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If I were a rich girl ... [Terminé]

[HJ : Pas très fière de ce RP', en espérant que tu auras de quoi faire quand même ^^']

« J'AI SOIF ! Merde impossible de trouver un bar ici ou quoi ?! »


    Quelle déchéance, quel outrage, une souillure, une ignominie. C'était honteux ! Une telle attitude tellement grossière, si … disgracieuse, si vulgaire ! Que l'on aurait presque pu croire que ces mots ne venaient pas de la bouche de la si jolie et innoc… koff koff, pardon je disais donc innocente Ceres. Qui d'ailleurs, comme vous avez pu le comprendre était en train de déambuler dans les rues de Logue Town à la recherche d'un endroit où elle pourrait combler son besoin qui devenait assez urgent de boire. Et vous vous serez doutés aussi que la jeune marine ne désirait pas sur l'instant présent boire de l'eau. Non, la jeune femme était une dure. Une vraie de vrai ! L'eau c'était pour les femmelettes, ceux et celles qui chialaient à la première occasion. Elle, elle n'était pas de ce genre-là. Elle, elle descendait des verres de vodka cul sec et toujours avec une classe singulière. Ce qui faisait d'elle un être tout à fait paradoxal : un caractère de cochon dans un corps de femme qui était, fallait le dire, assez bien fourni, doublé par des caprices de petite princesse insupportable. Une vraie peste à qui on ne pouvait rien refuser quoi.

    Notre héroïne préférée arpentait donc les ruelles de la ville à la quête d'un bar et ce fut finalement qu'au bout d'une trentaine de minutes qu'elle finit enfin par trouver son bonheur dans un bâtiment à l'allure négligée d'où se dégageait une odeur nauséabonde. On y apercevait facilement quelques fenêtres fissurées par des jets de pierre ou autres objets provoquant le même genre d'impact. Ce qui donnait en passant un petit côté glauque à l'endroit qui n'était déjà pas très rassurant à la base, de par sa position, mais aussi par sa fréquentation qui se révélait de plus en plus suspecte. Il faut dire en fait que toute la rue était en réalité malfamée. Des pirates ? Sûrement. Heureusement pour elle, la demoiselle n'avait pas son uniforme ce jour-là. Car même si elle se révélait plutôt douée au corps à corps et même au maniement des armes blanches et à feu, seule dans un endroit aussi peuplé elle n'avait aucune chance. Et cela même si elle essayait de se servir de son influence en tant que représentante de la justice qu'il ne fallait surtout pas faire chier.

    Deux perspectives se dessinaient pour notre petite peste : la première étant la plus logique, se forcer à entrer dans le bar malgré sa fréquentation douteuse et son manque de raffinement évident afin d'éponger sa soif ; ou bien tout simplement rebrousser chemin afin de trouver cette fois-ci un établissement digne de ce nom à l'allure beaucoup plus correcte et aux clients plus élégants. Après une brève réflexion, elle se décida. Il était urgent de se désaltérer. Elle devait donc laisser ses caprices et ses manies de côté. Ceres franchit alors enfin la porte d'entrée pour directement se diriger vers le comptoir et s'asseoir de telle sorte à être en face du barman. Tournant furtivement la tête derrière elle afin de se donner une rapide idée des personnes qui se trouvaient là et du décor, la jeune femme put observer qu'ils étaient tous bien comme elle l'avait prévu : bestiales, brutes et rustiques. La marine regrettait presque son choix. C'est vrai, elle qui rêvait de gloire, d'argent et de prestige. Elle n'avait rien à faire dans ce genre d'endroit qui allait complètement à l'encontre de ses idéaux.

    Quant au décor, il ne valait pas mieux que celui visible de l'extérieur. Un matériel usé à priori, des recoins assez sales, des verres qui avaient pris la poussière, des fuites, des fissures, des murs délavés … Bref la totale dans une ambiance sinistre. Et à première vue malgré le fait que l'endroit était bondé, le propriétaire avait l'air d'avoir bien du mal à faire des bénéfices. Ou alors il consommait ce qu’il gagnait ailleurs que dans la gestion du bar. Quelle vie misérable. Ceres le dévisagea, il avait le visage malheureux et pâle, les traits durcis ainsi que le regard sombre et triste. Il n'avait pas l'air d'apprécier ce qu'était devenu son bâtiment mais continuait tout de même sans broncher de s'en occuper. Se raclant la gorge histoire de faire remarquer sa présence au vieil homme qui comprit aussitôt qu’une cliente s’impatientait derrière lui et finit enfin par venir vers elle d’un pas nonchalant.


« J’vous sers ? »


    Il avait une voix rauque et fatiguée provoquant presque involontairement un sentiment de pitié dans l’esprit de la jeune femme. Il avait tout de déplorable en même temps : lui, son commerce, sa vie toute entière n’était qu’un échec cuisant. Et tout ça pouvait facilement être déduit rien qu’en regardant l’expression qui figurait sur son visage décharné. Mais cela n’était pas suffisant pour provoquer un quelconque acte de gentillesse de la part de la jeune Marine. Non ; rien n’était assez pitoyable pour qu’elle devienne gentille. Elle n’était gentille que par intérêt. Seulement quand c’était bénéfique et surtout lucratif. A quoi bon être gentil si ce n’était pas que pour servir ses propres intérêts ? Finissant de le dévisager pour enfin comprendre ce qu’il venait de lui demander, la belle fut soulagée de comprendre qu’elle allait enfin pouvoir boire. Elle regarda brièvement les boissons qui se trouvaient sur les étagères derrière lui et décréta d’une petite voix cristalline mais claire ce qu’elle avait choisi.


« De la bière s’il vous plait. »


    Elle accompagna ses paroles d’un clin d’œil, avec le petit espoir de réussir à charmer le vieil homme pour ne pas avoir à payer. D’autant plus qu’elle n’était même pas sûre d’avoir sa bourse d’argent avec elle sur l’instant présent. Mais cela n’était pas un problème, dans le pire des cas, elle n’avait qu’à demander à quelqu’un de payer à sa place en échange d’un quelconque service que bien sûr elle ne rendrait pas. Ahlala, vicieuse comme elle était, on pouvait presque se demander ce qu’elle faisait dans la Marine, elle qui n’était absolument pas serviable, gentille et tout le reste. Posant son verre devant elle en ayant quand même pris soin de l’avoir essuyer au préalable, le barman murmura un rapide « voici » avant de retourner s’occuper de ses affaires, ne laissant même pas à la demoiselle le temps de le remercier, chose bien sûr qu’elle n’aurait pas fait de toute manière. Preuve qu’il était certainement désespéré et ne s’attendait même plus à ce qu’on lui accorde une quelconque attention.


Dernière édition par Ceres O. Fall le Ven 3 Fév 2012 - 5:55, édité 1 fois
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Bzz-bzz-ter. La mouche s'approchait de la tache de bière sur la table. Lentement, elle se posa à quelque pas du précieux breuvage. Elle fit quelques pas craintifs vers le liquide qui lui enivrait les sens. Plus que quelques centimètres et elle allait pouvoir boire. Le liquide nutritif allait la revigorer pour plusieurs jours assurément. Bzz-bzz-ter. Quelque chose ne va pas. L'air vibre. Quelque chose de terrible s'approche. Pas de temps à perdre, la mouche prend son envol. Il était temps, une main s'abat à l'endroit exact ou elle se trouvait un instant plus tôt. Maintenant qu'elle est dans les airs, elle peut apercevoir la gigantesque créature qui a tenté d'attenter à sa vie. Le misérable. Aucune bonté envers les êtes de son espèce. L'odeur de la bière était toujours là. Il allait s'agir de s'approcher discrètement. Elle n'allait tout de même pas se déclarer vaincue si facilement. Quoi qu'il en coute, elle allait vaincre.
Surtout que son adversaire n'était que Pludbus Céldéborde, le célébrissime marine, qui s'était posé là depuis déjà plusieurs jours et qui n'avait pas envie de se bouger le popotin, oh que non !

Que faisait-il là ? C'était une bonne question. Sévissant sur East Blue depuis quelque temps déjà, Pludbus avait récemment fait capoter plusieurs missions d'équipages de marine par sa seule présence à bord des navires de la justice. Un bilan lourd en homme et en matériel avait profondément énervé les officiers de ce coin du monde qui ne désirait plus qu'une seule chose : qu'il aille faire ses bêtises sur une autre mer. C'est alors que Pludbus avait demandé un congé. Il estimait qu'il avait bien travaillé dernièrement et qu'il souhaitait se reposer pendant une bonne semaine histoire de pouvoir revenir en forme plus tard. L'occasion était trop belle pour se débarrasser du vioc et ils acceptèrent. Pludbus parti, ils pouvaient à leur tour se reposer dans un monde qui ne verrait pas des catastrophes s'abattre par la seule présence d'un vieillard chiant à en mourir.

L'ex-Amiral en chef avait fait ses quartiers dans un bar sans prétention de Loguetown. Depuis plusieurs jours déjà, il squattait une alcôve nauséabonde vidant godet et chopes. Il avait du temps à perdre et on ne l’emmerdait pas. Il se reposait plutôt bien. Souvent, il devait se lever pour se vider. Ces moments étaient de véritable parcours de combattant vécu par le vieil homme complètement rouillé et, de plus, complètement alcoolisé par les litres de boissons ingurgités depuis le début de sa permission mérité. Ses premières intentions étaient de faire le point sur ce qu'il comptait faire à l'avenir. Cela ne faisait déjà pas mal de mois qu'il agissait avec efficacité sur East Blue. Il était temps d'aller voir ailleurs ou il serait plus utile. Pour la prochaine destination, North Blue ou South Blue ? Il avait le temps de décider. Puis, avec le temps, il avait oublié qu'il devait faire un choix. La boisson n'était pas d'une grande aide dans sa prise de décision. En même temps, Plud' qui prenait une décision, n'était jamais une bonne chose.

Quand la demoiselle était entrée, Plud' était occupé par deux activités ô combien intéressantes ! La première consistait à vouloir exterminer la mouche qui ne cessait de le déranger depuis un sacré bout de temps. Pas question qu'elle s'abreuve d'une seule goutte de bière. C'est sa bière ! Pludbus ne partage pas avec les mouches ! Pour l'instant, le match était nul. Les tentatives de la mouche s'étaient terminées par une attaque fulgurante de Pludbus malgré son taux d'alcoolémie. Sa deuxième activité consistait à soupçonner tous les clients de l'établissement des pires crimes possible et inimaginable rien qu'en regardant les visages ; Pludbus était bien placé pour voir l'entrée et une bonne partie de l'établissement. Pour l'instant, le bar accueillait trois tueurs en séries, cinq voleurs, un violeur et trois vendeurs de chèvres. C'est dire le niveau de l'établissement au niveau de la respectabilité. Il estimait que plusieurs des types devaient plonger dans d'étrange affaire. Bien évidemment, il ne comptait pas la mouche qui faisait partie de la catégorie très fermée des " mouches chiantes et méritant la mort des centaines de fois pour tenter de voler la sueur et le sang du travailleur qu'est la bière ».

bzz-bzz-ter. Elle était toujours là. Le petit bruit en sourdine dérangeait au plus haut point Pludbus. Il la voyait du coin de l'oeil. Elle squattait le plafond. Il pourrait se la faire maintenant, mais il était bien trop vieux et saoul pour faire le moindre mouvement. La fatigue tue tout.

Il se désintéressa, un instant, de la mouche lorsque la gamine entra dans l'établissement. Elle faisait sacrément tache au milieu de ce bar d'une piètre qualité. Pas bien vieille, la gamine d'une beauté et d'une élégance qui aurait rendu fou un Pludbus sobre alla demander à boire. Le Pludbus saoul étant bien plus dangereux que le Pludbus sobre, quand on ne parle pas de sa forme physique, la fille aurait dû y repenser à deux fois avant de s'être décidé à entrer dans le lieu sombre et nauséabond. Bien évidemment, tout le monde la fixait comme on fixe la seule oasis au milieu d'un désert. Chauffé au fer rouge, Pludbus observait ses concurrents dans la course au mec le plus chiant et lourd qui va tenter d'inviter la demoiselle. Un grand barbu semblait prêt à concourir. Deux autres avaient des têtes à ne pas avoir envie de demander gentiment. Pendant qu'elle avait son verre, le silence se fit et les murmures salaces se turent. La course était engagée. Qui ferait le premier pas ? Pludbus était invisible pour les autres consommateurs. On ne connaissait son existence que lorsqu'il traversait la salle pour aller se vidanger. Pour son adversaire, il n'y avait pas de lutte. Il était seul à concourir. Il semblait se délecter de la suite, mais le vieux renard qu'était Pludbus lui rasa l'herbe sur les pieds et intervint en premier.
D'une voix rauque d'où suintaient des relents d'alcool, Pludbus prononça ces mots emplis de sagesse.


Et ma p'tite damoiselle ! Voulez pas boire un pt'tiot verre 'vec le vieux loup d'mer que je suis ?! J'vous le paye !

Regard surpris, puis haineux du barbu. Il était battu, pour l'instant. Il était prêt à embrayer si Plud' avait un refus bien senti, ce qui n'aurait étonné personne quand on voyait le déchet qu'était Pludbus à ce moment-là. Son alcôve était l'endroit qui puait le plus de tout l'établissement, si ce n'était pas de tout Loguetown.

Bzz-bzz-ter. Une claque sur la table. Pludbus n'allait pas se laisser faire quand même ! La mouche repart dans un coin et attend son heure.
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« Et ma p'tite damoiselle ! Voulez pas boire un pt'tiot verre 'vec le vieux loup d'mer que je suis ?! J'vous le paye ! »


    Hein quoi ? Qui venait de lui parler ? C’était le vieil homme qu’elle avait remarqué quelques secondes plus tôt et qui semblait lutter contre une mouche tout en brassant de l’air ? Apparemment oui. Non seulement il lui parlait, mais plus précisément il l’invitait. Et qui dit inviter, dit payer. Et ça, ça tombait bien, même très bien pour la jeune femme qui n’avait pas un rond sur elle. Heureusement, même si son interlocuteur n’était pas très séduisant, il avait tout de même le mérite d’être naïf et assez vieux pour qu’elle puisse lui fausser compagnie par la suite sans risquer de se déranger ou quoi que ce soit d’autre et tout ça avec une extrême facilité. Même si on ne pouvait pas tellement appeler ça un mérite, ça arrangeait tout de même beaucoup Ceres.

    Tournant machinalement la tête vers lui comme pour lui faire comprendre qu’elle semblait intéressée, la marine en profita pour le dévisager de haut en bas. Et là, ce n’était même plus qu’une question de séduction, c’était… Indescriptible. Il n’y avait pas de mot pour décrire ce que Ceres voyait en face d’elle. Elle hésitait entre un hybride du troisième âge mi-homme mi-bête et une étrange créature Gollumesque venant d’un autre monde. Ce qui était sûr, c’est que l’homme avait l’air d’avoir du vécu derrière lui, et pas qu’un peu. Ridé à souhait, bossu comme jamais le vieillard avait fait son temps. Seuls ses yeux contrastaient avec son physique déplorable. En effet, il avait le regard vif, presque malicieux voir pervers. On l’aurait dit habité d’une flamme. Pourquoi pas la flamme de la vieillesse ?

    Dans tous les cas, on pouvait aisément remarquer que le nonagénaire n’en était plus à son premier verre. Il avait le regard qui déviait et avait du mal à s’exprimer. De plus, il empestait l’alcool à plusieurs mètres à la ronde. Et puis il ne devait certainement plus avoir toute sa tête pour tenter une approche avec la jeune marine qui devait certainement avoir l’âge d’être sa petite fille. Il espérait sérieusement avoir une chance ? Si la belle ne s’était pas retrouvé fauchée au moment présent elle n’aurait évidemment même pas pris le temps de poser les yeux sur lui. Comme quoi il avait du bol aujourd’hui. Remarquant qu’en même temps qu’il parlait l’ancêtre continuait son combat acharné contre la mouche qui de toute évidence ne tenait pas à le laisser tranquille lui et son verre ; Ceres ne put s’empêcher de trouver le tableau ridicule. Aussi vrai que la jeune femme était méchante, la situation était juste tellement grotesque qu’on pouvait presque la croire surréaliste.

    Pivotant le regard pour faire face à la pièce tout en gardant un œil sur le vieil homme qui persistait à vouloir faire fuir la mouche qui finit enfin par repartir, la jeune femme comprit vite qu’il n’était pas le seul qui avait eu pour objectif de la charmer. En effet, plusieurs regards étaient posés sur elle depuis à priori un bon moment sans qu’elle ne l’ait remarqué. Ce qui rendait les circonstances assez morbides et gênantes. Replaçant derrière son oreille d’un geste anodin une de ses mèches blanches qui venait de se rebeller sur son visage, la jeune femme laissa alors paraitre sur ce qui lui servait de face un léger sourire en coin. Amusée par ce qu’il se passait, elle se forçait presque à ne pas rire. En temps normal, Ceres aurait répondu à son locuteur par une phrase abrupt et remplie de mépris dans l’genre de : « Va loucher ailleurs le fossile, c’est plus de ton âge. ». Mais dans le cas présent elle était bien obligée d’être un minimum agréable si elle voulait ne pas avoir à s’enfuir comme une voleuse du bar.

« C’est bien gentil à vous mon p’tit vieux. Je veux bien. »


    Prononçant ses mots d’une voix sensuelle tout en prenant soin d’accompagner ses paroles de petits gestes charmeurs tel que le touché de cheveux typique des femmes ; Ceres, souriante comme jamais et hypocrite à souhait espérait à l’instant juste qu’il ait assez bu pour ne rien remarquer de sa fausse gentillesse. Bien qu’elle ait un talent certain pour le mensonge, il y avait de quoi s’interroger sur les raisons de la réponse positive de la jeune femme. Même l’homme qui se trouvait derrière elle et qui apparemment aurait voulu lui aussi l’aborder quelques instants plus tôt semblait surpris – pour ne pas dire choqué – de ce qu’elle venait de répondre. Il devait sûrement la prendre désormais pour une pauvre idiote ou bien pour une demoiselle complètement folle d’accepter une invitation d’un tel individu.

« Hmpf … »


    Soupirant tout en rebroussant chemin vers sa table, visiblement énervée du comportement de son adversaire invisible jusque-là ; il semblait aussi par ailleurs emplit d’un sentiment de déception. Mais il demeurait surtout choqué. Il y avait de quoi : il devait à coup sûr faire maximum la moitié de l’âge du vieux crouton. Il se tenait correctement et possédait aussi ce que l’on appelle des muscles. Ce qui lui donnait un bon point. Mais malheureusement pour lui, sa lenteur lui aura fait défaut. Ou était-ce juste peut-être sa confiance en lui trop importante qui lui aura joué un tour. Même si il était vrai que même Ceres n’avait elle-même pas vu venir le vieil homme. Si le vioque détenait autant d’argent que le culot qui venait de l’animer, la jeune marine pourrait presque envisager de se le coltiner un petit moment en guise de porte-monnaie ambulant. Avide d’argent, elle ne pouvait pas se permettre de laisser passer ce genre d’occasion.

« Je peux me permettre de vous demander votre nom quand même ? »


    Il était vrai que même si cette information lui importait peu, cela restait une question de forme. Il fallait qu’elle réussisse à instaurer un dialogue où il se sente à l’aise. La manipulation c’était ça. Un long dialogue où l’on force la personne par de petites phrases anodines à se dévoiler pour mieux la contrôler par la suite. Et s’il était réellement bourré, la tâche n’en serait que plus simple. De cette façon, Ceres espérait réussir à obtenir une quelconque information sur sa classe sociale, son salaire ou son métier. Bien qu’elle se devait de ne pas espérer beaucoup d’une personne qui fréquentait ce genre d’endroit, la belle gardait pourtant au fond d’elle une légère lueur d’espoir. Ça ne coutait rien de rêver de tomber sur un vieux riche au bord de la mort après tout. De toute façon, elle ne perdait rien. C’était toujours un verre de gagner !

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De derrière, la fille avait réellement tapé dans l'oeil de Pludbus. Son regard vers le bas trahissait ses pensées. De profil, il en avait presque bavé un litre. De face, seuls l'alcool et ses années de vieillesse l'avaient empêché de se lever d'un bon et de se frapper le poitrail tel un gorille. C'est ce qu'il aurait fait il y a quarante ans, voir moins, car le faire en étant Amiral en chef n'aurait pas été très professionnel. En même temps, « Pludbus » et « professionnel » sont antinomiques ! De nombreux autres adjectifs positifs l'étaient aussi, mais les répertorier est une tache bien trop longue et fastidieuse pour être réalisé. Ainsi, Plud' le lubrique lorgnait Ceres sans vergogne. Son regard était au-delà de toutes les bonnes moeurs. La différence d'âge ? Il n'en avait rien à faire. Tout le monde méritait de tomber follement amoureux de sa personnalité exceptionnelle et de son physique d'adonis. Il n'était pas difficile. Bon prince, il pouvait même se partager entre tous, c'est dire la bonté qui faisait marcher ce bonhomme. À ce moment-là, Pludbus était prêt à faire découvrir à la fille toutes les merveilles que pouvait offrir le monde et, du fait de son expérience, il pouvait tout offrir, évidemment. Pludbus connaissait tout ce qui pouvait servir. Il était tellement craint et respecté.

Enfin, tout ça, c'était si elle acceptait. À quelques pas, son adversaire direct serrait le poing. Se faire battre par le vieux Pludbus ? Impensable ! Bien que des milliers avaient connu cette amère expérience, le valeureux marine était toujours un terrifiant combattant. Afin de donner un peu plus de panache à sa victoire proche ; il ne doutait pas qu'il allait gagner, le doute n'était pas Plud' ; il adopta à un sourire satisfait au coin des lèvres tandis qu'il leva sa chope jusqu'à sa bouche. Il continua à le fixer d'en bas tout en buvant dans son verre d'un air négligé. Le verre reposé, il s'essuya délicatement la bouche d'un revers de main chassant un peu de mousse sur ses lèvres de vieux. Son air satisfait fit tiquer l'autre qui ne bougea pas ; il était éduqué. Dans ce genre de duel, s'abaisser à la violence n'était pas gentleman et Plud' était un valeureux gentleman. Qui aurait pu en douter ? La preuve, il invitait une jeune demoiselle à boire un verre sans aucune, ou presque, arrière pensé.

Elle accepta. Soupire de déception chez le barbu. Il venait de se faire damer le pion par deux fois plus vieux que lui. Il y avait là assez pour se remettre en question sur tout les points. L'avenir de cet homme allait peut-être devenir un enfer suite à ce cuisant échec. Le désespoir et la mort allaient devenir son quotidien. C'est ainsi que Pludbus était le plus terrifiant. Par son pouvoir de magnétisme et son charisme surhumain, il détruisait les destinées de quelques mots savamment dosés. Pludbus aurait pu se délecter du désespoir sur les traits de l'homme, mais il était tout entier subjugué par la fille.
Elle venait d'accepter ! Branle-bas de combat ! Tout le monde sur le pont ! La barre à gauche, toute ! Pludbus remua sur lui même afin de mieux se mettre. Il redressa un peu plus son dos et rangea à un peu sa table parsemée de cadavre de bouteilles. Il se passa une main dans ses cheveux sales afin de tenter de se faire une improbable coiffure de gentleman. Elle faisait vraiment un effet très surprenant sur le vieillard. Son comportement au naturel suffisait à le faire passer du rang d'homme libre à celui d'esclave de son élégance. Comme elle en rajoutait, Pludbus descendait encore plus bas. C'était indescriptible.

Ella alla à l'alcôve qu'occupait Pludbus et semblait hésiter à s'y installer. Seule une banquette en mauvais état pouvait servir de siège à la nouvelle venue. Le problème, c'est que Pludbus occupait déjà une bonne moitié de la banquette et s'y assoir signifiait se trouver à faible distance de Plud', mais aussi de son odeur rance et de ses mains baladeuses. Une position que personne n'enviait. On pouvait bien tenter de s'assoir sur une des chaises non loin, mais elles étaient en plus mauvais état que la banquette de la mort. La fille devait faire un choix cornélien. Elle posa une question banale, surement pour se donner le temps de réfléchir à la question. C'était le genre de question par lequel Pludbus pouvait répondre pendant des heures. Il aimait parler de lui, mais il restait toujours modeste.


Moi, ma petite demoiselle, j'suis une légende vivante des mers. J'suis connu dans le monde entier et mon nom a été cité par de nombreux gens au cours de ma carrière. J'suis un marine depuis plus de 70 ans ! On m'surnomme la terreur des océans, la bras armé de la justice ainsi qu'le pourfendeur de la piraterie. Y a que la mer qu'j'ai pas encore réussi à dompter. C'normal, c'mon amante ! Mais elle est partageuse, t'inquiète ! J'ai fait fuir les plus grands pirates d'mon temps et j'ai pacifié d'nombreuses terres. Encore aujourd'hui, on murmure mon nom avec crainte et respect. J'ai été Vice-Amiral, Amiral puis Amiral en Chef pendant quatre ans ! J'suis le célébrissime Pludbus Céldéborde ! Pludbus le valeureux ! Pludbus le victorieux ! Pludbus le généreux ! Pludbus l'indomptable ! Pludbus l'invincible ! On m'a donné beaucoup d'surnoms au cours d'ma carrière. On me disait aussi fougueux que l'étalon et fort que l'taureau. Je le suis encore ! Je te monterais bien !

Pour la peine, ça me fait penser à tellement de souvenirs que ça mérite bien une tournée. Barman ! Sors-moi ta meilleure eau-de-vie ! Ton meilleur tord-boyau ! C'est l'occaz' de s'envoyer en l'air !


Petit clin d’œil vicieux vers l'interpellé qui ne réagit pas. Dommage. Pludbus aurait aimé partager sa bonne humeur avec quelqu'un. Il ne regardait même pas en direction du barbu qui devait surement broyer du noir. Pludbus se poussa sur le côté afin de faire un peu de place sur la banquette, histoire d'inviter subtilement la demoiselle à prendre place au côté de Pludbus le lubrique.

Et sinon, ma jolie, à qui ai-je l'honneur de côtoyer la délicieuse existence ? Buvons à nous deux !

Voilà que Plud' se mettait à faire de « belles phrases », ce n'était pas bon signe. Au mieux, il allait se ridiculiser, une fois encore.
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    Maintenant qu’elle avait accepté, Ceres ne pouvait plus faire machine arrière. N’ayant pris en compte dans l’invitation du vieillard que la partie « je-ne-vais-pas-payer-et-il-peut-toujours-servir-de-porte-monnaie », elle n’avait pas du tout pensé au côté « je-risque-de-me-faire-chier-et-en-plus-il-est-bizarre » et maintenant qu’elle faisait face à l’étrange dilemme qu’était le « vais-je m’asseoir à côté de lui ou devrais-je fuir ? », elle pouvait nettement s’apercevoir qu’elle avait accepté bien trop vite. Sauf que maintenant il n’y avait plus de place pour les regrets. Seulement une place à côté du vieil homme. Et rien qu’en s’imaginant à seulement quelques centimètres de lui avait le don de provoquer des spasmes d’écœurement chez la jeune femme. Il était trop tard maintenant, elle devait inévitablement y passer. La seule chose qui restait à faire était de prier pour sa survie face à l’haleine pestilentielle qui émanait de ses lèvres pincées. Tout le défi se trouvait là, et pour la première fois depuis le début de son existence, Ceres doutait de sa réussite. Voyant bien que son nouvel adulateur la fixait comme pour montrer son impatience, la marine n’eut d’autres choix que de retenir sa respiration avant de prendre place sur la banquette.

    Ça y est. Elle y était. Elle était assise à côté de lui, malgré le fait qu’elle n’osait pas encore respirer par peur de vomir. Sauf que l’oxygène commençait à lui manquer et il ne lui restait désormais plus que quelques secondes avant l’asphyxie. Son sablier imaginaire venait de s’écouler et le moment tant redouté était arrivé. Ouvrant doucement la bouche, comme effrayée et tout en essayant de reprendre le rythme de sa respiration lentement, la belle pouvait heureusement constater que…Rien. Il y avait eu au final tellement d’appréhension que l’odeur paraissait moins terrible que ce qu’elle avait imaginé. Mais elle ne se faisait pas d’illusion, elle savait qu’après un petit moment restée assise là son odorat retrouverait ses facultés. Bref, nous en étions donc à la partie où Ceres voulait engager un dialogue avec l’ancêtre pour pouvoir ensuite le « manipuler » à sa guise après l’avoir décortiquer psychologiquement dans tous les sens. Question simple, lui demander son prénom.

    « Moi, ma petite demoiselle, j'suis une légende vivante des mers. J'suis connu dans le monde entier et mon nom a été cité par de nombreux gens au cours de ma carrière. J'suis un marine depuis plus de 70 ans ! On m'surnomme la terreur des océans, le bras armé de la justice ainsi qu'le pourfendeur de la piraterie. Y a que la mer qu'j'ai pas encore réussi à dompter. C'normal, c'mon amante ! Mais elle est partageuse, t'inquiète ! J'ai fait fuir les plus grands pirates d'mon temps et j'ai pacifié d'nombreuses terres. Encore aujourd'hui, on murmure mon nom avec crainte et respect. J'ai été Vice-Amiral, Amiral puis Amiral en Chef pendant quatre ans ! J'suis le célébrissime Pludbus Céldéborde ! Pludbus le valeureux ! Pludbus le victorieux ! Pludbus le généreux ! Pludbus l'indomptable ! Pludbus l'invincible ! On m'a donné beaucoup d'surnoms au cours d'ma carrière. On me disait aussi fougueux que l'étalon et fort que l'taureau. Je le suis encore ! Je te monterais bien !

    Pour la peine, ça me fait penser à tellement de souvenirs que ça mérite bien une tournée. Barman ! Sors-moi ta meilleure eau-de-vie ! Ton meilleur tord-boyau ! C'est l'occaz' de s'envoyer en l'air ! »


    La réponse en revanche n’était pas aussi simple que sa demande. Au final, elle n’avait même pas eu besoin de le forcer à se dévoiler. Soit il était totalement bourré, soit c’était par nature un gros bavard. La bouche entre-ouverte, inutile de vous décrire la surprise de la jeune femme à l’entente de ces mots. Il mentait certainement. Ça ne pouvait pas être LE Pludbus dont elle avait entendu parler, pas lui, pas ce tas de vieux os inutiles. C’était tout bonnement impossible, irréaliste et fantasque. Il était évident qu’il était en pleine crise de démence et que ce qu’il venait de dire n’était que pur mensonge. Dans la crise de l’âge, il ressentait sans doute le besoin de faire parler de lui pour ne pas rester dans l’ombre. Sauf que dans le cas où il disait la vérité, notre petite peste nationale laisserait filer une bien belle occasion de faire une ascension fulgurante dans la Marine sans passer par la case cursus honorum qu’elle envisageait au départ. Elle n’avait de plus rien à perdre à tenter de le croire à part du temps. Et le temps elle lui ferait rattraper en lui coupant un certain organe si ce qu’il disait s’avérait n’être que de la calomnie. Clignant abusivement des yeux telle une poupée, la jeune femme s’empressa de lui faire son plus beau sourire et tout en prenant un ton mielleux, elle demanda avec insistance :

    « Vraiment ? Vous êtes Pludbus Céldéborde ? En chair et en os ? Vous savez, je vous admire et vous respecte beaucoup. Je ne m’attendais absolument pas à tomber sur une… célébrité telle que vous. Sachez en tout cas que je suis honorée de vous rencontrer et que j’éprouve une grande admiration pour le chemin que vous avez parcouru. »


    S’il voulait jouer au jeu du plus menteur, Ceres l’emporterait haut la main. Même elle se trouvait convaincante. A tel point que si elle était à sa place, elle aurait gobé ses propres paroles. Il fallait qu’elle abatte la carte de la séduction, elle n’avait que ça pour le ranger de son côté. Durant sa puberté, elle avait consacré la majeure partie de son temps à s’entrainer pour atteindre son objectif. A savoir entrer dans le corps des marines et ensuite gravir les échelons jusqu’à atteindre le poste tant convoité d’Amiral en Chef. Et là, et seulement là, elle pourrait exécuter ses caprices les plus fous. Ayant conscience des faiblesses physiques qu’elle possédait en tant que femme, la demoiselle s’était pourtant décarcassée afin de combler ses lacunes de combattante. Elle restait malgré cela handicapée par sa taille et son corps frêle. Maitrisant cependant à la perfection diverses techniques du corps à corps grâce à une certaine souplesse ainsi qu’une agilité à en faire pâlir les obèses, la jeune femme se détachait surtout du lot par sa polyvalence dans le domaine des armes. Elle ne savait pas magner les armes blanches telle une experte mais elle avait au moins le mérite de bien se débrouiller un sabre à la main. Quant aux armes à feu, ce que l’on pouvait affirmer c’était que la belle savait viser. Et cela avec deux calibres différents, même si généralement elle n’en dégainait qu’un et par logique, le plus léger. En bref, ce qui était sûr c’est que si le vieil homme disait vrai en affirmait être celui qu’il était (vous m’suivez ?) il allait lui servir, et pas qu’un peu.

    « Et sinon, ma jolie, à qui ai-je l'honneur de côtoyer la délicieuse existence ? Buvons à nous deux ! »


    C’est vrai que contrairement au large discours aux allures narcissiques qu’il venait de faire sur lui-même, Ceres elle ne s’était pas encore prononcée sur son identité. Elle avait le choix entre en dire trop et pas assez. Soit elle venait de trouver le jackpot en la personne qu’était l’Amiral en Chef à le retraite soit elle faisait juste face à un homme lubrique aimant les récits d’aventures et dans ce cas-là elle prenait le risque de se dévoiler. C’était quitte ou double. Prenons le risque.

    « Ceres Opall Fall. Beaucoup de « all » hein ? Je sers dans les rangs de la Marine. Vous êtes un exemple pour moi. »


    Elle leva son verre vers celui qu'il tenait en main pour trinquer, tout en conservant un sourire niais. Là en revanche elle en faisait un peu trop.
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Plongée dans le tourbillon de l'alcoolisme et du fénéantisme, la lumière qu'était Ceres parvint à faire émerger Pludbus de l'état dans lequel il se trouvait. Ses idées se firent plus nettes ; la transition fut douloureuse du fait qu'il se trouvait dans cet état depuis quelques jours. Le demi-dieu supposé qui sommeille en Pludbus se réveilla sous les louanges d'une jeune marine à la langue si mielleuse. Cela faisait bien longtemps qu'on ne lui avait pas parlé ainsi. Des semaines ? Des mois ? Il ne s'en souvenait plus. La beuverie qu'il venait de faire avait eu l'utilité de faire table-raz sur de nombreuses informations et anecdotes dont l'utilité était au ras des pâquerettes, même selon l'avis de Pludbus. On lui avait craché dessus, on avait souillé son honneur et on avait menti sur ses hauts faits d'armes, mais les inconditionnelles fans de sa prestance et de carrière était toujours là. Le plus souvent, ceux qui se le prétendaient suaient à grosse goutte comme s'ils avaient très chaud, même en plein blizzard, suite à une déclaration de Plud' leur indiquant qu'ils souhaitaient les aider. Enfin, généralement, on ne lui sautait pas dessus en criant au fort qu'on adorait Pludbus.

Pour le coup, l'apparition de Ceres dans cette petite taverne semblait relever plus de l'apparition divine que de la simple rencontre au hasard. D'abord vu sous son aspect de jeune femme élégante à croquer, Pludbus pouvait maintenant la considérer comme une fan fidèle et passionner de son auguste Personne. Elle était là, à côté de lui, comme une fragile et fluette créature à côté de son patriarche d'un âge illustre. Son regard qui transpirait, le mensonge ne dévoilait à l'esprit de Plud' que des yeux émerveillés d'une fan éperdue de reconnaissance envers son idole de toujours. Il y avait de quoi redonner un coup de boost à la sage journée du vioc.

Pour conforter encore plus l'aspect divin de cette rencontre, il y avait le fait qu'elle était encore marine. Décidément, elle ne pouvait que devenir son élève. Lui, de par son expérience gargantuesque, ne pouvait qu'enseigner le meilleur à celle qui se disait fan de lui. Il ne pouvait en douter ! On ne faisait pas de telle déclaration à Pludbus par tromperie ! Ça aurait été sacrilège ! Le monde n'était pas assez pourri pour que les jeunes filles en arrivent à de telles monstruosités !
Levant sa chope qu'il avait bien pleine, il trinqua avec Ceres sans pouvoir la quitter des yeux, la bouche entrebâillée tout en dessinant un mince sourire légèrement paternaliste. Dans ses rêves les plus fous, il aurait adoré enseigner à la chair de sa chair. Or, les circonstances étaient que pour l'instant, cela n'était pas encore possible.


Buvant quelques gorgées de sa boisson histoire de s'humidifier le gosier tandis qu'il tentait une nouvelle fois d'écraser la mouche qui s'était posé sur sa jambe ; claquer cette dernière lui fit tanguer son verre qui en renversa un peu sur la table. Plud' n'y fit pas attention, preuve que Ceres était passé en premier dans son échelle des priorités. Bombant le torse en posant sa chope, il commença par son petit manège d'idole bienfaitrice.

Aaaah ! Une fan ! J'aurais pas cru ! Bah, j'suis 'hachement content d'te rencontrer ! 'se cachent beaucoup, mes fans. T'veux un autographe ? J'vais t'en faire un. Tu l'mérites ma zolie.

Pludbus fouilla dans ses poches à la recherche d'un bout de papier. Il ne trouva qu'un mouchoir dont la propreté pouvait être sérieusement remise en question. Par défaut, il le prit et l'étendit sur la table. Tout comme le support, il n'avait pas de quoi écrire. C'est alors que Pludbus mit son doigt dans son nez. Il le sortit recouverte de morve de vieux et entreprit d'écrire maladroitement quelque chose sur son mouchoir, puis de signer. Le résultat fut plutôt illisible et sacrément dégueulasse ; l'image exacte de ce que l'on pouvait penser de Pludbus. Il prit délicatement le poignet de Ceres de sa main gauche et la força presque à prendre le mouchoir sournoisement sali.


V'là. Porte le avec conviction ! J'sais que t'en seras fier !
Qu'est ce que peut faire pour toi ? C'quoi ton grade ?! J'ose même pas imaginer que tu puisses pas avoir un grade élevé alors qu't'es fan d'moi ! T'as surement un potentiel énorme pour être aussi lucide ! J'pense ! J'pourrais t'donner des conseils ! C'normal pour une idole telle qu'moi envers son fan. Demande c'que tu veux, j'peux tout le livrer ! 'vec moi, t'auras pris trois grades dans le mois ! Si c'n'est plus !


Voilà, c'était parti. Pludbus se transformait en instructeur bienfaiteur. Il n'était pas vraiment en état de donner des conseils avisés ; déjà que sobre, ils sont guère utiles. Dans le fond, ça s'agitait. Le perdu précédemment cité n'allait peut-être pas se laisser faire. Avec Pludbus dans le gaz, une éventuelle engueulade n'allait pas être reposante.
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    « Aaaah ! Une fan ! J'aurais pas cru ! Bah, j'suis 'hachement content d'te rencontrer ! 'se cachent beaucoup, mes fans. T'veux un autographe ? J'vais t'en faire un. Tu l'mérites ma zolie. »


    Maiiis ouiiii. Une fan, si il savait à quel point. Ceres pensait qu’elle avait beaucoup trop exagéré ses propos et qu’il risquait de remarquer sa fausse gentillesse. Mais non, contre toute attente il n’y avait pas fait attention. Il suffisait de lui chatouiller un peu l’égo pour qu’il s’enflamme. Ça allait être au final plus simple que ce qu’elle croyait. Du moins, jusqu’à qu’il décide de lui faire un autographe avec non pas du papier ordinaire mais un ancien torchon qui avait sans doute déjà servi plus d’une fois. Le mouchoir qui devait être à l’origine d’un blanc éclatant n’était plus qu’un amas de déjections nasales aux tons verdâtres. C’était écœurant, poisseux, horrible, détestable et malpropre. Mais le pire n’était pas là, le vieil homme nommé Pludbus visiblement à court d’un quelconque objet pour écrire se rabattit sur ce qui avait déjà maintes fois décoré son chiffon, à savoir son mucus nasale. Et d’un geste des plus disgracieux il planta son doigt dans les fins fonds d’une de ses narines avant d’y ressortir un liquide visqueux verdasse pour enfin tenter d’y griffonner un ensemble de lettres totalement illisibles. Et le cauchemar auquel assistait la jeune femme ne s’arrêtait pas là. Manifestement fier de son œuvre, l’ex-amiral en chef fit alors don de son présent à notre marine en lui mettant de force la chose dans les mains. Sidérée par l’acte que venait d’accomplir le vieillard l’esprit de Ceres fut prise d’une si violente envie de despotisme hargneux qu’elle crût pendant une fraction de seconde qu’elle allait lui ôter la vie sur le champ. Elle se sentait… Souillée. C’était dégoûtant et affligeant de savoir que la vulgarité et le manque d’hygiène de certains pouvait aller jusque-là. Prise de nausées, elle était désemparée. Elle ne pouvait oublier qu’en face d’elle se trouvait tout de même l’ex-amiral en chef.

    …L’ex. C’est vrai qu’il n’occupait plus son poste depuis un bout de temps et que pour trainer dans ce genre de taudis malfamé il ne devait plus valoir grand-chose. A moins qu’il ait gardé tout de même une place privilégiée au sein du QG de la Marine. Deux choix s’offraient à la jeune femme : le premier consistait à laisser se déchainer son sadisme et la frénésie dont elle pouvait faire preuve quand on l’irritait. Le second lui laissait supposer qu’elle devait se la jouer fine. Prendre sur elle et se dire que ce n’était que passager et qu’il pouvait lui apporter quelque chose professionnellement. Non, il lui restait une troisième option et certainement celle que notre femme tyran préférait. Étant du troisième âge, il ne possédait certainement plus aucune force physique exceptionnelle et son intellect avait l’air d’être arrivé à un point de non-retour au niveau de la perversité. Tenter un passage en force.

    « V'là. Porte-le avec conviction ! J'sais que t'en seras fier !
    Qu'est-ce que peut faire pour toi ? C'quoi ton grade ?! J'ose même pas imaginer que tu puisses pas avoir un grade élevé alors qu't'es fan d'moi ! T'as surement un potentiel énorme pour être aussi lucide ! J'pense ! J'pourrais t'donner des conseils ! C'normal pour une idole telle qu'moi envers son fan. Demande c'que tu veux, j'peux tout le livrer ! 'vec moi, t'auras pris trois grades dans le mois ! Si c'n'est plus ! »


    Comme elle le pensait, il ne semblait même pas conscient de ce qu’il faisait. Entièrement consacré sur lui-même et les quelques flatteries qu’il venait de recevoir, il devait se sentir désormais assigné d’une tâche valorisante. Tel un prophète, il pensait pouvoir guider la brebis qu’était Ceres à ses yeux dans le droit chemin qu’était celui de l’ambition. Déjà pleins de promesses qu’il n’était sans doute pas dans le mesure de pouvoir accomplir, on pouvait déjà le comparer à un de ces marchands qui vantait les mérites de ses produits. Sauf que la belle ne comptait aucunement prendre en compte ses conseils, elle n’en avait nullement besoin. Tout ce qu’elle désirait c’était une promotion. Rapide et fulgurante. Absente, perdue dans l’un des recoins de son cerveau en pleine face de songes, la belle dame en eut presque oublié l’affront qui venait d’être commis précédemment et l’objet – si l’on pouvait appeler le torchon précieusement salit comme ça – qui était enfouit dans la paume de ses mains. Glissant son bras derrière son dos afin de se débarrasser du présent qui lui avait si gentiment été offert par le centenaire pour qu’ensuite elle puisse s’essuyer comme elle pouvait la main sur le mur qui se trouvait dans son dos. Affichant clairement une expression de dégoût, Ceres ne pouvait s’empêcher de grimacer quand elle réalisait ce qu’elle avait eu en sa possession. Résistant comme elle pouvait à l’appel de la fuite, la marine tenta tant bien que mal de reporter son attention sur le vieil homme sénile.

    Agacée, Ceres ne pouvait plus tolérer la conduite rébarbative de son interlocuteur. Et son comportement mielleux ne faisait qu’aggraver la situation et le désir de bonne impression qui habitait le vieillard. D’un mouvement brutal, elle agrippa donc le col du vêtement que portait l’ancêtre afin d’avancer son frénétique corps bossu vers elle. Quand il fut à une distance convenable, la jeune femme put distinguer clairement la lueur qui animait le regard de l’homme qui ne comprenait visiblement rien à l’agressivité de son adulatrice. Et c’est tout en arborant un masque froid et sans réelle expression qu’elle prononça dans un murmure qu’elle relevait sur un même ton :

    « Écoute-moi bien l’ancêtre. Si tu veux que ça se passe entre nous, tu fais ce que je te dis. Et tu commences par ne plus essayer de me faire des cadeaux ou autre cochonnerie que tu sortiras de je ne sais où. Ce que j’ai besoin moi c’est de monter en grade. Je veux atteindre les sommets si tu vois c’que je veux dire. Et si tu peux faire quelque chose qui me permettrait d’atteindre mon but plus vite, fais-le. Mais tes conseils de vieillard narcissique tu les gardes. J’ai pas besoin de ça. Et je suppose que tu ne veux pas que ça se passe mal de toute façon. N’est-ce pas ? »

    Ceres avait dit tout ça très vite, elle ne tenait pas à ce que les gens qui se trouvaient à côté n’entendent un traite mot de ce qui venait de sortir de sa bouche. S’assurant qu’en même temps qu’elle le fixait sa poitrine colle le torse du vieil homme : il fallait qu’elle lui fasse un minimum d’effet en usant de ses atouts.
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Tiens, Ceres ne semblait pas très heureuse. Ce soudain changement d'humeur sur ses traits délicats ne passa pas inaperçu pour l'excellent observateur qu'était Pludbus. Était-ce de la déception ? Pludbus n'avait jamais provoqué ce genre de réaction chez ses fans. Peut-être qu'elle espérait plus ? Plud' réfléchit deux secondes à ce qu'une jeune demoiselle pouvait bien vouloir d'une légende vivante telle que lui. Il avait offert son expérience rigoureuse, ses sages conseils et la promesse implicite de l'aider à gravir les marches de la hiérarchie de la marine. Que voulait-elle de plus ?! Quiconque aurait été au comble du bonheur d'obtenir tout cela. Ça le dépassait. Il n'avait plus grand-chose à offrir à la belle. C'est alors qu'une lumière salace s'alluma dans le fond de ses yeux tandis que la vérité surement lui vint dans un éclair de génie lubrique. Elle voulait s'offrir son corps ! Évidemment ! Comment n'y avait-il pas pensé plus tôt ? Le monde s'arrachait son corps, il était tout naturel de laisser son véritable fan-club profiter de son inestimable expérience et de ses nombreux talents dans les plaisirs de chairs. D'un coup, Pludbus se mit à la regarder comme celle qui allait partager sa chambrette le temps d'une nuit, voir plus, pour la vie ! Il allait lui faire l'honneur de l'épouser ! Pludbus imaginait déjà son bonheur en apprenant sa demande. Ah ! Il se voyait rougir pendant sa demande tellement il peut être romantique. C'est que c'est un vrai gentleman, ce Pludbus, on ne l'a pas déjà dit ?
Pludbus enchaina deux clins d'œil coquins suivis d'un léchage de lèvre inférieure rapide histoire de lui dire un : « C'est bon pour moi ma grande, Plud' va te montrer le canon ! ». Il ne réagit pas beaucoup lorsqu'elle lui attrapa le col d'un mouvement brusque. Sa réaction très rapide en disait long sur ses désirs. Plud' le Sénile avait surement vu juste ! Il s'attendait à se faire déshabiller en un claquement de doigts par la bête qu'était devenu Ceres. Qu'importe les gens, il aurait tout accepté, tellement il était aux anges.

Sauf que cela ne se passa pas comme ça. Pludbus attendit trop longtemps les étreintes pulsionnelles. Ceres ne semblait pas si heureuse que ça. Son regard était devenu un masque glacial n'exprimant aucun amour, aucune pitié, pas même du respect ! Ou était sa fan ?! Son comportement était trop différent d'il y a quelques secondes pour que Pludbus puisse faire le lien. Seules les paroles de Ceres eurent la capacité de lui prendre conscience de l'horrible trahison ; il n'allait peut-être pas avoir de petite sauterie.

En plus de ce terrible constat, Plud' l'Incompris prit conscience du fait que la jeune Ceres l'avait mené en bateau depuis les premiers instants. Elle n’était pas une fan. Elle n'était pas folle de lui. Elle voulait juste le pouvoir et cela à n'importe quel prix. Franchement, mentir sur le fait qu'on a Pludbus pour idole, c'est inconcevable ! C'est un crime contre l'humanité ! Une hérésie ! Un crime de lèse-majestés ! Plud' n'était pas du genre à chercher des poux chez les marines, mais, quand on venait de trahir autant sa confiance, on ne pouvait que s'attirer ses foudres.
Sa réponse ne se fit pas attendre. Il glissa sa main dans son dos et sortit de sa ceinture son antique pétoire et le glissa juste sous le menton de Ceres. À l'image de son interlocutrice, Plud' arborait un visage plutôt froid. Même son regard lubrique s'était assombri. Il y avait des choses avec lesquelles on ne rigolait pas. D'une voix plutôt lente par rapport à d'habitude, Plud' la mit en garde.


J'aime vraiment pas qu'on se foute de ma gueule. Certains sont morts pour moins qu'ça. J'sais pas combien ça fait de temps que j'ai pas nettoyer mon arme ; j'sais même pas si j'y ai une balle. Par contre, je sais qu'à cette distance, ça fera un joli trou dans ta caboche ou autre part. Alors, le vieillard narcissique te demande. Tu veux tenter le diable ? J'ai toujours eu beaucoup de chance.

Le vieux décrocha son regard du visage de Ceres et zieuta vers le bas. Elle lui avait collé sa poitrine contre lui. Sentir cette chair si désirable tout près de lui ne pouvait qu'attirer son attention. Il devina des courbes fantastiques sous ses vêtements ; Plud' esquissa un sourire carnassier tandis que son regard regagna sa lubricité légendaire. Lentement, il fit glisser le canon de son pistolet vers le dessus de la poitrine de la jeune femme tandis qu'il reprit sa mise en garde.


J'ai encore assez d'pouvoir pour t'pourrir la vie. Un rang comme le tien, c'facile pour moi à te mettre une sale réputation sur le dos. Après le coup q'tu viens d'me faire. J'ai aucun scrupule à l'faire. Par contre, j'pourrais oublier certains passages si j'en vis quelques autres d'une façon … exceptionnelle. T'vois le genre ?

Double clin d'oeil salace suivi d'un léchage de lèvre inférieure. Le message était de nouveau transmis. La balle était dans le camp adverse. Prendre une balle ou pas, il fallait choisir, ou négocier. Pour Plud', la perspective d'une chaleureuse soirée n'était pas aussi perdue qu'il le croyait.
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    « J'aime vraiment pas qu'on se foute de ma gueule. Certains sont morts pour moins qu'ça. J'sais pas combien ça fait de temps que j'ai pas nettoyer mon arme ; j'sais même pas si j'y ai une balle. Par contre, je sais qu'à cette distance, ça fera un joli trou dans ta caboche ou autre part. Alors, le vieillard narcissique te demande. Tu veux tenter le diable ? J'ai toujours eu beaucoup de chance. »


    Quelle surprise. Mais pas forcément une mauvaise. Il était certain que ce n’était pas ce à quoi la jeune femme s’attendait, mais les choses prenaient une allure des plus divertissantes et des plus avantageuses pour Ceres. Visiblement, il n’avait pas pris en compte tous les facteurs possibles dans son jugement avant de prendre la décision qu’était celle de pointer une arme sur la marine. Pouvant clairement apercevoir un changement d’expression sur le visage du vieillard, qui prenait désormais un air beaucoup plus conséquent, le nonagénaire ne donnait plus du tout l’impression de n’être qu’un simple tas de rides naïf et sénile. De la chance qu’il racontait ? A d’autres ! Devenir ce qu’il était à l’heure actuelle, à savoir un pauvre retraité qui arpentait des endroits à l’allure funeste, et qui n’avait rien de mieux à faire que de faire du gringue à une femme qui avait l’âge d’être sa fille ? C’était ridicule. Sa situation, sa vie toute entière n’était qu’une scène de comédie où la foule le huerait constamment. Tout dans ce personnage relevait de la fiction, du fantasque, de l’insensé et du grotesque. Il ne suggérait ni la crainte, ni l’intimidation. Et il venait sans s'en rendre compte de s’ajouter au tableau de chasse de la marine ambitieuse, à son plus grand enthousiasme. Ayant fait très attention à ce qu’aucune de ses paroles ne parviennent aux oreilles des hommes qui observaient le tableau d'un œil distrait quelques minutes plus tôt, personne dans la pièce ne pouvait justifier la conduite brutale et soudaine de l’ex Amiral en Chef qui venait de se dérouler sous leurs yeux ébahis.

    « J'ai encore assez d'pouvoir pour t'pourrir la vie. Un rang comme le tien, c'facile pour moi à te mettre une sale réputation sur le dos. Après le coup q'tu viens d'me faire. J'ai aucun scrupule à l'faire. Par contre, j'pourrais oublier certains passages si j'en vis quelques autres d'une façon … exceptionnelle. T'vois le genre ? »


    Comme elle le pensait, le vieux Pludbus semblait convaincu qu’il venait de remporter la partie haut le membr…la main. Il devait certainement déjà avoir dans l’optique que Ceres allait se ranger et obéir docilement aux fantasmes du pervers lubrique pour la soirée. Accompagnant même ses mots d’un léchage de lèvre inférieure tandis qu’il pointait son calibre en direction de la poitrine de la marine, il restait tout bonnement répugnant. Se tenant encore assez proche de la tête sans doute déjà remplie d’obscénités en tout genre de l’ancêtre, elle était encore en capacité de murmurer sans que personne ne l’entende à l’exception de celui qui venait de la menacer. Et elle allait en profiter, bien évidemment. S’approchant encore un peu plus de sorte à ce que ses lèvres ne se trouvent plus qu’à quelques millimètres de l’oreille de Pludbus, la belle ne put s’empêcher de rire d’une petite voix cristalline.

    « Une sale réputation hein ? Et que diront les gens s’ils voyaient qu’un Marine aussi respecté que vous, venait de tuer une jeune et splendide jeune fille qui servait dans vos rangs sans aucune raison apparente ? Qui s'prendrait la plus mauvaise réputation ? »


    Surtout si elle se mettait à pimenter le tout. Esquissant un sourire mesquin à son égard, les circonstances dans lesquelles ils évoluaient ne représentait rien de plus qu’un jeu pour Ceres qui, amusée par ce qui se passait devant elle, se retenait comme elle pouvait de rire. Elle venait de prendre les commandes, tout était sous son contrôle. C’était son théâtre. Et la comédie qu’était celle du vieillard venait de se transformer en une scène dramatique où il détenait le mauvais rôle.
    Reculant afin de prendre une certaine distance vis-à-vis de son interlocuteur, ainsi que pour être visible de tous, Ceres se mit à camoufler son visage dans la paume de ses mains et tout en tremblotant de façon délibérée, elle se mit à prononcer d’une voix qu’elle maintenait entre deux hoquets de façon à être audible dans tout le bar :

    « Vous êtes si… Si méchant… Pointer une arme sur moi… Pour me forcer à… Pour me … ! »

    Sanglotant de plus belle, elle ne pouvait pas être plus convaincante. Mentir, jouer, rentrer dans la peau d’une autre représentaient tout ce qu’elle aimait faire : à savoir jouer avec les gens, jouer avec la scène, jouer avec sa vie. C’était tout juste jouissif. Mentir était un art et a fortiori quand c’était Ceres qui menait la danse. Effectuant des prouesses théâtrales, la belle en oubliait presque qu’un revolver demeurait braqué sur son décolleté.
    Relevant la tête d’un air fébrile, les yeux larmoyants ; elle était parfaite. Et désormais l’objectif que visait la marine à savoir réussir à ce que tous les regards de la salle soient dirigés vers eux, ou plutôt vers lui fut accompli. Une seule pensée devait à cet instant être ancrée dans leurs esprits : Pourquoi le vioque avait-il fait pleurer la jolie créature qui figurait à ses côtés ? Très fière de ce qu’elle venait d’exécuter, elle ne put s’empêcher d’être habitée par le désir d’exagérer davantage la chose. Maintenant qu’elle avait commencé autant finir en beauté. C’était son feu d’artifice : persuader le public de la culpabilité totale du vieil homme en leur offrant sur un plateau d'argent la réponse à la question qu’ils se posaient tous.

    « Je ne peux… C’est si … ! Me demander une telle chose … Si sale … Et me menacer … Je ne peux pas … Mais je ne veux pas mourir … Un chantage si cruel ! Je serai à jamais souillée … Oh s’il vous plait ! Ayez pitié … Je viens tout juste de commencer ma vie… Si j’avais su… Qu’une telle idée vous habitait ! Je n’aurai pas accepté ce verre truffée de pensées perverses… »

    Elle venait de s’exprimer d’une voix puissante et toujours en sanglotant. Désormais, plus personne ne pouvait ignorer les deux individus. Et les larmes qui coulaient sur ses joues rosées paraissaient tellement réelles qu’elles auraient convaincu n’importe qui que Ceres n’était qu’une pauvre victime face à la tyrannie d’un haut-gradée de la marine qui ne cherchait qu’à soulager ses idées salaces. Rajoutant même une petite touche de sensualité ! Quelle garce. Et quel talent. (en toute modestie !)
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Statistiquement, Pludbus tuait beaucoup plus de gens sans qu'il le sache que quand il voulait vraiment leur mort. Évidemment, ça lui arrivait d'éliminer la cible qu'il s'était donnée. Cela arrivait de plus en plus rarement. Le nombre de bavures était tout aussi grand et nombre de marines avaient été envoyé six pieds sous terre grâce au merveilleux Pludbus. Pour cette catégorie de victime, les circonstances s'expliquaient par une décision idiote de Plud' ou bien une balle malencontreusement perdue ; pas d'chance. De ce fait, Pludbus avait déjà une sale réputation au sein de la marine. Alors, tuer Ceres ou ne pas la tuer, cela n'allait rien changer à ce qu'on pensait de lui. Mais ! De toute façon, on s'en fichait totalement ! Pludbus est tellement mauvais et décrédibilisé en tout que ce n'est pas une petite mort d'une marine de rien du tout qui allait changer quelque chose à son immense carrière de déboire suffisante pour remplir les livres d'une bibliothèque.

Pludbus n'avait pas conscience de ces statistiques. C'était bien trop peu reluisant pour que ce soit associé à son illustre personne. Il admettait parfois quelques bourdes causées par un énervement soudain, il est vrai. Certains avaient le chic pour se faire un ennemi de Pludbus. Dans ces rares occasions, il s'avérait être un adversaire tenace et efficace. Ceres était la toute nouvelle membre du groupe des ennemis de Pludbus, cercle très fermé aux effectifs diminuant continuellement de taille en fonction des petites vengeances du vieillard. C'était un peu une mission divine. Ils étaient les seuls à ne pas le reconnaître comme ce qu'il était : un héros ! Ils devaient disparaître pour que le monde soit unanimement d'accord sur ce point.

Qu'on puisse se foutre de sa gueule, c'est une chose. Inacceptable, il est vrai, mais Ceres faisait pire que tout. Elle voulait le décrédibiliser aux yeux de tous. Pire ! Elle s'attaquait là où ça faisait mal. Lui, le gentleman de ses dames, elle l'accusait des pires ignominies ! Plud' n'était pas quelqu'un comme ça. Ces mensonges lançaient à la face des gens, il le ressentait comme une blessure dans sa chair. Comme si le mal corrompait son cœur pur et son âme d'ange. Il se sentait souillé. Voilà ! Elle se le prétendait, mais, lui, c'était réel ! Il ne pouvait la laisser faire. Il ne pouvait la laisser continuer. En plus, pendant ces quelques instants d'inattention, la mouche en avait profité pour aller boire une goutte de sa bière. C'était vraiment le drame.
Plud' était franchement pas content.

Il se leva et s'approcha lentement de Ceres qui faisait franchement pitié. Un autre type s'était levé et s'était tout aussi approché que Plud'. Le genre grand, chevelu avec un sourire sadique en coin. Niveau chevalier volant au secours de la demoiselle face au grand Dragon cracheur de f… au grand Dragon, on avait vu moins psychopathe. Sa tête lui disait quelque chose. Il l'associait à un avis de recherche ; ce ne devait pas être un tendre.


Un problème avec la relique ? J'm'en occupe et, après, tu t'occuperas de moi !
ah ah !


Cet homme n'inspirait pas confiance. Il devait surement être du genre lubrique et pervers ; tout ce que Pludbus détestait chez les hommes, lui, le preux gentleman. Fièrement, Pludbus mit son bras entre le suspect et Ceres comme s'il voulait la protéger – la blague ! - et entrouvrit ses vêtements, laissant voir un uniforme de la marine sale. Les yeux du type s'illuminèrent, malsains.

Un marine ? Ils n'arrêtent pas de se mettre sur mon chemin ! T'vas rejoindre celui de la dernière fois !


Ah ! Plud' venait de se souvenir. Il était recherché pour avoir peu amicalement égorgé un marine qui lui cherchait des noises après une bagarre de taverne. Tout le monde lui voulait la peau ; on fait gaffe aux copains dans le coin. Il s'était mis à l'ombre un moment. Ce n’était pas le genre à détaler à la première difficulté. Imbibé comme il était, Plud' n'avait pas beaucoup de chance de réussir à lui échapper. En bonne condition, il l'aurait neutralisé avec deux doigts, évidemment. Mais ? Il avait Ceres sous la main ! Au pire, elle l'occuperait, lui permettant de s'échapper. Le plan parfait ! Alors que l'autre sortait un couteau de sa poche, il bomba le torse et se tourna à moitié vers Ceres. Il voulut dire ses galons ; il vérifia un instant sa tenue actuelle avant de se lancer.


Lieutenant Céldéborde et soldat Ceres ! Tu es tombé dans notre piège ! On va t'écraser la face ! Soldat Ceres, occupez vous de lui ! C'vous qui avez dit qu'il était tellement faible qu'il ne ferait pas le poids deux secondes face à vous. J'vous attends … euh … à la sortie. Ramenez moi le colis bien emballer et pas trop endommager.

Avec l'expérience du fuyard et l'agilité de l'éléphant, Pludbus laissa Ceres face à face avec le meurtrier qui ne semblait pas tout avoir compris à part le fait qu'il devait trucider une jeune marine au premier regard insignifiant. Plud' comptait bien rester à l'arrière. Soit Cere mourrait et c'était bien fait pour elle – la vilaine – soit il capturait le type et c'était bien pour sa réputation. Tout bénef.
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    « Un problème avec la relique ? J'm'en occupe et, après, tu t'occuperas de moi ! ah ah ! »


    Et voici l’homme qui était censé venir à son secours. Soulignons le censé. Non pas que Ceres s’attendait à quelqu’un d’autre, elle envisageait en fait surtout d’être prise en pitié. Et non pas d’être prise tout court dans une fiction tout droit sortie des songes de l’individu. Les pensées malsaines qui envahissaient petit à petit l’esprit de son preux chevalier réussissaient d’ailleurs malheureusement à l’atteindre et à lui laisser une amère sensation de dégoût propre à ce sujet. Non pas que la marine ait fait vœu de chasteté, bien au contraire, la belle appréciait grandement les plaisirs charnels. Mais d’une manière qui lui était plutôt singulière. Elle voyait en cette attraction un moment intime qui se devait d’être plutôt sensuel et non pas bestial comme l’envisageait l’animal qui se tenait en face d’elle. Telle une danse où les sens des deux personnes s’éveillaient comme jamais, une danse où il n’y avait place que pour la délectation. Un moment unique où deux corps s’abandonnaient l’un à l’autre, poussés par une force invisible. Et lorsque que c’était bien fait, lorsque que deux personnes arrivaient le temps d’une nuit à ne former qu’un, alors la perfection était atteinte. Ce n’était pas juste une question de tirer son coup à cause d’hormones mal contrôlées. Elle qui venait tout juste plus ou moins de se sortir d’une sacrée merde, la voilà en train de s’engouffrer en plein dans un autre merdier. Bon, au moins elle n’avait plus un flingue pointé sur sa poitrine c’était une bonne chose. Mais elle risquait de voir bientôt un autre joujou pointer en sa direction, quelque chose de largement plus écœurant. De plus vulnérable aussi, un bon coup sur l’engin et tout l’bonhomme finissait sur le sol afin de savourer délicatement la douleur. N’ayant jamais été un homme dans une autre vie, Ceres aurait bien du mal à vous décrire à quoi ressemble le supplice auquel était soumis la race inférieur quand leurs précieux organe avait le malheur d’être touché de façon brusque. Mais rien qu’au son des cris stridents qui émanaient de leurs bouches tandis qu’ils roulaient joyeusement sur le plancher, la belle pouvait affirmer sans hésitation que c’était bel et bien extrêmement douloureux.

    « Un marine ? Ils n'arrêtent pas de se mettre sur mon chemin ! T'vas rejoindre celui de la dernière fois ! »


    Tel un superhéros qui arrachait ses vêtements dans un élan chevaleresque dévoilant de sublimes pectoraux prisonniers d’une combinaison en latex des plus ridicules, Pludbus, dans le peu de grâce qu’il possédait se plaça entre les deux individus comme si, je dis bien comme si, il tentait de protéger la jeune femme d’une quelconque menace. Arborant fièrement un uniforme de la marine aux allures salasses et plutôt marqué par le temps, le vieil homme qui au final n’était pas si sénile que ça, utilisa le peu de matière grise qui lui restait afin de se sortir de ce mauvais pas, mettant une fois de plus Ceres dans de beaux draps.

    « Lieutenant Céldéborde et soldat Ceres ! Tu es tombé dans notre piège ! On va t'écraser la face ! Soldat Ceres, occupez-vous de lui ! C'vous qui avez dit qu'il était tellement faible qu'il ne ferait pas le poids deux secondes face à vous. J'vous attends … euh … à la sortie. Ramenez-moi le colis bien emballé et pas trop endommagé. »


    « OH LE CON. » Il était sans doute inutile de dire à quel point la jeune femme fut surprise de ce retournement de situation. Le vioque s’en sortait de façon plutôt magistrale au final. Et maintenant qu’il était sorti du vieux bâtiment, n’ayant plus qu’à attendre la fin des festivités, Ceres réalisa à quel point elle venait de se foutre dans un merdier. Elle qui pensait profiter de cette suuuublime occasion pour gravir rapidement quelques échelons dans la marine. Son cursus honorum revenait alors d’actualité. Pas de place pour un quelconque piston. Le grade absolu à savoir celui d’amiral en chef allait finalement attendre. Ses caprices de supériorité aussi. De plus, le vieillard avait réussi à faire croire au p’tit criminel que Ceres s’était moquée de lui, heurtant inévitablement son égo. Et heurter l’égo d’un homme à la base déjà vaniteux n’envisageait rien de bon. La belle n’avait plus qu’à miser une fois de plus sur la carte de la séduction, avec un peu de savoir-faire et de chance – et surtout avec une forte libido – le gaillard se laisserait faire docilement. Du moins, elle l’espérait car à l’heure actuelle il ne lui restait que ça. Sachant pertinemment que s’attaquer à lui revenait à s’attaquer à la taverne entière, la meilleure solution restait de filer dès que l’occasion s’en présenterait.

    « Ahahahah ! Quelle blague… Ce vieux n’a rien trouvé d’autre pour s’faire la malle. C’est drôle hein ? Moi une marine. Ahah ! »


    Riant d’une voix enfantine qui se voulait totalement innocente, c’est tout en niant les propos de l’ex Amiral-en-chef que Ceres prit part aux côtés de l’homme qui semblait à priori sceptique. L’enlaçant de ses deux bras, se collant à son buste et toute souriant, en un instant la jeune femme réussit à faire monter d’un cran la température de la pièce, laissant à la gente masculine encore présente qu’une bouche pour saliver et des yeux reflétant une envie certaine de se trouver à la place de leurs camarade. Et ce dernier avait l’air d’avoir complètement noyé les précédentes paroles du vieillard, sortant de son esprit l’éventuelle trahison de la femme qui était totalement en train de le rendre dingue, l’empêchant de formuler une quelconque réponse.
    En un instant, le pied de la jeune femme se retrouva en plein dans l’entre-jambe du vicieux. Manque de bol, il était tellement absorbé par les formes et le parfum de Ceres, rêvant déjà d’une nuit à ses côtés qu’il ne vit pas le coup venir. Murmurant un « sale garce » à peine audible tellement ses bijoux de famille devenaient douloureux, il finit par s’agenouiller sur le sol, luttant pour ne pas crier comme une femmelette devant l’assemblée. Cette même assemblée qui était prête à tuer la marine.

    « A plus mon chou ! »


    Tapant un sprint de malade jusqu’à la porte qu’elle ouvrit à la volée, s’engouffrant à l’extérieur en manquant de trébucher, la brute qu’elle était finit sa course derrière le bâtiment, dans un coin cafardeux à l’abri des regards. Il n’y avait plus qu’à espérer qu’aucun des hommes qui se trouvaient là ne tenteraient de la suivre pour la buter ensuite. La respiration haletante, le pouls pressé comme si elle revenait d’un marathon, la jeune femme n’avait plus qu’à chercher du regard l’ancêtre.
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Je suis désolée, mais c'est comme ça. C'est terrible, je sais, mais la vie est ainsi faite, non ? Il y a des hauts. Il y a des bas. Parfois, la vie va beaucoup trop bas, six pieds sous terre, c'est la vie. C'est la mort. C'comme ça. Je lui avais pourtant dit de faire attention. Je lui ai donné beaucoup de conseils, mais elle n'en faisait qu'à sa tête. Tu connais les femmes non ? En plus, c'était une gamine immature et un peu hystérique. Elle était persuadée d'avoir raison. Je n'y pouvais rien ! Elle faisait un regard de chat battu, ça attendrirait n'importe qui. Même toi ! J'te jure ! J'ai lutté, mais je n'ai pu résister. Elles sont comme ça, les femmes, imprévisibles. Elles nous forcent la main et des tas de problèmes leur tombent dessus. On est censé réparer, mais parfois, ça casse. Des vraies œuvres de porcelaine. J'te jure. J'ai bien tenté de la sauver. Mais ça ne ressemblait plus à rien. J'ai dû battre en retraite. Une folie sauvage qui l'a pris. Ça était vraiment fou. Personne n'est préparé à ça. Mais bon, elles sont comme ça, après tout, on ne peut pas les changer. On les comprend un peu, ces demoiselles. Tu les comprends, toi, non ?

Le chien aboya deux fois, puis s'en alla.

Plud' était appuyé contre le mur extérieur de la taverne. Le soleil l'avait accueilli dans la douleur. Les jours passés dans l'obscurité de l'établissement n'étaient pas le traitement le plus agréable quand on sortait rapidement en plein soleil. Titubant sur ses jambes frêles, il s'était posé sur le côté. Là, il avait croisé le regard d'un chien. Il s'était mis à répéter le texte qu'il allait déballé à l'officier du coin pour expliquer la mort prématuré de la première classe Ceres. Il ne fallait surtout pas oublier d'avoir la larme aux yeux de ceux qui venaient de vivre une expérience tragique. Pire, une déchirure qui vous transformez un homme.
Le discours n'avait pas paru émouvoir l'auditoire canin. Soit, il ferait avec. De toute façon, il fallait attendre et constater le décès. Il attendit donc.

Il eut du bruit, une sorte d'affrontement, puis le son d'une bousculade. Paix à son âme. Pludbus se signa ; cela faisait bien longtemps qu'il ne l'avait fait, il se trompa de sens. Il vit une Ceres sortir et tourner à droite en lui tournant le dos. Elle trébucha à moitié sur le chien précédemment nommé. Il partit en courant dans une autre direction en aboyant piteusement. Chez le vieux, on sentit que quelque chose ne tournait pas rond. Le cadavre marchait, un peu pâle, certes, mais était bien vivant. Pourtant, elle n'aurait pas dû en réchapper. Vraiment problématique tout ça. Quelqu'un d'autre approchait. Un homme sortit par la même porte et tourna la tête vers Pludbus. Bigre ! Il faisait une tête à faire peur aux gosses ! Il y avait une sorte de flamme sanguinaire dans ses yeux, pas celle des romantiques, mais plutôt celle des psychopathes. Le marine reconnut un pote à l'autre assassin.
Autant dire que Pludbus sursauta de peur ! Il dégaina impulsivement son pistolet et descendit son vis-à-vis d'un tir en plein torse. Le coup de feu fit l'effet d'une bombe dans la rue. Les gens se mirent à courir dans tout les sens en se protégeant ridiculement la tête. La crapule s'écroula, mort ou non, Plud' ne put vérifier. Lui aussi s'était mis à courir. Oh, il ne fuyait pas le tireur, c'était lui, il fuyait les éventuels potes de celui qu'il venait de refroidir.

Hasard des chemins, il alla se planter dans un cul-de-sac où l'attendait un autre, mais sans sac. Ceres, l'ex-futur cadavre semblait l'attendre. Elle ne semblait pas forcément très joyeuse de voir Plud', mais c'était toujours mieux qu'une bande de dérangé. Hé hé, pauvre fille. En réalité, Plud' entendit le bruit des funestes pas de la bande de dérangé en question. Le vieillard eut le temps de se poser à côté de la marine avant que les crapules apparurent au coin de la ruelle. Le type recherché en tête. Le marine remarqua qu'il se tenait soigneusement l'entrejambe. Deux conclusions possibles à cette observation. Soit il était pris d'un désir plutôt vivace, soit Ceres lui avait fait un sale coup que même Plud' avait de la compassion pour le pauvre homme. Vu le tempérament de la marine, il opta pour la deuxième idée. Quoique, la première n'était pas forcément fausse.

Dans tous les cas, ils étaient foutus ! Il ne pouvait rien faire contre eux ! Surtout dans l'état qu'était le meneur ! Si Ceres s'en était sortie aussi piteusement, elle ne pourrait faire mieux à ce moment-là ! Au grands maux les grands remèdes ! Pludbus allait devoir faire l'étalage de tout son savoir en matière de combat désespéré. Couinant, il se planqua derrière Ceres, recroquevillé comme un gosse, tandis que les affreux s'approchaient en prenant un malin plaisir à faire durer le suspense. Au passage, il reluqua les formes de la marine. Son plan était infaillible, il passa à l'attaque. Il se releva brusquement et passa les bras sous ceux de Ceres, tentant de l'immobiliser. D'une voix de vieux vicelard qu'il n'utilisait pas souvent, il appâta les prédateurs.


J'l'ai choppé ! Allez-y ! Faites-lui sa fête à cette garce !
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    « J'l'ai choppé ! Allez-y ! Faites-lui sa fête à cette garce ! »

    Ni une ni deux, sans même qu’elle ne s’en aperçoive, le petit vieux se faufilait déjà derrière elle, l’utilisant comme un vulgaire bouclier. Ouais, c’était le mot juste, Pludbus se servait d’elle comme un putain de vulgaire bouclier. Et en plus de ça, dans la plus grande lâcheté dont il était capable, l’antiquité s’autorisait en plus à désigner Ceres comme étant une garce. Ce n’était pas faux, certes. Mais c’était franchement énervant pour la jeune marine qui assistait de manière impuissante à ce qui allait se passer. Parce que oui, l’ex amiral-en-chef venait de refaire fonctionner sa matière grise dans le seul but de sauver sa peau. Et seulement la sienne, évidemment. Quel égoïste ! S’attirer les bonnes grâces de ceux qui allaient certainement buter la marine pour pouvoir se sauver. N’avait-il donc aucune éthique ? Tout ça confirmait l’idée de départ de la jeune femme : les hommes, tous des animaux. Agrippant farouchement Ceres par les bras, l’empêchant de bouger le moindre petit doigt, le dénommé Céldéborde s’apprêtait à commettre l’irréparable. A savoir, jeter la petite dame dans la fausse aux lions et ce, la tête la première.
    Une bande de six gaillards venaient de se ramener, alertés par les cris du vieil homme qui désormais gémissait dans le dos de la femme. Visiblement mécontents, ils n’allaient pas y aller de main morte. Et ça, qu’elle soit une femme ou non. Ayant l’agaçante impression de passer d’une main à une autre comme un vulgaire jouet, Ceres venait une nouvelle fois de se faire attraper par ce qui ressemblait au leader de la bande.

    « C’est toi la garce qui a frappé not’ patron ! T’auras beau être bien gaulée tu t’en sortiras pas cette fois ! »

    En effet. Ceres ne pouvait plus jouer des ruses typiquement féminines dont elle avait le secret. Elle était piégée, à six contre un dans un cul-de-sac, elle n’avait tout simplement aucune chance de s’en sortir. Putain de vieillard ! Encore une fois, c’était sa faute. Et ce qui était sûr, c’est que si par le plus grand des miracles elle arrivait à s’en sortir indemne, le vieux lui, elle le buterait tout de suite après. Il n’existait aucune place pour ceux qui osaient se mettre en travers du chemin de Ceres, aucune. Même pas dans son lit, et ce qu’ils soient agréables à regarder ou pas. Sur ce point-là, la marine était sans scrupule. Elle ne pardonnait pas. Son ascension au sein du gouvernement comptait plus que tout à ses yeux, et pour arriver à son but, à savoir le sommet, elle était prête à sacrifier n’importe quoi, voir n’importe qui. Son envie de tout contrôler semblait plus forte que tout, plus forte que sa raison, plus forte qu’elle-même.
    Sauf que là, elle n’avait pas une minute pour y penser. Elle se faisait violemment bousculer contre le mur de l’auberge par l’un des six gugusses qui n’hésitait pas à employer toute sa force contre elle. Vraiment, les hommes de nos jours n’avaient plus aucune délicatesse. Et vu la tête qu’il affichait, il ne semblait pas réceptif pour une quelconque approche lascive. Et hop, ce qui devait arrivait arriva. Il venait de la frapper au visage sans même se retenir, déclenchant chez la jeune femme le goût amer du sang qui coulait dans sa bouche.

    « Connard ! Lâche-moi ! Bordel de merde toi et tes chiens vous n’avez rien de mieux à faire que de taper une femme ?! Chiens ! »

    Un autre coup. Les mots qui sortaient de ses lèvres ensanglantées étaient agressifs, bien trop apparemment pour l’homme qui ne contenait plus sa rage devant ses compagnons riant comme des bêtes. Ceres ne faisait même plus attention au vieillard qu’elle ne voyait même plus, tellement sa vision était obstruée par la carrure imposante de son agresseur. Elle avait beau se débattre, ses petits bras fragiles comme de la porcelaine ne valaient rien face au colosse qui la cognait sans vergogne.
    Crac. Le fracas retentissant de la mâchoire de la marine se fit entendre, suivit d’un hurlement de la part de cette dernière. Ça faisait mal. Très mal. Elle qui n’était pas habituée à se faire assener de coups au visage, venait d’être amplement servie pour toute une vie. Malheureusement pour elle, le calvaire n’était pas prêt de finir. Son assaillant venait de la jeter sauvagement sur le sol qui avait tout l’air d’avoir servi plusieurs fois de latrines pour animaux en tout genre tellement l’état semblait piteux. L’assenant de coups de pieds dans les côtes qu’elle encaissait avec une difficulté certaine. Non seulement la marine se sentait humiliée, mais en plus elle était franchement en rogne contre Pludbus et contre le connard qui n’hésitait plus du tout à se faire plaisir.

    « T’as eu ta dose j’espère maintenant héhé. C’est le patron qui sera content. »

    « Chien… ! » prononça-t-elle d’une petite voix à peine audible mais pourtant bien présente.

    « T’en redemandes en plus ?! »

    Comme quoi la fierté des hommes était pire que tout. Un petit coup entre les jambes et voilà où tout ça l’avait mené. Sur le sol, affalé comme un vulgaire cadavre tellement bien amochée qu’on ne la reconnaissait plus. Elle qui d’habitude faisait attention à son allure, ne ressemblait à rien. Ce n’était plus qu’une pauvre femme en détresse. Le spectacle devait être désolant, sur l’instant présent, elle se détestait.

    « Merde ! Des marines ! T’as d’la veine ! Venez on s’casse ! »

    Hein quoi ? Que qui ? Le balafré venait de cracher un mollard écœurant tout juste à côté d’elle avant de filer avec sa cavalerie. D’après ses derniers mots, des marines arrivaient, probablement alertés par le grabuge qui avait eu lieu quelques instants plus tôt dans l’établissement. La laissant là, elle, Ceres dans une condition affligeante. Elle se relevait maintenant tant bien que mal, s’appuyant comme elle pouvait sur le mur spectateur de son humiliation. Titubant telle une ivrogne sur le chemin qui la ramènerait jusqu’à chez elle, ne prêtant plus aucune attention aux décors qui l’entouraient – à savoir Pludbus dans le lot -, le cadavre qu’elle était désormais pouvait bel et bien apercevoir des marins qui s’agitaient dans le but de calmer une foule apeurée au loin. L’un d’eux tout proche s’arrêtait déjà près de la jeune femme, la soulevant par le bras comme pour l’aider à atteindre un lieu sûr.

    « Vous allez bien mademoiselle ? »

    Pire que son état : la pitié.

    « Je vais bien ! Lâche-moi merde j’suis pas encore morte ! »

    Aboyant avec hargne sur le jeune homme qui visiblement ne s’y attendait pas, ce fut avec un tiraillement que la belle disparût au loin, ne pensait plus qu’à panser ses plaies elle-même, dans le cocon qui lui servait de toit.


[HJ : Désolée si c'est mal écrit. Voilà ce qui clos le RP', si tu veux que je change quelque chose, n'hésite pas !]
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En un instant, le grand méchant pas beau agrippa Ceres et envoya valdinguer Plud » à terre. Il regarda les autres types qui lui jetèrent quelques regards indécis, mais le boss semblait plus se préoccuper de la fille que du vieux. Du coup, ils le laissèrent tranquille d'un commun accord.
Ah ! Il était sauvé ! C'était moins une ! Il y avait donc un dieu pour les gens dans le besoin ! Pludbus se releva difficilement en s'aidant des poubelles à côté. Il chuta au premier essai, mais il parvint au deuxième à se mettre sur ses jambes. Le soleil était haut dans le ciel. Il faisait bien beau et la chaleur était plutôt satisfaisante. Il avait encore du temps à se reposer après ce jour. Qu'allait-il faire ? Entrainer quelques hommes à la base ? Pourquoi pas. Avec ce temps, ce serait un peu comme des vacances. Soleil et boissons en entrainant de braves bonshommes, c'était plutôt sympa comme idée. Puis, il prendrait la mer sur un bateau afin de rejoindre d'autres iles, d'autres marines, d'autres aventures magnifiques et enrichissantes pour quiconque. Même actuellement, c'était une expérience plutôt enrichissante. Il s'en souviendra !
Ceres aussi.

Waouh ! Elle s'en prenait plein la gueule. Au fond de lui, il était un peu gêner, le Plud'. C'était quand même qu'une gamine. Elle ne méritait pas ça. Puis, il se souvenait de sa tromperie et la pitié s'envolait. Un sourire sadique passa furtivement sur son visage. Peut-être qu'il la laisserait pour morte et qu'il pourrait assouvir lui-même ses désirs de vengeance. On ne se moque pas de Plud » sans en payer le prix ! Tel était le message qu'il pourrait faire passer à tout ceux qui seraient tentés de profiter de sa gentillesse et de son expérience à des fins malhonnêtes. Toutefois, le lynchage s'arrêta bien vite alors que la marine commençait à boucler le secteur. Leurs agresseurs s'enfuirent, laissant Ceres en piteux état et un Plud » tout beau, tout fringant. La marine ne tarda pas à arriver. Aussitôt qu'il vit leurs uniformes, le vieillard s'exclama sur un ton alarmé.

Vite ! Vite ! Occupez-vous d'elle ! Elle est blessée ! Et chercher une bande de six types dans les parages ! Ils nous ont agressés ! Il y a l'assassin du marine dans le lot !

Les révélations étaient suffisamment importantes pour qu'une partie de la troupe se mette à la recherche du groupe de l'assassin tandis que le reste entourait les deux marines. Ils cherchèrent à s'occuper de Ceres, mais elle les rejeta brusquement et s'en alla sans demander son reste. Pauvre gosse quand même. À des marines incrédules, il donna des explications sommaires.


Elle s'est fait coincer par les malfrats. J'ai tenté de la sauver, j'en ai amoché un à côté de la taverne et j'allais en finir avec les autres, mais vous êtes intervenus. J'espère qu'elle n'a rien ! Pauvre fille. C'est vraiment terrible, ce qui lui est arrivé. Elle mérite les honneurs ! Voir une promotion !


Sur le coup, on félicita Pludbus, puis ce fut fini. Les marines partirent s'occuper de la populace et laissèrent Plud » retourner tranquillement chez lui.


Plus tard, il alla toquer à la porte de l'administration de la base, un dossier dans les mains. Il alla au premier bureau occupé, ouvrit le dossier et en sortit une feuille simple ou peu de choses étaient écrites dessus. Il donna le papier au type derrière le bureau en lui disant qu'il s'agissait du rapport pour la promotion de Ceres O. Fall. Il l'a lu brièvement, stoppa, fit les gros yeux, puis regarda incrédule Pludbus.


C'est une blague ?
J'ai l'air de faire des blagues ?
Mais … mais …
Vous ne me croyez pas ?! Testez et vous verrez ! Elle le mérite !

Puis Pludbus sortit en sifflotant avec le sentiment du devoir accompli.
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