tandis que l'étranger au faciès ingrat le traitait de jeune fille. Des manières qui laissaient à désirer en plus d'être un rustre venu d'autres terres, ce type avait décidément tout pour plaire. N'appréciant guère sentir les poils d'un pinceau géant sous son nez, Ualraig l'écarta de son visage d'un revers de la main tandis qu'il se relevait. Sans se départir du mépris qu'il avait pour cet homme, le blond se racla la gorge avant de lui cracher aux pieds.


« Y'a pas d'trésor ici, regarde donc où tu t'trouves, crasse de meule. »


Un trésor à Crannog, c'était la meilleure. Le village était l'un des plus pauvres de tout Alba, il fallait vraiment être le dernier des idiots pour chercher des richesses dans le coin. Bien sûr, il ne fallait pas être très malin non plus pour ne pas comprendre qu'une fois un coffre enterré, il était difficile de se douter de son existence. Cette seule idée dépassait Ualraig. S'il n'avait pas vu de trésor, alors le trésor ne pouvait pas exister, c'était aussi simple que cela. La demande de l'étranger était donc stupide aux yeux du guerrier, qui, de plus, n'avait pas pour lui une grande sympathie. En plus de ne pas être Alban, il le traitait de jeune fille. Le golgoth n'avait rien contre les femmes, il les aimait beaucoup même, mais il était bien placé pour savoir, même lui, que de telles paroles ne pouvaient qu'être insultes ou provocations. Bien que rustre, le blond savait qu'il ne fallait pas se jeter de suite sur les étrangers qui faisaient un faux pas. La garde Albane appréciait assez mal cela, arguant que, soit disant, cela rendait les relations difficiles avec le Gouvernement Mondial. Ualraig s'en moquait bien, toutes ces choses compliquées les dépassaient.


« Va pas emmerder les anciens avec tes conneries, r'tourne donc téter l'pis des vaches. »


Ramenant sa lance contre lui, le guerrier faussa compagnie à l'étranger. Sur son passage, il croisa plusieurs enfants qui parlaient entre eux à vois basse, montrant du doigt Algesis. L'un d'eux s'empara d'une pierre et semblait sur le point de la lancer.


« Range ça, Fearchar. On caillasse pas les gens, même quand ils sont moches. »


Le gamin rouspéta, bien sûr, mais il n'eut pas l'audace d'aller contre la volonté de l'imposant guerrier. Levant les yeux au ciel, Ualraig reprit son chemin. Il n'avait vraiment pas envie de rester dans les parages, pas avec cet étranger qui lui tapait sur les nerfs.



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« Poc », fit alors la pierre venue heurter l’arrière d’un crâne ; celui du grand gaillard, très exactement. De derrière lui, encore en position de lancer, pris en flagrant délit, Alegsis se redressa comme si de rien n’avait été. Il avait ses manières à lui d’interpeler ses contemporains.

- Je… euh…, c’était alors un gros morceau qui le fusillait à présent du regard, ce qui, de ce fait, intima Alegs à une certaine révérence après qu’il eut accompli un coup d’éclat aussi brillantissime que le sien, c’est une pépite ! C’était un vulgaire caillou. Oui, voilà, une pépite encore euh… sédimentée de euh… condensation… euh… cristalline la condensation, quiiiii… mithridatise l’hydrocéphalie. Pour ça qu'elle est grise

Ignare, il avait enquillé à la suite les termes qu’il compta les plus techniques de son vocabulaire, sans qu’il n’en connut toutefois la signification. Par ce malhabile tout de passe-passe, il escomptait ainsi truander le pécore en le mystifiant sur le minerai présomptif. C’était, pour lui, une manière de vouloir briller après qu’il se sentit bien honteux d’être déconsidéré par quelques loquedus du fin fond des landes.

- Je peux t’en filer plein si tu m’aides à trouver le trésor qui en est rempli véridique. J’ai des tas d’échantillons.

Les enfants, figurant parmi les entités les plus clairvoyantes en présence, exhortèrent à la prudence, allant jusqu’à souffler – mauvais esprits qu’ils étaient – que le caillou, en définitive, n’avait été qu’un caillou. Alors, afin des les rallier à sa cause eux aussi, à moins que ce fut par malice, Alegsis, à ces garnements, les gratifia à leur tour chacun d’un caillou. Leste dans le mouvement de poignet, il les avait alors malencontreusement assommés l’un après l’autre. Qu’il visa si bien et si précisément pour les heurter au beau milieu du front pouvait, chez les plus suspicieux, laisser à suggérer qu’il l’aurait fait exprès.

L’averse de gadins ainsi tombée à l’horizontale, Alegsis apportait avec lui le beau temps en exhibant son sourire niais, espérant ainsi séduire un rustre afin de lui faire mordre de la caillasse en l’échange d’un trésor.

- Y’a bien un de tes vieux, il tenait le terme pour synonyme d'« Ancien » et l’utilisait nonobstant son caractère familier, qui a dû entendre des histoires et qui a des pistes à nous filer.

C’était à croire qu’il le pressait pour qu’on lui montra les antiquités locales. Et ce, bien que celles-ci furent réputées rétives à vouloir croiser du nouveau monde. Qu’on aille les entretenir de légendes sur un potentiel trésor ne pouvait dès lors que les indisposer dans les grandes largeurs. Ce qu’Alegs se fit un plaisir de faire, mais en espérant s’arranger la caution du grand couillon à qui il chercha à s’associer dans son entreprise stérile.
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∆ feat. Alegsis ∆


Tandis qu'il se frottait l'arrière du crâne, le guerrier des clans regarda les mioches se faire envoyer au tapis sans intervenir. Haussant légèrement les sourcils, il regarda tour à tour le corps des garnements.


« Même pas foutu d'voir v'nir des gadins d'en face. Les gamins d'nos jours... »


Perdu face aux élucubrations de l'étranger, Ualraig resta muet. Tant de mots si compliqués pour une si petite cervelle, c'était bien plus qu'il ne pouvait en supporter. L'air bête, il hocha la tête l'air de faire semblant de comprendre. Des pépites qui ressembleraient en fait à de vulgaires cailloux ? Cela n'avait pas le moindre sens. On aurait même pu dire que c'était tout à fait débile. Est-ce que le golgoth crut à cette histoire ? Bien entendu.


« Les anciens j'ai dis. Un peu d'respect, avorton à face d'flétan. Suis moi. »


Ualraig n'avait pas connaissance de l'existence d'un trésor à Crannog. Cela lui semblait difficile à imaginer, mais après tout, pourquoi pas ? En plus, s'il pouvait ressortir de là avec quelques pierres précieuses, ça ne pouvait décemment pas être un mal. Tout en avançant, il se creusa les méninges pour savoir qui pourrait lui en apprendre plus à ce sujet. Le vieil Alasdair étant le plus érudit du village, ce qui ne voulait pas forcément dire grand chose vu le niveau général, il apparut au guerrier qu'aller le voir semblait être une bonne idée. En compagnie de son compagnon de fortune aux mauvaises manières, il déambula dans les ruelles sinueuse du hameau jusqu'à arriver face à la maison de l'ancien. Petit bicoque sans prétention, elle lui avait servi par le passé de comptoir commercial. La chose pouvait sembler étrange, mais oui, il y avait bien eu un temps où même Crannog tirait quelques revenus du commerce. Cette époque était bien sûr lointaine. Devant sa bâtisse, l'homme d'un âge difficile à définir était assis dans un fauteuil à bascule.


« Ualraig, mon petit, bonjour.

- M'sieur Alasdair, j'ai une question.

- Je t'écoute.

- Z'auriez pas connaissance d'la présence d'un trésor ?

- Un trésor ?

- Ouais. L'minus ici dit qu'ya des étrangers d'son genre qui sont v'nus l'planquer.

- Un trésor à Crannog ? Hahaha, vous avez l'imagination fertile tous les deux.

- Ouais c'pas faux.

- Non, désolé, ça ne me dit rien.

- Oh, ok. Merci.

- Ceci dit, y'a bien un inconnu qui est passé dans les parages il y a quelques mois. Tu étais au tournoi de Glaschu à ce moment si ma mémoire est bonne.

- L'été dernier ?

- C'est ça.

- Ah bon.

- Mais il n'avait aucun trésor avec lui. Je doute que cela puisse t'être très utile. »



Se tournant vers Alegsis, le guerrier haussa les épaules en levant les mains, l'air de dire que leur quête était déjà terminée. Si Ualraig ne comptait pas insister, il était assez peu probable que l'étranger ne jette l'éponge aussi vite.



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- Il est dans le coup.

Il y avait un coup. Et quel qu’il fut, ce coup-là, Alegsis l’aurait volontiers juré ; l’Ancien en était. Sa réponse, pourtant limpide et équivoque, apparut au chasseur de primes comme si suspecte que la défiance fut forcément de rigueur.
Quoi qu’il eut répondu, ce vénérable, Alegs en aurait détourné fallacieusement le sens pour présenter l'individu comme louche. Opiniâtre quand il avait une idée en tête – et jamais la bonne – son jugement était fait avant même que le dossier vide ne lui fut présenté : il y avait une cabale autour du trésor, point. Admirablement doué dès lors où il fut question de se monter le bourrichon sans aucune raison valable, Alegsis, généreux, associa volontiers son guide dans la paranoïa infondée dont il ourdissait déjà les prémisses sur seule base de sa libre suspicion.

Sans qu'on lui accorda un instant afin qu’il eut seulement l’occasion de se montrer circonspect à présent qu’on l’accabla d’une hypothèse aussi douteuse, le guerrier fut très vite assailli de nouveau par l’indésirable.

- Mais enfin, ça crève les yeux, souviens-toi l’été dernier, Glaschu, le débit de son crachoir était alors suffisamment haletant pour qu’on n’eut le temps de lui préciser que « Glaschu » n’était pas le nom de son accompagnant, ils ont attendu que tu sois parti pour aller enterrer le trésor sans que tu t’aperçoives de rien. Une conjuration je te dis.

Dépourvu du moindre soupçon d’élément à même de corroborer sa thèse, Alegsis la tenait à présent pour incontestable.

- Vous savez que je peux vous entendre, hein ? C’est pas parce que je suis vieux que je suis sourd.

- Vous ne ferez pas taire la Vérité ! Argua théâtralement Alegsis en brandissant un doigt vengeur et acharné en direction d’un vieil homme manifestement fatigué d’éprouver les facéties d’un attardé notoire. Je sais tout !

- Eh bien si vous savez tout, dans ce cas l’affaire est réglée. Conclut fort justement un homme rendu sage par le poids des décennies et le strict bon sens. Écoutez, j'ai pour habitude de ne jamais tuer les étrangers chez moi... question d’hygiène. Alors si vous vouliez bien sortir avant que je déroge à mes principes…

Ce n’était pas tant à ce spécimen à chapeau qu’il en voulait, mais au grand benêt musculeux qui l’avait traîné jusqu’ici. Il sembla à l’Ancien qu’Ualraig était pareil à ces enfants qui, à la maison, ramenaient parfois des matous miteux en s’imaginant qu’ils pourraient le garder. Cette drôle de bête qu’il avait traîné avec lui cependant, l’aîné ne se sentit pas d’en être l’hôte très longtemps. Pas à moins qu’il n’en fut son bourreau à terme. Aussi adressa-t-il un regard noir au gaillard afin de mieux sous-entendre qu’il avait tout intérêt à jeter le chasseur de primes hors du village, sinon d’Alba.

- Viens Glaschu, asséna avec autorité l’invité douteux tandis qu’il se dirigea vers la sortie, on va aller interroger tout le monde sur cet « Inconnu » sûrement le complice et l’amant du vieux. On va le retrouver mon trésor, tu vas voir.

Avant qu’Alegs ne quitta la demeure, mais après seulement qu’il eut démesurément abusé de l’hospitalité de son hôte, ce dernier, cherchant à faire le tri au milieu de cette affaire qui lui tomba dessus, fronça les sourcils, soudain interloqué.

- Si c’est votre trésor comme vous le clamez, vous qui ne vous êtes même pas présenté,… ça veut dire que c’est vous qui l’avez amené ici. Ou alors que vous connaîtriez l’inconnu que vous tenez comme complice de sa dissimulation. Je me trompe ?

Dans l’entrée, soudain rendu immobile, le dos droit mais tourné à ce vieil homme qui n’avait pas omis d’être sagace, Alegsis daigna se tourner pour présenter un quart de profil. Son regard, pas des plus pénétrant, était cependant rivé en silence sur ce vieil homme qui avait – sans aucune difficulté – percé à jour les trous béants de son raisonnement. À supposer que l’on put qualifier la chose ainsi.
Il s’écoula plusieurs secondes, une dizaine presque, tandis que les deux hommes se regardèrent en silence, temps durant lequel le costaud les regardait successivement l’un et l’autre d’ici à ce qu’au moins un mot ne fuse. Puis, au terme de ce silence pesant qui, à lui seul, portait tout le poids d’une accusation venue tomber sur le chasseur de primes, celui-ci s’en remit finalement à un sens de la répartie rare pour ce qu’il avait de singulier.

- Et bah d’abord… entamait-il ainsi son réquisitoire, c’est celui qui le dit qu’il y est.

Puis, levant le menton, se voulant sans doute auguste alors qu’il quittait les pénates de l’Ancien, Alegsis s'émancipa des lieux avec son pinceau de combat en appui sur l’épaule. Sa réplique n’avait eu aucun sens et ne contribua que mieux, une fois énoncée, à le faire passer pour ce qu’il était.
De même que l’abysse appelait l’abîme, le vieil homme, connaissait très bien Ulraig pour l’avoir subi lui aussi, redoutait que les deux hommes se fréquentèrent trop longtemps.
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∆ feat. Alegsis ∆


Gêné par la situation, Ualraig resta pantois en regardant son rustre de compagnon s'éloigner. Se passant la main sur la nuque, il jeta un regard à l'ancien qui semblait à deux doigts de l'envoyer promener à son tour.


« Désolé m'sieur. »


Quittant la compagnie du vieil homme, le guerrier retourna auprès du chasseur de primes. Faisant racler la hampe de sa lance sur le sol, il renifla bruyamment en se portant face à l'étranger.


« C'pas bien engagé ton histoire. »


Faisant marcher ses quelques méninges disponibles, le blond aux muscles saillants essayait de chercher la personne idéale pour leur venir en aide. Si Algesis avait raison, tout le monde était dans le complot. Un complot, ici, à Crannog, c'était tout bonnement délirant. Il aurait fallu être le dernier des idiots pour se faire manipuler par une personne comme le chasseur. Manque de chance pour Ualraig, il correspondait assez bien à cette description.


« Un étranger, un trésor caché. C'louche tout ça. Y'a un truc, qui s'trame, aussi vrai qu'j'aime pas l'boulgour. Hum... Je sais ! Mais oui, la vieille mine. L'est abandonné d'puis j'devais être minot. »


Convaincu d'être sur la bonne piste, l'Alban prit la tête du duo. Excité comme il était, il marchait si vite qu'il donnait presque l'impression de courir. La mine n'étant qu'à quelques minutes du village, la rejoindre ne fut ni très long ni très compliqué. Son entrée était barrée par plusieurs planches en bois usées par le temps. Au dessus de celle-ci, un petit panneau défendait quiconque d'entrer, précisément rapidement les dangers encourus. Les poutres ayant servi pour faire tenir les galeries étant très vieilles, elles menaçaient de s'écrouler à tout instant. Grimaçant, Ualraig pesta contre sa grande taille. Un tel endroit n'était pas adapté à un homme de sa stature. Entrant tel un bossu, il ouvrit la marche avant de se rendre compte que l’obscurité était trop grande pour avancer.


« Bordel, on y voit comme à travers une pelle. T'as du feu ? »



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D’un pas décidément volontaire, son pinceau en main, Alegsis, avec un entrain démesuré, se déhanchait à chaque pas qu’il effectuait, agitant devant lui ses bras afin de mieux souligner à quel point sa démarche se voulait entraînante. Elle l’entraînerait vers les bas-fonds, cette marche-ci. Une marche qu’on saurait funèbre pour l’inconséquence avec laquelle les deux bestiaux s’étaient désormais engagés dans une tombe qui n’attendait plus qu’une termite assez vorace pour que tout s’effondra. Du duo en présence, il ne se trouva pas même une moitié d’encéphale pour les freiner dans leur course vers une mort certaine.

- Pas besoin de feu quand on est plein de bonne volonté, scanda Alegsis d’une intonation d’où l’énergie lui flamboyait dans le fond de la gueule. Cela, jusqu’à ce qu’il trébucha sur une lanterne et se rétama le menton à même le sol. Après…, se rattrapa-t-il alors qu’il s’était saisi de son embûche dans laquelle il subsista apparemment assez d’huile pour les éclairer, si t’as peur dans le noir, je veux bien me faire violence.

Alors qu’il se décida à mener la marche, il fallut au chasseur de primes peut-être accomplir un demi millier de franches enjambées avant que la lumière lui jaillit en dedans.

- On va où au fait ?

Il avait suivi le mouvement, Alegsis ; sans se poser de questions superflues telles que « pourquoi » ou « comment », celles-ci l’embarrassant plus qu’elles ne lui étaient secourables, car à ces questions-ci, il ne trouvait jamais trop de réponses à rétorquer. Il ne faisait pas les choses pour une raison cet énergumène-ci ; il les faisait parce qu’il les faisait. Son indolence, de là, confinait avec le paradoxe métaphysique.
Les galeries se multipliaient comme autant d’artères dans un corps asséché et eux, d’un pas vaillant et résolu, s’engageaient chaque fois dans la première qui leur vînt à portée de semelle. Depuis peu qu’ils s’étaient engouffrés dans les mines, ils s’étaient déjà perdus, mais aucun ne fut encore suffisamment avisé pour en prendre conscience.

Quand Alegsis, pourtant illettré au dernier degré, aperçut à l’aune du faisceau de sa lanterne une pancarte au-dessus d’un conduit apparaissant comme plus douteux et exigu que les précédents, il sut qu’il se trouva sur la bonne piste. Le doute, chez les imbéciles, jamais ne trouvait ses accès dans leur esprit.

- Regarde Glaschu ! Interpela-t-il son guide presque plié en deux dans des galeries déjà trop étroites pour son imposante carrure. Un Jolly Roger ! On est sur la bonne piste.

Ce qu’il interpréta comme un emblème pirate, à savoir une tête de mort posée sur deux os entrecroisés, visait ici à avertir d’un danger de mort imminent pour qui s’introduirait dans un accès condamné par des planches en bois qu’on avait jadis cloué à la hâte ; comme si le malheur qu'elles avaient cherché à dissimuler n'avait pas pu attendre qu'on lui bloqua l'accès.

- Quand je pense que tes copains se sont alliés à des pirates pour planquer un trésor dans leur propre mine… il adressa alors à son acolyte, de ses yeux ronds et mornes, un regard qu’on put confondre avec du mépris si l’on y regarda à deux fois. Franchement, vous avez pas beaucoup de dignité par chez vous.

Si la dignité de l’Alban moyen était possiblement discutable, leur érudition – certes lacunaire – l’était cependant moins. Car s’il n’était pas foncièrement dégourdi, ce gros bonhomme qu’Alegsis traîna si volontiers avec lui vers une tombe commune, celui-ci avait cependant le mérite de savoir lire. Notamment les avertissements et autres dangers de mort écrits à droite du « Jolly Roger » venus préciser quels malheurs attendraient ceux qui oseraient réouvrir la veine tellurique.

- Et dire que ces andouilles ont marqué l’emplacement de leur trésor aussi grossièrement, rigolait Alegsis, manifestement fier de lui alors qu’il enfonça les planches en un coup de semelle à peine, ce qu’ils sont bêtes ces pirates.

Quel exact danger de mort était-il permis de trouver dans les tréfonds de souterrains qui n’en finissaient pas ? Quel qu’il fut, deux parfaits crétins s’en iraient volontiers le chatouiller en espérant, au terme de leur vaine entreprise, y découvrir un trésor.
Ils seraient bien les seuls – s’ils réchappaient de ces conduits aux poutres voûtées et branlantes – à quitter un jour cette mine sans même un gramme d’or sur eux. Restait à découvrir jusqu’où le guide pourrait mieux éconduire leur excursion afin que le drame fut retentissant.
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戦 士

∆ feat. Alegsis ∆


« Euh.... J'suis pas sûr que... »


Dévisageant le crâne dans la pénombre, Ualraig s'attarda quelques instants sur place après que son comparse eut fini de détruire l'obstacle sur leur route. Se penchant du mieux qu'il le pouvait dans l'étroit couloir, il attrapa le fameux Jolly Roger à pleine main. Bien sûr, l'Alban savait déchiffrer les mises en garde et c'était ce qui l'inquiétait. Regardant tour à tour Alegsis, le crâne puis le chemin défendu, il resta interdit quelques instants, jusqu'à cet instant fatidique où il eut un flash.


« Mais oui ! C'bien sûr, bah ouais, c'est un piège ! Ils veulent nous faire croire qu'c'est la merde, mais non, c'des conneries. Hahahaha, bien tenté. On est trop malins pour eux p'tit gars. »


Continuant de rire de bon cœur, il tapa dans le dos de son acolyte pour le forcer à avancer. Quelques mètres plus loin à peine, le sol commençait déjà à présenter une dénivelé de plus en plus important. Descendre était difficile et sollicitait particulièrement les genoux du guerrier. Plus les deux hommes avançaient, moins la galerie semblait en bon état. Les poutres en bois qui permettaient à l'ensemble de ne pas s'effondrer semblaient sur le point de céder à tout moment. En avançant, Ualraig tomba sur un morceau de tissu d'un rouge vif qui attira son attention.


« Tiens. »


S'approchant, il jaugea l'étoffe du bout de doigt en se disant que sa mère pourrait se montrer intéressée par la chose. Au mépris du bon sens, l'homme commença à tirer sur le tissu qui était enroulé autour d'un morceau de bois rendu particulièrement fragile par les années. Rouspétant quelques secondes, il tira plus fort face à la résistance du nœud mais en vint rapidement à bout. Ayant tiré trop fort, il buta contre la paroi à sa droite. Une seconde se silence s'en suivit. Semblant durer une éternité, elle annonçait logiquement ce qui était à suivre. D'un coup d'un seul, toute la galerie se mit à trembler. Dix mètres plus loin, en amont, un rocher tomba. Sous l'effet tout à fait naturel de la gravité, et au vu de la pente particulièrement marquée de l'endroit, il commença lentement mais sûrement à foncer vers les protagonistes.


« Oh bordel... COURS !!!»


Sans grande délicatesse, l'Alban poussa Alegsis pour qu'il avance plus vite. Maladroit et paniqué, il avait le plus grand mal du monde à avancer, rendant le tout à la fois comique et pour le moins pathétique. S'agitant comme des dératés, les deux hommes étaient sur le point de se faire rattraper quand le sol se déroba sous leurs pieds. Tombant dans le vide, il se cognèrent en tombant misérablement et terminèrent leur course une quinzaine de mètres plus bas. Par un miracle difficilement explicable, la lanterne ne rendit pas l'âme. Sa petite flamme fébrile permettait aux deux aventuriers du dimanche de constater qu'ils se trouvaient à présent dans une sorte de grande cavité naturelle dans laquelle des stalactites rocheux tombaient du plafond. Un mince cours d'eau serpentait de manière erratique, brisant le silence ambiant une fois le bruit causé par les deux énergumènes terminé.


« Putain, ces connards d'pirates avaient pensé à mettre un piège en place. Rien d'cassé ? »



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La pudeur et l’élégance, entre autres vertus seyant à la bienséance, intimèrent de ne pas spécifier où et sur quoi Alegsis avait bien pu atterrir. La postérité retiendrait toutefois que, suite à cette chute que fut la leur, l’extrémité de son pinceau de combat n’aurait plus nécessairement la même odeur après qu’il fut si bien tombé. Les dents serrées le temps qu’il se frotta le postérieur avec insistance, lui aussi en avait réchappé.

- Je crois qu’on est tombé dans une forêt.

Un profane, trop peu au fait des frasques typiquement « jubtoniennes » - l’adjectif valant amplement le néologisme – aurait pu s’interroger sur les potentielles séquelles cérébrales. De séquelles cependant, il n’y en point ; pas plus que d’activité cérébrale. Au fond du trou – littéralement – le chasseur de primes, de son regard avisé quoi qu’éclairé du bout de sa robuste lanterne, avait échafaudé sa thèse sur un constat partiel. Dans cette excavation humide, là où on ne trouva plus ni poutres ni galeries qui fussent taillées par l’Homme, Alegsis n’avait pu s’empêcher de déceler les champignons qui apparurent ici. Et chacun savait, à condition d'être suffisamment ignare, que les champignons ne poussaient qu'en forêt. Aussi son hypothèse douteuse, assénée avec tant de certitude, se présenta comme le constat d'une réalité pourtant inexistante.

- C’est la preuve qu’on est sur la bonne piste.

Ça n’était la preuve de rien du tout si ce n’est l’étendue de l’errance dans laquelle ils s’étaient engagés d’un pas résolu. On put déplorer que ces deux-ci ne périrent pas dans la chute alors que leur périple s’acharnait à se poursuivre. Quand d’aucuns, plus perspicaces, se seraient sus perdus, sans doute désespérés, il ne se trouva pas un demi-neurone dans le binôme pour se mettre en branle afin de les alerter de la situation. Engouffrés dans les tréfonds d’un caveau de granit qui précéderait l’Enfer ; à moins que ce ne fut l’inverse, ils s’extasiaient en chœur de leur « découverte ».
Les immondices fongiques, assez grosses pour avoir amorti leur chute, étaient hautes de près d’un mètre pour certaines et presque aussi larges pour ce qui était du chapeau. Qu’elles apparurent si colorées et bariolées de motifs improbables ne sembla pas inquiéter ces chercheurs d'or venus se complaire jovialement dans un naufrage des plus tellurique. Par instants, sans trop qu’on sut ce qui avait bien pu les stimuler pour qu’ils se contractèrent ainsi, les champignons relâchaient quelques spores épais et duveteux.  

- Jeri-hi-hi-hi ! Ça chatouille ! S’en amusait le chasseur d’hommes – ou de trésors – alors que les émanations lui effleuraient ses larges narines.

N’importe qui d’un minimum averti, avec au moins un semblant d’instinct de survie, se serait sans doute méfié. Qu’autant d’abcès fongiques, ceux-là déjà suspects par leurs enluminures criardes et lourdement chamarrés, relâchèrent de si curieux résidus, en principe, ne devait qu’enjoindre à la méfiance. C’est néanmoins les narines grandes ouvertes qu’Alegsis renifla la fragrance pestilentiel qui lui montait au nez.

- Renifle-moi ça ! Suggéra-t-il alors à son camarade du fait que l’on n’était apparemment jamais assez nombreux à être empoisonnés dans une cave souterraine. Ça sent le trésor !

Pour y avoir lui aussi hasardé le groin, le golgoth se renfrogna. Si telle fut l’odeur d’un trésor – il n’en avait jamais senti auparavant – la fragrance, alors, se confondait avec celle de la moisissure.
Les narines peut-être irritées, à moins qu’il ne fut ému, Alegs, d’un revers de manche, persistait à s’essuyer ses narines après les avoir si bien mises à contribution. Apparemment plus erratique, on put juger, à son comportement, que les diffusions fongiques conduisaient quelques propriétés allant outre leur senteur méphitique.

- Que… il tournait alors sur lui-même, sa lanterne brandie bien haut afin de mieux tenir compte d’un panorama qu’il sembla découvrir. Mais… comment j’ai fait pour ne pas le voir avant ?…

Autour d’eux, dans cette immense cavité naturelle dont on ne put qu’espérer qu’elle fut leur tombeau, il n’y avait qu’une roche sombre et dure où rien ne scintillait. Aurait-on rempli le tout de flotte qu’on aurait juré y trouver les abysses. Mais il sembla qu’Alegsis, plus clairvoyant peut-être, à moins ses pupilles dilatées par les spores lui offrirent une perception qui fut autre, aperçut autour de lui le trésor qu’ils convoitaient.

- Regarde-moi ça, les…, il renifla en s’essuyant à nouveau disgracieusement le tarin, les murs sont en or ! Y’en a au moins pour des milliards… peut-être même pour des millions !

Impatient qu’on extracta enfin le filon – bien qu’inexistant – disposant l’anse de sa lanterne entre ses dents afin qu’il eut une main de libre, l’autre étant toujours rivée autour du manche de son pinceau de combat, Alegsis chercha à s’emparer de son acolyte. L’agrippant à un téton – on mettrait ça sur le compte des spores – il le tira ainsi jusqu’à ce qu’ils se trouvèrent face à l’une des innombrables parois, celles-ci invariablement rocailleuses, qui les tenaient captifs des fonds.

- Allez Glagla, il lui avait trouvé un surnom bien qu’il se fourvoya toujours quant à son nom, mets-les-y tes coups de poing qu’on puisse le miner notre or.

Perdus dans un souterrain, l’esprit embrumé par quelques curieux relents champignonniers, l’hallucination s’agrégea à la connerie dans un début de délire qui se voulait aussi manifeste que tragique. Cherchant à user de son compère comme d’une pioche du fait que celui-ci fut si bien doté, l’Épavien, dans ses divagations, se persuada que sa fortune fut faite.
Ne restait alors qu’à espérer que son guide fut dans de meilleures dispositions.

Autour d’eux, partout ou presque, les champignons, se contractaient avant de relâcher leurs spores.
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戦 士

∆ feat. Alegsis ∆


Pour l'Alban, le fameux trésor sentait plus la moisissure qu'autre chose. L'esprit déjà embrumé par les spores, il en vint à l'évidente conclusion qu'il ne pouvait s'agir que d'un piège destiné à les tromper, une fois de plus. Les pupilles du guerrier se dilatèrent tandis qu'il observait les stalactites. Réceptif aux paroles pourtant insensée de son compère, il lui sembla qu'ils se mirent à briller. S'ils brillaient, ils ne pouvaient qu'être faits d'or.


« Mais oui... MAIS OUI ! C'est ça !!! »


Frappant ses poings l'un contre l'autre, Ualraig, qui souriait bêtement, s'étira quelques longues secondes. Prenant de l'élan, il écrasa son poing contre la roche dans un bruit sourd. Malgré la douleur immense, il ne montra rien. Fronçant les sourcils, il recommença une fois de plus.


« Bondiou... C'dur cte connerie. »


Idiot mais persévérant, le golgoth  ne se démonta pas. Se mettant à frapper comme un sourd, il tapait à s'en briser les phalanges. Après une minute à se ruiner les mains, le guerrier vit quelques morceaux tomber. S'arrêtant net, il entendit la roche qui commençait lentement à se fissurer. Levant les yeux au ciel, il comprit que la situation était mauvaise.


« Aoh... »


Grimaçant, il prit son compagnon de fortune sous le bas et commença à courir en direction opposée. Les stalactites commencèrent à tomber dans un fracas terrible. La poussière soulevée par les débris empêchait de voir à plus de quelques mètres. Continuant à courir même après la fin de l’effondrement, Ualraig termina sa course contre un mur. Manquant de se briser le nez, il retomba en arrière et se réceptionna en partie sur le corps du pauvre Algesis.


« Bordel... Encore un piège d'merde ! Ils commencent à m'faire chier ces cons d'pirates !!! »


Se relevant tant bien que mal, le guerrier se redressa le nez de deux doigts tandis que deux larmes coulaient le long de ses joues. On pouvait dire que ça faisait mal. Observant autour de lui, il se rendit compte que l'éboulement avait permis de dévoiler l'accès à une nouvelle galerie. Marchant dans sa direction en respirant toujours plus de spores hallucinogènes, il avala sa salive en se demandant ce qui pouvait l'attendre dans cette direction. Sans même consulter son infortuné compagnon d'aventure, il se hissa dans le tunnel en se contorsionna plus encore que précédemment. Après une dizaine de minutes, les deux hommes arrivèrent dans une impasse qui prenait la forme d'une sorte d'arène ovale. Plissant les yeux pour y voir plus net, Ualraig se rendit compte qu'il distinguait des flammes au loin. En y regardant de plus près, cela ressemblait en fait à des cendres. Après un léger moment de battement, la lueur devint plus forte et plus grande. Grossissant à vue d’œil, elle prit d'abord la forme d'une silhouette humanoïde.


« Euh.... C'est quoi c'truc ?! »


En quelques secondes, un véritable montre fait de feu et de cendres et mesurant au moins dix mètres de haut fit face aux deux hommes. Ouvrant sa gueule, il hurla d'une manière étouffée et terriblement inquiétante, comme le crépitement du feu d'une forge.



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De flamme, de cendre et de souffre, improbable et bien là, consumant un air lourd et vicié par sa propre combustion, elle se trouvait devant eux, cette créature. Des yeux en avait-elle ? Un esprit sans doute ; une âme peut-être. Celle-ci, en tout cas, se consumait avec le reste.
Que l’entité fut vivante ou non – ne respirait-elle pas, après tout, un oxygène rare venu lui alimenter la flammèche ? – elle semblait en tout cas animée d’une volonté. La sienne, celle de son créateur, de l’ordre naturel ou quoi que ce fut, volonté on y trouva au milieu du crépitement. Le pire, en principe, était à craindre.

- C’est… commença péniblement Alegsis tandis qu’il tentait d’interpréter le phénomène, c’est typique des pirates ce genre de truc.

Ainsi espérait-il flouer le péquenaud en simulant l’expérience de terrain bien qu’il trouva en vérité son nez logé tout contre l’inconnu.

- Ou… ouais. Je connais.

Pas un seul ne souhaitait en démordre afin de ne pas avoir à prouver à l’autre qu’ils étaient ignares de quoi que ce fut en ce bas monde. La chose était coquasse en ce sens où, l’un comme l’autre, rivalisaient pourtant âprement dans le domaine très fermé de l’ignorance crasse.
Comme des grands, les deux, leurs pupilles élargies un peu plus à chaque minute qui venait, avancèrent ainsi vers la créature comme on allait à la mort après s’être eux-mêmes braqué un fusil dans le dos. Ils avaient, après tout, juré savoir à quoi ils avaient affaire ; dont acte. Un acte malheureux s’il en était alors que, piquée au vif, la bête, informe et brûlante, s’insinua brutalement vers eux. Devenue feu-follet, elle se dispersa en braises rougeâtres qui les fit reculer l’un et l’autre de trois pas au moins. Mais du feu ou des deux olibrius, le plus « follet » n’était pas le plus évident à déterminer. Tout feu tout flamme eux aussi, ils cherchèrent, sans trop à y réfléchir – ça n’était pas leur fort – à attaquer une créature foncièrement plasmatique. Alegsis, à grand renfort de pinceau de combat, tandis que le grand gaillard y alla à mains nues.

Les flammes eurent beau leur lécher l’épiderme à l’un comme à l’autre, ils ne déméritèrent cependant pas dans leurs efforts, quitte à être calcinés du revers même de chaque coup qu’ils administraient au beau milieu de la combustion même. Un spectateur de la scène – il n’y en eut heureusement aucun – n’eut alors été en mesure de dire si leurs efforts acharnés et combinés, à persister ainsi dans la débandade, tenaient du courage ou de la plus stricte arriération mentale.

En dépit de tant de blessures et d’un tel acharnement perpétré puis réitéré dans le néant, ils ne cédaient en rien à cet adversaire dont ils ignoraient jusqu’à l'origine même. Les brûlures, partout sur leur peau, avait rougi sinon noirci leur chair.
Situés en retrait après un énième assaut infructueux, en nage et le souffle court, Alegsis ne désespéra pas.

- Fais comme moi ! Exigea-t-il et ce, bien que son conseil ne pouvait être du moindre secours à qui que ce soit ; bien au contraire. Utilise la force de ta volonté pour te guérir.

Alors, il se cramponna solidement à son pinceau de combat, fermant les yeux et serrant les dents si fort qu’il devint presque aussi rouge que ses brûlures comptant parmi les moins superficielles. Et, à force d’efforts intenses, car de volonté il est était quasiment fait, chacune de ses blessures disparut de sa peau. Son camarade, un brin surpris – et pourtant pas tellement – l’imita dans l’absurdie au point d’accomplir à son tour le même miracle.
Sans qu’Alegsis ne justifia rationnellement comment telle prouesse fut loisible en pareil instant, celui-ci, pareillement à si de rien de spectaculaire ne s’était passé, poursuivit la liste de ses recommandations.

- Écoute-moi… faut que tu l’occupes une minute. C’est un gardien de trésor que les pirates ont posté là. Sûrement avec des Pyro Dials ou je sais pas quoi.

Et, le temps que le guerrier alban s’en alla littéralement au feu, Alegsis trouva, au fond de cette impasse, un coffre qui fut placé là si idéalement que son prospecteur s’étonna de ne pas l’avoir aperçu plus tôt. Sans même une serrure pour le retarder dans son exhumation du trésor qui s'y trouva, de ce coffret, les yeux brillants, il en extrayait deux fruits bariolés et curieux. L’aubaine que celle-ci.

Bon camarade, il jeta aussitôt l'une de ses trouvailles entre les mains du costaud, soudain éberlué par ce qu’on lui fit parvenir.

- C’est un fruit du démon ! Mange-le, c’est notre seule chance de le vaincre !

Ils n’hésitèrent pas – car le doute, jamais, n’était le propre du crétin – et gobèrent chacun leur nouvelle acquisition. Bien des maudits, bombance accomplie, peinaient parfois à ce que leur pouvoir leur jaillisse sans qu’ils ne découvrirent à tâtons le moyen idoine de l’activer. Pas Alegsis Jubtion toutefois qui, dans un déclic immédiat, prit la forme de l’eau. Un Logia, sans doute.

- Oh bah ça tombe bien, c’était peu dire, considère-toi comme vaincue, non attend c’est un gros mot, considère-toi comme vingt fesses, vile créature infernale démoniaque et pas sympa, Brush Crush : Marée Haute !

En tsunami des grands fonds – souterrains ceux-ci – il ensevelit alors la caverne de ses eaux, ne laissant derrière lui qu’une bien ténébreuse victoire. Des cendres ainsi rendues humides et inertes, il  en irradiait cependant un faisceau devenu lumineux comme un éclair, laissant naître de là où il n’y avait plus que la gadoue, une créature faite de glaise jusqu’à ce que celle-ci prit forme humaine. Une forme incongrue cependant, où un visage d’homme terne se greffa sur une silhouette de femme avenante. Les sous-sols d’Alba, décidément, étaient gorgés de surprises alors qu’Alegs détermina sans peine à qui il eut affaire.

- Mais… c’est Adam Freeman sur le corps de l’Impératrice Kiyori ! Si je m’attendais.

Et pourtant, de surprise, il n’en éprouva pas tellement, bandant les muscles et bombant le torse aussitôt, inlassablement lancé dans cet affrontement au sommet.

- Pas de chance pour toi mon gars, et « ma fille » du coup vu qu’il y a du Kiyori dedans, mais j’ai mangé le Fruit du Pouvoir qui me permet d’avoir…. TOUS LES POUVOIRS !!! Jeri-hi-hi-hi-hi-hi-hi-hi-hi, s’interrompant subitement dans son rire de dément, rendu ivre de ses soudains excès de puissance, il demanda le plus calmement du monde à son binôme, Et toi, t’as mangé le fruit du quoi ?

Tourné vers ce partenaire de fortune, tout deux perdus dans une aventure palpitante et inattendue, celui-ci lui asséna avec assurance et dignité :

- Red, Red, Red Red Red, Red, Red.

- Mais oui, s’exclama Alegsis bien heureux pour le compte de son associé, le Zoan du Red ! Qui te permet de parler et d’agir comme Red.

- Reeeeeeeeeed.

L’un à côté de l’autre, face à l’ennemi suprême ; le pinacle de la force de deux mondes coalisés en un, ils s’unissaient pour le combat non pas d’un siècle ni d’un millénaire, mais un affrontement qui déterminerait l'histoire du monde à jamais. De concert, tout deux bondirent à l’assaut. Plus jamais l’Histoire des Hommes ne connaîtrait d’événement plus conséquent à relater dans ses chroniques. Cela, alors, s’était passé dans les improbables et tortueux sous-sols d’Alba.

***

- Ouais… bah l’ancien a visé juste, ils sont bien rentrés dans les galeries condamnées. Ces idiots, je te jure.

- De toute façon, les traces qu’on a remontées étaient trop fraîches pour pas être suspectes.

À l’accoutrement, un esprit sagace fut en mesure de discerner que les deux hommes, à n’en point douter, étaient de ce même clan qui avait vu naître et grandir Ualraig. Après qu’il eut plus tôt visité le doyen du village avec ses idées de chasse au trésor, ce dernier s’inquiéta légitimement au point de lui envoyer deux hommes aux trousses afin de s’assurer qu’il ne s’égara pas. Ceux-là, leur camarade, ils le trouvèrent ainsi en compagnie de ce vilain chasseur de primes dont l’ancien les avait entretenus. Les deux, allongés au milieu des champignons, divaguaient la bave aux lèvres et les pupilles divergentes.

- On le perd des yeux cinq minutes et voilà qu’on le retrouve le nez dans des spores hallucinogènes. J’aimerais te dire que ça m’étonne de lui. Franchement… j’aimerais.

Il fallait dire que le golgoth avait eu Alegsis comme mauvais génie pour l’éconduire plus que de raison. Le sauvetage, considérant la nature de leur collaboration, fut en effet d’un impératif rare.

- Prends ça dans la tronche….. Fu… Fulguro Zgeg ...!

- Mais à quoi il rêve donc celui-ci ? Commenta écœuré l’un des deux héros ayant poussé le vice jusqu’à descendre en rappel pour s’en aller cueillir du débile au centre de la terre.

- J’en sais trop rien et, franchement, je serai bien heureux de mourir ignorant de certaines choses. Ramène Ualraig au village et celui-ci… balance-le moi tel quel dans le premier cargo en partance pour où que ce soit. Je crois qu’on a assez d’un abruti à la casbah.

Ce ne serait alors pas la première fois qu’Alegsis se réveillerait sur un bateau sans trop savoir par quel miracle il y avait atterri. Il provoquait ce sentiment chez ses hôtes, le bon monsieur Jubtion : celui de le foutre dehors dès que l’occasion se présenta à eux.

- Ah, dégueu… ! Se plaignit déjà le sauveteur à peine eut-il disposé le chasseur de primes sur son dos. Il s’est pissé dessus, regarde-moi ça. Une vraie marée haute.

Peut-être le Logia de l’eau, à certains égards, avait eu une part de vrai à faire valoir au milieu des fantasmes hallucinés.
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