De flamme, de cendre et de souffre, improbable et bien là, consumant un air lourd et vicié par sa propre combustion, elle se trouvait devant eux, cette créature. Des yeux en avait-elle ? Un esprit sans doute ; une âme peut-être. Celle-ci, en tout cas, se consumait avec le reste.
Que l’entité fut vivante ou non – ne respirait-elle pas, après tout, un oxygène rare venu lui alimenter la flammèche ? – elle semblait en tout cas animée d’une volonté. La sienne, celle de son créateur, de l’ordre naturel ou quoi que ce fut, volonté on y trouva au milieu du crépitement. Le pire, en principe, était à craindre.
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C’est… commença péniblement Alegsis tandis qu’il tentait d’interpréter le phénomène,
c’est typique des pirates ce genre de truc.Ainsi espérait-il flouer le péquenaud en simulant l’expérience de terrain bien qu’il trouva en vérité son nez logé tout contre l’inconnu.
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Ou… ouais. Je connais.Pas un seul ne souhaitait en démordre afin de ne pas avoir à prouver à l’autre qu’ils étaient ignares de quoi que ce fut en ce bas monde. La chose était coquasse en ce sens où, l’un comme l’autre, rivalisaient pourtant âprement dans le domaine très fermé de l’ignorance crasse.
Comme des grands, les deux, leurs pupilles élargies un peu plus à chaque minute qui venait, avancèrent ainsi vers la créature comme on allait à la mort après s’être eux-mêmes braqué un fusil dans le dos. Ils avaient, après tout, juré savoir à quoi ils avaient affaire ; dont acte. Un acte malheureux s’il en était alors que, piquée au vif, la bête, informe et brûlante, s’insinua brutalement vers eux. Devenue feu-follet, elle se dispersa en braises rougeâtres qui les fit reculer l’un et l’autre de trois pas au moins. Mais du feu ou des deux olibrius, le plus « follet » n’était pas le plus évident à déterminer. Tout feu tout flamme eux aussi, ils cherchèrent, sans trop à y réfléchir – ça n’était pas leur fort – à attaquer une créature foncièrement plasmatique. Alegsis, à grand renfort de pinceau de combat, tandis que le grand gaillard y alla à mains nues.
Les flammes eurent beau leur lécher l’épiderme à l’un comme à l’autre, ils ne déméritèrent cependant pas dans leurs efforts, quitte à être calcinés du revers même de chaque coup qu’ils administraient au beau milieu de la combustion même. Un spectateur de la scène – il n’y en eut heureusement aucun – n’eut alors été en mesure de dire si leurs efforts acharnés et combinés, à persister ainsi dans la débandade, tenaient du courage ou de la plus stricte arriération mentale.
En dépit de tant de blessures et d’un tel acharnement perpétré puis réitéré dans le néant, ils ne cédaient en rien à cet adversaire dont ils ignoraient jusqu’à l'origine même. Les brûlures, partout sur leur peau, avait rougi sinon noirci leur chair.
Situés en retrait après un énième assaut infructueux, en nage et le souffle court, Alegsis ne désespéra pas.
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Fais comme moi ! Exigea-t-il et ce, bien que son conseil ne pouvait être du moindre secours à qui que ce soit ; bien au contraire.
Utilise la force de ta volonté pour te guérir.Alors, il se cramponna solidement à son pinceau de combat, fermant les yeux et serrant les dents si fort qu’il devint presque aussi rouge que ses brûlures comptant parmi les moins superficielles. Et, à force d’efforts intenses, car de volonté il est était quasiment fait, chacune de ses blessures disparut de sa peau. Son camarade, un brin surpris – et pourtant pas tellement – l’imita dans l’absurdie au point d’accomplir à son tour le même miracle.
Sans qu’Alegsis ne justifia rationnellement comment telle prouesse fut loisible en pareil instant, celui-ci, pareillement à si de rien de spectaculaire ne s’était passé, poursuivit la liste de ses recommandations.
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Écoute-moi… faut que tu l’occupes une minute. C’est un gardien de trésor que les pirates ont posté là. Sûrement avec des Pyro Dials ou je sais pas quoi.Et, le temps que le guerrier alban s’en alla littéralement au feu, Alegsis trouva, au fond de cette impasse, un coffre qui fut placé là si idéalement que son prospecteur s’étonna de ne pas l’avoir aperçu plus tôt. Sans même une serrure pour le retarder dans son exhumation du trésor qui s'y trouva, de ce coffret, les yeux brillants, il en extrayait deux fruits bariolés et curieux. L’aubaine que celle-ci.
Bon camarade, il jeta aussitôt l'une de ses trouvailles entre les mains du costaud, soudain éberlué par ce qu’on lui fit parvenir.
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C’est un fruit du démon ! Mange-le, c’est notre seule chance de le vaincre !Ils n’hésitèrent pas – car le doute, jamais, n’était le propre du crétin – et gobèrent chacun leur nouvelle acquisition. Bien des maudits, bombance accomplie, peinaient parfois à ce que leur pouvoir leur jaillisse sans qu’ils ne découvrirent à tâtons le moyen idoine de l’activer. Pas Alegsis Jubtion toutefois qui, dans un déclic immédiat, prit la forme de l’eau. Un Logia, sans doute.
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Oh bah ça tombe bien, c’était peu dire,
considère-toi comme vaincue, non attend c’est un gros mot, considère-toi comme vingt fesses, vile créature infernale démoniaque et pas sympa, Brush Crush : Marée Haute !En tsunami des grands fonds – souterrains ceux-ci – il ensevelit alors la caverne de ses eaux, ne laissant derrière lui qu’une bien ténébreuse victoire. Des cendres ainsi rendues humides et inertes, il en irradiait cependant un faisceau devenu lumineux comme un éclair, laissant naître de là où il n’y avait plus que la gadoue, une créature faite de glaise jusqu’à ce que celle-ci prit forme humaine. Une forme incongrue cependant, où un visage d’homme terne se greffa sur une silhouette de femme avenante. Les sous-sols d’Alba, décidément, étaient gorgés de surprises alors qu’Alegs détermina sans peine à qui il eut affaire.
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Mais… c’est Adam Freeman sur le corps de l’Impératrice Kiyori ! Si je m’attendais.Et pourtant, de surprise, il n’en éprouva pas tellement, bandant les muscles et bombant le torse aussitôt, inlassablement lancé dans cet affrontement au sommet.
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Pas de chance pour toi mon gars, et « ma fille » du coup vu qu’il y a du Kiyori dedans, mais j’ai mangé le Fruit du Pouvoir qui me permet d’avoir…. TOUS LES POUVOIRS !!! Jeri-hi-hi-hi-hi-hi-hi-hi-hi, s’interrompant subitement dans son rire de dément, rendu ivre de ses soudains excès de puissance, il demanda le plus calmement du monde à son binôme,
Et toi, t’as mangé le fruit du quoi ?Tourné vers ce partenaire de fortune, tout deux perdus dans une aventure palpitante et inattendue, celui-ci lui asséna avec assurance et dignité :
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Red, Red, Red Red Red, Red, Red.-
Mais oui, s’exclama Alegsis bien heureux pour le compte de son associé,
le Zoan du Red ! Qui te permet de parler et d’agir comme Red.-
Reeeeeeeeeed.L’un à côté de l’autre, face à l’ennemi suprême ; le pinacle de la force de deux mondes coalisés en un, ils s’unissaient pour le combat non pas d’un siècle ni d’un millénaire, mais un affrontement qui déterminerait l'histoire du monde à jamais. De concert, tout deux bondirent à l’assaut. Plus jamais l’Histoire des Hommes ne connaîtrait d’événement plus conséquent à relater dans ses chroniques. Cela, alors, s’était passé dans les improbables et tortueux sous-sols d’Alba.
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Ouais… bah l’ancien a visé juste, ils sont bien rentrés dans les galeries condamnées. Ces idiots, je te jure.-
De toute façon, les traces qu’on a remontées étaient trop fraîches pour pas être suspectes.À l’accoutrement, un esprit sagace fut en mesure de discerner que les deux hommes, à n’en point douter, étaient de ce même clan qui avait vu naître et grandir Ualraig. Après qu’il eut plus tôt visité le doyen du village avec ses idées de chasse au trésor, ce dernier s’inquiéta légitimement au point de lui envoyer deux hommes aux trousses afin de s’assurer qu’il ne s’égara pas. Ceux-là, leur camarade, ils le trouvèrent ainsi en compagnie de ce vilain chasseur de primes dont l’ancien les avait entretenus. Les deux, allongés au milieu des champignons, divaguaient la bave aux lèvres et les pupilles divergentes.
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On le perd des yeux cinq minutes et voilà qu’on le retrouve le nez dans des spores hallucinogènes. J’aimerais te dire que ça m’étonne de lui. Franchement… j’aimerais.Il fallait dire que le golgoth avait eu Alegsis comme mauvais génie pour l’éconduire plus que de raison. Le sauvetage, considérant la nature de leur collaboration, fut en effet d’un impératif rare.
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Prends ça dans la tronche….. Fu… Fulguro Zgeg ...!-
Mais à quoi il rêve donc celui-ci ? Commenta écœuré l’un des deux héros ayant poussé le vice jusqu’à descendre en rappel pour s’en aller cueillir du débile au centre de la terre.
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J’en sais trop rien et, franchement, je serai bien heureux de mourir ignorant de certaines choses. Ramène Ualraig au village et celui-ci… balance-le moi tel quel dans le premier cargo en partance pour où que ce soit. Je crois qu’on a assez d’un abruti à la casbah.Ce ne serait alors pas la première fois qu’Alegsis se réveillerait sur un bateau sans trop savoir par quel miracle il y avait atterri. Il provoquait ce sentiment chez ses hôtes, le bon monsieur Jubtion : celui de le foutre dehors dès que l’occasion se présenta à eux.
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Ah, dégueu… ! Se plaignit déjà le sauveteur à peine eut-il disposé le chasseur de primes sur son dos.
Il s’est pissé dessus, regarde-moi ça. Une vraie marée haute.Peut-être le Logia de l’eau, à certains égards, avait eu une part de vrai à faire valoir au milieu des fantasmes hallucinés.