Nikolas en balade !

La marche dura presque deux heures jusqu’à l’ancienne ville. L’île se révéla plus étendue que ce que pensait Nikolas en débarquant ; lui et Balior s’était séparés peu après leur débarquement, le vieil homme s’étant contenté de grommeler en choisissant le chemin opposé à celui du musicien. Après quelques centaines de mètres de marche sur un sol rocailleux et sablonneux, les paysages verdoyants de Banaro se dévoilèrent au jeune homme, dépeignant un tableau pareil à nul autre.


Nikolas en balade ! Silver10


Les bordures de l’île étaient majoritairement composées de forêts tempérées, mêlant immenses pics rocheux et végétation florissante. Les chênes, noisetiers et autres arbres fruitiers s’entremêlaient, et éclairaient d’un vert fringant les petits sentiers de terre qu’arpentaient les promeneurs. Le tout était d’une très grande fraîcheur, et jamais l’on n’aurait pu penser, en humant l’air frais et revigorant, que quelques décennies plus tôt, deux monstres sacrés de la piraterie s’affrontaient ici dans un duel titanesque à l’issue historique. Les bottes de Nikolas frappaient la poussière, au rythme d’une chansonnette sifflotée par leur porteur ; après tout ce temps en mer, marcher sur un sol stable et non fait de bois lui faisait le plus grand bien. Non pas qu’il n’appréciait pas les longs voyages maritimes, mais le plancher des vaches finissaient toujours par lui manquer, et ce manque pouvait à la longue le rendre désagréable. A ce moment, c’était donc une véritable cure, une ressourcée bienfaitrice pour Baeteman.


Il s’arrêta près d’un arbre pour soulager sa vessie, et contempla durant ce moment de « communion » une famille d’écureuils s’échapper à toute allure de leur abri ; un trou d’arbre visiblement aménagé avec tout le confort nécessaire. Le chant des corneilles, rossignols et autres volatiles accompagnait celui de Nikolas, alors qu’il continuait sa route, décoiffant son chapeau afin d’aérer sa crinière blonde ; la barbe n’était visiblement pas la seule à avoir poussée. Une biche traversa le sentier, s’immobilisant quelques instants devant cette vision inhabituelle, puis franchissant d’un bond gracieux un petit fossé, disparaissant derrière la couverture des arbres. Le jeune homme, un sourire affiché sur les lèvres, respirant à fond, entama une rengaine :


« Quand du poste de vigie,
On crie terre à bâbord,
Le marin, l'âme ravie,
Se croit déjà au port.
Il n'a plus qu'une pensée,
Tirer une bordée,
Il n'a plus que cette idée,
Joyeux, il chante alors :

On est heureux comme des poissons dans l'eau,
Sur le plancher des vaches !
On peut guincher dans tous les caboulots,
Sur le plancher des vaches !
Le vin, les femmes, on a tout çà,
Mais oui, madame, sur ce plancher-là,
C’est presqu'un amiral, le matelot,
Sur le plancher des vaches ! »



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Continuant sa lente marche (de toutes façons, le log pose leur imposait une journée complète à terre, au minimum), Nikolas sombra dans ses pensées. Ce genre de forêt lui rappelait vaguement quelque chose, sans aucun doute. Ce n’est qu’après quelques minutes qu’il parvint à se souvenir de cet étrange rêve, quelques semaines plus tôt, lors de leur première nuit à bord du Hollandais. Il tâcha de se remémorer sa vision, sans trop de succès ; tout juste savait-il qu’il arpentait alors une forêt semblable à celle-ci, à une saison différente néanmoins. Il avait bien entendu envisagé que ce rêve eut été causé par l’ingestion de son fruit du démon, la veille. Mais encore aujourd’hui, ni lui, ni ses camarades n’avait réussis à découvrir la nature des pouvoirs donnés par ce Fruit. Les Grognards s’étaient pourtant adonnés à diverses expériences durant leur temps libre, dans le but de forcer les dons de Niko à se révéler. Ainsi, après plusieurs tentatives de Balior consistant à surprendre Nikolas au détour d’une artère du navire, en beuglant et agitant les bras en tous sens, les résultats restèrent peu concluants (excepté la confirmation que le jeune homme semblait en pleine forme cardiaque).


Un matin, Scab avait même tenté de frapper le musicien par surprise à l’aide d’une poêle, résultant en une magnifique bosse sur le crâne blond de l’intéressé et une engueulade en règles pour l’agresseur. Nikolas avait, de son côté, tenté plusieurs stimulations différentes ; à commencer par un petit plongeon dans le grand bain, relié à une corde de vie, afin de confirmer que « cette putain de poire au goût merdique » était bel et bien un fruit démoniaque, ce qui fut approuvé par plusieurs litres d’eau recrachés et une paire de baffes de Balior, hilare. Il tenta également la méditation, la stimulation  par la douleur, la faim, ou tout simplement la concentration extrême, mais rien n’en résultat, rendant le jeune homme aigri et absolument frustré durant quelques jours. Il se décida finalement à abandonner purement et simplement les tests, résigné à attendre que ses pouvoirs se révèlent d’eux même.


C’est là-dessus que Niko ruminait lorsqu’il parvint à l’orée de la forêt, contemplant en contrebas d’une colline sur laquelle il se trouvait, la petite ville dévastée, cernée par un les pitons rocheux de l’île, et donnant l’impression d’un gigantesque cratère. D’ici, la vue était magnifique, mais les ruines de la ville semblaient finalement d’un intérêt bien moins grand que ce que le musicien pensait jusque-là. Il se décida tout de même à descendre jeter un œil ; il n’avait de toute façon rien de mieux à faire.

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Ce qu’il restait de l’ancienne ville de Banaro trônait fièrement, entouré d’immenses pics rocheux protecteurs, au centre de l’île. Les maisons et bâtiments rudimentaires n’avaient pour la plupart pas résistés à l’usure du temps et à l’affrontement entre les deux sommités de la piraterie, un siècle auparavant. En effet, les constructions étaient presque toute de bois et de pierre, et les vestiges de la ville restaient épars. Seuls quelques bâtisses un peu plus imposantes et solides que les autres avaient survécu, donnant de la hauteur à ce triste paysage de mort et de ruine. La ville fantôme portait bien son nom : pas un chat ne montrait le bout de sa queue, aucun chant d’oiseau au-dessus du musicien ne troublait le silence de l’orée de ce champ de cendres. Si l’île semblait encore compter quelque activité, au vu des embarcations amarrées autour d’elle, ce n’était certainement pas ici qu’elle demeurait.


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Nikolas avança prudemment, un tantinet refroidi par ce spectacle lugubre. Sa curiosité naturelle prenait le pas sur le reste, cependant il commençait sérieusement à se demander s’il n’allait pas retourner à la tranquillité et la beauté de la forêt. Il distingua un grand bâtiment de pierre et de bois, au centre de la ville, et se décida à aller y jeter un œil, puis à rentrer fissa au bateau afin d’y attendre Balior en compagnie de Scab. Cette île n’apportait vraiment rien d’intéressant, et il ne comptait pas s’y attarder plus que de mesure. Il traversa la grand-rue d’un pas lent, dépité de ce spectacle navrant. Au coin d’une maison, un détail attira cependant son regard de lynx ; coincée sous une pile de débris, une mallette, visiblement en bon état, s’exposait à la vue de tous. Le musicien s’approcha et s’accroupit, déblayant à la main les quelques morceaux de bois et de roche qui recouvrait cette curiosité qui avait résisté aux dommages du temps et des combats.


Le loquet rouillé ne posa aucun problème au jeune homme, qui le brisa d’un coup sec. A l’intérieur, rien de bien intéressant ; une poignée de berrys, dont Nikolas s’empara prestement, quelques vêtements, et un vieux journal. Se saisissant de ce dernier et lâchant le reste, le grognard resta planté, feuilletant les pages jaunies, et restant stoïque devant un portrait affiché sur une moitié de page.


Nikolas en balade ! Luffy_10


Les faits relatés dataient de la bataille de Banaro, si ce n’était plus ancien encore. Rien de bien intéressant ne retint l’attention du jeune homme, qui lâcha le journal au milieu de la route et se remit à sa pénible promenade, profondément déçu. Cependant, sa lassitude ne dura pas ; en effet, alors qu’il se tenait à quelques dizaines de mètres de son objectif, il se figea, tendant l’oreille. Au loin, il lui semblait alors que le silence était brisé, plusieurs sons étranges parvenant jusqu’à ses oreilles. Gardant sa main ancrée sur la poignée de son arme, il continua d’avancer, interloqué, et bien décidé à discerner plus nettement ces étranges sonorités. A mesure qu’il s’approchait, les son ses précisaient ; il reconnut assez rapidement des éclats de voix, puis des notes de musique jouées par divers instruments. C’était une véritable fête qui semblait se dérouler, au beau milieu d’une ville fantôme complétement déserte. Les sons provenaient à n’en pas douter de l’intérieur du grand bâtiment encore debout, ce qui continua d’interpeller le musicien. Quelle bande de tordus pouvait bien festoyer au beau milieu de ruines sinistres et sans aucun intérêts ?


Bien entendu, et encore une fois, son côté borné ne lui laissa aucun répit. Il devait percer le mystère à jour.
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« MWAHAHAHA ! ENVOIES-EN DONC UNE AUTRE ! »



Nikolas s’immobilisa à l’entrée du bâtiment, surpris. Les cris venant de cette gargote, tenant encore debout sans trop que l’on sache comment, n’avaient rien d’effrayant. Il s’agissait bien de cris de fêtes ; et à en juger par les rires gras et la grammaire déplorable qui en ressortait, les types qui s’enivraient à l’intérieur étaient tout sauf des gens fréquentables. Le musicien s’attarda quelques secondes sur l’aspect de la taverne, ou du moins ce qu’il en restait. Le bâtiment était principalement fait d’une roche brute grisâtre, grossièrement taillée, et surpassait à vue d’œil en taille toutes les autres (anciennes) constructions de la ville fantômes. *Bien évidemment, pensa le jeune homme. Le troquet restera toujours la clé de voute de tout rassemblement humain.* Il était de forme rectangulaire, sans aucune finesse architecturale ; il se composait d’un rez-de chaussée et d’un étage partiellement détruit par le temps, donnant sur une terrasse en hauteur qui ne semblait plus être accessible. L’entrée possédait une espèce d’auvent de bois, dont on ne voyait plus que la structure, et la façade du bar était recouverte de larges fenêtres crasseuses sur tous les côtés, à travers lesquelles Nikolas distinguait de vagues formes aller et venir, et bouger en tous sens.


« Drôle d’endroit pour faire la fête… »


Et pourtant, de la musique de comptoir parvenait bien aux oreilles (outrées) du jeune homme. Des violons miteux, une contrebasse désaccordée et un piano qui l’était tout autant crachaient un semblant d’air paillard jusque dans la rue, accompagnée par les chants et les rires alcoolisés de la joyeuse troupe. Nikolas se décida, et abandonnant sa prise sur Menteuse, franchit la double porte de saloon qui faisait la jonction entre la rue et la salle principale. Les deux bouts de bois  entamés par les termites et les années réussirent tout de même à grincer du plus bel effet, battant derrière le dos de Baeteman, immobile. On avait vu entrée plus discrète. En quelques instants, l’agitation ambiante se calma puis disparut, tous fixant d’un air vide l’intrus. Nikolas se rendit alors compte, un peu tard, de sa bêtise. Mousquets, lames et autres massues brillaient dans la pénombre de la pièce. Des pirates. Une bonne trentaine, si ce n’était plus. Il mourrait d’envie de se mettre une bonne paire de baffes pour son imprudence, mais se retint, tâchant de faire bonne figure. Le premier gonze à la table de devant se retourna sur sa chaise, jetant un coup d’œil des pieds à la tête du jeune homme, lui lançant dans un magnifique jet de postillons :


« T’es qui, toi ?


- Un collègue assoiffé ! Les bruits de ripailles portent jusqu’à la côte, camarades, z’espériez tout de même pas que personne n’aurait envie de se joindre à la fête ? »


Le Grognard avait répondu sans réfléchir, comptant sur sa chance et son bagou pour se sortir de cette épineuse situation. Il déglutit avec difficulté, essayant tant bien que mal de paraître détendu pour ne pas éveiller les soupçons. Le silence perdura, les hommes se regardant entre eux, certains murmurant des suppositions à leur voisin de table. Finalement, un vieil édenté au bout de la salle s’exclama d'une voix cassée et tremblotante, appuyé sur une énorme béquille en bois gravée :


« Bah ! Ma foi,  y’aura bien assez d’rhum pour tout le monde ! »


Ce sur quoi la salle explosa de joie, riant aux éclats et invitant le jeune homme à se joindre à eux, reprenant le cours des festivités comme si rien ne s’était passé. Niko resta coi, stupéfait par le cours des événements. Quelques secondes plus tôt, il se voyait cloué à la figure de proue d’un navire de forbans, et voilà que maintenant, ils lui collaient une immense pinte mousseuse dans les mains, lui libérant une chaise à une table ronde. Se secouant la tête, le jeune homme décida qu’il valait mieux en rire, et accepta l’invitation.



Nikolas en balade ! Saloon10



Il but goulument à sa chope, appréciant le goût houblonné d’une bonne bière ambrée, après des semaines cantonné à la vieille gnôle. Son voisin de table, le même gars qui l’avait interpellé à son entrée, lui mis une grande tape dans le dos, et entama la conversation sous le brouhaha joyeux qui emplissait de nouveau le saloon. A la table, les types se penchèrent, visiblement curieux d’entendre le pourquoi de la venue de ce blondinet. Tous avaient l’allure de vieux loups de mer, édentés, scarifiés, mutilés, brefs, de parfaits compagnons de boisson. Un détail frappa néanmoins le nouveau-venu : tous portaient, à un endroit de leur tenue qui variait selon le bon plaisir de l’individu, une rose. L’un d’entre eux l’avait carrément tatouée sur sa joue droite, un autre avait épinglé une fleur fanée sur son veston. Jetant rapidement un coup d’œil alentours, il constata que ce n’était pas uniquement du fait de sa tablée ; tous les membres de la curieuse assemblée portaient ce même symbole.*Certainement le symbole de l’équipage*, pensa-t-il, avant d’écouter ce que son nouvel acolyte de comptoir avait à lui dire.


« Alors mon gars, qu’est-ce tu fabriques sur ce bout de terre paumé ? D’où tu viens comme ça ? »


Par prudence, Nikolas choisit d’éluder la question, levant son verre à ses interlocuteurs tout en demandant :


« Je pourrais vous demander la même chose. Drôle d’endroit pour faire la fête, non ?


- Mwahahaha ! Pas faux l’ami ! A vrai dire, on vient tout juste de mettre la main sur une grosse prise, et le cap’taine a décidé qu’il nous fallait un coin peinard pour écouler tranquillement la picole et la boustifaille qu’on avait grainé. Et quoi d’mieux que ce maudit caillou perdu, j’te l’demande ! »


Ce sur quoi il éclata de rire, suivi par ses compagnons, et vida la moitié de sa pinte dans son gosier, renversant l’autre moitié sur ses vêtements et sa barbe touffue. Ce sur quoi il claqua la chope sur la table avec violence, éructa bruyamment, puis hurla :


« LYDIA, MA BELLE ! J’SUIS A SEC !


- Encore, tu veux dire ! Parole d’unijambiste Boone, si tu descends encore plus que ta part, je t’enfonce ma béquille si profond dans l’cul que tu pourras t’curer l’pif avec !


La réponse du dénommé Boone ne tarda pas :


- Calme-toi donc, l’ancêtre ! On sait tous que t’en crèves d’envie ! MWAHAHAHA !


La salle éclata de rire en chœur, alors que le vieil édenté vociférait dans son coin en faisant un signe de la main vers l’arrière-salle. Nikolas riait de bon cœur, trinquant avec l’homme en face de lui. Enfin pensait-il avoir trouvé le moyen de tuer le temps sur cette île sans intérêt ; quand une vision de beauté et de grâce vint interrompre ce moment brut et gonflé de testostérone. La serveuse sortit de derrière le comptoir et s’approcha, plusieurs pintes à la main. Ses courbes voluptueuses et parfaites étaient soulignées par une magnifique robe rouge et noir, ornée de fourrures. Son visage était sans aucun doute la plus belle chose qu’il avait été donné à contempler aux yeux de Baeteman depuis longtemps, réveillant en lui des sentiments et des pulsions un tantinet oubliées. Il se découvrit, affichant son plus beau sourire, alors que la jeune femme déposait la bière devant le barbu, et que son regard flamboyant croisait un instant celui du jeune homme, lui serrant l’estomac et lui chauffant les joues.  



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Il contempla la jeune femme repartir avec grâce, au milieu des cris et des sifflets. Boone le remarqua, et éclata de nouveau de rire, le gosier réapprovisionné en bibine. Il s’essuya la barbe d’un revers de main, et parla :


« Pas mal, hein ? Mais t’fais d’illusions, mon gars. Celle-là, c’est pas touche. Propriété du capitaine Jack.


-Dommage.


-Mwahaha ! Tu l’as dit. Du coup, tant qu’j’y suis. »


Il frotta sa paluche droite sur sa tunique crasseuse et la tendit vers le jeune homme.


« Boone. Canonnier du Black Rose.


-Niko, musicien et vigie du Hollandais Voleur.


-Mwaha, sacré nom pour un rafiot ! Le vieux là-bas qui gueulait, c’est Arty, not’cambusier. Et vl’à Mors, Joe et Candy, hommes de quart. »


Les pirates de la table du Grognard levèrent un à un la main, plongés dans leurs chopes et ricanant. Le dernier répondit à son appel par un rot sonore, déclenchant les rires de ses compagnons. Nikolas repensa à la serveuse, envisageant de vite terminer son verre pour recommander, quand Joe sortit de sa poche un vieux jeu de cartes, et entreprit de les distribuer à tous sans même prendre le temps de proposer. *De l’alcool, des jeux, et des jolies filles, que demande le peuple ?*
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« Brelan d’As ! Hahaha !


-Quoi, encore ?! Couille de Kraken ! »


Une chance insolente. Voilà ce que Nikolas exhibait à la petite troupe qui s’était regroupée autour de la table, buvant et riant, criant de joie chaque fois qu’une mise était remportée. Le musicien amassait désormais un joli petit pactole, formé de divers objets hétéroclites, allant du bibelot en argent à la fourchette en or massif. Cela faisait bientôt une heure qu’il buvait et s’amusait avec la joyeuse troupe, et comptait bien continuer jusqu’à ce que le soleil ne se couche, voire au-delà. Finalement, cette île révélait un certain intérêt, et l’aventure sur Grand Line commençait en grande pompe. La serveuse revint vers l’aggroupement les bras chargés de pintes mousseuses, et commença à les distribuer. Niko lui leva son verre, ce à quoi elle répondit par un regard à la fois amusé et un tantinet moqueur, avant de repartir vers les réserves.


« Ma foi, tu caches bien ton jeu, blondinet ! MWAHAHA !


-Et tu devrais faire de même, Boone. »


Le canonnier baissa les yeux sur sa main droite qui exhibait à presque toute la table une magnifique paire de valets, et la ramena promptement vers son torse, jetant des regards accusateurs à ses camarades hilares. Nikolas avait appris, durant la partie, que le capitaine de l’équipage s’était absenté pour régler une affaire sur l’île, mais qu’il reviendrait certainement assez tôt. Si le zigoto était à la hauteur de ses hommes en matière de jovialité, il comptait bien partager une pinte avec lui, mais il n’avait pas réussi à extirper plus des matelots avinés. A la simple mention de leur chef, les hommes avaient détourné le regard et changé de sujet, ce qui n’était pas pour lui plaire. Il repensa à Scab et Balior. L’un devait toujours ronfler sur le pont du navire, et l’autre avait tracé au hasard, sans aucune explication. Il espérait que personne ne tenterait quoi que ce soit contre le Hollandais alors qu’il était là, à se saouler et à jouer. Il se rappela qu’après tout, il était lui aussi capitaine, et donc responsable du navire. Mais il choisit de ne pas s’inquiéter à tort, et distribua les cartes.


Alors qu’il vérifiait son pli, les bruits de la salle s’amenuisèrent au son de la porte du Saloon qui grinça avec force, suivie du bruit de lourdes bottes sur le parquet. Une à une, les discussions s’éteignirent, et tous portèrent le regard vers l’entrée. Même la musique s’arrêta, et Lydia et Arty stoppèrent net toutes leurs activités, le visage tout à coup dénué de toute joie. Niko fit un tour de table du regard. Les rires et les sourires édentés avaient laissé place à des traits sévères, presque inquiets. Il faisait dos à la porte, il se retourna donc pour voir de lui-même ce qui avait pu à ce point miner l’ambiance. Devant les portes battantes, se trouvait un homme grand et mince, quasi-famélique,  à la peau sombre et aux cheveux frisés extravagants, retenus par un fin bandeau sur son front. Il était vêtu d’un veston décoré de roses noires, et d’un long manteau déchiré de toutes parts qui flottait derrière lui comme un voile funeste. Ses vêtements étaient globalement en très mauvais état, et témoignaient de nombreuses batailles acharnées. Sur ses avant-bras s’entremêlaient de longues chaînettes, qui rendirent le musicien curieux. Mais ce qui le frappa surtout, ce furent les armes que l’homme portait à sa ceinture, de chaque côté de son corps ; des espèces de longues griffes aux lames acérées, trois sur chacune. Chaque lame faisait la taille d’un petit sabre, et Baeteman s’interrogea sur la technique qu’avait mis au point cet homme pour manier de telles armes. Il n’était certes pas un homme d’équipage ordinaire, et Nikolas sur au premier instant qu’il s’agissait du capitaine Jack dont Boone lui avait parlé, une heure auparavant.



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Le susnommé s’arrêta quelques instants et parcourut la salle du regard. Puis il éclata de rire et hurla :


-Et bien ! Z’en faites une tête ! QUI VOUS A AUTORISÉ À ARRÊTER DE PICOLER ?!


A ces mots, la salle explosa de joie et hurla le nom de son capitaine à en faire vibrer les murs. Les festivités repartirent de plus belle, alors que l’homme s’avançait dans la salle, hilare. Son rire était aigu et dément, tranchant avec sa voix calme et posée, d’un timbre grave et doucereux. Ses yeux noirs s’arrêtèrent alors sur le visage de Niko, et y restèrent fixés durant quelques secondes, un large sourire toujours sur le visage. Nikolas sentit son pouls s’accélérer, alors que son regard croisait celui de Jack. Il sentait une certaine malséance au fond des yeux de cet énergumène, sans trop savoir pourquoi. Il sentait en tout cas qu’il n’allait pas trop l’apprécier.


Le Capitaine du Black Rose arriva à hauteur de la table, sous les regards admiratifs de Boone et des trois hommes de quart. Alors que la fête battait son plein, il fit un signe à Lydia au loin, qui s’empressa de courir en réserve et lui apporta une bouteille de vin rouge, un sourire crispé sur le visage. Nikolas le remarqua, ce qui ne fit qu’accentuer son impression et le mit sur ses gardes une bonne fois pour toutes. Il y avait un contraste malsain entre la joie ambiante, que le Grognard partageait quelques minutes auparavant, et  cette espèce de tension palpable entre les deux Capitaines, qui se jaugeaient dur regard mutuellement, sans lâcher un seul mot. L’homme attrapa la bouteille des mains de la jeune femme avec violence. Nikolas reconnut l’étiquette ; un grand cru de North blue, qui valait une coquette somme. Le bouton fut vite expédié au sol à coups de dents, alors que son propriétaire s’attelait à étancher sa soif à même le goulot. Lorsqu’il eut terminé, il lâcha un grand soupir de contentement, et se pencha vers l’oreille de Baeteman, la bouteille toujours à la main. Il prononça ces simples mots :


« Maintenant, tu meurs. »


Et avant même que Niko ne puisse réagir,  la bouteille de vin encore à moitié pleine se fracassait contre l’arrière de sa tête, éclatant en mille éclats de verre et le recouvrant du précieux liquide. Sa tête partit en avant et claqua contre le bois de la table. Le monde tourna autour de lui et sa vision se flouta. Les vivats de la salle s’estompèrent en un brouhaha inaudible. Le Grognard ne sut dire sir la foule acclamait son capitaine ou se révoltait de son acte, mais à cet instant même, il lui semblait que Balior Blackness en personne s’acharnait à marteler son crâne contre le sol. Sans même qu’il n’ait eu le temps de reprendre ses esprits, il sentit deux énormes pluches lui empoigner le col et le bas du dos, et d’une seconde à l’autre, son corps s’envolait dans les airs. Il ne sentit plus son poids, juste un élan formidable qui semblait se dérouler au ralenti. C’en était presque apaisant pour le jeune homme étourdi ; jusqu’à ce que son corps n’entre en contact avec la fenêtre du bar, et l’explose en mille morceaux, continuant sa course folle dans la poussière de la grand-rue, une dizaine de mètres plus loin.
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« Hahahaha ! »


Par-delà le sifflement insupportable de ses tympans, Nikolas pouvait entendre les rires et les sifflets de tout l’équipage du Black Rose, qui se hâtait de sortir du bâtiment pour contempler le spectacle. Alors qu’il était encore à terre, tentant difficilement de se relever, une bouteille de rhum vide vint s’écraser à quelques centimètres de sa tête. Il sentait divers objets le percuter de toutes parts, la foule se laissant emporter par des idées de lynchage. Il rouvrit les yeux, et mit quelques instants avant de retrouver une vision claire et précise des choses. Même les musiciens était venus admirer son humiliation, instrument sur l’épaule. Beaucoup s’esclaffaient entre deux gorgées d’alcool, plusieurs d’entre eux mordaient même à pleine dents dans des parts de jambon salé ou de saucisson. Il était devenu l’attraction de la fête, le clou du spectacle ; et ça ne lui convenait pas vraiment.


Soudain, la foule s’écarta, dégagent en son centre un couloir pour que puisse passer le capitaine Jack, hilare, suivi de près par un colosse balafré ; certainement l’homme qui avait envoyé Nikolas valdinguer par la fenêtre. Ce dernier se damna de ne pas avoir remarqué la brutasse auparavant, certain qu’il n’était pas entré dans la taverne avec son capitaine. Le géant passa devant, alors que le cinglé à la peau sombre s’accoudait à la balustrade du perron et attirait vers lui une Lydia plus que nerveuse. L’adversaire de Niko se trouvait maintenant à quelques mètres de lui, faisant rouler ses muscles et craquer ses articulations, encouragé par les vivats de la foule. Certains pirates amassaient brandissaient des poignées de berrys, pariant sur l’issue du combat auprès d’Arty qui hurlait pour se faire entendre. L’énergumène devait bien mesurer deux mètres vingt, arborait une énorme moustache et des favoris roux, ainsi qu’une longue chevelure entamée par la calvitie. Son œil droit semblait crevé depuis longtemps, et chaque centimètre carré de sa peau semblait recouvert de tatouages indescriptibles.


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Jack annonça d’une voix forte :


« Dans le coin droit, Korto, mon fidèle second, étrangleur de Karl le Dépeceur, zigouilleur du Capitaine Lars et ses compagnons, et j’en passe. Et dans le coin gauche, heu… C’est quoi ton nom, déjà, blondinet ?


-Baeteman. Nikolas Baeteman. On peut savoir à quoi ça rime, ce merdier ? »


-Disons que ça m’amuse, et que ça amuse mes amis. (Il désigne l’assemblée en ouvrant ses bras) Et puis surtout, t’as un truc que je veux. »


A ces mots, il désigne de son long doigt noueux l’arme qui pend à la ceinture de Nikolas. *Menteuse ?*, pensa le musicien. Il était vrai que l’arme était un bel objet, mais de là à tuer quelqu’un sans même chercher à discuter pour l’obtenir… Nikolas commença à se demander si le capitaine Jack n’était pas plus renseigné que la moyenne sur les Grands Sabres, mais n’eut pas vraiment le temps de réfléchir à la situation. Dans un grand « DING ! », Arty le cambusier avait lancé les hostilités en frappant d’un coup de louche sur une casserole. Korto se lança à l’assaut dans un hurlement terrifiant, le poing en avant. Nikolas évita le coup de justesse, surpris par la vitesse et l’agilité du géant de muscles. Mais ce dernier ne s’arrêta pas là, et continua ses assauts ; directs, uppercuts, crochets et autres coups de pieds pleuvaient dans toutes les directions, Nikolas ne devant son salut qu’à sa vitesse supérieure et sa taille réduite, lui permettant d’esquiver plus aisément. Il sentait néanmoins la lourdeur et la puissance des attaques de son opposant, et comprit assez vite qu’un seul coup au but le sonnerait définitivement, mettant fin au combat prématurément.  


Après s’être penché en arrière, évitant ainsi un revers dévastateur du gauche, le musicien se décida à passer à l’offensive. Pivotant en arrière dans un geste d’escrime parfait, il dégaina Menteuse d’un grand geste, frappant de taille en direction de l’estomac de son adversaire. Celui-ci eut la présence de reculer, un peu tard néanmoins ; le coup avait déchiré ses vêtements et laissé un sillon sanglant, large mais peu profond, sur son ventre. Le public retint son souffle, alors que le Second portait sa paluche gigantesque jusqu’à la plaie, surpris par la vue de son propre sang. Plutôt que de le calmer, le résultat fut tout à fait inverse ; entrant dans une rage folle, sous les rires déments de son capitaine, Korto se jeta sur Nikolas, bien décidé à lui faire avaler son sabre par un orifice peu commun. Mais le combat avait basculé, et le bretteur l’avait senti. Le colosse faisait pleuvoir les coups, se fatiguant à une vitesse folle, et peu à peu, sa vitesse diminua, de même que sa précision. Après un direct loupé, Niko jeta son corps sur le côté, en profitant au passage pour taillader le buste de son adversaire sur toute sa largeur. La différence de niveau était palpable, malgré l’aspect effrayant du géant, qui tomba à genoux. Pour la première fois depuis longtemps, le bretteur sentait que sa supériorité était écrasante. Les derniers événements avaient certainement aiguisé, sans qu’il ne s’en aperçoive, ses réflexes et ses capacités au combat. Il savoura cet instant, avant de porter le coup fatal et d’achever son adversaire, perforant son cœur d’un estoc.


Le corps de feu Korto tomba lourdement dans la poussière, dans le silence le plus complet. Même le capitaine Jack avait perdu son large sourire, laissant place à une expression de rage extrême. Il lâcha sa compagne, complétement effrayée, et s’avança vers le Grognards, poings et dents serrées. *Enfin, pensa Nikolas, le plat de résistance.*

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