>> Luan Sekihara
Age : 25 ans Sexe : Féminin Race : Humain Métier : Médecin généraliste et R&D Groupe : Civils But : Venir en aide à ceux qui ont besoin de ses talents médicaux. Équipements : Nécessaire de premier secours, trousse de dissection. Codes du règlement (2) : Parrain : Lobbying actif et soutien constant de Sigurd Ce compte est-il un DC ? : Non. Merci à qui en a les droits d'archiver la présentation précédente et de remplacer le nom de compte par : Luan. |
>> Physique Luan est une jeune femme qui attire immanquablement les regards et pour cause : grande et élancée, sa taille l'amène déjà à dépasser de la foule. Mais dans son cas, son incroyable crinière blonde fait largement office de panache flamboyant auprès duquel se rallier. En effet, Luan possède une opulente chevelure dorée d'un blond profond qui semble s'illuminer sous les rayons du soleil, dont les nombreuses mèches cascadent en boucles soyeuses jusqu'à ses omoplates. Son front large, qui lui donne un air volontaire, surmonte deux yeux d'un bleu profond, pétillant d'un mélange de candeur, d'énergie et de bonté. Un nez légèrement retroussé et des lèvres adoptant un sempiternel sourire accueillant complètent le tableau et donne à son visage un air avenant. Bien qu'elle soit le plus souvent de bonne humeur, Luan est parfaitement incapable de cacher ses sentiments : son visage est d'une expressivité telle qu'on lit en elle comme en un livre ouvert. Luan ne possède pas de signes physiques distinctifs particuliers, si ce n'est une peau naturellement pâle et plutôt sensible au soleil. Dévouée corps et âme à la médecine, il est bien rare de trouver la demoiselle en dehors de sa blouse. En effet, la jeune femme considère que c'est là son uniforme et se fait un devoir de toujours la porter. C'est une blouse fort simple, en coton, blanche, comme on trouve tant dans le domaine médical, qui lui descend jusqu'aux genoux. La seule marque distinctive qu'elle se permet est le brassard qu'elle porte sur sa manche droite. Tout de blanc, il arbore un cartouche contenant un croix rouge, avec en dessous les initiales : NMSI. C'est un souvenir North Médecin Sans Île, l'équipe médicale dont a fait partie Luan et il a une grande valeur sentimentale à ses yeux. Une série de crayons bien ordonnée orne la poche supérieure gauche de sa blouse, tandis que les poches inférieures sont pleines d'un fatras divers et varié, tel qu'un bloc-note, des thermomètres, des gants à usage unique, un stéthoscope, des scalpels, de petites seringues sous emballage stérilisé, des bandes, des pansements... Bref, les poches extérieures renferment le parfait nécessaire de premiers secours. Les poches intérieures contiennent plus particulièrement toutes les substances médicales, que ce soit les flacons de désinfectants, les toni-cardiaques, les sirops, etc. Luan cache ses longues jambes dans un pantalon tout simple et complète généralement sa tenue d'une chemise blanche tout aussi classique et une paire de mocassins confortable, parfaits pour courir lors des rushs, le tout pour un résultat aussi sobre qu'élégant. Rien d'extravagant qui puisse satisfaire les yeux des plus excités qui n'auront qu'à utiliser leur imagination. >> Psychologie La première chose que vous diront tout à chacun sur Luan est qu'elle est gentille (ou franchement naïve selon que tout un chacun est mauvaise langue ou pas). Et c'est vrai : Luan est d'une gentillesse qui, si elle n'est effectivement pas à toute épreuve, place tout de même la barre relativement haut. C'est ainsi, Luan est quelqu'un à la fois très confiante et très ouverte, qui part donc du principe que les gens sont profondément bons, gentils et attentionnés les uns envers les autres. Et ce, en dépit de tous les revers qu'elle a pu vivre à ce sujet : sa foi en l'être humain (ou homme-poisson, voire géant : quand on est idéaliste, on ne s'arrête pas à quelques différences morphologiques) est resté intact. Bien évidemment, Luan n'est pas stupide, c'est même plutôt l'inverse. On pourrait donc supposer qu'une fois qu'elle est tombée dans le panneau face à quelqu'un de « mauvais », on ne l'y prendre plus une seconde fois. Mais c'est sous-estimer la gentillesse naturelle de la demoiselle et sa foi en autrui : les gens peuvent changer et elle est tout à fait encline à laisser une seconde chance, ainsi qu'une troisième, voire même une quatrième. Et même alors, si ledit « mauvais » fait acte de contrition ou prétend même se repentir et regretter ses actes passées, Luan sera tout à fait prête à faire table rase du passé et à l'encourager dans sa nouvelle voie. Elle est comme ça, Luan : la gentillesse (et l'ingénuité) incarnée. Il faudrait toute une série de déconvenues et d'entourloupes pour qu'elle décide à mettre quelqu'un sur sa liste noire et même alors, selon les circonstances, ça n'aurait rien d'irrévocable. Et c'est beau. Pour autant, il ne faut pas confondre gentille et idiote, car Luan est plutôt du genre cérébral. Il ne suffit pas d'un beau sourire et d'une excuse vaseuse pour la mener par le bout du nez, car la demoiselle réfléchit vite et bien. Gaie et pleine de joie de vivre, Luan est une personne facile à vivre, sociale et d'une bonne humeur presqu'impossible à faire disparaître. D'une nature altruiste, elle se soucie beaucoup de ceux qui l'entourent et fera toujours tout son possible pour venir en aide à ses amis, aux gens dans le besoin et aux malades. Elle possède une forte volonté qui la pousse toujours de l'avant sans baisser les bras, soutenue en cela par une grande patience. C'est d'ailleurs sa façon de faire : gentille comme elle est, elle ne se la joue jamais bélier de siège quand il s'agit d'imposer son point de vue ou d'obtenir ce qu'elle veut. Non, elle est plutôt la marée qui attaque une position aussi inlassablement qu'inexorablement jusqu'à l'emporter par l'usure. En tant que médecin, Luan est à la fois intransigeante et intraitable : si ses recommandations peuvent tout à fait être ignorés par ses patients, ses traitements et ses prescriptions doivent être respectés à la lettre. Et inutile de la duper en tablant sur sa gentillesse innée puisqu'elle le fait déjà pour votre bien. Entre le serment d'Hypocrate et ses dispositions naturelles d'esprit, Luan est bien évidement du genre pacifiste. Il est donc fortement improbable qu'elle attaque jamais qui que ce soit. Mais pour ces même raisons, Luan est très sensible à l'appel d'une petite voix qui appelle à l'aide et ne fermera jamais les yeux devant la moindre exaction à l'encontre des autres, même si pour cela, elle doit se mettre en danger ou finir par engager le combat. >> Biographie La famille Sekihara habite une île du Royaume d'XXXXX [cf fiche de Sigurd Dogaku]. Le père, Seolchan, tient un dojo de Kendo, au sein duquel il apprend à des élèves de tout âge le maniement du sabre. La mère, Socheon, est une cuisinière qui tient un petit restaurant devant le dojo ; sa spécialité est notamment l'inévitable soupe de ramen, aliment incontournable à la clôture informelle d'une dure journée d'entraînement pour tout Kendoka digne de ce nom. Ce couple, qui nage dans le bonheur le plus pur, possède trois enfants : l'aîné, Seolcheon, a décidé de devenir un grand Kendoka afin de pouvoir reprendre les rênes du Dojo à la suite de son père, comme il est d'usage dans la famille de père en fils depuis des générations immémoriales. Le cadet, Seolchong, a aussi étudié le Kendo avec assiduité, mais dans un but différent, puisqu'il est devenu Marine, afin de protéger le monde des déprédations des pirates et de servir la justice. Tous deux ont déjà quitté le domicile familial et volent de leurs propres ailes à travers le monde, mais ils ne manquent jamais de donner de leurs nouvelles à leur parent, quand ils ne reviennent pas en chair et en os dans le Dojo familial. Luan est donc la benjamine de la fratrie, la petite dernière, en plus d'être l'unique fille. Ce qui a fait tout naturellement d'elle la petite chouchoute de la famille, celle que tout le monde adore et que tout le monde gâte. À l'instar des ses frères, elle parcourt le monde au gré de ses activités mais revient souvent à la maison voir ses parents et entretient une correspondance assidue avec ses frères. La famille Sekihara est donc une famille très soudée et particulièrement heureuse, où les liens internes sont très forts. Pas de squelettes dans les placards, pas de drames familiaux, pas de participation à des événements épiques, pas d'anecdotes traumatisantes, rien : friands de drames humains, passez votre chemin, il n'y a rien à signaler. Luan a donc commencé par avoir une petite enfance très heureuse, avec deux grands frères turbulents et attentionnés pour faire les quatre cents coups, au sein d'un cocon familial aussi solide que protecteur. À l'instar de ses frères, Luan s'est initiée aux joies du Kendo, mais elle-même n'a jamais vu cela autrement que comme un jeu, un sport, un passe-temps. Elle n'a jamais désirée devenir une experte en sabre, contrairement à ses deux frères, cette idée ne l'ayant même jamais effleuré à quelque moment que ce soit de sa vie : les rêves de gloire, de batailles et de victoires n'ont jamais été son truc. Au contraire, comme toutes les petites filles de son âge, Luan voulait plutôt devenir vétérinaire quand elle serait plus grande. Elle passa ainsi de très longues heures à arpenter la campagne en compagnie de sa mère ou de ses frères afin de trouver des oiseaux blessés, des chatons abandonnés ou des chiens renversés, mais bien trop souvent en vain. Heureusement, le dojo comptait quotidiennement son lot de maladroits éclopés et la petite Luan dévia petit à petit de son ambition première en soignant les bobos des étudiants en sabre. La petite demoiselle finit néanmoins par y prendre goût et décida finalement de devenir médecin, les gens malades ou blessés abondant bien davantage dans l'île que les animaux. Avec son entêtement farouche, Luan se dédia bien vite corps et âme à sa toute nouvelle vocation. Elle commença tout d'abord par suivre des cours par correspondance, jusqu'à se forger un socle de connaissances théoriques des plus solides. Après quoi, elle rejoignit un petit médecin de campagne pour faire ses premières armes pratiques et se révéla suffisamment douée pour envisager de voir plus loin. Elle enchaîna donc sur un concours, qu'elle réussît, pour rejoindre les effectifs d'un CHU digne de ce nom et approfondir méthodiquement ses diverses connaissances du corps humain. Au terme de tout cela, elle obtînt un beau diplôme qui fit la fierté de ses parents et de ses frères, qu'on fit encadrer avant de le mettre en bonne place dans l'infirmerie du Dojo familial. Enfin libre, Luan décida de s'aguerrir en rejoignant une Organisation Non Gouvernementale tout juste crée : North Médecin Sans Îles. Cette organisation avait pour but d'armer un navire médical et de sillonner l'océan pour venir en aide aux navires dans le besoin : en effet, si de nombreux vaisseaux disposent de leur propre médecin (et encore, pas tous, fort malheureusement), tous n'avaient pas systématiquement les qualifications ou les infrastructures nécessaires pour régler certaines situations. De même, de nombreuses îles étaient de véritables déserts médicaux et un hôpital ambulant était une solution nécessaire, quand bien même ce n'était pas la panacée. C'est ainsi qu'elle se retrouva à parcourir North Blue en compagnie d'une équipe complète de médecins de divers horizons et spécialités et qu'elle navigua de ci de là, venant en aide aux navires en détresse sanitaire, aux îles médicalement désertées, etc. Elle y passa des années très formatrices, mais malheureusement trop courtes à son goût. En effet, faute de financements renouvelés (la crise, tout ça...), la petite équipe dût finalement se résoudre à se séparer. Cette petite parenthèse initiatique fut néanmoins très instructive pour Luan, qui apprit beaucoup tant sur elle-même que sur la médecine. Luan rentra alors passer quelques temps dans le dojo familial et c'est un beau matin qu'elle découvrit l'annonce suivante dans le journal : « Recherche lieutenants pour diffuser le Bien, la Paix, la Joie, la Justice et les Sourires dans les Blues, puis sur Grandline au sein de l'Ordre des Chevaliers de Nowel. Activité couplée avec prospection commerciale primeur. RDV 3, place de la mairie, Île Groenheim, Archipel Dårlig Ulv Stranden. » >> Test RP Avant-propos : Pas de commentaires, merci.
Luan ouvrit les yeux sur une kaléidoscope de lignes tourbillonnantes sur fond brun foncé. Il lui fallut quelques clignements d'yeux avant que la sensation de vertige ne disparaisse et qu'elle puisse faire le point sur ce qu'elle voyait. C'était une cloison, faite de planches de bois et imperméabilisée à l'étoupe. Elle-même se trouvait allongée sur le sol, lui aussi fait de bois ; elle pouvait le sentir sous ses mains et sa nuque. De toute évidence, elle se trouvait au fond d'un navire, mais pas le NMSI. Sauf qu'elle ignorait lequel et comment elle y avait atterri. La jeune femme voulut tourner la tête mais à peine commença-t-elle à bouger qu'une douleur aiguë naquit depuis l'occiput et lui vrilla le cerveau, lui arrachant un grognement de douleur. « Coup au crâne, perte de connaissance et amnésie partielle, diagnostiqua Luan. Si ce n'est pas une charmante journée qui s'annonce... _ Je n'aurai pas mieux dit. » Fit une voix familière à ses côtés. Luan serra les dents et entreprit de se redresser, luttant contre la sensation de vertige. Elle inspira profondément pour faire passer la sensation avant de reporter son attention sur son voisin. Sa grande carcasse repliée à ses côtés, il l'observait de ses yeux gris acier d'un regard presque contrit au travers de ses petites lunettes carrés. Ses longs cheveux noirs, retenus par un bandeau d'argents, retombaient, raides, en encadrant son visage. Un sourire narquois se dessinait malgré tout sur ses lèvres, atténuant largement la mine désolée qu'il essayait en vain de se forger. « Yoshimitsu ? Qu'est-ce qui s'est passé ? _ On a gagné une croisière pour les tropiques au frais de la princesse. _ On s'est fait kidnapper ?? N'en revînt pas la médecin. _ Ben pourquoi tu demandes si t'as deviné toute seule ? _ Mais je croyais que le NMSI était imprenable ? S'étonna Luan. _ Et je le maintiens ! » Affirma l'expert en sécurité. Luan laissa échapper un soupir désabusé. « On s'est fait attaquer dans le dispensaire, c'est bien ça ? _ Ouais, se renfrogna Yoshimitsu. _ Mais comment est-ce possible ? S'étonna Luan. D'accord, Patland est une île de seconde zone, mais elle possède tout de même une garnison de la Marine. Comment cela se fait-il qu'une bande de pirates puisse y prendre pied et nous attaquer ? _ Ah ! Explosa le jeune homme. Toi aussi, ça te chiffonne, hein ? Hé ben voilà ! Bam ! Tous des incapables, ces boulets ! Comment je peux travailler, moi, s'ils font pas leur boulot, les marines ? Je peux pas ! Là, alors faut arrêter de m'en vouloir, c'est pas ma faute, namého ! _ Je n'ai rien dit. _ Tu permets, je prépare ma défense. _ Mais je t'assure que je ne dirais rien. _ Ouais mais quelqu'un va bien finir par la ramener. On est jamais trop prudent. _ Sais-tu ce qui s'est passé au dispensaire ? S'enquit Luan en se massant prudemment l'occiput. _ Une quinzaine de types ont déboulés, armés jusqu'aux dents et ont dégommé une douzaine de médecins avant de les utiliser comme otages, expliqua le jeune homme. Le temps que je comprenne ce qui se passait, pouf, tout était fini. On n'a pas résisté et on a suivi. _ Tu as bien fait, inutile de risquer des dégâts inutiles. _ J'ai dit "on". ça n'a pas l'air de t'inquiéter plus que ça ? _ Non, acquiesça Luan. Je me suis trompée : nous n'avons pas été kidnappé, sinon, ils ne nous auraient jamais laissé nos blouses. » La jeune femme tapota l'une de ses poches enflée de tout son fatras de seringues, scalpels et autres instruments médicaux. « Bien vu, fit Yoshimitsu. Zut, moi qui voulais te faire mariner encore un peu à ce sujet... Ça augure quoi, d'après toi ? _ Comme si tu n'avais pas déjà ta propre idée là-dessus. Je suppose que ces pirates ont besoin de nous pour soigner quelques bobos. Ils ont simplement oublié leurs bonnes manières. _ Après ce qu'ils nous ont fait, ils peuvent toujours courir. _ Nous sommes des médecins, rappela Luan. Soigner les gens, c'est notre métier. _ Rhompffmaieuuuuh... _ La porte est-elle fermée ? _ On est prisonnier. _ Donc tu n'as pas essayé de l'ouvrir ? _ On est prisonnier. _ Je vais aller voir. Tu m'aides à me lever ? _ Luan, on-est-pri-son-nier ! _ Peut-être pas, puisqu'ils ne nous ont pas désarmé. En tout cas, moi je vais voir ; reste ici si tu veux. _ Oh non, j'ai peur tout seul... » Yoshimitsu se releva en soupirant, avant de prendre la main de Luan et de la relever comme si elle ne pesait rien. Au même moment, un infime vrombissement se répandit le long du pont, ponctué par le fracas métallique d'une chaîne chutant dans l'eau. Le navire venait de s'arrêter. « Voilà qui devrait rapidement régler la question de la porte, commenta Luan. _ Reste à savoir comment ça va influer sur notre situation... _ Forcément en bien, affirma la jeune femme. Nous sommes des médecins : les gens aiment les médecins. _ T'as jamais entendu parler de la phobie de la « blouse blanche » ? _ Allez, ne faisons pas attendre nos hôtes. _ Nos ravisseurs, Luan, nos ravisseurs... » Les deux médecins traversèrent la cale, chichement éclairée par quelques lanternes, pour gagner le petit escalier de bois qui menait vers le pont. Chemin faisant, Luan ne manqua pas d'adresser des sourires rassurants et quelques mots réconfortants aux médecins qui semblaient les plus bouleversées par leur situation. Puisque tout le monde ne faisait pas montre du même optimisme qu'elle, il fallait bien qu'elle partage. C'est ainsi que lorsqu'ils arrivèrent au pied de l'escalier, la porte de la cale s'ouvrit et un grand escogriffe tout en muscle et en barbe, fagoté comme un as de pique et avec une main sommairement bandée, descendit pesamment les marches et se planta devant le duo de médecins. « C'est toi le chef ? Lança l'homme d'une voix rauque en s'adressant à Yoshimitsu. _ Nan. _ Alors c'est qui le chef ? _ Le NMSI est une organisation non gouvernementale qui fonctionne suivant un processus collégial où les décisions sont prises à la majorité, expliqua Luan. Je m'appelle Luan Sekihara ; et vous ? Qui êtes-vous ? _ Gné ? _ Il n'y a pas de chef, explicita la jeune femme. Ou alors, il y en a autant qu'il y a de médecins ci-présent. Comment vous appelez-vous ? _ Maieuuuh... Beugua l'escogriffe. C'est que le chef m'a demandé de ramener le chef des médecins, à moi. _ Hé bien, nous serons tous heureux de rencontrer votre chef et d'écouter ce qu'il a à nous proposer, monsieur... ? _ Ah nan, mais ça, ça va pas être possible, refusa tout net l'homme. Vous tiendrez pas tous dans son bureau, hein ! _ Un bureau... On a à faire avec des pirates bureaucrates, maintenant ? _ Yoshi, ce n'est pas le moment de se moquer ! Si vous le désirez, le NMSI possède des portes-paroles à qui votre capitaine pourra détailler sa requête. Néanmoins, la décision finale devra être débattue par l'ensemble du NMSI. Dites, avez-vous un nom ? _ Grael la Montagne, mam'zelle... _ Enchantée, je suis Luan Sekihara et voici Yoshimitsu Kanzatsuga. Je suis ravie de faire votre connaissance. _ Heu... De même. Bon, le porte-parole, c'est qui ? _ Yoshimitsu et moi-même. Nous vous suivons, menez-nous à votre Capitaine. _ Nananan, le capitaine, il veut voir une personne, pas deux ! Se défendit Grael. _ Je suis désolée, mais le NMSI a inscrit dans ses statuts le concept de parité. Ce qui fait qu'il y a deux porte-parole : un homme et une femme. Leur présence est indissociable, afin d'éviter toute discrimination : votre capitaine devra donc nous recevoir tous les deux, c'est ainsi. _ Heu... Mais c'est toujours aussi compliqué, votre bordel ? Geignit le grand escogriffe. _ 'À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire', bonhomme ; ça ne serait pas aussi drôle si on ne se mettait pas de bâtons dans les roues, sourît Yoshimitsu. Allez, quand il y a de la place pour un, y'en a pour deux : le bureau de ton boss n'est pas si petit que ça, pas vrai ? _ Ben oui, mais... _ Nous en prenons la responsabilité, assura Luan. Nous lui expliquerons la situation et je suis certaine qu'il comprendra. Nous y allons ? _ Ben... Bon, ok, mais vous lui répétez bien votre méli-mélo, là, hein ? _ Ne vous inquiétez, nous nous occupons de tout, assura Luan. _ Bon, ben suivez-moi, alors. » Grael remonta l'escalier de son pas pesant, suivi du duo de porte-paroles du NMSI. Ils débouchèrent sur le pont d'une petite caravelle en bois sombre. Celle-ci était amarrée à un ponton, dans ce qui semblait être une grotte, naturelle, mais suffisamment profonde pour que la lumière du soleil ne procure qu'une clarté diffuse à l'intérieur. Le ponton avait été construit le long d'un affleurement rocheux à proximité de la paroi. À l'intérieur de celle-ci, plusieurs entrées se détachaient, repérables par leur noirceur d'encre qui tranchait avec la pénombre. De toute évidence, le NMSI avait affaire à des pirates troglodytes. Tandis qu'ils traversaient le pont en direction de la passerelle de débarquement, Luan s'aperçut que quelque chose de plus gros se tenait dans l'eau, à l'opposé de la petite caravelle. C'était un navire un peu plus massif, bien qu'il soit difficile d'en discerner les contours, mais il... « Mais c'est le NMSI ! S'exclama Luan. _ Hmmm ? Fit Yoshimitsu. Ah ben oui, ça y ressemble... _ Tu l'avais déjà aperçu, hein ? Et quand-est-ce que tu comptais me le dire ? _ Heu... J'allais le faire mais tu m'as prise de vitesse. _ Yoshi... Tant mieux, nous aurons les réserves médicales de la frégate et ses blocs-opératoires directement sous la main. Ça ne pouvait pas mieux tomber. _ On aura surtout pas besoin de se poser de questions pour savoir comment s'échapper. _ Nous n'aurons pas besoin de nous enfuir, j'en suis certaine. _ J'aime ton optimisme béat. _ Je suis juste réaliste, moi. Pas comme certain pessimiste forcené. _ 'faut bien que je me fasse du mourrons pour deux vu que tu fais pas ta part ! _ Mais puisque je te dis qu'il n'y a pas de quoi s'en faire... Têtu, hein ! » Chemin faisant, le trio débarqua sur le ponton et se dirigera vers les orifices creusés dans la roche. Les deux médecins notèrent – avec satisfaction ou pitié selon leur humeur respective – que plusieurs gardes armés jusqu'aux dents surveillaient attentivement le périmètre, mais que malgré leur air farouche, ils avaient surtout l'air blessés, plusieurs abritant comme ils le pouvaient des bandages plus ou moins sanguinolents sous leurs guêtres. Grael attrapa une lanterne et s'engouffra dans l'un des couloirs obscurs, qui s'incurvait pour donner naissance à un escalier en colimaçon. Le passage avait visiblement été taillé dans la roche par la main de l'homme et Luan se demanda combien de temps avait-il fallu pour dégager toute cette forteresse de la pierre. Ce ne pouvait être l’œuvre de ces pirates : la marine n'aurait jamais permis à ces types de rester présent aussi longtemps, c'était impossible. Qui donc aurait pu mener une telle tâche et dans quel but ? Néanmoins, aussi impressionnant soit-il, l'édifice n'était pas exempt de défauts. L'humidité remontait du bras de mer et se condensait le long de la roche qui suintait littéralement. En plus des blessures, Luan était prête à mettre sa main au feu qu'une bonne partie des pirates était tout bonnement malade. L'escalier en colimaçon déboucha sur une lourde tenture pourpre aux relents de moisis. Faute de porte, Grael tambourina contre la pierre. « Boss ? Ils... hum... Je suis de retour. _ Et t'attends quoi ? Fais-le rentrer ! _ Heu... Ouais. » Grael se tourna vers les deux médecins, puis écarta la tenture à leur intention et leur fit signe de passer. Luan et Yoshimitsu franchirent le seuil et pénétrèrent dans une pièce de petite taille. En fait, elle était plus grande qu'elle n'en avait l'air, mais les grosses armoires sur les côtés prenaient une bonne partie de la place disponible. Elles avaient néanmoins l'avantage de permettre de placarder de grosses cartes sur les portes, où de grosses punaises rouges signalaient sûrement des choses d'intérêts. Probablement des convois, puisque nombres desdites punaises étaient reliées entre elles par des fils en laine. Le centre de la pièce était presque entravé par un épais bureau qui croulait sous la paperasse. Sur un coin, un adorable escargophone nacré mâchonnait pensivement une feuille un peu trop près de ses papilles. Derrière l'imposant bureau trônait dans un énorme fauteuil un homme d'âge avancé, la peau halée par des années passées au soleil, les rides taillées par les embruns. Malgré son âge, il avait encore une solide carrure et occultait presque complètement le dossier de son siège derrière lui. Ses cheveux poivres et sels étaient graisseux mais malgré tout soigneusement peigné, tout comme sa barbe fournie était impeccablement taillée. Son costume pourpre délavé avait beau être taillé dans un style aussi vieillot que lui, il n'en avait pas moins une classe indéniable. Ce type irradiait le charisme à plein nez. Pas étonnant qu'il puisse commander une bande de paumés et les envoyer à la mort sans qu'ils se posent plus de questions que ça. Ce type était une malédiction pour tous les pauvres moutons qui croiseraient sa route. Ce que n'étaient pas les deux médecins qui venaient d'entrer dans la pièce. « Grael ! Tonna le vieil homme. J'avais dit le chef ! » Ce n'est qu'à ce moment-là que tout le monde remarqua que Grael avait décidé d'attendre bien gentiment derrière le rideau que les grosses pontes se mettent mutuellement au courant de la situation avant de risquer de subir les foudres de son capitaine. « Excusez-moi, répondit donc Luan, mais le NMSI ne possède pas de chef : toutes nos décisions sont prises de façon collégiale. Nous ne sommes que les porte-paroles du groupe et sommes ici pour écouter puis transmettre la proposition que vous avez à nous faire. _ Deux ? _ Principe de parité. » Le vieil homme fronça ses épais sourcils, fusillant du regard les deux jeunes gens. Aucun des deux ne cillèrent, soutenant son regard, qui impassiblement, qui avec son sempiternel sourire narquois. Un ange passa, puis finalement, le vieil homme grisonnant s'ébroua avant de partir d'un rire rauque. « C'est bon, Grael, ça ira. Tu peux t'occuper du reste, lança le vieil homme. Bien, bien, bien... Cet endroit sordide ne nous dispense pas des bienfaits de la civilisation, aussi permettez-moi de me présenter : Albrecht Niebels, capitaine de la Révolution. À qui ai-je l'honneur ? _ Ç'a alors, vous n'êtes pas des pirates ? S'étonna Luan. _ Nous n'avons rien à voir avec la vermine des océans, tonna Albrecht. _ Excusez la méprise, puisque vous utilisez les mêmes méthodes... » Commenta Yoshimitsu d'un ton acide. Les yeux du révolutionnaire flamboyèrent un court instant, mais avant qu'il ne puisse proférer la moindre répartie, Luan tenta de faire diversion. « Enchantée. Je suis Luan Sekihara et mon collègue ci-présent est Yoshimitsu Kanzatsuga. Ravie de faire votre connaissance. _ Hum... toussota Albrecht en se calmant. Bon, excusez-moi, je n'ai qu'une chaise disponible, mais si vous voulez bien pren... _ Prem's ! Hurla Yoshimitsu en sautant dessus. _ La galanterie, ça te parle, Yoshi ? _ Oooh ? Y'avait qu'une seule chaise ? Que faire... Je sais ! Tu n'as qu'à venir sur mes genoux ? _ Non, non, je sais que tu as les articulations fragiles. _ Ah flûte... Bon, j'aurais essayé, au moins. _ Alors, demanda Luan. Quelle est donc cette proposition que vous souhaitez négocier ? _ Qu'est-ce qui vous fait penser que nous allons négocier ? Grogna Albrecht. _ Pourquoi nous ne négocierions-nous pas ? S'étonna la médecin. _ Vous êtes mes prisonniers, rappela le révolutionnaire. _ Ouais, au temps pour moi, vous n'avez rien à voir avec des pirates : vous êtes juste des esclavagistes. _ T'as dit quoi, gamin ! _ Yoshi, sois gentil, veux-tu... Veuillez excuser mon collègue, il a un humour assez... heu... original. Bref, je pense que nous ne sommes pas des prisonniers au vu de nos conditions d'incarcération. Par ailleurs, puisque la plupart des subordonnés que nous avons vus semblent mal au point, je subodore que vous nous avez fait venir ici pour les soigner. Or si nous étions des prisonniers stricto sensu, vous ne pourriez pas avoir confiance en nous au point de nous confier la santé de vos subordonnés. _ On soignera rien, je ne cautionne pas les esclavagistes. _ Ce sont des révolutionnaires. _ Mmmpf... J'l'aime pas, l'petit blanc-bec. Effectivement, je vous ai fait venir ici pour soigner mes compagnons. Et je... vous présente mes excuses pour nos méthodes... barbares... _ Ah ben c'est pas trop tôt ! _ … mais comprenez-nous : la marine est sur les nerfs, en ce moment, et nous ne pouvions pas prendre de risque à ergoter des heures en vain sous son nez. Nous n'avions pas le choix... _ Oh, nous comprenons parfaitement, assura Luan. Faire partie de la révolution n'est pas de tout repos. Heu... Qu'est-ce qui a bien pu mettre la marine dans de telles dispositions à votre égard ? _ Nous avons exécuté leur chef, lâcha Albrecht. _ Vous avez assassiné quelqu'un !? _ En fait, je crois que je préférais les esclavagistes, tout compte fait... _ Quelle horreur ! S'exclama Luan. Mais qu'est-ce qui vous a pris ?? Je croyais que les révolutionnaires se battait pour une noble cause, un monde plus juste ? _ C'était un pourri ! Tonna le révolutionnaire. Un traître à sa propre organisation, qui chapeautait le marché noir et fricotait avec les pirates ! Le monde ne se portera que mieux sans un individu de cette espèce ! _ Ce n'est pas en devenant pareil ou pire que ceux que vous combattez que vous parviendrez à changer le monde en mieux ! Rétorqua Luan avec conviction. _ C'est facile de pérorer sans savoir ! Explosa Albrecht en se levant à demi de son siège, dominant les deux médecins qui lui faisaient face. Mais vous n'êtes pas différents de nous : viendrez-vous en aide à des pirates sanguinaires ? Non ! Vous les laisseriez crever sans bouger le plus petit doigt ; ce qui revient ni plus ni moins à un meurtre ! Alors, en quoi est-ce que j'agis différemment de vous, vous pouvez me le dire ? _ Oui, répondit calmement Luan. C'est même très simple : nous sommes médecins, nous soignons quiconque, sans porter le moindre jugement. Nous ne pouvons qu'espérer que ceux que nous soignons saisissent cette opportunité de repartir d'un bon pied, mais la décision ne les regarde qu'eux et eux seuls. Et pour être plus précise, ce ne sont pas que des mots en l'air : le NMSI est déjà venu en aide à des navires pirates en perdition. La plupart d'entre eux persistent dans leurs déprédations, mais cela ne nous empêchera pas de recommencer. Je ne peux que regretter le choix de ces pirates, mais j'estime qu'à partir du moment où je commencerai à décider de qui mérite ou non mes soins, je ne vaudrais pas mieux que ces criminels. » Albrecht cilla mais resta à dévisager la jeune femme sans dire un mot. Après un long moment, il se rassit et grogna dans sa barbe. « Finalement, les rumeurs étaient fondées, vous êtes vraiment des doux-dingues complètement inconscients. _ Ne vous sentez surtout pas obligé de le dire à voix haute, vous savez, lui rappela Luan. _ En tout cas, voilà qui règle mon principal soucis : je sais maintenant que vous ne rechignerez pas à nous aider et au fond, c'est tout ce qui m'importe. _ Bien, nous pouvons donc entamer les négociations ? _ Quelles négociations ? Vous affirmez soigner les gens sans discrimination et j'ai des blessés. Mettez-vous au boulot et puis c'est tout. Vous serez amplement récompensé, si c'est ce que vous craignez. On renflouera les caisses du NMSI, ça vous permettra de tenir encore quelques temps. _ Hé ! Nos problèmes d'argents ne regarde que nous ! _ Nous nous fichons complètement de votre récompense, signala Luan. Mais le fait est que nous avons avons une tâche à mener à bien à Patland et qu'être tous stationné ici est une débauche de moyens médicaux proprement ridicule. Le gros des effectifs du NMSI doit retourner au dispensaire. _ Pardon ? _ Nous ne faisons pas de discrimination : les gens de Patland ont tout autant besoin de nous que vous. Et puisque nous sommes largement en surnombre, nous allons renvoyer un contingent occuper le dispensaire. _ La population de Patland a bien vécue sans vous jusqu'à maintenant, ils ne sont pas à quelques jours près. On vous renverra tous là-bas lorsque tout le monde ici sera guéri, pas avant, lâcha Albrecht d'un ton péremptoire. _ Allons, nous sommes suffisamment nombreux pour prendre en charge une ville complète, il serait complètement ridicule de nous forcer à rester tous ici à nous tourner les pouces alors que nous pourrions être utile ailleurs sans que cela n'ait d'impact sur notre capacité à vous venir en aide. Je vous assure que nous allons laisser un effectif suffisant pour traiter vos blessés mais le reste retournera au dispensaire de Patland. _ Ah, ça suffit ! C'est moi qui commande ici et nous ferons comme je le dis ! Par égard à l'aide que vous allez nous apporter, je me montre plutôt coulant envers vous, mais n'oubliez pas que vous êtes de fait mes prisonniers et que je puis disposer de vous comme je l'entends ! _ Mais ce n'est pas du tout une façon de négocier, ça ! Se récria la jeune femme. _ Luan, je prends la relève. » Siffla Yoshimitsu. Le jeune médecin se cala confortablement sur sa chaise, bras croisés dans son giron, et planta ses deux pieds sur le bureau d'Albrecht. « Des prisonniers ? C'est vraiment ce que vous croyez ? Allons donc ! Si l'envie m'en prend, une fois vos gaillards soignés, je file d'ici en leur passant sur le corps s'il le faut et je signale à la Marine la position de votre jolie petite planque. Vous n'avez pas le contrôle de la situation, alors n'essayez pas de jouer les méchants matamores avec moi. » Albrecht sursauta comme s'il venait de se faire gifler, avant de bondir sur ses pieds, renversant son gros fauteuil au passage, et de toiser d'un œil mauvais le médecin, ivre de rage. « Dis donc gamin, tu crois pouvoir me menacer et t'en tirer comme ça !? Rugit le révolutionnaire empourpré. Yoshimitsu baissa légèrement la tête et vrilla son regard dans celui d'Albrecht, par-dessus l'armature de ses lunettes. Le temps se figea. Les mots qui venaient à l'esprit du vieil homme furieux se coinçaient obstinément dans sa gorge, incapables de sortir sous la pression du regard du médecin. La colère reflua, presqu'aussi vite qu'elle était arrivée et Albrecht pâlit. Pourtant, prisonnier d'une fascination morbide, il était bien incapable de détacher son regard des deux puits sans fond qui lui faisait face. Un regard qui lui renvoyait crûment ce qu'il était : un sac de viandes. Certes, une inexplicable anomalie électrique l'avait doté d'une conscience éphémère. Mais un sac de viandes quand même. Et ces yeux signalait clairement que leur propriétaire ne faisait pas grand cas des sacs de viandes qui se dressaient sur son chemin. La main gauche d'Albrecht se mit à trembler. En deux pas, Luan fut au côté de Yoshimitsu et bouscula du bout de sa chaussure le pied de la chaise, renversant l'équilibre du médecin. Celui se sentît partir en arrière et battit convulsivement des mains, en pures pertes, pour essayer d'infléchir son déséquilibre en avant. Heureusement, Luan attrapa le dossier de la chaise, empêchant à son collègue de culbuter cul-par-dessus-tête. « Mais t'es complètement folle ! _ On ne se balance pas sur les chaises. _ J'ai bien cru que j'allais mourir ! _ Evidemment : c'est dangereux de se balancer sur les chaises. _ Luaaaan ! Qu'est-ce qui t'as pris ? Encore un peu et il me mangeait dans la main ! Rouspéta Yoshimitsu en désignant le révolutionnaire sous le choc. _ Un médecin n'intimide pas ses patients. _ Maieuh... C'était pour rigoler, quoi... _ Ne vous inquiétez pas, monsieur Niebels, assura Luan. Mon collègue vous taquinait : il serait bien incapable de faire ce qu'il a dit. _ M... Mais... _ Puisque nous sommes vos médecins, les connaissances que nous pouvons rassembler sur vous tombent sous le coup du secret médical. La marine nous menacerait-elle qu'il nous serait tout de même absolument impossible de lui dire quoi que ce soit à votre sujet. Le secret de votre cachette sera bien gardé avec nous. _ Hum... Je... heu... Essaya de reprendre contenance le révolutionnaire. _ Pour en revenir à notre négociation, vous n'avez pas le choix en définitive, reprit posément Luan comme s'il ne s'était jamais rien passé. Soit vous nous faites confiance et vous permettez au NMSI de renvoyer un contingent au dispensaire de Patland... Soit vous n'avez pas confiance et à ce moment-là, que nous restions tous n'a aucun sens puisque vous ne parviendrez jamais à vous résoudre à nous confier la vie de vos subordonnés. Me trompe-je ? » Albrecht cligna des yeux, puis entreprit de s'asseoir, avant de se rendre compte qu'il avait renversé son siège. Finalement, il resta debout, essaya de se forger une contenance digne, avant de reporter son attention sur la médecin. « Non, vous avez raison, concéda le révolutionnaire un peu penaud. Si vous pouvez soigner mes hommes, on fera comme vous dites. _ Très bien, se félicita Luan. Combien de blessés avez-vous ? _ Presqu'une vingtaine. _ D'accord. Alors nous allons en référer avec le NMSI et si tel est sa décision, nous nous occuperons de vos blessés. _ En référer au... ? _ N'oublie pas que nous ne sommes que des portes-paroles. Nous ne ferons que transmettre votre proposition car nous n'avons pas l'autorité nécessaire et suffisante pour négocier au nom de l'organisation. _ Mais je croyais que... _ Relax, papy, c'est pas comme si on allait avoir du mal à les convaincre de quoi que ce soit, en définitive. » * * * Quelques minutes plus tard, Luan et Yoshimitsu traversaient la passerelle qui menait au NMSI, passant en revue le navire de fond en comble. Avant de proposer quoi que ce soit aux autres médecins, il leur fallait s'assurer des ressources à dispositions et préparer un plan d'action digne de ce nom. Comme à la guerre, la logistique était la clef de la réussite dans une opération médicale d'envergure. Heureusement tout semblait en ordre, les révolutionnaires ayant pris visiblement soin du navire sans toucher à quoi que ce soit qui ne fût pas nécessaire à la navigation. Le NMSI avec ses ressources au grand complet était donc prêt à entrer en action. Il ne restait plus qu'à... « Tiens donc, s'exclama Yoshimitsu. On a un visiteur. _ Où ça ? » Demanda Luan en scrutant désespérément la pénombre de la cale. Rien à faire, ses yeux désespérément normaux ne voyaient rien. Heureusement que sa famille n'avait jamais compté sur elle pour se tailler un avenir héroïque à grands coups d'exploits martiaux forgés à la pointe du sabre : elle n'avait pas la vision d'un expert du combat et aurait été bien incapable de percevoir le moindre mouvement dans un affrontement à grande vitesse. Ou dans la pénombre. Ce qui n'était pas le cas de Yoshimitsu. En s'approchant de la porte de la pharmacie avec leur petite lanterne, ils mirent à jour un jeune garçon à peine majeur qui cachait désespérément une barre à mine dans son dos. Visiblement, il ne goûtait guère les différents dispositifs de sécurités et de verrouillage qui contrôlaient l'accès aux réserves médicales de la frégate. « Bonjour, pouvons-nous vous aider ? Demanda Luan avec sa gentillesse naturelle. _ Hé ? Mais qu'est-ce que vous faites-là ? Z'êtes pas censé être prisonniers ? S'étonna le gamin. _ Si, mais on s'est évadé et on compte faire naviguer à deux le NMSI pour s'enfuir, déclara Yoshimitsu. _ Ahah, très drôle. _ Flûte, percé à jour. Et on peut savoir ce que tu fais avec une barre à mine près de nos réserves médicales, s'enquit le médecin. _ Moi ? Mais... heu... rien. Je patrouille juste pour m'assurer que tout va bien. _ Avec une barre à mine ? S'étonna Luan. _ Ben, 'faut nous comprendre, on est des révolutionnaires, on vit de bric et de broc et on a les armes qu'on peut. _ Une barre à mine ? _ ça peut faire drôlement mal, un coup de barre à mine ! _ Génial, c'est vachement intéressant, tout ça. Mais on ne va pas te retenir inutilement, hein... Poursuis donc ta patrouille, on s'en voudrait terriblement de te causer des ennuis parce qu'on t'as tenu le crachoir, assura Yoshimitsu. _ J'aurais pas dit mieux, acquiesça le gamin. Surtout que vous devez être super occupés, alors je ne vais pas vous gêner. Bon, ben salut. » Le gamin détala d'un pas vif, sans demander son reste, tandis que Yoshimitsu secouait la tête. « Je ne me doutais pas que les révolutionnaires étaient dans un tel état de dénuement, déclara Luan. Les pauvres. Se battre avec des barres à mine. _ Laisse tomber, c'était rien qu'un mensonge. _ Quoi ? Mais pourquoi ? Il n'avait aucune raison de nous mentir. _ Les Junkies mentent, c'est comme ça, asséna le médecin. _ Ce n'est pas parce qu'on l'a croisé près de la réserve médicale que c'est forcément un junkie. C'était peut-être juste une coïncidence. _ Oui, sûrement. » éluda Yoshimitsu, sachant qu'il était vain de discuter. Mais il se fiait à sa plus grande expérience. Le gamin était un junkie, il restait simplement à déterminer comment il allait falloir le gérer. Luan et Yoshimitsu devisèrent encore un moment, jusqu'à s'accorder sur le meilleur moyen de gérer la situation. Ils convinrent finalement que cinq médecins du NMSI resteraient chez les révolutionnaires pour les remettre sur pied, tandis que les autres retourneraient à Patland tenir le dispensaire et s'occuper de la raison première qui les avait menée ici. Les cinq médecins seraient d'une part eux deux, plus à même de tenir tête à Albrecht en cas de soucis et formant un binôme des plus efficace pour les opérations lourdes. Sumito et Berthe aux grands pieds (en fait, elle n'avait pas de si grands pieds que ça, mais c'était un surnom plus consensuelle que la grosse Berthe) formerait le second binôme et s'occuperait des blessures plus légères. Enfin, Rabel s'occuperait de l'orientation des blessés et de prioriser les cas. Ça marcherait comme sur des roulettes. Ne restait plus qu'à soumettre l'idée aux autres. Ce qui ne représentait guère qu'une formalité : si Yoshimitsu et Luan tenaient le rôle de Porte-parole, c'était justement en raison de leur capacité à convaincre autrui... * * * « Et donc... C'est là que vous allez opérer les gens ? » Demanda d'un ton circonspect le colossal Grael. Il se trouvait en compagnie de Luan et de Yoshimitsu dans l'un des quatre blocs opératoires que le NMSI recelait dans ses flancs. La vision de tout ce blanc resplendissant, l'odeur persistante et entêtante des mixtures pharmaceutiques, ce côté froid et clinique... Toutes ces composantes semblaient déstabiliser grandement le lieutenant Révolutionnaire. Alors qu'il aurait probablement foncé tête baissée sur un régiment de marine sans trembler, il ressemblait maintenant à un gamin sans défense et pas très rassuré. Yoshimitsu s'approcha de l'une des tables et posa dessus un épais rouleau de cuir qu'il venait de décrocher de sa ceinture. D'une pichenette, il fit bouler le rouleau, qui se déplia le long de la table, révélant les innombrables outils chirurgicaux insérés dans sa pochette. « Hé ! C'est quoi, ça ?? S'alarma Grael. _ Une trousse de dissection, répondit Yoshimitsu en souriant. _ Hein !? Mais heu... C'est pourquoi faire ? Vous allez quand même pas nous disséquer !?? _ Mais non, ce sont nos outils de chirurgies. Nous n'allons pas vous opérer à mains nues, évidemment, expliqua Luan. _ Mais y'a des scies, des marteaux, des vilebrequins, des... Mais qu'est-ce que vous voulez faire avec ça ! _ Oh flûte, minauda Yoshimitsu. Je crois que nous sommes percés à jour, Luan. _ Percer à jour ? Qu'est-ce que ça veut dire ? _ En réalité, nous sommes de dangereux sérials killers qui naviguons d'îles en îles pour assouvir nos pulsions sadiques et meurtrières, répondit le médecin en s'approchant à pas lents du révolutionnaire. _ Quoi !? Vous plaisantez ? _ Naaaaan.... Franchement, une organisation non lucrative qui sillonne les océans pour guérir les gens sans jamais rien demander en retour, sérieux ? Mais qui pourrait croire ces fadaises : c'est évident que nous avons d'autres buts, répliqua Yoshimitsu, si proche qu'il était presque au contact de son interlocuteur. _ Ne... Ne m'approchez pas ! Hurla Grael en reculant. _ Pourquoi ? Tu as peur ? C'est bien, je t'assure. Moi aussi, j'aurais peur si j'étais prisonniers avec deux savants fous dans un bloc opératoire, assura le médecin en poursuivant son approche. _ Lai... Laissez-moi sortir ! Je veux partir ! Je veux... Aaaah ! » Tout en reculant, Grael buta sur un siège et s'étala de tout son long dessus. D'une cambriole, Yoshimitsu s'installa à califourchon sur lui et fit danser un scalpel devant ses yeux. « Pas la peine de paniquer, mon grand ! Tu vas ressortir d'ici, je te l'assure ! Alors, en combien de morceaux ? Tu veux choisir les organes que je vais t'enlever ? Oh ! Je te rassure, on est pas obligé de se restreindre aux organes. Ton bras droit ? Il est blessé, pas vrai ? Tu n'en as donc pas besoin. Ça ne te dérangera pas si je te l'enlève ? _ AU SECOURS ! À L'AIDE QUELQU'UN !! J'VEUX SORTIIIIRRR ! _ Voilà, c'est fini, signala Luan. _ Oh flûte, ça commençait à devenir rigolo, soupira Yoshimitsu. _ Fini ? Qu'est-ce qu'est fini ? Je suis déjà mort, c'est ça ? » S'étrangla Grael, complètement perdu. Yoshimitsu quitta son siège vivant et fit signe à Grael de se relever. Celui-ci s'exécuta méfiant, et s'aperçut alors que... « Héé ! Mon bandage ! Vous avez refait mon bandage ? Mais quand ? _ Pendant que vous vous amusiez avec Yoshimitsu sur le siège, je m'en suis occupé, expliqua Luan. _ Mais j'ai rien senti. _ Il faut dire qu'on s'amusait tellement, acquiesça le médecin. _ C'est de la magie, c'est ça ? _ Simplement du talent. _ Bien, fit Yoshimitsu. Donc comme vous l'avez vu, nous sommes parés. Vous pouvez aller dire à Rabel qu'il peut commencer à nous envoyer les blessés, on s'en occupe. _ Heu... D'accord ; J'y vais tout de suite. » Grael salua rapidement les deux jeunes gens d'un signe avant de s'engouffrer vers la sortie, laissant échapper un grand soupir de soulagement. « Je crois que tu lui as fait peur, fit Luan. _ Tu veux rire ? Il a adoré, j'l'ai vu dans ses yeux. _ Moi, je crois qu'il a eu un peu peur. _ Oui, mais c'est le un peu, qui compte, expliqua Yoshimitsu. C'est comme ces gens qui vont dans le train fantôme dans les fêtes foraines : ça leur flanque un peu les pétoches, mais c'est justement ce qui les amuse. _ … _ Je t'assure que si. _ … _ Bon, d'accord, je ne le ferai pas avec les autres, convint le médecin. _ J'apprécierai beaucoup. _ ça mérite bien un bisou, ce genre de petits sacrifices ? _ ça n'a absolument rien à voir. _ Bon. J'aurais essayé. » La porte se rouvrit et les deux médecins se retournèrent pour accueillir leur prochain patient. Sauf que ce n'était que le gamin à la barre à mine. « Tiens, mais c'est notre ami junkie ! S'exclama Yoshimitsu. _ Pardon ? Fit Luan. _ Heu... Jack. Notre ami Jack. Tu t'appelles bien Jack, nan ? _ Pas du tout, moi c'est Roy, fit le gamin. _ Oh ? Me serais-je trompé ? _ Que voulez-vous, Roy ? Demanda Luan. C'est Rabel qui s'occupe de l'orientation des blessés. C'est à lui qu'il faut s'adresser pour être pris en charge pour des soins. _ Ouais, je sais, mais comme je passais justement par là... _ Junkie ! » Eternua Yoshimitsu. Le médecin s'attira une paire de regards pas franchement amicaux. Roy afficha une mine, mi-suspicieuse, mi-énervé. « Vous venez de me dire quoi, là ? _ Mais rien, j'ai juste toussé, se défendit Yoshimitsu. Bref, tu disais que tu passais justement par là, c'est ça ? _ Heu... Ouais, bon. En fait, j'ai super mal à la main et je me demandais si vous ne pouviez pas rapidement me filer un truc, pour atténuer la douleur. _ Un cachet devr... commença Luan. _ Nan, nan, nan, j'ai déjà pris les cachets, mais ça ne me fait rien et... _ Au fait, ça fait combien de temps que vous êtes caché dans cette grotte ? Demanda Yoshimitsu. _ … _ Quoi ? C'est juste de la curiosité. Promis-juré, si, si ! _ ça va faire une semaine, répondit Roy. On s'est carapaté ici en urgence et maintenant, on est coincé ici... Vous n'avez rien de plus forts que de simples cachets ? _ Ah, c'est long, une semaine. Dur de tenir, pas vrai ? Commenta le médecin. _ Vous essayez de sous-entendre quelque chose, là, ou c'est moi que me fait des idées ? _ Oooh, on devient paranoïaque ? _ Yoshi, laisse-le tranquille. Tout le monde serait sur les nerfs, après une semaine cloîtré dans une grotte. Roy, je suis certaine que les cachets peuvent... _ Nan, nan, nan, j'ai super mal, les cachets ne suffiront pas, je vous assure, affirma catégoriquement le gamin. _ Laissez-moi voir votre main. Vous êtes peut-être plus gravement atteint que vous ne le pensez. _ Mais nan, c'est en voie de guérison. _ Vous avez été soumis à un stress intense, c'est peut-être juste psycho-somatique. _ Ou sinon, c'est un junkie, conclut Yoshimitsu. _ Hé ! Je ne vous permet pas de m'insulter ! Se révolta Roy. _ Allons, allons, je ne faisais qu'énoncer toutes les possibilités. 'Faut pas se sentir visé par l'une d'elles en particulières. _ Ecoutez, je veux juste que la douleur cesse, affirma Roy. _ Junkie-junkie-junkie-junkie-junkie-junkie-junkie-junkie... _ Mais ta gueule ou je t'en colle une, connard ! Explosa le gamin en menaçant Yoshimitsu de son poing blessé. _ Voilà qui règle la question, je crois. » Fit le médecin. Roy lâcha un juron et fila en courant sans se retourner, laissant les deux médecins seuls. « Puisqu'il a instinctivement utilisé sa main, c'est qu'elle ne lui fait pas mal, commenta Luan. Si la douleur était psycho-somatique, alors ton petit jeu devrait lui en avoir fait prendre conscience et c'est réglé. _ Mais si c'est un drogué, il va revenir, conclut Yoshimitsu. _ Nous n'en savons rien. _ Il commence à être en manque. Aucune chance que Berthe lui refile sa came. En plus, elle ressemble à un dragon alors que tu ressembles à une maman poule. Nan, il va revenir. _ Tu n'es pas infaillible. _ Mais bien sûr que si, voyons ! » * * *
* * * Luan stoppa la pompe à eau et attrapa le racloir pour terminer de nettoyer le sol du bloc-opératoire. Finalement, tout s'était bien passé, aucune complication n'avait été rencontrée même lors des traitements des cas les plus graves. Il allait falloir surveiller la convalescence des patients, par contre, ce qui n'était pas sans poser problèmes puisque les révolutionnaires n'avaient aucun médecin sous la main que le NMSI aurait pu briefer. Le plus simple serait peut-être de... Le doux grincement de la porte attira l'attention de la jeune femme, qui se retourna d'un bloc pour apercevoir Roy. En nage, pupilles dilatées, pâle, légèrement tremblant. Les premiers symptômes du sevrage. À ce stade, le gamin était probablement prêt à tout pour atteindre sa dose, comme en témoignant le couteau qu'il serait dans sa valide. Sa main principale, elle, était toujours engoncée dans son épais pansement, mais à en juger par les tâches écarlates qui l'ornait, les blessures semblaient plus sérieuses que tantôt. Il avait du essayer de chasser une douleur par une autre en se scarifiant volontairement. « Roy, commença Luan. _ La réserve ! Tu vas m'ouvrir la réserve ! Cria le gamin. _ Non, je ne vais pas le faire, assura la médecin d'un ton bien plus assuré qu'elle ne l'était. Roy, vous n'êtes pas dans votre état normal, vous avez besoin d'aide. Laissez-moi vous aider. _ Tu veux m'aider ? Alors file-moi ma came, merde ! _ C'est impossible, Roy, cela ne fera que repousser l'inévitable. Mais je peux vous aider autrement, répondit doucement Luan en s'approchant du junkie. _ Ta gueule ! Ta gueule et m'approche pas ! File-moi la clef du cadenas, je me débrouillerai. _ Regardez-vous, Roy. Je ne peux pas vous laisser comme ça. Vous avez besoin d'aide, poursuivit la jeune femme en avançant encore. _ Va chier ! Recule ! Recule ou je te plante ! Et donne-moi les clefs ! _ Roy, vous ne pouvez pas continuer comme cela, reprit Luan en s'arrêtant. Vous vous mettez en danger. Pas seulement vous, mais vos compagnons aussi. Vous devez en finir avec ces bêtises. _ Ta gueeeule ! File-moi les clefs ou je te tue ! J'te jure que je le fais ! _ Non, vous n'en ferez rien, affirma Luan en avançant encore d'un pas. Vous êtes un révolutionnaire, vous voulez changer le monde en bien. Je suis certaine que vous ne m'agresserez pas. Vous ne renierez pas ce que vous êtes, conclut la jeune femme en avançant encore d'un pas. _ Putain, arrête, s'affola le gamin. Je... Je veux... je... _ Tout va bien, Roy. Lâchez ce couteau et écoutez-moi. Je peux vous aider. Vous pouvez vous libérer de cette dépendance. Vous êtes un révolutionnaire, vous vous battez contre un carcan qui étouffe votre idéal, c'est dans votre nature. Alors battez-vous car la drogue est un carcan. Vous devez vous défaire de son emprise et je peux vous y aider. » Le gamin se mit brusquement à hurler. Avant que Luan ne comprenne ce qui se passe, le bras du gamin bougea trop vite pour qu'elle le suive de l'oeil et une vive douleur éclata sur son crâne. Tandis qu'elle chutait en arrière, trente-six chandelles dansant dans son champ de vision, elle perçut la cavalcade éperdue du gamin dans les entrailles du NMSI. Luan essaya de se relever, mais elle avait encore le vertige. Et puis, elle ne voyait rien d'un œil, avec le sang qui lui coulait devant. Mais c'était somme toute un mal pour un bien : Roy avait frappé avec le manche. Une paire de jambe traversa la pièce et se dirigea vers elle. Elles se replièrent et Yoshimitsu apparut dans son champ de vision, son sempiternel sourire narquois sur la figure. « Tu ne peux pas savoir à quel point je me retiens de te dire 'je te l'avais bien dit' ! _ Et je t'en sais gré, assura Luan. _ Même avec le manche, c'est bien entaillé. Je vais te faire deux points, signala le médecin en tirant son nécessaire de couture de sa poche. À ce propos, si tu es choquée et que tu veux te réfugier dans mes bras pour puiser du réconfort, pas de soucis, naturellement. _ Non, non, ça ira, merci de ta solicitude. Je pense qu'il est mûr pour qu'on l'aide. _ Il t'a agressé. _ Avec le manche de son arme. _ Il t'a agressé ! _ Il n'est pas dans son état normal. _ Il t'a agressé. _ Les révolutionnaires vivent dans la violence, ce ne sont pas des gens tout à fait normaux. _ Mais t'as fini de lui trouver des circonstances atténuantes ? _ Aïeeuh ! Doucement avec le fil, tu veux. En tout cas, je n'ai pas l'intention de le laisser dans cet état. _ On pas le temps pour un sevrage. _ Je vais rester pour l'accompagner. _ Dis, tu m'écoutes ? On part demain, je te rappelle. _ Je ferai d'une pierre deux coups : ils n'ont pas de médecins, or quelqu'un doit garder un œil sur les convalescents. Et tant qu'à être là, je n'aurai qu'à m'occupe du cas de Roy. _ Et Patland, t'en fais quoi ? _ Vous serez bien assez nombreux, un médecin de plus ou de moins n'y changera rien. Vous n'aurez qu'à passer me chercher quand ça sera fini. Aïeeuh ! J'ai dit 'doucement'. _ Voilà, point de sutures terminées. Si ça fait mal, je peux faire un gros poutou dessus, sinon. _ Les poutous n'ont aucunes vertus curatives ou analgésiques. _ Fallait bien que j'essaye. Donc si je comprends bien, soit je te kidnappe, soit tu restes, c'est bien ça ? _ J'apprécierai que tu supprimes le kidnapping de tes options. _ Ben oui mais j'ai plus le choix, alors. _ Parfait. _ Tsss... D'accord, on fera comme tu dis, j'expliquerai ça aux autres. Deux semaines, pas une de plus, par contre. Bon, il faut le cueillir tant qu'il est mûr. Va le rejoindre, je m'occupe de terminer le nettoyage. _ Merci, je te revaudrais ça !! _ ça vaut bien un bisou, ça ? » Mais Luan avait déjà disparu. Yoshimitsu soupira et attrapa le racloir, se demandant comment il faisait pour toujours se faire avoir avec les corvées de ménages. * * *
* * * Luan ouvrit la porte du rebut dans lequel s'était caché Roy. Comme pour les poches, c'est toujours dans la dernière qu'on trouve ce qu'on cherche : en se basant sur les dires des différentes personnes qui l'avaient vu filer, elle avait tenté quatre autres endroits au préalable avant de tomber sur le bon. Le gamin était prostré dans un coin de la pièce, l'air hagard, tremblotant de manière tout à fait visible, le t-shirt trempé par la sueur. Lorsqu'il aperçut la médecin entrer dans la pièce, tenant une trousse de secours et une bouteille d'eau, il s'agita et bafouilla, tentant tout à la fois de s'excuser, de s'expliquer et de la supplier mais se répandant en galimatias proprement incompréhensibles. Luan s'approcha doucement et s'accroupit auprès de Roy. Elle posa la bouteille d'eau près de lui. « Vous allez avoir besoin de boire beaucoup. Vous vous sentirez un peu mieux et cela vous permettra d'éviter les symptômes de la déshydratation, signala la médecin. Faites-moi voir votre bras. Là, c'est bien. Je vais nettoyer et désinfecter tout ça et vous faire un autre pansement. Calmez-vous, tout ira très bien. _ V... Vous allez m'... m'aider ? Articula péniblement Roy entre deux tremblements. _ Évidemment : je suis médecin. »
Addendum : Pas de commentaires, merci. |
Dernière édition par Luan le Sam 1 Fév 2014 - 10:05, édité 5 fois