Je suis chargé. Prêt. Canon portatif sur le dos, flingues à la ceinture, sur les cotés, machette à l'arrière. Puis la thune dans les poches, le singe sur l'épaule, et la cape. Noir, la cape. Pour passer incognito. ... Héhé. Ça m'a toujours fait marrer. Les capes. Le truc ultime pour passer inaperçu, tout en criant au monde entier: "M'regardez pas, non, non!" Mais y a des trucs qui marchent d'puis toujours, à croire qu'même si c'est stupide et pas croyable, c't'un code commun.
J'ai laissé l'Ecume aux soins d'Linus, qui m'décevra pas. Elle mouillote péniblement, rafistolée avec des bouts d'ficelle, dans une crique éloignée, planquée, bétonnée. Tranquillité. Je suis tout à ma tâche, J'avance dans les rues d'Dead End, étonnamment calme. L'endroit me plait. J'y croise du malandrin et d'la sale gueule. Deux types se sont fait pointer sous mes yeux, pour presque pas grand chose. Ça sent le stupre et la luxure pas cher, sale. Le truandage et l'arnaque. Le danger. Moi, on me fout la paix. Ca fait partie du code de la cape. Le type en cape, c'est un dingue, trois chances sur quatre, alors tu luis fous la paix. Tu t'permets à la limite un r'gard pas cool, un chuchotage pas poli à ton pote balafré, et un pointage de doigt.
Je tape dans une bouteille vide au sol. J'ai envie de boire. Je fume pour faire passer. Ça marche pas. Mais je suis arrivé, là où je devais. L'Goret Chantant. Bar clandestin pas clandestin pour un sou. C'est limite écrit sur la porte qu'c'est un nid à emmerdes, un passage obligé pour toute personne mal intentionnée. Je pousse la porte. Un nuage de buée s'échappe, alors que j'entre dans la pièce. Classique et de bon gout. Boisson abondante, chair à demi-nue et dents en plombs. J'vais au bar. Je fais comme on m'a dit, brandit la pièce de 200 berry. C'est le secret l'moins secret du coin, on te le donne limite dans les kiosques à touristes. L'mec fait la gueule du type fier d'sa position, le gardien du secret, et montre la porte du fond. Je m'y engouffre. Et je marche, dans le noir et l'humidité. Je croise quelques chauves-souris. Jusqu'à arriver vers la lumière. Nous y voila.
Tu reconnaitras quand tu y seras.
m'a dit Linus. C'est vrai. L'endroit où je débarque est particulier. Si en haut, ça sent la fange, ici, c'est construit d'dans. La concentration d'infâmes est giga, et vu l'monde qui arrive encore derrière moi, elle f'ra qu'augmenter. J'identifie dans la foule deux ou trois gueules pas inconnues, affichées dans l'journal à la page "primes". Puis, j'lève les yeux, pour contempler. C't'une énorme cave, creusée dans la roche, ici. C'est vraiment masta, sur plusieurs étages. Les murs d'pierre sont taillés pour qu'on soit bien, l'endroit fourmille d'tables, d'chaises, d'gens dessus. Mais surtout, au centre, plusieurs cages qui en entourent une plus grande. Ça, définitivement, ça me plait. Ça m'rappelle mes jeunes années, mes débuts comme lutteur du dimanche. Héhé, l'temps à passer et pourtant, j'ai plutôt pris. Rien perdu. J'claque les types qui s'y rossent. Y a du talent. Du muscle. Mais rien qui soit pas cassable. Rien du tout.
...
C'est lent'ment qu'j'avance vers c'te table, ou deux sales types prennent les paris, notent frénétiquement des cotes et des noms sur du vieux papier. Jouant la cape, j'bouscule, sans mot dire, pour arriver en premier plan. Les deux gus lèvent leur tronche vers moi, pas impressionnés.
Y veut quoi l'encapuchonné?
Y veut rentrer dans la cage. La grande.
Y veut rentrer dans la cage. La grande.
Y s'jettent un r'gard et s'bidonnent. Puis, l'premier, l'plus laid des deux, m'bave, suffisant,
Aujourd'hui c'est du combat multiple, pour l'compte du clan Python. Du tous contre tous. Pas d'armes, c'est du main nue.
Y fait un geste vers le canon, sur mon dos.
Pour entrer, c'est dix mille berry. Si tu sors debout, tu récoltes le pot total, plus une partie des paris. Ca devrait taper dans l'million. Alors, t'en es?
J'fais mine d'hésiter.
Pis, t'impressionnera p't'être le Boss du clan. C'est jamais mauvais.
J'sors les billets, les claque sur la table. Il les encaisse, m'demande mes armes. Trois flingues, une machette et un canon vont s'ranger dans un baril, avec d'autres, et on m'montre d'un geste de main l'chemin vers la cage central. J'entends un gus qui beugle comme un dingue, annonçant les victoires et les défaites dans un gros escargophone. J'arrive à la porte de l'arène. D'autres types attendent, une vingtaine, tous calibrés pour la cogne. On évacue les blessés et les morts, on consacre un type gigantesque couvert de sang et on nous fait rentrer. La porte métallique grince, trois, deux, un, zéro, c'est parti. Entredéchirez vous. Le vacarme est assourdissant, autours, l'ambiance est chaude, rocailleuse. En face, à coté, on s'jauge, on montre les crocs, sous les "encourag'ments" du public. C'est le moment. J'descends la cape, j'découvre le Jack.
Un grand silence se fait, tout d'un coup.
Dernière édition par Jack Sans Honneur le Lun 21 Jan 2013 - 14:05, édité 1 fois