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Qui me harasse m'enseigne la force

Ce RP se situe après l'event de South Blue et mon -futur- RP avec Pludbus au cours duquel Shaï mange son FDD. Je reste volontairement floue sur les relations aux autres pour pouvoir RP cette période si l'occassion se présente. Shaï n'utilisera pas son FDD lors de l'entraînement pour des raisons expliquées RP parlant.



    Je crois que le pire dans tout ça était que j'avais été volontaire. J'avais signé de moi-même. Pire, j'avais dû supplier et faire jouer mes contacts familiaux pour avoir le privilège de poser un doigt de pieds sur cette foutue base.
    Comme quoi, j'étais de loin ma pire ennemie.

    A l'heure actuelle, je n'avais qu'une envie : dormir. Si je n'avais pas déjà si mal au dos – pff, si seulement ce n'était qu'au dos – j'aurais été capable de m'étendre là, sur terre, dans la poussière et m'endormir ici, avec les cailloux comme sommier.
    Dormir et pas autre chose. Sûrement pas ressasser ce sentiment bizarre qui s'emparait de moi à chaque fois que je me demandais ce que je faisais ici, ce que m'amenait systématiquement à me questionner sur ma santé mentale et m'ébahir – une nouvelle et énième fois – sur le fait que j'ai voulu venir ici.
    Oui dormir. Juste dormir. Je n'en demandais pas plus.
    Cela faisait des heures que je n'avais plus ressenti les symptômes de la faim qui m'avait pourtant tiraillée les entrailles plus tôt dans la journée. Ou était-ce le début de soirée ? Je ne savais plus. Les détails des derniers jours s'estompaient, coulant les uns sur les autres comme la peinture à l'eau dégorgeait sous la pluie. Je ne savais plus rien. Ni l'heure, ni la date, ni même vraiment où j'étais, à part cette idée fixe que je venais de découvrir l'enfer sur terre. Oui, je me trouvais sans aucun doute à la gueule béante du Tartare et je goûtais en avant-première de tout ce qui m'arriverait après ma mort.
    Dormir.
    Dormir et pas manger. Et surtout pas se laver. Ah, ça, ça avait été la première leçon que j'avais dû m'avaler. Ça et pas un repas pourtant bien mérité. Se laver ne servait à rien quand on luttait pour survivre. C'était même pire. Le temps d'une douche bien chaude, les muscles se relaxaient un peu et votre âme oubliait ses tourments. Le retour sur le champ de torture n'en était au final que plus douloureux que jamais. Non, valait mieux rester sale et puante et couverte de bleus, bosses et autres plaies et encaisser les coups du mieux possible. « Je souffre, donc je vie ». Je n'avais jamais compris ce dicton que mon aîné m'avait sorti plusieurs. Oh, Angus, comme je te comprends maintenant. Et comme je te déteste aussi, toi qui semble faire de tout ça une simple ballade au parc.

    Et dire que j'avais été volontaire pour ça...

    Je voudrais seulement dormir. Juste ça. Pendant une heure, ou même trente minutes. Juste fermer les yeux et oublier ce bourbier dans lequel on s'enfonçait, l'averse continuelle qui martelait de piqûres glacées mon corps et cette douleur lancinante qui m'empêchait de penser à autre chose que « Aie. J'ai mal. Achevez-moi. »

    Sauf qu'il m'était impossible d'abandonner. Ma mission était pourtant simple. Atteindre le point de ralliement de l'autre côté de l'île, et ce dans la durée impartie de cinq jours, et si possible avant les autres. Tout autre état final était considérer comme un échec. Abandonner... Ce mot n'existait pas dans cet enfer. On vivait pour souffrir. Arrêter de souffrir, c'était comme arrêter de respirer. Donc, atteindre le camp. A ce point de notre mission, les autres, on s'en foutait. On voulait juste y arriver, pour que ça s'arrête. Mais merde à la fin ! Traverser une île et grimper une petite colline, ça ne devrait pas être si difficile ! Les mots faisaient que ça semblait facile. Les relevés topographiques faisaient que ça semblait facile
    Avec Garry Cooper, facile est synonyme de mort à chaque seconde. Il n'y avait ici pas une chose morte, vivante ou inerte qui n'avait pas vouée son existence à nous meurtrir d'une façon ou d'une autre. Les caillasses mêmes semblaient avoir un don inné pour s’infiltrer dans vos chaussures où techniquement il n'y a pas d'espace pour s’infiltrer. La moitié des plantes ici étaient toxiques au simple toucher et le reste nourrissait insectes, serpents ou autres joyeusetés animalières qui étaient nées pour nous en vouloir, et ce jusqu'au sang et au-delà. Mince, j'avais été attaquée pour une sorte de poule. Une poule bon sang !!! Ceci dit, une poule avec des griffes comme ça, je n'appelle pas ça non plus une poule, mais mon cerveau est bien trop éreinté pour passer au-delà de l'image de trucs à plumes blanc, avec des ailes atrophiées, deux pattes et qui picorent en pondant = poules.
    - « Alors les gonzesses ? Vous n'avancez plus ? Vous voulez peut-être qu'on vienne vous tenir par la main ? J'vous signale que vous n'avez plus que trois heures pour arriver à votre putain point de ralliement et pour le moment, c'est mon pied qui va rallier votre cul ! Bougez-vous, bandes d'enfoirés ! »

    Quelque part dans la frondaison des arbres, un système de haut-parleurs débitait continuellement depuis le début de l'épreuve de survie la si douce et mélodieuse voix de notre instructeur. A croire que c'était un cyborg ce mec. Cinq jours qu'il nous gueulait dessus à distance, sans jamais faillir. Au début, on avait pensé que c'était un escargophone pré-enregistré, mais l'acuité des beuglantes que Le Formateur nous envoyait dans la tronche ne laissait pas planter un seul doute : il nous voyait, nous traquait. Big Brother était parmi nous. Et inlassablement, il hurlait, nous empêchant de dormir ou même de nous concentrer. On pensait qu'on allait s'y faire, qu'au bout d'un moment, ces remontrances deviendraient comme un bruit de fond, tout comme la résonance de la pluie sur nos casques ou les croassements des crapauds. Que dalle. On ne savait pas comme c'était possible, mais ouais, le caporal nous tannait encore et encore, s'immisçant dans notre cerveau 24/7.

    « On », c'était la bande d'éclopés qui formait avec moi l'équipe jaune. Cinq clampins qui comme moi-même avaient désiré se retrouver dans une île au climat tropical, à barboter dans la gadoue et la merde de poules-qui-ne-sont-pas-des-poules, entourés de dangers... Tous des gars. Les deux autres filles avaient été réparties dans l'équipe vert et l'équipe brune. La tronche des cinq marines quand ils avaient compris que c'était moi, 'leur' fille. Je suis même certaine que l'un deux a considéré très sérieuselment le choix de se tirer une balle dans le genou, là, sur le tarmac d'embarquement, plutôt que de faire équipe avec moi. Ceci dit, connaissant Le Formateur, il l'aurait chargé dans la navette et le gars n'aurait eu que le temps de la traversée pour se faire rafistoler avant de se payer la tranche de rigolade qu'était l'épreuve de survie du BAN. Tout ça pour vous dire que ma présence avait démoralisé tout le monde avant même que le test n'eût commencé.

    Il faut dire que techniquement, je n'avais rien à faire ici.
    Le BAN, ce n'était pas tellement pour les Cipher Pol à la base.
    Le BAN, c'était encore moins pour les Cipher Pol dont les affectations les menaient plus derrière un bureau que sur le terrain.
    Le BAN, c'était juste pas fait pour une poulette bimbo fifille à papa comme moi. Surtout quand elle – moi – avait massacré son entraînement de base, poussant deux ou trois instructeurs à la dépression mentale ou au découragement le plus total.

    Pourtant j'y étais.
    Et c'est moi qui avais demandé à y aller.
    Et malgré tout, je continuais à croire – enfin, si j'en avais les capacités mentales – que c'était ma meilleure décision jamais prise.
    Comme quoi, meilleure n'est pas forcément un synonyme de sage.

    Mais depuis quand il y avait quelque chose de sage dans ma vie ?
    Déjà gamine, j'étais insupportable. Une véritable peste, pourrie-gâtée. Odieuse et hautaine envers les « moins que soi », persifleuse et aigre-douce pour les semblables, véritable belle du sud, j'avais été éduquée pour me réjouir du malheur des autres et en tous points chercher à améliorer ma condition et celle de ma famille. Je n'avais jamais questionné cet état des choses et encore moins les décisions de mes parents. J'aurais obéis et in fine, pas de doute que je me saurais satisfaite d'une vie de bourgeoise pondeuse de chiards tout aussi étriqués d'esprit que les générations précédentes.
    Sauf que je n'étais pas simplement l'adorable impertinente.
    J'étais avant tout et surtout une chieuse, et ça avait tout naturellement que j'avais fait ma crise d'adolescence en envoyant tout péter. Devenir un agent du gouvernement et non pas une Marine, et y faire carrière, plutôt que de contenter d'un mariage avec un officier supérieur.
    Et encore une fois tout détruire pour devenir révolutionnaire. Trahir mes serments et œuvrer dans l'ombre pour aider des sociopathes assoiffés de sang.
    Et de décider que non, ce n'était pas ça que je voulais. De décider que j'allais faire autre chose, autrement... Si ça, c'était être sage, je ne donnais pas cher pour le devenir de ce monde...

    - « Vous savez, moi, je peux rester ici pendant encore des jours. Si personne ne bouge dans les dix minutes à venir, je double la durée de l'exercice ! Si vous pensiez savoir ce que c'est souffrir, vous vous trompez, mes donzelles. MAGNEZ-VOUS, bande tas d'enculés! »

    Et dire que Garry Cooper et moi étions parents... Parlez-moi encore de la génétique, hum ?
    Lors de mes premiers jours à la base du BAN, plusieurs milliers de kilomètres de ça, Henry Cooper – le jumeau du Formateur – et moi avions comparé notre arbre généalogique, et effectivement, nous avions des ancêtres communs à la quatrième arrière-grand-mère. Quand on disait que les Raven-Cooper était une dynastie de la Marine, on ne mentait pas. Tous les Cooper et tous les Raven des Blues et de Grand Line portant l'uniforme étaient liés par le sang.
    N'empêche... cousin au sixième degré ou pas... je détestai positivement Garry. Bon, ce n'était pas si ça me faisait quelque chose – et à lui encore moins. J'avais trahi mon père, alors un inconnu que je ne reverrai JAMAIS de ma vie. Jamais car soit je mourrai là, maintenant, ici... soit je m'arrangeai pour ne pas avoir à recroiser son chemin quand ma vie reprendrait son cours normal.

    Avec difficulté, je me hissai sur mes pieds pour suivre mon chef d'équipe. Titubant derrière lui, je repensai à tout ce qui m'était arrivé récemment, et ce qui avait motivé ma décision de venir ici.
    Car oui, c'était ma volonté. Je voulais venir ici. J'ai demandé, supplié, menacé pour que je vienne ici.

    Rappelle-t'en, Shaïness. Pour que ta maudite fierté te sauve encore la vie, pour que tu trouves la force en toi de lever le pied et de le poser un peu plus en avant. Et pour recommencer. Encore. Et encore. Marche, Shaïness. Tu as commencé, alors tu finiras. Tu ne leur laisseras pas la joie de se moquer de toi. Non que tu y portasses une attention particulière. Rappelle-toi ton serment. Au diable la dignité et l'honneur. Même si je dois mentir, tricher ou tuer, j'y arriverai. C'est ce que tu avais dit n'est-ce pas ? Alors souviens-toi que tu as demandé à venir ici.


Dernière édition par Shaïness Raven-Cooper le Ven 4 Jan 2013 - 22:35, édité 1 fois
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    - « Je désire être réellement apte au terrain. Savoir me défendre et défendre ce qui doit être protégé, et ce qui ne peut être protégé par soi-même »
    Je savais avant même d'avoir ouvert la bouche que ma réponse ne conviendrait pas. Mais que répondre au commandant de la base d'entraînement la plus réputée pour ses résultats et ses conditions d'entraînement sur la raison de ma candidature ? Mouais, j'aurais pu essayer le classique « j'ai vu de la lumière et je suis entrée », mais je doutais du sens de l'humour du « Kaiser ».
    Le plus étonnant dans tout ça, c'est que j'avais dit la plus stricte vérité. Les récents événements de ma vie m'avaient marqué jusqu'à la moelle, et c'était une toute nouvelle femme qui se tenait devant l'empaffé de service. Question à la con, j'te jure.

    Je soupirai, mâchouillant ma lèvre inférieur. Il n'avait toujours pas bougé. A se demander s'il était conscient. Ou peut-être était-il en train de penser et ça, ça devait prendre du temps chez lui. Entre le peu de neurones que sa masse de muscles lui avait laissé et les nombreux coups qu'il s'était mangé, le Kaiser ne devait pas briller par son intelligence et sa rapidité d'analyse.
    Voyant qu'il n'allait rien dire, rien faire, et qu'il attendait en fait une autre réponse de ma part, j'eus envie de hurler et de le secouer comme un cocotier. Son avis ? Il importait peu, ma candidature avait été approuvée et il ne pouvait pas me mettre à la porte avant la fin de mon entraînement. Il n'était même pas mon chef, non pas apte à me retirer de ses rangs. J'étais une extérieure de la maison, et j'étais donc une invitée non désirée. Par contre, il pouvait me rendre la vie impossible et je me doutai que j'allais suffisamment en baver pour ne pas en rajouter.

    - « J'étais présente lors des attaques des QG de North et South Blues. J'ai également survécu à une île déserte avec un pépé pervers pernicieux. Ça prouve bien que j'ai des capacités. Mais je sais également que j'ai surtout eu un coup de bol phénoménal à chaque fois. Si on parlait en statistiques, j'aurais dû mourir. Et ça, ça ne me convient pas. Alors je viens m'entraîner. »
    - « Le BAN n'est pas la place la plus... propice à ça. Je n'ai pas de temps à perdre avec une Cipher Pol. Nous formons des officiers d'élite ici. »
    - « Je sais. Mon frère est passé par ici. Vous le savez très bien. Notre nom et la lettre de recommandation le prouvent. Vous en connaissez beaucoup des Raven-Cooper avec des cheveux roses ? »
    - « Et alors ? »
    - « Ceci prouve bien que j'ai totalement conscience de ce pourquoi je signe. Même si ce n'est pas la séquence totale d'entraînement, ça sera suffisamment dur pour me tester. On m'a dit qu'à mon niveau, ce n'était plus de la chance, c'était du potentiel. Que je n'ai pas vécu deux attaques de QG et en être sortie plus ou moins indemne par hasard. Du potentiel, hein ? Ben je veux connaître mes limites. Je veux que vous me cassiez. Il n'y a rien de mieux que le BAN pour casser les aspirants héros. Mais je teste aussi ma volonté. Je veux m'améliorer. Je ne veux plus être faible. Je veux faire quelque chose de bien, d'utile de mes dix doigts. Le potentiel, c'est bien, mais ce n'est pas tout. Je me lance un défi à moi-même. Jusqu'où ma détermination va me porter ? Combien de temps avant que vous ne me cassiez ? »
    - « Hum. J'ai personnellement parié sur sept semaines. »
    - « J'espère de tout mon cœur vous faire perdre ce pari. Douze semaines. Je les ferai toutes. »


A suivre
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    Mes premières minutes sur la base du BAN furent un excellent échantillon de ce que j'allais vivre pendant trois mois. Ici tout et tout le monde était direct, abrupte, avec une violence contenue à fleur de peau. Il n'y avait aucun confort au-delà du strict minimum ici et si la nourriture était consistante et bien cuisinée, elle n'en était pas pour autant un délice gustatif.
    Un emploi du temps spécifique à mes besoins avait été concocté pour moi. Je passais d'une classe à une autre, suivant les mêmes cours que les jeunes recrues ou les marines en rééducation. Si ça, c'était le niveau facile, je ne voulais pas savoir ce que c'était en mode domination. Dire qu'Angus avait a-do-ré sa période de formation au BAN. Mon frère devait être maso. Et parce que c'était moi, un Cipher Pol – et je me doute aussi parce qu'on n'avait guère apprécié le comment j'avais réussi à faire valider ma candidature – j'avais même des cours particuliers avec le Sergent Flores.

    Quand on dit que les femmes, c'était des teignes... On a grandement tort. Le Sergent Lyanna Flores n'a pas démérité son surnom d'Ombrageuse. Cette fille, c'est une véritable saloperie. Mesquine, ironique et particulièrement efficace pour vous faire retenir des points comme « ton flanc gauche est laissé à découvert » ou « tu ne bouges pas assez vite ». Moi qui pensais que même en y mettant du mien, je resterai une poire au niveau combat, je me découvris des trésors d'agilité et d'endurance. Je connaissais déjà le soru, déplacement rapide, et le geppô, déplacement aérien – mon préféré, en plus du kami-E, la défense de papier. Des techniques passives ou défensives et pour le Sergent MacBitch, ce n'était pas suffisant. Sous sa houlette, je dus donc parfaire mon Rokushiki, en apprenant le Ran Kyaku, le coup de pied lame d'air et le Shigan, le doigt pistolet. Le pire ? Elle ne possédait pas elle-même les techniques et je dus me débrouiller avec les bases qu'on avait vainement tenté de m'inculquer trois ans. Elle osa même me dire que c'était bien fait pour moi. AH !
    Lorsqu'elle voulut que je passe au Tekkaï, le corps de fer, elle dut admettre que je n'y arriverai pas dans ma condition actuelle. Mais au BAN, ce sont tous des cousins de McGuyver et à chaque problème, sa solution. Je manquais de muscle ? Que cela ne tienne, les séances de Garry Cooper feraient des merveilles sur moi.
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    J'ai été élevée pour être une dame.
    Quelque part au fond de moi, malgré tous mes efforts, ma famille, mon éducation ont laissé une trace indélébile. Je ne pourrai jamais considérer ce qui est bien et ce qui est mal autrement que par « ce qui est bien ou mal pour une dame », et « ce qu'une dame peut ou ne pas faire ». J'ai beau me dire que c'est un masque que j'affectionne, que je porte pour me cacher, il me faut toutefois accepter maintenant que c'est ce que je suis. Ou du moins une part de mon identité. Une bonne part en plus. Apparemment, le dicton comme quoi on ne peut se défaire du passé est vrai. Que les diables emportent le bon sens ancestral. Je ne veux pas être comme ceux et celles avant moi. C'est justement le point central de ma révolte.
    Ou plutôt... je veux respecter leur esprit, l'essence de leur héritage, et non pas cette traduction infâme de complaisance et d'aristocratique puanteur entretenue.

    C'est marrant, parce qu'en général, les gens désirent appartenir à ce cercle que je renie. Ils veulent devenir des bourgeois et font tout leur possible pour que leurs filles reçoivent l'éducation des dames. Comme si savoir coudre et broder servaient réellement à quelque chose, ou comme si ânonner des leçons de littérature allait faire d'elles des personnes réfléchies et indépendantes. Par contre, pour séduire les beaux, les officiers de la Marine, oui, je suppose qu'être jolie, savoir battre des cils et danser les quatre variations de la valse, oui... Ceci dit... en repensant aux officiers que je connaissais... Mes frères étaient hors compétition. Tiens, Alheïri Fenyang par exemple... Je crois que ce n'était pas ma capacité à savoir composer un plan de table pour cinquante personnes qui l'avait intéressé chez moi...

    Patauger dans la boue... ce n'était pas « bien ».
    Tout mon être me criait que j'étais en train de déshonorer la mémoire des centaines de femmes des lignées Raven et Cooper. Pourtant, je continuai de marcher. C'était tout ce qu'on me demandait. Les gars de mon équipe avaient compris plusieurs heures plus tôt que je ne pouvais pas faire plus. Au moins reconnaissaient-ils ma détermination à ne pas abandonner. Je les suivais plus mal que bien, à la traîne, mais sans un mot. De toutes les façons, j'avais régressé à un stade primal. Je ne savais plus que grogner ou mugir.

    Soudain je me heurtai au dos de... je crois c'est Manuel. C'était peut-être Kyan... Un grand dos baraqué noyé sous la pluie.. ça pouvait être n'importe qui. Qu'est-ce qu'ils avaient tous, à être si grands ?
    Il se trouvait qu'en fait, nous avions réussi. Nous étions au point de ralliement. Je ne me rappelle même plus notre classement, si je ne l'ai jamais su. Tout comme je n'avais jamais su comment nous étions arrivés à y arriver. Tout ce qui m'importait – et même maintenant – était que c'était fini.
    Je restai debout, plus qu'à moitié endormie, le temps du débriefing, car je savais que si je ne faisais que m’asseoir, je serais incapable de me relever. Puis on me chargea dans la navette pour la traversée du retour et là, je pus enfin dormir.

    Quelques heures plus tard, un raclement me réveilla en sursaut. Nous étions de retour à la base principale du BAN. J'eus le droit de prendre un repas et une douche, avant de reprendre la direction des salles de classe pour une leçon de guerre stratégique, illustrée par les schémas des batailles des deux derniers siècles.
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Pour plus de compréhension, je vous invite à lire ce topic


    - « Beleu-beleu-beleu »
    - « Oui ? … Non... Oui... je sais.... Je.... Ils.... …. …. »
    - « !!!????!!! ¤¤¤¤ !!!! »
    - « Père, voyons, ayez un peu confiance en moi. Je sais que ma demande peut paraître... surprenante, mais elle est pensée. J'ai besoin d'être plus forte. »
    - « !!! »
    - « Je sais que Mère s'inquiète, mais qu'est-ce qu'il peut m'arriver au BAN ? Dois-je vous demander de lui rappeler que je suis un agent assermenté du Cipher Pol 5. Je sais que pour vous, c'est difficile à admettre, mais je suis un bon agent de terrain. Et je veux...non, je dois devenir meilleure. C'est ce que vous m'avez appris, Père. Toujours viser plus haut. »
    - « .***** !!! *****... ***** !!!! »
    - « Oui, je sais qu'il y a d'autres camps d'entraînement. Angus a eu exactement la même réaction et ---- »
    - « !!!!????!!!! »
    - « Bien entendu que j'ai discuté avec Angus. N'a-t-il pas fait ses classes au BAN ? Ça aurait été insensé de poser ma candidature sans avoir discuté avec lui, ne serait-ce pour savoir ce à quoi je m'engageais. Et j'ai continué à postuler en toute connaissance de chose. »
    - « ***. **** ? »
    - « Père, loin de moi l'idée d'insulter la hiérarchie, mais je suis face à un défi de taille. Je suis une femme, fille d'une riche famille. J'ai tout à prouver. Je dois faire deux fois plus d'efforts pour avoir deux fois moins de considération. Un autre camp d'entraînement me conviendrait parfaitement, mais le fait même que je demande le BAN prouve que... si vous me permettez l'expression « que j'en ai ». Certains diront que j'ai le ventre plus gros que les yeux, mais quand je reviendrai, j'aurai la tête haute. »
    - « ***. ***. **** **** **** ******** *** **** **** ** ****** ***** **** *** *** *** ** *** ***** *** ** **. *** ***. ***. **** **** **** ******** *** ****. **** ** ****** ***** **** *** *** ***. ** *** ***** *** ** **. »
    - « Oui, Père. Je vous remercie. Embrassez Mère pour moi. »


    Et on se demande pourquoi j'avais piqué une crise d'adolescence version rebelle. Mon propre père ne croyait pas en moi. Certes, je n'avais pas donné de réelles preuves de mes capacités. Mais les faits parlaient pour moi: j'avais fait mes classes CP, mes premières missions terrains, puis mes missions solos. Si à un instant je n'avais pas été à la hauteur, mes supérieurs l'auraient noté et m'auraient viré.Je n'avais bénéficié d'autant passe-droit. En fait, je me suis toujours demandée s'ils n'avaient pas été un peu plus … sévères... à mon encontre. Je ne peux pas les blâmer. Mais maintenant, j'en veux et je réussirai.
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    J'ai compris pourquoi beaucoup avaient parié sur mon départ à sept semaines. La semaine de l'épreuve de survie. Je comprenais aussi pourquoi l'autre partie de la base avait parié sur la semaine six : l'idée même de l'épreuve de survie aurait dû me faire prendre mes jambes à mon cou.

    Que j'ai survécu changea l'attitude de tous envers moi. Une sorte d’indulgence passa sur le fait que mon coéquipier dut physiquement me porter sur son épaule lors des dernières heures. Après tout, je n'étais qu'une CP... Je trouvais ça amusant que ce n'était pas mon sexe qui était incriminé. Ceci dit, quand on connaissait certaines des femmes de la Marine, pas étonnant. L'Ombrageuse était capable de tuer un homme de quatre façons différentes avec juste une petite cuillère.

    Mes dernières cinq semaines furent donc placer sous le signe de « faisons quelque chose de la p'te dame ». A croire que chacun avait attendu ce moment pour décider que je valais le temps de leur enseignement. Si avant, je me levais à six heures pour enchaîner les exercices pour zombies. Pas étonnant que mon cerveau en fut devenu de la gelée. Désormais, je devais être sur mes gardes constamment, car la chasse à la Shaïness était ouverte. A chaque instant, un instructeur ou même un membre du BAN avait le droit de me sauter de dessus et de m'envoyer dans le décor. Certains s'en donnaient à cœur joie. Et entre les deux séances de traque, je m'avalais les entraînements. Le Sergent Flores avait validé avec moi un nouveau style de combat. Toujours essentiellement fondé sur la défense, il me permettait pourtant de prendre l'avantage face à des adversaires plus forts et avec plus d'allonge.
    J'avais fait le choix de ne pas évoquer ma capacité nouvellement acquise du fruit du démon. Peut-être n'avais-je pas encore assimilé que je possédais un tel pouvoir. Cependant, j'avais pris la décision de me débrouiller toute seule avec ce côté de mon « arsenal ». Un cas pratique, peut-être ? Voir si j'étais capable de m'auto-gérer ? Je pense que mes instructeurs devinèrent à un moment donné que je gardai quelque chose sous le pied, mais comme je donnais tout – pas le choix de toutes les façons – à chaque échange, ils firent avec.

    Mes techniques de fils intéressèrent mais à ma grande déception, ne furent pas une découverte. Moi qui croyais pouvoir me pavaner devant eux. Que dalle. Le BAN, ce n'est pas de la gnognotte. Des vieux de la vieille. Ils avaient tous vu, tout fait, ou l'équivalent.
    J'ai du accepter le fait que mes fils... ne servaient à rien tels que. Flores me botta le cul avec mes propres techniques après dix minutes de travail sur le tatami. Une leçon d'humilité que je ne pourrai jamais oublié. Alors j'ai écouté.Et je ne suis pas qu'un peu fière de dire maintenant être capable de manier mes fils des deux mains à la perfection. Je peux même utiliser d'autres parties de mon corps pour diriger les filins si nécessaire. La précision n'était pas forcément là, mais le but était plutôt d'être toujours en mouvement et difficile à attraper.
    Mon maniement de lame s'améliora. Disons que je n'étais plus un danger public avec ma lame courte. Ni pour autrui, ni pour moi-même. Bon, là, c'est moi qui faisais du mauvais esprit. Il faut dire que j'ai toujours un rapport très réticent avec mon Wakizashi. Toutes mes résolutions avaient du mal à atteindre la poignée de mon sabre. Sûrement que cela ne me rappelait que trop vividement la blessure de Rafaelo. Maintenant, j'étais capable de tuer avec mon sabre. J'avais presque peur de moi-même.

    En fait, je ne savais pas si je serai réellement capable de tuer de sang-froid. D'autant plus que c'est bien l'excès de violence qui m'avait conduite là où j'en étais. Entre mes convictions et la réalité, jusqu'où étais-je prête à aller ?
    Je savais toutefois que je devais beaucoup au BAN. Si seulement tous les hommes et les femmes de la Marine pouvaient être aussi fiers de leurs missions et aussi passionnés, investis dans leurs tâches. Si seulement tous ceux de la Marine pouvaient passer entre leurs mains. On aurait déjà moins de problème.

    Et il faut un début à tout.
    J'avais eu le mien.
    Il ne restait qu'à donner celui que le reste du monde méritait.


- FIN -
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