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Les funérailles d'Alexandre Dubal et Laurie Nelseen

Sous un soleil digne du doux climat de South Blue, une femme vêtu de noir vient de sortir de l'hôtel du quais. Elle porte une ombrelle et un voile aux couleurs sombres dissimulant son apparence. Son pas est lent et son regard erre au fil des diverses distractions sur son passage. Un mendiant tend le bras, elle lui donne quelques pièces. Des enfants jouent devant elle, cette mystérieuse bourgeoise sourit avant de les laisser passer. Des pochtrons sont virés violemment du bar, la blonde aux bottines de satins les esquive de justesse avant de les enjamber naturellement. Traversant la grande place de l'obélisque, elle s'arrête un instant pour contempler le monument, puis reprend son chemin. On ne douterait pas qu'elle vient d'ailleurs, tellement elle semble connaître les coutumes et la ville dans laquelle son chemin la mène. Saluant d'une révérence les marins locaux, la jeune femme continue son périple dans la seconde enceinte de la Capitale uréanne, celle des notables et des bourgeois. Repérant les devantures des divers commerces, la blonde s'arrête en souriant devant une grande bijouterie. Un homme, à peine plus âgé, la chevelure mi-longue bien coiffée, vêtu d'un costume de noble noire, était en train de piloter des subalternes pour installer une pancarte quand il la repère en train de fixer la devanture.

“Je m'excuse Madame, nous sommes exceptionnellement fermés aujourd'hui. Nous rouvrons demain pour satisfaire la moindre commande.
-Quelle dommage, on m'en a dit beaucoup de bien. À qui ai-je l'honneur ?

Il s'incline poliment avec un sourire. En ce jour, ce monsieur semble d'humeur maussade retenant toute extravagance caractéristique de la culture uréanne.

“Bastien Dubal, je gère cette boutique avec mon père. Pour être honnête, notre famille est en proie à un drame récent. La totalité du personnel se prépare à assister à un enterrement. Ainsi, nous avons pris la décision de fermer.
-Navrée de l'entendre. Il faut croire que ces temps sont bien sombres, car, moi aussi, je viens ici assister à un enterrement. Peut-être pourriez-vous me renseigner sur la position du Cimetière des Patriotes, monsieur Dubal.
-Oh, c'est surprenant. Qui donc?
-Laurie Nelseen. Je suis… une vieille amie.
-Une coïncidence fortuite,  nous pleurons la mort de mon jeune frère, Alexandre, qui était son ami proche. Nous assisterons au même enterrement. Les deux familles se sont entendues pour joindre l'événement. Nous pourrions vous escorter si vous le souhaitez. Il suffit d'attendre ma femme. Nous rejoindrons, en premier lieu, la Chapelle Nelseen pour les plus proches. Le déroulé nous fera escorter les cercueils jusqu'au cimetière des Patriotes. La procession est ouverte au public. Mais en tant que charmante connaissance, je peux vous permettre de nous accompagner dans la Chapelle.
-Quel gentil homme, vous faites. Que la Miséricorde soulage nos âmes meurtries.
-Je l'espère, aussi.”


Bastien réajuste son costume avant de congédier ses employés ayant fini leur tâche. Il fixe ensuite cette dame en noir dont la robe, bien que subissant quelques innovations, lui fait penser à la mode locale.

“Êtes vous originaire de ces lieux ?
-Oh. Il y a bien longtemps que je n'ai pas foulé le pied sur cette île. Néanmoins, j'y ai bel et bien vécu une partie de mon enfance. Tout est resté comme dans mes souvenirs. Saint-Uréa semble insensible au temps qui passe.
-En effet, nous avons préservé une stabilité. Nous remercions la Dame de Fer pour ne pas finir comme la tristement célèbre Goa.”


Pendant cet échange succinct, deux femmes vêtu de sombres vêtements et d'une voile noir chacune, une en fin d'adolescence, une autre plus mâture, s'approchent du bijoutier. Celui-ci les regarde de haut en bas quelque peu agacé.

“Vous en avez mis du temps. Mère et Père sont déjà sur les lieux avec Alice, et nos employés vont arriver avant nous.
-Désolé, Grand frère. La faute me revient pleinement. Ne vous fâchez pas à cause de mes indécisions.
-Laisse-le donc, Diane. Si Monsieur Dubal a des reproches à faire, je suis toute ouïe. Même aujourd'hui, il ne semble pas capable de comprendre la détresse de sa famille.
-Qu'est ce que vous insinuez? Vous voulez encore humilier votre mari?
-Je vous en prie…


La mystérieuse dame à l'ombrelle observe la scène avec un amusement à peine voilé. La plus jeune regarde avec une certaine curiosité cette inconnue dont l'élégance sobre crée une certaine admiration. Elle, qui a mis tant de temps à se préparer pour être à la hauteur des attentes de sa mère, se sent bien petite face à elle. Quand à la femme du bijoutier, elle fait la moue à son homme dont les rapports semblent tendus en ce moment. Bastien soupire un instant avant de reprendre son masque social devant la dite proche de Laurie.

“Madame, excusez nos manières. Je vous présente ma femme, Clitorine, et ma plus jeune sœur Diane.
-Vous êtes ravissantes, Madame. Enchanté.
-J'avoue que je suis, de même, curieuse d'avoir l'adresse de votre styliste.
-C'est une vieille amie de Laurie.
-Toutes mes condoléances, nous savons ô combien ces deux jeunes hommes étaient inséparables. Partageons nos peines pour combler le vide qui laissent derrière eux. Comment doit-on vous appeler, ma chère ?

L'avenante Clitorine prend le bras comme une pure noble de Saint-Uréa. Elle a déjà choisi de se faire ami avec cette femme… ou plutôt de capter l'aura qu'elle dégage. Tels sont les règles du milieu mondain. Le groupe se met ainsi en marche, tandis qu'un large sourire transparaît à travers le voile de l'inconnue.

Je suis charmé par votre accueil. Vous êtes d'une amabilité touchante. Je ne pensais pas en mériter autant. Vous pouvez m'appeler Capulina. Hihi !


À l'écoute de ce prénom, Bastien s'arrête net. Les yeux écarquillés,  le fils Dubal ressent des frissons aux sons de ses rires. Pris par des sueurs froides, il fixe le sourire de cette femme, le regard marqué par la stupeur. La petite Diane remarque,  d'abord, le malaise de son frère. Il ne lui faut que peu de temps pour comprendre à qui ce nom fait référence. Bien qu'elle en est aucun souvenir, ce nom tabou représente une séquelle profonde dans la famille. Elle se rapproche de son frère avec une main attentionnée et un regard méfiant envers cette parvenue. Clitorine n'a aucune idée de l'identité de sa nouvelle compagnie et ne fait pas le lien avec les rumeurs qu'elle a pu entendre dans les cercles mondains.

Oh, ce prénom vous va à ravir.
-Vous êtes la première à me le dire, ma chère Clitorine.


Remarquant que les deux autres ne suivent plus la marche, la femme du bijoutier se retourne peu inclinte à prendre plus de retard qu'il n'en faut.

Voyons, que vous arrive-t-il à vous deux?
-Ne soyez pas si dure. Ils sont simplement surpris de revoir leur détestable sœur réapparaître. Le temps passe bien vite. La petite Diane est devenue pratiquement une jeune femme.
-Vous voulez dire que… diantre !

Clitorine reste bouche bée. Une légère brise soulève subrepticement le voile de cette sœur disparue, les traits caractéristiques de la famille Dubal se révèlent au grand jour, autant qu'un sourire poli. Capulina Dubal. Celle dont la fugue a soulagé tout autant qu'elle a traumatisé. La dernière personne que sa fratrie aurait voulu voir à ce jour de recueillement pour leur frère décédé au combat.

Ne sommes nous pas pressé par le temps, mes très chers?
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Dans la maison austère du Patriarche, où le silence régnait malgré la présence de toute la famille, Éléonore se tenait debout près de la grande fenêtre aux lourds rideaux de velours jaune. Elle était perdue dans ses pensées, le regard tourné vers l’extérieur, observant les jardins où la lumière du matin contrastait avec l’ombre oppressante qui enveloppait l’intérieur. Ses longs cheveux argentés tombaient en vagues douces sur ses épaules, et sa silhouette se découpait nettement dans la pénombre de la pièce, presque immobile, telle une statue.

Derrière elle, la scène de deuil se poursuivait. Marcellia restait droite et ferme, tentant de contenir ses émotions, tandis que Guillaume, impassible comme toujours, demeurait figé à ses côtés, tel un roc inébranlable. Dominique, quant à elle, s’effondrait, cachant son visage dans un mouchoir, incapable de reprendre le contrôle de sa douleur. Philippe IV, assis non loin, ne regardait personne. Ses yeux restaient fixés sur un verre de cognac qu’il n’avait pas encore touché, complètement absent après la perte insurmontable de ses deux fils. Amandine pleurait en silence, assise à côté de son mari Antoine, qui lui tenait la main avec une froideur apparente. Leur union silencieuse contrastait avec la peine qu’elle ressentait, tandis que leurs filles étaient restées avec la nourrice, à l’abri de cette journée accablante.

Éléonore, elle, restait immobile, seule avec ses réflexions, une figure élégante, mais tourmentée par des pensées invisibles, prisonnière du chagrin silencieux qui régnait dans la pièce. Il serait mentir de dire qu'Éléonore avait été proche de Laurie. Leurs échanges avaient toujours été rares et formels, mais elle avait entendu de bonnes choses à son sujet. Lorsqu’ils se croisaient lors des rassemblements familiaux, elle avait toujours ressenti un léger plaisir à le revoir. Toutefois, en ce jour, une autre émotion la traversait, une émotion plus lourde et plus complexe.

Elle soupira doucement, détachant son regard de la fenêtre, de la lumière froide qui se faufilait à travers les rideaux épais. Lentement, elle se tourna vers sa famille, son regard clair se posant sur Philippe et Dominique, effondrés sous le poids de la douleur. Cette peine, Éléonore la connaissait trop bien. La perte, la solitude, elle les avait vécues elle-même, il y a de nombreuses années, lorsque sa propre famille s'était effondrée. Elle comprenait le vide que l'on ressentait, cette brûlure qui ne s’éteignait jamais.

Sans un mot, elle s’approcha d'une table, non loin d’Amandine, qui pleurait encore doucement, toujours enveloppée dans le silence. Éléonore prit soin de remplir le plateau où des petits verres en cristal étaient alignés, remplis d'un liquide doré et intense : l'absinthe des morts. C’était une vieille tradition familiale, presque oubliée avec le temps, mais Éléonore avait jugé bon de la rappeler. Trinquer au nom des défunts, leur accorder un dernier hommage à travers cet alcool aux arômes puissants.

Elle fit le tour de la salle, tendant un verre à chacun des membres présents. Guillaume, impassible comme toujours, prit le sien sans un mot. Marcellia, le visage fermé, suivit. Dominique, encore tremblante, accepta le verre d'une main incertaine, tandis que Philippe se redressait à peine pour prendre le sien. Amandine, les yeux rougis, murmura un faible merci en saisissant le verre offert. Antoine, quant à lui, resta stoïque, ne prononçant rien, mais prenant tout de même part à ce rituel silencieux.

Éléonore saisit le dernier verre avant de déposer le plateau argenté sur la table basse. Elle leva alors son verre, et, d’une voix calme et neutre, elle brisa le silence :

« À ceux qui sont tombés. Que leur passage ait été sans douleur et rapide. »

D’un geste fluide, elle avala d’un coup le liquide brûlant, sentant la chaleur amère descendre le long de sa gorge. Lentement, un à un, les autres membres de la famille suivirent, imitant le geste d’Éléonore. Ils trinquèrent en silence, chacun avec son propre fardeau de tristesse, unis dans la douleur, mais séparés par leurs chagrins individuels.

Ce fut à cet instant précis qu’Edmond fit son entrée, poussant la porte de l’entrée principale avec une certaine brusquerie, laissant entrer un vent doux dans la pièce sombre. Il balaya la scène d’un regard d’acier, une expression de lassitude sur le visage. Pour Edmond, qui comme Éléonore avait servi dans la Marine d’élite, la mort faisait partie intégrante de sa vie. Il en avait vu plus que son lot, et cet enterrement n’était qu’un de plus dans une longue série. Il haussa légèrement les épaules avant de secouer la tête, comme pour chasser une pensée fugace.

Éléonore, sans un mot, s’avança vers lui et remplit un verre qu’elle lui tendit. L’homme d’âge mûr, s’en saisit rapidement et en avala le contenu d’un coup sec, son regard tourné brièvement vers le plafond comme pour un dernier adieu silencieux. Il leva son verre, un geste respectueux mais détaché, avant de le reposer avec soin sur la table.

« Les carrosses sont prêts, nous devrions partir avant d’être en retard », marmonna-t-il d’une voix rauque, presque désintéressée.

Sans attendre de réponse, il tourna les talons et quitta la pièce aussi brusquement qu’il était entré, laissant derrière lui un court silence. Éléonore, attrapa son voile et l’enfila avec soin. Elle ajouta un petit chapeau décoratif qui se posa élégamment sur sa tête, maintenant ses cheveux en place. À côté d’elle, Dominique enfila une large capeline ornée d’un voile épais qui dissimula immédiatement son visage gonflé par les larmes et le chagrin. Amandine, plus discrète dans ses mouvements, ajusta un tambourin orné d’un voile, simple mais efficace pour respecter les convenances. Marcellia, fidèle à son élégance naturelle, saisit un bibi sombre qui laissait un petit voile caresser délicatement le devant de son visage.

Un à un, les membres de la famille se levèrent, chacun enveloppé dans ses pensées et sa douleur. Ils se dirigèrent lentement vers la porte, quittant la pièce qui avait été le témoin silencieux de leur deuil. À l’extérieur, les carrosses attendaient patiemment, prêts à les emmener vers le lieu des funérailles.
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Dans un silence mortifère, Bastien, sa femme et sa soeur se sont regroupés pour échanger des messes basses, pendant que la tant détesté Capulina les suit avec une certaine indifférence. Celle-ci profite de la marche, inhalant l’air doux typique de la mer du Sud. Elle ne pensait pas être sensible à ce genre de mélancolie dans ce pays qu’elle a fui. Contemplant les rues de la haute ville, les retardataires parviennent enfin devant la Chapelle sélectionnée par les Nelseens pour le recueillement de la famille proche. Encadrant l’entrée, de nombreux associés, serviteurs et pleureuses sont d’or et déjà placés pour accompagner le cortège funèbre. Le son des sanglots imprègne l’atmosphère de tristesse malgré un soleil éclatant. Diane s’arrête un instant les yeux pleins de larmes pour enlacer une vieille dame sur le chemin. Cette femme en âge se montre extremement maternelle avec la cadette Dubal. Lorsque celle-ci reprend son chemin, la sextagénaire laisse tomber son mouchoir par indévertance. Le tissu glisse aux pieds de la mystérieuse blonde. Sa main s’étend et des fils accrochent l’objet pour le faire léviter jusque dans sa paume. Le regard de la vieille dame se lève avec un certain émerveillement. Du bout des doigts, Capulina donne ainsi ce bout de tissu avec un sourire aux lèvres. Lorsque cette dame remarque le visage de sa bienfaitrice à travers son voile sombre, ses mains se mettent à trembler et son expression est marquée par le choc.

Dorothea, un plaisir de vous revoir en pleine santé. Tant année à servir cette famille vous à finalement plutôt réussi. Hihi !

La gouvernante en chef de la maison Dubal est prise de vertiges, des servantes plus jeunes à ses côtés la retiennent dans sa chute. Capulina continue de progresser, constant que ses accompagnateurs ne l’ont pas attendu pour entrer dans la chapelle. A l'intérieur, Bastien accélère soudain le pas. Dans le silence solennel, il approche le siège de son père pendant que sa femme et sa soeur salue le reste de la famille. Pierre-Emmanuel, le patriarche Dubal, est quelqu’un de mou, même si la mort de son fils le touche profondément, il reste isolé et assis pour laisser sa femme exprimer son malheur. Interpellé par son fils aîné, il lève les yeux, le visage visiblement fatigué.

“Père, nous avons un très gros problème.
-Ce n’est pas grave, si nous perdons de gros clients aujourd’hui.
-Non, cela n’a rien à voir. C’est bien pire que cela.
-On réglera les affaires plus tard mon fils, ce n’est pas le jour…
-Capulina.”


L’homme mûr écarquille les paupières de stupeur. Ce simple nom suffit à le faire appréhender toute la suite des événements. D’un regard vers sa femme en sanglot, il s’approche de Bastien pour discuter plus discrètement.

Tu l’as vu?
-Elle nous a suivi jusqu’ici.
-Qu’est ce qu’on fait?
-On demande à nos employés de la chasser.
-Cela reste ta sœur.
-Avez-vous oublié tout ce qu’elle nous a fait subir? Mère a brisé des vies pour moins que cela.
-Tu prends ta mère en exemple à présent? Toi, qui lui parles si peu.
-Tss. Vous savez très bien comment cela va finir.
-Ce n’est pas un jour où j’ai la force de résister.
-Oui. Ce n’est jamais le jour pour vous.”


Dans cette dernière remarque, Bastien, remonté par l’apathie de son propre père, décide d’agir seul. Se redressant pour empêcher que sa dangereuse sœur n’entre dans la Chapelle, il perçoit un grand silence dans l’édifice. Même les plaintes et les consolations ont cessé devant les deux cercueils ouverts des défunts. Un bruit de talon résonne. Son regard paniqué alterne entre l’intruse et le visage crispé de sa mère. Capulina a pénétré la Chapelle, son ombrelle sous le bras et le voile noir translucide que portent toutes les femmes proches des morts. Il est trop tard pour éviter ce que Bastien craignait.
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Dans un silence étouffant, la chapelle semblait figée dans le temps, seule la lumière du soleil se frayant un chemin à travers les vitraux teintés projetait des reflets colorés sur le sol de pierre froide. Les membres de la famille Nelseen étaient déjà installés, leurs silhouettes sombres contrastant avec les jeux de lumière. Éléonore, assise sur le bord de son banc, paraissait tendue, le dos droit, les mains jointes sur ses genoux. Son visage, bien qu’impassible, laissait transparaître une froideur. Son regard clair fixait l’allée centrale, là où chacun devait défiler devant les cercueils ouverts. Ses cheveux soigneusement tirés sous son voile, elle incarnait la figure silencieuse, malgré le poids du deuil qui imprégnait la salle.

À sa droite, Guillaume, restait stoïque, sa large carrure et son air sévère dominant l’espace autour de lui. Le vieux chef de famille, bien qu’affaibli par les années, conservait une présence imposante. Son visage ne trahissait aucune émotion, comme s’il refusait de laisser transparaître la moindre faiblesse. À ses côtés, Marcellia, toujours élégante dans sa tenue de deuil, portait son voile avec une grâce déconcertante. Son expression fermée et son regard perdu dans le vide témoignaient de la profonde peine qu’elle dissimulait.

Philippe IV était là, son corps affaissé sur le banc, l’air absent, tenant dans sa main un mouchoir qu’il frottait nerveusement. À ses côtés, Dominique sanglotait doucement sous son voile épais, complètement repliée sur elle-même, ses épaules secouées par la douleur.

Amandine, quant à elle, restait en silence à côté d’Antoine, sa main dans la sienne, son visage caché sous le voile tombant de son tambourin. Le poids de l’absence de leurs filles et de l’incertitude des événements pesait sur ses traits, alors qu’elle tentait de contenir ses propres larmes.

Tous attendaient dans une posture silencieuse, mais l’atmosphère semblait de plus en plus tendue. Le son régulier des talons frappant le sol vint soudain briser ce silence pesant. Capulina venait de pénétrer la chapelle, ses pas résonnant dans l’espace sacré. Sa silhouette mystérieuse, drapée de noir, avançait avec assurance, l’ombre de son ombrelle l’accompagnant dans sa démarche. Le voile qui couvrait son visage translucide ne laissait que deviner les traits fins et dangereux de la femme. Le regard d’Éléonore se tourna un instant vers l’intruse et pour la premières fois depuis un moment un fin sourire s’étira sur ses lèvres.

Éléonore s’était finalement levée, se dirigeant avec calme vers Capulina. Elle se plaça directement devant elle, lui barrant le chemin, comme un mur infranchissable. Le silence devint encore plus lourd alors que les deux femmes se faisaient face. Toute la chapelle sembla retenir son souffle, attendant une confrontation qui aurait pu déraper à tout instant. Mais au lieu de cela, la Commandante fit un geste inattendu. D’un mouvement fluide, elle prit Capulina dans ses bras, la serrant dans une accolade qui paraissait presque fraternelle. La surprise se lisait sur quelques visages.

« Heureuse de te revoir, cousine. Il y a bien longtemps que nous n’avons pas échangé. » Sa voix, basse et grave, était pourtant marquée d’une certaine douceur.

Après quelques secondes, elle relâcha légèrement son étreinte, reculant tout en gardant ses mains fermement posées sur les épaules de Capulina, comme pour maintenir cette connexion, ou peut-être pour s’assurer qu’elle restait bien là.

« Je sais que tu n’es pas proche de ta famille, mais je t’offre mes condoléances. » Sa voix avait pris une teinte plus formelle, mais son regard était plus doux sous son voile.

Le contraste entre l’accolade amicale et la tension sous-jacente dans l’air était tangible. C’était un moment à la fois plein de respect et chargé d’une vieille méfiance, où les non-dits semblaient aussi lourds que le deuil partagé.
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Haussant les sourcils, Capulina fixe un instant Eléonore en silence. Celle qui a survécu au pillage de la colonie de l'Archipel Vert semble avoir renoué avec son noble lignage. Son cocon joyeux rasé, son refuge paraît être la seule famille qui lui reste. Décidément, que ce soit à sa seizième année ou dans le milieu de sa vingtaine, la blonde ne peut s'empêcher de la voir comme une opposée totale. L'intruse balaye les autres du regard. Certains détournent les yeux, d'autres lui jettent des regards noirs. Là où Éléonore semble apprécier, Capulina n'est vu que comme une perturbatrice. Un monstre que la gentille Nelseen s'est courageusement sacrifié pour retenir. Son attention revient sur cette connaissance, avec un léger sourire.

Cousine? Depuis le temps, tu n'as toujours pas rectifié cette erreur. Éléonore Grey.

Elle appuie à dessein sur son nom pour créer une distance et l’a ramené à son passé. Une pique mesquine qu’elle ne pouvait s'empêcher de lancer. Cependant, la blonde semble s’arrêter là.

Nous sommes tous condoléancés, ici bas. Mais cela reste une intention louable…

Deux femmes viennent subitement à leur rencontre, l’une aux regards encore rouges de larmes à travers son voile noir, les mains tremblantes dont tout en elle témoigne d’une grande détresse émotionnelle difficile à contenir, n’est autre que la soeur ainée Dubal, l’autre avec des larmes encore sur le visage et un mouchoir en main reste digne, il s’agit de la mère, pratiquement Matriarche des Dubal.

Pourquoi, maintenant, Capulina?
-Moi aussi, je suis contente de te revoir après tant d'années, Alice. Hihi.
-Comment pouvez-vous plaisanter familièrement à un moment pareil? En dix ans, vous avez donc empiré.
-En effet, ma chère sœur, le temps ne m’épargne pas non plus. Si ce n’est pas trop demandé, je vais m’installer. Le voyage a été assez épuisant pour que je ne supporte tes insécurités.


Pour la première fois depuis dix ans, Alice n’a jamais ressenti une aussi grande colère. Serrant les poings, elle reste silencieuse devant cette provocation. Une pensée noire lui traverse l’esprit, elle aurait préféré que ce soit l'enterrement de Capulina plutôt que son petit frère. Si les meilleurs partent les premiers, les pires partent les derniers. L’intruse indésirable s’assied ainsi au dernier rang dans l’espace destiné à sa famille. Oriane Dubal, sans un mot jusqu’à présent, s’approche de la cousine Nelseen.



Très chère, Eléonore. Je vous prie de nous excuser. Ce sont des histoires de famille qu'il nous revient de gérer. Néanmoins, si vos disponibilités le permettent, j’apprécierai m’entretenir auprès de vous. Nous n’avons jamais eu l’occasion de nous apprécier, pourtant, beaucoup parmi votre famille ne disent que du bien. Il me faudrait bien une discussion chaleureuse dans ce drame de vie. Vous savez mieux que quiconque qu'elle genre de tragédie est-ce de survivre à la perte d’un enfant…



La femme mure rapproche le mouchoir de son visage, tandis que sa fille à la mine contrite peine à retenir ses chaudes larmes.
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Éléonore osa lever un sourcil face aux paroles de Capulina. Décidément, le temps n’avait pas été tendre avec elle. Cette pique, bien que cinglante, était inoffensive comparée à la fourberie qu’elle avait déjà subie de la part de sa cousine. Capulina avait toujours eu ce talent pour transformer la tension en moquerie, mais Éléonore n’avait pas l’intention de s’attarder sur cette provocation. En toute réponse, elle tapota amicalement le dos de sa cousine, n’ayant pas la chance de la contredire sur son nom de famille avant que la matriarche des Dubal ne s’approche, suivie de l’une de ses filles.

Leurs échanges marquants furent pleins de non-dits. Éléonore, bien qu'encline à l'indulgence, ne souffla aucun mot, écoutant avec surprise le tempérament adouci de Capulina. Grâce à Kyllan, Éléonore avait eu des nouvelles de sa jeune cousine. En effet, son fidèle amant, autrefois lié au Cipher Pol, avait su lui faire découvrir que Capulina était à l’époque une agente du Cipher Pol 4, impliquée dans les affaires de la Marine. Cette révélation avait été un choc, mais avec le temps, Éléonore en était venue à comprendre davantage les comportements de Capulina, ainsi que les rumeurs qui circulaient au sein de leur famille.

Les Dubal avaient toujours été des sujets de conversation, même si Éléonore n’était pas proche d’eux. Amandine avait souvent mentionné leur lignée, et Dominique avait parfois parlé d’Oriane. Tout cela avait contribué à tisser une image particulière de la famille, où les forces et les faiblesses cohabitaient dans une danse chaotique. Mais tout ce qu’avait comprit la blanche était que la famille semblait se cacher sous un voile d’illusion qui avait réussi à berner beaucoup.

Laissant de côté les souvenirs lointains, Éléonore écouta le trio de femmes. Avec le temps, la commandante avait fini par comprendre que Capulina n'était pas simplement une sauvageonne s'amusant aux dépens des autres. Son rôle au sein du Cipher Pol indiquait un certain niveau de compétence et de dangerosité. Cependant, au vu des réactions diverses de sa famille, celle-ci ne semblait pas au courant de son travail. En même temps, pour devenir un agent du CP, il devait y avoir des prérequis particuliers. Ainsi, la tarentule laissa le terrain à sa maternelle, qui sembla soudainement s’intéresser à la blanche, qui était à deux doigts de retourner à sa place, loin d’être intéressée par des blablas inutiles. Toutefois, la matriarche semblait bien décidée à faire la jasette avec elle.

« À aucun moment, je ne me suis intéressée à vos drames familial, madame Dubal, je dois déjà gérer les miens. Vous l'avez amené vous-même à moi. De plus, si je peux me permettre, si j'ai bien appris quelque chose dans la Marine, c'est qu'il est inutile de s'accrocher aux vieux ressentiments, surtout quand une vie est facile à perdre... Mais je m’égare. Je crois que Dominique et Philippe vous avait déjà donner nos condoléances, mais je vous les offres à nouveau. » Glissa-t-elle en penchant un peu la tête.

Elle se tut un instant. En ce qui concernait les 'commentaires' positifs, elle doutait qu'ils viennent de la part de Dominique, qui semblait la détester comme elle avait détesté sa mère. Peut-être Amandine ? Probablement Amandine. Elle doutait que les autres membres de la famille échangent des plaisanteries avec Oriane, à l'exception de Dominique, qui la voyait comme une figure suprême. Ce pourquoi Éléonore était toujours méfiante avec la femme.

« Hmm, j'ai quelques disponibilités, mais je tiens à vous dire que je ne suis pas de ces âmes qui aiment se rencontrer pour parler de la pluie et du beau temps. Si ce sont des conseils que vous recherchez, je peux vous les offrir, madame Dubal, mais ne vous attendez pas à ce que je vous mente ou que je vous cajole avec des mots positifs, » souffla-t-elle finalement d'un ton doux. « Si vous désirée une discussion franche, je suis votre. »
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Les deux femmes ressentent une certaine méfiance dans les mots d'Eléonore. Alice, malgré ses pleurs, affiche un certain malaise. Certes, sa mère est proche de Dominique Nelseen dont elle connaît les contentieux, mais, sa cousine Amandine l'a considérée comme une amie chaleureuse. Néanmoins, elle ne peut pas vraiment lui en vouloir, c'est une femme que la vie a brisé par ses drames. Oriane prend, soudainement, sa fille à parti avec une voix douce et mélancolique.

Alice, très chère, te sens tu prête pour le discours.
-Oui, mère…
-Ne retiens pas tes larmes. Elles sont sublimes et nous attendrissent le cœur. À travers nos sanglots, nous honorerons la mémoire d'Alexandre. Préviens donc le prêtre d'initier les pompes funèbres sous peu.


Alice hoche la tête respectueusement avec de s'éloigner. La mère Dubal fixe à travers son voile noir. Une seconde de silence, elle retire un bague portant un joyau bleuté de ses mains gantées.  Son ton triste devient subitement froid.

Eléonore Nelseen. Une discussion franche a toujours été dans mes intentions. Je vous invite après la cérémonie dans mes appartements.

Posant doucement sa main sur l'épaule d'Eléonore, Oriane approche délicatement sa tête de son oreille. D'une voix basse, presque menaçante, la mère de Capulina prononce des mots bien évasifs et insidieux.

Envoyez mes salutations à votre oncle Edmond de ma part.

Un sourire mince et imperceptible pourrait se lire sur son visage dissimulé par le tissu, à cette distance. La matriarche des Dubal se redresse pour enfiler à nouveau sa bague. Sans d'autres mots, elle regagne sa place tenant son mouchoir telle une mère éplorée. Capulina roule des yeux en silence. Positionnée à l'écart de sa famille, la blonde est installée dans les dernières rangées de sièges.  

Le prêtre commence sa courte messe au nom de la Miséricorde. Avant d'effectuer une prière pour laisser, la famille prononcée les discours d'adieu. Celle choisit pour discourir est sans conteste Alice dont l'éloquence est reconnue même par la Dame de Fer. Se postant sur l'estrade, la douce soulève son voile.

Mon frère Alexandre a toujours été un trésor pour notre famille. Et avec son ami de toujours Laurie, auxquelles à deux, ils formaient nos richesses les plus inestimables…

Éclatant en sanglots sincères, Alice continue malgré ses émotions fortes et son intense tristesse.

Leurs joies de vivre, leurs entrains, leurs désirs d'aventure, leurs complémentarités… aujourd'hui envolé dans l'héroïsme de leurs services au Gouvernement Mondial.

La jeune femme sert les poings. La situation de Saint-Uréa est ambiguë mais il est incontestable que le nationalisme est une idéologie largement partagée. Si bien que servir dans l'élite est mal vue pour les risques mais aussi car elle n'est pas soumise aux privilèges spéciaux de la nation. En effet, des accords stipulant que tous officiers de Saint-Uréa restent en service pour Saint-Uréa. Certains sont même à scruter le moindre de signe de faiblesse du Gouvernement pour s'en détacher. Ainsi, mourir pour le Gouvernement Mondial est une hypocrisie maintenu mais qui n'a en réalité aucune valeur pour l'élite locale. Ce qui est valoriser, c'est d'avoir une bonne carrière dans la Marine simplement.

Je me souviens du jour où je devais les garder tous les deux. De vrais boules d'énergie, je les ai laissée me coiffer, j'ai fini les cheveux en pagaille. Père s'en était beaucoup amusé…

Pierre-Emanuelle fond en larmes lui aussi. L'appel aux souvenirs semble marquer la famille Dubal d'un grand chagrin.

La fois où mon frère, Bastien a été défier en duel par le jeune Laurie. Il a finit roué de petits coups par les deux compères…

Un rire teinté de tristesse est libéré par Bastien, ayant bien du mal à se retenir. Ses yeux sont humides.

Les fois où notre Alexandre sortait de la chambre de notre mère, nous savions qu'il avait fait un autre cauchemar…

Oriane se recroqueville sur son mouchoir. Toujours les larmes coulantes, elle affiche une expression dure en fixant Capulina. Celle-ci laisse un sourire d'incompréhension. En effet, lors de sa fugue, l'agent Tarentule n'a aucune idée qu'elle est la responsabilité de la perte de l'œil de son petit frère et de son traumatisme de jeunesse. Il ne lui a jamais révélé.

Le jour où Diane a voulu participer à ses cours d'épée. Il a traité ses blessures avec bienveillance et douceur. La portant jusqu'à notre salle à manger pour le dîner… vous étiez si beaux et souriants.

Le regard tendre d'Alice envers sa sœur cadette suffit à faire déborder les larmes de Diane. Éssouflé de ses sanglots, la sœur aînée Dubal tient bon.

Mon petit frère nous laisse un grand vide. Un vide que nous partageons pour rester fort devant cette épreuve de vie… car nous continuerons de vivre et nos souvenirs de cette jeunesse gâchée vivrons encore à travers nous. Nos deux familles porteront le poids de votre perte et vous honorerons…

Reniflant, le visage rouge et marqué d'une profonde douleure, Alice conclut son discours.

Tous nos cœurs qui se brisent de vous voir partir à jamais.

Alice descend de l'estrade pour rejoindre sa mère et s'effondrer dans ses bras. Tous ses souvenirs qu'elle n'a pas partagé créer un malaise au fond de la gorge de Capulina. Celle-ci change de posture sans un mot. Pour la première fois, la blonde semble vraiment entendre sa sœur, ce qu'elle pense au fond d'elle-même. Et non pas l'image que sa mère renvoie. Sur l'estrade, c'est au tour des Nelseen d'effectuer le discours familial. Qui a eu l'honneur de la responsabilité de sa tâche ?
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Éléonore, malgré ses réticences, ne put résister à l'invitation voilée de Madame Dubal. Le ton insidieux de la matriarche avait éveillé une curiosité dangereuse en elle. La mention d'Edmond, son oncle, la laissait perplexe, mais elle savait qu'Oriane ne lançait jamais des mots sans sous-entendus. Éléonore se contenta d'un hochement de tête discret en réponse avant de retourner à sa place, s'immergeant dans l'atmosphère pesante de la cérémonie.

Assise, ses mains frôlant le rebord du banc, elle prêta une oreille attentive au discours d'Alice. Chaque mot prononcé par la jeune femme semblait arracher des émotions brutes à la famille Dubal, même Capulina, d'ordinaire si stoïque, était affectée. Lorsque ce fut le tour des Nelseen de prendre la parole, les regards se tournèrent naturellement vers Dominique et Philippe, mais l'un comme l'autre restait silencieux, brisés par leur deuil. Dominique, enveloppée dans son châle noir, tremblait de sanglots, incapable de surmonter sa douleur pour s'exprimer. Philippe, son mari, n’était guère plus apte, les yeux perdus dans le vide, absent, figé dans une torpeur de chagrin.

Tous savaient qu'Edmond, connu pour sa maladresse verbale et son caractère militaire, ne pouvait pas assumer cette responsabilité. Éléonore elle-même n’avait pas la distance émotionnelle nécessaire pour offrir un discours sincère et juste. Elle n'était pas prête à assumer ce rôle, surtout en des circonstances aussi délicates.

 Ce fut donc Marcellia Nelseen, la cadette de Guillaume, qui prit les devants. D'un geste gracieux, elle se leva, lissant ses vêtements avec un geste mécanique. Ses longs cheveux grisonnants étaient soigneusement relevés, une élégance contrastant avec l'atmosphère lugubre du moment. Malgré son âge avancé, Marcellia irradiait toujours cette prestance qui lui valait tant de respect, non seulement dans le monde littéraire, mais aussi au sein des cercles de la haute société.

Chaque pas qu'elle fit vers l'estrade était empreint d'une dignité immuable. En silence, elle affronta les regards de la famille et des invités, puis, arrivant à destination, elle ajusta son col avec un calme résolu. Le poids de son héritage littéraire se reflétait dans chacun de ses mouvements, et ceux qui la connaissaient bien savaient que chaque mot qui allait sortir de sa bouche serait choisi avec soin. Marcellia, bien que veuve et sans enfant, n’avait jamais laissé son deuil la définir. Forte, indépendante, elle avait consacré sa vie à son art et à la famille, malgré son infertilité et les amants qui traversaient sa vie comme des secrets bien gardés.

Arrivée à l'estrade, elle inspira doucement avant de commencer. D'une voix douce, elle entama son discours, enveloppant l'assemblée de son charisme littéraire.

« Laurie était… est une lumière dans nos vies. Une lumière qui, bien que trop tôt éteinte, continue de briller dans nos cœurs. Nous le savions tous ici, un être de bien, courageux et loyal, qui a choisi de servir sa patrie avec un honneur que peu peuvent égaler. »

Elle fit une pause, laissant ses mots se déposer avec poids et grâce.

« La vie ne nous laisse pas toujours le choix. Elle nous vole parfois ceux que nous aimons le plus, sans explication, sans justification. Mais Laurie, par son service, nous laisse un héritage inestimable : celui du sacrifice et de la mémoire. »

Marcellia scrutait l'audience, observant les réactions. Sa présence sur l'estrade captivait tous ceux qui l'écoutaient, son discours soigneusement tissé, ponctué de silences qui accentuaient la solennité du moment. Même Dominique et Philippe semblait attiré par son discours.

« La famille Nelseen, tout comme la famille Dubal, portera ce deuil avec fierté. Car nous savons que, bien que physiquement absent, Laurie restera à jamais parmi nous, tout comme Alexandre. Chaque souvenir, chaque sourire qu'ils ont laissé derrière eux est une étincelle que nous chérirons. »

Elle s'arrêta une nouvelle fois, fixant un point devant elle, comme si elle s'adressait non seulement aux vivants mais aussi à ceux qui étaient partis.

« Il nous appartient maintenant de continuer, de vivre avec leurs mémoires, et de nous rappeler que nos liens, qu’ils soient de sang ou d’amitié, sont ce qui nous maintient debout dans les moments les plus sombres. »

Marcellia se tut, jetant un dernier regard vers Éléonore, comme pour lui transmettre silencieusement une force intérieure. Puis, dans un geste élégant, elle quitta l’estrade, ayant accompli son devoir et retourna auprès de sa famille, laissant le prêtre prendre son tour.
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Le prêtre dirigeant les pompes funèbres s'avance sur l'estrade.

Que les Charonéides se prononcent.”


Terme désignant une des traditions des enterrements à Saint-Uréa, il désigne les femmes proche de l'âge du défunt en avant de la procession guidant le cercueil. Portant des bannières noires, ce sont celles que l'on dit garantes du cercueils, même si ce n'est qu'une tradition. Le prêtre et ses chanoines dirigent réellement la procession. Ces femmes peuvent être seules, rarement, ou deux, plus commun, et sont choisies généralement parmi les sœurs ou cousines. C'est avec évidence qu'Alice et Diane s'avancent en se tenant la main. Du côté Nelseen, c'est naturellement Éléonore qui a été choisie pour remplir ce rôle.

Les talons de Capulina résonnent dans la pièce. Elle se place devant le prêtre comme les autres. Ses sœurs ne peuvent empêcher d'afficher une expression outrée. Le prêtre semble confus. Une simple inclinaison de tête, la perturbatrice prend de court les discours offusqués.

Je me propose humblement en délégation pour les Nelseens. N'ayant qu'une seule candidate, je me propose de l'accompagner. L'amitié de nos familles ne devrait-elle pas aussi partager ce dont on a en abondance?
-Hum. Ce sont à la famille du défunt de déci…
-C'est absurde. Si ce n'est qu'une question de partage. Amandine est bien plus légitime pour remplir ce rôle.


Les mots durs d'Alice résonnent dans la pièce. Elle a ainsi tourné toute l’attention sur la jeune mère qu'est leur cousine Amandine. Capulina incline légèrement la tête vers sa direction. Toute l'assemblée a les yeux rivés sur sa prochaine action. La matriarche Dubal signifie avec un mouvement de tête sévère lui signifiant de se lever.
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Éléonore, demeurait assise, observait la scène avec un détachement apparent, mais un sourire en coin discret étirait ses lèvres devant l’audace de Capulina. Elle n’était pas surprise de voir sa cousine provoquer ainsi les conventions. Au contraire, elle admirait secrètement cette capacité de Capulina à s'imposer face à l'autorité, même en pleine cérémonie.

Lorsque Alice attirait l’attention sur Amandine, Éléonore remarquait aussitôt le malaise de cette dernière. Sa jeune cousine se ratatinait visiblement, ses épaules s'affaissant sous le poids de l’attention soudaine. Un sanglot de surprise lui échappait, tandis que son époux, Antoine, tentait de la protéger des regards de la famille Dubal en se penchant vers elle, ses yeux sombres étincelant de colère.

Éléonore décidait alors d'intervenir. Elle se levait calmement, posant une main rassurante sur l'épaule de son cousin Antoine et lui offrant un léger sourire de soutien. Son regard croisait celui d'Amandine, et un échange silencieux passait entre elles, empreint d’une promesse de soutien. Amandine, soulagée, redressait un peu les épaules, rassurée par la présence sereine d’Éléonore.

« Malheureusement, Amandine n’avait pas assez de force dans les jambes pour parcourir tout le trajet, » disait Éléonore d’une voix calme mais ferme en s’avançant vers l’avant, en direction du prêtre et des autres Charonéides. « Entre les nuits blanches avec les tout-petits et la fatigue émotionnelle... Capulina pouvait très bien se proposer pour cette fois. Considérons cela comme une façon pour elle de faire amende honorable pour ses actions passées. »

Avec cette déclaration, Éléonore atteignait l’avant et rejoignait Capulina sans autre commentaire. D’un geste naturel, elle glissait son bras sous celui de sa cousine blonde, ancrant la procession dans une unité inattendue. Ignorant les murmures de désapprobation, elle adressait un signe discret au prêtre, l’invitant à débuter la marche funèbre.


Le cortège prenait alors vie. Sous le chant solennel des chanoines, les Charonéides avançaient en tête, bannières noires en main. Alice et Diane, leurs visages empreints d’une émotion sobre, marchaient main dans la main, leurs robes noires glissant sur le sol de pierre, leurs silhouettes à côtés de celles d’Éléonore et Capulina. Les quatre femmes traçaient un chemin lent, gravitant autour du cercueil comme un rempart protecteur.

Derrière elles, le prêtre marchait en rythme, entouré des chanoines qui entonnaient un chant sacré, les voix graves se mêlant en un chœur envoûtant, et les encensoirs se balançaient pour libérer une fumée dense et parfumée. Les volutes de fumée se répandaient dans l’air, laissant derrière elles une traînée d’encens lourd, imprégnant la procession d'une atmosphère religieuse et presque intemporelle.

Les membres des familles suivaient, tête baissée, le rythme de la procession, tandis que quelques invités retenaient discrètement des larmes. La marche s’éternisait, chaque pas résonnant dans le silence recueilli, les pieds frappant doucement la pierre du chemin menant à l’inhumation. La lumière du jour était tamisée par les nuages sombres, conférant à l’instant une gravité presque ésotérique.

À l'avant, Éléonore gardait son calme, guidant le cercueil aux côtés de Capulina, sa posture droite reflétant une force tranquille. Pour elle, cette procession était qu'un simple rituel ; mais elle savait que pour les autres, c’était un hommage intime, un dernier acte de fidélité et de respect. Ainsi, elle avançait, résolue, son cœur murmurant un dernier adieu silencieux au défunt, tandis que le cortège continuait sa marche, inébranlable et solennel, vers le lieu d'inhumation.

Le lieu d'inhumation se dressait, majestueux et empreint d’une atmosphère cérémonieuse, au cœur d’un vaste terrain boisé. De hauts cyprès entouraient la clairière ou était installée le cimetière, derrière l’église, leurs cimes effilées se balançant légèrement sous le vent, comme des gardiens muets de ce repos éternel. L’air y était chargé d'humidité et de l’odeur terreuse de la bosquet, tandis que le ciel nuageux créait une lumière diffuse et froide, presque éthérée, enveloppant l’ensemble du site d’un voile grisâtre.

Au centre de cet espace sacré se trouvait une large fosse, soigneusement creusée, bordée de pierres polies et ornée de fleurs blanches et violettes disposées avec soin par les proches. Les fleurs, choisies pour leurs symboles de pureté et de deuil, contrastaient avec le bois sombre du cercueil, qui allait se reposer sur des linceuls tissés de lin et de broderies fines. Les coins de la fosse étaient décorés de lanternes en fer forgé, dont les flammes dansaient doucement, créant des jeux d’ombres tremblotantes autour des visages des invités rassemblés.

Une fois le cercueil installé, le prêtre et les chanoines se mirent en position autour de celui-ci, chantant des prières d’apaisement, des hymnes anciens dont les échos semblaient se perdre parmi les arbres. Les voix des chanteurs s’entremêlaient, formant un chœur grave et vibrant qui imprégnait chaque recoin de la clairière, renforçant la solennité de l’instant. Quelques invités essuyaient des larmes en silence, absorbés par la majesté du moment.

Les Charonéides prirent place de part et d’autre du cercueil, marquant le dernier passage. D’abord, elles posèrent doucement les bannières noires sur le cercueil, en guise de dernier hommage. Alice et Diane, leurs gestes empreints de douceur et de respect, installèrent les bannières avec soin, avant de reculer de quelques pas pour laisser place aux membres de la famille immédiate.

Le prêtre se positionna ensuite au pied de la fosse, ses mains jointes devant lui, et invita d’un geste les membres de la famille à approcher. Sa voix s’éleva, basse et apaisante, rompant le silence de la clairière :

« Que ceux qui souhaitent adresser un dernier adieu au défunt viennent se recueillir et déposer leur offrande. »

Dans la clarté voilée de ce jour de deuil, les invités se mirent à avancer un par un, formant une file lente et recueillie. Ils tenaient chacun une fleur – rose, lys ou œillet – soigneusement choisie pour symboliser leur lien unique avec le défunt.

Chaque membre de la famille se tenait ainsi devant le cercueil, murmurant quelques mots d’adieu, une prière silencieuse, un souvenir partagé, un pardon ou un remerciement chuchoté. Les fleurs étaient ensuite jetées dans la fosse, tourbillonnant doucement avant de se poser sur le cercueil, formant un tapis de pétales et de couleurs métaphorique.

Éléonore, avec une grâce sobre, s’avança à son tour. Dans sa main, elle tenait une simple rose blanche, symbole de pureté et de paix. Elle se recueillit en silence, laissant ses pensées glisser vers des souvenirs absents. Puis, en fermant doucement les yeux, elle lâcha la rose sur le cercueil, qui alla se poser délicatement parmi les autres fleurs déposées.
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Laissant tous les invités petit à petit laisser leurs mots devant le prêtre, Capulina ne se prononcé pas restant statique pendant toute cette fin de cérémonie. Le prêtre finit le requiem. Le cercueil est recouvert. La tombe est posé. Le monde s'en va progressivement du Cimetière des Patriotes. Oriane frôle un instant sa fille prodige. Elles se fixent de leurs yeux bleus perçant à travers leur voile. Comme un souffle glaçant, la mère Dubal ne prononce que quelques mots presque inaudibles.

Qu'est ce que tu as vieilli, Capulina.

Une phrase percutant en plein cœur la blonde, tandis que le cortège de la famille Dubal la traversent avec une cruelle indifférence ou un dédain à peine masqué. L'indésirable ricane doucement d'amertume lorsque tout ce beau monde est bien loin. Sa mère a toujours su frapper où cela faisait mal. Capulina sait qu'elle a repéré sa grande baisse d'énergie. Ces mots de la bouche d'Oriane n'ont montré que sa fille n'était non seulement plus une menace mais qu'elle en a perdu toute sa superbe. Et, en cette période de trouble dans sa carrière et ses ambitions, l'espionne ne peut le nier.

Se pensant seule, sous son ombrelle, elle pose un simple et délicat œillet violet avant de caresser, de sa main, la pierre de cette nouvelle tombe dans ce vaste cimetière.

C’est donc ainsi que tu finis. Comment oses-tu perturber tous les plans d’avenir de notre génitrice ? Hihi ! Voilà que son plus précieux outil vient de se briser, va-t-elle tout faire à la main à présent ? Qui écrasera-t-elle encore pour ses rêves de noblesse et de pouvoir ?

Ses bras se laissent tomber, son ombrelle roulant au sol.

Regarde ce que tu me force à faire, Alexandre. Être sage, retenir mon venin, laisser toutes ses conventions sans heurt et ridiculiser ma… mère. Mais, je n'ai pas besoin de plus d'ennemis.

Pour la première fois depuis sa fugue, Capulina reconnaît celle qui la mise au monde comme sa mère, aussi détestable soit elle. La blonde a cessé de fuir la réalité qui la dérange. S'accroupissant, elle s’adosse à la pierre tombale de son frère. Son regard plonge dans l'étendue du ciel bleu et ensoleillé.

Le soleil de la mer du Sud est pourtant le même partout. Pourquoi me paraît-il si peu enviable aujourd'hui ?

Un jour, elle s'est promise de viser le Soleil et de briller bien plus ardemment que lui. Mais,  cette émulation ne fait plus écho en son être. Quelque chose faiblit et la mort de son frère n'en est aucunement la cause. Capulina baisse sa tête voilée.

Revenir ici m'a révélé bien plus de choses que je n'imaginais.

En y repensant, le destin de son frère était si prévisible. Un point parmi la foule de médiocres. Mais, la tragédie est d'avoir mener une vie que sa mauvaise mère lui a choisi. Le vilain petit canard des Dubal lui a choisi la liberté. Néanmoins, il le pensait. Capulina soupire profondément.

Mon frère. Merci de me prouver que la fugue était le bon choix… mais j'ai tout gâché.

Des sanglots commencent à s'entendre faiblement dans ses tourments. Cependant, un lucidité émane de toute cette émotion.

J'ai fui une cage dorée pour construire la mienne. Tout ce que j'attire n'est qu'une rémanence incarnée du passé. Dans l'Excellence du Gouvernement, je ne cherchais que la reconnaissance d'une mère toxique. Dans le mépris des autres, je ne voulais que retrouver la haine qui a intoxiqué l'entourage de mon enfance. À travers le rire, une façon de conserver une part de la spontanéité infantile. Je vivais dans une reproduction plus grande de la famille que je fuyais. Le pire est que j'en jubilaire sans savoir la nature de cette comédie pathétique. Éternellement bloqué dans mon enfance, je suis maintenant épuisé…

Cette impression d'être incapable de faire autre chose que de recréer l'environnement qu'elle veut fuire fini par la ronger avec une carrière pourrissante.

Peut-être devrais-je briser ce cocon une nouvelle fois ? Que restera-t-il de moi sans surface à fouler, ni montagne à gravir ? Probablement plus rien. Mais ce grand vide, n'est-ce pas ce qui m’apportera le salut?

Le désir de voir le monde tel qu'il est, c'est-à-dire absurde et sans aucun sens. Tout ceci cassera l'armature de ses principes pour laisser dans une chute libre perpétuelle sans accroché. Un navire à la dérive. Ses poings se serrent malgré ses larmes.

Je tiendrai encore un jour… et le suivant… ainsi que ceux qui lui succéderont avant de m'abandonner à la paix. Mes dix années de sacrifices ne peuvent être aussi… inutiles. Si elles se révèlent l'être, alors qu'en sera-t-il de mon existence?

Capulina vient d'exprimer sa plus grande peur à pleine voie. Celle qu'au final, tous ses efforts pour suivre un chemin sont vains, car, en réalité, il n'y a aucun chemin pour elle. Tout n'est qu'illusion et chacun doit croire en sa propre hallucination pour ne pas sombrer dans le Grand néant nébuleux qu'est ce monde.

Quelque part, Alexandre, je te jalouse car tu n'as plus à te poser toutes ses questions.

Elle reste ainsi les yeux dans le vide, assise contre une tombe. Ses larmes se sont calmés mais sa souffrance la torture encore. La notion du temps se perd, l'appétit ne vient pas. Isolée, Capulina se recroqueville sur elle-même dans ce rare moment de détresse. Tandis que dans la demeure Dubal, Oriane patiente en vêtement de deuils en sirotant son verre de vin blanc. Un bref regard vers le denden à ses côtés, elle se demande si la petite Nelseen dédaignera tenir parole, ou lui manquera-t-elle de respect, aux risques et périls que coûtera l'offense ?
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Éléonore avait rejoint sa famille un instant, les laissant s’éloigner progressivement, mais son esprit restait fixé sur Capulina, isolée près de la tombe. En silence, elle fit signe aux autres de partir sans elle. Leur perplexité ou leurs objections ne l'intéressaient pas. Elle comprenait bien trop ce que c'était que de se retrouver seule face à la perte, bien qu'elles l'abordent différentes manières.

Alors qu'elle attendait, son esprit la ramenait à cette époque sombre où elle s'était réveillée parmi les ruines fumantes de l'archipel vert. La douleur physique avait été accablante, mais elle n’était rien comparée à celle de l'âme : l’absence irréparable des siens, les souvenirs qui tournaient en boucle, tels des fantômes insatiables. Ces images de pirates saccageant sans merci, des cris de terreur et de fureur qui se mêlaient à l'odeur du sel et du sang... Tout cela lui revenait avec une acuité qui ne s’émoussait jamais tout à fait.

Elle se laissa absorber par ces pensées, leur donnant de l’espace sans chercher à les repousser. Mais bientôt, son attention revint au présent. Capulina était toujours là, immobile sous un soleil qui n’offrait qu’une lumière crue, dépourvue de chaleur. Éléonore inspira profondément, puis s’avança doucement vers sa cousine. Arrivée près d’elle, elle ouvrit son parasol et abrita la blonde sans dire un mot. Elle respectait l’importance du silence, de ce moment de recueillement personnel.

Les minutes passèrent ainsi. Éléonore sortit une cigarette, l’alluma d’un geste lent, et en tira quelques bouffées, son regard vide se posant sur l’horizon qui commençait à devenir grisâtre. Le ciel semblait pesant, comme s’il partageait un fragment de leur mélancolie. Lorsque la cigarette fut terminée, elle écrasa soigneusement le reste entre son pouce et son index, puis rangea le mégot dans une petite boîte métallique, habituée à ne laisser aucune trace derrière elle. Enfin, elle rompit le silence d’une voix basse, mais ferme, empreinte d’un mélange d’assurance et de douceur.

« Malheureusement, la douleur de la perte ne part jamais vraiment. Elle trouve un coin en toi, s’y installe, et y reste. Peut-être qu’avec le temps, ce n’est pas elle qui diminue, mais toi qui apprends à vivre avec. »

Elle tendit sa main vers Capulina, le geste neutre et sans insistance, comme une invitation, non une obligation.

« Mais il y a une chose à retenir : maintenant que tu la vois, cette douleur, tu peux commencer à t’en libérer. La perdre, non. Mais l'accepter. Elle peut te servir de fondation pour devenir quelqu’un de mieux. Pas pour les autres. Pas pour ta chère Oriane ou qui que ce soit. Pour toi. La version de toi que tu choisis d’être. Plus de faux-semblants, plus besoin de chercher l’approbation de qui que ce soit. Tu es libre, Capulina. C’est à toi de décider quoi faire de cette liberté. » Glissa lentement la blanche qui ne faisait plus simplement référence à la perte d'Alexandre.

Éléonore attendit patiemment, laissant le temps à ces mots de s’inscrire dans l’air comme une offrande, pas une leçon. Sa main restait tendue, une promesse implicite qu’elle ne la laisserait pas seule, pas cette fois. Si Capulina accepta la main tendue, Éléonore la guida avec une lenteur mesurée, lui laissant le temps de se retrouver à chaque pas. Ensemble, elles marchèrent vers le lieu où la blonde avait pris résidence. Éléonore n’échangea que peu de mots durant ce trajet, mais ses gestes étaient pleins de sollicitude silencieuse. Lorsqu'elles atteignirent la destination, elle s’assura que Capulina se sentait à l’aise avant de prendre congé, toujours disponible pour la soutenir si nécessaire.

Si, au contraire, Capulina déclina sa main, Éléonore ne la pressa pas, respectant ce choix avec sérénité. Elle lui proposa aussi de venir s’installer chez elle, décrivant brièvement son modeste appartement : rien de somptueux, mais une chambre d’amis disponible, où elle pourrait se retirer si elle le souhaitait. Peu importait la réponse, elle lui annonça également la demande d’Oriane. D’une voix calme et posée, elle expliqua la visite qu’elle devait rendre à leur matriarche. Ce n’était pas une excuse ni une justification, juste une transparence volontaire envers la blonde, laissant la porte ouverte si elle voulait lui confier quoi que ce soit. Mais si ce n’était pas le cas, Éléonore n’insista pas.

Une fois leur séparation actée, Éléonore prit un temps pour elle. Retrouvant la solitude familière de son quotidien, elle s’autorisa un moment de détente. Elle troqua ses habits formels contre des vêtements plus confortables et prépara un repas simple, mais nourrissant. Chaque geste, méthodique, l’aidait à recentrer ses pensées avant l’inévitable entrevue.

Lorsqu’elle se sentit prête, elle se présenta à l’imposante demeure d’Oriane. Fidèle à son habitude, elle ne s’embarrassa pas de préavis ou de faux-semblants. Ses mains enfouies dans les poches de son pantalon, elle laissa la sonnette retentir dans l’air, signalant son arrivée sans autre cérémonie. Elle attendit calmement qu’on vienne l’accueillir, l’air impassible, bien qu’en son for intérieur, elle se préparait aux joutes verbales et aux sous-entendus mordants qui caractérisaient toujours les échanges avec cette femme.
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