SPLASH
« Gnh qu'estceque ?!
- Giah-ah-ah-ah... »
Ça commençait à sérieusement bien faire. Nikolas n'avait jamais autant embrassé le parquet qu'aux côtés de ces deux vieux loups de mer, et force est de dire que ce n'était jamais une très bonne expérience. Chaque fois qu'il fermait les yeux, il angoissait, jamais certain de se souvenir de quoi que ce soit à son réveil. Cela lui avait pris des mois, si ce n'était des années avant de pouvoir faire des nuits complètes. Mais tomber dans les vapes, c'était une autre histoire. Encore une fois, il se réveilla en sursaut ; d'une part, à cause de l'angoisse amnésique, mais surtout grâce à la délicatesse innée du capitaine Balior Blackness, hilare, un seau d'eau vide à la main.
« Palsambleu, capitaine Baeteman ! Cessez donc de bailler aux mouettes, et admirez moi ce foutu bâtiment ! Zagahahahaha ! »
Hngh. La douce mélodie des braillements de la Cloque finit de le tirer de sa torpeur, et il reprit lentement ses esprits. Il n'avait visiblement pas bougé depuis sa furieuse envolée entre les navires, et l’atterrissage presque parfait qui s'ensuivit. Il bougea les mains, tentant de toucher le sol et de retrouver un semblant d'équilibre ; il rencontra des cordages trempés, tout autour de lui, ce qui le laissa penser qu'on l'avait attaché au mât lors de son inconscience. Trop aimable. Il se passa la main sur le visage, et ressentit une vive douleur dans l'épaule ; de même que dans son flanc. Les acrobaties avaient laissé des traces. Il reconnut les pas lourds de l'homme-buffle et le claudiquement sourd de la Cloque, le bruit des vagues, le cri de quelques oiseaux marins, locataires de la Montagne proche. Il ouvrit enfin les yeux, et put contempler le Hollandais de l'intérieur, enfin presque. Il n'y avait pas à dire, à côté, le Sans-Nom ressemblait plus à un canot qu'à un navire. C'était une élégante frégate, au parquet lisse et poli de bois sombre. Les mâts hauts et fiers semblaient percer les nuages, les grandes voiles claquaient et se gonflaient du moindre alizée. Le musicien était impatient d'arpenter les moindres recoins de ce superbe navire, mais pour l'instant, il tentait péniblement de se relever.
D'un geste machinal, il étira son bras et manipula violemment son épaule, la remettant en place dans un grognement de douleur. Sa côte, apparemment fêlée, continuait de lui enflammer le côté, mais il serait toujours temps de s'en occuper un peu plus tard. Un « SPLASH » retentissant attira son attention ; visiblement, une bonne partie de l'ancien équipage du Hollandais n'avait pas survécu au passage, et Balior s'occupait de nettoyer le pont. Il se rendit alors compte que lui non plus n'avait pas assisté au passage sur Grand Line, et s'en voulut énormément d'avoir raté un moment aussi important dans la vie d'un pirate. Il se retourna, pour contempler la poupe du navire finement décorée et ornée de lanternes stylisées, et derrière elle, la grande Reverse Mountain ; désormais, il n'était plus question de faire machine arrière. L'absence du Pride et du Sans-Nom le frappa ; comment avait-il pu ne pas s'en rendre compte avant ? Il s'approcha du bastingage, pris d'une légère nausée due au réveil difficile. Au moment où il se pencha en avant, il comprit. L'océan était littéralement recouvert d'un tapis de débris flottants, de voiles déchirées, de cordages, et de cadavres. Comme il l'avait prévu, le Sans-Nom n'avait pas survécu à l’amerrissage, et visiblement, le Pride non plus, même s'il ne savait pas trop pourquoi ; et à vrai dire, il s'en tamponnait un peu. Il se rappela des trois pavillons, toujours serrés contre sa poitrine, mais décida qu'il n'était pas encore en état pour aller batifoler dans les haubans.
Sur le pont, Tournebroche s'affairait, aux anges. Il ne cessait de caresser le bois du bastingage, d'épousseter de ses vêtements crasseux le moindre bas relief qui croisait son regard. Un vrai gosse au commandes de son nouveau joujou. Baeteman, lui, ne rêvait que d'un coin tranquille où s'installer confortablement, afin de panser ses blessures et reprendre tranquillement ses esprits. Il y avait quelque chose d'irréel en cet instant, comme une espèce de gueule de bois collective après une longue nuit de fête sur les Blues ; désormais, la journée commençait, de même que les choses sérieuses. Et personne ne semblait pressé de quitter l'étreinte sécurisée du Cap des Jumeaux. Nikolas finit par entrevoir la lourde porte ornée qui menait à la cabine du capitaine, et se dirigea vers elle, complètement éteint, une migraine commençant à furieusement lui monter au crâne. Il s'empara de la poignée en bronze, imitant la forme d'un serpent monstrueux, et pénétra dans la pièce, refermant la porte derrière lui.
La pièce avait ce je-ne-sais-quoi de légèrement oppressant, tout en restant extrêmement élégante dans sa décoration et son agencement. Il semblait que les anciens propriétaires du navire avait un goût pour le spectaculaire et les anciennes traditions pirates ; aussi certains auraient pu trouver le décor légèrement démodé et outrancier. Mais Nikolas ne prêtait alors guère attention à ce genre de détails ; son esprit était entièrement concentré sur l'énorme fauteuil rouge et or, confortablement rembourré, trônant derrière un large bureau de chêne encombré. Il se traîna jusqu'au dit siège, et s'affala sans aucune autre considération, se massant le front et les tempes ; il aurait pu rester ici durant des heures, à se prélasser et faire la sieste dans ce petit bout de paradis. Son regard parcourut rapidement le bureau, et il jeta son dévolu sur une bouteille en verre simple, remplie d'un liquide translucide ; il porta la goulot à ses narines, mais ne sentit aucune odeur particulière. Rien d'autre que de l'eau ; parfait. Il étancha goulûment sa soif, et sentit ses forces lui revenir peu à peu.
Il entreprit alors de fouiller rapidement le bureau et de parcourir la pièce du regard, cherchant quoi que ce soit d'utile pour bander ses plaies et de quoi soulager la douleur de son flanc. Il trouva plusieurs bouteilles d'alcools exotiques, des bandes de tissus entreposées dans une petite armoire, divers onguents et pommades, et quelques poudres, qu'il reposa à leur place, faute de connaître leur utilité pour le moment. Au moins, la cabine était fournie en matériel divers, en ouvrages et parchemins ; en fait, il s'agissait d'un joyeux bazar, fruit de nombreuses pérégrinations, et visiblement, personne ne s'était inquiété d'un quelconque système de classement ou de rangement. Baeteman se jura d'y remédier, certain que ce fatras pouvait contenir foule de choses utiles pour leur voyage. En attendant, il s'installa dans le fauteuil, avala une lampée de gnôle, entreprit d'appliquer les remèdes sur son flanc, où un hématome violacé de la taille d'un boulet s'était installé. Après avoir appliqué une large couche de pommade, il se banda l'abdomen à plusieurs reprises, de façon à empêcher le plus possible l'exposition aux chocs et aux mouvements de la zone sensible.
Le tout lui prit bien une bonne demi-heure, et il commençait à se demander pourquoi les autres ne l'avaient pas encore dérangé. Il se leva, s'habilla, rassembla ses affaires et se dirigeait vers la sortie quand son œil malin fut attiré par un léger reflet doré, au sol. En effet, sous une étoffe rouge vif, un objet assez massif semblait avoir été dissimulé à la hâte ; un petit coffre orné de dorures, à en juger par le bout de métal jaune qui se dévoilait au regard du jeune homme. Celui ci s'empressa de dévoiler le coffret et le saisit à deux mains, le soulevant jusqu'à lui. Léger. Trop léger pour un coffre comme celui-ci ; la serrure était renforcée, le bois précieux, et les finitions du plus bel ouvrage. Il le secoua légèrement, portant son oreille près de lui ; en vain. Pourtant, il en était certain, ce coffre était plein. Sinon, pourquoi prendre la peine de le verrouiller ? La serrure ne semblait pas vouloir céder, et Niko luttait contre l'envie de la forcer à grands coups de bottes ; ce qu'il aurait fait, sans la crainte d'endommager le contenu de la boite. Il finit par sortir de la cabine, portant sous le bras sa trouvaille, et rejoignit sur le pont ses camarades... et une espèce d'homme-poisson-chat, à la coupe de cheveux tout à fait ridicule, et solidement ligoté au grand mât. Le prisonnier semblât aussi étonné de voir Baeteman que lui même ne l'était de contempler cet inattendu passager.
« Ah ! Nikolas, vous tombez bien. Un peu plus et je relâchais cette sardine géante par dessus bord ! Mais ma parole, à peine arrivé que vous dénichez déjà le trésor du navire ? Zagahaha ! »
Baeteman ne répondit pas tout de suite, attendant d'arriver au niveau de ses camarades pour poser le coffre à terre et exposer le problème à ses camarades.
« Quoi qu'il y ait là-dedans, on s'est donné du mal pour le cacher... »
Il sortit de sa poche une bouteille qu'il avait déniché dans la cabine, et la lança à Balior, visiblement assoiffé. Le vieil homme remercia la blondin d'une gigantesque tape dans le dos et d'un rire gras, et entreprit la descente du contenu. L'homme-poisson, visiblement terrifié, regardait le coffre avec une certaine curiosité ; pas la peine de chercher à lui soutirer des infos, pensa Nikolas. Il ne semblait pas plus au courant du fin mot de l'histoire que ses geôliers. Alors qu'il était perdu dans ses pensées, le Grognard sursauta.
VLAN
La Cloque n'était vraiment pas quelqu'un de patient. D'un coup de sa béquille de fortune, il avait littéralement explosé la petite serrure du coffre, et l'ouvrait désormais du bout de sa canne. Tous se penchèrent pour admirer le contenu du trésor... Et quel trésor.
Niché dans un écrin de velours rouge, un fruit étrange, bleu électrique, attendait patiemment que l'on se délecte de sa chair. Les volutes caractéristiques se détachaient sur toutes ses faces, témoignant de sa nature démoniaque. Nikolas se figea. C'était la deuxième fois qu'il voyait ce genre de fruits ; mais cette fois, c'était différent. Sans trop savoir pourquoi (était-ce la faim qui lui tiraillait l'estomac?), ce fruit du démon l'interpellait, et il ne pouvait détacher son regard de sa chair bleutée unie et parfaite. Sans même s'en rendre compte, il s'était accroupi, et effleurait du doigt cette malédiction ; ou bénédiction, il n'en savait plus rien. Il avait vu la dangerosité d'un tel fruit, entre les mains d'un inconscient ; mais il avait aussi contemplé la puissance brute, le potentiel d'un tel pouvoir. Il ne s'était jamais trop posé la question, mais là, maintenant, il n'avait qu'une envie ; croquer à pleine dent cette satané chose. Ce n'était pas vraiment une question de puissance, mais plutôt... de hasard. D'aventure. Manger ce fruit pourrait lui apporter le plus inutile et grotesque des talents, comme la maîtrise de la plus dévastatrice des forces primitives. Un simple coup de poker, comme Nikolas les aimait ; une unique carte à tirer, sur laquelle repose toute la partie. Il agrippa l'objet convoité à pleine main ; et rencontra la paluche crasseuse de Tournebroche, lui aussi penché sur le coffret, et décidé à emporter le fruit. Les deux hommes se regardèrent dans les yeux, circonspects. Les dents serrés, Nikolas finit par entamer la discussion.
« Lâchez ce fruit, Scab.
-Zagaha ! Dans tes rêves, gamin. »
« Gnh qu'estceque ?!
- Giah-ah-ah-ah... »
Ça commençait à sérieusement bien faire. Nikolas n'avait jamais autant embrassé le parquet qu'aux côtés de ces deux vieux loups de mer, et force est de dire que ce n'était jamais une très bonne expérience. Chaque fois qu'il fermait les yeux, il angoissait, jamais certain de se souvenir de quoi que ce soit à son réveil. Cela lui avait pris des mois, si ce n'était des années avant de pouvoir faire des nuits complètes. Mais tomber dans les vapes, c'était une autre histoire. Encore une fois, il se réveilla en sursaut ; d'une part, à cause de l'angoisse amnésique, mais surtout grâce à la délicatesse innée du capitaine Balior Blackness, hilare, un seau d'eau vide à la main.
« Palsambleu, capitaine Baeteman ! Cessez donc de bailler aux mouettes, et admirez moi ce foutu bâtiment ! Zagahahahaha ! »
Hngh. La douce mélodie des braillements de la Cloque finit de le tirer de sa torpeur, et il reprit lentement ses esprits. Il n'avait visiblement pas bougé depuis sa furieuse envolée entre les navires, et l’atterrissage presque parfait qui s'ensuivit. Il bougea les mains, tentant de toucher le sol et de retrouver un semblant d'équilibre ; il rencontra des cordages trempés, tout autour de lui, ce qui le laissa penser qu'on l'avait attaché au mât lors de son inconscience. Trop aimable. Il se passa la main sur le visage, et ressentit une vive douleur dans l'épaule ; de même que dans son flanc. Les acrobaties avaient laissé des traces. Il reconnut les pas lourds de l'homme-buffle et le claudiquement sourd de la Cloque, le bruit des vagues, le cri de quelques oiseaux marins, locataires de la Montagne proche. Il ouvrit enfin les yeux, et put contempler le Hollandais de l'intérieur, enfin presque. Il n'y avait pas à dire, à côté, le Sans-Nom ressemblait plus à un canot qu'à un navire. C'était une élégante frégate, au parquet lisse et poli de bois sombre. Les mâts hauts et fiers semblaient percer les nuages, les grandes voiles claquaient et se gonflaient du moindre alizée. Le musicien était impatient d'arpenter les moindres recoins de ce superbe navire, mais pour l'instant, il tentait péniblement de se relever.
D'un geste machinal, il étira son bras et manipula violemment son épaule, la remettant en place dans un grognement de douleur. Sa côte, apparemment fêlée, continuait de lui enflammer le côté, mais il serait toujours temps de s'en occuper un peu plus tard. Un « SPLASH » retentissant attira son attention ; visiblement, une bonne partie de l'ancien équipage du Hollandais n'avait pas survécu au passage, et Balior s'occupait de nettoyer le pont. Il se rendit alors compte que lui non plus n'avait pas assisté au passage sur Grand Line, et s'en voulut énormément d'avoir raté un moment aussi important dans la vie d'un pirate. Il se retourna, pour contempler la poupe du navire finement décorée et ornée de lanternes stylisées, et derrière elle, la grande Reverse Mountain ; désormais, il n'était plus question de faire machine arrière. L'absence du Pride et du Sans-Nom le frappa ; comment avait-il pu ne pas s'en rendre compte avant ? Il s'approcha du bastingage, pris d'une légère nausée due au réveil difficile. Au moment où il se pencha en avant, il comprit. L'océan était littéralement recouvert d'un tapis de débris flottants, de voiles déchirées, de cordages, et de cadavres. Comme il l'avait prévu, le Sans-Nom n'avait pas survécu à l’amerrissage, et visiblement, le Pride non plus, même s'il ne savait pas trop pourquoi ; et à vrai dire, il s'en tamponnait un peu. Il se rappela des trois pavillons, toujours serrés contre sa poitrine, mais décida qu'il n'était pas encore en état pour aller batifoler dans les haubans.
Sur le pont, Tournebroche s'affairait, aux anges. Il ne cessait de caresser le bois du bastingage, d'épousseter de ses vêtements crasseux le moindre bas relief qui croisait son regard. Un vrai gosse au commandes de son nouveau joujou. Baeteman, lui, ne rêvait que d'un coin tranquille où s'installer confortablement, afin de panser ses blessures et reprendre tranquillement ses esprits. Il y avait quelque chose d'irréel en cet instant, comme une espèce de gueule de bois collective après une longue nuit de fête sur les Blues ; désormais, la journée commençait, de même que les choses sérieuses. Et personne ne semblait pressé de quitter l'étreinte sécurisée du Cap des Jumeaux. Nikolas finit par entrevoir la lourde porte ornée qui menait à la cabine du capitaine, et se dirigea vers elle, complètement éteint, une migraine commençant à furieusement lui monter au crâne. Il s'empara de la poignée en bronze, imitant la forme d'un serpent monstrueux, et pénétra dans la pièce, refermant la porte derrière lui.
La pièce avait ce je-ne-sais-quoi de légèrement oppressant, tout en restant extrêmement élégante dans sa décoration et son agencement. Il semblait que les anciens propriétaires du navire avait un goût pour le spectaculaire et les anciennes traditions pirates ; aussi certains auraient pu trouver le décor légèrement démodé et outrancier. Mais Nikolas ne prêtait alors guère attention à ce genre de détails ; son esprit était entièrement concentré sur l'énorme fauteuil rouge et or, confortablement rembourré, trônant derrière un large bureau de chêne encombré. Il se traîna jusqu'au dit siège, et s'affala sans aucune autre considération, se massant le front et les tempes ; il aurait pu rester ici durant des heures, à se prélasser et faire la sieste dans ce petit bout de paradis. Son regard parcourut rapidement le bureau, et il jeta son dévolu sur une bouteille en verre simple, remplie d'un liquide translucide ; il porta la goulot à ses narines, mais ne sentit aucune odeur particulière. Rien d'autre que de l'eau ; parfait. Il étancha goulûment sa soif, et sentit ses forces lui revenir peu à peu.
Il entreprit alors de fouiller rapidement le bureau et de parcourir la pièce du regard, cherchant quoi que ce soit d'utile pour bander ses plaies et de quoi soulager la douleur de son flanc. Il trouva plusieurs bouteilles d'alcools exotiques, des bandes de tissus entreposées dans une petite armoire, divers onguents et pommades, et quelques poudres, qu'il reposa à leur place, faute de connaître leur utilité pour le moment. Au moins, la cabine était fournie en matériel divers, en ouvrages et parchemins ; en fait, il s'agissait d'un joyeux bazar, fruit de nombreuses pérégrinations, et visiblement, personne ne s'était inquiété d'un quelconque système de classement ou de rangement. Baeteman se jura d'y remédier, certain que ce fatras pouvait contenir foule de choses utiles pour leur voyage. En attendant, il s'installa dans le fauteuil, avala une lampée de gnôle, entreprit d'appliquer les remèdes sur son flanc, où un hématome violacé de la taille d'un boulet s'était installé. Après avoir appliqué une large couche de pommade, il se banda l'abdomen à plusieurs reprises, de façon à empêcher le plus possible l'exposition aux chocs et aux mouvements de la zone sensible.
Le tout lui prit bien une bonne demi-heure, et il commençait à se demander pourquoi les autres ne l'avaient pas encore dérangé. Il se leva, s'habilla, rassembla ses affaires et se dirigeait vers la sortie quand son œil malin fut attiré par un léger reflet doré, au sol. En effet, sous une étoffe rouge vif, un objet assez massif semblait avoir été dissimulé à la hâte ; un petit coffre orné de dorures, à en juger par le bout de métal jaune qui se dévoilait au regard du jeune homme. Celui ci s'empressa de dévoiler le coffret et le saisit à deux mains, le soulevant jusqu'à lui. Léger. Trop léger pour un coffre comme celui-ci ; la serrure était renforcée, le bois précieux, et les finitions du plus bel ouvrage. Il le secoua légèrement, portant son oreille près de lui ; en vain. Pourtant, il en était certain, ce coffre était plein. Sinon, pourquoi prendre la peine de le verrouiller ? La serrure ne semblait pas vouloir céder, et Niko luttait contre l'envie de la forcer à grands coups de bottes ; ce qu'il aurait fait, sans la crainte d'endommager le contenu de la boite. Il finit par sortir de la cabine, portant sous le bras sa trouvaille, et rejoignit sur le pont ses camarades... et une espèce d'homme-poisson-chat, à la coupe de cheveux tout à fait ridicule, et solidement ligoté au grand mât. Le prisonnier semblât aussi étonné de voir Baeteman que lui même ne l'était de contempler cet inattendu passager.
« Ah ! Nikolas, vous tombez bien. Un peu plus et je relâchais cette sardine géante par dessus bord ! Mais ma parole, à peine arrivé que vous dénichez déjà le trésor du navire ? Zagahaha ! »
Baeteman ne répondit pas tout de suite, attendant d'arriver au niveau de ses camarades pour poser le coffre à terre et exposer le problème à ses camarades.
« Quoi qu'il y ait là-dedans, on s'est donné du mal pour le cacher... »
Il sortit de sa poche une bouteille qu'il avait déniché dans la cabine, et la lança à Balior, visiblement assoiffé. Le vieil homme remercia la blondin d'une gigantesque tape dans le dos et d'un rire gras, et entreprit la descente du contenu. L'homme-poisson, visiblement terrifié, regardait le coffre avec une certaine curiosité ; pas la peine de chercher à lui soutirer des infos, pensa Nikolas. Il ne semblait pas plus au courant du fin mot de l'histoire que ses geôliers. Alors qu'il était perdu dans ses pensées, le Grognard sursauta.
VLAN
La Cloque n'était vraiment pas quelqu'un de patient. D'un coup de sa béquille de fortune, il avait littéralement explosé la petite serrure du coffre, et l'ouvrait désormais du bout de sa canne. Tous se penchèrent pour admirer le contenu du trésor... Et quel trésor.
Niché dans un écrin de velours rouge, un fruit étrange, bleu électrique, attendait patiemment que l'on se délecte de sa chair. Les volutes caractéristiques se détachaient sur toutes ses faces, témoignant de sa nature démoniaque. Nikolas se figea. C'était la deuxième fois qu'il voyait ce genre de fruits ; mais cette fois, c'était différent. Sans trop savoir pourquoi (était-ce la faim qui lui tiraillait l'estomac?), ce fruit du démon l'interpellait, et il ne pouvait détacher son regard de sa chair bleutée unie et parfaite. Sans même s'en rendre compte, il s'était accroupi, et effleurait du doigt cette malédiction ; ou bénédiction, il n'en savait plus rien. Il avait vu la dangerosité d'un tel fruit, entre les mains d'un inconscient ; mais il avait aussi contemplé la puissance brute, le potentiel d'un tel pouvoir. Il ne s'était jamais trop posé la question, mais là, maintenant, il n'avait qu'une envie ; croquer à pleine dent cette satané chose. Ce n'était pas vraiment une question de puissance, mais plutôt... de hasard. D'aventure. Manger ce fruit pourrait lui apporter le plus inutile et grotesque des talents, comme la maîtrise de la plus dévastatrice des forces primitives. Un simple coup de poker, comme Nikolas les aimait ; une unique carte à tirer, sur laquelle repose toute la partie. Il agrippa l'objet convoité à pleine main ; et rencontra la paluche crasseuse de Tournebroche, lui aussi penché sur le coffret, et décidé à emporter le fruit. Les deux hommes se regardèrent dans les yeux, circonspects. Les dents serrés, Nikolas finit par entamer la discussion.
« Lâchez ce fruit, Scab.
-Zagaha ! Dans tes rêves, gamin. »