Le temps passe et la journée bat son plein. Le commerce se déroule comme un rouleau de papier chiotte laissé tombé dans une panique diurétique et mon vocabulaire avec. C'est sympa de voyager sur la balance de la formalité je trouve. On écrit selon l'humeur, et on espère que ça colle à ce qui se passe. Dans le pire des cas, on colle ce qui se passe à l'humeur. Souvent ça le fait.
Aujourd'hui, on verra, il y a du soleil, une légère brise et un petit frisson sur ma nuque fraîchement dégarnie.
Sur Walters, il pleuvine. Sur le reste de l'île maléfique c'est pareil. Les enfants du bled regardent dehors et ne savent pas quand ils pourront rejoindre leur copain Jojo pour aller jouer à la marine et aux pirates. Là, c'est maussade, c'est pas le kiff, et Maman va pas être contente si on rentre plein de boue et on aura pas de quatre heures et faudra manger toute la soupe du soir...
C'est pas le top.
Sous Walters, c'est l'incompréhension la plus totale face à ce cadavre qui a été ramené par ce deux inconnus. Très étrange: torse nu, masqué, visiblement mutilé, il n'avait pas fallu appeler le légiste pour prononcer la cause du décès, c'est généralement le cas quand la tête n'est plus rattachée au reste. Un petit coup d’œil au travers des verres du masque avait passé l'envie de voir ce qu'il avait dessous aux plus téméraires. Un esprit dérangé avait visiblement laissé sa marque dessus. Ils ne se doutaient pas à quel point...
L'avis général avait été unanime. On allait brûler le macchabée dès que le groupe parti en forêt serait revenu avec assez de bois pour ériger un bûcher. On les attendait depuis un moment déjà. On n'était pas près de les voir revenir.
Arthur Cravache, éleveur, avait tout de même trouvé l'histoire quelque peu démesurée. Même si les autres villageois avaient été contre l'idée, il avait envoyé son fils, Joachim, voir au port touristique avertir les autorités de Voyages tout risques qu'on avait découvert quelque chose de peu commun. Quelques hommes devaient déjà être sur le chemin, d'ailleurs. Eux aussi, on les attendait, même si on cherchait des histoires pour vite les faire repartir. Les hommes de Mac Manus, moins on les voyait, mieux on se portait.
Josiane Cravache, épouse relativement heureuse à ses heures, pestait contre son mari. Les montures étaient agitées, et il n'y avait pas moyen de les calmer. Elle avait été déserté par les mâles de la famille, et le garçon d'étable devait encore être en train de roupiller dans le grenier à foin, à l'étage. Elle appela à plusieurs reprises, frappa de toutes ses forces contre les planches du plafond avec sa fourche, laissa échapper un chapelet d'injures destiné à tous ces branleursdevanupiedsjtenfouttraidesconneriespareillescharognesdenflute et se décida qu'après s'être chargée de Betty elle irait chercher l'aide dont elle avait besoin. Par la peau de ses parties pendantes s'il le fallait. Un bruit sourd retenti, ça venait de devant l'étable.
Justinien Begue, le nez collé à la fenêtre, cru voir quelques formes bizarres sauter sur les tuiles du toit d'en face. Elles étaient sombre et ressemblaient à des squelettes. Il hésita un moment à appeler Maman, mais se dit qu'elle lui tirerait surement les oreilles pour raconter de telles sornettes. Maman avait été déçue des choix imposés par Papa. Elle aurait du écouter Mami et laisser tomber ce bon à rien. Elle était jeune, et tomber enceinte n'avait pas été très malin à l'époque. Venir vivre sur cette île avait été la pire chose qui lui était arrivée. Maman n'avait pas beaucoup d'imagination, on allait peut-être même le lui prouver d'ici la fin de la journée.
En bas dans la rue, madame Cravache, la maman Jojo, passa en courant. Elle était toute rouge et suait à grosse gouttes. On le voyait même sous la pluie. Il était sympa Jojo, il avait toujours des idées pour des jeux sympas. En plus, Papa travaillait chez lui. Justinien releva la tête. Sur le toit, en face de lui, un forme s'était arrêtée et le regardait. Elle n'était pas plus grande que lui et portait un masque. Il se retourna pour appeler Maman, et quand il revint à la maison d'en face, il n'y avait plus rien.
"Oui Juju ?"
"C'est quand le goûter ?"
Justinien aurait bien voulu pouvoir courir sur les toits, lui aussi. Il aurait surement été puni, parce que ça glisse les tuiles. Il était pourtant certain qu'avec ses semelles en coutchouc il n'aurait aucun problème à gambader dessus.
Aujourd'hui, on verra, il y a du soleil, une légère brise et un petit frisson sur ma nuque fraîchement dégarnie.
Sur Walters, il pleuvine. Sur le reste de l'île maléfique c'est pareil. Les enfants du bled regardent dehors et ne savent pas quand ils pourront rejoindre leur copain Jojo pour aller jouer à la marine et aux pirates. Là, c'est maussade, c'est pas le kiff, et Maman va pas être contente si on rentre plein de boue et on aura pas de quatre heures et faudra manger toute la soupe du soir...
C'est pas le top.
Sous Walters, c'est l'incompréhension la plus totale face à ce cadavre qui a été ramené par ce deux inconnus. Très étrange: torse nu, masqué, visiblement mutilé, il n'avait pas fallu appeler le légiste pour prononcer la cause du décès, c'est généralement le cas quand la tête n'est plus rattachée au reste. Un petit coup d’œil au travers des verres du masque avait passé l'envie de voir ce qu'il avait dessous aux plus téméraires. Un esprit dérangé avait visiblement laissé sa marque dessus. Ils ne se doutaient pas à quel point...
L'avis général avait été unanime. On allait brûler le macchabée dès que le groupe parti en forêt serait revenu avec assez de bois pour ériger un bûcher. On les attendait depuis un moment déjà. On n'était pas près de les voir revenir.
Arthur Cravache, éleveur, avait tout de même trouvé l'histoire quelque peu démesurée. Même si les autres villageois avaient été contre l'idée, il avait envoyé son fils, Joachim, voir au port touristique avertir les autorités de Voyages tout risques qu'on avait découvert quelque chose de peu commun. Quelques hommes devaient déjà être sur le chemin, d'ailleurs. Eux aussi, on les attendait, même si on cherchait des histoires pour vite les faire repartir. Les hommes de Mac Manus, moins on les voyait, mieux on se portait.
Josiane Cravache, épouse relativement heureuse à ses heures, pestait contre son mari. Les montures étaient agitées, et il n'y avait pas moyen de les calmer. Elle avait été déserté par les mâles de la famille, et le garçon d'étable devait encore être en train de roupiller dans le grenier à foin, à l'étage. Elle appela à plusieurs reprises, frappa de toutes ses forces contre les planches du plafond avec sa fourche, laissa échapper un chapelet d'injures destiné à tous ces branleursdevanupiedsjtenfouttraidesconneriespareillescharognesdenflute et se décida qu'après s'être chargée de Betty elle irait chercher l'aide dont elle avait besoin. Par la peau de ses parties pendantes s'il le fallait. Un bruit sourd retenti, ça venait de devant l'étable.
Justinien Begue, le nez collé à la fenêtre, cru voir quelques formes bizarres sauter sur les tuiles du toit d'en face. Elles étaient sombre et ressemblaient à des squelettes. Il hésita un moment à appeler Maman, mais se dit qu'elle lui tirerait surement les oreilles pour raconter de telles sornettes. Maman avait été déçue des choix imposés par Papa. Elle aurait du écouter Mami et laisser tomber ce bon à rien. Elle était jeune, et tomber enceinte n'avait pas été très malin à l'époque. Venir vivre sur cette île avait été la pire chose qui lui était arrivée. Maman n'avait pas beaucoup d'imagination, on allait peut-être même le lui prouver d'ici la fin de la journée.
En bas dans la rue, madame Cravache, la maman Jojo, passa en courant. Elle était toute rouge et suait à grosse gouttes. On le voyait même sous la pluie. Il était sympa Jojo, il avait toujours des idées pour des jeux sympas. En plus, Papa travaillait chez lui. Justinien releva la tête. Sur le toit, en face de lui, un forme s'était arrêtée et le regardait. Elle n'était pas plus grande que lui et portait un masque. Il se retourna pour appeler Maman, et quand il revint à la maison d'en face, il n'y avait plus rien.
"Oui Juju ?"
"C'est quand le goûter ?"
Justinien aurait bien voulu pouvoir courir sur les toits, lui aussi. Il aurait surement été puni, parce que ça glisse les tuiles. Il était pourtant certain qu'avec ses semelles en coutchouc il n'aurait aucun problème à gambader dessus.