Evil is here

-Le Jojolampa ?

-Oui, très chère !

-Oh euh... Quel drôle de nom quand même... Et euh... Qu'est-ce que c'est ?

-Ahinahinahin ! Je me doutais que vous alliez poser la question ! Il s'agit d'un animal que mon équipe et moi avons découvert sur une île hivernale et complètement sauvage, sur la mer de North Blue. Trois semaines pour traquer cette farouche bestiole et l’attraper !

-Ah… Il a l’air d’être un sacré prédateur quand même… Et à quoi ressemble-t-il au juste ?

-Eh bien, il semble appartenir à la famille des canidés ! Son apparence est très proche d’un loup, si ce n’est le fait qu’il est bien plus grand et qu’il possède de drôles de cornes sur la tête. Pour ce qui est du comportement…
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-Vooooiiiilàààà ! Je vous remets donc les clés de la cabine où vous passerez la nuit ! Je vous rappelle donc qu’il est interdit de fumer à l’intérieur, aucune dégradation du mobilier ou quoi que ce soit d’autre devra être remboursée. Ah, et essayez de ne pas boucher les toilettes, c’est important. Poulet froid et soupe de légumes sur la table pour le dîner, enfin, si vous avez un appétit de loup, hihi Nous vous souhaitons un agréable voyage avec notre compagnie !

-Ouais, ouais, j’connais la chanson. J’suis un habitué du service m’chère dame.

L’hôtesse continue de minauder avec un sourire trop blanc pour être naturel, tenant une lanterne illuminant le pont d’une douce lueur jaune tremblotante. Les roulis des vagues agitent le bateau doucement et le vent caresse doucement le bois de sa coque, qui grince de vieillesse et gémit comme pour mettre en garde ses passagers.

Romuald laisse glisser son regard sur elle, inexpressif, presque froid. Blonde, trop maquillée. Pas vraiment son genre. Ça veut ressembler à une sirène, mais ça ne les égale jamais. Il le sait mieux que quiconque, ayant plongé de nombreuses fois dans les eaux entourant les restes de Clock Work. On les aperçoit parfois, nageant gracieusement et rapidement entre les poissons, les monstres marins et la végétation sous-marine. D’une beauté si inimaginable que le jeune homme ne pourrait  la décrire. Romuald aime les femmes. On ne saura jamais le nombre de ses conquêtes, mais ce dont on peut être sûr, c’est qu’il sait apprécier le charme de chacune d’elle à sa juste valeur, tout comme les plaisirs que lui offre la vie. Qu’elle soit froide, colérique, renfermée, douce ou naïve, il se délecte de  ces bijoux qui ressembleraient à des gâteaux bien sucrés pour un enfant de huit ans.

La clé de la cabine et son sac de voyage  dans une main, l’inconnue blessée sur son épaule, il descend d’un pas lourd l’escalier qui mène au couloir des cabines. Il n’a plus qu’une seule envie, celle de se laisser tomber sur son lit et dormir comme un ours hiberne en hiver. Et pour cela, il suffit simplement d’ouvrir la cabine numéro treize et profiter des couchettes mises en place pour  se reposer !

La porte grince un peu quand le jeune homme brun la pousse d’un coup d’épaule. Il allonge la blessée sur l’un des lits avant de disperser la pénombre régnant dans la pièce en allumant une bougie mise à disposition sur une petite table de chevet. La flamme tremble un peu, la cire commence à fondre et à dégouliner. Soupir de soulagement quand Romuald se laisse tomber sans ménagement sur sa propre couchette qui couine un peu sous le poids du grands gaillard.

Et il reste là, à contempler le plafond où les ombres et la lumière dansent, frémissant et s’enlaçant selon le mouvement de la petite flamme qui apporte un peu de chaleur dans cette cabine. Le navire est seulement percé des bruits de la mer et du bois qui craquèle doucement. Les embruns de la mer s’immiscent partout, et ça et là, quelques odeurs de chique et de thé qui remontent, seules traces des passagers ayant dormi ici. La marque de vivants inconnus qui les fait passer pour d’étranges fantômes.

Les ectoplasmes. A cette pensée, le jeune homme esquissa un léger sourire qui illumina son visage creusé par la fatigue et les soucis. Il ne croit pas aux légendes. Encore moins au paradis ou à l’enfer. Alors, si un jour on lui dit que le diable est derrière lui, il se rase le crâne.  Les anges, les démons… Tout ça, ce ne sont que des histoires pour effrayer les âmes les plus faibles.

Une vague plus violente que les autres vient faire crier et gémir le bateau d’un son aigu et déchirant. Tout redevient calme dans cette nuit terriblement banale.

Groouuiiik

Mh. Une faim de loup, ouais. Heureusement qu’y’a du poulet.


Dernière édition par Honaka Suzuke le Mar 19 Aoû 2014 - 14:09, édité 1 fois
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La bête se réveille soudainement.

Ses yeux jaunes clignent , s’habituent doucement à la pénombre.

Elle scrute cette étrange obscurité ambiante.

Elle n’aime pas ça.

C’est trop petit, trop oppressant…

Où est-elle ?

Où est la neige ?

Où est la forêt ?

Où sont les autres ?

Les monstres, sont-ils partis ?

Un grincement.

Des voix.

Des odeurs répugnantes.

La bête souffle, ahanne bruyamment.

Son cœur palpite, la peur transpire par tous ses poils sombres.

Elle voit.

Elle comprend.

Un démon cornu ne reste jamais bien longtemps dans sa cage.
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-… C’est un mangeur de champignons plutôt farouche et-

-… Mais pas forcément agressif professeur, hein ? … Non, parce que dans ce cas, je ne serais pas franchement rassurée de voyager avec un tel animal à bord…

-Ahinahinahin ! Ne vous inquiétez pas très chère ! La cage est indestructible, même pour un être humain à la force dépassant la normale !

-Mais... S’il y parvient malgré tout ? S’il s’avère plus dangereux que ce que vous pensiez ?

-Eh bien, j’irai moi-même le capturer à nouveau, au péril de ma vie ! Si je l’ai capturé une fois, la seconde ne m’est pas impossible ! Mais comme je vous l’ai dit, il est peu probable que le Jojolampa parte aussi facilement ! Enfin, c’est surtout qui ira Gruffud, hein ?

-Bweeeuuurp ! Hok ! Ouaip patron ! C’est entendu patron !

-Arrête de te gaver de chips et de cidre, bon dieu ! Pense à notre camarade de couchette !

-Mais, patron… Pardon patron !


Dernière édition par Honaka Suzuke le Mar 21 Oct 2014 - 19:16, édité 1 fois
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Le morceau de poulet froid et trop gras tremblote un peu au bout de sa fourchette. Romuald, immobile dans cette pièce sombre.

Il l’a entendue.

Souffler et grogner.

Elle gémit et a les traits crispés. Est-ce la fièvre ou la douleur qui lui fait cet effet ? Il n’en a pas la moindre idée mais l’agitation qui habite ce visage creusé par la fatigue n’est pas faite pour rassurer. Ces longs cheveux bruns sale de poussière pourpre et de sueur, ces cernes violettes et ces poches sous les yeux, la voilà aux portes d’une souffrance sans nom qui ferait trembler le plus endurci des hommes. Alors, sans paraître de se lasser ou s’inquiéter, le jeune homme prend sa gourde d’eau et un chiffon, et essuie à plusieurs le front pâle et fiévreux d’une femme en proie aux supplices d’un corps détruit.

Sa chaise grince lorsqu’il se rassoit lourdement, le visage de marbre et ses yeux ne cessant de la fixer. Il ne doute pas de la survie de la future de l’inconnue. Elle a l’air d’en avoir vu d’autres, et bien pires que celle-là. Et quand Tim l’aura soignée, elle sera de nouveau sur pied. Elle apprendra toute l’histoire du sauvetage, blablablah et elle le remerciera, en lui répétant qu’il est une bonne âme, que c’est rare aujourd’hui, gnagnagnah…

-Bonne âme… Mon cul, oui.

Il s’est plutôt servi d’elle comme de ticket de retour express sur Clock Work. Simplement parce qu’il a voulu éviter d’expliquer à son grand-père ce qu’il s’est passé pendant son séjour. Il n’a pas voulu lui dire qui étaient ces hommes venus le menacer, pour le passer ensuite à tabac, une semaine plus tard. Il n’a pas voulu non plus lui raconter comment il avait trouvé tout cet argent pour payer deux mois de nourriture au vieil homme et bien d’autres choses encore. Romuald n’a pas voulu lui expliquer tout cela, parce qu’a vu dans le regard de Samuel que lui-même avait déjà compris.

Un soupir s’échappe des lèvres du jeune homme. Ce qui est fait, jamais n’est défait, quel que soit le moyen qu’on utilise. On ne peut revenir en arrière… Comme on ne peut remonter le temps pour remettre Clock Work debout ou sauver cette jeune femme d’un massacre encore inexpliqué. Ils étaient des pirates, mais cela n’excuse en aucun cas un tel acte de barbarie.

Toc toc toc !

-Entrez.

-Euuuhm… Tout va bien monsieur ?

Ah, l’hôtesse… Plus de petites minauderies ou quoi que ce soit d’autre ? Etrange, même si le brun n’irait pas jusqu’à s’en plaindre ou en manquer. Elle semble un peu nerveuse, ses mains tremblent même… Non, il doit juste se faire une idée. Tiens, revoilà son sourire un peu trop sucré qui apparaît.

-Oui, oui, tout va très bien.

-Ah ?

-La nuit file, les mouches et les oiseaux volent, le poulet est immonde, comme toujours, que voulez-vous que je dise de plus ?

-Ah ! Très bien, dans ce cas !

-...Pourquoi chuchotez-vous ?

-Moi, je chuchote ? Ah, oui ! Huhum. Vous n’avez rien entendu de particulier ?

Haussement d’épaules, moue dubitative.

-Les gémissement de la malade, oui.

-Quelque chose de plus particulier, non ? Comme… Euhm. Le hurlement d’une bête, hum ?

-Vous chuchotez à nouveau là.

-Non. Ah, si ! Vous avez besoin de quelque chose, sinon ?

-Si vous avez des médicaments contre la fièvre, je veux bien.

-Oh euh… On a utilisé nos derniers sirops lors d’une épidémie de grippe générale sur le navire… Même les vaches transportées et le chien du capitaine étaient malades… Je vous amène des bandages et du désinfectant, si vous voulez !

Et sans attendre une quelconque réponse de Romuald, la blonde hôtesse sort de la cabine en claquant la porte.

Mh. Tout compte fait, elle est VRAIMENT agitée.

Une bête qui hurle…

Le jeune homme hausse les épaules, ne cherchant pas à comprendre plus que ça.
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-Alors, Julie, rien de nouveau ?

-Non, capitaine ! Personne n’a rien entendu du côté de la proue du navire !

-Mmmmh…

-Capitaine…

-Vous savez ce que cela veut dire, n’est-ce pas ?

-Oui capitaine…

-Et cessez de chuchoter !

-Oui ! Je veux dire, oui capitaine !

-Si personne n’a rien entendu de ce côté… Cela veut dire que le hurlement bestial que nous avons entendu n’était pas un chien illégalement transporté dans un sac et non donné pour être mis dans une des cages de transport…

Glusp…

-Julie ?

-Oui capitaine ?

-Allez me chercher ce professeur, là… Nestor quelque chose, en cabine 7 ou 8…

-Tout de suite, capitaine !

-Et arrêtez de chuchoter ! C’est un ordre venant de votre supérieur, c’est-à-dire moi-même qui vous parle en ce moment !

-Oui !
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-Q… Qu.. Quoi ?!

-Seigneur miséricordieux !

-Ah bah il s’est échappé, patron !

-Tais-toi Gruffud ! V… Vous voulez dire qu’il a réussi à OUVRIR la cage ?

Nestor Wilbich avale difficilement sa salive. Que peut-on dire ? Une cage sensée être indestructible ne l’est pas en réalité ; il a raconté, pendant deux heures, ses découvertes qui sont vraies et ses exploits, qui le sont beaucoup moins. Voilà le pauvre et lâche professeur Wilbich dans de beaux draps.

Le capitaine du navire, animé d’une agitation fébrile, marche de long en large dans la cabine, marmottant quelque chose dans sa barbe. Quant à la jeune hôtesse, elle lui lance des regards désespérés, comme s’il était devenu Dieu en cet instant d’angoisse soudaine. Mais Nestor n’a en rien l’âme d’un courageux ou d’un héros. La lâcheté gangrène  son cœur comme un poison insipide assassine et se prolifère dans son hémoglobine. Le grand Gruffud, à l’air hébété, continue de le fixer avec une imbécillité non contrefaite, tandis que la ménagère qui a bu ses paroles comme on s’enivre d’un mauvais vin pas trop cher, elle couine  avec admiration que « vous réitérerez votre exploit en direct ! ».

Quatre personnes qui comptent sur lui. C’en est trop pour la peureuse bête qu’il est. Le professeur Wilbich sent la sueur dégouliner à grosses gouttes sur son front.


-Alors professeur, avez-vous un plan d’attaque ?

-Un-un plan d’attaque ?

-Après l’avoir capturé une première fois, vous êtes certainement capable de le refaire !

-O-oui, tout à fait !

Nestor aurait bien voulu répondre non et s’enfermer à double tour dans un placard à balais, faire semblant d’être la serpillière épongeant la misère s’abattant sur ce rafiot. Mais face à ces regards insistants et inquisiteurs, il ne peut que se résigner  à rattraper le Jojolampa et à tenir sa réputation de grand explorateur.

-Eh, b-bien… Approchez-vous un peu que je vous explique… Je vais avoir besoin de euh… De cordes ! Oui, voilà, des cordes ! Et aussi d’eau savonneuse, beaucoup d’eau savonneuse ! Et euhm… D’un champignon aussi… Oui, un champignon… Et aussi de...


Dernière édition par Honaka Suzuke le Mar 21 Oct 2014 - 19:26, édité 1 fois
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Romuald laisse l’alcool couler  dans sa gorge, savoure la brûlure qui remplit entièrement sa bouche et claque la langue de plaisir. Il savoure les brumes enivrantes qui montent jusqu’à lui, jusque dans sa tête pour le remplir d’un trouble particulier que même une femme ne peut exercer sur un homme.

Un soupir.

L’hôtesse n’est toujours pas revenue avec ce qu’elle avait promis.

L’étrangère. Ses plaintes se sont tues à présent. Le jeune homme a dû vérifier qu’elle respirait toujours quand il s’en est aperçu.

Deux soupirs.

Huuun…. Ffffff…

Elle respire. Elle vit. Elle livre bataille. Son souffle caractéristique des mourants illustre bien la bougie de la vie, qui s’éteint  aussi soudainement que la mort survient. Une flamme glacée que l’on peut raviver si rien n’est fait.

Trois soupirs. Un grognement. Une allumette racle la boîte d’allumettes.

Une bouffée de cigarette s’envole.
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AAAAOOOOUUUUUUH
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Et la bête hurle.

Et la bête grogne.

Et la bête trépigne.

Et la bête hume l’air.

Un effluve de douleur, de mort s’approchant à grands pas et de pourriture traîne dans l’air du couloir sombre. Une odeur de mort qui prend aux tripes et donne la nausée.

Peur.

Patraque.

Panique.

Et la bête repart, les murs du noir corridor suintants l’homme à plein nez.
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-Doux seigneur !

-Etait-ce... ?

-On va tous mourir !

-Patron !

-Gruffud !

-Oui patron ?

-Il est temps de mettre les champignons en place !


Dernière édition par Honaka Suzuke le Mar 4 Nov 2014 - 23:25, édité 1 fois
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Boum.

Romuald s’est raidi tout à coup.

Boum Boum.

Il a entendu.

Boum Boum Boum.

Il a pâli subitement.

Boum Boum Boum Boum.

Il s’est senti se ratatiner de l’intérieur, l’effroi le transpercer et lui glacer le cœur.

Boum.

Le mystère de l’inquiétude de l’hôtesse est percé.

Il y a quelque chose en liberté sur le navire. Et ce quelque chose n’a pas du tout l’air sympathique.

Le jeune homme sent ses mains trembler légèrement. Les palpitations de son cœur se sont arrêtées, mais une drôle d’appréhension lui mine l’âme. Son regard va de la porte à l’étrangère allongée et inconsciente sur l’un des lits. Il réfléchit à tout va, laisse ses méninges apporter une solution. Il faut que ce soit rapide, clair et net. Romuald sait qu’il peut se barricader dans cette pièce avec la pièce avec la blessée. Il peut. Mais ce n’est pas dit que ce soit le choix le plus sage à faire. Si la bestiole arrive à défoncer la porte, ils seraient alors isolés de l’équipage du navire et de bien des mains secouristes se trouvant à bord.

Alors, le jeune homme soulève et place l’étrangère sur son dos, attrape son sac de voyage, inspire profondément pour chasser toute peur et s’enfonce dans les ténèbres du couloir. Le navire, silencieux et inquiétant, semble comme abandonné. Ils sont seuls.

Seuls et perdus, encerclés par une bête qui n'a pas de visage ni de nom pour eux. Une inconnue qui est encore plus terrifiante que les monstres que l'on connait.
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L'odeur d'un...
Une odeur...
Une odeur si plaisante…
Un peu amère…
Mais si délicieuse…
La bête trépigne…

Un bolet !

Une montagne de bolets !


Dernière édition par Honaka Suzuke le Mar 4 Nov 2014 - 23:24, édité 1 fois
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La respiration de Romuald résonne lourdement. Le navire grince, le vent s’agite dehors et les vagues attaquent la coque à grandes déferlantes. Même les éléments se déchaînent, alors qu’une bête est dehors. Il ne sait pas où elle est, ni à quoi elle ressemble, il peut simplement l’exagérer grossièrement grâce au cri terrifiant qui a ébranlé le bois solide du navire.

Il faut partir et vite. Se réfugier pour ne plus rien craindre, pour ne plus isolé. Pour ne plus être seul dans ces couloirs vides qui paraissent immenses et étroits, qui semblent ne pas vouloir vous recracher.

Et lui, il court, longe les murs et grimpe l’escalier qui mène jusqu’à la salle de navigation, où le capitaine dirige le bateau. Les marches couinent et gémissent sous son poids. Un pas, un pas encore, et un autre. Il s’envole, la blessée sur son dos semble être si légère, tout comme son sac de voyage. L’angoisse lui a fait pousser des ailes. Le jeune homme pousse enfin la porte à la volée, le cœur battant et-

-aAH !
-BAHAAA !

Bon dieu. Il aurait presque senti son palpitant se décrocher. Ce n’est que la blonde hôtesse qui semble tout aussi effrayée et pâle que lui. Le jeune homme s’appuie contre la porte quelques secondes, le temps que ses jambes cessent de trembler et puisse retrouver ses mots.

-Vous auriez pu prévenir qu’il y avait quelque chose de dangereux sur ce navire !
-Euh… Oui… Mais c’est que… Il faut que… Vous… Cachiez, là !

Il jette un coup d’œil derrière l’hôtesse et ne peut s’empêcher d’hausser un sourcil.

-… Un filet et un… Bolet ? Qu’est-ce que c’est que ce foutoir ? Où est le capitaine ?
-Oui, oui, mais venez vous…
-Quoi ? Mais parlez donc plus fort, je n’entends rien !
-… Il… Il est là.
-Quoi ? Qui est là ?
-Le… Le…

Un grondement sourd résonne dans me dos de Romuald. Son sang, sa chair, ses organes et ses os, tout cela se liquéfie à l’intérieur de lui, pour ne laisser qu’une peur bestial. Il ne sent plus ses jambes, et pourtant, il s’est jeté en avant, l’étrangère inconsciente toujours sur le dos. Il a l’impression d’être sourd, et pourtant, le hurlement cristallin de la minette blonde transperce ses tympans.

La bête est là.

Il n’ose pourtant pas se retourner.

De peur de croiser son regard et de ne plus pouvoir bouger.
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Le bolet est là. La bête peut sentir son odeur titillante. Elle grogne et frémit. Des hommes sont là. Et ils hurlent, hurlent, hurlent. Elle secoue sa tête en soufflant bruyamment, surveillant du coin de l’œil l'un des deux êtres qui s'est réfugié derrière une chaise.

...Mais qu’est-ce qu’ils puent.

Il y en a un qui se balance au plafond, complètement ficelé. Il crie à pleins poumons, mais la bête ne comprend pas. Ils gémissent pour un elle langage étrange et incompréhensible. La voix vers son piètre mais succulent festin est ouverte. Enfin. Elle le devrait.

Il y a quelque chose qui ne va pas et qui l’empêche de sauter et croquer à pleines dents son Graal.

Nerveuse, elle sort les dents, retrousse les babines et aboie.

Une fois, deux fois, trois fois.

Que l'humain allongée entre elle et le bolet ose bouger un seul membre et elle le réduira en morceaux.

En tous petits morceaux.
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-Kwwaaaak ! Kwaaak ! Arrivée à Clock Work dans vingt minutes ! Kwaaak !
-Tais-toi coco !
-Kwwaaak !

La bête tourne la tête C'est un oiseau. Un vulgaire piaf. Un drôle de volatile aux longues plumes colorées et au bec étrangement recourbé. Elle n'avait pas remarqué, jusqu'à l'intervention du perroquet, les quatre paires d'yeux qui l'observaient dans son dos, barricadées derrière un tas de caisses et de planches.

-Elle nous regarde, oh seigneur !...
-Calmez-vous patron ! C'est mauvais pour votre coeur !
-Grmmblblblh !... LE PIEGE ! Ils ont déclenché le piiiièèèège !

-Le piiiièèègeee ! Kwwaak !

Acculée. Pas de sortie, ni d'échappatoire définitive vers la liberté. L'odeur de la montagne de bolets continue de lui titiller les narines, mais il y a... Ce truc, devant. Ce corps humain qui pue la maladie à pleine truffe et ressemble à un tas de chiffons que l'on aurait abandonné là. Fragile et sans défense.

-Bon... On l'encercle, on lui saute dessus et essaie de le ficeler, c'est compris ? Professeur, êtes-vous VRAIMENT certain qu'on ne court presque AUCUN danger ? Ce... Heum... Jojolampa, ne risque pas de se montrer plus violent qu'il ne l'est déjà ?
-Euh, oui, oui ! Gruffud, tu sauteras sur lui, hein ?
-Oui patron !

-Chhhht !
-Oh, professeur, faîtes attention à vous !

Les hommes se rapprochent peu à peu. La bête sort les crocs.

Elle a peur.

Elle est nerveuse.

Tout cela pourrait mal finir.

Le goût du sang sur ses papilles ne la dérangerait même pas, étant donné la situation dans laquelle elle se trouve.
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Romuald sent encore son sang bouillonner d'une folle inquiétude et son coeur battre une mesure désordonnée. L'étrangère est tombée de ses épaules lorsque lui s'est pris les pieds dans ce maudit piège. Sans couteau ou quoi que ce soit de véritablement tranchant, impossible de s'en dépêtrer. Quand à la bête, ce grand loup gris cornu et aux yeux d'un bleu glacé, elle semble farouche, sauvage, pas forcément agressive mais bien plus angoissée que n'importe quel être présent dans la capitainerie. Elle pourrait se mettre à trembler et à gémir, qu'il ne serait nullement étonné. Cet animal a quelque chose d'humain au fond, qu'on ne saurait expliquer.

-A un... Deux...
-LLOOOOOYYYYYYYD !

Un coup de feu retentit.

-Kwwaaak ! Llllloooyyd ! Kwwaaak !
-Maintenant !
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Personne n’a réellement compris ce qui s’est passé à ce moment-là.

La ménagère un peu bavarde et très naïve les encourageait derrière les caisses empilées.

La jeune et jolie hôtesse les murmurait de derrière son petit refuge de fortune (qui était aussi un caisson) en tremblant des pieds à la tête.

Nestor Wilbich s’était réfugié sous une table, laissant Gruffud, le capitaine du navire de la translinéenne et ses quelques hommes, s’occuper du Jojolampa qui avait eu les tympans réduits en miettes, sans pouvoir comprendre ce qu’il se passait.

Romuald continuait de gigoter dans son filet.

Et celle qu’il appelait « l’étrangère » continuait de murmurer ce nom de manière hystérique, les yeux grands ouverts, le visage blême et le corps crispé sous une forme d’angoisse inquiétante.

Coco continuait de décompter le temps d’attente avant le prochain arrêt.

-Kwwaaak ! Kwwaak ! Arrivée à Clock Work dans cinq minutes ! Kwwwaaak !

Le monde tournait toujours, le temps s’écoulait normalement et la lune était toujours haute dans le ciel étoilé.

Les poules n’avaient toujours pas de dents, les chats se bataillaient avec les chiens, comme les chiens se bataillaient avec les chats.

Le capitaine avait retrouvé sa place pour diriger le navire et Coco décomptait toujours.

-Kwwaaak ! Kwwaaaak ! Arrêt à Clock Work ! Kwwaaak ! Espérons revoir les voyageurs très bientôôôt ! Kwwaaak !

Dans tout ce fouillis indescriptible, Romuald n’avait pas cherché plus loin. Il avait remis la blessée sur son dos, pris son sac de voyage, sorti une cigarette et était descendu du navire.
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-QUOI ?!
-Vous-vous voulez rire ?!
-… Non… La porte de la cage était simplement mal fermée…
-… GruuufFFUUUUD !
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