Des alliés en plus, des millions en moins ? [Chasse au trésor 2/7]

Précédemment : Course-poursuite funky

Après cette incroyable traversée, nous sommes enfin arrivés à cet archipel au trésor, les Îles Abacos, si l’on en croit la vieille pancarte accrochée au port. Je réalise cependant rapidement mon erreur, de penser qu’arriver avant Jack signifiait arriver le premier. La carte n’est de toute évidence pas le seul exemplaire disponible ou alors l’île sur laquelle nous avons trouvé la nôtre n’est pas si secrète. Plusieurs bateaux pirates sont amarrés au port de l’île principale et en longeant la côte jusque-là, nous avons aperçu un camp d’une trentaine de personnes installées sur l’île principale. Ça ne fait aucun doute, tout ce monde n’était là que dans un but : le trésor du furieux O’Brian.

Le pied à peine posé à terre, nous sommes pris dans l’agitation qui règne dans le village. Dans chaque rue, on assiste au même spectacle. Les vendeurs ambulants qui vendent à prix d’or des pelles et les pioches, des vendeurs à la sauvette vendant des cartes officielles de l’emplacement du trésor à plusieurs centaines de millions de berrys, des pirates qui se battent, soit deux équipages qui se disputent la propriété d’un outil, d’une arme, d’un lopin de terre à creuser, parfois même d’un membre d’équipage, soit au sein du même équipage, une mutinerie organisée contre un capitaine par un équipage trop las de n’avoir encore atteint le trésor espéré.

Nous sommes d’ailleurs nous-mêmes accueilli par une bande de pirates, quatre membres tous équipés d’armes à feu et dont l’un d’eux nous crie :

Les armes à feu ne sont pas un combat avantageux pour un épéiste de ma sorte, mais il est hors de question pour moi de laisser tomber le trésor. Je prends mes épées en main mais avant que je ne puisse m’en servir un son rauque se fait entendre derrière moi, la terre tremble et les quatre pirates se retrouvent au sol, désarmés et désorientés. Je me retourne et voit Adam accrocher son micro à sa ceinture. Voici donc l’étrange pouvoir offensif des dials. Impressionnant.

La vie des pirates est faite de trahisons et de coups de couteaux dans le dos, cette chasse au trésor commence à peine, mais c’est déjà la deuxième fois qu’on me rappelle cette leçon. Je me retrouve à nouveau seul, seul face à toute cette armée de pirates cherchant la même chose que moi. Je me dirige vers le bar de la ville, peut-être que je pourrais y trouver quelques informations qui me seront utiles. 

Adam a raison sur ce point. Si la dizaine d’équipages complets qui vit sur l’île n’a pas encore mis la main sur le trésor, je ne risque pas d’apporter grand-chose à son équipage de pirate-musicien. Déjà abandonné par deux fois alors que ma quête ne fait surement que commencer, je suis toutefois loin de baisser les bras. Je le veux ce trésor. Pas pour l’or, enfin… pas que pour l’or. Je veux ce trésor, parce que je m’imagine déjà devant tous ses pirates, leur prouvant que seul je suis bien meilleur qu’eux tous réunis. Revenant au village les bras chargés d’une montagne de billets, les poches pleines de pièces, et un énorme sac sur les épaules, chargé de toutes sortes de bibelots de métaux précieux que je m’empresserais d’échanger contre un navire qui me permettra de reprendre la mer.
Toutefois, ce n’est pas en restant là à ne rien faire, que je vais trouver le trésor. Il me faut agir intelligemment. Et pour commencer, direction le village. J’espère y dénicher quelques informations utiles sur les endroits qui n’auraient pas encore été fouillés, explorés, pillés. Le temps de voir un bar, une boulangerie, un magasin d’alimentation générale, une vingtaine d’habitation en bois et quelques fermes et j’avais terminé mon tour du village, finalement très petit pour un archipel aussi étendu et qui devait compter moins de trente habitants. Un bar est sans nul doute le meilleur endroit pour y obtenir des renseignements. Les barmen sont habitués à servir tous types de clients, et après quelques verres, quand les langues de la clientèle se délient enfin, sont certainement les oreilles les mieux placées pour écouter indiscrètement les confidences de deux pirates bourrés au coin du feu.
J’entre dans le petit établissement. Une vingtaine de clients y sont, certains assis autour de l’une des quatre tables de bois disposés dans l’établissement, d’autres debout accoudés au comptoir du même matériau, traversant la pièce dans toute sa longueur. Derrière le comptoir, un homme d’une quarantaine d’année, barbu et à l’air renfrogné sert les verres. Un escalier en colimaçon monte sur une petite mezzanine au plancher grinçant sur laquelle trois petites chambres étaient louable. Je m’avance doucement vers le comptoir, sentant les yeux se lever vers moi, et demande un verre au barman. Une fois servi, j’amorce la conversation.

Je bois ma limonade cul-sec, dépose une piécette sur le comptoir pour la régler et fais demi-tour. Cette visite ne m’a donc rien appris sur le trésor, à moins que le barman ne voit juste et que ce ne soit qu’un canular. Je ne pouvais m’y résoudre. Je m’apprêtais à quitter l’établissement quand une voix m’interpella :
Je m’approche de la table d’où provient la voix. Un des quatre hommes assis à la table se lève pour me laisser sa place. Je m’installe à la table et regarde l’homme face à moi, celui qui vient de m’interpeller.
Il m’adresse ensuite un large sourire, dévoilant trente-deux dents en or.

Je quitte l’établissement et me dirige à présent vers cette ferme où je pourrais élire domicile pendant la durée de ma quête. En échange de quelques pièces, le paysan me donne une couchette de paille dans un enclos fermé à clé, dont il venait certainement de faire sortir le cheval qui en était le précédent locataire. Je m’installe ici et y passe la journée, malgré l’odeur, réfléchissant à ce qui serait le mieux pour chasser le trésor. Y aller en solitaire, avec peu de chance de réussite mais d’énormes gains ? Ou m’associer avec ces types qui semblent assez sûr d’eux mais en devant partager le trésor en quinze, vingt parts.

La nuit tombant, et n’ayant toujours pas réussi à prendre de décision, je décide de me rendre à la réunion des chasseurs de trésor, espérant y trouver une réponse. Après avoir marché quelques minutes dans les bois, suivant la lumière des torches pour me repérer, j’arrive à cette petite clairière où sont installés déjà en cercle autour d’un petit feu de camp, une vingtaine de pirates, dont … Jack Daniels. Qu’est-ce que ce traître fait ici ?  Il a finalement réussi à rejoindre l’île, et maintenant ? Il veut s’associer à un groupe avec de bonnes chances de réussite dans la quête, les trahir et garder l’or pour lui tout seul ? Ma main glisse sur le fourreau de mon épée, prêt à dégainer, je veux l’attaquer mais mon geste est retenu par un type derrière moi. Le chasseur de trésor de ce matin, retient mon bras, passe devant moi et prend la parole.

Il pointe du doigt l’endroit du tableau où mon nom et celui d’Adam sont inscrits côte à côte. Je me lève, ajuste mes sabres à ma ceinture et me dirige vers le village. Jack Daniels se précipite sur mes pas.

 J’avais aperçu un morceau de la carte du chasseur de trésor et j’avais une idée assez claire de l’endroit où j’allais chercher ce trésor. 

Après une courte nuit de sommeil, je suis à nouveau dans le bar de la ville. Cette fois, hors de question de perdre du temps, je m’approche du comptoir et demande :

Le tavernier sort une large carte de la région qu’il étale sur le bar. Je la scrute minutieusement à la recherche d’un détail qui m’a sauté aux yeux la veille. Là ! Je désigne du doigt une île parfaitement ronde, cette île qui hier était complétement noire sur la carte du chasseur de trésor, là où les îles écartées de la zone de recherche n’étaient que grisées à la mine.

Une île inaccessible sur laquelle personne n’aurait posé les pieds ? Si ce trésor existe, il est forcément là-bas. Je sors précipitamment du bar et recrute dans la même précipitation un pêcheur qui accepte de m’emmener au pied des montagnes. Je me tiens debout, face à l’île durant la traversée, le regard conquérant, la mine réjouie, persuadé d’avoir déjà trouvé le trésor. Tellement fier de moi que je ne fais pas attention à tous ces mecs qui ont entendus ma conversation avec le barman et qui me suivent…