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Un lien plus fort que celui du sang

Un lien plus fort que celui du sang
Le temps fila à vive allure sur l'île de Parisse. De nombreuses années s'écoulèrent durant lesquelles la jeune Lulutsu alors qu'une simple fillette lors de sa rencontre avec la Sœur de Lune était devenue à ce jour une adolescente pleine de vie. Aussi belle qu'une violette des bois, la jeune fille s'épanouit grandement aux côtés de l'ange aux cheveux blancs ainsi que dans cette nouvelle famille que formait l'Ordre qu'elle avait rejoint.

Les journées de la jeune Geim ne furent pas toujours de tout repos durant cette période d'intégration. Bien plus vieille que la plupart des nouvelle fidèle qu'accueillait l'institution, il fallut à la douce enfant faire preuve de ténacité pour apprendre à la lettre tous leurs préceptes. La seule condition imposée à cette dernière afin de pouvoir rester auprès de la femme qui l'avait sauvé et pour qui elle ressentait un profond respect. Mais pas seulement.

En réalité, un lien puissant s'est tissé entre l'adolescente et l'albinos. Un amour interdit qui elles le savaient toutes deux pourrait mettre leur vie en grand danger si cela se savait. En grandissant à ses côtés, Lulutsu vit des sentiments puissants naître en son for intérieur. Ceux d'une fille à sa mère. Car oui la petite Lune voyait en la Faucheuse de Parisse la mère qu'elle n'avait jamais eue en raison d'un décès prématuré de sa génitrice alors que l'adolescente n'avait qu'un an à peine.

Privée de cet amour maternel dont elle n'avait pas le moindre souvenir la jeune fille de quatorze ans ne rétreignit pas cet attachement que certains qualifierait de malsain quand on savait le sort qu'avait subit son père des propres mains de la Danse-lame. Mais ce que beaucoup ignoré encore à ce jour, c'était que cet homme qui se disait être son père lui faisait subir des sévices indigne d'une personne se disant l'aimer. Un mal dont Chang'e la tira pour lui offrir une vie pleine de gratitude.

Aujourd'hui bien que son géniteur pouvait parfois lui rendre visite dans ses cauchemars. La poussant à se réveiller en sursaut avec son frêle corps ruisselant de sueur tandis que de ses lèvres un hurlement plaintif résonnait dans le dortoir où elle avait élu domicile. Tout se passait pour le mieux pour la jeune fille. Les temps sombres que Lulu avait malheureusement vécus étaient dorénavant loin derrière elle.

Et c'est durant une belle journée ensoleillée de printemps qu'on la retrouvait en compagnie de ses " sœurs ". En plein entraînement au maniement du sabre dans les somptueux jardins de l'abbaye, l'adolescente démontrait un véritable dont pour les arts du combat des Sœurs de Lune. Sous la supervision de l'une de leur ainée, la douce enfant se déplaçait avec une grâce toute naturelle telle une danseuse étoile.

Sous les regards de ses camarades en admiration, la Jouvencelle se laissa totalement aller à cet art. Les yeux totalement clos, celle-ci ne remarqua même pas que plus personne autour d'elle ne bougeait. Mais qu'à la place, ces dernières suivaient le moindre de ses mouvements avec la plus grande attention. Quand enfin accompagnant son dernier mouvement, des applaudissement retentirent entre les murs du cloître.

- " C'était magnifique ! " S'exclama soudainement la voix fluette d'une de ses camarades au moment où la jeune Geim ouvrit de nouveau les yeux pour assister aux acclamations des sœurs qui l'entouraient. " Tu voudras bien m'apprendre s'il te plait ?! "

Rapidement suivant son exemple, d'autres jeunes élèves se joignirent à elle pour lui demander de leur enseigner la prouesse qu'elle venait de faire. Car oui, il s'agissait en effet de cela. Car ce que ne savait pas encore l'adolescente, c'était qu'elle avait réussi à entrouvrir les portes d'un art ancestrale connu seulement des plus prestigieuses membres de l'Ordre.

Un style de combat qui leur était propre faisant appel à chaque parcelle de leur féminité combinait à une élégante danse. Le Méiyǒu yuèliàng plus communément appelé le Pas de Lune. Un art que peu d'élues avait réussi à dompter.  

- " Euh... " En fut surprise la jeune fille qui ne réalisait pas encore l'étendu de ce qui venait de se passer.

- " Mesdemoiselles ! " Intervint brusquement leur instructrice en charge de leur entraînement en frappant à plusieurs reprises dans ses mains pour rappeler le silence. " Veuillez vous concentrez je vous prie et retrouver votre calme. Sinon je me verrai dans l'obligation de vous envoyer en corvée de latrines pour le mois à venir. "

Suite à cet avertissement, les apprenties guerrières retrouvèrent rapidement leur place avant de rester droite comme des piquets en attendant les prochaines instructions de leur professeur. Ravie de voir le calme revenir parmi les rangs, l'enseignante leur donna le signe de se disperser en frappant une dernière fois dans ses mains pour leur signaler que le cours prenait fin.

Aussitôt, les disciples sautèrent sur l'occasion d'interroger Lulutsu qui ne savait plus où se mettre. Par chance, quelqu'un qui avait assisté à son exploit dans l'ombre vola à son secours.

- " Dites les filles. " S'exprima d'une fois douce la Danse-lame qui apparut dans le dos de sa fille avant de poser délicatement ses mains sur ses épaules tout en survolant les demoiselles qui lui faisaient face de ses yeux écarlates. " Et si vous alliez embêter Sœur Thirona en cuisine plutôt ? Mon petit doigt me dit qu'elle vous a préparez de délicieuses pâtisseries pour le goûter. "  

À ces mots, les Jouvencelles ne pouvant résister à l'appel de douces sucreries s'éclipsèrent en un éclair dans les rires, laissant seules la mère et la fille au milieu du parc.

- " Je suis fière de toi ma chérie " Lui susurra tendrement l'albinos qui contourna son enfant pour lui faire face sans la lâcher.

- " Mais... " Souffla l'adolescente en penchant la tête sur le côté tout en affichant un air d'incompréhension sur son visage juvénile. " Je n'ai rien fait de spécial, ma.... " S'interrompit-elle soudainement en voyant l'erreur qu'elle faillit faire avant de se reprendre. " Sœur Chang'e. J'ai tout simplement suivit les consignes durant cet exercice que Sœur Máni nous a demandé d'exécuter. " Stipula l'adolescente en haussant les épaules sans comprendre ce qu'il y avait d'exceptionnel là-dedans.

Face à cet aveu, la réaction de sa mère la déconcerta davantage. Riant amusée par la situation, la Parissienne la regarda avec une fierté non dissimulée avant de lui faire signe de la suivre.
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Un lien plus fort que celui du sang
Deux bonnes heures plus tard, c'était en dehors de l'abbaye que l'on retrouvait la délicieuse enfant. Seule la tête farcie de questions au milieu d'une petite clairière fleurie parmi lesquelles elle s'était assise, l'adolescente ne cessait de ressasser les dernières paroles de sa mère. Une prodige, voilà de quoi l'avait qualifié la Danse-lame en rapport à sa performance durant l'exercice au maniement du sabre. Un titre suivit d'éloge dont se sentait indigne la jeune fille qui ne comprenait pas en quoi cela fut en soit si extraordinaire.

Certes la petite lune avait réussi à faire corps avec sa lame tout en effectuant des pas de danse. Seulement pour cette dernière ne se rendant pas compte du plein potentiel qu'elle venait d'éveiller en elle était tout ce qu'il y a de plus normal. Il faut dire que Lulutsu avait à de nombreuses reprises observé sa tutrice effectuée cette danse martial. Un moment de ravissement pour la Jouvencelle qui à chaque fois qu'elle la voyait se mouvoir avec une telle harmonie sentait son cœur battre d'admiration.

Un pur instant de voluptés durant lequel l'albinos semblait rentrer en transe aux yeux ébahis de l'adolescente qui ne perdit pas une occasion pour analyser le moindre de ses gestes. Que cela soit du placement de ses orteils, de la façon d'animer ses doigts ou encore de la rotation de son bassin, la novice assimila le moindre de ses déplacements pour les faire siens.

- " Tu es bien plus douée que moi à ton âge. Si tu continues sur cette voie, je t'imagine sans mal me surpasser et devenir la plus grande Sœur de Lune que l'Ordre n'est jamais compté. " Répéta la jeune fille mot pour mot qui se remémora les propos de l'ange aux cheveux blancs. " Comment lui dire que ce n'est pas ce que je souhaite... ? " Se questionna-t-elle tout en poussant un lourd soupir de tristesse au moment d'enlacer ses genoux contre sa poitrine. " Tant que je peux rester avec elle, c'est tout ce qui m'importe... "

Déboussolée, l'adolescente enfouit son doux visage de poupée contre ses jambes alors que son cœur se briser en repensant à ce que Chang'e lui annonça par la suite. Des paroles qui marquèrent profondément la petite lune dans son être. La nouvelle de son départ prochain pour le Cipher Pol marquant ainsi la séparation avec sa mère. Une triste réalité que Lulutsu n'arrivait pas à accepter. Voir ainsi la seule personne qu'elle aimait quitter Parisse en la laissant toute seule était insupportable. Pire encore, la disciple de la lune se sentait soudainement abandonné.

À cette simple pensée, des larmes se mirent à couler le long de ses joues tandis que ses épaules furent rapidement prises de soubresaut à cause des sanglots qui les accompagnèrent. Un tabou que la jeune Geim transgressa en se laissant aller à son chagrin qu'elle ne put retenir plus longtemps malgré tout ce qu'elle avait appris. Cependant, cela n'avait pas la moindre importance tout comme se faire surprendre à cet instant. Car pour l'heure, la petite demoiselle ne se sentait pas la force de se retenir.

Soudain, alors qu'elle se pensait à l'abri d'une quelconque perturbation, la novice sursauta légèrement lorsqu'elle sentit une présence derrière elle. Pour autant, nulle peur n'enserra son cœur quand des bras la couvèrent avant de l'étreindre d'une immense tendresse. Les battements de son palpitant s'apaisèrent légèrement au moment où la douce enfant se laissa aller contre cette personne qui n'était autre que sa mère qui la cajola avec le plus grand amour.

Sans dire un mot, mère et fille profitèrent de cet instant magique durant lequel les pleurs de l'adolescente cessèrent pour laisser place à une expression de bonheur. Ces doux moments si rares étaient les seuls pendant lesquels cette dernière pouvait sentir la chaleur de la Faucheuse de Parisse qui partageait tout comme elle la même peine.

- " Reste... " Souffla péniblement la petite lune qui sentit les larmes lui piquer à nouveau les yeux à la prononciation de ce seul mot. " Ne m'abandonne pas... "
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Un lien plus fort que celui du sang
Toujours murée dans le silence, la Sœur de Lune aurait pourtant tant souhaité pouvoir lui répondre favorablement. Malheureusement, une chose pareille n'était pas possible. Sa mobilisation au sein du Gouvernement Mondial avait enfin sonné et même si Chang'e aurait préféré rester auprès de son rayon de lune, cette dernière n'avait pas le droit au chapitre. La seule chose qu'elle pouvait faire, c'était obéir aux ordres bien que ceux-ci lui coûtaient énormément.

Bien sûr, l'albinos avait bien évidemment songée à s'enfuir en emportant cet être si cher à son cœur avec elle. Seulement pour aller où ? Une question à laquelle la Danse-lame n'avait pu trouver la moindre réponse qui ne comportait aucun risque pour son astre lunaire. Malencontreusement, les moyens que possédait l'Ordre étaient démesurément grands et ne laissait que peu de manœuvre pour réussir à leur échapper.

Parmi quelques-unes de ses " sœurs " à s'y être tentée certaines y parvinrent. Ce qui témoignait d'une faible lueur d'espoir d'y arriver. Néanmoins dans cette équation, la Danse-lame se devait d'y inclure le fait qu'il y avait avec elle une enfant qui malgré ses aptitudes hors nome pour une jeune fille de son âge ne ferait pas le poids si elles venaient à se faire rattraper. Un risque que l'albinos ne pouvait prendre si elle ne souhaitait pas voir sa fille succomber des coups de ces guerrières.

- " Cela est impossible mon Lapin lunaire et tu le sais... " Lui répondit-elle à contrecœur tandis qu'elle l'étreignit davantage contre sa poitrine avant de déposer un doux baiser dans sa chevelure violette. " L'Ordre refuserait que je t'emmène avec moi. Et si je le faisais malgré tout sans leur consentement, tu courrais un grand danger que je ne peux me permettre de te faire courir... Je m'y refuse catégoriquement. "

- " Ça m'est égale ! " S'exclama l'adolescente qui serra les avant-bras de sa mère de ses fines mains tout en posant sa tête contre ceux-ci. " Ensemble on parviendrait à leur échapper ! "

- " Non. " Fut la seule chose que répondit la Danse-lame qui savait pertinemment que cette idée n'aurait aucune chance d'aboutir.

- " Comment peux-tu le savoir si on n'essaie même pas ?! " Lui demanda la jeune fille la voix enrouée par le chagrin avant de renifler discrètement. " Tu as dit toi-même qu'un jour je deviendrai la plus puissante de l'Ordre. Bien plus forte que toi. Alors... "

- " Tu te ferais tuer. " Déclara sans appel la demoiselle au moment de lui couper la parole afin de lui faire entendre raison. " Elles enverraient des assassins bien plus expérimentés que tu ne l'es pour le moment. Et... " Soupira d'impuissance la mère de famille pourtant si fière qui se maudissait d'avance pour ce qu'elle allait dire. " Je ne pourrai pas te protéger même en y mettant toutes mes forces. "

Le silence revint dans la clairière où seuls les piaillements des oiseaux et le bruissement des feuilles prises dans la brise du vent se firent entendre. Un instant de calme pendant lequel chacune des deux femmes resta immobile en souffrant à l'unisson à cause de ce verdict. Le destin se montrait particulièrement cruel envers la mère qui ne savait comment réconforter son rayon de lune dont le cœur saignait de désespoir.

- " Promets-moi de ne pas m'oublier... " S'exprima avec douleur Lulutsu qui brisa enfin le silence avant que les pleurs n'emportent ces dernières paroles vers le lointain.

Surprise par les propos de sa petite lune, Chang'e resta un instant les lèvres légèrement entrouvertes. L'oublier ? Une option que l'ange aux cheveux blancs n'avait pas envisagée un seul instant. Desserrant son étreinte, la Parissienne attrapa délicatement sa fille par les épaules pour la forcer à lui faire face. Les yeux écarlates plantés dans ses deux améthystes, le chagrin pouvait se lire sur son visage d'albâtre. Une expression que Lulutsu vit pour la première fois depuis que cette femme l'avait adopté.

- " Écoute-moi bien ma chérie. " Souffla avec amour la demoiselle au moment de poser tendrement une main sur sa joue tout en penchant la tête sur le côté. " Jamais tu m'entends. Jamais je ne pourrais t'oublier. Tu es et resteras pour toujours ma fille. " Lui stipula-t-elle avec sincérité et d'une voix si chaleureuse que le visage de la Jouvencelle s'empourpra tandis que ses pupilles étincelaient de milliers d'étoiles. " Tu es la personne que j'aime le plus au monde et il ne passe pas une seule seconde où je ne réalise pas la chance de t'avoir entendu m'appeler maman. Ce fut le plus beau jour de toute ma vie et je chéris chaque instant où tu me fais ressentir que je suis ta mère avec le même amour que le premier jour. "

Affectueusement, la Sœur de Lune colla son front contre le sien tout en plaçant sa deuxième main sur son doux visage. Durant ce qui sembla durer une éternité, les deux jeunes femmes restèrent ainsi à profiter de l'instant présent. Un tendre moment complice qu'aucune des deux ne voulut rompre. Car l'une contre l'autre savait qu'il s'agissait peut-être là de leur dernière fois avant leurs futures retrouvailles.

- " Un beau jour, nous nous retrouverons pour ne plus jamais se quitter. " Reprit d'un timbre mélancolique la mère de famille qui enserra le frêle corps de son enfant dans ses bras pour une douce étreinte. " D'ici là, peu importe où je me trouverais. Je ne cesserai jamais de t'aimer mon rayon de lune. "

- " Moi aussi maman... " S'exprima avec difficulté l'adolescente qui passa ses bras dans le dos de sa mère comme s'il s'agissait de la dernière fois qu'elle lui faisait un câlin. " Je t'aime plus que tout. "

Les semaines qui suivirent, mère et fille s'échappèrent aussi souvent qu'elles le pouvaient du couvent afin de passer autant de temps que possible ensemble. Des instants merveilleux que les demoiselles imprimèrent dans leur esprit à tout jamais et dans lesquels ces dernières se replongeraient quand le manque de la présence de l'autre se ferait trop ressentir.

Puis vint ce triste jour où Chang'e quitta enfin Parisse sans jamais y revenir. Laissant livré à elle-même la petite lune qui ne vit pas un jour passer sans penser à sa mère et au jour où elle la retrouverait enfin.
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