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La Nuit.


Il les dévale, les couloirs du QG, ses souliers claquant contre le sol de béton, suivit de près par ses hommes. Tous le suivent aveuglément, prêts à poursuivre la purge qu'ils ont déjà si bien mené jusqu'à maintenant. Des frères, ils en ont perdu, tout comme leurs ennemis révolutionnaires, ils les ont vu mourir, mais il n'y aucune place pour la rancœur ou les larmes pour l'instant. Il n'y a que leur objectif, et leur supérieur qui fonce vers celui-ci sans s'arrêter un seul instant. Son chapeau haut-de-forme vissé sur son crâne, Edwin Morneplume avance d'un pas décidé tout en consultant avec sérieux la liste de noms que lui a donné Jessica Hopkins.

Il y a une ressemblance assez flagrante entre chacune de ces personnes. Chacun de ces noms appartient à une des vieilles familles d'artisans du royaume. Comme les Kaltershaft, il faut croire qu'il y a de la mauvaise graine chez chaque ancêtre de ce pays gangréné.

À sa droite, le fusil à l'épaule, le caporal Erwan Fitzgerald, l'œil dur, bâtit comme un coriace haltérophile, lui emboîte le pas, une cigarette en bouche.

Spoiler:

Nous allons procéder à des visites en règle dans la demeure de ces différentes familles en commençant par celles en bordure de Lavallière.
Bien sûr Sergent, mais…
L'objectif premier serait de découvrir des preuves à conviction comme des documents justifiant ces transactions financières illégales pour ensuite remonter la piste, tout en inculpant lesdits révolutionnaires.
Sergent…
Je m'attends toutefois à devoir forcer la main à de nombreuses personnes que nous devront interroger…
Sergent…
Il serait même plausible que ces lieux en tant que tel soient des nids de révolutionnaires, ce qui serait fâcheux dans l'optique où nous aurions à essuyer une nouvelle bataille comme celle de la manufacture de Givrepoigne…
Sergent.
Qu'y a-t-il, Caporal Fitzgerald?
Les renforts, le Sergent d'Élite Kuroda.
Le Sergent d'Élite Kuroda?
Votre nouveau collègue dans le cadre de l'enquête.
Ah. Oui. Les renforts. Allons y.


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[Edwin, tu me forces à écrire au présent é_é. Challenge accepted]


-

Trois jours en mer. Dont un de tempête. La vigie crie :

- Terre en vue !
- Boréa ?
- Oui Capitaine !

Mura Yasuaka, Premier Caporal, Archer et vigie des Commandos d'Acier :

Shintaro se tourne alors vers Chryses, à la barre.

- Combien de temps, selon toi ?
- Oh, à cette allure... entre quatre et cinq heures.

Chryses Nivilk, Troisième Caporal, Navigateur des Commandos d'Acier :

- Shige, comment ça se passe à la cale ?
- C'est presque terminé Capitaine !

La tempête a provoqué quelques dégâts sur tribord, et depuis, les charpentiers s'occupent de réparer les dommages causés. Rien de bien grave, des avaries classiques. Et, comme vient de le souligner le charpentier en chef, la réparation est quasiment effectuée.

Shige Bata, Deuxième Caporal, Charpentier des Commandos d'Acier :

Le sergent Kuroda retourne dans sa cabine. Il ne veut pas hésiter, il ne veut pas faire d'erreur. Il sent que sa position est vacillante, et que de ses actes dépendrait sa future situation. Alors il lit et relit l'ordre de mission du QG du BAN.

Le Commandant du BAN a écrit:
Ordre de mission

Lieu : Boréa

Objet : Purge

Contenu :

La Marine a entamé le processus de purge sur l'île de Boréa, régulièrement victime des mouvements rebelles. Le dernier en date, appelé le Teiko, a déclenché cette volonté du BAN de commencer ledit processus.

Le Sergent Edwin Morneplume, vétéran de l'élite, est déjà sur place. Il est chargé de l'enquête en elle-même. Malheureusement, il a rencontré quelques difficultés auxquelles il vaut mieux éviter de se frotter une seconde fois. Pour éviter ce genre de situation, le QG a décidé d'envoyer votre unité en renfort. Votre objectif est d'assister et, éventuellement, de conseiller le Sergent Morneplume dans sa tâche.

Il vous est également demandé de ne pas prendre d'initiative sans en informer Morneplume, toujours chargé, seul, de l'enquête dans sa totalité. Vous aurez donc un rôle purement de renfort armé. En tout cas dans un premier temps.

Si vous avez des questions ou des doutes, n'hésitez pas à contacter le QG.

Bonne chance, je vous souhaite bonne réussite pour votre première mission.
Signé : Kaiser Jugo, Commandant du BAN.



Edwin Morneplume... D'après les dires, c'est un bon, efficace, mais quelques peu... disons... extrême dans ses méthodes. Et c'est certainement pour cette raison qu'il a été envoyé pour la purge.

- Capitaine, on va entrer dans le port !
- Parfait ! Affalez le foc, le grand hunier et la voile d'artimon ! On continue à la grande voile seule !

Boréa. L'hiver commence déjà à revenir, si rapidement, si froidement. Un été court, pendant lequel il était absent, malgré lui. Cet été aurait dû voir l'apogée du Teiko. Mais ç'avait été une erreur, le Teiko n'a jamais été prêt. Son objectif était vague, ses fondations tremblantes.

Même maintenant, Alrahyr ne sait pas ce qu'il veut. Il n'y a pas encore réfléchi, parce qu'il poursuit un autre objectif depuis quelques mois. « Pars, deviens plus fort, et reviens nous libérer ». Il n'a pas oublié cette supplication de Nayami, et il est désormais si proche d'accomplir cela. Le Teiko, sa rébellion, tout ça est mis de côté pour le moment. Seule cette promesse le guide. Nayami est là, quelque part, sa vie en danger. C'est un témoin dans l'enquête de la Purge, et maintenant Alrahyr participe à ladite enquête. Il pourra donc la trouver, la voir, la sortir de là. Revenir la libérer.

La "Lame de Fond", caravelle des Commandos d'Acier, accoste. On l'amarre, et on les accueille. Une odeur de thé très forte embaume un homme, un très grand homme, qui s'avance vers l'unité qui vient de descendre de son bâtiment.

- Bienvenue à Boréa, Sergent Kuroda.
- Merci Colonel.

Earl Grey. Cet homme l'a battu si facilement, à l'époque. Mais surtout, il a gravement blessé Nayami qui, semble-t-il, a survécu. Premier test donc : Alrahyr est-il capable de ne pas perdre pied avec la réalité, afin de se jeter sur cet ancien adversaire, qu'il écraserait certainement comme un moucheron désormais ?

Il semble qu'il en soit capable, oui. Il ne bronche, pas, ses traits dissimulés sous une cagoule et un sugegasa. Son nouveau style, si différent d'il y a quelques mois. Et grâce à cela, Earl Grey n'a absolument aucune chance de le reconnaître. Comme chaque individu qu'il croisera sur l'île. Il est quelqu'un d'autre, il est Shintaro Kuroda.

- Vous avez certainement reçu un ordre de mission, je ne vous embêterais donc pas avec les formalités.
- Effectivement.
- Suivez-moi, je vais vous présenter au Sergent Morneplume. Votre unité peut aller à la caserne en attendant.

Shintaro se tourne vers ses hommes.

- Mura, Shige, Chryses, venez. Les autres, à la caserne, vous y trouverez certainement de quoi vous restaurer.

Ils marchent à travers les couloirs du bâtiment principal. A un moment, en face d'eux, quelques hommes. Celui qui marche en tête est très grand et fin, vêtu d'un costume noir et d'un chapeau haut de forme. Ses gants blancs s'agitent alors qu'il parle à un autre, un type avec un fusil sur l'épaule. Les claquements de ses souliers noirs contre le sol s'arrêtent alors qu'il voit les cinq hommes venir à sa rencontre.

- Sergent Morneplume, voici le Sergent Kuroda. Je vous laisse, j'ai à faire.

Sur ce, le Colonel s'en va, buvant toujours son thé.

- Sergent Morneplume.

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Sergent Kuroda.

Il toise l'homme cagoulé de son regard froid et acéré, le détaillant d'un simple balayage visuel; une mise à nu parfaite. C'est un homme de combat, à sa posture, à la force de sa poigne, lorsqu'ils se serrent la main, à sa manière de se déplacer, cela ne fait aucun doute pour Edwin. Si le Sergent Kuroda est sorti vainqueur du tournoi du BAN, c'est probablement parce qu'il s'est débrouillé à la force de ses poings. S'il y a bien une chose que Morneplume souhaite néanmoins, c'est que ce jeune prodige ne vienne piler sur ses plates-bandes. L'enquête lui appartient, elle est sa quête vers la rédemption.

J'imagine que votre voyage en mer s'est avéré épuisant, toutefois, il n'y a pas de repos pour l'Élite en ce royaume, messieurs. Je pense profiter de l'après-midi pour faire le voyage jusqu'aux environs des mines de Boyettes. Là je compte rencontrer un forgeron du nom de Ferdinand Frappefer. Il recevait des fonds de la Révolution et je tiens bien à découvrir à quelle fin.

Il s'assure que son chapeau est bien posé sur son crâne, range les papiers dans son veston et repose son regard d'acier impénétrable sur les ténèbres qui enveloppent le visage de son nouvel acolyte. Il ne sait peut-être pas encore très clairement caser l'homme qui se tient devant lui, mais ça ne saurait tarder. Ils l'ont choisit pour la purge, lui aussi, en aucun cas il ne peut échapper à son devoir…

Sachez, Kuroda, qu'à peine hier je marchais toujours aidé d'une béquille et que mon bras droite était toujours en écharpe. J'ai essuyé une violente embuscade révolutionnaire et à ce propos, je tiens à vous prévenir tout de suite que vous agirez comme ma main armée au cours de cette enquête.

J'approche dangereusement de la fin de toute cette histoire, mais ce ne sera pas sans couper quelques têtes, si vous voyez ce que je veux dire…

En avant, je veux avoir atteint les mines avant la nuit. Nous partons à cheval.




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Belle poigne, le Morneplume. Certainement le type de mec qu'il ne faut pas juger sur son âge, et encore moins ouvertement en sa présence. Il ne ferait donc pas cette erreur. Ferdinand Frappefer ? Alrahyr le connaît, c'était un concurrent des Kaltershaft en matière de forge. Mais pas un adversaire, non, plutôt un ami. Mais le jeune homme ignore tout de sa possible participation à la révolution. Edwin fait-il fausse route ? Ou est-il bien plus avancé que ne l'a été le dirigeant du Teiko par le passé ?

Mystère... Mais, quoi qu'il en soit, il ne tardera pas à connaître la réponse à cette question. Comme à beaucoup d'autres d'ailleurs, y compris celles qu'il ne se pose pas encore.

L'homme le dévisage. Ou en tout cas, essaye de lire dans son regard, seul ouvert à la lecture. Cette cagoule joue ici un double rôle : cacher à la vue des anciens proches l'actuel visage d'Alrahyr Kaltershaft, et créer ce personnage mystérieux et ambigü qu'est Shintaro Kuroda. Et cela plaît énormément au jeune homme, qui compte profiter de cet avantage. Non pas pour commettre un trahison ou toute autre chose, non. Mais pour se mettre en avant, se mettre en valeur. Il aime être l'homme d'intérêt, et cela depuis toujours. Et aujourd'hui, on lui sert cela sur un plateau : le nouveau venu dans l'Elite, qui s'est battu corps et âme pour sa place de premier de sa formation. Il arrive, à la tête de son unité fort bien formée, et sert de bras armé.

Et ça, ça lui plaît. Parce qu'il est le centre d'attention, parce qu'il sert un but précis. Et ce but ? C'est de chercher, trouver, débusquer le réseau de la révolution. La même révolution que le Teiko rejetait. La même révolution qui ne les a pas aidés quand ils en avaient eu besoin.

Si ça n'est pas le travail de Shintaro de s'occuper de l'enquête, il peut quand même faire son propre cheminement dans son esprit. Edwin va le tenir informé, et lui-même pourra, avec les cartes qu'il a déjà en main, en déduire certaines informations. Et peut-être même surprendre son collègue durant la traque.

Mais ce que veux faire Morneplume, cela l'éloigne de Lavallière et de Nayami. Il ne peut pas discuter, alors il espère. Il espère que, quand ils reviendront, elle sera toujours là, elle n'aura pas été exécutée. Si cela devait arriver...

Mais sa pensée s'arrête là. Il n'ose imaginer ce qui se produirait. Tant de tristesse, une perte si forte, une cicatrice irréparable. Une colère, une haine. Une violence. Trop de choses. Mais il n'y songe pas, il oublie, il se focalise sur le présent. Car c'est le présent qui compte.

Alors comme cela, Morneplume, vous avez eu du fil à retordre...Soit, c'est ce pourquoi les Commandos d'Acier sont là. Alrahyr ne le dit pas, mais n'en pense pas moins. Il connaît sa mission, il sait où est sa place.

A cheval, donc.

---

Sur la route, les deux hommes sont en tête. Alors que les caporaux bavardent tous entre eux, d'une unité à l'autre, eux restent silencieux. Shintaro, parce que c'est son caractère, et Edwin... parce qu'il ne doit pas avoir un caractère bien différent. Mais le jeune homme souhaite tout de même engager la conversation. Non pas pour passer le temps, mais pour mieux connaître son comparse. Le seul prétexte qu'il trouve, ce sont les mésaventures du Sergent.

Vous m'avez dit juste sortir d'une sorte de convalescence.

Ma mission est, comme vous avez tenu à la souligner, de vous servir en tant que renfort et bras armé. Vous êtes l'enquêteur, je suis celui qui défend vos intérêts en cas de problème.

Silence. Edwin écoute, même s'il ne bronche pas.

Je ne suis pas un idiot, Sergent Morneplume. Si vous étiez tant pressé de souligner cela, c'est que vous tenez à diriger la purge.

Serait-il impoli de vous demander pourquoi vous êtes si investi dans cette tâche ?

Les premières neiges de l'hiver précoce de Boréa tombent encore et toujours, inlassablement. Il fait frais, mais Alrahyr est un habitué. Il espère simplement que ses hommes n'en pâtiront pas.

Il a la tête légèrement inclinée en avant, son sugegasa masquant jusqu'à son regard. Et, lorsqu'il a terminé de parler et attend une réponse, il tourne la tête sur la gauche, vers Morneplume. Il la redresse, lentement de manière à ce que ses yeux rencontrent ceux de son interlocuteur.

Que me caches-tu, Edwin. Pourquoi tant de puissance dans tes convictions.
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Le regard d'Edwin est perdu dans la blancheur des sapins et épinettes qui bordent le large sentier de terre battue sur lequel ils progressent. C'est comme si un Dieu, une entité quelconque, à vrai dire, s'était mis en tête de se débarrasser de toute la végétation, et que seule celle apte à se défendre avait pu rester en vie. Il n'y a que ça, des conifères, sur Boréa, à perte de vue, ils parsèment les flancs des montagnes, comme les brins de fourrure recouvreraient d'énormes bêtes assoupies. Il profite du calme, Edwin, il vit la quiétude de cet instant d'inactivité qu'il s'octroie, après tant de journées où il n'a fait que courir.

Désormais, faute de chevaux plus endurants, il se permet un trot que chaque étalon n'a aucun mal à garder, les animaux laissant d'épais nuages de vapeur s'échapper de leur gueule salivante. Il écoute d'une oreille attentive les paroles de Kuroda, non pas que s'entretenir avec un collègue ne l'intéresse particulièrement, mais il ne peut ignorer l'homme avec qui on l'a ligué.

Et puis, il ne s'en ira pas, le silence de cette forêt. Il sera toujours là lorsque cette conversation sera terminée.

Je n'avais pas prévu, initialement, qu'il serait possible que les révolutionnaires aient un coup d'avance sur moi. Je croyais piéger une certaine Jessica Hopkins, mais il s'est avéré qu'elle m'a coupé l'herbe sous le pied. Un massacre. Je suis parvenu à l'écraser, mais au prix de nombreux hommes et de ma propre sécurité.

Ce que Kuroda ne sait peut-être pas, c'est que quand Edwin utilise le mot "écraser", il sous-entend un sens excessivement littéral. De Madame Flocon il ne reste qu'une pauvre jeune femme brisée, vaincue et perdue. Morneplume inspire, médite les paroles sur lesquelles il croit poursuivre sa tirade, se replaçant du même fait sur la selle de sa monture à la robe marron.

Je suis sur cette terre pour éradiquer le Mal. Le Mal, il existe en chacun des ennemis de la justice, et en éliminant tout ceux qui se dresse sur mon chemin, j'accomplis, petit à petit, ma propre rédemption. Je suis à la recherche du Pardon, et cette expiation, je l'aurai seulement lorsque le Mal ne pourra plus rien face à moi.

Et vous, qu'est-ce qui vous a poussé à rejoindre la Marine, Sergent Kuroda?


Ce n'est pas comme s'il a un grand intérêt en la question, mais quitte à parler, lui aussi peut tenter de définir celui avec qui il doit accomplir sa mission.



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Cet homme si droit a donc déjà commis sa première erreur. Sous-estimer les révolutionnaires est une chose qui pardonne rarement, et seule son expérience a pu le sauver. Il est mal à l'aise, il gigote. Ainsi, le sergent Morneplume n'apprécie pas particulièrement qu'on lui pose des questions personnelles.

Mais surtout, il parle du Mal comme s'il le connaissait. C'est peut-être vrai, qu'en sait-on ? Après tout, qu'est-ce que le Mal ? Selon lui, le Mal est opposé à la Justice. Et cette justice, c'est la sienne, celle du sergent Edwin Morneplume, gradé de l'élite, vétéran dans sa catégorie, enquêteur ici, à Boréa.

Et ce Pardon dont il parle. Pourquoi chercher à se faire pardonner ? Quand on désire cela, c'est qu'on a pêché, d'une manière ou d'une autre. Il cherche à éradiquer ce soi-disant mal pour se faire pardonner.

Alrahyr ne sait pas quelle est cette justice, quel est ce mal, et quel est ce pardon. Il réalise à ce moment qu'il ne sait absolument rien de son compagnon. Non pas qu'il l'ignorait auparavant, mais il n'avait pas réalisé l'ampleur de cette méconnaissance. Et il n'en apprendra pas beaucoup plus dans l'immédiat.

Rejoindre la Marine. Instinctivement, il s'apprête à répondre que c'était pour devenir plus fort. Mais il se ravise, de peur d'être questionné par un fameux "pourquoi devenir plus fort ?". Que peut-il dire, alors ? Pour servir la justice ? Pour punir les méchants ? Pour chasser les pirates ? Pour taper ? Oh, et puis... à quoi bon se prendre la tête.

- Pour devenir plus fort.

CLING

Bruit de métal contre métal, au loin, légèrement étouffé par la couche neigeuse.

CLING

Un bruit reconnaissable entre mille.

CLING

Le marteau contre la pièce de métal.

CLING

Une pièce chaude, posée sur une enclume.

CLING

La forge est proche. Le forgeron s'est arrêté, les chocs s'estompent dans l'atmosphère calme de la forêt. Le jeu de questions réponses entre les deux sergents s'est interrompu, tous deux ont les sens focalisés sur ce bruit métallique.

La forge est proche. Même les caporaux se taisent, même les soldats se font silencieux. La demeure de Frappefer est en vue.

La forge est là.
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Devenir plus fort. La réplique conforte Morneplume dans l'idée que son acolyte est un brave homme de l'Élite, qui agit et respecte les ordres avant de questionner ou de réfléchir. Toutefois, s'il n'éprouve lui-même que très peu de sentiments, Edwin sait reconnaître la fougue chez quelqu'un. La verve et les questionnements dont à fait montre Kuroda un peu plus tôt ne lui ont pas échappé, l'homme s'est légèrement refermé face à l'interrogation d'Edwin.

Hm.

La forge est là. Une grande maison à deux étages, toit de chaume recouvert de neige, petites fenêtres à carreaux, grande porte de chêne clouté, le heurtoir, la lourde poignée; une maison à l'image de son propriétaire qui, le marteau sur l'épaule, sort de la forge faisant annexe à sa demeure. Légèrement habillé malgré le froid de cette fin d'après-midi, Ferdinand Frappefer est trapu, mais bâtit comme une forteresse. Le seul contour de ses bras semble comparable au tour de taille d'Edwin, comparaison dérangeante, voire déstabilisante lorsqu'on remarque que le visage de Frappefer semble tout sauf avenant.


Loin derrière la grande maison de pierre, on aperçoit les montagnes où se trouvent les mines de Boyettes.

Ils stoppent leurs montures. Edwin fait signe aux soldats d'attacher leurs chevaux près du bâtiment, puis, tout en descendant de son propre étalon, souffle à Kuroda:

Nous sommes loin d'être les bienvenues ici, Sergent. Soyons sur nos gardes, la Révolution peut très certainement avoir un autre coup d'avance sur nous. Je m'occuperai de questionner Frappefer, vous, vous fouillerez la maison pendant ce temps. Toute pièce prouvant une appartenance à la Révolution est bonne à prendre, toutefois, ce que l'on veut réellement savoir, c'est qui se trouve au sommet de l'échelle.

Frappefer arrive à la hauteur d'Edwin alors que celui-ci lisse son costume, son cheval étant pris en charge par le Caporal Fitzgerald. Sans parler, le regard dur et fier, Ferdinand Frappefer tend la main. À vue d'œil, il mesure au moins deux bonnes têtes de moins qu'Edwin, qui baisser les yeux pour s'adresser à son interlocuteur.

Monsieur Frappefer. Je suis le Sergent d'Élite Edwin Morneplume.
On m'a dit ça…

Sa poigne est forte, virile, de quoi broyer la main de celui qui ne s'y attend pas. Mais on ne broie pas la main d'Edwin Morneplume. Décidément, les nouvelles semblent voyager rapidement au sein du royaume de Boréa. Edwin est déjà loin d'être apprécié dans les environs, mais si les sources de Jessica Hopkins s'avèrent exactes, l'antipathie de Frappefer figurerait plutôt au tableau de la haine justifiée par son appartenance à la Révolution.

Moi et mon collègue le Sergent Kuroda aurions quelques questions à vous poser. Pouvons-nous entrer?
Je n'vous ai pas invité.
Ah, mais vous n'avez pas à le faire, monsieur Ferdinand.

Le ton est terriblement suggestif, Edwin est dans son élément lorsqu'une situation est sous son contrôle, et il le fait savoir.
Je boirais bien un verre, j'ai entendu parler d'une bière délicieuse qu'on ne brassait uniquement que dans ce pays.

Suivez-moi…

Il a le regard sombre, agacé comme jamais, Frappefer. Il pousse la lourde porte de sa maison et invite les deux hommes à passer le hall d'entrer. Avant d'entrer, Edwin se tourne subtilement vers Fitzgerald qui attend près des chevaux avec le reste des hommes. Encerclez le bâtiment, disent les yeux ternes du Sergent d'Élite.

Une large salle à manger où trônent une table ronde et des chaises pour une dizaine de convives accueille les trois hommes. Annexée à cette même salle, la cuisine, où sont amoncelées des piles de vaisselle sale sur des comptoirs de bois et de céramique, depuis le plafond pendent des saucissons et des herbes séchées, une vraie demeure bien traditionnelle. Dans un âtre jouxtant la salle à manger, les braises d'un feu allumé durant la matinée se consument paresseusement.

Trois choppes sont posées sur la table. Trois hommes s'y assoient. L'un, Ferdinand, seul, faisant face aux deux autres, assis à l'opposée de leur hôte. Une gorgée. Goût de malt prononcé, mousseuse, épaisse, nordique.

Hmm… Elle n'est pas mauvaise, cette boisson.

Et toujours le regard sombre du forgeron braqué sur eux. Si on pouvait poignarder quelqu'un huit fois de suite en un regard, Frappefer serait probablement passé maître en assassinat. Morneplume ignore magistralement la mine sulfureuse de Ferdinand, Kuroda, lui, n'a pas touché au breuvage.

Vous savez pourquoi nous sommes ici, Monsieur Ferdinand?
Aucune idée.
Allons, une hypothèse.
Vous croyez qu'j'suis un révo.
Tout à fait. Et en fonction de mes droits d'enquêteur, Monsieur, mais aussi en regard aux lois des Mesures de Guerre établies par le Gouvernement Mondial, je suis venu vous poser quelques questions tout en observant une fouille dans les règles de votre demeure. Je tiens à humblement vous rappeler que vous n'êtes pas en droit de refuser, Monsieur.

Silence de plomb. Une nouvelle gorgée. Personne d'autre qu'Edwin n'a touché à sa bière, comme si la tension écrasant la pièce bloquait la gorge de ses homologues. Morneplume dépose son chapeau sur la table, puis s'éclaircit la gorge. Il jette un regard à Kuroda, l'incitant à se mettre en action, puis appuie ses coudes sur la table en croisant ses mains.

Commençons, si vous le voulez bien.

La Purge reprend du service.



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Frappefer a vieilli... Et pas en bien. Il a aussi perdu de sa musculature, même s'il est toujours imposant. Shintaro adopte un comportement impassible, de manière à passer le plus possible inaperçu. Il est une ombre, l'ombre qui côtoie le sergent Morneplume, l'ombre dont on ignore tout. Le jeune homme, toujours cagoulé et coiffé de son sugegasa, ne bronche pas pendant toute la discussion.

Enfin, si on peut appeler cela une discussion. Son collège a une manière bien particulière d'amener les choses. Il va droit au but, il est dans son environnement. Pour le moment, Alrahyr a une carte de plus qu'Edwin : il connaît Frappefer. Il le connaît assez pour savoir que s'il sait quelque chose en rapport avec les questions de son interrogateur, il ne mettra pas longtemps à répondre. Mais, si par malheur le sergent ne pose pas les bonnes questions, le forgeron restera muet. Il est comme ça, Ferdinand : il est muet comme une tombe tant qu'on ne s'aventure pas dans des chemins bien tracés et bien précis. Shintaro ne s'inquiète donc pas.

Non, ce qui l'inquiète, c'est la vérité. Frappefer est-il de mèche avec la révolution ? Si c'est le cas, toute relation passée perd de sa valeur. Le jeune homme n'a jamais vu - et ne verra jamais - la révolution d'un bon œil.

Ah, la choppe. Il ne boit pas. Le jeune homme ne veut pas prendre le risque de se remémorer le goût de sa jeunesse. Il est impassible, il est une ombre, et il ne l'oublie pas. Le regard de Morneplume l'incite à commencer la fouille.

Mais il a un doute. Si Frappefer est lié à la révolution, ils viennent à nouveau de se jeter dans la gueule du loup, comme Edwin l'a déjà fait quelques jours plus tôt. Et c'est contraire aux stratégies de l'élite. Il faut faire parler le forgeron au plus vite.

Et pour cela, il peut légèrement aider son collègue. Leçon d'interrogatoire numéro 1 : déstabiliser.

Le sergent Morneplume pose ses coudes sur la table et annonce le début du questionnement. Avant que le vieil artisan ne réagisse, Shintaro, en une fraction de seconde, dégaine son sabre court et le plante dans la table, à la base de la liaison entre l'annulaire et l'auriculaire de la main gauche de Ferdinand. Il n'est pas blessé : la lame est simplement en contact avec la peau.

Déstabiliser.

Le petit tour n'est pas encore terminé. Sans jeter un seul coup d’œil en direction du forgeron, Shintaro se lève et se dirige vers la porte par laquelle ils sont entrés. Il n'a pas besoin de voir la réaction de l'interrogé, il la connaît déjà. Et ce mépris du résultat de son œuvre ne fait qu'amplifier l'effet de la déstabilisation. Il sent le regard des deux hommes dans son dos, mais les ignore totalement.

Il est une ombre. Et cette ombre pose sa main contre le mur, sans un mot, et la traîne lentement, parcourant la pièce. Il inspecte. Minutieusement, extrêmement lentement.

Il entend enfin la main de Frappefer se retirer nerveusement de sa position initiale sur la table. Le jeune homme sourit intérieurement.

Le forgeron est prêt.

L'interrogatoire commence.
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C'est une drôle de sensation que d'être surpris, voire effrayé. Une sensation à laquelle Edwin est profane depuis de nombreuses années déjà. Néanmoins, il se doute que ça doit créer quelque chose, à l'intérieur, un frisson, une insécurité, quelque chose. Car regarder son doigt et se dire qu'il aurait pu ne plus être là, soudainement, ça a un effet tout de même inquiétant. Un effet auquel Ferdinand Frappefer ne semble pas imperméable, alors que ses yeux ronds comme de billes fixent toujours le reflet livide que lui renvoie la lame ayant estoqué sa table.

Edwin, quant à lui, a été surpris. Quelle rapidité. Quelle précision. Lui-même n'est pas certain d'avoir perçu tout l'amplitude du mouvement de son acolyte, si fluide et efficace. Néanmoins, autant il n'apprécie pas la part d'improvisation qui s'est jouée sous ses yeux, mécontent de ne pas avoir été consulté quant à la prise d'une telle action, autant il est assez satisfait de la sueur qui perle subtilement sur la tempe gauche de Frappefer.

Une gorgée.

Comment vont les affaires, Monsieur?

Monsieur?

Vous pouvez cesser de fixer cette lame, elle ne peut faire de mal à personne là où elle est rangée. Et puis, vous en avez vu d'autre, des lames, j'imagine.
…Oui.
Alors, comment vont les affaires?
…Bien…
C'est intéressant ça, parce que c'est justement de ça dont je viens vous parler.
Qu'est-ce que vous cherchez en particulier?
Plaît-il?
Vous m'cherchez un poux là. C'est quoi?

Il a repris un peu de sa contenance, Frappefer. Edwin prend une nouvelle gorgée, se racle la gorge.

Vous êtes sous soupçon, vous vous en doutez bien, n'est-ce pas?
Ouais.
Et vous avez sûrement déjà entendu parler de l'enquête que je mène sur l'île, n'est-ce pas?
Ouais.
Vous devez certainement, alors, avoir une bonne amie du nom de Madame Flocon, si je n'm'abuse?

Éclat dans ses yeux. Il se sait piégé. Il comprend un peu mieux pourquoi ils sont ici. Il voit un peu mieux qu'ils ont remonté une piste et que leurs soupçons sont fondés. Mais Edwin ne veut pas en arrêter là, il veut tout lui faire cracher.

J'ai capturé Madame Flocon, une élégante révolutionnaire, si je puis dire. Il se trouve qu'elle redistribue des fonds à des artisans du pays qui travailleraient conjointement avec la Révolution.

Ça sonne une cloche?
Pas du tout. J'vois pas d'quoi vous voulez parler.
Vous possédez une usine de métallurgie près des mines de Boyettes, non?

N'ai-je pas raison?
…Ouais.

Silence de mort. Seuls les pas de Kuroda dans la demeure de Frappefer sont audibles. Un court instant, les yeux des deux hommes se posent simultanément sur le sabre court planté pratiquement au centre de la table. Leurs yeux se croisent, se défient, ceux de Frappefer se détournent. Il y a une arme, là, au centre de la table.

Une arme.

Deux personnes.

…Je prendrais bien un autre verre de votre excellente bière.


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Il se lève, lentement, d'une façon bien trop calculée pour ne pas être celle d'un homme qui calcule ses chances de survie. Son regard reste inébranlable. Même s'il se lève, même s'il se tourne vers la cuisine derrière lui, il prend un temps qui parait insupportable pour garder un œil sur le sabre court enfoncé dans le bois de la table. Dans ses yeux, il a la flamme de celui qui, selon Edwin, ne réfléchit plus que par l'instinct. Il sait qu'il a fait mouche en mentionnant le nom de Madame Flocon, mais il cherche encore à obtenir toutes les informations dont il a besoin du forgeron. Il y a un aspect chez Frappefer qui, néanmoins, dérange quelque peu Morneplume; une fierté, ou plutôt un honneur refoulé, quelque chose qui rend inaccessible l'esprit de Frappefer, qui blinde sa volonté derrière un écran bien solide.

Le forgeron sert la bière alors que soudain, un grincement, imperceptible, s'élève du plafond. Un grincement trop malvenu dans le silence poignant de la maison pour être normal. Regard vers Kuroda, il a entendu. Hochements de têtes, il s'éclipse. Edwin se surprend lui-même à être tendu, ses muscles déjà près à l'action. Il sent un danger sur lequel il n'arrive pas à mettre de nom. Peut-être est-ce dû à la solide assurance de son interlocuteur… Lentement, subtilement, alors que Frappefer ramène un pichet de bière Boréaline, Edwin fait mine de se gratter tandis qu'il détache la fermeture du holster sous sa veste. Dialogue de statues, aucun des deux n'osent broncher.

Tenez.
Merci.
Nouvelle gorgée.
Donc, puis-je me permettre une nouvelle question, monsieur Frappefer?
Non.
À vrai dire c'était une simple politesse, un tel choix n'est pas de votre ressort. Dites-moi, alors, quelle a été la production majoritaire de votre usine aux mines de Boyette, récemment?

Monsieur Frappefer?
Des casseroles de fonte.
Hm, nous savons tous les deux que c'est totalement faux, monsieur Ferdinand.

Il se crispe, subtilement, tellement que si ce n'avait été d'Edwin, aucun changement n'aurait été perceptible chez le forgeron. Le Sergent, lui, voit en cette gestuelle une faille dans laquelle il s'engouffre au grand galop. Il avale une grande gorgée de bière, puis tire d'une poche le document rédigé par Madame Flocon. Il le déplie en broyant de son regard d'acier l'homme de métier, l'entravant psychologiquement de ses seuls iris.

Ici j'ai une liste des artisans du royaume que finançait Madame Flocon en procédant à la redistribution des fonds fournis par le mécène Dwight Givrepoigne.
Et pis?
Votre nom est en tête de liste, Ferdinand Frappefer. Il est fait mention, d'ailleurs, que votre usine serait bien loin de produire des instruments de cuisine.
Ah bon. Mentionne-t-il sur un air de défi, contre-attaquant Morneplume de ses yeux de nordique courroucé.
Je ne vous l'fait pas dire. Monsieur Frappefer, vous êtes, selon mes preuves, un fournisseur d'armes pour la Révolution, et par le même fait, un traître.  
Et qu'est-ce que vous croyez pouvoir faire? M'arrêter?
C'était justement dans mes plans.

La suite se déroule très rapidement, la tension explosant soudain entre Morneplume et Frappefer. L'un bouge, l'autre réagit. L'un grogne, l'autre inspire profondément.  Mouvements secs, puissants.

Éclair.

La table a foutu le camp, renversée par le forgeron trapu. Ce dernier s'est jeté sur Morneplume, appuyant la lame de Kuroda contre la gorge du Sergent. Avec le calme d'un fauve, Edwin reste assit, parangon de quiétude face au danger. Dans sa main, un six-coups qu'il braque contre le cœur de Frappefer, ultimatum silencieux au bout d'un canon.

Ferdinand Frappefer, vous êtes en état d'arrestation par décret de la Marine d'Élite pour partisannerie illégale, financement d'organisation criminelle ainsi que voix de faits envers un représentant de la Justice. Le bâtiment est cerné par mes hommes, vous pouvez choisir de vous rendre maintenant ou de mourir.
Z'avez oublié un chef d'accusation, Sergent.
Ah bon.
Hébergement illégal de soldats révolutionnaires.
Hm… Voilà qui est assez fâcheux.
 


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Fracas à l'étage. Chuintements de lame, grognements, cris, injures, gargouillis noyés. Kuroda est tombé sur l'engeance que devait héberger Frappefer. Les sourcils d'Edwin se fronce à cette pensée, combien peuvent-ils être, là-haut? Il se surprend même à sentir une goutte de sueur descendre négligemment le long de sa tempe. Ça y est, les choses ne tourne définitivement pas rond. Il appuie de plus belle son pistolet contre le torse du forgeron qui, à son tour, raffermit sa prise sur le sabre court. La respiration du Sergent, impassible, se fait difficile. La contenance du révolutionnaire s'épuise.

Le bâtiment est déjà encerclé par la Marine d'Élite, Frappefer, vous courrez à votre perte. Cette lutte est perdue d'avance, laissez donc tomber.
Va t'faire foutre, Morneplume.
Votre vie ne tient qu'à moi, Frappefer. Si vous vous avérez coopératif, je pourrais reconsidérer la mort immédiate que je pensais vous faire subir. Quelques informations, et votre vie pourrait être sauve. On vous offrirait un procès juste, un bon avocat. Peut-être même que l'argument de votre lignage ancestral vous sauverait la mise…
Le problème, dans tout ça, Morneplume, c'est que ta vie aussi ne tient qu'à moi.

Sa voix s'est ébréchée lorsqu'il a parlé, chose qu'Edwin ne manque pas de réaliser, une lueur mesquine animant momentanément son regard vide. Il se redresse légèrement, défiant la lame pouvant lui ouvrir la gorge à chaque instant, testant les limites du forgeron qui semble déchiré entre colère et désespoir. Aux yeux d'Edwin, il est un roc, un glacier du Nord qu'il a peine à fissurer. Le stress se fait sentir chez les deux hommes. Chez Edwin de par son cœur battant la chamade malgré lui, chez Frappefer par l'once de doute qui éclaire son regard. Et les sons de coups de sabre, de meubles fracassés et d'hommes fauchés à l'étage n'aident en rien à calmer la tension.

Allons Frappefer, vous êtes plus brillant que ça. À vous seul vous avez la possibilité d'éviter un très grand nombre de morts inutiles. Agissez comme un homme responsable, faites cesser ce carnage, et dites-moi de qui d'autre viennent les fonds qui financent cette production d'armes.

Il ploie à vu d'œil, ce brave homme du Nord. Il ne peut résister aux paroles sèches mais ô combien convaincantes de Morneplume. Son front se plisse, couvert de sueur, ses yeux fuient les iris insistants d'Edwin, sa prise sur la lame se relâche de plus belle. Il passe nerveusement sa langue sur ses lèvres, ne sachant quoi faire ou quoi répondre. Il est enfin à la merci du Sergent, près à enfin révéler un des chaînons manquants de cette enquê-

BANG!

Un coup de feu, à l'étage. Résonnant si fort dans la maison qu'il met un terme aux bruits de combats qui persistaient. S'en suit un corps qui s'effondre et qui déboule violemment les escaliers adjacents à la pièce où se trouvent Edwin et le forgeron. Une balle ayant percé son armure au niveau de l'abdomen, Kuroda termine sa course en s'écrasant lourdement contre le sol de la maison, tenant encore en main son sabre couvert de sang. Frappefer sursaute, tente de raffermir sa prise sur son sabre. Trop tard. Après de nombreuses années à jouer les traqueurs dans l'Élite, Edwin a bien appris à reconnaître le moment propice pour se tirer d'une mauvaise situation. Si bien que l'instant où le forgeron détourne le regard pour remarquer le Sergent Kuroda, Morneplume en profite plutôt pour lui asséner un véhément coup de genoux au sternum. Il s'écroule au sol, ses poumons brusquement vidés de leur oxygène, projeté vers l'arrière par la puissance du choc.

L'instant d'après, Morneplume est déjà debout, abattant avec flegme son pied sur la rotule du forgeron pris au dépourvu. Craquement, hurlement.

Sans plus de considération pour son hôte en bien mauvais état, Edwin fait volte face, fauve se sachant en danger. À terre, Shintaro se relève difficilement, une main cramponnée à sa blessure, sa respiration sifflant à travers son masque. Edwin traverse la pièce à grandes enjambées, ne portant aucun regard à son allié. Non, il n'a pas le temps pour ça, des pas déboulant l'escalier le lui confirme bien.

Combien? demande-t-il à Kuroda, son regard d'acier braqué vers les marches.
Beaucoup… répond-il en un souffle, haletant sous son chapeau et sa cagoule.

Réponse tout à fait satisfaisante pour Edwin qui n'a pas besoin de plus pour lever son six-coups vers l'escalier et vider son chargeur dans la poitrine du premier révolutionnaire venu; un vieux barbu, probablement un mineur, vêtu d'une parka hivernale et armé d'une hache. Cette symphonie de tirs est bien suffisante pour calmer les ardeurs des autres hommes à l'étage qui, semble-t-il, freinent leur course au tournant de l'escalier, craignant de subir le même sort que leur compatriote. Ce temps mort est bien suffisant pour qu'une vingtaine d'hommes de l'Élite fassent irruption par l'entrée principale, le coriace Caporal Fitzgerald écrasant la porte d'un coup d'épaule éléphantesque.

Ils se répartissent dans la pièce sous les yeux d'Edwin qui, affairé à recharger son fusil, s'appuie contre le mur en angle mort de l'escalier. Avec flegme, dans un silence pratiquement religieux, ils prennent couverture derrière tables, chaises et murs, braquant ostensiblement leurs armes à feu vers l'escalier. Rapidité. Efficacité. Prudence. Puissance. Élite.

Silence de plomb sur la maisonnée. Edwin range son pistolet dans son holster, après avoir rempli le barillet de nouveaux projectiles. À part lui, plus rien ne bouge dans le bâtiment. On ne perçoit à peine que les hennissements éparses des chevaux, à l'extérieur, ainsi que la respiration sifflante d'un Ferdinand Frappefer qu'on a tout juste bâillonné. Kuroda, deux de ses hommes l'ont saisi et l'on traîné derrière la table renversée, bouclier face aux possibles tireurs venant de l'escalier. Par les carreaux de fenêtres, on distingue dans la nuit naissante la silhouette des autres soldats d'Élite qui patientent, l'arme au poing, entourant soigneusement la maison.

L'ennemi est en haut, voilà ce qu'ils savent. Peu importe le nombre ou le type, il est en haut.

Et il ne s'en tirera pas vivant.
 


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Kshhh…

L'allumette s'embrase et crève le silence tendu du bâtiment. La flamme s'attache à une cigarette prise entre les lèvres minces d'Edwin. Inspiration. Fumée.

Bon… Dites moi, messieurs.

Il hausse le ton, Morneplume, visiblement impatienté, histoire d'être entendu de tous les habitants du bâtiment. Voilà bien une demi-heure qu'ils patientent tous en silence, attendant inlassablement qu'un camp comme l'autre se décide à agir. Finalement, c'est Edwin qui part le bal, impatient comme il peut l'être.

On ne va pas s'éterniser ici toute la nuit, vous êtes en état d'arrestation et vous le savez. Je vous demanderais de bien vouloir coopérer et de descendre en laissant vos armes à l'étage.
Va chier, Morneplume!
Bon… Eh bien messieurs, je vous sommerais de bien vouloir esquiver cette grenade.

Argument de poids, pense-t-il, en balançant son six-coups au sommet de l'escalier. Qui oserait sincèrement rester dans le rayon d'explosion d'un tel objet? Et qui plus est, qui voudrait courir le risque de ne pas accorder crédit aux paroles de Morneplume? Personne, évidemment. C'est donc lorsque Edwin lance son flingue au sommet des marches que les révolutionnaires y étant postés se mettent en branle, courant à travers les couloirs de l'étage pour échapper à la déflagration. Le plafond craque lorsqu'ils se mettent tous à courir, faisant se dresser toute l'unité d'Élite prostrée derrière Morneplume.
Feu!

Dix armes se braquent vers le plafond. Dix armes libèrent le tonnerre.

BANG!  BANG!   BANG!   BANG!   BANG!   BANG!   BANG!   BANG!   BANG!   BANG!   BANG!  

Un plafond comme un gruyère. À nouveau le silence.  




La neige tombe à nouveau dans la nuit de Boréa. Nonchalamment, Edwin tient son cheval par la bride en vissant son chapeau sur son crâne, sa cigarette, pratiquement consumée, au bord des lèvres. Derrière lui, la maison de Frappefer brûle de mille feux, gigantesque torche illuminant la froide nuit Boréaline. Le Sergent se dirige lentement vers ses hommes, qui sont affairés à aider Kuroda à monter sur son étalon.    

Fhhh… Vous commencez bien mal, Kuroda.
…Une égratignure. Il dit ça en haletant, peinant à se tenir en selle.
Réplique clichée, quoique tout à fait appropriée. Je n'ai pas compté les cadavres à l'étage, mais vous avez fait une bonne partie du travail, Sergent.
...Pourquoi... Pourquoi vous avez tout fait cramer?
Pour passer un message. Que ceux qui auraient la mauvaise idée de venir dans les environs comprennent ce qui est arrivé à leur compatriote. On appelle ça une guerre de terreur, pour décourager ou effrayer les Gris. Vous retournez à Lavallière, vous n'êtes pas en mesure de continuer.
Mais!
Je vous rappelle que malgré le fait que nous soyons du même grade, ma responsabilité par rapport à cette enquête ainsi que mon ancienneté vénérable me permettent une autorité indiscutable sur vous, Kuroda. Bonne convalescence, je garderai la responsabilité de vos hommes.

Il se tait, courroucé par les paroles d'Edwin qui, de marbre, savoure la dernière bouffée de sa cigarette. Morneplume se détourne, Kuroda file à cheval en compagnie d'un de ses caporaux. Grondement des flammes, silence sur la neige. Edwin s'approche de ses hommes, aucun d'eux ne présentant ne serait-ce qu'un signe de fatigue. Bâillonné, tenu en joue par le caporal Fitzgerald, Ferdinand Frappefer est fiévreux, ayant abandonné toute résistance, paralysé par la douleur de son genou fracturé. Edwin jette un instant un regard à la jambe drôlement pliée du forgeron, un regard froid et dénué de pitié.

Alors Frappefer…

On lui retire son bâillon. Il tousse, se penche vers l'avant et crache dans la neige, gémissant légèrement. Il est une épave, un homme du Nord brisé et vaincu. Devant lui se consument les ruines de son existence, sa Cause, sa demeure, des années de labeur… Rien qui puisse sincèrement affecter Edwin, plutôt intéressé par ce qu'il n'a toujours pas pu soutirer à Frappefer.

Qui est celui qui tire les ficelles, Frappefer?

Il passe directement aux grosses questions, sans attendre. La nuit tombée, le froid venu, l'impatience se fait sentir pour tout le monde, même chez le grand et mince Sergent. Le forgeron déchu, lui, tangue difficilement, probablement toujours sonné par la douleur horrible lui sciant la jambe. C'est à peine, si, aux yeux d'Edwin, il semble conscient. Quoi qu'il en soit, l'impassible Morneplume n'a plus de temps à perdre. Il dégage un pan de sa veste, ouvre son holster et en tire son six-coups. Clic. Cran de sureté relevé.

Parlez, Ferdinand Frappefer.

Il halète, cette épave de forgeron autrefois fier, suant et souffrant piteusement dans la neige de Boréa. Il relève un regard injecté de sang vers Edwin, un sourire dément animant son visage haineux et déchiré. Un filet d'écume coule sur le coin de sa bouche béante, il est fou, il n'est plus homme, il est déchet. Un pauvre idéaliste qui a vu son univers s'enflammer, qui a vu ceux qu'il cachait se faire descendre sans considération. Il n'est plus rien. Il inspire, puis hurle, comme on ne l'en aurait jamais cru capable.

CREVEZ TOUS! CHIENS SANS CŒURS NI VALEURS! LA CAUSE PERDURERA! LA LIBERTÉ PERDURERA! NOS DROITS PRÉVAUDRONT SUR CEUX DE VOTRE STUPIDE DICTA-
BANG!


Une volute de fumée s'élève du canon de l'arme d'Edwin. Il soupire, le range avec dépit, sans un regard vers Frappefer qui s'écroule à la renverse dans la neige.

C'est terminé.

Silence. Seul le brasier crépite toujours dans la nuit, mêlant son épaisse fumée aux nuages expirés par les hommes de l'Élite. Avec morgue, ils regardent un temps les flammes, ignorant la dépouille. Edwin, lui, fixe le ciel, insondable. Inaudible retour sur le combat, pause momentanée avant le retour à la tempête.

Messieurs, partons. Les mines de Boyettes nous attendent.



Dernière édition par Edwin Morneplume le Mar 7 Oct 2014 - 6:10, édité 1 fois
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Pulupulu…

Morneplume…
Colonel Grey.
Je tiens à vous dire que vous êtes un être haïssable doublé d'un homme machiavélique.
Ces déclarations ne seront pas retenues contre vous, Colonel, vous avez droit à votre opinion. J'en déduis que les renforts que j'ai demandé récemment au Qg de South Blue sont arrivés à Lavallières?
Vous êtes complètement cinglé d'avoir fait envoyer des renforts sans mon accord! Je vous rappelle que je suis le RESPONSABLE de cette base!
Laissez tomber, Colonel, vous n'avez pas les qualificatifs nécessaires pour gérer cette situation qui, nous devons l'avouer, vous dépasse amplement. Je serais ravis d'obtenir le plus tôt possible l'aide du Sergent d'Élite…
Starn, Kaze Starn…
Oui voilà. Qu'il se mette en route. D'ailleurs, le Sergent Kaltershaft est touché au combat. Il revient vers Lavallières à cheval accompagné par un de ses caporaux.
Vous jouez à un jeu dangereux, Morneplume! Vos manques de respect et votre pédanterie ne vous apporteront rien de bon!
Et tâcher de vous démarquer au même niveau que l'Élite ne se soldera que par un échec de votre part, Colonel. Laissez les vrais représentant de la Justice accomplir leur mission.

Bonne fin de soirée, Colonel Earl Grey.
Je vous estimais plus que ça, Morneplume.
Et vous êtes fabuleux dans le service du thé, Colonel, dommage que l'on ne puisse en dire autant sur vos capacités de gestion de crise.

Clac!

Sergent Morneplume? Vous avez parlé au Colonel?
Un homme charmant, cela va s'en dire.
Et puis?
Les vrais renforts sont là.
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Revenons, si vous le permettez, de multiples heures auparavant. Episode flou, s’il en est, l’escarmouche de chez Frappefer est loin d’être superflue dans cet amas de trahisons à l’encontre de la Marine. Replaçons le contexte quelques instants, si vous le voulez bien.

Shintaro vient de planter son sabre court dans la table, de manière à déstabiliser le forgeron. Même Morneplume est surpris par cette initiative, mais il fait avec. Lorsque leur hôte sert une nouvelle bière à Edwin, un bruit se fait entendre au-dessus de leur tête. Regard vers Kuroda, il a entendu. Hochements de tête, il s’éclipse.

Et pour le moment, vous ne savez rien. Admettez-le : il vous manque le point de vue d’un acteur majeur de cet épisode. Et ce que vous croyez savoir pour le moment est faux.

Un bruit, donc. Et ce bruit n’a pas lieu d’être dans ce silence. Le Sergent Kuroda s’engouffre dans l’escalier, montant les marches une à une dans le plus grand silence. Aucun ordre n’a été passé. Si quelqu’un est en haut, il n’a aucune certitude que ses mouvements ont été entendus en bas.

Plus que quelques marches avant d’arriver sur le palier. Le Sergent Morneplume continue son interrogatoire. L’éventuel intrus de l’étage s’en rassure certainement. Dernière marche, palier. Un tout petit carré de parquet, avec une porte à gauche et une en face. Shintaro se remémore la forme du bâtiment : il se trouve actuellement très proche d’un coin de la structure. Par déduction, la porte en face doit donner sur une pièce de petite taille, un genre de débarras, ou autre. Et celle de gauche permet d’accéder à une salle située tout à fait au-dessus de l’interrogatoire du rez-de-chaussée.

Oreille collée à la porte du supposé débarras. Rien. Main sur la poignée, lente ouverture, bouclier paré. Un débarras, ridiculement petit. Léger coup d’œil, rien. Balais, serpillères, ustensiles divers et variés, étagères vides dans l’ensemble. Rien d’inhabituel, et pas la place d’y cacher qui que ce soit.

Shintaro entame le même processus pour la seconde porte. Ici, son ouïe lui révèle la présence de nombreuses personnes. Il se met en garde, place sa main sur la poignée, et ouvre le battant à la volée.

Son regard se pose immédiatement sur le centre de la pièce, sur une table illuminée par des bougies posées à même le bois. Huit hommes y sont accoudés, cartes en main, et semblent avoir interrompu leur partie pour jeter un œil au nouvel arrivant. Cinq autres sont assis à côté de l’âtre flamboyant, trois se servent à boire à une sorte de mini bar, et quatre sont affalés, somnolents, sur des canapés. Tous sont calmes, et s’intéressent à Shintaro sans surprise, comme s’il était commun de voir quelqu’un entrer comme cela.

Bug littéral de l’assemblée. Le sergent garde son air ahuri, ne comprenant rien à la situation. Personne ne bouge. Le temps s’écoule avec une lenteur impressionnante. Finalement, il referme lentement la porte. Sans lâcher la poignée, il se perd dans ses pensées. Quel est ce bordel ? Pourquoi cette ambiance de bar au-dessus de la demeure du forgeron ? La situation est particulièrement louche. Peu à peu, certains éléments lui apparaissent.

Au bar, aucune bouteille et des verres vides. A la table de poker, aucun jeton ou monnaie susceptible de jouer le rôle d’une mise. Tous n’avaient pas le même nombre de cartes, certains n’avaient qu’une fesse posée sur leur chaise. Autour de l’âtre, les hommes semblaient mal installés. Et sur les canapés, Shintaro se remémora les paupières closes qui clignaient, comme lorsqu’on ferme les yeux sans dormir.

En bas, un bruit de table renversée. Quelques échanges, et une phrase ressort, plus importante que les autres.

Hébergement illégal de soldats révolutionnaires.

Des armes. Beaucoup d’armes étaient présentes dans cette pièce, amplifiant encore le côté inapproprié de la scène. Cela ne lui avait pas sauté aux yeux, mais c’était maintenant une évidence.

Un pas en arrière, bouclier armé au bras gauche, il enfonce la porte violemment, l’envoyant démolir la table de jeu. Les hommes de la pièce ne sont désormais plus à leur emplacement initial, ils ont les armes en main, prêts à se battre. Ces hommes sont des révolutionnaires.

Le cerveau est un outil extrêmement puissant, capable de décomposer les actions lorsqu’on l’exerce à la tâche. La relativité du temps, notion propre à la perception humaine, permet de réagir rapidement lors d’une action rapide. C’est cet artefact temporel qui fait qu’un combat de quelques instants peut paraître incroyablement long.

Et ce combat-là se déroula incroyablement lentement.

Un cri. « Appelle Danton ! ». Un homme se précipite sur un escargophone. Les révolutionnaires se lancent à l’assaut. Parades, coups, Shintaro n’épargne pas ses adversaires. Vingt hommes, c’est bien trop pour jouer au bon samaritain, surtout quand leur niveau est totalement inconnu. Mais après quelques passes, il se rend compte qu’ils ne feront pas le poids.

Danton ? Il réagit à peine au premier cri. L’analyse des mots est plus lente que les réflexes de combat. Cet homme parlait-il de Fidel Danton, celui qui a aidé à la destruction du Teiko ?

Pulupulupulu.

Shintaro continue son affrontement, non sans prêter une oreille à la communication qui s’établi.

Mmh ?
Fidel, on a un prob…
NE DONNE PAS MON NOM IDIOT !

*Clac*

L’interlocuteur a raccroché. Cette voix, ce nom. Fidel Danton, commandant des Hérauts de l’Aurore, est impliqué jusqu’aux veines dans la révolution, c’est une évidence. Edwin Morneplume ne le sait certainement pas encore. C’est cela qu’il cherche tant.

Fidel Danton. Celui qui n’a pas aidé le Teiko, celui qui a entraîné leur chute. La mort de nombreux Gardes Impériaux. L’emprisonnement de Nayami. Nayami…

Nayami…

Pars. Deviens plus fort. Et reviens nous libérer.

Nayami a besoin d’Alrahyr, plus que jamais. Il ne l’a toujours pas libérée. Il doit retourner à la caserne au plus vite, il doit s’émanciper de Morneplume. Il doit s’extraire de cette mission d’une manière ou d’une autre. Il est au beau milieu d’un combat, une opportunité se présente : sérieusement blessé, il sera envoyé en convalescence à la caserne et pourra se débrouiller pour agir. Mais sérieusement blessé, il ne pourra pas agir correctement.

Il se colle à l’une de ses victimes, engorgeant son armure de sang. Puis il se projette hors de la pièce, sur le palier. Il aperçoit l’un des révolutionnaires sortir un fusil, le braquer sur lui, et tirer. D’un rapide mouvement du bouclier, Shintaro se protège de l’impact.

BANG !

Il dévale les marches, indemne. Arrivé en bas de l’escalier, il voit la mauvaise situation de son coéquipier, qui profite des événements pour prendre le dessus sur le forgeron. Rapidement, Edwin se dresse à ses côtés.

Combien ?
Beaucoup…

Le jeune homme simule la blessure. Il le fait très bien, car il a déjà souvent été blessé de manière bien plus grave que ce qu’il fait croire cette fois-ci.

La suite, vous la connaissez.

---

Une fois l’escarmouche terminée, le sergent est sommé de rentrer à Lavallière pour s’y faire soigner, accompagné de son navigateur pour l’aider. Tous croient à sa blessure, personne n’est dans la confidence. Il donne rapidement ses ordres à Mura Yasuaka, son premier caporal, pour qu’il prenne le contrôle de l’unité.

La route pour Lavallière est longue.


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Boréa.

Enfin…

Le voyage avait duré sept jours, tel qu’établis au QG de South Blue par la commandante Thémis.  Cette interminable semaine s’était transformée  en entraînement perpétuel, dont le seul objectif était l’arrivée sur l’île. Le simple désir de servir  la noble cause de la Justice justifiait tous les efforts fournis.  Malgré une température en dégringolade, Kaze s’était tenu sur le pont jour après jour, fournissant toujours plus d’ardeur à l’entraînement… Et cela avait porté ses fruits.  Son corps rachitique avait réussi à retrouver un état avoisinant la normalité et il était prêt, du moins au mieux de ses capacités, à combattre les impies révolutionnaires.

L’équipage se constituait d’une douzaine de marins, de trente marines prêts à rejoindre l’effort de guerre contre les révolutionnaires et notre sergent d’élite. Une section de combat lui avait été attribuée pour aider le manque d’effectif de ce fameux Edwin ! Il avait beau partager le même grade,  son collègue serait probablement plus apte à diriger les troupes. Cet homme maîtrisait la situation de l’île, du moins au premier regard, et aux vues de ses méthodes il utiliserait à merveille ces nouveaux moyens de coercition. Kaze, lui, ne se préoccupait pas de toutes ces techniques de répressions. Non pas qu’il était bête, bien au contraire, mais seul le résultat comptait vraiment. Son collègue se chargerait de planifier, et lui d’agir avec sa collaboration. Cela serait suffisant pour cette fois.

L’arrivée au port de Lavallière s’était fait sans accro. Malgré le froid mordant qui avait assaillis les marines, la chaleur humaine que dégageait cette île réchauffait le cœur des hommes.

Dommage qu’elle abrite en son cœur à elle un réseau de traîtres et de vendus à une cause perdue d’avance.

Ce genre de réflexions était inévitable chez Kaze. Le mépris avait pris le dessus sur la haine et la colère qu’il éprouvait généralement envers les hors-la-loi. L’idée d’un peuple manipulé par des escrocs révolutionnaires lui avait donné le haut-le-cœur. Ce fut sur cette pensée que le navire arriva à destination. Les membres de l’équipage, peut-être par soucis d’efficacité ou par besoin irrépressible d’espace, s’étaient tous précipités à l’extérieur du bateau. L’équipement déchargé en un temps record, avait permis au blondinet de descendre en dernier. Son corps ayant retrouvé une vigueur nouvelle, il abordait toutefois une canne couleur ébène. Désormais inutile, elle préservait une aura de faiblesse autour de ce personnage au long veston rouge qu’était l’officier d’élite. Seule une personne contentieuse serait amenée à découvrir la réalité, les autres n’y verraient que du feu. Ce jeu détournerait peut-être suffisamment l’attention de sa jolie surprise qu’il espérait utiliser. Bien sûr, ses fidèles pistolets étaient toujours plaqués contre lui, attendant leur retour avec impatience.
Pour l’instant, seule la visite au colonel Grey comptait puisqu’elle dicterait en quelque sorte ses prochains agissements. Un subalterne devait probablement attendre Kaze, sans que ce dernier ne l’aille remarqué, pour le conduire à son supérieur.

« Kaze Starn ? »

Voilà ! Je vais pouvoir me rendre au…

« Kaze Starn, je suis le colonel Earl Grey ! »

L’homme qui avait interrompu les pensées du sergent d’élite semblait être plus qu’un simple soldat, il s’agissait du colonel en personne!

« Bonjour Monsieur Grey, déclara Kaze encore surpris de cette intervention inattendue.

-J’ai pris la décision de venir vous accueillir moi-même et de ce que je vois vous avez emmené les renforts dont nous avions besoins.

-Oui, ces hommes sont prêts à servir pour la grande chasse aux sorcières de Boréa !

-Parfait, le Sergent Morneplume, aussi arrogant et mesquin soit-il, avait un minimum de raison lorsqu’il a réclamé des troupes supplémentaires. Vous allez maintenant devoir collaborer avec cet homme qui, je vous préviens, ne possède aucune conscience. Un de mes soldats vous guidera jusqu’à lui, à moins que le sergent ne vous trouve en premier. Du moins, je laisse cette histoire entre vos mains sergent Starn !

- Est-ce déjà tout Monsieur ?

- Oui vous partirez d’ici quelques minutes et lorsque vous aurez rencontré votre collègue, vous aurez de plus amples détails.

- Merci colonel !

-Hahaha, cracha  ironiquement Earl, vous me remercierez plus tard ! Dites-vous que l’obstacle le plus important de cette affaire n’est ni le froid ni les révolutionnaires, mais le sale caractère de Morneplume. Allez, je vous souhaite bonne chance, mon gars vous attends au bout du quai. »

Ces dernières paroles raisonnèrent dans le crâne de Kaze. Son coéquipier s’annonçait des plus intéressants.




    Lavallière.

    Durant tout le trajet, Shintaro a tout fait pour maintenir le voile sur la vérité auprès de son caporal, Chryses. Il lui a également fait comprendre qu’il ne désirait pas ébruiter le fait qu’il avait été blessé par des révolutionnaires. Question de réputation. Nul besoin d’en faire plus, Chryses a compris. Les deux hommes vont donc vers le Lame de Fond, la caravelle dans laquelle ils sont arrivés sur Boréa. Le jeune homme a choisi ce lieu pour s’y reposer.

    Lorsque Shintaro demande à son caporal de retourner auprès d’Edwin, ce dernier ne s’en étonne pas. Il sait son supérieur tout à fait apte à prendre soin de lui tout seul, et notamment à recoudre sa plaie.

    Mais il n’y a aucune plaie, en réalité. Et lorsqu’il est certain que Chryses est bien parti de la ville, il commence à prendre les choses en main.

    Nayami. Bastion de son espoir, forteresse de ses souvenirs. C’est son premier objectif. Pour cela, il ne doit plus être Shintaro Kuroda, car Shintaro est connu et n’est pas censé être là. Enfin, pas officiellement. Seuls Edwin et l’unité anti révolutionnaires est au courant de sa prétendue blessure. Pour un temps, il doit donc redevenir Alrahyr Kaltershaft. Il se dévêt donc de ses atours de la Marine pour enfiler des vêtements communs, sombres, et pioche dans la petite armurerie du navire pour s’équiper de divers couteaux.

    Et la cagoule. Il la retire. Aussi étrange que cela puisse paraître, pour passer incognito, il doit montrer son visage. Car « passer incognito » désigne ici le fait d’apparaître comme Alrahyr, et non pas comme Shintaro. Le Sergent d’Elite porte une cagoule, le rebelle de Boréa n’en porte pas. C’est aussi simple que cela.

    Puis il jette un œil à son sabre long. Cette pièce de forge impeccablement ouvragée, il ne peut s’en séparer. Après tout, personne ne reconnaîtra qu’il s’agit de l’arme de Shintaro Kuroda. Et il aime bien l’utiliser. C’est de l’Acier Kaltershaft, après tout !

    C’est la fin d’après-midi. Des bruits se font entendre au dehors. Alrahyr se faufile sur le pont, prenant garde à ne pas être remarqué, afin d’observer ce qu’il se passe.

    Une caravelle vient d’arriver au port. Une troupe d’Elite en descend, accueillie par le Colonel Earl Grey. Lui et le Sergent de l’unité discutent, puis se quittent. Edwin avait dû faire appel à des renforts supplémentaires.

    Mais qu’importe. Une fois la nuit tombée, le jeune homme pourra passer à l’action.

    Sauver Nayami. Faire payer à Earl Grey les blessures infligées à son amie. Trouver Fidel Danton. Lui faire cracher des noms. Et ensuite…

    Ensuite ? On verra.


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    La Nuit.

    Alrahyr n’a pas encore eu l’occasion depuis son retour sur Boréa de revoir son amie. Mais désormais, il est temps de libérer Nayami. Pars, deviens plus fort, et reviens nous libérer, avait-elle dit. Cette supplication est sur le point de se réaliser. Et rien ni personne ne pourra s’interposer entre le jeune homme et son but.

    Il descend donc du navire, furtivement, se faufilant entre les baraques du port, frêles cabanes servant de docks pour les caravelles amarrées là. Toute cette partie de la ville est entièrement militarisée et interdite d’accès aux civils : nul passage n’est à prévoir, si ce n’est une patrouille de temps à autre. La nuit, le port est calme.

    La Nuit. Mais pas cette nuit. Cette nuit, un homme traverse les rues, navigant entre les ombres. Cet homme est habillé sombrement, légèrement. Ses mouvements sont souples et assurés, il se dirige inéluctablement vers son objectif. Et pour cela, vers la prison.

    Car il est déjà venu ici, brièvement. Et lors de son premier passage, il a pris soin de mémoriser certains détails. Comme le fait que la prison est un bâtiment séparé de la caserne principale, si on exclue un long couloir d’une cinquantaine de mètres permettant d’assurer la liaison entre les deux constructions, notamment lorsque les officiers ne veulent pas se mouiller en cas de mauvais temps. Tous des couards, ces Marines. Si peu de courage dans leur mentalité, si différente de celle de l’Elite.

    Car, avec le temps, Alrahyr – ou Shintaro, c’est vous qui voyez – commence à apprécier ceux avec qui il travaille, son équipage, ses caporaux. Le job de la Marine d’Elite n’est pas pour lui déplaire, même s’il présente un inconvénient majeur : il sert les intérêts du Gouvernement Mondial, lui-même dirigé implicitement par une noblesse trop ancienne à son goût.

    Tout cela, Alrahyr a pu l’apprendre lors de sa formation au BAN, grâce à son statut de gradé qui lui donnait accès à un peu de lecture sur le monde d’aujourd’hui.

    Et cela ne lui a pas plu.

    Et cela a radicalement changé sa manière de penser.

    Et maintenant qu’il sait que le Teiko était une erreur, il sait également vers quoi se diriger.

    Mais d’abord, il faut sauver Nayami, encore détenue dans la prison, désormais en vue. Etant donnée la localisation de ce centre de détention – en plein milieu d’une zone exclusivement militaire – il y a très peu de protection. Quelques gardes, histoire de satisfaire aux normes officielles de la Marine.

    Autrement dit, un jeu d’enfant pour quelqu’un qui vient juste de bénéficier d’un entraînement avancé de l’Elite. Et également une occasion de faire renaître Alrahyr Kaltershaft pour semer la pagaille. Le jeune homme a eu le temps d’y réfléchir toute l’après-midi, et l’idée de laisser la trace de son passage lui a extrêmement plu. Une petite marque du Teiko par-ci, une autre par-là, et le Colonel Earl Grey allait être comblé.

    Une belle opération en perspective.

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    [Merci d'avoir lu ! Suite pour Alrahyr : Pareil, mais Empire. Suite pour Edwin et Kaze : Justice ambigüe.]
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