Chère June,
J’espère que tu te portes bien et que tu recevras cette lettre. Enfin, surtout que tu te portes bien, je crois que recevoir ma lettre ne changera pas grand-chose. Moi bien sûr que ça va. Ca va toujours ! Je suis désolé d’avoir mis le temps, mais tu sais, on est très occupés par ici. Et puis, je suis désolé aussi pour tout ce qu’on s’est dit, la dernière fois. C’était y’a un moment, mais je sais que tu t’en souviens. J’ai pas été très doué avec toi, mais c’est pas grave, pas vrai ? Tu me pardonneras, comme tu m’as toujours pardonné. Enfin, j’espère, ou je sais pas.
J’ai pas grand-chose à dire, mais j’espère que tu vas bien. Réponds-moi dès que possible, l’oiseau me retrouvera, t’en fais pas.
Alors ? … Non. Et les flammes consumèrent ces mots.
Il réessaierait demain.
June,
J’ai écrit à bien des femmes par le passé, lorsqu’encore jeune je me prenais pour quelque poète charmeur. C’était bien avant de connaitre l’alcool, les hommes belliqueux et le voyage – tu sais bien, la piraterie. C’était aussi bien avant de te connaitre. Et à présent, écrire me parait une épreuve insurmontable. Mes mots paraissent brutaux là où ils n’étaient que douceur. Mais c’est mon cœur qui écrit, toujours. Un peu abîmé, mais plus que jamais sincère. Tu n’es pas une de ces femmes que j’ai essayé de charmer. Tu es ma fille. Celle qui ne faut pas toucher, mais simplement contempler. Car tu as porte en toi la vie, le véritable bonheur, la touchante innocente. Tu es celle que je n’aurais jamais, et cette idée me rassure. Je veux ton bonheur, et ton bonheur est loin de moi.
J’ai mis du temps à t’écrire, car il m’en a fallu pour réaliser ce que je désirais vraiment de toi. Je veux que tu restes telle que tu étais la dernière fois que je t’ai vu. Tu as changé mais j’ai aimé ce que j’ai vu, même si je ne te l’ai pas dit. Il y a beaucoup de choses que j’ai tues. Et il n’est pas encore temps pour moi de te les dire, mais peut-être qu’un jour viendra. Et j’espère que toi aussi, un jour, tu m’écriras tout ce que tu as sur le cœur avec sincérité. Ne te préoccupe pas de savoir si je le supporterai, écris-le.
June, je t’écrirai des lettres moins tristes, je te le promets. Des lettres sur nos voyages, nous, barbares. Comme dans le temps, tu te souviens ? Même si à l’époque on ne s’écrivait pas, on vivait ensemble. Et tu m’écriras sur ta vie à toi ? J’espère de tout mon cœur que tu vivras de belles choses, que tu rencontreras des gens qui feront attention à toi, comme tu fais attention à nous, petits hommes chanceux.
Surtout, ne t’inquiètes pas pour moi, je suis un homme fort. Un guerrier qui ne meure jamais ! Et puis
Eh ! Vite, tout cacher dans sa poche… Qu’est-ce que tu as dans ta poche? Eh bien, viens voir ! Un coup de poing !
Il sera fouetté, et fouetté fort. Mais au moins, personne n’aura lu sa lettre. Il l’enverra après le fouet.
Cette lettre, elle n’était que pour June.