« J'ai besoin d'un garde » que l'gérant de la transilienne m'a dit. A croire qu'avec son costume trois pièces, sa moustache bien épilée et son sourire d'cérémonie il se prenait pour quelqu'un. Alors je lui ai répondu « ce sera l'voyage plus un million ». Là, il m'a regardé noir. L'a grattouillé ses poils de nez avant de me rire au nez.
L'avait compris.
Que sur l'île où on était, y'avait pas de travail. Y'avait pas de voleurs. Y'avait rien à faire à part prendre le premier bateau pour aller chercher ailleurs de quoi rentrer chez soi et offrir un joli cadeau à sa belle femme. Alors j'ai accepté. J'ai laissé tomber le million et je suis monté sur la coque.
La loi du marché.
On m'a expliqué le problème. L'un des passagers était l'un des plus riches de South Blue. Le genre à se promener avec plusieurs dizaines de millions sur soi. Le genre à manger du foi gras de morue au petit déjeuner et à n'accepter que les cuillères en or. Forcément ça attire. Forcément un pirate était au courant. Un gars qui connaissait un gars qui connaissait un pirate avait fini par dire que l'bandit allait tenter de la faire à l'envers. Le pirate ? Jack I. I pour Inconnu. Parce que sa gueule n'avait jamais réussi à finir sur une feuille et qu'il n'avait pas l'habitude de laisser des témoins derrière lui. Ça montait sa prime à 10 000 000. Beaucoup de zéros. Trop pour dormir tranquille.
Trop pour croire à un voyage paisible.
Alors pas con, j'ai dormis trois nuits avec mon pétoire sous l'oreiller. D'un œil, une oreille toujours sur la pièce d'à côté. Où le riche se noyait dans sa piscine de billets verts.
Trois nuits et quatre jours sans rien d'autre que l'bruit des vagues claquant contre la coque, que le cris du riche pour une bouchée de fois gras, que les ordres du capitaine pour son équipage. Je commençais vraiment à croire à un voyage sans emmerde. Et donc sans paye.
Pis la quatrième nuit ça a tourné. On venait de passer le bordel de Reverse. Tous les nerfs étaient à cran. Grand Line, ça ne rassure pas et surtout quand on arrive au beau milieu d'une tempête. Ça bourlinguait de tous les côtés. Les bourrasques cognaient si forts sur le bateau qu'on devait presque hurler pour se faire entendre. Moi, ça me mettait pas bien. Parce que j'étais obligé de foutre mon oreille sur la planche de bois servant de mur pur entendre le voisin. Et que j'entendais presque rien. A peine le murmure d'un discussion. Et c'est pourtant pas discret, même au milieu d'une tempête, ce genre de guss.
Alors j'ai ouvert. Et j'ai vu ce que je ne voulais pas voir.
La gueule du bourgeois à l'envers, la main tendue vers un verre brisé. Sa pute à moitié nue à gesticuler de peur devant une lame. Et au bout de la lame. Jack I. Ou tout du moins un gars que j'avais pas envie de connaître. La longue barbe descendant jusqu'en dessous le menton. Les larges épaules de l'homme qu'a trop soulevé de fonte dans sa vie. Les frusques dégueulassés par le temps qui sentent trop. La gueule boursouflée de cicatrices.
Ça sentait l'emmerde comme j'aime pas souvent la sentir.
« On se fout sur la gueule avant ou après les présentations ? »
Celle là, je l'ai sortis avant de réfléchir alors que ce que j'aurais dû sortir, ce sont mes flingues. J'ai été trop con et lui, l'a pas attendu. Sa lamelle a foncé vers ma gueule trop vite. J'ai esquivé trop lentement et déjà, ma vieille chemise était en lambeau. Alors j'ai répondu par un coup de feu qu'a fini sa course trop à droite. Trop loin du pirate. Trop près de la pute. Dans sa pauvre jambe qu'avait rien demandé. Mais j'avais pas le temps d'y penser que déjà l'méchant tentait d'encore me trancher, emmenant tout mon corps dans une pirouette qui mettait pas bien mon dos comme l'aime pas être.
Et le reste s'est encore passé vite. Trop vite. Les coups se sont enchaînés. Les esquives aussi. Jusqu'à ce que toute la pièce vole dans un immense bordel. Que les tables se renversent, les verres se brisent, les hublots se cassent, les meubles se fassent tranchés.
Et au milieu, moi et l'vilain, deux ombres immondes au pays des mécréants, on se foutait sur la tronche comme pas souvent on foutait dessus. Pis l'un de nos corps est partis là où il fallait pas partir. Une main s'est tendue et a amené l'autre dans la chute. L'eau glaciale. Qui gifflait le corps comme d'innombrables griffures. C'est putain de douloureux. Tant que j'ai cru prier pour mourir maintenant.
Mais la gueule de ma fille me revenait à l’esprit, et même gelé, même à me battre contre le courant pour ne pas me faire engloutir, je continuais à fracasser mes poings sur la trogne de l'enfoiré.
Puis une vague trop grande, trop violente est apparue. Et ça a été le trou noir. Béant. Comme le début de la fin.
C'est comme ça que je me suis retrouvé là. Les lèvres gercées. A ne plus sentir mes pieds. A ne plus savoir où je suis. Les cheveux collés au sable avec à coté, la sale gueule de Jack. Tout aussi mort.
L'avait compris.
Que sur l'île où on était, y'avait pas de travail. Y'avait pas de voleurs. Y'avait rien à faire à part prendre le premier bateau pour aller chercher ailleurs de quoi rentrer chez soi et offrir un joli cadeau à sa belle femme. Alors j'ai accepté. J'ai laissé tomber le million et je suis monté sur la coque.
La loi du marché.
On m'a expliqué le problème. L'un des passagers était l'un des plus riches de South Blue. Le genre à se promener avec plusieurs dizaines de millions sur soi. Le genre à manger du foi gras de morue au petit déjeuner et à n'accepter que les cuillères en or. Forcément ça attire. Forcément un pirate était au courant. Un gars qui connaissait un gars qui connaissait un pirate avait fini par dire que l'bandit allait tenter de la faire à l'envers. Le pirate ? Jack I. I pour Inconnu. Parce que sa gueule n'avait jamais réussi à finir sur une feuille et qu'il n'avait pas l'habitude de laisser des témoins derrière lui. Ça montait sa prime à 10 000 000. Beaucoup de zéros. Trop pour dormir tranquille.
Trop pour croire à un voyage paisible.
Alors pas con, j'ai dormis trois nuits avec mon pétoire sous l'oreiller. D'un œil, une oreille toujours sur la pièce d'à côté. Où le riche se noyait dans sa piscine de billets verts.
Trois nuits et quatre jours sans rien d'autre que l'bruit des vagues claquant contre la coque, que le cris du riche pour une bouchée de fois gras, que les ordres du capitaine pour son équipage. Je commençais vraiment à croire à un voyage sans emmerde. Et donc sans paye.
Pis la quatrième nuit ça a tourné. On venait de passer le bordel de Reverse. Tous les nerfs étaient à cran. Grand Line, ça ne rassure pas et surtout quand on arrive au beau milieu d'une tempête. Ça bourlinguait de tous les côtés. Les bourrasques cognaient si forts sur le bateau qu'on devait presque hurler pour se faire entendre. Moi, ça me mettait pas bien. Parce que j'étais obligé de foutre mon oreille sur la planche de bois servant de mur pur entendre le voisin. Et que j'entendais presque rien. A peine le murmure d'un discussion. Et c'est pourtant pas discret, même au milieu d'une tempête, ce genre de guss.
Alors j'ai ouvert. Et j'ai vu ce que je ne voulais pas voir.
La gueule du bourgeois à l'envers, la main tendue vers un verre brisé. Sa pute à moitié nue à gesticuler de peur devant une lame. Et au bout de la lame. Jack I. Ou tout du moins un gars que j'avais pas envie de connaître. La longue barbe descendant jusqu'en dessous le menton. Les larges épaules de l'homme qu'a trop soulevé de fonte dans sa vie. Les frusques dégueulassés par le temps qui sentent trop. La gueule boursouflée de cicatrices.
Ça sentait l'emmerde comme j'aime pas souvent la sentir.
« On se fout sur la gueule avant ou après les présentations ? »
Celle là, je l'ai sortis avant de réfléchir alors que ce que j'aurais dû sortir, ce sont mes flingues. J'ai été trop con et lui, l'a pas attendu. Sa lamelle a foncé vers ma gueule trop vite. J'ai esquivé trop lentement et déjà, ma vieille chemise était en lambeau. Alors j'ai répondu par un coup de feu qu'a fini sa course trop à droite. Trop loin du pirate. Trop près de la pute. Dans sa pauvre jambe qu'avait rien demandé. Mais j'avais pas le temps d'y penser que déjà l'méchant tentait d'encore me trancher, emmenant tout mon corps dans une pirouette qui mettait pas bien mon dos comme l'aime pas être.
Et le reste s'est encore passé vite. Trop vite. Les coups se sont enchaînés. Les esquives aussi. Jusqu'à ce que toute la pièce vole dans un immense bordel. Que les tables se renversent, les verres se brisent, les hublots se cassent, les meubles se fassent tranchés.
Et au milieu, moi et l'vilain, deux ombres immondes au pays des mécréants, on se foutait sur la tronche comme pas souvent on foutait dessus. Pis l'un de nos corps est partis là où il fallait pas partir. Une main s'est tendue et a amené l'autre dans la chute. L'eau glaciale. Qui gifflait le corps comme d'innombrables griffures. C'est putain de douloureux. Tant que j'ai cru prier pour mourir maintenant.
Mais la gueule de ma fille me revenait à l’esprit, et même gelé, même à me battre contre le courant pour ne pas me faire engloutir, je continuais à fracasser mes poings sur la trogne de l'enfoiré.
Puis une vague trop grande, trop violente est apparue. Et ça a été le trou noir. Béant. Comme le début de la fin.
C'est comme ça que je me suis retrouvé là. Les lèvres gercées. A ne plus sentir mes pieds. A ne plus savoir où je suis. Les cheveux collés au sable avec à coté, la sale gueule de Jack. Tout aussi mort.