Enzo P. Hisachi était incapable d'accorder trop d’intérêt aux autres. Des années entières de solitude et de rejet avaient beaucoup affecté sa vision des choses. Petit à petit, au fil du temps, son esprit et son cœur avait été façonnés, taillés par le terrible mais diablement doué orfèvre du désespoir pour en faire un bijou d'incertitude et de méfiance. Il était parfaitement capable de vivre en société, mais ce mauvais coté de lui, dans mit dans les bonnes conditions, pouvait ressortir extrêmement facilement. En fait, pour décrire simplement Enzo, on pourrait dire qu'il s'agit , selon la situation d'un homme ne vivant que pour lui, et n'accordant son temps et son intérêt aux autres que s'il a quelque chose à y gagner, ou, pour parler plus vulgairement, c'est un connard d'égoïste qui ne pense qu'à ses miches. Ses miches et les miches de son serpent (à supposer que les serpents possèdent un fessier ou des compétences en boulangerie/pâtisserie). Oui, Enzo acceptait volontiers d'aider les autres, mais quand il n'avait absolument rien à y gagner, fallait pas trop espérer non plus. La grosse exception étant bien sur Anko, son adorée anaconda de Jaya, pour qui il était prêt à sacrifier absolument tout. Et ça, c'était quelque chose qui surprenait à peut près tout le monde. Pourtant, dans la tête du CP, tout était clair, tout était logique, son comportement était parfaitement justifié et sensé, et ceux qui n'arrivaient pas à saisir ça n'ouvrait tout simplement pas assez les yeux. C'est d'ailleurs pour lui et aussi pour An qu'il se trouvait actuellement sur l'île de Stamphead Island, à essayer de maîtriser les techniques du Rokushiki.
Un CP "classique" chercherait probablement à apprendre le sixième style pour mieux servir le gouvernement, ou pour se sentir puissant. Enzo, lui, faisait plutôt ça pour se sentir en sécurité: parce qu'avec les compétences d'un sur-homme, il pourrait certes, mieux servir le gouvernement, mais il pourrait surtout mieux faire son boulot et donc mieux assurer sa longévité sociale et financière, et en plus cet art martial serait foutrement pratique pour arriver à se protéger (lui ou son reptile adoré) du danger. Ouais, Enzo P. Hisachi était un égoïste, et pourtant, ce trait de caractère qu'on pourrait classer comme "mauvais" l’amenait souvent à faire de grandes choses, et parfois des plus petites. La question étant: lesquelles des deux étaient les plus utiles?
Notre agent du gouvernement préféré (ceux qui ne sont pas d'accord avec cette idée son priés de sortir, merci bien) se trouvait dans sa grotte située dans un rocher bordant l'oasis du désert de Stamphead Island. Quand il y était revenu, durant la mâtiné, après avoir passé plusieurs jours en compagnie d'Atsuji Kaitô, l'homme lui enseignant le Rokushiki, le CP était plutôt joyeux. En effet, son professeur était content des progrès qu'il avait faits, il maîtrisait de mieux en mieux les arcanes du sixième style dont il était déjà capable de se servir, et il devait retourner s’entraîner en solo pour apprendre cette fois ci à utiliser le geppou. Une série d'évènements plutôt agréables, non? Le souci, c'est qu'une fois de retour sur son lieu d'entrainement, il se mit immédiatement à la pratique des exercices que Kaitô lui avait demandé de réaliser, et au bout de trois heures d'entrainement, rien. Pas le moindre progrès, il n'était pas capable de frapper l'air, il n'arrivait pas à sauter plus haut qu'avant, il n'était pas fichu de se propulser. L'agent Hisachi, qui avait pourtant l'impression de bien progresser, en prit un coup au moral. Pourtant, il se doutait bien de la raison pour laquelle il n'arrivait pas à utiliser le Geppou: à cause d'un manque de vraie motivation, et c'est ça qui l'embêtait. Parce qu'il pensait être déjà suffisamment motivé comme ça, il pensait que la volonté de vraiment apprendre le Rokushiki c'était imprégnée dans son esprit, mais de toute évidence, ce n'était pas le cas. Et cela voulait surtout dire que la seule chose qui le motiverait efficacement maintenant, c'est de mettre sa vie en danger.
L'idée en elle même n'était pas mauvaise: reprendre le principe de la carotte mais en rajoutant un banana croco mutant zombi robot avec des sabres lasers derrière l’âne, histoire d'être sur qu'il va vraiment continuer à avancer. Ce qui gênait Enzo, c'était la partie "risque de mort", parce que même s'il était capable d'accomplir des prouesses incroyables lorsqu'il se sentait en danger de mort, le cornu n'aimait pas vraiment cette sensation. De un parce que c'est très désagréable, de deux parce que ça le fait angoisser facilement ce qui n'est pas une bonne chose pour lui, et de trois parce qu'il existe toujours cette probabilité de vraiment crever et que pour le faire paniquer cette probabilité est souvent très élevé. Après, ce n'est pas un expert en pourcentage, mais le CP préfère quand même quand son risque de mortalité est proche de zéro, voir en dessous.
Bref, l’ami Hisachi était bien contrarié par sa situation et avec Anko, il retournait son cerveau dans tous les sens à la recherche d’un moyen efficace et peu dangereux de réussir à se motiver. Faisant les 100 pas et perdu dans ses pensées, il n’entendit pas (contrairement à An, qui encore une fois se montrait plus attentive que son père) les bruits de pioches résonnant derrière l’une des parois de la grotte. Il ne remarqua pas non plus que quelque chose de pointu se mettait à percer petit à petit la dite paroi. Et c’est à peine s’il prit conscience de l’effondrement de cette dernière. Oui, Enzo avait beau être paranoïaque et constamment sur ses gardes, une fois perdu dans ses pensées, il fallait un buster call pour le ramener sur Terre. Sentant enfin que son serpent lui tirait la jambe, le cornu se retourna et découvrit avec stupeur un trou dans l’un des murs de son habitation temporaire, ainsi qu’un vieil homme. Petit, barbu, ce dernier avait une pioche dans une main et un flingue dans l’autre. Et le dit flingue était pointé sur le CP, ce qui pourrait s’expliquer par le fait que le papy n’avait pas l’air content du tout.
-Sale petit merdeux, qu’est ce que tu fous dans ma galerie ?! T’es la pour me piquer mes trouvailles, c’est ça ?!
- Euh, plaît-il?
-J’ai dis “sale petit merdeux, qu’est ce que tu fous dans ma galerie”. Bon sang, c’est moi qui ai plus de trios quart de siècle et c’est toi qu’est complètement sourdingue?!
-Mon audition est parfaite monsieur, et c’est plutôt moi qui devrait vous demander ce que vous fichez dans ma grotte!
Enzo parlait avec assurance, visiblement peu impressionné par l’arme pointée sur lui. Bon, en réalité, il était un peu paniqué et il utilisait le tekkai au cas où un coup partirait.
-Dit donc, t’es gonflé de te pointer chez les gens et de faire comme si c’était chez toi, gamin !
-C’est VOUS qui êtes gonflé l’ancêtre, ça fait plus d’une presque deux semaines que je squatte cette caverne, et vous, vous venez d’y rentrer par effraction !
-Non seulement t’es de mauvaise fois gamin, mais en plus t’es con ! C’est pas une caverne, ça, c’est une galerie, une galerie souterraine, revois ta géologie !
-J’crois que c’est ton cerveau la galerie souterraine, papy ! C’est une grotte ici, une grotte bien à la surface se trouvant en plein milieu d’un désert !
-D’un désert ? Mais qu’est ce qu’il me chante l’autre ?! Laisse-moi voir ça.
Le vieillard, tout en continuant à garder l’agent Hisachi en joue, se mit à longer les murs de la caverne. Il finit par apercevoir de la lumière, et se dirigea dans sa direction. Une fois dehors, il du protéger son visage avec ses main, étant trop ébloui par les rayons du soleil. Constatant son erreur, il se retourna vers le cornu, une once de honte parcourant son visage.
-Euh…. Bah…… Bah tu vois, c’est une caverne cet endroit ! Depuis l’début je te le répète mais nooooon, môsieur n’a pas voulu m’écouter ! C’est bien le problème des jeunes ça : ils n’en font qu’à leur tête.
Et pour seule réponse, l’ancêtre se prit une claque dans la tronche.
-Bordel mais ça va pas de frapper un vieil homme sans défense ?! T’es pas bien toi ?!
-Tu l’auras voulu ptit chieur !
Pointant son arme sur l’agent secret, le vieux mineur constata avec horreur que les canons avaient été bouchés avec ce qui semblait être de la fourrure. Visiblement, Enzo était passé par la pendant que le vieil homme protégeait ses yeux du soleil. Le CP, lui, était toujours remonté contre le barbu, et il lui colla une troisième baffe histoire que l’information « faut pas me faire chier, et faut pas jouer les faux culs avec moi », à défaut d’être retenue par son cerveau âgé, soit bien imprégnée dans sa mémoire physique.
-Okay cette fois tu l’auras voulu !
Ayant marre de se faire claquer tel le fessier d’une femme passant à proximité d’un banc de beauf, le prospecteur fonça sur Enzo, qui, surprit par la vitalité du vieil homme, n’eu pas le temps d’esquiver le coup de crosse en pleine cote lui étant destiné. Mais l’autre ne s’arrêta pas la : saisissant sa pioche, il commença à enchainer les frappes en direction du pauvre cornu, qui évita tant bien que mal les assauts du mineur. Il avait beau ne plus être tout jeune, il savait encore bien se défendre le gaillard. Il attaquait si vite que même l’assassin du gouvernement eu du mal à trouver une ouverture pour riposter. Il décida donc de sortir sa botte secrète. Le grand-père, lui, entendit juste un sifflement s’échapper de la bouche de son adversaire. N’y prêtant pas attention au début, il comprit son erreur quand il vit que son bras tenant l’arme à feu ne répondait plus. Quelque chose le tirait fermement vers l’arrière : c’était An, qui avait enroulée sa queue autour du canon scié de l’ancêtre. En fait, voyant que quelqu’un attaquait son père, elle était déjà prête à planter une corne de bersebison trainant par la dans le dos de l’agresseur, mais le sifflement lui fit comprendre qu’Enzo voulait ce type vivant. Loin de se laisser décourager, le prospecteur, lui, lâcha son arme pour se jeter sur le cornu, prêt à lui asséner un coup de pioche mortel sur le crane. Malheureusement pour lui, sa cible trouvait qu’il commençait à agir un peu trop dangereusement à son goût.
- Tekkai !
Et dans un grand mélange de bruits métalliques et de craquements, l’outil du prospecteur se brisa, la tête complètement tordu, s’étant visiblement montré moins solide que la technique du sixième style. Le propriétaire de l’objet, lui, était complètement estomaqué. Il en avait vu des choses tout au long de sa vie, mais ÇA, ça sortait quand même pas mal de l’ordinaire. La surprise l’ayant pas mal calmé, une fois le vieil homme remit de ses émotions, il accepta de s’expliquer calmement : il se nommait Balthazar Goldie et était chercher d’or, le meilleur selon lui. Il avait commencé à creuser une galerie dans la montagne près des cotes de l’île, et, sentant de plus en plus d’or au fur et à mesure qu’il avançait, il avait finit par creuser jusqu’à cette caverne. Même s’il n’avait pas apprécié la façon dont Balthazar avait débarqué, Enzo devait quand même admettre qu’il était balèze le bonhomme, pour se faire un tel chemin à travers la roche tout seul.
Voulant éviter tout problème, le cornu s’excusa pour la pioche cassée, mais il demanda au vieil homme de bien vouloir partir et de ne plus tenter de l’attaquer. Ce dernier accepta, mais il demanda quand même au cornu l’hospitalité pour la nuit, voulant reprendre des forces avant de repartir affronter les souterrains. Bien que moyennement rassuré, le jeune homme accepta, mais à la condition que le canon scié reste hors de porté du prospecteur. Autant prendre ses précautions dès maintenant. Une fois la nuit tombé, le CP ne dormit que d’un œil, sa parano ayant refait surface. Il se sentait en danger, et le plus agaçant dans tout ça, c’est qu’il ne trouvait même pas ne façon de reconvertir ce sentiment en motivation pour se geppou, le fait d’être dans une grotte ne rendant pas particulièrement utile la capacité à sauter sur l’air. Et visiblement, il avait bien fait de se montrer méfiant, car, au cours de la nuit, le cornu entendit le prospecteur se lever. Jetant un coup d’œil discret pour repérer sa position et se préparer à se défendre, Enzo réalisa que le vieil homme se dirigeait vers l’entrée de la grotte. Après quelques minutes à entendre dans sa tête son instinct de survie batailler avec sa curiosité, il finit par décider de se lever pour aller à la rencontre du vieux Balthazar.
-Tu sais papy, si tu veux me buter dans mon sommeil, faut te diriger vers mon lit, hein…
- Ferme-la, sale blanc bec. J’t’ai donné ma parole que j’te ferais rien,e t j’suis un homme d’honneur.
Un peu rassuré par les propos du vieillard (et aussi parce qu’il venait de vérifier si il avait ou non une arme), le CP se rapprocha de lui et s’assit sur un morceau de tronc de palmier trainant au bord de l’eau. Goldie décida lui aussi de se poser, l’air plutôt attristé.
-Qu’est ce qu’il y a ? C’est d’avoir perdu ta pioche qui te met dans cet état la ? Je peux te la rembourser si tu veux, ou t’en fabriquer une autre…
-Non, non, j’m’en fiche de la pioche, j’en ai plus en réserve que les asticots qu’une mouche peut lâcher dans un repas laissé à l’air libre… Non, ce qui me gêne, c’est….. Gamin, à tu une raison de vivre ?
-Ki….Kihihihihi, d’habitude c’est moi qui pose des questions du genre. Oui Balthi, j’ai une raison de vivre. Mais ça serait long de te l’expliquer en détail, et pour l’instant, ce qui nous intéresse, c’est toi.
-Ouais, probablement….. Bah tu vois, moi, ma raison de vivre, c’est l’or ! Tu peux me traiter de sale rapia, de vautour, de monstre vénal et d’égoïste, mais je m’en fous ! J’ai toujours vécu pour l’or, j’ai tout sacrifié pour l’or, ça a toujours été ma passion, ma vie, mon rêve. Jamais je n’ai cessé d’en chercher, et jamais je n’ai cessé d’en trouver !
-Ha, si tu savais….. Ce n’est pas moi qui vais te reprocher de penser comme ça…….
Mais le vieux prospecteur n’écoutait plus l’agent Hisachi. Il était lancé, maintenant, plus rien ne pourrait l’empêcher de dire ce qu’il avait sur le cœur, comme s’il avait attendu de trouver une oreille plus ou moins attentive uniquement pour se soulager.
-Oui, j’ai cherché l’or, j’ai trouvé l’or, j’ai aimé l’or, j’ai vécu l’or ! Tellement que je suis devenu capable….. Capable de le sentir ! Tu dois surement me prendre pour un vieux cinglé, mais jte jure sur mon caleçon porte bonheur que c’est vrai !
Le mineur se mit à regarder Enzo, attendant une réponse. Ou plutôt, attendant LA réponse qu’il voulait entendre. Et aujourd’hui, le cornu n’avait pas envie de décevoir l’homme.
-J’te crois Balthi, jte crois sur parole !
-Gfaha, merci ptit gars, merci…. Ca fait du bien de savoir qu’on est pas encore totalement bon pour l’asile…. Enfin, c’est ce que je m’serais dit il y a encore quelques temps, mais j’dois t’avouer que je commence à douter sérieusement….
-C'est-à-dire ? Il s’est passé quelque chose ?
-Ouais…. En quelque sorte….. En fait, tu sais pourquoi j’ai creusé aussi loin ? Jt’ai dis que j’avais trouvé de l’or tout le long de la grotte, non ? Bah, en fait, j’t’ai un peu menti : j’ai senti l’or, j’l’ai senti tout le long de cette foutue galerie, mais impossible de mettre la main dessus. C’est pour ça que j’ai avancé, sans cesses, espérant enfin découvrir l’endroit où se planquait se satané métal, mais rien. Que dalle. J’ai même pas trouvé une petite pépite…. Jme dis… Jme dis que c’est peut être le destin qui m’envoi un signe… Qu’il essai de me faire comprendre que j’ai fait mon temps, que c’est bon, j’peux raccrocher mon tablier maintenant….
Des larmes commencèrent à couler le long des joues de Goldie. Sa voix, pourtant d’habitude forte et puissante, devint soudainement fatiguée, trainante, un peu cassée.
–J’ai vécu pour l’or…. J’ai existé pour l’or…. Si jamais j’arrête d’en chercher, il me reste quoi ?! Je… je ne veux pas que ça se termine maintenant. Je sais que je peux encore continuer à en trouver. Mais…. Mais si j’avais raison ? Si l’âge commençait à avoir définitivement raison de moi ?! Je….. je……..
D’un coup, il se ressaisit. Essuyant ses larmes et se levant d’un bon, ton du prospecteur redevint le même qu’avant.
-Erf, pardon gamin, j’dois surement t’emmerder avec mes histoires. T’inquiète pas pour moi, ça va aller. Bon, j’retourne me coucher moi, t’as pas à t’en faire, demain matin à l’aube, je serais parti sans laisser de trace !
Et le vieillard tourna les talons pour se diriger vers la grotte, laissant seul un Enzo troublé, ayant du mal à savoir quoi penser de ce à quoi il venait d’assister. Malgré tout, un petit bruit réussi à attirer son attention : il s’agissait d’Anko, qui c’était réveillée et avait écoutée les deux hommes. Si elle n’était pas capable de comprendre en détail la langue des humains, elle avait parfaitement ressenti la tristesse du vieil homme. Elle fixa son père, semblant lui demander ce qu’il fallait faire. Ce dernier avait du mal à l’admettre, mais il comprenait ce que ressentait Balthazar. Il la vivait chaque jour, cette sensation que ce pour quoi on existait allait disparaitre, emportant tout ce qui nous rendait « vivant » avec lui. Il réfléchit pendant quelques instants, avant de s’adresser à son amie à écaille.
-An…. On va un peu changer nos habitudes, okay ?
Le lendemain matin, Balthazar Goldie se leva avant le soleil. Il ne voulait pas perdre de temps pour retraverser ses galeries en sens inverse, et en plus, il n’avait pas le courage de faire face à Enzo après le débordement d’émotions qu’il avait eu la veille. Il avait été un vieil homme solitaire à la recherche d’un peu de compagnie pour se confier, et il en avait honte. Récupérant ses affaires, il jeta un rapide coup d’œil vers le « lit » de ses hôtes pour constater avec stupeur que personne n’était dedans. Il se rendit aussi compte que sa lanterne avait disparu, ainsi que sa pioche de secours. Ne voyant pas d’autre endroit que ses galeries où un tel matériel pourrait être utile, le prospecteur s’enfonça à travers les couloirs de roches, progressant sans trop de problème, des années passées sous terre et dans des grottes lui ayant permit de développer un certain niveau de nyctalopie. Au bout d’une quinzaine de minute de marche rapide, il finit par retrouver Enzo et Anko, ainsi que sa pioche et sa lanterne qui se trouvait dans les mains de l’agent secret.
-Mais…. Par les couilles de Midas qu’est ce que vous êtes en train de foutre ?! Et pourquoi vous avez fauché mon matos ?!
Le cornu, sa lance attachée dans son dos (on ne sait jamais sur quoi on peut tomber dans les grottes), était en train de se servir de la petite lampe à huile pour éclairer une paroi de pierre se trouvant près de lui, et la scruter en détail.
-Bah, après ton discours de hier, An et moi on s’est creusés la tête et on s’est dit que c’est peut être parce que tu t’es toi-même torturé l’esprit avec des pensées désagréables que t’es passé à coté de l’or. Du coup, on a décidé de faire un ptit checking de tes galeries histoire d’être sur que t’ai rien raté. ALORS, TU TROUVE QUELQUE CHOSE AN ?
-SSSSSESSESEEEEE. KESHAAAAAAAA !
-RIEN NON PLUS DE MON COTÉ, J’CONTINU DE FOUILLER !
-Chuuuuuuut ! Ca sert à rien de chercher, c’est mon problème, je peux le régler tout seul. J’ai pas besoin de vous ! Et arrêtez de hurler vous allez attirer les créatures qui vivent dans ces galeries.
-Ecoutez Balthi, j’ai décidé que j’allais chercher si vous étiez passé à coté de filons d’or ou non, alors je vais vérifier si vous êtes ou si vous n’êtes pas passé à coté de filons d’or, point barre. Traitez moi d’égoïste si vous voulez, j’m’en fous, j’fais s’que je veux ! ALORS AN, TOUJOURS RIEN ?
-SHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA !
-MAIS BORDEL DE MERDE VOUS ALLEZ LA FERMER OUI ?!
-OH VOUS COMMENCEZ PAS HEIN ! J’AI PASSÉ UNE NUIT BLANCHE TOUT CA POUR VOUS RENDRE SERVICE, ALORS FAITE PAS CHIER !
-WRYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYY !
-C’était quoi ça ?
-Ssss ? KSAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA !!!!
-Des emmerdes….
Et pour confirmer les dires de l’ami Goldie, une grosse créature quadrupèdes, à la peau aussi sombre que le charbon (enfin, c’était dur de bien déterminer la couleur vu le noir qu’il faisait dans cette fichue grotte mais bon…) jailli de la pénombre, sautant de murs en murs, avant de s’accrocher au plafond à l’aide de puissantes griffes. Et dans l’une de ses pattes, elle tenait un certain anaconda bien connu des personnes ici présentes.
-ANKO !
-J’vous avais bien dit de pas gueuler…. Cette chose est un Chauve-Tourisque, une créature de la famille des pseudochiroptères qu’on trouve facilement dans les grandes cavernes de cette île. Elle est capable de grimper aux murs et de courir et bondir assez vite grâce à ses puissantes pattes. Et une fois que ces saloperies ont choppé une proie, pas la peine d’espérer qu’il la relâche. J’pense que vous pouvez dire adieu à votre serpent l’ami…
Enzo n’écoutais qu’à moitié le vieil homme. Son cerveau ne laissait passer que les informations les plus importantes vu la situation. C'est-à-dire les infos sur cette créature qui avait kidnappée An. Grâce à la lumière générée par la lanterne, le cornu pouvait voir le Chauve-Tourisque essayer de mordre son amie. Il pouvait voir le brave anaconda essayer de se défendre du mieux qu’il pouvait, mais étant malheureusement pour lui en partie bloqué par les puissants membres de la bête. Le CP devait aller aider son bébé. Il le fallait. Saisissant la lance dans son dos, il commença à essayer de sauter le plus haut possible pour tenter d’atteindre le ravisseur, mais rien n’y faisait, malgré tous ses efforts, ce dernier se trouvait beaucoup trop haut. Balthazar, lui, avait saisi son arme et commença à viser les deux animaux en train de se battre, mais le regard que lui lança l’assassin du gouvernement était largement assez expressif pour lui faire baisser son canon : si jamais il tirait, il avait toute les chances de toucher aussi Anko. Et si cela arrivait, le cornu se chargerait en personne de s’arranger pour qu’il n’ait plus à s’inquiéter de perdre ou non sa raison de vivre.
L’agent Hisachi, toujours en train de sauter sur place, réfléchissait à un autre moyen d’atteindre sa cible. Projeter sa lance ? Mauvaise idée, il risquait d’attraper aussi An avec. En fait, aucun projectile n’était sur à cause de la proximité des deux animaux. Accélérant son rythme de sauts, le cornu maudit son impuissance, son incapacité à atteindre une cible ayant pourtant l’air si proche, son incapacité à venir en aide à la seule personne comptant pour lui, et ses au fur et à mesure que ses pensées et ses émotions se mélangeaient, hurlaient dans son cerveau, son rythme de sauts continua à accélérer. Ses jambes se mirent à aller de plus en plus vite. Et, instinctivement, sans comprendre ce qui était en train de se passer tout en sachant parfaitement ce qu’il faisait, Enzo P. Hisachi se mit à hurler :
-GEPPOU !
Et, percutant l’air de plein fouet avec ses pieds, son corps se propulsa jusqu’à la hauteur de l’ange à écaille et du ravisseur. L’agent Hisachi avait enfin trouvé une bonne motivation. Ne prenant pas le temps de réfléchir, ou plutôt ayant déjà largement pensé à la façon de procéder, il donna un grand coup de lance au Chauve-Tourisque, Visant précisément entre les anneaux de l’anaconda, frappant si fort que la pointe de l’arme traversa le corps de l’animal et s’enfonça dans le plafond. Se servant de la lance, bien fixée à la roche, pour se maintenir en équilibre, le cornu tendit sa main vers le serpent, qui se déroula du corps de son agresseur avant de descendre lentement le long de l’arme pour rejoindre son meilleur ami.
-Désolé d’avoir réagit si lentement…
Retirant avec difficulté la longue pointe du mur, Enzo retomba sur le sol, utilisant le Tekkai pour amortir sa chute, avec son amie dans une main, et le cadavre du Chauve-Tourisque dans l’autre.
-Hé bah…. Ca c’était du saut, ou je ne m’y connais pas….. T’es vraiment surprenant gamin…
-Kéhéhé, merci, merci, mais faut pas vous étonner de me voir soulever des montagnes pour l’une de mes raisons de vivre…
-Gfihihi, t’as bien raison mon gars……. Une minute…. Je le sens, je le sens distinctement, la : il y a de l’or, tout près, la sensation est plus grande que d’habitude…. Où est il ? Où est il ?! Je perds la tête, c’est ça ?!
-Tu ressens de l’or ? Maintenant ? Attends, on va t’aider à chercher, on était la pour ça à la base et…… Une petite seconde…….
Le cornu se mit à détailler la carcasse de l’animal se trouvant au bout de sa lance. Puis, d’un coup, il utilisa le geppou pour se propulser de nouveau au plafond, utilisant l’arme pour se maintenir en l’air.
-Balthi ? T’as pas perdu la tête, et t’as pas non plus perdu ton flair. Soit content, le destin n’avait pas du tout l’intention de te mettre à la retraite !
Attrapant un stalactique se trouvant à porté, Enzo s’en servit pour rester accrocher au plafond, soutenu par Anko qui c’était enroulée autour du conne de pierre. Tirant un grand coup sur sa lance, il l’arracha de la roche, entrainant avec elle plusieurs morceau de pierre, provocant un minuscule éboulement, et laissant apparaitre…. Une superbe couche d’or.
-Elle était cachée la ta raison de vivre.
-Gf…..Gfa….Gfaha…..Gfahaha…GfahahahahahahahaHAHAHAHAHAHAHAHAHA, YIIIIPEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEE !
Son filon d’or découvert, et la preuve que sa carrière était loin d’être terminée donnée, Balthazar Goldie décida de ne pas perdre ses bonnes habitudes, et s’en alla sans tarder miner le plafond de l’immense galerie qu’il avait creusé. Il remercia chaleureusement Enzo du soutient qu’il lui avait apporté, et il voulu même lui offrir un peu d’or, mais l’agent du CP9 refusa, lui rétorquant « Qu’il avait ses propres raisons de vivre, et que pour l’instant, l’or ne l’aiderait pas à les maintenir en place. Il prit quand même quelques pépites, par principe, et aussi parce que ça reste un sale opportuniste quand il veut. Le vieux prospecteur, encore plus fringant que quand il avait vingt ans, offrit en plus un casque au cornu, lui disant que s’il avait envie de revenir le voir, il n’aurait qu’à mettre sa sur sa tête et avancer dans la galerie en suivant les pierres tombant du plafond.
Et Enzo retourna à sa grotte, heureux des évènements récents, et d’avoir enfin pu arriver à maîtriser le geppou. Le problème de la motivation pour apprendre les techniques restantes du Rokushiki était toujours présent, mais pour le moment, il n’avait aucune envie de s’embêter avec ça. Il décida plutôt d’aller dehors tester sa nouvelle technique, histoire de voir s’il pouvait attraper des oiseaux avec et se faire une bonne petite grillade. Parce qu’aider les gens, ça donnait faim bordel !
Enzo P. Hisachi était incapable d’accorder trop d’intérêt aux autres. On pouvait le décrire vulgairement comme un connard d’égoïste ne pensant qu’à ses miches et à celle de sons serpent. Mais ça ne le dénudait pas pour autant de tout sentiment humain, et il était parfaitement capable de ressentir une sympathie tout ce qu’il y a de plus sincère envers quelqu’un d’autre, même s’il s’agissait d’un pauvre vieillard tout aussi égoïste que lui.
Un CP "classique" chercherait probablement à apprendre le sixième style pour mieux servir le gouvernement, ou pour se sentir puissant. Enzo, lui, faisait plutôt ça pour se sentir en sécurité: parce qu'avec les compétences d'un sur-homme, il pourrait certes, mieux servir le gouvernement, mais il pourrait surtout mieux faire son boulot et donc mieux assurer sa longévité sociale et financière, et en plus cet art martial serait foutrement pratique pour arriver à se protéger (lui ou son reptile adoré) du danger. Ouais, Enzo P. Hisachi était un égoïste, et pourtant, ce trait de caractère qu'on pourrait classer comme "mauvais" l’amenait souvent à faire de grandes choses, et parfois des plus petites. La question étant: lesquelles des deux étaient les plus utiles?
Notre agent du gouvernement préféré (ceux qui ne sont pas d'accord avec cette idée son priés de sortir, merci bien) se trouvait dans sa grotte située dans un rocher bordant l'oasis du désert de Stamphead Island. Quand il y était revenu, durant la mâtiné, après avoir passé plusieurs jours en compagnie d'Atsuji Kaitô, l'homme lui enseignant le Rokushiki, le CP était plutôt joyeux. En effet, son professeur était content des progrès qu'il avait faits, il maîtrisait de mieux en mieux les arcanes du sixième style dont il était déjà capable de se servir, et il devait retourner s’entraîner en solo pour apprendre cette fois ci à utiliser le geppou. Une série d'évènements plutôt agréables, non? Le souci, c'est qu'une fois de retour sur son lieu d'entrainement, il se mit immédiatement à la pratique des exercices que Kaitô lui avait demandé de réaliser, et au bout de trois heures d'entrainement, rien. Pas le moindre progrès, il n'était pas capable de frapper l'air, il n'arrivait pas à sauter plus haut qu'avant, il n'était pas fichu de se propulser. L'agent Hisachi, qui avait pourtant l'impression de bien progresser, en prit un coup au moral. Pourtant, il se doutait bien de la raison pour laquelle il n'arrivait pas à utiliser le Geppou: à cause d'un manque de vraie motivation, et c'est ça qui l'embêtait. Parce qu'il pensait être déjà suffisamment motivé comme ça, il pensait que la volonté de vraiment apprendre le Rokushiki c'était imprégnée dans son esprit, mais de toute évidence, ce n'était pas le cas. Et cela voulait surtout dire que la seule chose qui le motiverait efficacement maintenant, c'est de mettre sa vie en danger.
L'idée en elle même n'était pas mauvaise: reprendre le principe de la carotte mais en rajoutant un banana croco mutant zombi robot avec des sabres lasers derrière l’âne, histoire d'être sur qu'il va vraiment continuer à avancer. Ce qui gênait Enzo, c'était la partie "risque de mort", parce que même s'il était capable d'accomplir des prouesses incroyables lorsqu'il se sentait en danger de mort, le cornu n'aimait pas vraiment cette sensation. De un parce que c'est très désagréable, de deux parce que ça le fait angoisser facilement ce qui n'est pas une bonne chose pour lui, et de trois parce qu'il existe toujours cette probabilité de vraiment crever et que pour le faire paniquer cette probabilité est souvent très élevé. Après, ce n'est pas un expert en pourcentage, mais le CP préfère quand même quand son risque de mortalité est proche de zéro, voir en dessous.
Bref, l’ami Hisachi était bien contrarié par sa situation et avec Anko, il retournait son cerveau dans tous les sens à la recherche d’un moyen efficace et peu dangereux de réussir à se motiver. Faisant les 100 pas et perdu dans ses pensées, il n’entendit pas (contrairement à An, qui encore une fois se montrait plus attentive que son père) les bruits de pioches résonnant derrière l’une des parois de la grotte. Il ne remarqua pas non plus que quelque chose de pointu se mettait à percer petit à petit la dite paroi. Et c’est à peine s’il prit conscience de l’effondrement de cette dernière. Oui, Enzo avait beau être paranoïaque et constamment sur ses gardes, une fois perdu dans ses pensées, il fallait un buster call pour le ramener sur Terre. Sentant enfin que son serpent lui tirait la jambe, le cornu se retourna et découvrit avec stupeur un trou dans l’un des murs de son habitation temporaire, ainsi qu’un vieil homme. Petit, barbu, ce dernier avait une pioche dans une main et un flingue dans l’autre. Et le dit flingue était pointé sur le CP, ce qui pourrait s’expliquer par le fait que le papy n’avait pas l’air content du tout.
-Sale petit merdeux, qu’est ce que tu fous dans ma galerie ?! T’es la pour me piquer mes trouvailles, c’est ça ?!
- Euh, plaît-il?
-J’ai dis “sale petit merdeux, qu’est ce que tu fous dans ma galerie”. Bon sang, c’est moi qui ai plus de trios quart de siècle et c’est toi qu’est complètement sourdingue?!
-Mon audition est parfaite monsieur, et c’est plutôt moi qui devrait vous demander ce que vous fichez dans ma grotte!
Enzo parlait avec assurance, visiblement peu impressionné par l’arme pointée sur lui. Bon, en réalité, il était un peu paniqué et il utilisait le tekkai au cas où un coup partirait.
-Dit donc, t’es gonflé de te pointer chez les gens et de faire comme si c’était chez toi, gamin !
-C’est VOUS qui êtes gonflé l’ancêtre, ça fait plus d’une presque deux semaines que je squatte cette caverne, et vous, vous venez d’y rentrer par effraction !
-Non seulement t’es de mauvaise fois gamin, mais en plus t’es con ! C’est pas une caverne, ça, c’est une galerie, une galerie souterraine, revois ta géologie !
-J’crois que c’est ton cerveau la galerie souterraine, papy ! C’est une grotte ici, une grotte bien à la surface se trouvant en plein milieu d’un désert !
-D’un désert ? Mais qu’est ce qu’il me chante l’autre ?! Laisse-moi voir ça.
Le vieillard, tout en continuant à garder l’agent Hisachi en joue, se mit à longer les murs de la caverne. Il finit par apercevoir de la lumière, et se dirigea dans sa direction. Une fois dehors, il du protéger son visage avec ses main, étant trop ébloui par les rayons du soleil. Constatant son erreur, il se retourna vers le cornu, une once de honte parcourant son visage.
-Euh…. Bah…… Bah tu vois, c’est une caverne cet endroit ! Depuis l’début je te le répète mais nooooon, môsieur n’a pas voulu m’écouter ! C’est bien le problème des jeunes ça : ils n’en font qu’à leur tête.
Et pour seule réponse, l’ancêtre se prit une claque dans la tronche.
*SBAF*
-Bordel mais ça va pas de frapper un vieil homme sans défense ?! T’es pas bien toi ?!
*SBAF*
-Tu l’auras voulu ptit chieur !
Pointant son arme sur l’agent secret, le vieux mineur constata avec horreur que les canons avaient été bouchés avec ce qui semblait être de la fourrure. Visiblement, Enzo était passé par la pendant que le vieil homme protégeait ses yeux du soleil. Le CP, lui, était toujours remonté contre le barbu, et il lui colla une troisième baffe histoire que l’information « faut pas me faire chier, et faut pas jouer les faux culs avec moi », à défaut d’être retenue par son cerveau âgé, soit bien imprégnée dans sa mémoire physique.
*SBAF*
-Okay cette fois tu l’auras voulu !
Ayant marre de se faire claquer tel le fessier d’une femme passant à proximité d’un banc de beauf, le prospecteur fonça sur Enzo, qui, surprit par la vitalité du vieil homme, n’eu pas le temps d’esquiver le coup de crosse en pleine cote lui étant destiné. Mais l’autre ne s’arrêta pas la : saisissant sa pioche, il commença à enchainer les frappes en direction du pauvre cornu, qui évita tant bien que mal les assauts du mineur. Il avait beau ne plus être tout jeune, il savait encore bien se défendre le gaillard. Il attaquait si vite que même l’assassin du gouvernement eu du mal à trouver une ouverture pour riposter. Il décida donc de sortir sa botte secrète. Le grand-père, lui, entendit juste un sifflement s’échapper de la bouche de son adversaire. N’y prêtant pas attention au début, il comprit son erreur quand il vit que son bras tenant l’arme à feu ne répondait plus. Quelque chose le tirait fermement vers l’arrière : c’était An, qui avait enroulée sa queue autour du canon scié de l’ancêtre. En fait, voyant que quelqu’un attaquait son père, elle était déjà prête à planter une corne de bersebison trainant par la dans le dos de l’agresseur, mais le sifflement lui fit comprendre qu’Enzo voulait ce type vivant. Loin de se laisser décourager, le prospecteur, lui, lâcha son arme pour se jeter sur le cornu, prêt à lui asséner un coup de pioche mortel sur le crane. Malheureusement pour lui, sa cible trouvait qu’il commençait à agir un peu trop dangereusement à son goût.
- Tekkai !
Et dans un grand mélange de bruits métalliques et de craquements, l’outil du prospecteur se brisa, la tête complètement tordu, s’étant visiblement montré moins solide que la technique du sixième style. Le propriétaire de l’objet, lui, était complètement estomaqué. Il en avait vu des choses tout au long de sa vie, mais ÇA, ça sortait quand même pas mal de l’ordinaire. La surprise l’ayant pas mal calmé, une fois le vieil homme remit de ses émotions, il accepta de s’expliquer calmement : il se nommait Balthazar Goldie et était chercher d’or, le meilleur selon lui. Il avait commencé à creuser une galerie dans la montagne près des cotes de l’île, et, sentant de plus en plus d’or au fur et à mesure qu’il avançait, il avait finit par creuser jusqu’à cette caverne. Même s’il n’avait pas apprécié la façon dont Balthazar avait débarqué, Enzo devait quand même admettre qu’il était balèze le bonhomme, pour se faire un tel chemin à travers la roche tout seul.
Voulant éviter tout problème, le cornu s’excusa pour la pioche cassée, mais il demanda au vieil homme de bien vouloir partir et de ne plus tenter de l’attaquer. Ce dernier accepta, mais il demanda quand même au cornu l’hospitalité pour la nuit, voulant reprendre des forces avant de repartir affronter les souterrains. Bien que moyennement rassuré, le jeune homme accepta, mais à la condition que le canon scié reste hors de porté du prospecteur. Autant prendre ses précautions dès maintenant. Une fois la nuit tombé, le CP ne dormit que d’un œil, sa parano ayant refait surface. Il se sentait en danger, et le plus agaçant dans tout ça, c’est qu’il ne trouvait même pas ne façon de reconvertir ce sentiment en motivation pour se geppou, le fait d’être dans une grotte ne rendant pas particulièrement utile la capacité à sauter sur l’air. Et visiblement, il avait bien fait de se montrer méfiant, car, au cours de la nuit, le cornu entendit le prospecteur se lever. Jetant un coup d’œil discret pour repérer sa position et se préparer à se défendre, Enzo réalisa que le vieil homme se dirigeait vers l’entrée de la grotte. Après quelques minutes à entendre dans sa tête son instinct de survie batailler avec sa curiosité, il finit par décider de se lever pour aller à la rencontre du vieux Balthazar.
-Tu sais papy, si tu veux me buter dans mon sommeil, faut te diriger vers mon lit, hein…
- Ferme-la, sale blanc bec. J’t’ai donné ma parole que j’te ferais rien,e t j’suis un homme d’honneur.
Un peu rassuré par les propos du vieillard (et aussi parce qu’il venait de vérifier si il avait ou non une arme), le CP se rapprocha de lui et s’assit sur un morceau de tronc de palmier trainant au bord de l’eau. Goldie décida lui aussi de se poser, l’air plutôt attristé.
-Qu’est ce qu’il y a ? C’est d’avoir perdu ta pioche qui te met dans cet état la ? Je peux te la rembourser si tu veux, ou t’en fabriquer une autre…
-Non, non, j’m’en fiche de la pioche, j’en ai plus en réserve que les asticots qu’une mouche peut lâcher dans un repas laissé à l’air libre… Non, ce qui me gêne, c’est….. Gamin, à tu une raison de vivre ?
-Ki….Kihihihihi, d’habitude c’est moi qui pose des questions du genre. Oui Balthi, j’ai une raison de vivre. Mais ça serait long de te l’expliquer en détail, et pour l’instant, ce qui nous intéresse, c’est toi.
-Ouais, probablement….. Bah tu vois, moi, ma raison de vivre, c’est l’or ! Tu peux me traiter de sale rapia, de vautour, de monstre vénal et d’égoïste, mais je m’en fous ! J’ai toujours vécu pour l’or, j’ai tout sacrifié pour l’or, ça a toujours été ma passion, ma vie, mon rêve. Jamais je n’ai cessé d’en chercher, et jamais je n’ai cessé d’en trouver !
-Ha, si tu savais….. Ce n’est pas moi qui vais te reprocher de penser comme ça…….
Mais le vieux prospecteur n’écoutait plus l’agent Hisachi. Il était lancé, maintenant, plus rien ne pourrait l’empêcher de dire ce qu’il avait sur le cœur, comme s’il avait attendu de trouver une oreille plus ou moins attentive uniquement pour se soulager.
-Oui, j’ai cherché l’or, j’ai trouvé l’or, j’ai aimé l’or, j’ai vécu l’or ! Tellement que je suis devenu capable….. Capable de le sentir ! Tu dois surement me prendre pour un vieux cinglé, mais jte jure sur mon caleçon porte bonheur que c’est vrai !
Le mineur se mit à regarder Enzo, attendant une réponse. Ou plutôt, attendant LA réponse qu’il voulait entendre. Et aujourd’hui, le cornu n’avait pas envie de décevoir l’homme.
-J’te crois Balthi, jte crois sur parole !
-Gfaha, merci ptit gars, merci…. Ca fait du bien de savoir qu’on est pas encore totalement bon pour l’asile…. Enfin, c’est ce que je m’serais dit il y a encore quelques temps, mais j’dois t’avouer que je commence à douter sérieusement….
-C'est-à-dire ? Il s’est passé quelque chose ?
-Ouais…. En quelque sorte….. En fait, tu sais pourquoi j’ai creusé aussi loin ? Jt’ai dis que j’avais trouvé de l’or tout le long de la grotte, non ? Bah, en fait, j’t’ai un peu menti : j’ai senti l’or, j’l’ai senti tout le long de cette foutue galerie, mais impossible de mettre la main dessus. C’est pour ça que j’ai avancé, sans cesses, espérant enfin découvrir l’endroit où se planquait se satané métal, mais rien. Que dalle. J’ai même pas trouvé une petite pépite…. Jme dis… Jme dis que c’est peut être le destin qui m’envoi un signe… Qu’il essai de me faire comprendre que j’ai fait mon temps, que c’est bon, j’peux raccrocher mon tablier maintenant….
Des larmes commencèrent à couler le long des joues de Goldie. Sa voix, pourtant d’habitude forte et puissante, devint soudainement fatiguée, trainante, un peu cassée.
–J’ai vécu pour l’or…. J’ai existé pour l’or…. Si jamais j’arrête d’en chercher, il me reste quoi ?! Je… je ne veux pas que ça se termine maintenant. Je sais que je peux encore continuer à en trouver. Mais…. Mais si j’avais raison ? Si l’âge commençait à avoir définitivement raison de moi ?! Je….. je……..
D’un coup, il se ressaisit. Essuyant ses larmes et se levant d’un bon, ton du prospecteur redevint le même qu’avant.
-Erf, pardon gamin, j’dois surement t’emmerder avec mes histoires. T’inquiète pas pour moi, ça va aller. Bon, j’retourne me coucher moi, t’as pas à t’en faire, demain matin à l’aube, je serais parti sans laisser de trace !
Et le vieillard tourna les talons pour se diriger vers la grotte, laissant seul un Enzo troublé, ayant du mal à savoir quoi penser de ce à quoi il venait d’assister. Malgré tout, un petit bruit réussi à attirer son attention : il s’agissait d’Anko, qui c’était réveillée et avait écoutée les deux hommes. Si elle n’était pas capable de comprendre en détail la langue des humains, elle avait parfaitement ressenti la tristesse du vieil homme. Elle fixa son père, semblant lui demander ce qu’il fallait faire. Ce dernier avait du mal à l’admettre, mais il comprenait ce que ressentait Balthazar. Il la vivait chaque jour, cette sensation que ce pour quoi on existait allait disparaitre, emportant tout ce qui nous rendait « vivant » avec lui. Il réfléchit pendant quelques instants, avant de s’adresser à son amie à écaille.
-An…. On va un peu changer nos habitudes, okay ?
Le lendemain matin, Balthazar Goldie se leva avant le soleil. Il ne voulait pas perdre de temps pour retraverser ses galeries en sens inverse, et en plus, il n’avait pas le courage de faire face à Enzo après le débordement d’émotions qu’il avait eu la veille. Il avait été un vieil homme solitaire à la recherche d’un peu de compagnie pour se confier, et il en avait honte. Récupérant ses affaires, il jeta un rapide coup d’œil vers le « lit » de ses hôtes pour constater avec stupeur que personne n’était dedans. Il se rendit aussi compte que sa lanterne avait disparu, ainsi que sa pioche de secours. Ne voyant pas d’autre endroit que ses galeries où un tel matériel pourrait être utile, le prospecteur s’enfonça à travers les couloirs de roches, progressant sans trop de problème, des années passées sous terre et dans des grottes lui ayant permit de développer un certain niveau de nyctalopie. Au bout d’une quinzaine de minute de marche rapide, il finit par retrouver Enzo et Anko, ainsi que sa pioche et sa lanterne qui se trouvait dans les mains de l’agent secret.
-Mais…. Par les couilles de Midas qu’est ce que vous êtes en train de foutre ?! Et pourquoi vous avez fauché mon matos ?!
Le cornu, sa lance attachée dans son dos (on ne sait jamais sur quoi on peut tomber dans les grottes), était en train de se servir de la petite lampe à huile pour éclairer une paroi de pierre se trouvant près de lui, et la scruter en détail.
-Bah, après ton discours de hier, An et moi on s’est creusés la tête et on s’est dit que c’est peut être parce que tu t’es toi-même torturé l’esprit avec des pensées désagréables que t’es passé à coté de l’or. Du coup, on a décidé de faire un ptit checking de tes galeries histoire d’être sur que t’ai rien raté. ALORS, TU TROUVE QUELQUE CHOSE AN ?
-SSSSSESSESEEEEE. KESHAAAAAAAA !
-RIEN NON PLUS DE MON COTÉ, J’CONTINU DE FOUILLER !
-Chuuuuuuut ! Ca sert à rien de chercher, c’est mon problème, je peux le régler tout seul. J’ai pas besoin de vous ! Et arrêtez de hurler vous allez attirer les créatures qui vivent dans ces galeries.
-Ecoutez Balthi, j’ai décidé que j’allais chercher si vous étiez passé à coté de filons d’or ou non, alors je vais vérifier si vous êtes ou si vous n’êtes pas passé à coté de filons d’or, point barre. Traitez moi d’égoïste si vous voulez, j’m’en fous, j’fais s’que je veux ! ALORS AN, TOUJOURS RIEN ?
-SHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA !
-MAIS BORDEL DE MERDE VOUS ALLEZ LA FERMER OUI ?!
-OH VOUS COMMENCEZ PAS HEIN ! J’AI PASSÉ UNE NUIT BLANCHE TOUT CA POUR VOUS RENDRE SERVICE, ALORS FAITE PAS CHIER !
-WRYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYY !
-C’était quoi ça ?
-Ssss ? KSAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA !!!!
-Des emmerdes….
Et pour confirmer les dires de l’ami Goldie, une grosse créature quadrupèdes, à la peau aussi sombre que le charbon (enfin, c’était dur de bien déterminer la couleur vu le noir qu’il faisait dans cette fichue grotte mais bon…) jailli de la pénombre, sautant de murs en murs, avant de s’accrocher au plafond à l’aide de puissantes griffes. Et dans l’une de ses pattes, elle tenait un certain anaconda bien connu des personnes ici présentes.
-ANKO !
-J’vous avais bien dit de pas gueuler…. Cette chose est un Chauve-Tourisque, une créature de la famille des pseudochiroptères qu’on trouve facilement dans les grandes cavernes de cette île. Elle est capable de grimper aux murs et de courir et bondir assez vite grâce à ses puissantes pattes. Et une fois que ces saloperies ont choppé une proie, pas la peine d’espérer qu’il la relâche. J’pense que vous pouvez dire adieu à votre serpent l’ami…
Enzo n’écoutais qu’à moitié le vieil homme. Son cerveau ne laissait passer que les informations les plus importantes vu la situation. C'est-à-dire les infos sur cette créature qui avait kidnappée An. Grâce à la lumière générée par la lanterne, le cornu pouvait voir le Chauve-Tourisque essayer de mordre son amie. Il pouvait voir le brave anaconda essayer de se défendre du mieux qu’il pouvait, mais étant malheureusement pour lui en partie bloqué par les puissants membres de la bête. Le CP devait aller aider son bébé. Il le fallait. Saisissant la lance dans son dos, il commença à essayer de sauter le plus haut possible pour tenter d’atteindre le ravisseur, mais rien n’y faisait, malgré tous ses efforts, ce dernier se trouvait beaucoup trop haut. Balthazar, lui, avait saisi son arme et commença à viser les deux animaux en train de se battre, mais le regard que lui lança l’assassin du gouvernement était largement assez expressif pour lui faire baisser son canon : si jamais il tirait, il avait toute les chances de toucher aussi Anko. Et si cela arrivait, le cornu se chargerait en personne de s’arranger pour qu’il n’ait plus à s’inquiéter de perdre ou non sa raison de vivre.
L’agent Hisachi, toujours en train de sauter sur place, réfléchissait à un autre moyen d’atteindre sa cible. Projeter sa lance ? Mauvaise idée, il risquait d’attraper aussi An avec. En fait, aucun projectile n’était sur à cause de la proximité des deux animaux. Accélérant son rythme de sauts, le cornu maudit son impuissance, son incapacité à atteindre une cible ayant pourtant l’air si proche, son incapacité à venir en aide à la seule personne comptant pour lui, et ses au fur et à mesure que ses pensées et ses émotions se mélangeaient, hurlaient dans son cerveau, son rythme de sauts continua à accélérer. Ses jambes se mirent à aller de plus en plus vite. Et, instinctivement, sans comprendre ce qui était en train de se passer tout en sachant parfaitement ce qu’il faisait, Enzo P. Hisachi se mit à hurler :
-GEPPOU !
Et, percutant l’air de plein fouet avec ses pieds, son corps se propulsa jusqu’à la hauteur de l’ange à écaille et du ravisseur. L’agent Hisachi avait enfin trouvé une bonne motivation. Ne prenant pas le temps de réfléchir, ou plutôt ayant déjà largement pensé à la façon de procéder, il donna un grand coup de lance au Chauve-Tourisque, Visant précisément entre les anneaux de l’anaconda, frappant si fort que la pointe de l’arme traversa le corps de l’animal et s’enfonça dans le plafond. Se servant de la lance, bien fixée à la roche, pour se maintenir en équilibre, le cornu tendit sa main vers le serpent, qui se déroula du corps de son agresseur avant de descendre lentement le long de l’arme pour rejoindre son meilleur ami.
-Désolé d’avoir réagit si lentement…
Retirant avec difficulté la longue pointe du mur, Enzo retomba sur le sol, utilisant le Tekkai pour amortir sa chute, avec son amie dans une main, et le cadavre du Chauve-Tourisque dans l’autre.
-Hé bah…. Ca c’était du saut, ou je ne m’y connais pas….. T’es vraiment surprenant gamin…
-Kéhéhé, merci, merci, mais faut pas vous étonner de me voir soulever des montagnes pour l’une de mes raisons de vivre…
-Gfihihi, t’as bien raison mon gars……. Une minute…. Je le sens, je le sens distinctement, la : il y a de l’or, tout près, la sensation est plus grande que d’habitude…. Où est il ? Où est il ?! Je perds la tête, c’est ça ?!
-Tu ressens de l’or ? Maintenant ? Attends, on va t’aider à chercher, on était la pour ça à la base et…… Une petite seconde…….
Le cornu se mit à détailler la carcasse de l’animal se trouvant au bout de sa lance. Puis, d’un coup, il utilisa le geppou pour se propulser de nouveau au plafond, utilisant l’arme pour se maintenir en l’air.
-Balthi ? T’as pas perdu la tête, et t’as pas non plus perdu ton flair. Soit content, le destin n’avait pas du tout l’intention de te mettre à la retraite !
Attrapant un stalactique se trouvant à porté, Enzo s’en servit pour rester accrocher au plafond, soutenu par Anko qui c’était enroulée autour du conne de pierre. Tirant un grand coup sur sa lance, il l’arracha de la roche, entrainant avec elle plusieurs morceau de pierre, provocant un minuscule éboulement, et laissant apparaitre…. Une superbe couche d’or.
-Elle était cachée la ta raison de vivre.
-Gf…..Gfa….Gfaha…..Gfahaha…GfahahahahahahahaHAHAHAHAHAHAHAHAHA, YIIIIPEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEE !
Son filon d’or découvert, et la preuve que sa carrière était loin d’être terminée donnée, Balthazar Goldie décida de ne pas perdre ses bonnes habitudes, et s’en alla sans tarder miner le plafond de l’immense galerie qu’il avait creusé. Il remercia chaleureusement Enzo du soutient qu’il lui avait apporté, et il voulu même lui offrir un peu d’or, mais l’agent du CP9 refusa, lui rétorquant « Qu’il avait ses propres raisons de vivre, et que pour l’instant, l’or ne l’aiderait pas à les maintenir en place. Il prit quand même quelques pépites, par principe, et aussi parce que ça reste un sale opportuniste quand il veut. Le vieux prospecteur, encore plus fringant que quand il avait vingt ans, offrit en plus un casque au cornu, lui disant que s’il avait envie de revenir le voir, il n’aurait qu’à mettre sa sur sa tête et avancer dans la galerie en suivant les pierres tombant du plafond.
Et Enzo retourna à sa grotte, heureux des évènements récents, et d’avoir enfin pu arriver à maîtriser le geppou. Le problème de la motivation pour apprendre les techniques restantes du Rokushiki était toujours présent, mais pour le moment, il n’avait aucune envie de s’embêter avec ça. Il décida plutôt d’aller dehors tester sa nouvelle technique, histoire de voir s’il pouvait attraper des oiseaux avec et se faire une bonne petite grillade. Parce qu’aider les gens, ça donnait faim bordel !
Enzo P. Hisachi était incapable d’accorder trop d’intérêt aux autres. On pouvait le décrire vulgairement comme un connard d’égoïste ne pensant qu’à ses miches et à celle de sons serpent. Mais ça ne le dénudait pas pour autant de tout sentiment humain, et il était parfaitement capable de ressentir une sympathie tout ce qu’il y a de plus sincère envers quelqu’un d’autre, même s’il s’agissait d’un pauvre vieillard tout aussi égoïste que lui.
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