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Un pacte avec le diable

♥♠Flash-back ♣♦


Depuis peu, Pharaun s'était lancé activement dans la chasse aux primes. Il avait fait un marché avec un pirate, un certain Mizukawa Sutero. Pour payer une dette qu'il lui devait, et aussi pour que celui-ci réalise, selon ses propres dires, trois de ses souhaits, il devait réussir à trouver 80 Millions de berrys. Il avait donc décidé d'accepter tous les contrats qui lui passeraient sous le nez, pour s'acquitter au plus tôt de sa mission. Celui qu'il avait trouvé était l'idéal, bien qu'un peu spécial.

En effet, pour venir à bout du pirate Aori, une organisation exceptionnelle avait été montée. En son sein, cinq chasseurs de primes venant de différents horizons qui se partageraient un montant de 20 millions de berrys une fois la mission menée à bien. Parmi eux, trois étaient déjà des professionnels possédant une renommée très importante dans les différentes Blues. Les deux autres, Pharaun compris, n'en était qu'à leurs débuts mais beaucoup s'accordaient à dire qu'ils étaient très prometteurs, notamment Jesker.



Un pacte avec le diable Jester10

Cet homme, plutôt chétif, était un as dans beaucoup de domaines, notamment les acrobaties, les jongleries et le lancé de couteaux. Il avait vécu toute sa jeune vie dans un cirque itinérant dans North Blue et s'était vite fait une réputation de troubadour exceptionnelle. Les divertissements qu'il offrait étaient sans pareil et on venait de loin pour l'acclamer. Il était le fer de lance de sa troupe, bien que beaucoup semblaient plus expérimentés car plus âgés. Lorsqu'un équipage pirate anéantit tout son monde en massacrant ses proches, pour des raisons obscures que seul lui connaissait, il était devenu chasseur de primes. Son visage sombre trahissait néanmoins ses sentiments. Jamais un sourire n'éclairait son visage maquillé alors qu'on le disait extrêmement jovial avant son drame, qui ne datait que de quelques mois en arrière. Pharaun ne pouvait s'empêcher de compatir, et se sentait très proche de cet étrange bouffon du fait de son même âge.


Un pacte avec le diable Krause11

Krauser était le vétéran de leur équipe. Les nombreuses cicatrices qu'il portait sur tout le corps témoignait de sa vie de combat acharnée contre les pirates. Son nom faisait trembler tous les forban des différentes Blue, et aucun ne voulait se risquer à l'affronter. Beaucoup s'y sont essayés, mais peu en sont revenu. Son nom à finit par devenir presque légendaire. On disait de lui qu'il était impossible à vaincre, à moins de l'attaquer par surprise dans le dos. Pharaun était heureux de l'avoir à ses côtés car à lui seul il pouvait assurer leur succès. Il ne lui inspirait cependant pas totalement confiance. Cela était certainement du au ton bourru que prenait Krauser quand il s'adressait à lui. Il n'était pas vraiment tendre non plus avec les jeunes nouveaux de la profession, ce qui le rendait un peu effrayant. Néanmoins, il n'avait pas la réputation d'un homme sadique sans raison, et ne faisait pas exprès de traumatiser les jeunes gens comme Pharaun et Jesker.


Un pacte avec le diable Dark_w10

Triel avait le comportement tout à fait inverse de Krauser. Cette femme, toujours magnifique malgré les années qui s'écoulaient, faisait preuve d'une gentillesse incroyable à l'égard des deux nouveaux, et notamment envers Pharaun. Celui-ci, avait-elle dit, lui rappelait son fils. La perte de son enfant et du même coup de son mari, tués tous les deux par des pirates venant voler leur grande fortune, l'avait fait s'entrainer dans le but de se venger. Elle avait appris à manier le sabre avec une volonté de fer, ne s'autorisant aucune faiblesse. La force qu'elle possédait mentalement pour réussir avait eu ses fruits, et bien qu'elle eut vingt-cinq ans lorsque son entrainement commença elle maitrisait désormais un style presque parfait. Elle avait d'ailleurs tenu à former Pharaun les quelques jours avant leurs départ. Bien que notre chasseur de primes sache plus ou moins manier une épée, il ne s'en servait presque jamais, car celle qu'il possédait avait appartenu à son détestable frère jumeau. Il avait cependant pris un plaisir tout particulier à transpirer sous les assauts soutenus de la guerrière en armure.


Un pacte avec le diable Ada10

Enfin venait Ada. Mercenaire aguerrie, on ne pouvait pas dire que cette femme était vraiment causeuse. Si elle avait adressée dix mots à Pharaun depuis le début de la semaine qu'ils avaient passés ensemble, s'était bien le diable. Cette tireuse d'élite passait son temps à s'entrainer, faisant feu sur des cibles à l'allure humaine. Ce qui était sûr, c'est qu'elle était extrêmement adroite. Jamais elle ne ratait son coup. En temps que canonnier, notre chasseur de prime ne pouvait que l'admirer pour la constance exceptionnelle de la qualité de ses visées. Mais cette femme ne lui inspirait pas vraiment confiance. En fait, il ne savait absolument rien d'elle, si ce n'est les exploits qu'on lui prêtait. Ada avait, disait-on, mis au fer plus de cinq cent pirates sur les différentes Blues, devenant ainsi une des cibles à abattre en priorité pour les forbans sillonnant les mers. Il y en avait toujours qui voulait s'attaquer à elle, n'accordant pas grand crédits aux rumeurs. En effet, la plupart ne concevait pas qu'une femme pouvait les surpasser, ce qui les poussait à leur perte.


Cette petite équipe avait vécu ensemble plusieurs jours avant de se mettre en action. Un plan avait été monté pour capturer le pirate à 20 millions de berrys du nom d'Aori, et il fallait attendre le bon moment. En effet, sa prime était surcotée, et tout le monde le savait. Au niveau individuel il ne valait pas ce montant. En revanche, lorsqu'il était en présence de son frère jumeau Akari il devenait redoutable. Celui-ci était également recherché pour la même somme, les deux ayant effectué la quasi-totalité de leurs délits ensemble. C'était leur alliance qui était dangereuse, et c'est pour cela que le plan était d'attendre qu'ils se séparent. Depuis peu, chacun des deux frères s'était placé à la tête d'une flotte. Il devait forcément arriver un moment où on pourrait en isoler un.

Et d'après les informations qu'ils venaient de recevoir, ce jour était enfin arrivé. Akari venait de partir effectuer ses sombres larcins sur une île voisine, alors qu'Aori s'occupait de ses propres affaires sur l'île de Sirup. L'assaut allait être donné peu avant la tombée de la nuit. Krauser avait mis à disposition de l'association temporaire de chasseurs de primes son propre navire, sur lequel de nombreux hommes travaillaient. Ainsi, ils n'auraient pas besoin de s'occuper de diriger le navire avant l'abordage. Le pirate s'était installé dans une petite crique non exposée à la vue des autochtones depuis le village pour y passer la nuit, ne se doutant pas qu'ils étaient observé. Déjà, des habitants se rapprochaient des falaises pour observer la chute du forban Aori.

L'heure était enfin venue. Longeant la côte, le navire de Krauser apparut soudain à une centaine de mètre du navire pirate, dissimulé jusqu'à présent grâce aux falaises entourant l'île. Ils comptaient évidemment sur l'effet de surprise. Les premier coups de canon retentirent dans le crépuscule, alors qu'une cloche d'alarme retentit sur le bateau ciblé. Les boulets commencèrent à faire leur travail, déjà on voyait des explosion projetant bois et hommes dans l'océan. Ils ne mirent cependant pas longtemps à riposter. Les projectiles commençaient à siffler autour du navire, alors que Pharaun et ses coéquipiers étaient installés confortablement dans une cabine.

Tous étaient en train de se préparer à leur façon. Ada méditait, ne parlant à personne, comme à son habitude. Triel, quant à elle, était en train de motiver les deux jeunes chasseurs de primes qui en avaient bien besoin. Jester semblait d'ailleurs nerveux et n'arrêtait pas de jongler avec ses couteaux acérées, un moyen pour lui de se décontracter. Krauser aiguisait méthodiquement sa lame de poignard avec une pierre prévue à cet effet. Il n'avait pas l'air de se soucier le moins du monde de ce qu'il se passait dehors, ayant apparemment une grande confiance en ses hommes. Pharaun était lui aussi impatient d'en découdre, et surtout de voir à l'œuvre ces monuments vivants qui allaient faire équipe avec lui. Bien sûr il avait une légère appréhension, mais avec des personnes comme Krauser tout allait bien se passer, il n'en doutait pas. Après plusieurs minutes interminables, le lieutenant frappa à la porte de la cabine. Ils seraient prêt à aborder dans très peu de temps.

Il était donc l'heure pour les chasseurs de primes de monter sur le pont. Déjà Ada chargeait son arme. Á peine était-elle arrivée sur le pont qu'elle avait commencé à faire feu, bien que le navire pirate soit encore assez éloigné. Des hommes tombaient à la pelle. La cadence de tir était impressionnante, et elle eut vite fait de faire le ménage dans les les rangs des forbans les plus proches du bastingage. La place était maintenant libre pour un abordage facile. C'est alors qu'apparu Aori, les yeux écarquillés de terreur quand il reconnut le navire de Krauser. Il était vêtu d'une tunique bleue recouvrant tout son corps et d'un turban de la même couleur. Il devait maintenant savoir que sa vie ne tenait plus qu'à un fil, et dressa doucement son arme devant lui.

Celle-ci était impressionnante. Un énorme cimeterre à large lame. Elle mesurait plus d'un mètre de longueur. Sur la garde était fixée une longue chaine munie à son bout d'un mousqueton. Cependant celle-ci avait plus l'air de le gêner qu'autre chose, et Pharaun se demandait qu'elle était son utilité réelle. Pour le moment, elle ne faisait que ralentir ses mouvements. Quoi qu'il en soit, il était temps de passer à l'attaque. Déjà Jester, apparemment survolté, bondissait dans un prodigieux saut périlleux vrillé, un poignard dans chaque main. Sans attendre de toucher le sol, il les lança en direction d'Aori.

Ceux-ci se plantèrent dans le sol en bois un mètre devant le pirate. Pour un lanceur de couteaux se targuant d'être le meilleur et d'être habitué au stress, on peut dire que l'enjeu lui avait légèrement fait perdre ses moyens. Entrainé par la fougue du jeune acrobate, les quatre autres chasseurs de primes se précipitèrent à l'assaut du navire. Dans une grâce féline, Triel atterrit délicatement sur le sol, son sabre à moitié dégainé. S'accroupissant, elle le sortit en silence et trancha trois pirates autour d'elle, avant d'avancer d'un pas rapide mais léger en direction d'un autre groupe de forbans. Krauser, lui, ne faisait pas dans la délicatesse. Ses poings et son poignard ouvraient des trous béants dans les poitrines de tous les adversaires qu'il rencontrait. Ada, moins à l'aise en mêlée, se contentait de ne laisser personne s'approcher d'elle et de couvrir les arrières de ses coéquipiers. Pharaun, quant à lui, était en train d'épuiser ses adversaires à force d'esquives répétées suivi de rapides contre-attaques à l'épée.

C'est alors que l'imprévu, si cher aux moments d'actions décisifs comme celui-là, choisit de pointer le bout de son nez. Une énorme explosion retentit dans le soir. Se retournant, les chasseurs de primes purent constater avec effroi que le navire de Krauser venait d'avoir été pris pour cible par une attaque dévastatrice. Déjà le bâtiment en miette commençait à sombrer dans l'eau de la baie. Apparemment, peu ou pas avaient survécu à l'attaque. Les tirs de canon continuaient à se faire entendre, bien qu'il n'y ai sûrement déjà plus de survivant.

Mais plus que l'horreur, c'était l'incompréhension qui parcourait le visage de nos héros. Tout avait été prévu pour se mettre à l'abri. Krauser était un homme riche et son navire était rapide. Ainsi, ses navigateurs s'étaient placés devant le bateau pirate, de façon à ne pas pouvoir être visé. Mais alors d'où venaient l'attaque ? Il ne fallut pas longtemps pour le comprendre. Le long de la falaise, de l'autre coté de l'endroit où était arrivé Pharaun et ses compagnons, un navire venait de faire son apparition. Un navire portant le même drapeau que celui d'Aori. Aucun doute possible : son frère était en train de venir en renfort. Des hurlements affolés surgirent du haut des falaises où les villageois, complétement surpris par ce changement de situation, commençaient à paniquer.

La fuite n'était désormais plus une option. Il ne restait plus qu'à vaincre les deux équipages l'un après l'autre. Á l'allure où allaient les choses, ils en auraient vite fini avec le premier navire sur lequel ils se trouvaient. Les circonstances n'étaient pas si dramatiques, d'autant qu'Ada avait enfin trouvé son utilité en commençant déjà à tirer en direction du navire d'Akari. Krauser, dans un professionnalisme digne de sa réputation, avait momentanément fait abstraction de la perte de son équipage et s'était remis à massacrer les pirates.

Mais lorsque la roulette de l'infortune a décidé de rouler en notre défaveur, il est bien souvent impossible de tricher. Les jeux semblaient faits, car un nouveau coup du sort vint frapper les chasseurs de primes.

Bien que les forbans tombaient en masse, leur nombre ne semblait pas diminuer. Des nouveaux brigands n'arrêtaient pas de sortir de l'intérieur du navire pour envahir le pont. S'étonnant de la présence de ces renforts inattendus, Pharaun compris enfin lorsqu'il vit un homme, tout habillé de rouge, se placer à coté d'Aori. Il portait les même vêtements que lui, avec pour seule différence la couleur de ceux-ci. Il s'agissait d'Akari, un sourire illuminant son visage.

Lui et son frère avaient réussis. Ils jubilaient tous les deux, sûr de leur victoire. Son navire ne contenait que peu de ses hommes, uniquement ce qu'il fallait pour le diriger et pour tirer sur le navire de Krauser. Leur embuscade était parfaite. Ils allaient enfin pouvoir mettre un terme aux agissements du vieux chasseurs de prime, et par la même occasion de nombreux de ses camarades gênants.

Se rendant compte de la situation, le vétéran de l'équipe de cinq personnes pris le commandement des opérations :

« En cercle, tous dos à dos, vite ! »


Ses coéquipiers s'exécutèrent. Krauser rajouta quelques mots pour dire que, tant qu'ils ne s'exposaient pas, ils n'avaient rien à craindre. Ada couvrait leurs arrières. Á partir du moment où elle effectuerait son job sans flancher, comme elle savait si bien le faire, peu de pirates pourraient les surprendre. Il étaient encore loin d'avoir perdu. Pharaun avait maintenant l'épaule collée d'un côté à Krauser, de l'autre à Jesker. Á la droite de ce dernier était placé Ada, et Triel fermaient le cercle. Observant cette tentative désespérée pour survivre, les frères jumeaux éclatèrent d'un rire sonore. Aori pris alors la parole.


« Que tu es pathétique, mon cher Krauser ! Tu sais très bien que tu aurais plus de chances en abandonnant tes compagnons et en t'en prenant à nous. Vous n'arriverez à rien comme ça. »


Ayant assez d'expériences pour ne pas se laisser perturber, celui-ci se mit simplement en garde, ce qui provoqua à nouveau l'hilarité des deux pirates.



« Tu ne comprends rien ! Tu n'essayes même pas de réfléchir. Selon toi, pourquoi sommes-nous réunis, alors que tu nous croyais séparés ? Nous savons tous sur vous, idiot, alors que vous ne savez rien sur nous ! Vous vous êtes fait avoir. Vous êtes morts. C'est fini ! Profitez du couché de soleil car il ne vous reste que quelques minutes à vivre. »


Pharaun commençait vraiment à ressentir une vive inquiétude. Il savait que Krauser était capable de vaincre l'équipage à lui tout seul. Mais si des informations tenues secrètes par les cinq chasseurs de primes avaient pu être connu d'Aori et d'Akari, cela ne pouvait vouloir dire qu'une chose. Songeant à Ada, il se retourna vers elle. Celle-ci ne semblait rien préparer de louche. Et pourtant, les faits étaient là, un traitre se trouvait parmi eux.

A sa droite, Un grand sourire illuminait le visage de Jesker.

Soudain, les mains serrées autour de deux long poignards, il se retourna pour frapper de l'intérieur du cercle. Krauser était juste devant lui. Sans hésiter une seule seconde, il lui enfonça les deux lames dans la nuque. Tout s'était passé en une fraction de seconde, mais le légendaire chasseur de primes s'écroulait déjà, proférant une dernière malédiction avant que l'écume ne recouvre ses lèvres.

Après un cours instant du au choc, Ada et Triel se retournèrent pour attaque le bouffon félon. Des chaines vinrent alors s'enrouler autour du canon de la tireuse d'élite et autour du sabre de l'épéiste. Leur armes leur furent retiré d'un coup sec. Il s'agissait d'Aori et d'Akari, qui possédait tous les deux la même arme, au détail prêt. Voilà donc enfin une utilité pratique à ces encombrants rajouts qu'avaient les cimeterres. Pharaun, quant à lui, venait d'être cloué au sol par pas moins de six pirates.

Très vite ils furent amenés pieds et mains liés devant les deux capitaines, alors que Jesker les avaient rejoint et trônait fièrement derrière eux. On les força alors à s'agenouiller. Aori pris alors la parole, sur un ton triomphal.



« Mes amis, aujourd'hui est un grand jour. Le chasseur de primes légendaire Krauser est tombé. Nous serons bientôt acclamé comme étant des héros parmi nos amis pirates d'East Blue, de South Blue, de West Blue et de North Blue. Mais le spectacle ne s'arrête pas là, car nous avons aussi dominé les fameuses Ada et Triel. Nous leur réservons un châtiment pire que la mort. Ce soir, Ada partagera ma couche, et Triel celle de mon frère, Akari. Elle ne mourront que demain. »


Des hurlements frénétiques éclatèrent au sein de l'assemblée. Apparemment, ils étaient beaucoup à les détester. Pharaun, lui, se sentait incroyablement impuissant. Il aurait tout fait pour pouvoir empêcher le destin qui allait être celui des deux femmes. Il éprouvait notamment une incontrôlable fureur vis à vis d'Akari, bourreau futur de Triel qui l'avait tant aidé et affectionné depuis ses derniers jours. Elle ne méritait pas ça. Ses sentiments furent cependant mis à l'écart dans l'immédiat lorsque Aori se tourna vers lui.



« Mais dès maintenant, chers compères, je vais vous offrir un spectacle très divertissant. Avez-vous déjà entendu parler des fruits du démon ? Beaucoup ne croient pas à ces légendes. Et pourtant, notre ami Mizzrym, ici présent, en possède un ! Connaissez vous la malédiction qui pèse sur ses gens ? Quiconque mange ces objets de pouvoir est condamné à sombrer dans les abysses s'il venait à tomber à l'eau. Qu'on lui retire ses entraves ! »


Comprenant ce que leur capitaine avait en tête, la foule rentra dans un délire incroyable. Une exécution originale, cela avait de quoi les réjouir. Aussitôt, une planche en bois fut placé sur le bastingage, et Pharaun fut poussé dessus. Il put voir sur les falaises des gens dont il apercevait le visage. Tous était dépité, certains étaient même en pleurs. Ils assistaient au drame avec émotion. Demain, certainement, on honorerait leur mémoire. Derrière lui, de nombreux pirates avaient chargé leurs armes, et attendait patiemment, avec vigilance, au cas où le chasseur de primes activeraient ses pouvoirs pour s'échapper ou contre-attaquer.

Trouvant le temps trop long, un pirate tira en sa direction. La balle siffla à ses oreilles, mais Pharaun savait qu'il l'avait raté volontairement. C'était un très net avertissement. Il fallait qu'il saute pour satisfaire ces horribles personnes. Quelqu'un monta alors pour le pousser en avant...

Pharaun voyait l'eau se rapprocher à toute allure. Sa fin était proche. Il avait maintenant le choix entre tomber dans l'océan et devenir une enclume ou utiliser son pouvoir pour s'envoler, tout en sachant qu'il serait alors instantanément la cible de dizaines de tireurs expérimentés. Il décida donc de choisir la solution qui lui apporterait le plus de chances de survie.

Alors que les cris de joie des pirates retentirent dans les airs, Pharaun plongea dans les abysses...
    Les pirates étaient tous entassés contre le bastingage de leur navire. Les yeux complétement fous après leur victoire, ils regardaient le chasseur de prime sombrer dans l'océan, alors que le soleil venait de plonger sous l'horizon. Après quelques minutes d'attente, et ne voyant toujours pas le freluquet remonter, tous explosèrent de joie en acclamant leurs capitaines. On commença à ouvrir les bouteilles de rhum dans tous les coins. La nuit allait être des plus agréables, excepté pour deux personnes. Ada, le visage de marbre, ne pouvait cependant pas cacher son angoisse et son désespoir qui se traduisait par des tremblements des mains et des jambes, ainsi qu'une bouche plus crispée que d'habitude. Triel quant à elle ne pouvait se contenir. Á genoux, complétement repliée sur elle-même, ses larmes coulaient à flots. Elle revivait le désespoir que des pirates lui avait déjà infligé par le passé. Elle qui voulait se venger des pirates à la mémoire de son mari, elle allait passer ses dernières heures à satisfaire, impuissante, les vils plaisir d'un horrible forban.

    A coté d'elles, des fripouilles les injuriaient, se moquaient d'elles ou encore les admiraient. Déjà, l'ivresse de l'alcool se faisait ressentir. Certains tentaient de passer discrètement les mains sur les courbes des deux femmes, mais aucun n'arrivaient au bout de leur geste, car les deux capitaines veillaient sur leur proie. Plusieurs fois, cela se régla par des coups de poings et même quelques balles. Le temps finit par ne plus suivre son cours normal pour les pirates de plus en plus saouls, qui ne se contrôlaient plus vraiment. Les rires ne semblaient pas vouloir s'arrêter. Certains, hilares, insultaient les rares villageois se trouvant encore sur les falaises, leur promettant de raser leur île dès le lendemain.

    Le temps s'écoulait, plusieurs heures passèrent. La nuit finit par tomber complétement. Le navire d'Akari s'était rapproché pour que ceux qui étaient dessus participent à la fête. Seuls quelques rares personnes, souvent ceux qui était sous le joug d'une punition de la part de leur capitaine, étaient restées à bord, pour monter une garde qu'ils pensaient inutile après ce succès. Ils étaient plutôt éloignés mais entendaient tout de même la musique. L'absence d'alcool les poussait toutefois à un profond ennui, et ils s'étaient plongés pour la plupart dans une partie de cartes maussade. Quand une paire de botte apparut soudainement sur la table, les pirates, surpris, levèrent la tête pour voir le visage de celui qui les portait. Les regards emplis d'effroi, ils essayèrent de sortir leurs revolvers et d'appeler à l'aide.

    Trop tard...







    *Tenir ! Encore quelques instants, quelques minutes ! *

    Une volonté de survivre formidable maintenait la concentration de Pharaun intacte. S'il se laissait aller par des pensées négatives, ne serait-ce qu'à un seul instant, il allait mourir, et cette fois pour de bon. Pas de tricherie ni d'illusions, pas deux fois. Au dessus de sa tête, la surface de l'eau, emplie de petits éclats rouges grâce à la lumière du crépuscule, semblait l'attirer vers elle. Mais il savait qu'il ne devait remonter à la surface que le plus tard possible, pour avoir une chance de passer inaperçu auprès des pirates. Chaque nouvelle seconde de gagnée était un succès. Il fallait toujours se fixer comme objectif d'atteindre la suivante. C'est ainsi que Pharaun, malgré son fruit du démon, parvint à rester sous la surface de l'eau plus de huit minutes.

    Son pouvoir aurait du être ce qui allait le tuer, or c'était justement lui qui l'avait sauvé. Un instant avant de pénétrer dans l'eau, le chasseur de primes avait créé une bulle d'air autour de lui. Elle était assez grande pour qu'il tienne entièrement dedans s'il repliait ses bras et ses jambes. Cela avait été tellement rapide qu'il espérait que les pirates n'aient rien remarqué. La bulle avait été à la limite d'exploser lorsqu'elle rentra en contact avec l'eau, mais Pharaun avait maintenu le lien physique qui l'unissait à elle pour ne pas qu'elle disparaisse. Cela avait fonctionné. Il était rentré dans l'eau sur quelques mètres de profondeur.

    C'est à cet instant que les choses s'étaient compliquées. En effet, l'air étant moins dense que l'eau, la physique tirait la bulle vers le haut. Or pour survivre, il ne le fallait pas. Pharaun avait donc perpétuellement mis sa concentration en jeu pour continuer de la tirer vers le bas, restant invisible aux yeux des pirates. Parallèlement à cela, il fallait tout faire pour que l'air ne se sépare pas en plusieurs plus petites particules, et c'était encore au chasseur de primes de gérer cela en restant concentré. Au final, la quantité d'énergie qu'il avait laissé s'écouler dans ses huit minutes était phénoménale.

    A vrai dire, il était au bout de ses forces, mais il ne fallait pas s'arrêter là. Il était à la surface, mais il fallait maintenant fuir. Toujours soutenu par sa bulle, il compris que jamais il n'arriverait à retourner sur la terre ferme. Mais il ne pris pas trop de temps à tergiverser, car il avait une autre idée. Il se rapprocha des débris flottant du navire de Krauser. De nombreux cadavres flottaient dans l'eau, des blessures béantes dans leur corps, parfois même avec des membres en moins. Pharaun n'eut cependant pas la force de s'apitoyer. Trouvant une partie en bois plus grande que les autres (l'avant du navire), il s'y installa. Celle-ci était creuse et lui assurerait une cachette depuis le bateau d'Aori. Il espérait juste qu'ils n'aient pas l'idée de venir voir si la carcasse du navire de Krauser ne contenait pas quelques richesses. De toute façon il n'avait pas le choix.

    Maintenant qu'il n'avait plus besoin de se concentrer, une immense fatigue l'envahit, ainsi qu'une incontrôlable tristesse. Pauvres Ada et Triel. L'enfer les attendait, et il était impuissant. Peu à peu, ses paupières se cloîtrèrent et il sombra dans un profond sommeil sans rêve, avec seulement une pensée en tête.

    « Je ne peux rien faire pour elles désormais... »




    … La lune s'était levée et plus aucune trace de lumière dans le ciel n'était présente lorsque Pharaun se réveilla avec une seule idée en tête :

    « Je peux faire quelque chose. Je dois les aider. »

    Très étrangement, cela sonnait maintenant comme une évidence dans son esprit. Il ne pouvait pas les sauver, c'était vrai. Cependant, il savait qu'elle préféreraient la mort à la dernière nuit qu'elles allaient passer sur ce navire. Le chasseur de primes était décidé à leur accorder ce souhait. Par la même occasion, il comptait bien emporter le maximum de pirates dans la tombe.

    Son sommeil avait été très réparateur. Son nouvel objectif lui avait fait oublier la fatigue et les douleurs, il se sentait désormais prêt à soulever des montagnes. Pour le moment cependant, il fallait qu'il établisse un plan. Après quelques minutes de réflexion, d'analyse et de théorie, il se lança. En créant une bulle d'air qu'il chevaucha, il se dirigea vers le navire pirate d'Akari. Il se doutait que sur celui-ci il n'y aurait pas grand monde. Aucun forban ne donna l'alerte en disant qu'il avait vu un fantôme se déplacer en volant. Si quelqu'un l'avait remarqué et l'avait dénoncé, il devait certainement être à l'heure qu'il était la risée de ses camarades, ceux-ci riant de l'abus d'alcool qu'il avait consommé. Les gardes du navire d'Akari était, quant à eux, plus occupé à jouer au carte ou à dormir qu'autre chose. Pharaun arriva donc discrètement par la poupe du navire, et se posa doucement sur la partie élevée du pont, juste derrière la barre. Pour l'instant en tout cas, il semblait ne pas avoir été remarqué. Déjà il faisait l'inventaire des personnes qu'il pouvait voir de là où il se trouvait. À sa droite, un homme roupillait. Devant lui, en plein centre du bateau, huit pirates étaient assis autour d'une table et jouaient au poker.

    Pharaun commença en silence sa sale besogne d'extermination. Il détestait faire cela, ces viles bassesses ne lui ressemblant pas. Cependant, sa soif de vengeance était plus forte que tout, et rien ce soir ne pourrait l'arrêter. S'approchant du dormeur allongé contre le bastingage, il lui trancha purement et simplement la gorge. L'homme se réveilla sous le coup de la douleur, le regarda avec des yeux effrayés, et essaya de crier. Aucun son ne sortit de sa bouche, et il s'affala doucement sur lui-même dans un dernier soupir. Le chasseur de primes regarda en direction des joueurs. C'était maintenant leur tour. Mais il allait falloir faire vite. En effet, la cloche d'alarme du navire était à portée de main de l'un d'eux, il faudrait commencer par celui-ci. La table était éclairée par une lanterne accrochée sur le mat, ce qui devait baisser leur visibilité, la forte lumière augmentant paradoxalement la noirceur des ténèbres de la nuit. Pharaun ne voyait que mieux ses futurs adversaires.

    Alors qu'il s'apprêtait à se lancer, des mots que lui avait dit Triel lui revinrent en tête. Des mots qui dataient de leur entrainement ensemble.


    *Lorsque tu te retrouves face à plusieurs adversaires, il faut rester très calme. La peur et la précipitation te font faire deux erreurs graves : tout d'abord tu cherches à tuer à coup sûr, et pour cela tu frappes fort et profondément. Ton épée peut alors être ralentie par les os de tes ennemis ce qui te mettra en danger par rapport aux autres. La peur quant à elle fait trembler ta main. Cela baisse ta précision, et tu n'as pas le loisir de rater ta cible dans un combat contre plusieurs adversaires, cela te serait fatal. Mon conseil est donc celui-ci. Lorsque tu te tiens prêt à frapper, expire profondément un bon coup, en imaginant que toutes tes peurs vont être entrainées par ton souffle. Cela sera suffisant dans la plupart des cas. *

    Pour l'instant, la pression était toujours sur les épaules de Pharaun. Il ne voyait pas vraiment ce qu'un simple rejet d'air pouvait bien faire contre huit pirates sanguinaires. Néanmoins, il avait confiance en l'épéiste, et était résolu à appliquer ses conseils. Il savait aussi que contre plusieurs ennemis, le mieux était d'en terminer au plus vite. Il mis donc en place la meilleure façon pour éliminer ses adversaires rapidement. En silence, il créa une autre bulle d'air et monta debout dessus. Puis, toujours sans aucun bruit, il se déplaça pour se placer à la verticale de la table de jeu. Il entama ensuite une descente progressive. Toujours plus bas, encore plus bas. Il espérait qu'aucun forban n'ai l'idée de lever la tête car, en dépit de la pénombre dans laquelle il se trouvait, il commençait à rentrer dans le champs de la lanterne et se ferait repérer à coup sûr. Heureusement, la chance semblait cette fois se trouver de son coté. Lorsqu'il ne fut qu'à trois mètres au dessus de la tête des pirates, il laissa éclater sa bulle sous son poids et tomba sur la table, pliant légèrement les jambes pour amortir le choc.

    Quand une paire de botte apparut soudainement sur la table, les pirates, surpris, levèrent la tête pour voir le visage de celui qui les portait. Les regards emplis d'effroi, ils essayèrent de sortir leurs revolvers et d'appeler à l'aide.

    Trop tard...

    Pharaun resta accroupi dans la position où il avait atterri. La pression le rejoint à ce moment là. S'il ne laissait ne serait-ce qu'un individu en vie, celui-ci ne manquerai pas d'alerter ses compagnons qui faisaient la fête sur le navire d'Aori, et il aurait perdu. Le chasseur de prime posa la main sur la garde de son sabre. L'image de Triel lui vint en tête.

    Il souffla le plus profondément qu'il le put, en fermant les yeux pour se concentrer sur cette image chaleureuse qui lui donnait confiance. Lorsqu'il les rouvrit, moins d'une seconde après, il ne tremblait plus.

    Le sabre glissa de son fourreau sans résister. Avec l'élan qu'il avait, il trancha la gorge du pirate juste devant lui. L'épée aiguisée ne fut pas ralentie par quelque chose de dur, et continua sa route horizontale. Prenant appui sur ses talons, Pharaun pivota sur lui même, ne bougeant ses pieds qu'à deux reprises pour pouvoir faire un tour complet. Les pirates, tous assis, eurent chacun la gorge tranchée, sans exceptions. Alors qu'ils étaient tous dans un mouvement de recul un instant avant, leur chaise penchée en arrière, il tombèrent le dos au sol, essayant d'appeler vainement au secours. Après quelques instants, ils s'immobilisèrent enfin, les yeux exorbités. Ils formaient une parfaite étoile à huit branches vu du dessus avec, en son centre, trônant fièrement, le chasseur de primes revenu des abysses.

    N'ayant détecté aucune autre personne dans l'immédiat, Pharaun essuya méthodiquement le bout de son sabre couvert de sang, avant de le remettre dans son fourreau. Il avait fait le plus dur. Il ne pensait pas que beaucoup d'autres pirates se cachaient dans les environs, mais décida tout de même de faire un tour pour s'en assurer.

    C'est alors que surgit une vive douleur dans le bas de son dos. Si forte qu'il posa immédiatement un genou au sol, avant d'explorer la zone touchée avec ses mains. Trouvant un long objet planté, il le retira dans un nouveau grognement de souffrance. Un poignard. Il le reconnut, car cela faisait plusieurs jours qu'il en voyait de semblables. Il appartenait à Jesker !

    Un rire aigu se fit entendre dans la nuit. C'était la première fois qu'il entendait le bouffon se gausser d'une situation. La voix venait d'au dessus de lui, mais Pharaun n'arrivait pas à en déterminer l'origine. Celle-ci semblait venir de différents endroits à chaque instant. Il l'aperçu alors, accroché à un cordage. Il semblait s'amuser à virevolter dans les airs, avec un talent certain. Il tournait autour du mat, la corde presque à l'horizontale, ne semblant pas ressentir les effets de la gravité. Au bout d'un certains moment à jouer avec le vent, Jesker lâcha prise et s'envola, gracieusement, avant de tomber vers la table de jeu en effectuant de nombreuses figures artistiques. Il se réceptionna quasiment droit à cinquante centimètres de Pharaun, visiblement sans intention offensive pour le moment.

    Ce qui n'était pas le cas de notre chasseur de primes. Complétement dominé par la rage, celui-ci avait préparé son bras tout le long de la chute du traitre, et lui décocha un violent coup de poing au visage, l'envoyant s'écraser quelques mètres plus loin avant de se faire arrêter par la balustrade.


    « Enfoiré ! » S'écria Jesker. « J'allais rien te faire, lâche. Seulement discuter avec un bon ami. »

    Ses mots mirent Pharaun hors de lui.

    « Tu parles ! Qu'est-ce que pourrait bien dire un sale traitre comme toi ? Comment t'as pu faire ça ? Et ta haine des pirates, qu'est-elle devenue ? Je comprends pas... »

    Après s'être essuyé la bouche de laquelle s'échappait un filet de sang, le bouffon répondit, avec un sourire :


    « Une haine envers les pirates ? Ça n'a jamais été le cas, idiot. Tu crois que c'est qui, à l'époque, qui à détruit la troupe dans laquelle j'étais ? Réponse : les pirates Aori et Akari. Sauf que c'est moi qui leur ai donné les infos pour qu'ils le fasse. »

    Devant l'air surpris de Pharaun, qui manifestement ne comprenait pas la manœuvre, Jesker poursuivi :


    « J'étais jeune, mais j'étais la vedette du spectacle. Cependant je ne gagnais rien. Tout revenait aux anciens jaloux de mon succès. Pourtant, c'est moi qui aurait du avoir le meilleur salaire. Lorsque j'ai compris que, quoi que je fasse, ça ne changerait rien, j'ai décidé de virer complétement de cap. Devenir pirate me rapporterait sûrement plus d'argent. Sauf que voilà, Aori et Akari ont mis une condition pour rentrer dans leur équipage : leur livrer Krauser sur un plateau. On a donc mis en place un plan pour y parvenir, une embuscade. Grâce aux nombreuses fausses informations que j'ai fournit, tout c'est déroulé à la perfection ! »

    Alors que Pharaun commençait enfin à comprendre comment ils s'étaient fait avoir du début à la fin, Jesker, bavard pour la première fois depuis qu'il le connaissait, continuait de parler :


    « Mais je ne suis pas encore complétement accepté par mes camarades pirates. Beaucoup me considèrent encore inconsciemment comme un chasseur de primes, et donc comme un ennemi. C'est pour cela que je suis ici, et pas en train de fêter notre victoire. Mais tu m'amènes l'occasion de me hisser directement au rang qui m'appartiens. »


    L'acrobate se releva et sorti le deuxième poignard qu'il possédait. Il bondit alors sur Pharaun qui avait lui aussi en main la lame que le bouffon lui avait planté dans le dos. Le fer tinta dans la nuit, alors que le chasseur de primes paraît l'attaque. Leur visage était tout proche maintenant, et Jesker murmura doucement :

    « Je ne sais pas comment tu as fait pour survivre tout à l'heure. Mais cette fois je vais finir le travail, tout seul. Les autres m'acclameront après cette magnifique victoire. Peut-être même pourrais-je devenir second d'un des deux frères ! Quoi qu'il en soit, prépares-toi. On n'a pas de chance deux fois, tu vas vraiment mourir maintenant ! »

    « C'est ça, compte là-dessus ! »

    Brisant le bras de fer qu'ils étaient en train de s'infliger, Pharaun se baissa pour faire perdre son équilibre à Jesker. Celui-ci, ne s'y attendant pas, fit en pas en avant et son poignard continua dans le vide, effleurant le haut du crâne du chasseur de primes. Profitant de cette situation favorable, Pharaun balaya la jambe du traitre avec son pied pour qu'il chute sur la table. Donnant un coup de poignard dans l'air, il arriva à trancher le ventre de Jesker, qui grogna de douleur avant de s'écrouler. Enfin il bondit en arrière et lui lança le poignard qui se planta dans sa cuisse.

    Il ne pouvait pas perdre ! Il était surmotivé, encore plus que quelques dizaines de minutes auparavant. Il voulait faire la peau à ce félon. C'était de sa faute si Krauser était mort et qu'Ada et Triel allaient bientôt le rejoindre. Il refusait de lui laisser ne serait-ce qu'une petite chance de victoire. Jesker, justement, était en train de reprendre son souffle et d'essayer de retenir le sang qui s'écoulait de ses blessures. Il parvint à se redresser enfin. Plus aucune trace de sourire narquois n'éclairait son visage désormais.

    Pharaun s'aperçut qu'il tenait quelque chose dans la main gauche. Après quelques secondes d'observation, il compris. C'était des cartes, celles qu'il avait récupéré, incroyablement rapidement, sur la table de jeu. Soudain, il en attrapa une avec sa main droite et la lança en direction du chasseur de primes. Celle-ci vint tracer une coupure sanglante sur sa joue. La réputation du bouffon n'était donc pas usurpée. Avec le simple tranchant d'une carte, il avait réussi à produire une entaille de cinq centimètres. Le pire, c'est qu'il ne s'arrêta pas, déjà il avait saisi un nouveau ''projectile''.


    *Protéger ma gorge, vite ! *

    Levant un bras devant son cou et un autre devant ses yeux, Pharaun se prépara à encaisser l'attaque. Jesker était très rapide, et cette fois, il le mitrailla. Des coupures s'ouvrirent sur ses avant-bras, ses mains, ses joues et son torse très rapidement. Du sang commençait à couler de chaque blessure et la douleur, tolérable mains néanmoins gênante, s'installa. Puis l'assaut se finit, et le chasseur de primes s'autorisa à regarder son adversaire. Celui-ci n'avait pas bougé, mais avait maintenant en main ses deux poignards alors que Pharaun n'avait aucune arme à distance sur lui, excepté quelques billes inutiles dans cette situation. Néanmoins, parmi ses dernières, il y avait matière à distraire son adversaire. Il plongea donc la main dans sa sacoche à tout vitesse et en retira une qu'il lança de toutes ses forces en direction du visage de Jesker. L'instant d'après, un poignard vint se planter dans son abdomen.

    Faisant fi de la douleur qui allait bientôt le submerger, Pharaun sortit à nouveau le sabre de son frère, et bondit en avant. Du moins il essaya, car un deuxième poignard, lancé dans la foulée du premier par le bouffon, l'atteint à la cuisse et le fit trébucher. Il tomba à genoux sur le sol, à la merci de son adversaire. Cependant, celui-ci avait actuellement les deux mains plaquées contre son visage, à se boucher le nez.

    La bille que venait de lancer Pharaun contenait un gaz très malodorant, l'odeur de l'œuf pourri. Jesker, connaissant les capacités de son adversaire, savait qu'il n'y avait rien de dangereux dans l'immédiat avec ses billes, qu'il s'en servait plutôt en les combinant avec les pouvoirs de son fruit. Il avait donc pensé que son action relevait plus de l'intimidation qu'autre chose mais il s'était trompé. La capsule avait explosé sur son visage et l'avait rependu d'odeurs nauséabondes.

    S'il y a bien quelque chose que l'on n'estime pas souvent, c'est le pouvoir à double tranchant de l'odorat. Beaucoup ne le croiraient pas, mais il est presque inconcevable de se battre normalement avec quelque chose d'aussi nauséabond qui vient assaillir les sens. C'était ce qui arrivait en ce moment à Jesker. Sous son maquillage, invisible à l'œil, sa peau avait pâli. Des tremblements incontrôlables commencèrent à le submerger. Enfin, il se mit purement et simplement à vomir devant lui tripes et boyaux, tombant à son tour à quatre pattes.

    Retirant les poignard qu'il avait dans la cuisse et dans le ventre, provoquant ainsi une nouvelle douleur intolérable, Pharaun se releva. Il était temps d'en finir et de venger tous les autres. Il avait conscience que son attaque n'était pas très orthodoxe, mais il n'en avait cure. Quoi de mieux pour quelqu'un qui puait la trahison que de mourir à cause d'une odeur de putois ? Avec l'énergie de la volonté et de la soif de tuer, Pharaun s'élança une dernière fois en direction de la table de jeu, sur laquelle Jesker était encore affalé, les larmes aux yeux. Sans prendre le temps de réfléchir, il planta les deux lames dans chaque main du bouffon, les clouant sur la table.

    Le renégat se mit alors à hurler de douleur, mais Pharaun lui bloqua la bouche avec sa main, l'empêchant de poursuivre son cri. Si quelqu'un l'avait entendu, là-bas sur le navire d'Aori, il croirait sûrement qu'il ne s'agissait que d'une dispute entre les gardes qui veillaient sur le bateau d'Akari. Quoi qu'il en soit, Après avoir vainement essayé de se dégager de la poigne de Pharaun qui le tenait par la mâchoire, Jesker se mit à essayer de le supplier du regard. Aucune chance que cela atteigne le chasseur de prime qui le fixait sans aucune trace d'une quelconque pitié dans les yeux. S'approchant de son visage, il prononça les derniers mots que le bouffon put entendre, telle une terrible malédiction :


    « Tu viens de te condamner toi-même. Si tu vas au paradis, je suis sûr que Krauser te réservera un bon accueil. Si tu vas en enfer, le diable en personne s'occupera de toi ! Profite de la vie éternelle. »

    Sans plus de cérémonie, il lui planta son épée dans le ventre. Elle le transperça de part en part, pour ressortir entre ses omoplates. Pharaun, qui avait toujours sa main contre sa bouche, put constater qu'il était en train de cracher du sang. elle en était couverte quant il lâcha le corps, inerte, de l'homme qui était à l'origine du désastre de la mission.

    Le chasseur de primes leva alors un regard vers le ciel étoilé.


    « Krauser, ça c'était pour toi. »

    Puis il fit quelques pas en arrière, s'adossa contre le mat et se laissa glisser sur le sol. Assis dans cette position, il put enfin reprendre son souffle. La douleur le tiraillait. Il avait reçu trois blessures assez profondes, sans parler des nombreuses coupures dessinées sur son visage et ses bras. Sortant une bille de sa sacoche, il la brisa pour répandre sur ses doigts le liquide épais. Puis il l'appliqua sur ses différentes plaies, afin de calmer ses douleurs. Ce n'était pas très efficaces, mais cela suffirait pour l'instant. Puis il sorti des bandages et entreprit de bloquer l'afflux de sang qui sortait de sa cuisse, afin qu'il puisse tout de même se déplacer. Une fois cela fait, il se releva difficilement, et commença à tester sa jambe en la tapant doucement sur le sol. Ça tiendrait.

    N'ayant plus aucun adversaire en vu, Pharaun commença à effectuer le plan qu'il avait depuis qu'il s'était réveillé, il n'y avait qu'une dizaine de minutes, bien qu'il lui semblait que cela faisait une éternité. Son plan requérait un certains temps de préparation, il s'y attela donc le plus vite possible. Il n'arrêtait pas de penser que le calvaire d'Ada et de Triel avait peut-être déjà commencé. Il fallait vite qu'il en finisse.

    Plusieurs minutes plus tard, tout était prêt. Pharaun, tenant la bougie de la lanterne qui était accrochée au mat, avait devant lui des dizaines de chemins noirs dessinés sur le sol. Tous étaient reliées à un des nombreux canons que possédait le navire d'Akari, soit vingt-sept au total. Les trainée de poudre faisaient environ la même taille, car le chasseur de primes voulait que chaque canon crache sa vengeance au même instant. Certaines étaient donc sinueuses et possédaient de nombreux virages, d'autres traçaient tout droit jusqu'à leur objectif.


    « Ça, c'est pour Ada, la tireuse d'élite. »

    Il s'accroupit alors pour allumer la poudre. Très vite, le feu se sépara en neuf parties, et chacune encore une fois en trois. L'avancée fut très rapide, et quelques secondes après l'enfer cracha le tonnerre et les flammes. Le bruit fut assourdissant, le son de chaque canon s'ajoutant à celui de son voisin. Puis le silence revint, pendant trois secondes où Pharaun retint son souffle. En l'honneur d'Ada, il avait passé un temps fou à ajuster les tirs. Cela n'était pas très dur, car le vent était absent et la cible immobile.

    Seul deux boulets tombèrent dans l'eau. Tous les autres transformèrent le navire d'Aori en un véritable brasier apocalyptique. Les réserves de poudres s'enflammèrent, et bientôt de terrifiantes explosions se firent entendre. Très vite le mat se brisa et s'effondra dans l'eau. La coque se déchira en deux parties distinctes qui commencèrent à couler dans l'océan, allant tenir compagnie au navire de Krauser. De là où il était, Pharaun pouvait apercevoir de nombreux corps dans l'eau sans vie, ballotés par les remous que provoquait l'engloutissement de la carcasse du bateau. Les flammes éclairaient une scène horrible, un tableau de mort et de douleur.

    Très vite cependant s'élevèrent dans le ciel des cris de joie. Des hurlements tranchant nettement avec la violence de la scène que Pharaun avait devant les yeux. Levant la tête pour en déterminer l'origine, il s'aperçut que les villageois étaient en train d'arriver en masse sur les falaises, alertés par les coups de canon. Ils avaient accouru le plus vite possible, pensant que les pirates passaient déjà à l'attaque. Criant au miracle, ils aperçurent Pharaun, juste en dessous d'eux, éclairé par les autres lanternes du navire. Ils poussèrent alors tous des exclamations de joie bruyantes à l'attention du héros qui était revenu des tréfonds de l'océan. Le chasseur de primes ne put s'empêcher de sourire et d'accueillir avec plaisir les hourras chaleureux qui lui étaient destinés. Il avait réussi. L'âme de Krauser, Ada et Triel pouvaient maintenant aller en paix. Mission accomplie !





    Au loin, à quelques mètres du navire s'enfonçant de plus en plus dans les abysses, deux turbans trempés émergèrent de l'eau. Un rouge et un bleu. Puis deux paires d'yeux apparurent, et si quelqu'un avait observé la scène il aurait pu voir dans chacun une haine aussi profonde que l'océan...


    Dernière édition par Pharaun Mizzrym le Dim 20 Mar 2011 - 22:16, édité 5 fois
      Si Aori et Akari avaient réussi à se faire un nom en tant que pirates, c'est parce qu'ils ne faisaient pas parti de cette catégorie d'individus stupides qui relâche sans cesse leur vigilance. Même légèrement éméchés, ils étaient toujours prêt à réagir à une attaque surprise. Quand les coups de canons retentirent dans l'air, Il furent immédiatement sur le qui-vive, ce qui avait permis leur survie. Bien sûr, ils avaient reçu certains coups, des planches frappant leur dos et de légères brûlures suite au multiples déflagrations, mais dans l'ensemble ils étaient indemnes. Ils étaient certainement les seuls d'ailleurs. Partout autour d'eux des corps inanimés flottaient. Certains avait la tête complétement immergée, ce qui ne faisait aucun doute quant à la question de leur survie. Les deux frères enrageaient. Ce traitre de Jesker allait payer cette trahison plus chère encore que sa propre vie.

      Car il était évident qu'il ne pouvait s'agir que du bouffon. Ils s'étaient assurés que Krauser était mort, le corps du jeune chasseur de primes avait sombré dans l'océan et les deux femmes avaient été tout le temps avec eux. Ils avaient une confiance absolue en leurs hommes qui, même s'ils étaient très idiots pour la plupart, avaient le mérite d'être parfaitement loyaux. Jesker était le seul à avoir pu faire feu sur eux, pour une raison parfaitement inconnue.

      Mais la vérité serait bientôt limpide sur cette histoire, car les deux pirates étaient déjà en train de nager vers le navire d'Akari, leurs armes toujours avec eux. Le sang allait bientôt couler.




      Un peu plus loin, baigné dans la joie et l'allégresse, Pharaun s'apprêtait à rejoindre en héros les habitants du village de Sirup. Mais les cris des villageois sur la falaise changèrent alors du tout au tout d'une seconde à l'autre. Alerté par ces hurlements qui semblaient être passé du bonheur à la terreur, le chasseur de primes leva la tête. Beaucoup étaient en train de montrer du doigt un point précis de la mer, situé entre la carcasse du navire d'Aori et celui d'Akari. Plissant les yeux, Pharaun essaya de distinguer de quoi il pouvait bien s'agir. Son cœur fit un bond dans sa poitrine.

      Les deux jumeaux, et seulement eux, étaient en train de nager vers lui. Dans quelques minutes à peine ils seraient là. Celui qui pensait avoir vengé ses amis pensa alors dans un premier temps à s'enfuir, avant de se raviser. Aussi idiot que cela puisse paraître, il était revenu du fond de l'océan pour réduire à néant cet équipage, et il n'avait pas l'intention de se retirer sans en avoir fini avec les deux forbans les plus importants. Cependant il savait qu'il n'avait pas le niveau pour les affronter tous les deux de face. Il fallait qu'il prépare le terrain avant l'arrivée des deux frères. Il s'y attela le plus vite possible, ne disposant que d'un temps très court.

      Les frères arrivèrent sur le navire d'Akari moins de dix minutes après l'explosion de celui d'Aori. Submergés par la colère, ils étaient prêt à tout pour massacrer ce vaurien de Jesker. Il montèrent à bord discrètement, comptant sur l'effet de surprise, sans se douter qu'ils étaient déjà observé. Leurs cimeterres étaient déjà sorti, mais ceux-ci étaient différents de ce que Pharaun avait pu voir quelques heures plus tôt. Les chaines, munies d'un mousqueton à leur bout comme il avait pu le voir précédemment, étaient maintenant reliées. Les jumeaux avaient donc maintenant en quelque sorte une seule et unique arme. Le chasseur de primes ne savait pas vraiment comment ils l'utilisaient, mais si la réputation terrible qu'ils avaient était du à leur actions en duos, il se doutait qu'ils la maniaient redoutablement.

      Peu de temps se passa avant qu'Akari et Aori ne découvrent la scène morbide du centre du navire. Huit pirates égorgés en cercle autour d'une table de jeu, sur laquelle le bouffon avait péri. L'odeur immonde qui s'en dégageait était encore horrible, et seul sa terrible blessure dans son dos témoignait du terrible sort qui l'avait frappé. Cette scène faisait étrangement penser à un rituel démoniaque, une sorte de sacrifice humain dont l'auteur était inconnu. Les deux frères étaient déboussolés. Si ce n'était pas Jesker l'auteur de la destruction de leur navire, alors qui cela pouvait-il être ?

      Au clair de lune, contemplant la scène de derrière le mat, Pharaun se préparait à passer à l'action. Il était debout sur une bulle d'air, à plus de dix mètres de haut. Pour l'instant il était quasiment indétectable, car sans le pouvoir de voler personne n'aurait pu se trouver à cet endroit. Il se doutait donc que les frères n'allaient pas commencer leur recherches par ici. Saisissant un des poignards qu'il avait récupéré sur le corps de Jesker, il pris son temps pour viser.

      Akari sentit une vive douleur entre les côtes, proche de la colonne vertébrale qui était l'objectif du chasseur de primes. Á l'instar de Pharaun quelques minutes auparavant, il n'avait pas prévu une attaque surprise de derrière lui. Lorsqu'il poussa un cri, Aori se retourna pour chercher la présence de la personne qu'ils voulaient massacrer, ignorant encore son identité. Mais aucun signe de présence aux alentours...

      Le pirate rouge se releva en jurant. Arrachant stoïquement le poignard planté dans son dos, il se mit lui aussi à chercher activement où pouvait se cacher leur ennemi. Mais Pharaun n'était déjà plus dans la direction qu'ils regardaient. Le chasseur de primes, ayant anticipé les réactions des deux jumeaux, avaient d'ors et déjà changé silencieusement de coin. A vrai dire, il avait même commencé à se déplacer avant que son tir n'atteigne sa cible. Maintenant, il se trouvait derrière eux, toujours dans les airs. Les forbans ne semblaient pour l'instant pas avoir la présence d'esprit de scruter les cieux autour d'eux. Il saisi alors un deuxième poignard.

      Cette fois, ce fut à l'épaule qu'Akari fut touché. Pharaun avait choisi de concentrer ses tirs sur lui, car s'il arrivait à se débarrasser d'un des deux frères, il savait que le combat deviendrait immédiatement plus équilibré. A nouveau, il s'empressa de changer de coin avant d'être détecté. Ignorant le hurlement de rage de l'homme vêtu de rouge, il se plaça à un troisième endroit, en partie camouflé par la voile repliée.

      Maintenant, Akari et Aori semblaient se demander s'ils n'avaient pas affaire à plusieurs adversaires. Le premier fixait l'endroit de la deuxième attaque, alors que le second était toujours dirigé vers le lieu d'où était survenu l'attaque surprise commençant l'affrontement. De là où il était, le chasseur de primes avaient en ligne de mire la tempe de sa cible. Il était donc temps de diminuer le nombre de ses adversaires.

      Soudain, et contre toute attente, Akari se tourna vers lui. Il le fixait désormais, un terrible regard promettant mille douleurs affreuses. Il n'y avait aucun doute qu'ils avaient compris la manœuvre depuis la seconde attaque, mais ils l'avaient vraiment très bien dissimulé. Alors que Pharaun n'était pas du tout préparé à un affrontement direct, il ne put réagir assez vite. Le pirate rouge leva son bras et projeta carrément le cimeterre dans sa direction. Le sabre volant sifflait dans l'air, dans un chant de mort promettant un bain de sang. Il atteignit le chasseur de primes dans le bas-ventre du côté gauche et déchira environ quinze centimètres de peau. Le sang éclaboussa le ciel, alors que Pharaun, grièvement blessé, perdit sa concentration et laissa éclater sa bulle. Chutant d'environ dix mètres de hauteur, il heurta le pont du navire sur le dos, ce qui le fit cracher à nouveau une gerbe de sang qui éclaboussa son visage. Sur les falaises, les gens poussaient des cris affolés.

      Pendant ce temps, Aori avait tiré vers lui la chaine qui le reliait à l'arme d'Akari. Le cimeterre fit une courbe élégante dans le ciel avant de revenir en direction de son possesseur. Le pirate rouge bondit dans les airs, effectuant un sublime saut périlleux avant en rattrapant par la garde la lame qui lui appartenait. Ils venaient de montrer une petite partie de leur formidable puissance en coopération, montrant ainsi que leurs primes n'étaient pas usurpées. Ils allaient offrir un spectacle au chasseur de primes digne de ce nom. Celui-ci allait vite comprendre qu'il ne pouvait rien face aux enchainements travaillés depuis des années des deux frères jumeaux.

      Alors qu'il était en train de lutter contre la douleur lancinante, Pharaun put voir les deux frères se diriger en marchant vers lui, un sourire sadique au lèvres. Constatant avec effroi qu'il était toujours trop faible pour fuir, il ne put que contempler, impuissant, Aori lui plaquer le visage au sol en appuyant sur sa tête avec son pied. Celui-ci éclata alors d'un rire railleur.


      « Tiens, tiens... Ne serait-ce pas Pharaun Mizzrym, revenu d'entre les morts ? T'en penses quoi, Aka' ? Comment il a fait ? »

      « J'en sais rien, et je m'en fous. Je ne pense qu'une chose : cette fois on va pas le rater, et on va bien prendre notre temps ! »


      A la fin de ces mots il envoya Pharaun voler quelques mètres plus loin en lui enfonçant vigoureusement son pied entre les côtes. Le chasseur de primes alla heurter une pile de tonneaux sans parvenir à se rétablir le moins du monde, tel une poupée de chiffon. Il ne savait plus quoi faire. La douleur elle-même l'empêchait d'utiliser son pouvoir pour colmater momentanément sa blessure. Les bulles de sang qu'il créeraient seraient bien trop difficile à maintenir, du fait de sa concentration vacillante. Cela ne ferait que précipiter sa perte de conscience et donc sa mort. Face à deux adversaires de cette trempe, l'issue du combat allait vite être réglée, si l'on pouvait appeler ça un combat... Néanmoins, Pharaun refusait d'abandonner.

      Sous les encouragements moqueurs des deux pirates, il parvint au terme de monstrueux efforts à se remettre debout. Il vacilla légèrement sur ses jambes avant de se stabiliser. Ses ennemis semblaient être heureux de cet élan de bravoure, ayant apparemment envie de s'amuser avec le jeune homme. Pour parvenir à cette fin, Pharaun n'avait cessé de s'imposer l'image de Triel. Il fallait qu'il la venge, elle et ses deux autres compagnons sacrifiés sur l'autel de la trahison. Il y pensait si fort, avec une intensité tellement incroyable qu'il finit par ne plus ressentir la douleur, si ce n'est une gêne persistante aux emplacements de ses blessures. Cela ne le faisait pas mieux se tenir sur sa jambe touchée, ni n'empêchait le sang de couler, mais sa volonté incroyable lui assurait finalement la capacité de prolonger un peu le combat. Bien sûr, il était fort possible que cet état second qu'il ressentait n'était du qu'à la mort elle même qui s'approchait. Néanmoins, il était décidé à faire le voyage à plusieurs. Pour cela, il ne fallait pas qu'il s'encombre d'une chose aussi futile que la douleur.

      Le deuxième round promettait d'être plus épique. Pharaun comptait sur son agilité pour éviter les coups meurtriers des deux frères, et été bien décidé à saisir la première opportunité qui se présenterait. L'assaut ne tarda pas à arriver. Aori bondit sur lui et trancha l'air dans un coup horizontal. Pharaun esquiva en sautant en arrière pour se rétablir accroupi sur la balustrade, attendant la suite. Le pirate vêtu de bleu tira sur la chaine après son coup pour projeter Akari dans les airs. Celui-ci, bien accroché à la garde de son arme, décolla en direction de la mer. Le coup ne visait pas directement Pharaun, mais d'un mouvement du bras Aori ramena sur la gauche son frère qui était passé à la droite du chasseur de prime. Le but était de faucher ses jambes avec la chaine. Encore une fois il esquiva le coup en sautant sur lui même.

      Akari fit une trajectoire circulaire dans les airs avant de retomber sur le pont, une dizaines de mètres plus loin. Comme son frère un instant auparavant, il précipita Aori vers Pharaun en tirant sur la chaine. Cette fois l'attaque était directe et le pirate bleu, qui s'agrippait au lien qui l'unissait à l'arme de son frère dans le but de pouvoir manier sa lame, essaya directement d'atteindre le chasseur de primes au visage. Pharaun se laissa alors tomber sur le pont pour se plaquer au sol, laissant le cimeterre siffler au dessus de sa tête. Au passage il tenta de mettre un coup de pied au pirate en poussant le sol avec ses mains, mais celui-ci avait trop d'élan et sa jambe traversa le vide. Après une nouvelle élégante courbe dans les airs, Aori se réceptionna à nouveau sur le pont à coté de son frère.

      Les deux jumeaux étaient apparemment aux anges. Bien que Pharaun soit au seuil de la mort, il se mouvait d'une manière presque normale, pour le plus grand plaisir de leur soif de combat. Cependant, ils ne comptaient pas lui laisser la moindre occasion de prendre l'avantage. Maintenant qu'ils avaient vu ses capacités physiques, les chances du chasseur de primes étaient maintenant réduites à presque zéro. Ils étaient bien décidés à en finir dès la prochaine attaque.

      Sans plus de cérémonie, Aori se lança en avant. Sprintant sur une dizaine de mètres, il atteint très vite une très haute vitesse. Plaçant horizontalement la lame de son cimeterre et ayant apparemment l'intention de passer à la gauche de Pharaun, son intention semblait être de le couper en deux au niveau du ventre en profitant de son élan. Cependant le chasseur de primes se tenait prêt et bondit dans les airs en s'appuyant sur sa jambe valide. Mais il s'aperçut un peu tard que c'était le souhait du pirate...

      Une fois Pharaun au sommet de son saut, Aori se retourna vivement et tira sur la chaine de toutes ses forces pour attirer Akari à lui. Celui-ci décolla dans les airs tel un boulet de canon en direction du chasseur de primes en adoptant la même posture que son frère un instant auparavant. Sauf que cette fois, ce n'était pas une feinte, et il avait bien l'intention de trancher Pharaun au niveau du nombril. Un humain normal n'aurait rien pu faire dans ces conditions, car sans appui sur le sol, il était impossible d'échapper à l'attaque.

      Mais Pharaun n'était pas un être humain normal.

      A sa connaissance, les deux jumeaux ne l'avait jamais vraiment vu utiliser son pouvoir. Ainsi, il était très probable qu'ils ne connaissent pas vraiment l'étendu de ses capacités. Créant une bulle d'air sous son pied gauche, celui qui était blessé, il se prépara à bondir une nouvelle fois. Grimaçant de douleur lorsqu'il impulsa de toute ses forces, il s'éleva encore un cran plus haut dans les airs, échappant à la lame aiguisée. Il put voir Akari écarquiller les yeux de surprise. Jamais personne n'avait pu éviter cette attaque qui était une des combinaisons les plus imparables des deux frères. Il ne put que constater sans réagir l'élévation de Pharaun encore un peu plus haut dans le ciel.

      Mais le chasseur de primes ne comptait pas s'arrêter là. Il venait de trouver l'ouverture qu'il attendait. Alors qu'il évitait l'attaque grâce à sa bulle, il tendit sa jambe droite en arrière avant de la balancer en direction du visage d'Akari. Il l'atteignit sous le menton d'un mouvement de bas en haut, percutant sa mâchoire. La tête du pirate fut propulsée en arrière, suivie par tout son corps qui, dans un arc élégant, alla s'écraser au sol. Le coup, déjà puissant, avait été amplifié par la vitesse du forban. Complétement sonné, Akari le rouge resta étendu là, sur le sol, la tête posée sur le bois du pont, une flaque de sang commençant à se former sous sa bouche.

      Lorsque Pharaun retomba par terre, il s'aperçut que l'homme qu'il avait mis K.O. venait de lâcher son arme qui trainait maintenant à coté de lui. Aori, qui semblait ne pas comprendre ce qui venait de ce passer, se rendit compte du regard qu'avait le chasseur de primes sur le cimeterre de son frère. Se rendant compte de la situation, il s'empressa de tirer à lui la lame sans propriétaire, mais il était trop tard.

      Pharaun avait bondi pour saisir la garde de l'arme d'Akari. Alors que le pirate bleu tirait pour ramener à lui le cimeterre, le chasseur de primes fut projeté dans les airs, mais il tint bon. La chaine alla s'enrouler deux fois autour du mat avant de s'arrêter, déposant Pharaun au sol, la tête lui tournant. Néanmoins, il se reprit vite. Maintenant que le milieu de la chaine était coincé, il ne restait plus qu'une dizaine de mètres de manœuvre au deux hommes pour combattre. L'affrontement allait être au corps à corps, ce qui pouvait légèrement favoriser le chasseur de primes, car ce n'était pas la spécialité du pirate.

      Celui-ci était un homme très puissant, mais peu rapide. Sa spécialité, à lui comme à son frère, était de se servir de leur immense capacité physique pour donner de la vitesse à l'autre. Maintenant qu'il était seul, le combat semblait bien plus équilibré. Surtout que Pharaun n'avait pas prévu de tuer cet homme avec un coup d'épée dans le ventre... Pour l'instant néanmoins, il ne fallait surtout pas qu'il se fasse toucher.

      Dès la première attaque il se rendit compte qu'il ne pouvait pas non plus parer. L'énorme cimeterre semblait augmenter la force du pirate. Alors qu'il frappait, Pharaun interposa l'arme d'Akari entre lui et la lame qui s'approchait de son visage, dans le but de la bloquer. Cependant le coup était si puissant qu'il avait l'impression que la simple onde qui se répercuta dans son bras allait le décrocher. Sa blessure à l'épaule s'ouvrit un peu plus, provoquant un nouveau cri de douleur de Pharaun avant qu'il ne se reprenne. Il y était presque, il ne fallait pas céder. S'il arrivait à vaincre Aori, il pourrait sans problèmes aller achever Akari qui gisait un peu plus loin, toujours inconscient.

      Il choisit d'opter pour une feinte originale, qui allait mettre en avant sa capacité de réaction. Alors que le pirate bleu était en train de préparer un nouveau coup puissant horizontal au niveau de son cou, Pharaun leva son arme à coté de son visage pour parer. Cependant, alors que les deux lames allaient s'entrechoquer, il la lâcha tout simplement et se plaqua au sol. Aori, ne rencontrant aucune résistance, fut emporté par son élan et se retrouva momentanément sans défense. En revanche Pharaun n'avait plus d'arme, car celle-ci venait d'avoir été éjectée à plusieurs mètres, et gisait maintenant proche du mat. Mais son but n'était pas de mettre un coup décisif au pirate mais simplement de le distraire. Fauchant ses pieds avec sa jambe, le chasseur de primes observa son adversaire s'écraser lourdement sur le dos. Sans attendre ne serait-ce qu'un instant il bondit en direction du mat pour ramasser le cimeterre.

      Au passage, il en profita pour regarder le sol, pour vérifier que tout était en place. A sa gauche se trouvait la table sur laquelle reposait Jesker. Il en émanait la même odeur nauséabonde que quelques minutes auparavant. Une odeur si forte qu'elle en masquait toutes les autres...

      Alors qu'Aori était déjà en train de se relever, Pharaun se servit de ses deux mains pour planter de toutes ses forces le cimeterre d'Akari dans le mat. Puis il saisit la lanterne qu'il avait remis à cet endroit après son attaque au canons. Enfin, il fit deux pas sur le coté puis en fit encore trois en avant, et se retourna.

      Aori qui l'avait observé avait du mal à comprendre son manège. Cependant après s'être relevé il n'avait pas perdu de temps et avait bondit vers lui. Alors qu'il allait bientôt le rejoindre pour lui asséner un dernier coup fatal, il put voir une flamme dans ses yeux. Ce n'était que le reflet de la bougie qu'il tenait à la main, mais cette vision lui ficha une appréhension difficilement explicable. Peut-être ce pressentiment était-il amplifié par le visage de marbre qu'affichait le chasseur de primes, traduisant son inaltérable conviction. Il semblait tellement sûr de lui qu'Aori se mit à penser à un piège, et ralentit sa course.

      Il fit bien, car sinon il aurait été grièvement brulé. Jetant au sol la lanterne qui explosa, un énorme mur de feu se dressa entre Pharaun et lui. Ce qui était étrange, c'est que ce mur ardent s'allongeait à chaque instant, suivant deux chemins invisibles... Dont un était en train de se diriger vers lui ! D'un bond, il recula d'un mètres. Les flammes continuaient de se propager à une vitesse folle, l'obligeant à faire plusieurs bonds en arrière pour ne pas que les langues de feu ne viennent lécher sa peau. Il ne s'aperçut que trop tard qu'il n'était pas simplement en train de fuir le brasier, mais qu'il était en train de se faire encercler. Moins de dix secondes après le début de l'action Aori s'était retrouvé au centre d'un cercle brûlant, juste devant le mat. Une seule ouverture le rompait, et les flammes continuaient de délimiter un couloir après celui-ci. Le feu avançait toujours, allongeant ce passage à chaque instant. Celui-ci débouchait sur...

      Aori voulut soudain hurler et s'enfuir. S'il l'avait pu à cet instant, il aurait tout donné pour expier ses pêchés et continuer à vivre. Car c'était l'objet de sa mort au bout du chemin. Ce qu'il voyait ressemblait au dernier couloir pour arriver en enfer. Au bout de celui-ci, la bouche du diable était prête à cracher sa punition ultime. La bête ne manquait que d'être réveillée par le feu qui allait l'atteindre dans un instant.

      Lorsque celui-ci arriva enfin au bout de sa course, une détonation se fit entendre dans l'air. Le boulet de canon emporta tout sur son passage. Tout d'abord Aori, le pirate des mers d'East Blue. Il percuta son ventre et l'arracha à moitié. Puis ce fut le tour du mat dans lequel était planté le sabre. Tout cela alla rejoindre les flots. Le corps du pirate azur rejoint le bleu de l'océan...


      « Toi qui as voulu abuser du corps d'Ada la tireuse d'élite, voici un châtiment bien approprié. Ne repose pas en paix. »

      Grâce à l'odeur émanant du corps de Jesker, les deux pirates n'avaient pas senti le pétrole qui était étalé sur le pont du navire. Même s'ils s'étaient aperçus qu'un liquide était étalé sous leurs pieds, ils avaient pensé que ce n'était que de l'eau de mer. De simple embruns recouvrant le navire en quelque sorte. Ils ne s'étaient pas posé la question.

      Tout était fini. Il ne restait plus qu'à achever Akari et à laisser son propre sang se vider pour rejoindre les âmes de tous ceux qui avaient péri. S'approchant de l'endroit où le corps du pirate était supposé reposer, il s'aperçut avec effroi que seul une flaque de sang se trouvait à cet endroit. L'homme avait disparu... Des hurlements affolés s'élevèrent des falaises et alertèrent Pharaun. Son sabre sorti de son fourreau alors qu'il effectuait un demi-tour sur lui-même et frappa l'air. Une blessure rouge s'ouvrit dans le ventre d'Akari qui essayait visiblement de lui briser la nuque en l'attaquant par derrière.

      Le visage du pirate était crispé, complétement submergé par la haine. Il ne semblait pas faire attention à sa blessure et continuait d'avancer. Dans un bond en arrière le chasseur de primes fit à nouveau parler le fer. Une nouvelle marque sanglante vint se dessiner sur le torse d'Akari, traçant une croix sur son abdomen, tel un ignoble tatouage de pirate. L'homme sembla se reprendre alors, s'arrêtant dans sa course effrénée de vengeance. Son regard n'avait cependant pas changé. La folie l'avait submergé, en témoignait par ses yeux révulsés. Il était cependant encore assez lucide pour comprendre qu'il n'avait pas beaucoup de chance de vaincre contre un épéiste agile s'il ne s'armait pas à son tour.

      Ce constat fait, il se précipita sur le corps d'un des pirates étendu autour de la table pour prendre un sabre. Il n'avait pas l'habitude de magner des lames aussi basiques, et se sentait clairement diminué physiquement par rapport à d'habitude, mais sa rage emporterait le chasseur de primes. Il lui fit face et se mit en garde, puis attaqua en avançant.

      Bien que la puissance des coups étaient bien moindre que lors de son cours duel contre Aori, Pharaun se rendit compte qu'ils n'étaient pas négligeable. Il pouvait parer, mais à chaque fois il reculait et laissait un peu plus le pirate prendre l'avantage sur lui. Après trois parades, Akari parvint à percer sa défense dans un coup d'estoc visant son ventre. Le chasseur de primes tenta tant bien que mal d'esquiver, mais la lame parvint quand même à mordre sa chair, s'enfonçant dans la terrible blessure qu'il avait reçu de ce même adversaire au début du combat. La douleur fut épouvantable car les deux blessures s'additionnèrent. Sa vue commença à se troubler alors qu'un afflux de sang encore plus important qu'avant ne s'échappe de sa double entaille. Profitant de la brèche ouverte, le pirate continua d'attaquer frénétiquement, ouvrant une longue coupure sur sa poitrine et une autre le long de sa hanche. Le combat était rythmé par les hurlements des villageois à chaque nouvelle blessure.

      Tout en reculant, Pharaun savait que ses chances de victoire devenaient très minces. Il n'arrivait pas à se reprendre et n'attaquait plus. Même ses parades devenaient aléatoires. Il essayait tant bien que mal de penser à la vengeance, et rien qu'à la vengeance, mais la douleur faisait vaciller son esprit et il ne pensait à plus rien qu'à la peur et la mort.

      Il allait mourir, ce constat était fait depuis longtemps. Mais il n'allait pas réussir à apaiser l'âme de tous ses compagnons sacrifiés. Ada et Krauser avaient eu cette chance, car Jesker et Aori était vaincu. Mais Akari qui avait choisi de déshonorer Triel en la forçant à se soumettre à lui était toujours debout...


      *Triel... *

      Une douce brise marine vint faire voler les cheveux de Pharaun. Le temps sembla se ralentir, et une main d'une douceur hors du commun vint se poser sur son épaule. Le chasseur de primes éprouva une sensation d'intense bien-être, en décalage avec sa véritable situation. Bientôt, le combat repris sa vitesse normale. Mais le coup de sabre qui aurait du trancher la tête de Pharaun ne découpa que le vide.

      Après avoir esquivé en se baissant doucement, Pharaun adopta la position qu'avait toujours Triel lors de ses duels. Une jambe repliée sous lui, une autre tendue en arrière, la main à son sabre proche de son fourreau, comme si celui-ci avait été rangé, le buste en avant et la tête penchée vers le sol.

      Il souffla profondément.

      Le sabre vola en direction du pirate. Il pénétra ses chairs au niveau des basses-côtes et aurait découpé l'homme en deux si celui-ci n'avait pas attaqué au même moment. L'arme d'Akari vint se planter en dessous du nombril de Pharaun et le transperça de part en part, stoppant son mouvement. Les deux hommes se figèrent, leur visage étaient proches. Les yeux dans les yeux, ils attendaient de voir qui allait mourir le premier, tout en sachant que l'autre le suivrait immédiatement. Soudain, Akari cracha une gerbe de sang sur Pharaun, lâcha doucement son arme et s'affala sur le sol. Très bientôt, le pirate rouge d'East Blue se retrouva au centre d'une auréole écarlate que formait son propre sang sur le pont en bois.

      « Pour Triel... »

      Titubant un instant, le sabre le traversant toujours, il s'évertua à regarder le ciel. Puis ses jambes le lâchèrent. Il tomba sur les genoux puis s'échoua sur le coté. Dans ses yeux grands ouvert, il voyait Krauser, Ada et Triel qui le regardait en souriant. Il était temps de les rejoindre...














      Quand il ouvrit les yeux, Pharaun ne vit que du blanc. Sans doute le paradis. Mais ses idées n'étaient pas très claires, il avait plutôt l'impression de se réveiller d'un long sommeil. Proche de lui, il entendit une voix.

      « Pas trop tôt, on t'attendait depuis un bout de temps ! »

      Elle était familière, cette voix, mais pourtant très étrangère. Ce paradoxe était difficilement explicable. C'était comme s'il connaissait bien la personne qui avait parlé mais que celle-ci ne s'exprimait presque jamais.

      Écarquillant les yeux, Pharaun tourna la tête vers la silhouette assise à coté de lui. Même si l'univers était flou, la couleur rouge de sa robe était plus que reconnaissable.

      Ada sourit quand le jeune homme le reconnut.

      « T'as eu du pot ! A la fin de ton affrontement, les villageois ont envoyé un de leur navire pour aller te récupérer et te donner les premiers soins. Mais t'es quand même resté inconscient deux jours. Akari est mort peu de temps après, car personne ne s'en est occupé. »

      Pharaun n'arrivait pas vraiment à comprendre le sens de ses paroles, mais il ne comprenait pas comment il était possible qu'il lui parle à cet instant. Avec difficulté, il arriva à prononcer quelques mots.

      « Je t'ai tué ? »

      Un sourire illumina le visage de la jeune femme.

      « T'as bien faillit, mais tu tire comme un débutant. T'as fait beaucoup de dégâts, mais t'as pas tué tant de monde que ça. En fait, tous le monde ou presque a été mortellement blessé, mais certains corps étaient encore vivants et ont flotté quelques heures dans l'eau. Tous ont été achevés par les marins de Sirup. Mais ils ont aussi retrouvé nos corps, à Triel et moi. On a pu être soigné. »

      Pharaun qui retrouvait peu à peu la vue put effectivement constaté que le corps de la tireuse d'élite était recouvert de bandages, même si elle paraissait pouvoir se déplacer normalement.

      « Moi ça n'a pas été trop grave. J'ai déjà presque guérit. Mais elle... »

      montrant un lit à coté de celui de Pharaun, celui-ci put constater avec une boule au ventre que Triel y reposait, inconsciente. Son corps tout entier semblait avoir souffert, et elle respirait difficilement.

      « Elle est dans le coma. On ne sait pas trop si elle va se rétablir. Mais au moins elle est vivante. »


      Ada se leva de sa chaise, s'étira avant de commencer à se diriger vers la sortie.

      « Bon, c'est pas tout ça, mais moi faut que je mange à midi. J'ai pas d'argent, alors je vais me remettre au boulot. Remet-toi bien. »

      Après cette déclaration, il fallut quelques secondes à Pharaun pour réagir. Puis il s'assit sur son lit et essaya de se lever. Il avait mal de partout, mais il ne comptait pas laisser partir la jeune femme comme cela. Il se dirigea vers la porte en titubant et pénétra dans un couloir. Ada était déjà presque au bout. Le chasseur de primes lui lança.


      « Attends ! On n'a pas encore partagé la récompense ! »

      La tireuse d'élite se retourna et lui lança un regard explicite.

      « Tu plaisantes, j'espère ? »

      Puis elle poursuivit sa marche. Avant de disparaître de son champs de vision, elle leva une main à hauteur de sa tête, dans un signe d'au revoir.

      « Au plaisir de rebosser avec toi un de ces quatre ! »

      Pharaun resta un instant dans l'entrebâillement de la chambre. Il avait du mal à mettre ses idées au clair. Une chose était sûre, Ada lui laissait la récompense pour lui. C'était sûrement une manière pour la jeune femme de le remercier.

      Avant de retourner se reposer, Pharaun était décidé à aller parler à Triel, même si celle-ci était inconsciente. Lorsqu'il fut à son chevet, les mots lui manquèrent. Ses blessures étaient terribles, et il en était responsable. Il resta un moment sans bouger, sans parler, son regard tourné vers ses pensées. Il aurait tout fait pour que Triel puisse émerger de son sommeil.

      Après quelques minutes, il s'était assoupit, toujours assis sur sa chaise. Sans doute eut-il rêvé, car au réveil il se sentait paisible et heureux. Il mit quelques instants à comprendre pourquoi.

      La main de Triel s'était posé sur la sienne.