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Black Holes and Revelations

-Bon sang, Red, magne-toi ! Toji n'a pas l'intention de t'attendre. L'appel des mers Bleus, tu saisis ? Alors saute à bord, que j'ai besoin de toi pour changer des pansements !

    Ledit Red accourt vers le Fenrir qui déjà, amorce sa descente vers Grand Line, un petit tas d'enveloppe sous le bras et l'air étrangement contrarié du type qui s'est fait déranger par une personne qui était tout sauf un plaisir de retrouver. Et rien que pour voir cette tête, Rachel est contente de se tenir par dessus le bastingage, faux dans une main, accrochée aux enfléchures de l'autre. Et elle sourit, en plus la bougre. Salem, tes craintes ont beau être devenues réalités à son sujet, ta petite fleur n'en reste pas moins épanouie.

    Direction les mers bleues.

    *****

    Quelque part, entre les Allods et la prochaine île de la quatrième voie, le Fenrir fait voile, fièrement, arborant le tout nouveau Dial géant, brillant au soleil, et fixé par les soins d'une rouquine effrayée à l'idée de mouiller son pelage. Heureuse de retrouver le pont, elle ; un peu moins d'avoir retrouvé la flotte. Ces fruits du démon... Rachel, elle, est heureuse d'avoir retrouvé le plancher des homme-poissons. Elle devait être une sirène dans une vie antérieure... Le roulis, y'a que ça de vrai. Un roulis, des voiles blanches, des ordres hurlés à tue-tête et un équipage de fiers marins heureux d'être menés par le Commodore Arashibourei. Mais sur la Dunette, la lieutenant à la faux ne peux profiter de ce petite paradis personnel plus longtemps. La raison? Un vacarme et une vibration qui fait vaciller son pied marin. Et ça venait des cabines des officiers. Un coup d’œil sur le pont. Toji n'a rien remarqué ou choisit de ne pas relever. Ce n'est donc pas lui qui se bat une énième fois avec son voleur de cigare de pingouin ninja. Lin reprend son souffle après une séance de torture à supporter l'écume à la proue du navire et le voyeur est bien à sa place sur la hune de la vigie. Notre poupée de porcelaine, les yeux de vair luisants se posant sur son bandage au bras, soupira. Elle sauta à bas du gaillard arrière et s'engouffra dans la cage de bois.

    Une allée de coursives plus tard, elle déboule dans le carré, là où vit le reste de l'équipage qui n'est pas de quart. Là où il joue, parle, mange, boit, et parfois, dort. Pas besoin de couchette pour un bon marin plein comme une outre. Elle ignore les deux hommes qui y boivent pour décompresser et se dirige vers les cabines des officiers. Et c'est là qu'elle retrouva Red. Allongé dans un hamac de fabrication Sea Wolf bien planqué dans sa cabine. A la dure. Il faisait semblant de dormir. Enfin, visiblement. Parce qu'avec les trois guss qui hurlaient à s'en défriser les gencives, on ne pouvait décemment pas dormir à poings fermés... Enfin, d'ordinaire. Elle fixa intensément le mur de l'autre côté duquel les bruits sourds martelaient toujours ses tympans. Puis elle dirigea son regard vert sur red, allongé et immobile comme un mort. A ce rythme là, il faudrait vite soigner les mecs. Pas vraiment qu'ils étaient dangereux, mais elle risquait d'être assez désagréable si elle devait les faire taire elle-même. Et Red serait une précaution supplémentaire.

    Dans un soupir, agacée par le boucan de l'autre côté, elle lui donna un coup de manche du bout de sa faux.

-Je sens que je vais bientôt avoir besoin de toi, la corneille.


Dernière édition par Blacrow L. Rachel le Jeu 28 Juin 2012 - 1:58, édité 3 fois
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    Règle cent dix sept du Cipher Pol, toujours avoir une excuse toute prête en cas de soucis. Bon évidemment, parfois, comme c'est préparé à l'avance, il arrive que l'excuse tombe un peu à coté., c'est le problème des réflexes conditionnés, c'est trop rapide.

    -Elle m'avait jurée qu'elle était majeure ! J'pouvais pas savoir !

    Red se redresse d'un bond dans son hamac et se mange aussitôt le front dans la poutre au dessus de lui. Ce qui le renvoie direct dans le hamac et lui fait lâcher ce qu'il tenait jusqu'alors dans sa main et l'envoie rouler sur le sol... Une sorte de boite en bois, une vieille boite en bois à la peinture défraichie qui heurte le sol dans un bruit creux et se fend sous le choc, laissant échapper une pièce qui part se perdre dans un coin sombre...

    -Ah putain de bois ! Chié, burnes ! Mais enfin, on a pas idée de faire irruption dans les cabines des gens comme ça sans prévenir. Imagines j'aurais été en train de me raser hein ? Ou de jouer avec une grenade ?

    Red se relève plus prudemment cette fois, massant son crane douloureux et lançant un regard furieux à une poutre qui s'en tamponne royalement. Il s'extirpe du hamac et pose les jambes au sol avant de tendre la main vers la boite toujours au sol. Cette boite que Rachel regarde si fixement qu'elle en quasiment arrêté de respirer.

    A l'intérieur de la boite brisée se trouve une figurine de bois, une louve grossièrement taillée dans un bout de bois flotté et juchée sur le mécanisme complexe d'une boite à musique. Brusquement débloqué par le départ de la pièce coincée à l'intérieur le ressort alimentant le cylindre de laiton se détend et se remet soudain en marche, laissant le carillon égrener quelques notes de musiques limpides dans la cabine, reprenant avec la précision et la rigueur implacable des automates la mélodie interrompue des années plus tôt comme s'il ne s'était rien passé entretemps. Une mélodie que l'agent Red et le lieutenant Rachel n'ont pas entendu depuis des années. De très longues années...


    -Hé, elle remarche à nouveau...Si je m'attendais. Je ne pensais plus jamais entendre cette musique...

    Un léger sourire sincère et nostalgique humanise un instant le visage du lieutenant pendant que la musique lui rappelle une autre époque. Sa main rafle prestement l'automate et son regard rejoint celui d'une Rachel toujours aussi raide qu'une statue, et qui le regarde fixement de ses terribles yeux verts orage ou se devinent une prise de conscience brutale et meurtrière.

    -Rachel ?

    Red baisse lentement les yeux vers la boite qui lance dans la pièce les dernières notes du morceau avant de relever la tête vers le visage froid de Rachel. Une horrible lueur de doute dans le regard et dans la voix.

    -Lou ?



Dernière édition par Red le Mer 13 Mar 2013 - 8:22, édité 2 fois
      Comment aurait-elle pu imaginer. Qu'une mélodie. Aussi simple. Aussi belle. Puisse à ce point.

      Tout faire basculer.

      Comment croire que quelques notes aussi délicates puissent être un gouffre sans fond. Comment comprendre qu'une toute petite boite en bois. Qu'une minuscule boite à musique. Puisse faire aussi mal qu'un coup de poing. Comment intégrer qu'un morceau de bois flotté. Taillé. Fusse la bascule vers le fond d'un précipice. Vertigineux.

      Face à elle, Red. Du moins, ce qu'elle considérait jusqu'à maintenant comme un lieutenant médecin de la marine. Des Sea Wolf. Il restait interdit. Il semblait comprendre quelque chose. Prendre conscience d'un élément capital. Décisif. Qui pourtant échappait encore à Rachel. Rachel droite. Rachel immobile, le regard fixe et incroyablement effrayant. Sans sa faux plantée dans le sol, elle aurait vacillé. Elle serait tombée. Physiquement. Car mentalement, son esprit était perdu dans des méandres trop profondes et trop noires pour pouvoir ne serait-ce que respirer. Elle avait le cœur au bord des lèvres. L'estomac retourné. Les poumons vides. Et pourtant, en dedans, elle sombrait. Plongée toute habillée dans une eau arctique. Glacée jusqu'au cou. Lui étreignant la gorge, lui ceignant la taille, lui enserrant la poitrine.

      Puis elle immergea. Très lentement. Il lui sembla que des heures s'étaient écoulées lorsque d'un coup sec, Red referma le mécanisme, masquant aux yeux verts perçants la statuette de loup taillée. La musique cessa et elle put enfin sortir la tête de l'eau. Une goulée d'air s'engouffra dans ses poumons sans qu'elle n'en donne l'ordre. Ses yeux se vrillèrent sur ceux de Red. Et comme elle entrouvrait les lèvres pour expulser un oxygène altéré un sanglot remonta dans sa gorge. C'est à travers des yeux brillants de larmes qu'elle vit à nouveau Red. Sous un autre jour. L’appelant par un prénom que plus personne ne connaissait. C'était une prise de conscience plus que violente.

      L'instant devait être insoutenable. La tension beaucoup trop forte. Rachel n'arrivait plus à respirer. Elle avait conscience de sa faux dans sa main, du visage embrumé du lieutenant et de la boite à musique dans sa main. Une goutte s'écrasa soudain sur le plancher des quartiers de Red. Et le visage de ce dernier apparaissait aux yeux de la faucheuse en double. Deux images de lui se superposant. Un médecin... ou un cuisinier ? Un marine... ou un pirate ? Un ami... ou un ennemi ? Car le doute n'était pas permis. Il s'agissait de la même personne.

      Notre faucheuse fit un pas en avant. Un pas lourd. Chargé d'émotions. Dans son dos tourbillonnaient des effluves ténébreuses. Des filaments d'ombres. Des parcelles de fumées. Des nuages de cendres. Et en l'épicentre de ce maelström, deux pierres de jade incandescentes fixaient Red avec une avidité démoniaque.

    -J'ai entendu dire que tu étais au gouvernement avant d'atterrir sur ce rafiot, Red...

      Le sous entendu était d'une épaisseur à couper au couteau. Et lors du second pas de la faucheuse dans sa direction, la menace était plus que palpable. On put clairement déceler le geste anodin d'une main qui se crispe sur une faux gigantesque. Geste qu'une silhouette encore informe semblait imiter derrière elle. Le visage de Rachel devenait méconnaissable. De peine et de tristesse, il devenait fureur et chaos. Et savoir si elle avait conscience de ce changement était une question à éviter.

    -Tu sais que c'est incompatible avec le souvenir que j'ai de toi... ? Et que le prénom utilisé vient de sceller ton cas ?
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      On dit que le destin aime les coups de putes. Y'a même un type qui en a fait une théorie au Cipher Pol, Murphy. Une théorie simple, si quelque chose peut tourner mal, alors ça finira forcément par arriver. Et ça ne loupe jamais...

      Comme maintenant. Ou l'ex agent Red se retrouve soudain confronté a un sale retour de bâton, en tête à tête avec une personne qu'il a surement sauvé autrefois. Même si d'aucuns diraient plutôt épargnée que sauver. Mais c'est moins bon pour les souvenirs...

      Red se revoit prés de dix ans plus tôt. Juste après le dernier épisode de la trilogie Tahar. Une mission qui l'avait laissé salement sur le carreau, tellement qu'on lui avait confié un boulot d'éclopé. Un boulot d'infiltration sur un bateau pirate qui possédait un second que le département scientifique voulait récupérer. Une sombre histoire de pouvoir à étudier... Mais tout ça n'est que détail, et Red ne se souvient pas des détails...
      Il y a un moment aussi que Red a appris à ne pas se souvenir des visages de ceux qu'il tue. Ceux qui s'en souviennent ont des remords, des regrets, et ça n'a jamais aidés à vivre vieux. Alors quand Red repense à l'équipage qu'il a infiltré a l'époque il ne se rappelle que de vagues silhouettes grises, des fantômes aux visage flous... Sauf un...Une plutôt, une enfant perdue au milieu des pirates, la môme du second. Une gamine aux yeux verts, Louve...

      Une gamine que le jeune agent Red de l'époque n'a pas pu liquider quand l'heure du dernier acte a sonné. Et qu'au lieu de balancer à la mer après lui avoir tranché la gorge il a assommé et jeté dans une chaloupe avec de l'eau et des vivres.
      Un geste d'humanité un peu vain alors qu'il préparait la destruction de tout ce qui constituait l'univers de la môme, père compris... Mais on fait avec ce qu'on a pour s'acheter un semblant de conscience...

      Red regarde Rachel et reconnait tout ce qu'il a loupé jusqu'ici, expressions, postures, tout ces indices criants qui aurait du le pousser à reconnaitre instantanément la môme quand il l'a croisé sur Citadelle...

      Et il repense à leur discussion d'il y a quelques semaines, juste après les Allods, quand il a surpris Rachel en train de permettre à une poignée d'enfants révos de se sortir en vie du carnage... Les mots exacts qu'il lui a dit alors qu'il repensait précisément à la seule gamine qu'il ait épargné dans sa carrière jonchée de cadavres "Tu sais que quand ils seront grand ils ne bruleront que de nous faire la peau ? Tu t'es préparée à ça ?".

      Et pour Red le môme vengeur est enfin la...

      -Tu sais que c'est incompatible avec le souvenir que j'ai de toi... ? Et que le prénom utilisé vient de sceller ton cas ?

      Il esquisse un sourire, se dire qu’après une multitude de travaux sales au service du gouvernement on peut se faire tuer pour les quelques actions éthiques qu'on a semé sur le chemin est plutôt marrant. Pour qui aime l'humour noir évidemment...

      -Ouais, bien sur que le je sais... Mais je suis content de te revoir Lou...



    Dernière édition par Red le Mer 13 Mar 2013 - 8:23, édité 1 fois
        La digue se brisa. Le barrage céda.

        Elle se sentait mal. Très mal. Nauséeuse. Vacillante sous une rafale de vent qui la giflait avec acharnement. Un vent que l'on pouvait appeler « prise de conscience ». Les larmes lui brulaient yeux et joues, comme venues des grands glaciers. La main qui étreignait le manche de sa faux la faisait souffrir comme elle était crispée à s'en faire blanchir les articulations. Mais cette douleur là était supportable. La douleur physique ne l'atteignait pas. Pas maintenant.

        Or, ce piège à loup qui vient de se refermer sournoisement sur son coeur... Rachel vacilla, incapable de tenir le regard du Lieutenant Médecin. Cette douleur là était inconnue. Indicible. Aspirée par le sol, attirée par ces marécages dans lesquels elle se tenait, elle perdait pied avec la réalité. Ainsi que toute notion du temps. Elle savait qu'elle venait de parler mais ne se souvenait plus de ces propres paroles, immergée entre souvenirs et douleur lancinante. Des images surtout. Du navire pirate sur lequel elle avait grandi et appris à aimer la mer. Où elle avait vécu tant de jours paisibles et heureux. Avec sa famille. Ses pères. Ils en faisaient tous partie, de sa famille. Même le cuisinier était rentré dans cette grande famille telle qu'elle la considérait. Cette grande famille qui doit l'observer depuis le territoire de la grande dame. Tous. Sauf l'être qui lui faisait actuellement face. Tous. Personne ne lui parlerait plus. Tous sauf lui. Ils ne l'appèleraient plus Louve. Jamais. Sauf lui.

      -Il n'y a plus de Louve... Ou de Lou... Il n'y a plus personne pour s'en souvenir !

        Ses appuis semblèrent se renforcer. Elle sembla grandir. Dans son dos, le tourbillon de filaments d'obscurité prit de l'ampleur. Cette silhouette macabre se renforça également. Devenant plus grande, Plus impressionnante et plus menaçante. Son bras, ou ce qui s'apparentait à un bras ligamenteux se tendit lentement vers le Lieutenant Visiblement prêt à s'en saisir. La silhouette sembla prendre tout l'espace et à l'instar de Red, aspirer la lumière de ses quartiers. Il en faudrait sûrement plus pour l'effrayer... Mais alors qu'elle se rapproche inexorablement, elle perd en consistance. S'effilochant de plus en plus, le bras disparaît lentement, puis c'est au tour de la forme de se dissiper lentement.
        Révélant une Rachel repliée sur elle-même. Debout, recroquevillée sur elle-même, tête basse, elle sanglote doucement.

      -En quelques mots... haaa... Tu viens de briser un deuil.

        Relevant la tête, sans pour autant le regard, elle arrive à esquisser un sourire plus triste qu'elle n'aurait jamais pensé faire un jour. Elle se détourne alors de lui, fièrement et s'éloigne de Red.

      -Tu m'excuseras...

        Et elle sortit en fermant la porte derrière elle, laissant ainsi Red en plan. Sûrement avec autant de questions qu'elle pouvait avoir à lui poser. Mais plus tard. D'abord se calmer. Sinon elle aurait été capable de l'étriper sur place avant d'avoir eu un semblant de réponse.

        Remontée sur le pont, elle était piteuse, faisait peine à voir. Et pour une fois, ce qui n'était pas coutume, elle n'en avait cure. Le pingouin la regarda passer avec un drôle de regard et entreprit de la suivre jusqu'au bastingage. Là, arès quelques secondes de silence, elle lui demanda de la laisser seule. Dans un sanglot. Ce qui le convainc d'obéir obligeamment. Laissant Rachel seule avec elle-même. Et le ciel trop bleu. Et le soleil trop fort. Jusqu'à ce que le soir tombe, elle avait dû prendre un coup de soleil ou deux.

        L'orbe gigantesque se rapprochait de plus en plus de l'horizon maintenant. Et cela faisait deux bonnes heures qu'elle avait arrêté de pleurer. Deux heures durant lesquelles le pingouin avait fait le filtre et empêché n'importe qui de s'approcher de cette partie du bastingage. Jusqu'alors.

      -Quelle était ta mission, à bord, il y a quelques années ?

        Dans son dos, Red. Il avait pu passer devant le pingouin gardien. Grand bien lui fasse. Elle voulait de toute manière lui parler...


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        -Tu ne devines pas ?

        Red se rapproche de Louve et s'assoit à proximité sur un des tonneaux de viande salée. Marrant d'ailleurs comme les choses se répètent. Si on changeait le bateau ils se retrouveraient assis au même endroit que la derniére fois qu'ils se sont causés pour de vrai...

        -Tu te souviens de l'histoire que te racontait ton père ? Celle des scientifiques fous et du gentil monsieur qui leur échappe ? Il te la racontait tout le temps. C'était sa meilleure, celle que tu préférais.

        Comme Rachel Red murmure sans bruit les premières paroles du conte du défunt second. Toujours les mêmes, aussi immuables que des conneries immuables comme le bruit des vagues ou l'eau qui mouille. Il était une fois un jeune garçon qui vivait dans une grande cage toute blanche...

        -Cette histoire c'était la sienne. L'histoire d'un type bouffé par les rouages du gouvernement mondial et qui croyait qu'il s'en était tiré. Un de plus... Si tu savais combien j'en ai croisé des comme lui. Persuadés qu'on les avait oubliés. Mais le Gouvernement n'oublie jamais. Et personne ne peut lui échapper éternellement Louve... Et il n'était personne...

        Red s’arrête avant de hausser les épaules. Difficile de regarder Rachel dans les yeux et de lui dire désolé chérie, rien de personnel mais c'était le boulot... L'agent Red se souvient trés bien de l'époque ou il aurait pu. Hausser les épaules, sourire et partir en se foutant de ceux qui restent vivants à coté des cadavres... Mais l'agent Red est mort...

        -Il a eu plus de temps que beaucoup, le temps de vivre, le temps de t'avoir. Et puis on l'a retrouvé. Et les types qui l'avaient perdus ont du réclamés haut et fort qu'on leur rende leur cobaye. Et comme c'était mon boulot c'est moi qu'on a envoyé.

        Red ne dit rien de ce qu'il vivait à ce moment la. La convalescence difficile après la raclée contre Tahar. La descente aux enfer dans la hiérarchie du Cipher Pol, les annotations sur son dossier personnel. Échec cuisant, agent vaincu, blessures incapacitantes... Lessivé l'agent Red, au fond du trou... Obligé de mendier les missions dont personne ne voulait pour tenter de remonter la pente et pas se faire balancer avec les inutiles... Mais tout ça Louve s'en fout, c'est son histoire qu'elle veut entendre, pas celle de l'agent...

        -Votre équipage allait être capturé par la marine. Je devais rester au coté de ton père et m'assurer qu'il survivrait au combat pour retourner dans son labo. Je devais aussi lui administrer un traitement qui le rendrait docile et noter ses réactions mais...

        La suite, Rachel est capable de la déduire toute seule. Le traitement qui loin d'adoucir les mœurs du second avait probablement réveillé les démons qu'il avait enfouis au fond de lui et provoqué le carnage. La mission de récupération qui n'était en fait que l'élimination d'une expérience ratée administré par un agent qu'on avait classé dans la catégorie pion sacrifiable...

        Red esquisse un geste vague de la main l'air de vouloir dire encore un truc, puis il s’arrête. Tout ce qu'il pourra dire maintenant aura l'air d'excuses. Et Red n'a pas envie de se chercher des prétextes pour éviter les sanctions, pas cette fois...



      Dernière édition par Red le Mer 15 Mai 2013 - 13:57, édité 2 fois
          Rachel avait finalement réussi à se calmer. Peut-être le Pingouin l'avait-il vu et avait ainsi permis à Red de s'approcher d'elle. Elle ne se retourna pas lorsqu'il s'approcha. Elle ne le regarda pas lorsqu'il s'assit non loin d'elle, sur un tonneau. Faux à côté d'elle, Rachel n'y touchait même pas. Lorsque Red entreprit de raconter, sa mâchoire se crispa une nouvelle fois. Ses doigts s’emmêlèrent dans ses cheveux. Mais elle écouta. En silence. Sans l'interrompre. Lorsqu'elle fermait les yeux, fatigués par la brûlure du soleil couchant -ou pour masquer des larmes qui menaçaient de nouveau-, elle revoyait défiler des images que les paroles du médecin prononçait. Laconiquement. Comme s'il avait passé les deux précédentes heures à les tourner, à les préparer. Des paroles évocatrices, douloureuses, un peu. Car elles remettaient en question tous les souvenirs qu'elle gardait de la nuit funeste où elle avait perdu ses pères. La nuit où son père avait massacré ses camarades. Que s'était-il véritablement passé ? Elle n'en sut rien encore. Mais elle ne put se résoudre à poser la question. Remettre tout à plat d'abord.

          A en croire Red, il était prévu que tous meurent. Elle comprise. Pourtant, il en fut autrement. A cause des médicaments ? A cause de la maladie naturelle ou des fameuses expériences sur ce
          « jeune garçon dans sa cage toute blanche ?

          Mais fallait-il croire Red ?

          Rachel tourna le visage vers lui. Vers ces tonneaux où il trônait. Sa position, son visage, sa morphologie... Lors de leur première vraie discussion, dans l'ancien local infirmier de Karl, Red, après lui avoir soigné sa jambe, lui avait avoué qu'ils s'étaient déjà rencontrés au hasard d'un tournant de leurs vies. Sur une île où la cabale courait. En compagnie de Pludbus Celdéborde et de Yukiji Alucard.. Mais ça n'était pas cette image de lui qu'elle avait vu alors. C'était un souvenir bien plus lointain qui cognait alors pour se faire entendre. Elle ne l'avait pas écouté. Et préféré entendre la version du « on s'est déjà rencontré par hasard avant ».
          Mais ça n'empêchait pas de voir qu'il s'en voulait. Enfin, s'en vouloir était peut-être un bien grand mot. Un travail est un travail. Pourtant une question restera en suspens. Pourquoi Rachel, envers et contre tout, se tenait-elle debout face à lui et ne reposait pas avec Davy comme tous ses pères ? Lentement, jaugeant Red du regard pour essayer d'entrevoir une réponse plausible, elle se retourne vers lui. Il semble vouloir ajouter quelque chose. Mais ne le fait pas. Pourquoi donc ? Veux-tu que la justice te saisisse ? Que Rachel prononce la sentence ? Pendant une seconde, le regard de Rachel redevient inexpressif comme elle l'est d'ordinaire pour diriger l'équipage.

          Oh oui, elle lui en veut. Il lui manque des réponses, mais les faits sont là et les révélations trop fraiches pour pouvoir être acceptées si facilement. Elle le voudrait, pourtant. Elle a envie de se jeter dans ses bras comme elle aurait pu le faire autrefois. Comme une petite fille. Heureuse de découvrir qu'un de ses pères n'est finalement pas mort. Mais pas moyen. Elle n'y arrive pas.

          Sentence alors ?

          Rachel saisit sa faux derrière elle et toise Red. Son visage est horriblement neutre. C'est à peine si un sourire ne se dessine pas sur ses lèvres, comme un jour normal en somme. Pour les détails, elle verrait un autre jour.

        -Un détail Red, ou quel que soit ton vrai nom. Ne m'appelle plus Louve. Ce nom est réservé à un passé où ceux qui l'employaient sont morts. Où ceux qui l'employaient m'aimaient.

          D'une cruauté assourdissante. Même à ses propres oreilles. Elle avait pu épargner des jeunes enfants sur l'île volante de Yasmeen... Et si Louve se rebellait bec et ongles contre cette attitude, lacérant le cœur de Rachel, notre faucheuse n'allait pas épargner Red.

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          Cette absence de réaction est peut être encore pire que la colère et la haine que Red s’apprêtait à prendre dans la gueule. C'est une condamnation, l'enterrement de cette absolution à deux berrys qu'il s'est payé autrefois en sauvant la môme de la mort... La fin de tout ces moments à se regarder dans une glace en se disant "Je ne suis pas vraiment une ordure, j'ai fait des trucs bien"

          Conneries !

          Au fond de lui Red sait bien qu'il a toujours méprisé cordialement les crétins bien pensants persuadés qu'il existe une sorte de putain de jauge morale omnisciente qui monte et descend en fonction de ce que l'on fait. Bordel, c'est quand même pas pour sauver son âme immortelle à la con qu'il a sorti la môme de son cercueil... Et c'est pas non plus pour la regarder disparaitre à peine retrouvé qu'il est sorti sur le pont lui parler...

          -Moi je ne suis pas mort Louve. Et toi non plus !

          Red se fait presque agressif. Si elle ne vide pas sa colère maintenant elle ne lui pardonnera jamais. Du moins c'est ce que dise en gros les bases de psycho dont il se rappelle. Il faut qu'elle crache la haine qu'elle ressent une bonne fois pour toute pour pouvoir appréhender le reste... Pour pouvoir se rappeler qu'elle a vécu la même situation que l'agent il n'y a que quelques jours. Et qu'elle a fait le même choix...

          -Je vais pas te dire que je ne t'ai pas menti. Évidemment que je l'ai fait. Oui j'étais un agent du Cipher Pol en mission. Oui je bossait pour le gouvernement et je me foutais éperdument de cette bande de pirates miteux... Tu veux que je te dise quoi ? Que je suis désolé ? Que je m'en veux de la mort de ton père ? Que maintenant que je te connais je voudrais pouvoir revenir en arrière pour éviter tout ça ? Conneries ! Tu sais aussi bien que moi que si c'était possible je referais exactement la même chose. Que je me retrouverais à filer une nouvelle fois à ton père ce traitement qui l'a rendu dingue. Qu'il recommencerait à tuer tout le monde à bord... Et que je serais encore obligé de le liquider pour te sauver la peau ! Tu t'en souviens pas de ça ? Tu crois vraiment que ça faisait partie de mes ordres ?

          Red tend le bras vers Rachel comme s'il allait la saisir pour la secouer. Et comme avant il s’interrompt avant de la toucher...

          -Louve ?



        Dernière édition par Red le Dim 19 Aoû 2012 - 10:41, édité 1 fois
          -LA FERME !!!

            Lorsque Red laisse tomber l'ancien prénom de Rachel comme une prière, la jeune fille toute tremblante à cause de la tirade du médecin éclate et rue comme un animal acculé dans sa cage. D'un large mouvement de bras, elle repousse l'ex-agent, devenu Lieutenant. Et dans le même temps, La silhouette d'ombre et de volutes jaillit de nouveau dans le dos de la faucheuse. Plus matérielle qu'elle ne l'avait jamais été. Plus grande qu'elle ne l'avait jamais été. Plus menaçante qu'elle ne l'avait jamais été. Et au centre de la boule de ténèbres qui se voulait représenter une tête, deux orbes de Jade fixaient Red avec une Avidité visible.

            Mais Rachel n'en a pas conscience. Elle n'en a jamais eu conscience. Tout ce qu'elle sait, c'est que ses larmes bouillonnantes en elle ne peuvent plus sortir que par le biais de la colère. Tout ce qu'elle voit, c'est Red et tout ce qu'il représente actuellement pour elle. Et ce qu'elle vient d'entendre n'aide en rien à la calmer. Comme en témoigne l'ombre de la Mort, encapuchonnée, dans son dos.

          -Tout ce que je veux c'est que tu la ferme ! Je ne veux rien entendre de plus ! Pas pour l'heure du moins. Tu as conscience de ce que tu es en train de me dire ? Que j'aurais dû crever ! Que j'aurais du y passer avec tous les autres ! Mais qu'est-ce que tu me dis aussi ? Que c'est toi qui m'a sauvé ! Que c'est toi qui m'a sauvé ? Aurais-je mal compris ? C'est pas toi qui les a tous tués ? Par des médicaments, peut-être, mais c'est de ton fait, de celui du gouvernement. Mais admettons, tu m'as sauvée. Tout ça pour quoi ? Pour que je me fasse repêcher par un putain de commerçant à l'âme aussi noire que cupide !

            Rachel arrache soudain les boutons qui maintiennent sa veste de marine en place, laissant entrevoir un corps de porcelaine frêle, contrastant avec ses dessous noirs. Sur sa peau blanche, elle pointe de sa main libre des tâches qui n'ont rien de naturelles. Des tâches auburn, des endroits où la peau est distendue.

          -Tu ne savais pas qui m'avait repêché, hein, avoue ! J'ai vécu un enfer de sel et de chaleur pendant deux ans, Red ! Cette marque là, c'est une balle de mousquet qui a percé mon épaule. Cette cicatrice, c'est celle d'un plomb qui a déchiré le poumon d'une pauvre cible humaine ! D'une pauvre gamine : Moi ! En deux ans, j'ai eu le loisir d'implorer la Dame de m'emporter. Et si elle a eu des dizaines d'occasions, elle m'a laissé endurer ces supplices ! Et tu viens me dire que tu m'as sauvé ?!

            Malgré tous ses efforts, elle n'arrive plus à lui crier dessus. elle ne veut plus lui crier dessus. Régulièrement, un sanglot soulève ses épaules. Et chaque fois qu'elle essaie de lever un doigt accusateur vers lui, son bras retombe mollement à son côté. Des larmes perlèrent à ses paupières. Une nouvelle fois, la figure fantomatique dans son dos perd en forme.

          -Et pourtant j'arrive pas à t'en vouloir. J'ai dans la tête une saleté de Louve qui est trop heureuse de te revoir. (Elle se martèle soudain le crâne de son poing rageur) Une gamine encore innocente qui te prend pour son sauveur. (Elle essuie une larme avant qu'elle ne coule et remet en place une mèche de cheveux). Je ne sais pas quoi penser ou ressentir. Où crier est encore le choix le plus simple.

            Car elle arrivait à imaginer la logique de Red. On lui avait demandé de faire un besogne, peut-être pas très noble, mais qui aurait de toute façon finie dans les pattes d'un autre si ce n'était pas les siennes. Comme un bon petit gars du gouvernement, il avait accepté et fait son boulot, qui s'avéra détruire le navire. Et à l'en croire, car elle voulait le croire maintenant, il l'avait fait échapper au massacre. Et c'était aujourd'hui grâce à lui qu'elle était encore en vie et ce en dépit des épreuves qu'elle avait dû traverser. Sans lui, la vérité... c'est qu'elle serait morte.

          -Et pour la dernière fois, Louve n'est plus qu'une lettre dans mon nom. Ne l'utilises plus devant moi.
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            -Hey Rachel, si t'aimais pas la plaisanterie... Fallait pas t'engager...

            Que dire d'autre ? A part sortir la plus vieille blague de la marine d'élite. Celle qu'on sort quand il ne reste plus grand monde pour rigoler ou quand on est devant une mission suicidaire et qu'on se prépare à y aller gaiement et la tête haute. Celle qu'on sort à la jeune recrue quand on a envie de lui dire "hey, t'es en vie non ? Alors profite, t'auras toujours le temps de chialer quand tu seras mort..."

            Et puis merde quoi. Le coup des souffrances c'est pas à Red qu'il faut le faire. La spéciale tout ce qui ne vous tue pas vous rend plus fort il connait bien et n'a pas attendu la naissance de Rachel pour en avoir sa part. Et il connait aussi ce moment ou on se dit que finalement ce serait mieux de baisser les bras et de se laisser aller, ou on se met à trouver à l'inéluctabilité de la mort un coté si attirant, si franchement définitif...

            Tu parles... Red se souvient même du moment ou il a lâché prise et s'est fait descendre... Alors les tracas de la Louve il connait... Mais c'est toujours pareil, c'est pas de ses problèmes à lui qu'on est censé causer...

            A la place il est plutôt temps de passer à ce qui l'a sauvé lui...


            -Mais si tu as des regrets, je peux m'en occuper tout de suite...

            Comme à son habitude la lame apparait dans la main de l'ex agent sans aucun geste avant coureur, mieux qu'un tour de passe passe. Une seconde il n'y a rien et l'instant d’après la longue pointe d'acier dont il ne se sépare jamais est dans sa main...

            -Alors ? Regarde moi bien droit dans les yeux, et dis moi en face que si tu pouvais tu choisirais de mourir la bas plutôt que de souffrir pour vivre ?

            De toute façon Red connait la réponse. Parce qu'en bon agent il a lu le dossier de tous les officiers à bord. Et qu'il a lu le rapport de Salem sur l'ado qu'il a trouvé un jour sur cette ile de pirate. Et que personne ne se sort de ce genre d'enfance sans un bon instinct de survie jumelé a une sacré envie de vivre quelle qu'en soit le prix. Il faudrait juste qu'elle s'en rende compte...

            -Alors Rachel ? Maintenant qu'est ce qu'on fait ?
            -Mais si tu as des regrets, je peux m'en occuper tout de suite...

              Bobom...

              L'instant se fige et l'atmosphère semble se solidifier autour des deux lieutenants. Une tension réelle, palpable, comme il n'y en avait jamais eu de similaire, nait instantanément entre eux-deux. Elle croit rêver, inventer les paroles qu'elle vient d'entendre. Pourtant, c'est un regard dur et empli de détermination qu'il lui renvoie. Et ce n'est pas le couteau qui jaillit entre ses doigts qui viendrait prouver le contraire. Elle a très bien entendu son injonction et il sait également ce que cela implique. Rachel fixe la lame du couteau pendant un instant et croit y lire une soif inextinguible.

              Alors lorsqu'elle relève le regard pour braquer deux feux de jade incandescents sur Red, quitte à la fusiller du regard, la tension elle-même se dit qu'il est temps de mettre les voiles. Car pour notre faucheuse, il n'y a plus que Red qui existe en cet instant fatidique. Red, ce qu'il représente ainsi que sa fidèle faux qui se rapproche de son flanc aussi menaçante que le ton de voix qu'elle prend soudain pour lui répondre.


              Bobom...

            -Pardon... ?

              Mais elle a très bien entendu. Elle sait très bien ce que Red a voulu dire. Elle a très bien compris ce que cela implique, quels sens ont les mots jetés par un être qu'elle n'arrive soudain plus à ranger entre les cases « ennemi » ou « ami ». Louve, elle, est pétrifiée et disparaît de sa conscience. Les câlins attendront car les couteaux fourbi se profilent.

              Le regard de Rachel se fit dur, froid et violent. Il était si simple de combiner toutes ces émotions contradictoires en colère et en soif d'apaisement. Un apaisement que seule la brutalité et l'intensité d'un combat pourrait étancher.

            -Alors ? Regarde moi bien droit dans les yeux, et dis moi en face que si tu pouvais tu choisirais de mourir là-bas plutôt que de souffrir pour vivre ?

              Bobom...

              L'air vibra sous la provocation de Red et ce qu'elle fit naître en Rachel. La bête noire ne fut pas de sortie, mais ce n'était pour le moins pas de meilleure augure. Des ondulations à la surface de l'air comme celles provoquées par la chaleur. Seulement elles étaient du fait de Rachel, épicentre des vagues de terreur qu'elle aurait dû provoquer. Et le fixant si intensément, elle n'avait envie que d'une chose, de lui tordre son petit cou pour lui faire ravaler son humour. Parce qu'elle a envie de tout sauf de rire, notre faucheuse. Ce qui est d'ailleurs également le cas de Red au vue de sa raideur Et d'un dernière phrase. Comme s'il attendait une réaction violente et imminente de sa part.

              Elle eut soudain envie de rire. Et cette envie la glaça plus encore. Elle l'étouffa à temps, mais elle fut secoué tout de même de cette quinte, une quinte désincarnée qu'elle ne se serait pas reconnue. Nerveux. Sinistre. Le manche de sa faux claqua contre le pont, s'annonçant comme un coup de semonce que redoutait -ou espérait- Red.


              Bobom...

            -Parce que tu crois réellement avoir le droit de vie ou de mort sur moi, maintenant ?
            Parce que tu crois réellement que tu pourrais me descendre pour rattraper une « erreur de jeunesse » et mettre du baume sur ta conscience de bon agent en prétextant vouloir me rendre service ?


              Bobom...

            Eh bien j'espère réellement que tu es préparé ; parce que en effet je ne suis pas prête à te laisser me tuer. Et que souffrira le plus qui s'y attend le moins !

              Bobom...

              Sur ces mots, Rachel empoigne sa faux comme si sa vie en dépendait, à s'en faire blanchir les jointures. D'ailleurs, Red le lui avait bien fait comprendre, sa vie en dépendait. Autour d'eux mais à distance raisonnable, quelques hommes de bord se disent visiblement la même chose, et qu'intervenir ne serait que réduire drastiquement leur espérance de vie. On ne met pas le doigt entre le marteau et l'enclume. Mais qui est le marteau, qui sera l'enclume? A juste quelques pas d'écart, C'est soudain Rachel qui ouvre le bal. Ce serait mieux que d'attendre la lame du lieutenant, se dit-elle comme elle fonce vers lui. Et alors que dans son dos elle arme sa lame avec une vitesse qui donne à l'arme l'impression de se dédoubler, formant des ailes noires et extrêmement dangereuses à sa silhouette frêle, gagnée par une rage étrange qu'elle ne cherche pas à restreindre, elle en oublie que Red n'est pas un ennemi. Et qu'elle frappe pour sa survie, comme il lui disait.

              Elle frappe pour tuer.


              Bobom...
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              Et Red esquive...

              Depuis le début de la conversation il attend que ça se termine comme ça. Avec Rachel essayant de lui faire la peau. Normal. Il aurait même parié que ça arriverait plus tôt. Alors quand Rachel frappe, il est prêt.

              D'un mouvement de poignet il ramène sa lame contre son avant bras. Il ne s'agirait pas que Rachel se blesse en tentant de le découper. Et puis pour se défendre, c'est mieux. Et quand la faux lui tombe dessus il se jette souplement en arrière sur le pont, évitant la lame pour faire une roulade et se redresser immédiatement derriére.

              Maintenant il ne reste plus qu'a tenir bon jusqu’à ce qu'elle se calme. Ou que le lieutenant se loupe...

              Rachel de son coté montre qu'elle est bien la fille de son père. Les effets sont différents mais ils sont bien la. Et ce n'est pas bon signe...
              D'un geste de la main Red indique aux matelots les plus proches que tout ça n'est pas une blague très drôle et qu'ils doivent impérativement se tenir loin de l'explication du duo de choc.

              Et pendant ce temps Rachel lui tombe à nouveau comme une nuée de corbeaux. Des corbeaux avec des faux et un regard capable de tuer à dix mètres. Rachel frappe encore et Red bloque le coup. main appuyé derriére sa lame pour avoir le maximum de force sur sa parade pendant qu'une vague d'air continue derriére lui en tranchant le bastingage. La miss a pris du galon et le Teawase de Red lui indique précisément combien. Il s'agit de ne pas de faire d'erreur. Avec les coups qu'elle envoie même le tekkai risque de ne pas protéger des coupures...

              Une autre frappe, une nouvelle explosion d'air à l'endroit du contact et c'est le gaillard d'avant qui se retrouve avec une belle balafre en travers de la cloison principale. Et dans la main du lieutenant la lame vole en éclats pendant que la faux de Rachel remonte tel un couperet pour frapper encore.

              -Soru !

              Contre une arme de cette taille la une seule solution, rentrer dans sa garde pour minimiser son efficacité. Le Soru de Red le propulse au contact avant que ne s'abatte le faux. D'une main il en agrippe le manche pendant que de l'autre il frappe, sa paume visant le ventre de Rachel pour y délivrer la quintessence de l'art du combat du Cipher Pol, le Roku Ou Gun...

              Mais Red lui ne frappe pas pour tuer. Et le geste offensif s’arrête juste avant de toucher sa cible. Ce qui n'est pas le cas de la riposte de Rachel...



            Dernière édition par Red le Dim 2 Sep 2012 - 16:14, édité 1 fois
                En effet. Il fait tout pour éviter le contact. Il pare, évite, saute, esquive, pare à nouveau. Et ce malgré les assauts répétés de Rachel qui y met à chaque fois plus de hargne et de détermination. Elle ne lit pas encore de peur dans le regard de Red, mais elle espère encore l'y déceler dans ses yeux.

                Depuis un moment déjà, les émotions de Rachel se bousculaient dans sa tête. Ses envies et pulsions également. La Violence, elle la ressentait. Elle avait voulu se frapper le crâne contre un mur mais avait réussi à la canaliser jusque dans sa faux. La Colère et la Tristesse se confondaient. Elle n'arrivait plus à dissocier l'une de l'autre et s'en fichait éperdument. Elle avait voulu s'enfermer dans sa cabine, fuir la confrontation orale, s'isoler dans un canot de sauvetage, seule en mer pour se poser, se calmer. Les regrets, la Peur, le ressentiment envers Red étaient présents et si le repousser, le gifler avaient été insuffisants, elle s'abandonnait maintenant dans le combat. Histoire de lui vider un peu l'esprit. Un combat où les coups s'enchaînaient à sens unique et où, parfois, une larme scintillait dans les derniers rayons du soleil. Mourant lui aussi.

                Mais maintenant elle était grisée. Contenues, ses émotions orageuses la dévoraient. Pourtant, depuis qu'elle avait sorti les armes et rangée les mots, elle savait quoi faire. Comme un mécanisme d'horlogerie trop bien huilée, à qui l'on abandonnerait tout. Et voir pourtant le lieutenant reculer sous ses coups lui procuraient maintenant et contre toute attente, un sentiment de supériorité.

              -J'ai dû mal comprendre Red ! Tu m'avais pas parlé de souffrir pour vivre ???

                Oui. Grisée était le mot. Et dans ses yeux verts, ce n'était plus de la colère, de la peur ou même du désespoir dont l'étincelle était faite. C'était le plaisir d'avoir une chance contre lui. D'avoir sa revanche. Une passe d'armes qui peut-être la libèrerait de ce poids qui lui comprimait la poitrine. Un poids qu'elle sent lentement se soulever. Elle se sentait pousser des ailes. Au sens propre.
                Red le pensait si bien : Elle n'était pas la fille de son père pour rien !

                Pourtant, Le Lieutenant Red semble prendre les derniers mots de la Lieutenante comme une invitation et s'insère soudain dans sa garde, sans qu'elle ait eu le temps de le voir. Et c'est quand elle sent le poids supplémentaire qui alourdit sa faux comme il la retient qu'elle réagit instinctivement.

                D'un bond, elle s'éloigne sans que Red n'ait porté le moindre coup. Elle avait craint de devoir encaisser, mais non. C'était la preuve qu'il se trompait depuis le début. Les rôles étaient inversés et il ne s'en était même pas rendu compte ! Ou alors il ne s'en rend compte que trop tard. Comme du filin qui entoure son poignet. Filin qui relie l'arme à son utilisatrice.

                Rachel, déjà sur pieds, tire sur le filin avec une force qu'elle ne se connaissait pas et qui l'exhorte à combattre. Red vole vers elle presque trop rapidement sous cet assaut nouveau. Presque car l'agent médecin a le temps de jeter l'arme gigantesque qui va se planter dans le pont du navire, stoppant net sa course, acceptant par la même que son poignet soit malmené. Dans le dos de Rachel, une paire d'ailes filiformes vibre sous toutes ces émotions aux rênes lâchés. Signe avant coureur de sa réaction immédiate.
                Il n'a pas touché le sol qu'elle bondit déjà sur lui. Dans sa main, un crochet de boucher, tâché et souvenir d'une très mauvaise semaine. Ils sont tous deux suspendus dans l'instant lorsque leurs regards se croisent.

                Il aurait pu riposter. Facilement. Elle le lut dans ses yeux. Il voyait venir le coup mais refusa d'en porter un. Une hésitation qui se mua en besoin de parer la nouvelle arme qu'elle tenait. Ne pas frapper et recevoir des coups étaient deux choses bien différentes. Malheureusement, cette hésitation lui coûtera un peu plus cher, car lui aussi doit bien voir cette mâchoire qui se crispe et ce poing qui s'arme dans cette fraction de seconde suspendue.
                Le crochet vise la main qui tente de l'arrêter. Le bras de Rachel se tend au-dessus d'eux et se mue en un puissant marteau du jugement. Tout le corps de Rachel vibre soudain d'une puissance inconnue qui lui ouvrira d'innombrables portes. Un Haki qu'elle ne se connaissait pas. Et avec elle vibre celui de Red qui lui doit bien savoir de quoi il s'agit. Et ce dernier aura beau se protéger d'un ultime rempart comme le Tekkaï, ça ne l'empêchera pas d'aller s'encastrer crâne le premier parmi les planches du Fenrir. La puissance du coup en fit frémir la mâture.

                Rachel n'avait jamais frappé personne à main nues. Mais pour lui, elle avait bien voulu faire une exception.

                A quelques pas, elle se redresse, poing tremblant, corps parcouru de frissons et regard bloqué sur un Red plus ou moins intact dans son lit de bois et d'échardes. Bordé de clous. Dans cette crevasse lui tient compagnie la faux de deux mètres qui a failli avec lui.
                Elle ne sait plus quoi dire, quoi penser. Elle a bien vu qu'il avait accepté le coup, qu'il l'avait attendu. Qu'essayait-il de prouver ? Que voulait-il donc ? Elle voulut lui crier ces questions, mais ne trouva pas de force morale nécessaire à cet acte. Elle ne voulait plus que s'asseoir dans un coin, avec une bonne pomme bien verte et observer dans le ciel ces couleurs que le soleil y avait dessiné en disparaissant à l'horizon.

              -Qu'est-ce que tu cherchais à faire ? Ça veut dire quoi, ça ? Que tu refuses de me tuer ? Que tu refuses de me frapper ? Que quoi ? Qu'est-ce que ça signifie tout ça ? Je t'en prie, dis-moi à quoi ça rime.

                Elle avait remisé au placard le masque de placidité et les émotions négatives. Envolées, même. Comme si elles s'étaient tout à coup évaporées avec le coup qu'elle venait de lui porter. Non, pas évaporées. Aspirées . Drainées. Elle se sentait faible tout à coup. Fatiguée et surtout impuissante. Était-ce ça, son but ? Avait-il fait tout ça pour se simple résultat?



              Dernière édition par Blacrow L. Rachel le Lun 3 Sep 2012 - 2:05, édité 1 fois
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                Normalement, ça n'aurait pas du faire si mal... Normalement...

                Elle n'est même pas censée être aussi forte à mains nues. Et pourtant... Et pourtant le coup de poing qu'elle vient d'assener au lieutenant Red a bien failli lui briser la mâchoire. Malgré le tekkai. Impensable... A moins que ce ne soit impensable que pour Rachel... Pas pour Louve...

                Red se dégage lentement du pont dans lequel il vient de s'incruster en pliant jusqu'au solides poutres maitresses et en brisant les planches tout autour de lui... Rien qu'il n'ait déjà subis, rien qui ne devrait lui faire mal. Et pourtant...

                Et pourtant ça fait mal...

                Red se relève et se masse une mâchoire douloureuse et une lèvre que le coup de poing lui a fendu. Il essuie de la main le sang qu'il n'a pas envie de cracher sur le pont avant de se tourner pour attraper la faux planté derriére lui et l'arracher du pont.

                L'arracher et la jeter entre lui et Rachel...

                -Ce que je cherche à faire ? Tu ne devines pas? Je suis content de t'avoir retrouvé Louve... Content que tu t'en sois sortie. Content de ce que tu es devenue... Et je voudrais te tuer ?

                Red fait un demi sourire douloureux à la môme. A celle qu'il a abandonnée sur un bateau y'a dix ans et à l'autre, l'officier d'élite qui vient de l'allonger d'un coup de poing...

                -Je suis heureux de te connaitre Rachel... Et je n'ai pas envie de rester ici sur ce bateau à te regarder me détester. C'est aussi simple que ça. Alors à toi de choisir. A toi de décider si tu veux la peau de l'enfoiré qui à tué ton père ou si tu peux lui pardonner. Moi j'ai fait mon choix y'a dix ans. Et je vois aucune raison de changer d'avis...

                  Rachel ferme les yeux et savoure la fraicheur d'un air marin lui caressant le visage. Quelque chose de doux, enfin. Elle ne cherchait pas la douceur, actuellement, mais de cette brise légère, du sourire que, malgré tout, Red lui envoie, elle sent que ses blessures quelle pensait meurtrissures, n'étaient en fait que des entailles. La vie ne tient pas à grand chose, finalement. Un type vous a dans le collimateur et on se fait rayer de la liste des vivants. Au contraire, il y a des anges gardiens qui, en dépit de ce que les autres ont décidé pour vous, redonnent vie, espoir et peut-être même une destinée. Il valait mieux qu'elle soit là plutôt que dans le royaume de Davy Jones, non ? Après tout et au final, sans Red, elle ne serait rien du tout. Finalement, si elle a tout compris, c'était l'effet papillon. Car un autre que Red se serait chargé de la tuer elle aussi, à sa place. Et si red avait été envoyé sur ce navire il y a dix ans, c'était à cause d'une chose.

                -Merci le Chien Fou... murmura-t-elle en se rapprochant de l'agent devant elle.

                  Tout en s'avançant, elle fuyait le regard de Red. Elle ne savait pas encore quoi penser, quel sort lui réserver, car si sa raison lui disait qu'elle-même tuerait encore des pirates par dizaines et qu'ainsi des dizaines de Louves verraient le jour de cette manière, eh bien Rachel n'arrivait pas encore à accepter sa propre louve qui dans son cœur bondissait de joie. De la joie d'avoir retrouvé Red, le fameux ange gardien.

                  Massant son poignet bleui par l'impact, elle choisit de s'asseoir sur le manche de la faux, plantée droite et immuable dans le pont du Fenrir. Avant de regarder autour d'elle, se dévissant le cou pour apercevoir des mines pâles et choquées par ce à quoi elles venaient d'assister. Sans compter les multiples balafres que comptait maintenant le Fenrir. Enfin une lueur de peur passa dans son regard.

                -Mon Dieu... Toji va nous tuer… Lin va nous étriper !

                  Elle s'immobilise et lentement, son regard remonte vers Red. Il a une lèvre en sang et la marque rouge qui enfle sur son visage est bien plus impressionnant que les fourmis qui frissonnent dans sa propre main. Elle croise alors son regard, mi-amusée mi désolée, et finit par lui rendre son sourire. Elle n'est en outre que contradiction. Fille de pirate pour finir officier de la marine. En toute logique, elle n'a pas le droit d'en vouloir à quelqu'un qui a fait son boulot durant toute sa vie et qui a fait avec zèle ce qu'elle s'efforce de faire depuis à peine cinq ou six ans.

                -Je...

                  Sa gorge se noue.
                  Elle n'avait même pas fait attention à la manière dont il l'avait appelée.


                -Avec tout ça, je ne sais plus où j'en suis. Je... je ne pense pas t'en vouloir. Pas au point de te tuer. Et puis Louve veut te garder auprès d'elle, je crois.
                Red ? Je voulais te dire que je suis désolée. Pour tout ça
                (elle pointe du doigt le visage du Lieutenant médecin et ne peut contenir une mimique amusée). Et surtout, je le réalise un peu tard sûrement, mais... Merci. De m'avoir protégé de mon père. De m'avoir sauvée.

                  Quelle sotte ! Elle n'aurait pas pu dire ça plus tôt ? Elle n'aurait pas pu arriver à se calmer avant tout ça ? Avant le combat ? Ça aurait été tellement plus simple. Elle allait maintenant devoir s'occuper de rénover le navire, à tout les coups !

                  Elle sonde le regard de Red de ses propres yeux émeraude et un sourire véritable finit par devenir le nouveau soleil de ce début de nuit.

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