~ Le pêcheur, l'ours et le berger.

« ~ Le pêcheur, l'ours et le berger. »


Un kilomètre à pieds, ça use, ça use, un kilomètre à pieds ça use les souliers. Deux kil.... Ah bah non, en fait, nous en sommes déjà à vingt-deux kilomètres en barque qui usent, qui usent, quinze kilomètres en barque, qui usent les... bras ? Pour tout vous dire, voilà quelques jours que Véra avait quitté la dernière île où elle avait mis les pieds, elle s'était fait attaquer par un serpent à sonnette des régions chaudes qui se trouvait étrangement à North Blue. La jeune femme avait pris ses jambes à son cou et avait sauter dans la première barque qu'elle avait trouvé en jetant son propriétaire à l'eau. Ses sacrés illusions la poussaient dans ses derniers retranchements. Elle avait également vu des requins roses à la queue verte, c'est d'ailleurs ce qui lui avait permis d'aller aussi vite, mais ce qui avait également causé son mal de bras.  Enfin, une île était en vu, elle allait enfin pouvoir se reposer de tous ses incroyables périples, enfin ça c'est ce qu'elle pensait...

Véra accosta finalement dans une petite ville, pour ne pas dire un village. Elle accrocha la barque qu'elle avait dérobé à un piquet, sous les yeux attentifs des pêcheurs et de leur femme qui tissaient sur au bord de l'eau le futur pull préféré de leur mari tout en commérant sur ceci et cela. Et aujourd'hui, il semblait bien que Véra soit devenue ceci. Il était rare que  des gens viennent leur rendre visite bien que la peinte soit là plus par nécessité que par envie. Un pas après l'autre, la jeune femme se dirigea vers l'une des tisseuses et lui demanda où il était possible de trouver une auberge ou une taverne pour boire et se reposer. L'habitante de ce bourg sourit. Un sourire qui pouvait bien dire des choses. Soit elle était machiavélique, soit gênée ou encore tout simplement bête, ce qui était tout à fait probable vu l'apparence du pull rose qu'elle avait dans les mains. Sa réponse fut brève et confirma la première idée.

« Pas 'ci, aut' ville plusiours kiloumèt' à pi' ! Por' lo-bas ! »

Puis elle montra une direction, une information dont se serait bien passer Véra puisqu'après tout, il n'y avait qu'une route, et donc qu'une direction probable. La jeune artiste songea et resongea aux mots « plusieurs kilomètres »... Elle venait déjà d'en faire d'innombrables et en barque qui plus est. Elle était éreinté de son périple et n'avait pas eu une seul minute de repos. La fatigue s’emparait de son doux et léger corps. Ses paupières se fermaient et ses jambes commençaient à vaciller lorsque tout à coup... ouvrez bien grand vos yeux, une satanée truite vînt frapper sa joue d'une blancheur à en faire pâlir les plus sceptiques. Joue qui devint tout à coup rouge, cette couleur qui évoquait la colère et la fureur ne démontrait ici que la douleur. Mais douleur qui se transforma vite en un rire jaune. Les yeux de Véra se remplirent de noirceur, elle ramassa le poisson et le lança à son envoyeur tout en criant :

« Saperlipopette ! Vous ne pouvez pas faire attention sale pêch... »

Oh ! Mais c'était qu'il était plutôt séduisant le jeune homme, en cinq secondes, la peintre de la folie lui avait pardonné. Il n'eut même pas besoin de s'excuser puisqu'elle lui fit savoir que ce n'était pas grave après tout et que ça arrivait à tout le monde d'échapper un poisson et qu'il atterrisse à six mètres plus loin dans la figure d'une jeune femme qui allait s'endormir. Le pêcheur parvint tout de même après quelques minutes à ouvrir la bouche.

« Désolé mo' p'tite, j'peux faire quequ'chose por toua ? »

Pan. C'est le bruit de déception qui vint de suite à Véra et qui résonna dans sa tête tel le bruit de la cloche de l'église qui vous casse les oreilles de bon matin alors que vous ne souhaitez qu'une chose, dormir ! Mais en y repensant, le dame au Color Trap avait bien besoin d'un service... Elle lui demanda donc, s'il lui était possible de l'emmener dans cette ville où se trouve une taverne. Sa réponse fut rapide.

« Po' d'problème, j'lais livrer ma poiscaille, t'peux monter dans mo' charrette ! »

Finalement, toute solution avait un problème et cette truite était peut-être signe de chance. Ce qui serait plutôt bien puisque voilà notre protagoniste partie sur la charrette et entourée de tous les petits amis de la truite qui avaient décider de rendre son voyage difficile à cause de leurs odeurs... Le regard vide, Véra et son nouvel « ami » quittèrent le village des pêcheurs.

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    Le carrosse de Véra traversait une grande partie de l'île, trop fatiguée, la jeune femme ne prenait pas le temps d'admirer le magnifique paysage campagnard et reposant qui l'entourait. Elle souhaitait seulement deux choses, manger et dormir. Mais pour ce dernier souhait, cela s'avérait difficile entourée de poiscaille. Malgré quelques coups de pompe, l'odeur pestilentielles  finissait toujours par réanimer la protagoniste.  Le chemin fut donc long et ennuyeux. Les quelques discussions sur le poisson et les machines agricoles avec  son taxi ne valaient pas vraiment mieux. Véra était étonnée de voir à quel point toutes les idées que l'on se faisait des campagnards étaient fondées. Où alors c'était seulement sur cette île. C'est alors qu'elle était plongée dans ses pensées qu'elle aperçut de très grandes masses blanches.. Des troupeaux...

    « Pouvons-nous nous arrêtez quelques instants ? »

    « Ah non, j'ai du poisson à livrer moi. »

    Se foutait-il du monde ? Ce qui était sûr en tous cas , c'est que Véra allait le faire sortir de son chariot coûte que coûte. La peinture l'appelait. Alors qu'elle tenait son pinceau, bâton ou balai (à votre guise), elle asséna un coup dans la nuque du gentil homme qui avait accepté de l'emmener. Un coup juste assez fort pour l’assommer pendant quelques minutes. Si ce n'était pas suffisant, il lui suffirait de réitérer son action. Elle s'approcha donc lentement d'une clôture en bois pour ne pas effrayer les bêtes qui se trouvaient à l'intérieur. Le paysage et la scène ainsi que ses acteurs pouvaient faire d'une toile un véritable chef-d’œuvre.  Véra sortit le nécessaire pour sa toile, quelques petits pinceaux et ses magnifique peinture, puis elle peignit.

    « Hey toi lô-bas ! Quequ'tu fais gamine ? »

    La « gamine » tourna sa tête du côté d'où le son provenait, un homme, chemise à carreau rouge et verte avec un short déchiré orange et des chaussures tout aussi détruites noires. A première vu, un drôle de spécimen. Vous me direz sûrement que venant de Véra, on ne pouvait pas vraiment dire ça. Ceci étant dit, il venait de déranger la peintre en plein ouvrage, ce qui avait don de la mettre en colère. Elle répondit donc sèchement :

    « Je peins. »

    « T'peins mes bestiaux j't'apprends lô ! »

    « Vous avez de très beaux ours. »

    « C'sont des moutons ! »

    Véra ne répondit rien, ces campagnards alors, confondre des ours et des moutons, quand même.  Vu leur grosseur, il était logique que ce soit des ours, selon elle... Hallucination... Elle regarda alors  plus précisément les ours. C'est alors que le vieux berger lui proposa d'entrer pour  voir de plus près les moutons. Véra était épanouie et accepta avec joie de voir ces ours. Elle les caressa et il s'avéra qu'il s'agissaient d'ours garnis de beaucoup de poils, un spécimen étrange... Tiens, elle remarqua que l'un d'eux possédait des cornes, ce devait être le chef... Elle prit donc son courage à deux mains et grimpa sur lui. Drôle, il semblait plus petit qu'au départ lorsqu'on était sur son dos. Le problème étant que la bête ne se laissa pas faire et commença à sauter dans tous les sens avant de faire tomber Véra et de courir vers elle certainement avec le but de l'éventrer.

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      Était-ce la fin ? La fin d'une vie si courte à laquelle peu de péripéties avaient participé. La fin d'une vie de fuyarde et de voyages. Il est glorieux de mourir face à un ours à cornes, peu de personnes dans l'au-delà s'en vanteront et beaucoup seront subjugués. Il l'est cependant beaucoup moins de mourir à cause d'un bélier, aussi féroce soit-il. Le destin avait-il décidé d'en terminé avec une folle qui causait trop de troubles ? Apparemment, non, sa vie n'était pas en train de défiler. Le destin devait sûrement rire de la situation à l'heure actuelle. Reboostée par le fait de savoir qu'elle ne mourrait pas, Véra saisit ses pinceaux qui étaient tombés en même temps qu'elle. Elle trempa dans la peinture rouge et du plus vite qu'elle put dessina la marque du Color Trap juste à côté d'elle. Elle n'avait même pas eu le temps de dire comme à son habitude : « le Rouge du Taureau Furieux ».
      L'ours ne put donc s'empêcher de viser la marque, le problème pour lui étant qu'il s'enfonça littéralement les cornes dans les sol. Véra en profita.

      « Le Orange de l'Humiliation ! »

      Et la jeune peintre dessina la marque de couleur orange sur le bélier/ours. Celui-ci après maintes reprises parvint enfin à se décoincer du sol, mais prit d'une honte soudaine il courut se dissimuler derrière les autres ours qui semblaient regarder Véra d'un œil interrogateur.

      « Sourcièr' ! A bas lo sourcièr' ! »

      Quoi ? Après des ours avec et sans cornes, désormais une sorcière était dans les parages. Véra s'essuya très rapidement sa robe puis se retourna vers l'endroit d'où le cri était venu. Il semblait que c'était le berger qui avait montrer signe de peur. Il tenait une fourche à la main, il semblait prêt à en découdre avec cette fameuse sorcière. Le poissonnier semblait prêt également puisqu'il tenait dans chacune de ses mains les deux plus gros poissons qui avait côtoyés Véra. La seule question que se posait la jeune femme, c'était où est cette fameuse sorcière ? Les deux hommes semblaient se diriger vers la peintre. Elle pensa donc qu'elle était derrière elle, elle se retourna tout en se baissant. Elle marmonnait quelques choses, apparemment elle n'aimait pas ces créatures. Elle s'aperçut qu'il n'y avait personne derrière et que c'était bel et bien vers elle qu'ils se dirigeaient. Pour en remettre une couche, l'ours à cornes venait de se frotter contre ses compères. Véra n'avait pas été maligne, elle lui avait fait sa marque sur le coté. Il se dirigeait donc lui aussi dans la direction de notre protagoniste qui se mit à courir vers la ville, peut-être trouverait-elle de l'aide. Elle se retourna et quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'elle vit tout le troupeau lui courir après mené par le berger, le poissonnier et l'ours à cornes remontés. La barrière n'avait pas été fermée... Elle continua donc sa route en courant et criant.

      « J'suis pas une sorcière ! »
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                               
        « ~ Le pêcheur, l'ours et le berger. »


        Un  vacarme pas possible se fit retentir dans toute la ville, le bruit du troupeau d'ours se rapprochait de plus en plus. Les habitants criaient dans tout les sens, et le berger pour ne rien arranger annonçait la venue d'une sorcière à tous ceux qu'il croisait. Véra recevait même des cailloux dans la tête, elle était humilier à telle point qu'elle n'avait par remarqué  que les moutons/ours étaient en train de réduire à néant toutes les maisons en bois derrière elle, elle en serait certainement jugée coupable. Cependant, elle avait décidé de fuir cette île qui ne fut qu'une expérience désastreuse malgré la beauté de l'endroit naturel. Elle réfléchit, elle réfléchit, elle entendait les pas lourds de ses poursuivants se rapprocher de plus en plus, la situation était en train de devenir une véritable catastrophe, on jetait même les débris des maisons détruites sur la jeune peintre qui ne se démontait pas et continuait de courir en direction de la mer.

        C'est alors qu'elle reçut une tomate  en pleine figure, et son légendaire sang-froid laissa place à une férocité sans nom ! Férocité, mais bien sûr ! Véra allait pouvoir s'échapper tout en punissant cette ville de l'avoir considéré comme une vulgaire sorcière. Elle s'arrêta sur une sorte de scène et attendit sagement ses assaillants. C'est qu'elle aperçut le désastre qu'elle avait causé, c'était simple, plus aucune maison, simplement de la terre qui volait. Son plan avait intérêt à marcher, sinon elle était une femme morte. Elle sortit son pinceau, le trempa dans du gris puis fit mine de se rendre. Le berger arrêta donc son troupeau annonçant qu'il voulait tuer de ses propres mains une sorcière. Il prit donc un couteau dans sa poche et s'approcha jusqu'à être juste devant Véra. Celle-ci lui chuchota alors à l'oreille.

        « Le gris de la férocité.. »

        Elle venait de lui dessiner une marque de couleur grise sur son abdomen. Elle s'empressa de contrer  le couteau de l'homme avec son bâton puis sauta derrière la scène avant de reprendre sa route vers la mer. Juste le temps pour elle d'apercevoir le berger s'en prendre à l'ours à corne qui commença à attaquer partout. Elle esquissa un sourire voyant qu'à présent tout le monde était en train de se taper dessus et d'éviter les ours. Enfin, la jeune femme aux cheveux corbeaux arriva sur le quai. Tous les habitants y compris les pêcheurs étaient sorti pour voir ce qui se passait. Toutes façons ils n'avaient plus de quoi rentrer chez eux. Il fut donc facile pour Véra de dérober une barque et de s'échapper tranquillement de l'île tumultueuse.