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Les pactes


J'ferme la porte derrière moi pour aller arpenter l'pavé d'Dead End. Par la même, j'enterre le secret. Dans la cave qu'j'abandonne, trois encapuchonnés s'tirent de leur coté, par les égouts. Linus, Noah et Alex qu'ils s'appellent. Les généraux d'l'ombre, ceux qui combattent sur les flancs. Après quelques jours de séparations, y m'ont bavés les nouvelles. Elles sont bonnes. Alex et Noah sont au top. Y rossent les p'tits caïds du coin, à raison d'un par jour. Vrai, mes deux compères sortent un peu du canvas qu'j'leur ai imposé. Y s'attaquent à tout, pas qu'aux clans. Mais j'suis qui pour entraver leur créativité. L'esprit d'initiative, j'l'encourage. Puis ça fout un bordel monstre, tout l'monde est à cran. On parle de tueurs fous, d'animaux sauvages, haha. Linus aussi à bien bossé. Les p'tites mains d'l'équipage sont maintenant infiltrées un peu partout. Du hall de combat aux gardes des portes, en passant par les serveurs des plus grosses tavernes, tous sont à disposition. Quant au bateau, il est bien planqué, prêt à réparation. Tout se met en place donc. ... Et pourtant, à mesure que j'avance dans ces rues, j'me dis qu'on a pas assez. Pas assez de gens, pas assez de force de frappe. Y m'en faut plus, beaucoup plus.

Pour palier à ça, j'ai quelques idées. Une en particulier. C'est pour ça qu'prend la direction du port. Aux abords des eaux et des embruns, on trouve un matériel précieux. Sous-estimé, mais précieux. Un matériel que j'aurai pas d'peine à utiliser, parce qu'il est fait du même bois que moi. Je pense à tous les zonards, les paumés, ceux qui même sur Dead End n'ont pas trouvé leur place, n'ont pas pu r'joindre les rangs. Ce genre de dingue, sont comme moi, mais sans le talent, et je les attire comme un merde attire les mouches. Après, je passerai le voir, l'autre. Après.

J'arrive dans l'coin, et déjà, j'bifurque. Direction les vieilles allées, celles qui puent, qui tuent. J'y engage le pas, confiant d'y trouver qui j'veux y voir. Plus j'avance, et plus les baraques sont pourries. A Dead End, c'est pas peu dire. En plus, aujourd'hui, il pleut. Les pavés glissent. Raison probablement suffisante pour qu'Anthrax daigne rester sur mon épaule, comme un bon toutou. Et c'est la seul âme qui pointe, dans le coin. J'ai beau m'enfoncer, tout est vide. Pas un pey. Parfois, j'en mire un, en bout d'rue, qu'mendie. Mais dès que ses globuleux pointent ma gueule, le gus disparait aussi sec. Les désagréments d'la célébrité, faut croire. Et pourtant, j'sens des r'gards. Ca fait un moment déjà, qu'j'les capte, ces mires qui m'épient l'arrière train. J'continue pourtant mon ch'min, et m'enfonce, à raison, dans un cul-d'sac, une dead end comme on dit. Arrivé face au mur, j'me r'tourne, clame haut et fort.

Montrez-vous, et j'vous crèverai pas.


Silence. Vide. Puis. Une, deux, douze, vingt silhouettes sortent de nulle part. Elles sont armées de chaines et de bars à mine, mode fracasse à la construction. Parmi toutes ces sales gueules, juvéniles, une plus marquée s'illustre. L'chef de bande, tu le sers rapide. Indéniablement. L'est dur à esquiver, sa fonction est écrite sur sa gueule. C'lui-ci fait pas exception. Plus grand, plus vieux, plus armé aussi. Pourtant il hésite.

J'suis sur vot'territoire.


Il le sait, mais il hésite toujours. C'est simple de base. Tu défends tes intérêts, et tes intérêts, c'est ton quartier. Si quelqu'un y fout les pieds en touriste, y raque, ou tu l'craques. Mais voila, aujourd'hui, quelqu'un c'est moi, ça change la donne.

Vous êtes qui?


Les gars d'ici.


Malgré l'impasse, il a bavé ça l'air sur de lui. Le gus est conscient de ses attributions.

Alors dis moi, les gars d'ici, y veulent se faire du fric?


Ça dépend c'qu'on leur propose.
[/b]


Je propose rien tant que j'ai pas l'cul bien installé, mec.


---


La baraque qui m'accueille est plutôt big. Sale, vieille, mais masta. Difficile de croire qu'un puant ai fait construire ce truc. Faut croire qu'avant d'être c'qu'elle est, Dead End était autre chose. Héhé, le passé. Ca m'fait penser à Tahar tiens. Le cul sur une chaise, je mire les tronches des gus autours. Tous un peu nerveux, tous un peu sale, tous de bonne conditions. Une vingtaine de gosses sous la houlette d'un moins gosse, qu'ont rien à envier aux plus âpres des pirates. Formés par la rue, calibrés par l'environnement, c't'une belle bande de casseurs qui m'entoure. Leur boss, grand blondinet à la tronche qu'en a vue, sort une bouteille genre bonne came, m'sert un boq. J'le mire.

T'as peur?


Un peu.
[/b]


C'est bien. Ça prouve que t'es pas un con. T'sais qui j'suis donc.


L'acquiesce.

Parfait. On peut parler alors. J'veux qu'tu m'baves c'que tu fais, c'que tu peux faire, et c'que tu veux. Puis ton nom aussi.


C'faisant, j'pose un gros billet sur la table. Vingt mille. On est entre gens de bien.


Dernière édition par Jack Sans Honneur le Mer 6 Mar 2013 - 13:23, édité 1 fois
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Plusieurs jours avaient passés depuis le combat avec le Sans Honneur. Le brave Joseph n'était pas sorti indemne de cet affrontement, loin de là. Ce n'était pas la première fois que Crack Joe se prenait une dérouillée, ni même la première fois qu'il finissait alité suite à un affrontement, mais jamais au grand jamais, il n'avait fini avec autant de blessures. Lorsque la Fouine l'avait ramené au Hibou de nuit, le Champion n'était plus que plaies et bosses. Il comptait d'avantage de fractures, de fêlures et autres blessures que d'organes en bon état, c'est dire à quel point il était en forme. Il avait d'ailleurs laissé une trace plus ou moins nette menant de la plage jusqu'à son honorable établissement. Plic, ploc. Une petite goutte de sang par ci, une autre par là. C'était un jeu de piste qui pourrait amuser les gosses des rues jusqu'à la prochaine pluie. Il était comme ça le Joseph, la main sur le coeur, toujours prêt à aider son prochain. Il donnait même son sang pour aider les plus démunis à égayer leurs journées.

L'arrivée du Champion dans son petit établissement chéri ne s'était pas faite sans cris, heurts et autres pleurs. De la part de cette chère Léna tout d'abord. Elle avait entrepris de hurler à la mort avec une conviction telle que la moitié des chiens du quartier répondirent à son appel. Pour le malheureux Joseph, cela revint surtout à perdre l'usage de ses tympans, dire qu'il s'agissait d'un des rares trucs que Jack ne lui avait pas cassé. Heureusement Jasper, le tout nouveau barman du Hibou de nuit avait pris les choses en main. Un mec bien ce Jasper, il faudrait songer à l'augmenter, il en avait plus dans le ciboulot que la moitié des séides de Joseph. La preuve, il avait tout de suite pensé à aller chercher un toubib plutôt que de hurler à la mort ou de crier vengeance contre le vilain pas beau qui avait fait du mal à leur patron chéri. Ouais, les employés peuvent se montrer particulièrement lèche bottes quand ils sentent qu'ils ont moyen de marquer des points auprès du gérant, surtout si celui-ci a déjà un pied dans la tombe. Proposer de venger leur bien aimé supérieur de celui l'ayant amoché entrait dans cette catégorie. Bien évidemment, cela n'était que de la pure vantardise. Ils avaient beau la ramener, pas un des sous fifres de Joseph n'irait se risquer à approcher du Sans Honneur. Pour eux il était totalement impossible, ne serait ce que d'imaginer, que quelqu'un puisse battre "leur" Champion. Et là Joseph n'avait pas été battu, il avait été écrasé. Autant dire que l'instinct de survie des truands leur recommandait de se tenir à bonne distance du nouveau premier champion de Sir Montgomery. Pas folles les bêtes.

Le toubib avait vite rappliqué. Faut dire que Jasper savait être convainquant quand il avait Roger et Robert avec lui. Il avait ouvert de grands yeux le Doc'. C'était sans doute la première fois qu'il voyait un type dans un aussi sale état mais le plus impressionnant c'était le regard de ce taré de Joseph. Il était fiévreux, totalement fou. A croire qu'il voulait retourner se battre dès qu'il serait soigné. Le Doc' l'avait bien soigné ouais. Bandage par-ci, plâtre par là, tas de médocs et de perfusions. Il avait transformé le bureau du gérant en une vraie petite chambre d'hôpital avec Léna en infirmière à domicile. Joseph était plutôt cool comme patient, il ne se débâtait pas (il en aurait été bien incapable vu son état et la présence permanente d'un des videurs dans sa chambre pour le garder au lit) mais par contre qu'est ce qu'il causait.

"L'est tellement fort... C'est la Violence incarnée ce mec. Moi j'suis qu'un amateur, rien qu'un amateur qui fait joujou avec des pignoufs."

"Des projets hein ? Partir d'ici, rentrer dans la danse ? J'veux me cogner sur le meilleur ring du monde ouais.
Le haut de l'affiche !"

"Saleté de fruit du démon... Moi aussi j'aurai des pouvoirs, t'vas voir ! Vous allez tous voir ce que Joseph sait faire !
Le sixième hein ? Que dal' ! J'vais te les monter ces échelons moi ! A moi Dead End !"

"J'étais qu'une putain de grenouille dans une mare qui s'appelle Dead End. Mais c'finit, terminé l'règne sur la mare. Y'a un nouveau Boss en ville et ce boss c'est Jack. Le Monde est venu frapper à ma porte. Même qu'il m'a mis une sacrée raclée.
Direction l'grand large maintenant. Les plus fort j'les mettrai tous à mes pieds !"

"L'est temps de changer d'division. L'monde va connaître le nom de Joseph Patchett !!!"

Et ça continuait encore et encore. Il faut dire qu'il avait pas mal déliré pendant les premiers jours, la faute aux médocs que le doc' lui filait. Combien de temps était il resté alité sans pouvoir quitter son lit ? Quatre jours ? Cinq ? P'tet même toute une semaine. Mais il allait mieux désormais. Crack Joe était de retour ou en tout cas ça n'allait pas tarder. Après tout c'était un monstre de volonté et d'endurance. Normal que ce genre de type se remette rapidement de ses blessures pas vrai ? Maintenant, la première chose à faire c'était payer une visite de courtoisie au Sans Honneur. Lui en avait p'tet pas mais Joseph en avait un minimum. Sans déconner ! Avoir buté son mentor et supérieur ne faisait pas de lui une personne dénuée de toutes valeurs. Jack l'avait battu, et bien battu. Il l'avait eu son duel. Maintenant il savait clairement ce qu'il valait et où il se situait. Ce type était bien plus impressionnant que le Montgomery, bien plus que tous les Champions de Dead End. Même ce frimeur de Smaug se ferait casser en deux par Jack s'il s'avisait de mal lui parler. Joseph avait l’intuition que s'il suivait le Sans Honneur, il ne le regretterait pas. Un type aussi célèbre que Jack, quand vous vous mettez dans sa roue ça avait forcément un impact positif sur vous, pas vrai ?
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Mes mires ciblent le caïd. Les miennes, puis celles d'ses p'tits copains aussi. Dans c'te pièce crados, c'est aux lèvres du gus qu'on se suspend. Mais c'est qu'le gus, il aime s'faire mousser. Y nous harponne tous d'un grand blanc, la gueule entrouverte pour choper les mouches en train d'voler (qu'on entend). Puis pour parfaire l'ambiance, ses yeux flottent dans l'lointain, 'stoire d'ajouter une touche d'handicap dans l'tableau d'sa face. J'insiste, du r'gard. Bouge pas. Un d'ses zigs de potes lui s'coue l'épaule, faudrait pas qu'il nous fasse une crise non plus, mais rien. J'sais pas trop comment réagir, eux non plus. On s'regarde, sans comprendre.

Notre premier business, ce sontt les docks. On tend l'oreille, pour savoir ce qui rentre et qui sort, puis on dispatch aussi les dockers. Quiconque bosse là-bas nous paie la dime! Après, on est pas difficile. Si le racket reste notre grande spécialité, on est aussi efficace dans les autres domaines. Les classiques, vols, meurtres, intimidations, tout le bazar. Et moi c'est Bonzo.

Sans crier gare, le lunatique a bavé en mitraillette, en nous clouant aux murs, à coups d'mots inattendus. C'tait tellement soudain qu'on a sursauté. Tous.

Qu'est-ce que vous avez à me mater comme ça?

*Y fait comme si de rien n'était!!*


Ces potes tapent la même tronche que moi: grands yeux, bouches ouverte. Pour un instant, on est tous des Bonzo. J'me r'met pourtant d'sa maladie, aussi bien qu'lui au moins, et r'prend l'fil. D'une poigne volontaire, j'tire a nouveau du blé d'ma poche. 100 000 berry qu'viennent s'ajouter au vingt précédents, qu'je claque sur la table, sans les lâcher. Bonzo, puisque c'est son nom, les mire avec appétit, comme si c'était des bombecs. J'en profite pour choper son r'gard, tant qu'il est conscient.

Ca, c't'une avance sur ta fidélité. Un prix d'groupe.


J'fourre une tige en bouche, un larbin s'précipite pour l'allumer. Ca m'fait bizarre, il le r'marque, fait presque un bon en arrière.

C'est pour vot'discrétion, puis votre efficacité aussi. Ces p'tits papiers s'ront pas tout seul si vous faites bien vot'travail. Pigé?


Comme sur un billard.


Hein? C'est quoi l'rapport? Le gus me fait un sourire pepso-dent au chocotof, tend la main vers les bifton, mais j'ai pas fini.

J'ai pas fini. Si tu prends la monnaie, tu signes un pacte à vie, un pacte avec moi. Pour être clair, imagine que j'suis l'diable et qu'peux être déçu. Quand ça arrive, j'ai une saloperie de tendance à tout ravager. Salement. C'est dit.


Ma poigne s'ouvre, libère la monnaie. C'est la curée, y se précipitent tous dessus comme des animaux. Un plaisir à voir. Dans la ruée, Bonzo arrive à extirper sa tête de l'amas d'corps qui vient d'se faire sur la table, pour me baver:

C'est ok, tout est ok Boss!

Il y r'plonge, et moi j'me lève. Direction la porte, tout en finissant ma tige. Deux bouffardes, reste plus qu'un mégot, qu'j'éteins sur la paume de ma main.

Euh, mais sinon, c'est quoi qu'vous voulez qu'on fasse?


Face à la porte, j'm'arrête. Vrai qu'j'avais oublié c'petit détail. J'tais v'nu pour ça quand même.

J'veux tout savoir, qui rentre, qui sort, qui bosse aux docks. T'nez moi informé, discretos. Puis hésitez pas à engager aussi, et à vous armez. J"finance, dans la limite de l'efficace, voir du panache. Y aura d'autres trucs plus tard, rien qui d'vrait sortir de vos possibilit...


J'arrête. Face à moi, Bonzo r'fait une crise de somnambulisme éveillé. Les mires au loin, la bouche en trappe, y a plus rien à attendre de lui. C'est vers ses copains qu'me tourne.

Vous lui f'rez le topo quand y r'viendra parmi nous.


Et je me casse. La porte grince, se referme, et les rues m'appartiennent à nouveau. Plus qu'à les arpenter. Après deux pas, j'sers les dents, et souffle sur ma paume, douloureuse, piquante, brulée. Merde, qu'est-c'qui faut pas faire comme connerie pour avoir la classe.



Dernière édition par Jack Sans Honneur le Mer 6 Mar 2013 - 13:26, édité 1 fois
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Back to business. Le Boss était content, le Hibou de Nuit tournait à plein régime et les sous entraient à belle vitesse dans les caisses. Et quand le patron avait sa thune, il posait pas de question sur la tronche de momie de son champion. Un brave type ce Montgomery, c'est tout juste s'il s'était permis de lever un sourcil en voyant Joseph débarquer recouvert de bandages sur la quasi totalité de la surface de peau apparente. Bah ouais, même si Crack Joe avait quitté le lit, il n'avait pas pour autant entièrement récupérer. Ça se saurait si on pouvait se remettre d'un combat avec Jack en un claquement de doigts. Cela dit, il pouvait désormais se déplacer sans aide et maintenant que le Boss avait touché son dû, il était temps d'aller voir son futur nouveau Boss.

Trouver Jack aurait pu être difficile. Cela ne fut pas le cas. Comme toutes les personnes qui comptaient sur Dead End, Joseph avait ses petits oisillons qui veillaient à le tenir au courant des évènements importants. Et ces derniers jours tous les regards étaient braqués sur le Sans Honneur. Il n'existait pas un gangster d'envergure qui n'ait au moins posé l'oeil sur lui. Joseph, lui, gardait en permanence une paire d'yeux sur le Jack. Il avait su mette à profit les compétences des minables qui traînaient en permanence dans son établissement. Tu veux qu'on oublie l'ardoise ? Bah tu bosses pour Joseph. Rien de bien méchant comme taff', juste devoir suivre le pirate le plus puissant ayant jamais posé le pied sur ce caillou qu'est Dead End. Facile comme taff pas vrai ?

Tellement facile que Joseph n'avait pas eu à déplorer la moindre perte. C'était d'ailleurs un véritable petit miracle. Le Champion s'était attendu à ce que certains de ses hommes se fassent suriner par Jack lui même ou à tout le moins par d'autres suiveurs. Mais visiblement tous avaient choisi la patience comme stratégie. Grand bien leur en fasse. Joseph avait déjà trop attendu. Jack l'attendait, le Grand Jack avait des projets pour lui. Héhé, il avait une vague idée des projets du pirate. Tout ce temps passé au lit n'avait pas été vain. Joseph avait eu le temps de faire marcher sa caboche et l'image qui s'y dessinait lui plaisait au plus au point. Il ne restait plus qu'à transformer l'image en réalité.

Du Hibou de Nuit jusqu'à Jack, il y eut deux soiffards et un gosse des rues. Tous trois bossaient pour le Clan Python mais présentement ils obéissaient à ce brave Joseph. Le môme avait été efficace, surtout pour un muet. Du doigt il désigna la porte d'une vieille et grande bâtisse. Joseph laissa une pièce au gosse avant de le congédier. Il avait besoin d'être seul pour la suite. Dos au mur, bien planqué à l'ombre de la ruelle, il contemplait la vieille demeure. C'était là que Jack était. Son Destin l'attendait de l'autre côté de cette porte et bientôt il sortirait et viendrait à sa rencontre. Là ! La porte venait de s'ouvrir et la haute silhouette du Sans Honneur en sortit. Joseph eut un sourire crispé en constatant que ses poings s'étaient fermés d'eux même. Ce fut à cet instant qu'il se rendit compte qu'il tremblait, ses poings étaient serrés si fort que le sang perlait au niveau de ses mains. Son corps voulait un 2e round mais il était hors de question pour Joseph de céder. Il ne craquerait pas. Pas cette fois. Avec une lenteur calculée, il sortit de l'ombre pour faire face au Sans Honneur, un grand sourire sur ce qui lui restait de visage apparent. Entre les bandages, les compresses et son visage qui n'avait pas entièrement désenflé, il avait une bien plus sale tronche que lors de leur duel.

"Salut Jack."

La phrase resta en suspend un instant, comme si le Champion cherchait ses mots. Quel comédien pourrit il faisait. Le fait qu'il avait préparé cette petite scène se voyait comme le nez au milieu de la figure et pourtant il souriait comme un con. C'est qu'il avait l'air sincèrement content de retrouver Jack ce crétin.

"J'espère que t'es content de me revoir, ça a pas été de la tarte de survivre à ce que tu m'as mis. Le Doc' avait jamais vu un patient dans un état pareil, d'après lui j'étais bon pour la morgue. Hahaha, c'était bien mal me connaître tiens ! Comme si j'allais crever à la première mandale au Haki venue hein ? Mais je parle, je parle et je manque à tous mes devoirs. Je t'offre un verre ? Si je ne m'abuse t'as à causer pas vrai ? J'connais l'endroit idéal pour ça: mon rade, le Hibou de Nuit."

Le sourire de l'homme s'élargit d'avantage, ses poings se relâchèrent tout comme ses muscles. Il ne servait à rien d'être tendu. Si Jack voulait sa peau, il était tout à fait capable de l'avoir que Joseph soit consentant ou pas importait peu. Alors à ce prix là, autant rester zen pas vrai ? C'était maintenant qu'il allait quitter les amateurs pour passer chez les pros. Aujourd'hui Dead End, demain, le Monde !
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A peine sorti d'cette maison d'fous, m'voila alpaguer. Comment le Joseph m'a retrouvé? J'ai ma p"tite idée la-dessus. une idée clair, qui m'pousse à penser qu'va falloir commencer à être discret. Dead End à des oreilles. Pas que les murs. Et pas que des oreilles. Soit. Prudence donc. A l'avenir. Joseph m'bave donc un tas d'trucs. J'ai pu r'marquer qu'il aimait bien parler, le Jo. C't'un bavard. J'aime pas trop ça, mais il a assez d'panache dans ses pattes pour qu'ce soit presque pardonnable. Puis il offre à boire. Moi j'dis, chassez l'naturiste, y r'vient au bungalow.

J'suis donc le sparadrap vivant, jusqu'à son troquet. Ca m'fait réfléchir sur le ch'min. J'aim'rais bien avoir un troquet à moi aussi. Un bar à moi, sans addition. Pas qu'j'veuille me fixer. J'veux juste boire gratos. Mais ce sont des considérations à la con, j'me dis, alors qu'on passe la porte du Hibou de Nuit.

L'endroit est cossu, comme il faut. Un barman à sale gueule que j'aime déjà bien, quelques habitués, plus l'une ou l'autre rosses qui trainent. Ça marche à la politesse, y a du Mr. Patchett qui tombe. On avance dans l'établissement, pour poser not'cul sur une table isolée, dans un coin. 'Stoire de pouvoir parler à voix basse. Jo' hèle le zig derrière le bar, commande la meilleure bibine qu'il ait. Une fois servi, on lance les pourparlers.

T'as survécu. C'est bien.


Comme j'l'ai dit, Jo' est du genre bavard. Ca se confirme durant not'parlage. J'tente de suivre, l'alcool est bon, il m'aide. Entre deux vomissements labiaux du gus, j'arrive à en placer une.

J'ai décidé d'te faire confiance Jo'. Parce qu'j'suis un tendre. Et c'que j'vais t'dire dois pas sortir. T'as tâté d'ma patte, t'sais c'qu'il en coutera si tu m'doubles.


Y d'vient plus sérieux, plus calme. Bien.

On va faire tomber Mongomery. Puis les autres aussi. Enfin. On va tout faire tomber, tout Dead End, puis la ramasser. Pour nous. Pour les Saigneurs.
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Joseph était plutôt fier de lui. Ramener Jack au Hibou de Nuit faisait bien évidemment partie de son plan pour lui en mettre plein la vue. Bah ouais, autant essayer d'apparaître comme un interlocuteur incontournable pour le Jacky-Boy. Dans son établissement, il pouvait se montrer à son avantage. Ici il était Môssieu Patchett, un respectable patron d'un établissement de débit de boissons et tous le respectaient ou le craignaient, ce qui revenait sensiblement au même. Crack Joe avait bien hésité à préparer un truc exubérant pour leur arrivée, comme une haie d'honneur mais il y avait renoncé. Jack n'était pas le genre de type à apprécier l’esbroufe. Une table dans un coin tranquille et de la bonne picole au frais, c'était tout ce dont ils avaient besoin pour mener les pourparlers. Et la bibine aidant, les langues se délièrent, celle de Joseph surtout mais pas que. Le Jack savait ménager ses effets. Je te flatte d'une main et je te menace de l'autre. Cela dit, ce n'était pas vraiment une menace, juste une constatation. Toute personne s'avisant d'essayer de doubler le Sans Honneur finirait immanquablement au cimetière. Personne ne pouvait survivre deux fois à ce Dieu de la Violence.

"On va faire tomber Mongomery. Puis les autres aussi. Enfin. On va tout faire tomber, tout Dead End, puis la ramasser. Pour nous. Pour les Saigneurs."

Le coin des lèvres de Joseph se souleva très légèrement. Il avait donc vu juste. Jack ne se contenterait jamais d'un rôle de figurant, il voulait Dead End pour lui tout seul. Il n'y avait bien que cet idiot de Montgomery pour ne pas voir le coup venir. Mais les paroles de Jack tintaient aux oreilles de Joseph telles des pièces d'or. Il pouvait voir le chateau de cartes qu'était Dead End s'effondrer. Il pouvait voir la patte du Sans Honneur s'emparer du tout. Et il se voyait lui, derrière Jack. Celui-ci le comptait comme un Saigneur maintenant. Il venait tout juste de changer de patron et au bon moment. Dead End tomberait comme un fruit mûr, c'était obligé. Le sourire de Joseph s'élargit encore d'avantage.

"Les Saigneurs sont morts. Longue vie à Jack !"

Son sourire s'élargit à nouveau, il allait désormais d'une oreille à l'autre, pareil à celui d'un fou ou d'un requin. Mais Joseph n'avait pas l'air hostile pour deux sous à cet instant, en même temps qui sur cette île pourrait bien représenter un danger pour le Sans Honneur ?

"C'est de toi ça. Moi les Saigneurs j'les connais pas. Celui que je suis c'est toi. Alors... Gloire à Jack !"

Une rasade de bière pour laisser le temps à Jack de faire infuser ses dernières phrases, puis Joseph reprit la parole.

"Ce sera un plaisir que de faire tomber les Clans. Ces pirates de pacotille se sont ramollis et quand t'es faible... Tu meurs. Ils ne méritent pas cette île alors autant la leur arracher des mains. Par quoi on commence ?"

Si le volume sonore de la conversation restait très proche du zéro décibel, il fallait toujours se méfier des oreilles indiscrètes, le ton lui était d'un sérieux à tout épreuve. Le regard de Joseph brillait d'excitation, il se voyait sûrement déjà échanger des gnongs avec les autres Champions de Dead End ou alors il s'imaginait en train de nager la brasse dans des billets. Dans tous les cas, son regard fiévreux était braqué droit sur le Saigneur en Chef, dans l'attente des consignes de celui-ci.
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Pour commencer tu t'remets. J'ai b'soin d'un cogneur efficace, pas d'un handic'. T'as pas beaucoup d'temps, ça va s'couer au combat des premiers champions, entre les clans.

J'mate Jo'. C'que j'viens d'lui dire à l'air d'lui triturer la tronche. J'sais pas si c'est l'projet ou l'prérequis qui l'chatouille. Les deux p't'être. Puis faut dire, le gus, il est pas net. Pas qu'doute d'son engagement, d'sa fidélité. C'est même tout l'contraire. Jo' m'aime. Genre vachement. Doit m'prendre pour son grand frère, ou un truc du genre, parce que sinon c'est pas permis. C't'excitation dans ses globuleux, cette dévotion, une admiration qui pointe à l'excès. J'me d'mande, j'lui dirais "mec, tu m'suces?", ben j'crois qu'y sucerait. On va éviter d'en arriver à c'genre d'extrémités dégueulasses par contre. On est sur un forum ouvert aux mineurs, aussi. Mais bon, c'pour dire, Jo', il fait flipper. Et c'est p't'être tant mieux. Puis son rade sert de la bonne gnôle. Parlant de ça.

J'dois aller voir un informateur, l'barman Louis. Tu l'verras, un d'ces quatre. C'est une mine d'or ce type. 'Fin soit, j'm'arrache. J'te ferai parvenir des nouvelles.


J'quitte donc le Jo, pour continuer ma tournée. Le rade de l'ami boxeur est pas loin d'celui d'Louis. J'arrive à faire le ch'min sans même croiser d'nullos chauds d'se bastonner. C'est pas peu dire. J'pousse la porte, entre. Louis est derrière son bar, comme d'hab', m'fait un p'tit signe en m'voyant débarquer. Une fois au comptoir, y m'sert un verre, et on parle.

Drôle de gus le mec qu'tu m'as conseillé, le Bonzo.


Il a pris quelques coups sur la tête oui. Mais c'est un vrai, il te décevra pas. Beaucoup d'ambition ce gamin.


J'me méfie de l'ambition.

Louis se marre doucement.

Sinon, Mongomery?


Ah ouais, tiens. Mongomery. Plus vu. Dois l'voir.


Je vide mon verre d'un trait, sort un pacson d'ma poche et en tire une clope. Je la fume, la clope.

J'ai entendu que dans les autres clans, ça bougeait. Ils ont recrutés apparemment, mais ils le gardent pour eux.


Genre?

Louis me regarde avec un air entendu.

Genre je commence à comprendre ton plan d'action.


C'est pas vraiment une bonne chose. Combien de temps avant que Mongom' et les autres pigent aussi?

Probablement beaucoup plus. Quand ils se rendront compte, il sera trop tard. Ils ont leurs yeux accaparés par d'autres problèmes, comme le Cargo, ou les meurtres qui secouent la ville. Les hommes de mains tombent comme de mouches.


Dis-moi Louis, j'sais qu't'es un cador pour collecter l'info mais... tu sais la propager?

Ça dois être jouable. T'faudrait quoi?


N'importe, j'veux juste que ça jase dans Dead End. Que ça jase tellement qu'les clans soient au courant.

Ouais.. mais au courant de quoi?


N'importe quoi. Tout, sauf le vrai. Plus c'est gros, plus ça passera.

Whahaha! Semer le chaos pour cacher la tempête. C'est noté.


Merci Louis. J'te revaudrai tout ça.


J'espère bien.


Et je me barre. Rude journée, pas finie. Reste plus qu'à aller voir Mongomery. Veut m'parler. Pour d'vrai.


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Soit l'hospitalité de Joseph posait problème, soit Jack avait vraiment un emploi du temps surchargé. A peine avait-il fini son verre que paf, le voilà qui levait le camp. Il devait avoir des fourmis dans les pattes et une envie de taper le pavé, pas de doutes là dessus. L'ex-agent Patchett aurait bien voulu que cette petite conversation dure d'avantage, histoire de nouer des liens avec son tout nouveau Boss. Et non, pas le genre de liens qui requerraient qu'il passe sous la table; plus le type amitié virile entre hommes. Le genre d'amitié où on se minait la gueule bien méchant tout en se balançant des claques sonores dans le dos. Joseph aurait bien voulu que sa relation avec Jack ressemble à ça. Dommage, on avait rarement ce qu'on voulait dans la vie. Pourtant le Sans Honneur lui avait laissé un très joli lot de consolation et de quoi faire carburer ses méninges. Le tableau qui se dressait dans la tête de Joseph était particulièrement magnifique. Oh il restait bien quelques zones d'ombre à compléter mais l'image d'ensemble lui plaisait carrément. Jack foulant aux pieds Montgomery, Patine et l'autre Princesse pimbêche pendant que lui même refaisait le portrait de Smaug et du Blaaaack Knight. Ouais, ça lui plaisait carrément. La preuve, il souriait comme un abruti sur son siège. Pour un peu on aurait pu croire qu'il était amoureux ce con, seuls les amoureux souriaient de façon aussi stupide.

"chett... Vous m'entendez m'sieu Patchett ?"

Et voilà, il n'y avait jamais moyen d'être tranquille. Il fallait toujours qu'on le dérange quand il fantasmait sur l'avenir. Avoir la paix n'était quand même pas si compliqué que ça... Il faudrait peut être qu'il s'accroche un panneau "Do Not Disturb" autour du cou... Ou alors qu'il refasse le portrait de tous ceux qui le dérangeaient. Non... Ce n'était définitivement pas une bonne idée, après il se retrouverait en manque de main d'oeuvre. Crack Joe se força donc à faire apparaître un sourire, crispé, sur son visage afin de répondre à l'importun.

"Ouiiii mon gars ? Qu'est ce que je peux faire pour toi ?"

"Euuuuuuuh.... j'voulais pas vous déranger dans vos pensées M'sieu mais euuuh... bah les gars et moi on se demandait s'il fallait encore qu'on suive M'sieu Calhughan. Rapport au fait qu'vous êtes devenus potes et qu'il a un peu tendance à laisser des tas d'machabs sur sa route..."

Le Champion haussa un sourcil, l'air surpris. Derrière l'homme de main qui tentait de négocier se trouvait quatre aux sbires de bas étage. Le genre de menue fretin qu'on pouvait aisément sacrifier. Depuis quand le plancton remettait il en question les ordres ? Surtout au nom de l'instinct de survie ! Avait on jamais vu du petit personnel penser à sauver sa peau ?

"Dis voir... Tu m'as entendu dire qu'il fallait arrêter de le suivre ?"
"Euh bah non mais vous..."
"Rappelles moi la dernière consigne que je vous ai donné tu veux."
"Euuuuuh... Suivez cet enfoiré de Jack partout où il ira, j'veux tout savoir de ce qu'il fout, qui il voit, ce qu'il bouffe et même combien de litres il a pissé. M'semble que c'était quelque chose comme ça."
"Bieeeeen. Alors maintenant laisse moi te poser deux questions. Ne t'inquiète pas, elles sont très simple. Première question: sais tu ce qui arrive à ceux qui n'obéissent pas à mes ordres ?"

Le nervi déglutit péniblement. Il était sûr que ça allait finir comme ça. On ne pouvait pas raisonner et négocier avec un homme comme Crack Joe. Mais les collègues avaient insisté et lui avait tiré la courte paille. Il devait aller jusqu'au bout même si sa voix désormais n'était plus qu'un murmure.

"Vous leur refaites le portrait jusqu'à ce qu'ils soient méconnaissable..."
"Tout juste. Maintenant deuxième question. Où est Jack ?"

L'homme de main transpirait désormais à grosses gouttes. Il craignait manifestement pour sa vie, ou à tout le moins pour son intégrité physique mais Crack Joe n'était pas d'humeur pour ça. D'un signe de la main il le congédia lui et ses collègues. Tous avaient compris le message et les cinq hommes partirent au galop dans les rues de Dead End, sur les traces du Sans Honneur laissant Joseph seul avec lui même. Le Champion prit une nouvelle bière qu'il décapsula d'un coup de dent.

*L'combat des premiers champions... C'est bientôt ça. Héhé, tu vas pas regretter de m'avoir avec toi Jack. J'suis sacrément efficace quand il s'agit de cogner.*

Crack Joe leva sa bière et d'une voix sonore s'adressa aux personnes présentes à cet instant dans son rade.

"A la santé de Jack Calhughan, le nouveau premier Champion de Sir Montgomery !"

*Et à cette île qui sera bientôt notre...*
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Mes panards tapent le pavé, et j'me dis qu'bordel, c'est du boulot, le complot. Choisir les relations, les titiller, puis voir tout l'monde, en mode conciliabules secrets et tout et tout. On crache sur les conspirateurs qui s'sont viandé, d'ordinaire, mais perso, je le ferai plus. Maint'nant qu'je vois l'étendue du job à taper. J'en suis presque à m'dire qu'on aurait juste du charger c't'ile, en mode barbare, et compter les morts. Bast... Faut bien qu'moi aussi, j'apprenne des trucs parfois. Faut j'me perfectise. Tout ça.

Je bifurque, pour m'engager dans une sous-terrain dégeulasse. Dead End n'est qu'ça. Une grande île pleine de grandes cavernes où on peut cacher des tas d'choses. Entre elles, les grottes communiquent, pour la plupart, et ma main à couper qu'on a pas encore découvert le quart du tiers des ch'mins qui les habitent. J'passe donc sous-terre, sur une bonne lieue. Ici, rien d'bien dingue, juste des arnaques aux jeux d'dés, puis des rades à boisson et paris. On m'a dit qu'y avait une cave où on faisait des combats d'animaux illégaux. Pas les combats, les animaux. J'serais chaud d'voir ça. Puis même de taper la gueule à une bête. Mais j'ai pas encore trouvé. Même pour le roi des cadors, y a toujours que'qu'chose qu'on te cache, à Dead End.

J'aperçois sur le coin un aut'passage. Une porte haute, en gros bois humide et pourri. Sans les stuctures en fontes pour la t'nir, bas elle tiendrait pas. C'est celle qu'j'voulais. Elle conduit sur un ch'min qui coupe vers la cave centrale, puis aussi vers la baraque du clan Python, où j'me dois d'aller. Le passage est humide, faiblement éclairé, pourtant y a du monde. Certains sont d'passages, d'autres vivent ici. Tu peux être sur que c'sont les plus ravaches et sans l'sou qui connaissent le mieux c'gruyère qu'est l'ile. Faudra qu'j'm'en rappelle. Tiens, d'ailleurs j'vais filer d'l'oseille à un mendiant. Y en a un là, à deux mètres, posé à même l'sol. Niveau puage, m'a l'air d'être un cador, et j'te parle pas du look. Le type est authentique. J'sors dix billets, qu'j'laisse tomber négligemment à ses pieds, sans arrêter d'avancer. Dès qu'je l'entends r'muer, c'qui prend un brin d'temps, l'type a hésité à tous les coups, j'me r'tourne. J'le mire qui fout les cach'tons dans sa poche, y m'mire qui l'mire et qui r'part. Comme ça y sait qu'c'était pas une erreur, un oubli, y sait qui qu'à donner. Sa tronche mec. Elle valait bien c'tas d'pognon. ... bon faut qu'j'arrête mes conneries, à ce rythme là, dans même pas une heure, j'suis assis avec les clodos à picoler. Au boulot Jack, y a une ile à prendre.

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La maison du clan python est presque d'bon gout. Mais un truc jure. J'sais pas vraiment. P't'être cette sorte d'amas d'objets divers et variés, entreposés ensemble, en mode musée perso. Puis aussi ces tableaux gigantesques, des différents big types du clan. Plus t'es haut dans la structure, plus l'tableau est gros. Y a genre un lapin, la toile doit bien faire trois mètres sur trois. Puis le chevalier, lui il tape dans la hauteur, en mode mat. Mongom' pour sa part, à un tableau d'la taille d'une grand-voile. J'entreprends la traversée du capharnaüm, m'faufile entre des commodes de la taille de bateau d'pêche, des sceptres d'antan, et un tas d'autres conneries qui servent à rien. C'est suant qu'j'arrive à la porte du bureau d'Mongom', où j'entre, sans toquer. La porte s'ouvre grand.

AAAAAh !


Mongom' dos à moi, l'cul dans son trône tournant, fait un bond d'un mètre. J'entrevois qu'il est nu comme un ver, il s'passe vite une bure sur le corps, tout en gueulant:

Je l'ai déjà dit une infinité de fois: je ne veux pas qu'on me dérange quand je fais mes comptes!


Sur ce, y s'retourne, les mires injectés. Son calme semble r'venir alors qu'y m'reconnait. Mon r'gard va d'lui à un pot d'onguent dégeulasse ouvert sur l'bureau. Y range l'onguent, sourit bien grand.

Oh Jack. Ce n'était pas ce que tu crois. Hmm. Comment vas tu mon beau champion?


J'réponds pas, m'approche, tout simplement. La pièce est luxueuse. Sur le mur de droite repose un tableau énorme et pas fini. Aux premières esquisses, on peut r'connaitre ma tronche... Sacré Mongom'

Je suis content de te voir, ça fait longtemps.


J'étais occupé.


Oui, occupé, il y a plein de choses à faire sur Dead End.



Ouais, ça va.


Toujours avec ce même sourire étrange, y m'fixe. Il a fini d'se rhabiller maintenant. L'gus quitte son bureau, commence à marcher dans la pièce, en rond. Tout à coup, il s'arrête.

Jack, nous devons régler plusieurs choses...


Nous..?

Bientôt aura lieu le tournoi des clans. La nuit menant à la nouvelle année, pour être exact! Nos meilleurs champions affronteront ceux des Soeurs et de l'Underground. C'est un grand moment. Il faut se préparer.


Je suis né prêt.


Oh, je n'en doute pas!


Il commence à marcher autours de moi, tout en palpant mes biceps.

Mais tu n'es pas seul... Viens, j'ai quelque chose à te montrer.


Mongom' prend la tête et se dirige vers une porte énorme, sur la droite de la pièce. Y sort un clé d'sa porte, délock une vingtaine de serrure, fait tourner une roue en acier trempé, abat plusieurs manivelles, met son doigt sur un cache, tire un livre de la bibliothèque. La porte s'ouvre. Sans un bruit. Nous entrons.

Ici, c'est un salle aux murs apparemment épais. Fait humide, sombre. Mais c'qui attire le regard direct, c'est la cage au centre. Elle est aussi large que haute, dans les trente pieds. Pis surtout, elle est lourdement cad'nassé, barricadée, obstruée d'grillages mastoc. On en fait l'tour, Mongom' fait glisser une mini trappe, et observe l'intérieur. Y s'retourne vers moi, m'invite à aller checker. J'approche, regarde au travers de la glissière. C'est..

Les pactes Logo10
Un lapin.

Je te présente Mr. Âââr, troisième champion du clan, depuis ton entrée fracassante.


Je ne comprend pas.

Impressionnant, non?


Si on veut.

Oh, je vois le doute dans tes yeux, grand gaillard! Tu te demandes si je suis fou n'est-ce pas? Tu te demandes ce qu'un lapin fait en place de champion!?


Il soupire.

Et bien, je t'avoues que je me le demande aussi. J'ai été abasourdi par ce rongeur, mais je me demande maintenant si on ne m'a pas arnaqué. C'est là que j'ai besoin de toi. J'aimerais que tu le testes!


Sérieux?

Oui, sérieux! J'aimerais que tu rentres dans cette cage, et que tu testes ce lapin. Ne le tue pas, juste, vois s'il est aussi bon combattant qu'il est sensé l'être. Je l'ai payé si cher...


Qu'est-ce qu'c'est qu'ce plan pourri... J'aime pas du tout. Mais faut dire qu'ces derniers jours, j'ai tiré sur la corde. La, faut qu'j'lache un peu d'leste au Mongom'.

Bon. Ouvre.


Il rit, la porte grince et j'entre. Dès que je suis à l'intérieur, on referme derrière moi, la porte comme tous ses loquets... Con. Je mire la bête. Elle me mire. Et tout à coup, je me rappelle. L'archipel vert, le roi pigeon, pis ses cavaliers de l'enfer, ses rongeurs sadiques, ses lapinivores! Mongom' est p't'être pas si fou en fait. Si on lui a vendu un d'ces bestiaux là, ce lapin est un tueur sanguinaire des plus efficaces. J'approche, sans jamais quitter son regard, à l'affut du moindre changement de taille de pupille, à l'affut du moindre tressaillement! Ces bêtes peuvent être rapides, comme la mort. Un instant d’inattention, et t'voila avec la carotide ouverte, un rongeur de l'Enfer en train s'repaitre de ton sang! Y m'fixe aussi, aux aguets. Terrible bête... ? Il vient de se retourner, pour sautiller gentiment vers une feuille de laitue. J'observe encore, canalise mon vouloir. Je pense violence, j'émane violence. Le lapin se retourne, tremble, et fuit. ... Mongom' s'est fait arnaqué. C'est juste un lapin.

Mongom', pas b'soin d'une aussi grosse cage pour l'rongeur. Tu t'es fait avoir. C'qu'un bouffeur de salade.

Qui te dit que la cage était pour le lapin ?


Je n'aime pas son ton. Ni le fait d'être enfermé ici. Je n'aime pas ça du tout.

A quoi tu joues Mongom' ?

A quoi TU joues Jack? Pourquoi cette alliance, pourquoi ses aller-retours sur Dead End? Qu'est-ce que tu mijotes!?


Tu joues avec ta vie. Je vais compter jusqu'à trois.

Compte donc! J'ai investi beaucoup d'argent dans cette cage.


Je le crois. C'est du solide son machin. Mais ce sera pas suffisant. C'est l'histoire d'un peu de concentration. Je focalise, jusqu'à plus entendre les palabres du vieux fou, toujours en train de déblatérer des inepties. Je focalise sur la rage qui m'tiraille, d'être comme un lapin en cage, jusqu'à ce que mon poing devienne noir de haine. Mes poumons se vident de l'air qu'ils contiennent, je prend deux pas de recul.

Dernière sommation Mongom'.


J'attends pas la réponse, je fonce. Élan de quatre pas, ma droite vient s'encastrer dans la porte! Le choc est démentiel, elle plie, tord, ne rompt pas. J'refais quatre pas en arrière, charge à nouveau! Mais la porte s'ouvre à la volée, et emporté par l'élan, j'm'écrase au sol, comme un merde. J'relève les mires, pour mater Mongom' qu'à un grand sourire.

C'est bon, tu as réussi le test.


Je me relève. Passablement énervé. Le vieux bonhomme me semble être une cible de choix. Une profonde envie de l'encastrer me parcoure l'échine. J'me calme néanmoins.

J'allais te tuer.


Je n'en doute pas! Quelle hargne! Mais soit, passons, et revenons au bureau. Ce lapin me donne envie de pleurer.


Il se retourne, je l'entends qui renifle profondément et pleure. Nous faisons quelques mètres, revenons au bureau. La voix enroué de chagrin, comme si de rien n'était, y m'fait.

J'ai mis la main sur une information importante.. snif. Shhhshshshshs. Nous allons bientôt frapper fort, le temps de tout mettre en place... Mais laisse moi t'expliquer!


Ce mec ne vient pas de ce monde.

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