C'est pas l'homme qui prend la mer
C'est la mer qui prend l'homme,
Moi la mer elle m'a prit
J'me souviens, un mardiii..
J'ai troqué mes santiags, et mon cuir un peu hips !
Burps...
Finalement je n'en veux pas tant que ça aux marines d'avoir oublié de charger les rations de combat réglementaires dans le coffre de sureté de la chaloupe. Ou plutôt, avoir découvert que si les rations n'étaient plus à leur place c'était d'abord parce que l'embarcation servait de zone de stockage pour de l'alcool clandestin plutôt que par négligence coupable m'a aidé à relativiser les choses.
Y'a pas mieux qu'une caisse d'alcool fort pour remettre les choses en perspectives.
Bon, c'était quoi déjà la suite? Moi la mer elle m'a pris, j'me souviens... Rah non, j'me souviens plus du tout. Pas grave, une bouteille vide de plus dans le sillage et ça va me revenir. Une bouteille vide. Y'en a qui jettent des bouteilles pleines à la mer. Pas moi. L'expérience du type qui sait que les bouteilles ne vont jamais ou elles devraient ? Non non... C'est l'expérience d'un mec qui a déjà été enfermé dans une bouteille. Ouais, ça ça en jette. Mais pas à la mer, jamais...
La mer c'est... Tu vois ?
Non?
D’après les calculs que j'ai fait quand je me suis aperçu qu'il n'y avait plus de vivres, je devrais arriver à Inari dans quatorze bouteilles... Quatorze. J'ai tout le temps. Même le temps de faire une petite sieste.
C'est dans ces moments la qu'on réalise qu'on se prend vraiment la tête pour rien. Je suis allongé au calme, soleil de plomb, chapeau sur la gueule, mains et pieds qui trempent dans la flotte, une bouteille à portée de main et un petit vent frais qui me signale que la barque trace sa route.
C'est le bonheur.
C'est juste dommage d'avoir mis tant de temps à s'en apercevoir.
La ou meurent les homards.
J'en avais un. C'est sur j'en avais un. A Logue il m'en restait combien déjà? Au moins trois, et j'en ai fumé qu'un en arrivant en ville. Plus un sur le bateau avec Adell. Il devrait m'en rester un !
Rien dans les poches, rien dans la veste.
Dans le sac ? Cigare ? J'avais un cigare.
Sac ? Rien dans le sac. Et pourtant c'est pas faute de l'avoir vidé, deux fois.
Dans le coffre de la chaloupe ? Aucune raison de l'avoir rangé la mais bon, je l'avais c'est sur. Je m'en souviendrais si j'avais fumé mon dernier cigare.
Si je l'avais fumé oui. Si je l'avais fumé... Allez Red ! Un effort, on se concentre et on essaye de se souvenir. Je l'avais en embarquant, ça c'est sur. Donc j'ai pas pu le perdre.
Sauf si...
Mon regard revient sur la zone un de bois noircie à l'avant de la chaloupe. Celle ou cette nuit après avoir sans succès tenté le réchauffement à l'alcool fort j'ai décidé de faire un grand feu avec ma couverture pour me geler un peu moins les couilles. Coup de bol que je me sois réveillé au moment ou mes bottes ont commencés à fondre et avant que la voile ne prenne feu de concert.
Je l'avais pas posé la bas quand même? Si ?
Je me revois ramper jusqu'au tas de fringues, sortir péniblement mon briquet de ma poche pour bouter le feu à tout ça et m’apercevoir que ce truc ne fait plus de flammes dignes de ce nom. Souffler sur les étincelles pour que ça prenne plus vite. Pester contre ces fringues mouillées qui ne prennent pas, chercher un truc sec pour lancer le départ de feu...
J'ai cramé mon dernier cigare...
Le dernier cigare Sea wolf. L'ultime survivant de ma carrière de marines et du naufrage de la chaine de luxe et de bon gout de Toji Arashibourei. La quintessence du tabac de qualité, réduit en poudre pour servir d'allume feu.
Y'a presque de quoi arrêter l'alcool et aller pointer aux alcooliques anonymes. Presque.
Mais si je peux pas boire pour oublier...
Je m'effondre à nouveau au fond de la barque mise à sac en cherchant ma dose. Et c'est la que je le vois. Ce sous titre de la gazette écrit juste pour moi.La marine saisit toutes les possessions d'Arashibourei.
Tous les cigares saisis seront emmenés au QG pour y être brulés.
La date ! Ou est la date du canard ?!
Deux jours ! J'ai encore un peu de temps. Juste un petit détour avant Inari le temps de faire œuvre utile. Sauvez les cigares !
Je f'rai le tour du monde
Pour voir à chaque étape
Si tous les gars du monde
Veulent bien m'lâcher la grappe..
Ronde de nuit sans histoire sur le Pacifiste, fier vaisseau de ligne de la marine des Blues, actuellement chargé de la mission la plus tranquille qui soit, convoyer des marchandises saisies jusqu'au QG de North Blue ou elles seront détruites. Thierry, et Hervé, respectivement matelot de premiére et de seconde classe font méthodiquement le tour du navire, d'un bord à l'autre, de la poupe à la proue. Relevant consciencieusement les positions des lanternes de signalisation et des quelques sentinelles de garde de nuit. Le pilote et ses deux apprentis, l'homme de proue, le bosco et un groupe de corvée de ravaudage de voiles.
Et puis surtout Gontran, le cuistot insomniaque qui passe la nuit à pécher depuis le gaillard arrière. Et qui accessoirement garde toujours à portée de main sa grosse boite de biscuit et un cruchon de rhum qu'il n'hésite pas à partager avec les types sympas.
Sauf que cette nuit...
-Hey Gontran !
-Réveille toi mec !
-Mince, t'as vu la bosse qu'il a ?
-Ouaip, estourbi pour le compte le vieux. Et on lui a piqué son cruchon !
-Bah, personne l'aurait tapé pour ça.
-A bord non.
-Mais...
-Chut !
Les deux matelots s'immobilisent au dessus du corps inerte de cuistot, tendant l'oreille pour entendre à nouveau le bruit qui vient d'alerter Thierry. Le bruit sourd d'une coque qui en heurte une autre.
-Hey ! Y'a une barque amarrée juste la en dessous !
-Une barque ? Mais alors, c'est un abordage !
-File chercher le bosco ! Moi je vais pister ces types avant qu'ils aient le temps de nous piquer des trucs,vu la taille de leur chaloupe ils doivent pas êtres plus d'une dizaine, on va se les faire !
Et pendant qu'Hervé file chercher des secours, Thierry s'engage bravement dans la coursive la plus proche, baïonnette pointée vers l'avant et tous sens aux aguets, faut dire que le couloir sombre est plutôt propice aux embuscades et aux surprises désagréables de toutes sortes. Mais rien. Juste par endroit quelques traces qui attestent que celui qui a assommé le cuistot est bien passé par la. Comme ce cruchon vide par exemple.
Et cette porte fermée qui clôt le couloir alors que Thierry n'a croisé personne.
Toc toc.
-Qui est la ?
-C'est Thierry.
-Thierry qui ?
-Euh... Y'a pas de chute avec Thierry non ? Et puis de toute façon ce n'est pas la question. De toute façon les questions, c'est moi qui les pose, c'est mon bateau ! Alors vous, vous êtes qui ?
-Red. Capitaine Red.
-Ben ouais c'est sur. Et moi je suis le petit frère du grand amiral ! Maintenant sortez de la tout de suite, vous êtes sur un navire de la marine !
-Je sais très précisément ou je suis vu que je suis la pour m'emparer de ce bâtiment.
-S'emparer de ce bâtiment? Tout seul ?
-Écoute gamin, je vais être compréhensif et t'expliquer gentiment les détails que t'as loupés avant que t’aille chercher ton chef pour que je puisse discuter sérieusement. Tu vois la salle ou je suis ? Ben c'est la sainte barbe. Tu sais ? Le coin ou on stocke tout ce qui peut exploser et sauter sur ce bâtiment... Alors si j'allume une clope, tout le navire est détruit. Et si je peux le détruire, alors il est à moi ! Capiche ?
-Mais vous allez sauter aussi !
-T'en es vraiment sur ? Moi je pense que non. Attends j'ai justement du feu, on va tester...
-Non non faites rien ! C'est bon, le chef arrive !
-Chef chef ! L'intrus s'est enfermé dans la sainte Barbe et il dit qu'il a du feu et qu'il va tout faire péter !
-Ah oui ? Et qu'est ce qu'il veut ?
-Il dit qu'il veut s'emparer du navire !
-Hum... Hé la dedans ? Vous voulez quoi ?
-Des cigares ! Tous les cigares Sea wolfs que vous avez à bord dans ma chaloupe, ou je fais tout sauter ! j'vous donne une heure !
-Aie... Je suis vraiment désolé monsieur mais. MLais mon devoir de marines m'interdit de céder à un chantage. Je préfère que vous nous fassiez tous sauter.
-Euh.. Quoi ?!
-Euh chef... Z'étes vraiment sur la ?
-Oui oui, tout a fait sur ! Plutôt la mort que le déshonneur !
-On pourrait pas faire un vote ?
-Oui parce que moi je vous préviens je le fais ! J'ai qu'a allumer mon briquet et pouf, on part tous en fumée !
-Et ben allez y, partir en fumée pour des cigares, c'est plutot bien vu ...
-Mais chef enfin !
-Chut... Taisez vous bande de crétins ! Et ouvrez un peu vos yeux ! C'est quoi cette porte ?
-Ben, la Sainte barbe ? Non ?
-C'est la cambuse ! Sur ce modéle la sainte barbe est à l'avant ! Précisément pour tromper les pirates qui nous faisait saute tout le temps. Je sais pas qui est ce type, mais c'est dans la cuisine qu'il s'est enfermé !
-Héhé, dans la cambuse, quel niais ce pirate...
-Héhé, ah oui ça c'est bien vu chef, c'est sur que la, on peut le laisser tout faire sauter.
-Vous l'aurez voulu ! Je compte jusqu'a 5 ! Deux !
-Trois !
-Quatre !
-Cinq !
-Mais enfin vous sortez d'ou ? Vous êtes complétement tarés ! j'vous dis que vous allez mourir !
-Et ben alors pirate ? On a peur de se faire sauter ? Je vous l'avais dit les gars, que de la bouche !
-Ok ! De toute façon moi je m'en fous je vais m'en tirer. Adieu bande de clowns, vous l'aurez bien cherché !
Scrath, frouf !
-Alors pirate ? ça boume ?
-Héhé, ça boume... Jolie celle la chef !
-Vous avez bougé la Sainte Barbe... C'est ça hein ?
-Ouais ! Allez maintenant tu sors de la et tu te rends !
-En fait, je crois pas. Je crois même que je vais rester la. C'est que la porte a l'air bien solide. Et que toutes ces émotions, ça creuse.
-Ne joue pas avec nous pirate ! Tu es coincé !
-Hey ! Mais vous avez des saucisses de Pays ! On ne se refuse rien dans la marine. Et du vin de Manshon ! Je crois que j'ai bien fait d'allumer, ça vous dérange pas si je me fais un petit gueuleton j’espère ?
-Mais !
-Chef ! Il bouffe nos provisions !
-Du roti aux airelles ! Houla, pas réglementaire du tout ça ! Heureusement que je passais par la !
-Il va tout manger ! Il faut l’arrêter tout de suite !
-Aucune chance, il faut des explosifs pour ouvrir cette porte !
-Rah c'est horrible ! Qu'est ce qu'on va faire ?
-Oh ! Mais c'est un gâteau ça ! Chantilly et chocolat ? Miam...
-Noon ! Vous avez pas le droit de faire ça !
-C'est pour l'anniversaire du capitaine !
-Salaud ! Ordure !
-Délicieux. Mes compliments au cuistot en tout cas...
-Attendez ! STOP ! Temps mort ! C'est d'accord pour les cigares !
-Ah ?
-Mais seulement si vous laissez le gâteau et les viennoiseries du capitaine !
-Hum... Je sais pas... Je crois que je viens de reconnaitre des figues braisés à la mode de Marijoa, et c'est si rare de trouver un cuistot sachant les cuisiner... Bon d'accord. Je vous les laisse ! Mais vous chargez comme je vous le dis !
-Ouais ouais d'accord ! On vous écoute !
-Alors voila ce que je veux !
Y'a pas à dire, une équipe de brave marines bien motivé peut accomplir de grandes choses. Et pour le coup, ceux que j'ai sous les yeux sont motivés à mort. Et ils ont pour l'instant suivis à la lettre les instructions que je leur ai transmises à travers la porte.
Amener ma chaloupe 0 l’arrière du navire, la ou je peux la voir par l'étroit hublot de la cuisine et en surveiller le chargement. Trier les caisses de cigare par genre car il y en a hélas beaucoup trop pour que je les emmène tous avec moi. Heureusement que je n'ai qu'une marque de prédilection. Charger les Hawkins à bord, entreposer les Davy Jones devant la porte de la cambuse, laisser les autres à fond de cale.
Parce que bon, pas besoin d'avoir l'empathie pour être sur de voir dés que j'aurais quitté le bord tous ses braves marins se rue vers les canons de leur navire pour couler ma pauvre chaloupe avant qu'elle ait fait trois brasses vers l'horizon...
C'est pour ça que je leur ait aussi fait sortir les Davy Jones de la cale. Parce que contrairement à tous ces types qui n'ont jamais fumé de cigare valant un mois de leur solde je connais parfaitement toutes les caractéristiques des productions Sea Wolfs. Et j'ai beau me trainer une casquette de plomb qui me donne l'impression de m’être fait marteler le crane par un lingot d'or enveloppé de feuilles de menthes je ne suis pas soul au point d'avoir oublié de penser à l'issue de secours.
-Bon les gars, je sors avec le homard en sauce ! Et je ne le lâcherais que quand je serais en sécurité dans ma chaloupe !
-Ok !
-Et attention hein ! Au moindre geste suspect, je le dévore !
-Y'aura pas de lézard ! On est tous sur le pont comme vous avez dit, on vous attend !
Et pendant que je me glisse dehors homard à la main, derrière moi, dans le couloir devant la cambuse les caisses de cigares commencent doucement à fumer. Et des caisses entières des plus infâmes cigares jamais créé par Toji prennent feu l'une après l'autre, ceux tissés en algues destinés uniquement au palais des hommes poissons et capable de faire rendre tripes même aux fumeurs humains les plus coriaces, ceux conçus pour cramer et bruler même sous l'eau.
Et pendant que je saute dans ma chaloupe, que je m'éloigne de quelques brasses avant de jeter derrière moi l'otage en sauce, une épaisse fumée toxique se met à sourdre discrètement de l'entrepont et des sabords du navire.
-Chef ? Y'a comme une odeur non?
-Ben... C'est pas le homard ?
D'expérience, a moins de posséder un scaphandre, personne ne se risquera dans le bateau pendant au moins deux heures après la fin de la combustion. Largement assez de temps pour disparaitre à l'horizon sourire aux lèvres et cigare en bouche.Distance à Inari ? Quatre bouteilles et deux fois plus de cigares.
J'irai z'aux quatre vents
Foutre un peu le boxon
Jamais les océans
N'oublieront mon prénom...
Dernière édition par Red le Lun 21 Avr 2014 - 18:09, édité 2 fois
-Bon chef ? On fait quoi maintenant ?
-Qu'est ce que u veux qu'on fasse ? On va féter l’anniversaire du capitaine bien sur. Et aprés je te ferais un chocolat chaud!
-Ah oui ? Ah ben ça c'est chic alors.
-Triple buse ! Bien sur qu'on appelle le QG !
-Mais on leur dit quoi ? Ils vont nous demander ou il est parti.
-Ben ça c'est facile...
-Facile chef ?
-Ouais... Y'aura qu'a leur dire que vu ce qu'il trimballe, pour le retrouver suffira de suivre la fumée...