Je n'étais jamais restée aussi longtemps sous ma forme papillon. En dépit du fait que tout se passait bien jusqu'à présent, je ne pouvais m'empêcher de me faire du souci. Je n'avais jamais entendu parlé d'un zoan qui était resté bloqué sous sa forme animale. Aucune menace pressante ne rodait autour de nous. Pourtant j'étais sur nerfs. Et les nerfs de papillon, croyez-moi, c'est du fragile. Je sursautais au moindre bruit, et par les chaussettes du Grand Djinn, qu'est-ce qu'il y en avait, du bruit !
On pourrait croire que le désert, c'est mort, mais c'était bien le contraire. Rien que le vent, qui en faisant glisser le sable d'une dune à l'autre, créait des symphonies lancinantes et encore plus irritantes par leur irrégularité. Le frottement des grains sur les rochers, le grésillement des insectes qui survivaient ici et là... Un désert n'était jamais vide que de présence humaine.
Sauf qu'en plus de toute la vie naturelle au désert, qu'il fut de sable ou de poussière, on rajoutait une bande de pillards sans aucune éducation.
Et ça, c'était ce qu'il y avait de pire !
Bruyants, puants et absolument sans aucune manière. Je veux dire, pourquoi tous les bandits semblent se faire un devoir d'être absolument dégoûtants de saleté et d'idiotie ? Je pouvais comprendre que se laver dans un désert n'était pas la chose la plus facile à faire. Mais de là à se sentir obligé de cracher, tousser, morver et pisser à grand vent dès qu'ils s'en sentaient l'humeur ? Et pourquoi se flatter de leur médiocre ouverture d'esprit ? Comme si c'était un signe de réussite dans la piraterie ? Ce qui était en plus totalement faux, si on en croyait l'histoire criminelle de notre monde. Shanks, Barbe-Blanche et Crocodile n'étaient pas des sages parmi les sages, mais ils savaient lire, écrire, compte et réfléchir. Sans s'arrêter sur le cas extrême de Nico Robin... un bon pirate, fut-il de mer ou de terre, ne pouvait pas se contenter de rire grassement à toutes les blagues vaseuses. Il suffisait encore de regarder le présent : les deux plus grands hors-la-loi d'aujourd'hui étaient Tahar Tahgel et Toji Arashiborei, deux ex-officiers supérieurs de la Marine, et toute révo que j'étais, je restais fille de Marines, et donc reconnaissait une valeur aux galons donnés...
C'était une bonne chose que je ne fusse pas autre chose qu'un papillon, parce que je pense que je les aurais déjà tous tués trois fois avant le lever du deuxième jour. Ma forme animale les protégeait de ma juste colère, mais ne m'épargnait pas d'avoir à endurer le flot continuel de leur bavasserie insipide.
Solomon et moi avions quitté Yuba quelques jours auparavant, accompagnés d'une demi-douzaine d'hommes de différents clans. Ils devaient agir en éclaireurs tout en nous guidant sur le chemin vers Syrdaha. Le but était de repérer les impies alors qu'ils quittaient ou revenaient vers la cité sacrée, et de trouver un moyen de se mêler à eux. Le comment ? Aucune idée. Nous avions convenus que l'improvisation serait le mieux.
Ce fut ainsi que nous prîmes en filature une petite bande d'une vingtaine de pouilleux, clairement en route pour un méfait quelconque. Vu leur armement et le soin – tout relatif – qu'ils prenaient dans leur déplacement, ce n'était pas difficile de comprendre qu'ils préparaient un coup. Cela s'avéra être l'attaque d'une caravane marchande de petite taille – à peine sept wagons et une grosse dizaine d'esclaves traînée derrière un chameau fatigué. Rien ne devrait présenter un défi incommensurable pour ces gredins. Avec le recul, je comprenais que si. Leur force n'était pas dans leur intelligence, mais bien dans leur nombre. Seuls les quelques chefs avaient une bonne vision des choses, et s'ils avaient eu des troupes un temps fut un peu plus dégourdies, nul doute qu'ils auraient mis la région à feu et à sang. Ainsi, ce convoi faisait l'office d'une prise de guerre de choix.
Bon, soyons honnête. Ce raid était pour eux d'une importance capitale. Ce n'était que des chariots de nourritures, ce qui expliquaient la relâche dans la défense assurée par juste cinq mercenaires qui ne m'inspiraient pas plus que ça – mais bon, à ce moment de ma vie, pas grand chose ne m'inspirait quoique ce fut. Cependant, sept fourgons de nourriture, quand on habitait une ruine au beau milieu d'un désert, ça valait bien des trésors. Mais ça, je ne le savais pas encore.
Un rapide conciliabule plus tard, nous passions à l'attaque. Je confiais Nova au bon soin d'un des guerriers des sables, pendant que je fonçais vers les esclaves. Solomon devait s'occuper des gardes, avec perte et fracas. Fracas surtout, mais c'était un domaine où il excellait, comme il me l'avait déjà prouvé. Nous prenions ainsi de court les brigands qui assistèrent donc à l'attaque héroïque de notre maître espion qui, seul contre cinq, prit possession d'un magot pas dégoûtant. Je profitai du chaos pour libérer les esclaves, détruisant à mains nues leur entraves de métal – mine de rien, le rokushiki, ça a du bon – et les adjoignant de déguerpir au plus tôt. Puis je pris ma forme papillon, pour venir me glisser dans la besace de mon ami, qui forcément allait devoir faire face aux gredins. Pour sûr, nous avions leur attention désormais. Enfin, Solomon. Le bonus dans tout ça restait que les innocents commerçants et leurs mercenaires gisaient inanimés dans le sable tassé de la piste par mes bons soins, inanimés et non morts comme l'auraient presque certainement voulu les voleurs.
De ma cachette, j'assistai à la sortie de nos cibles, encerclant Solomon, tentant de l'impressionner et de lui faire rendre son butin en échange de sa vie. Quelques baffes plus tard, mon lépreux préféré était admis dans la bande en tant que recrue, et nous, chariots, bandits, bandeletté et papillon confondus, faisions route vers Syrdaha.
Le voyage fut long, ennuyeux, bruyant – mais je l'avais déjà dit. Les nomades qui devaient nous suivre le faire avec une telle discrétion que même moi je ne pus les détecter. J'aurais pu profiter du froid de la nuit pour me glisser hors de la poche de Solomon pour venir à eux, mais justement, le froid m'engourdissait plus que nécessaire et je me retrouvais toujours à m'endormir. Une ou deux fois, Solomon m'écrasa dans son sommeil, en se retournant, et il comprit vite que ce n'était pas judicieux de ne pas poser son sac à côté de lui. Mes phéromones semblaient être capables de produire en lui les pires cauchemars possibles, car sous cette forme, j'avais une parfaite maîtrise de mes pouvoirs. Hé oui, j'étais papillon après tout.
On pourrait croire que le désert, c'est mort, mais c'était bien le contraire. Rien que le vent, qui en faisant glisser le sable d'une dune à l'autre, créait des symphonies lancinantes et encore plus irritantes par leur irrégularité. Le frottement des grains sur les rochers, le grésillement des insectes qui survivaient ici et là... Un désert n'était jamais vide que de présence humaine.
Sauf qu'en plus de toute la vie naturelle au désert, qu'il fut de sable ou de poussière, on rajoutait une bande de pillards sans aucune éducation.
Et ça, c'était ce qu'il y avait de pire !
Bruyants, puants et absolument sans aucune manière. Je veux dire, pourquoi tous les bandits semblent se faire un devoir d'être absolument dégoûtants de saleté et d'idiotie ? Je pouvais comprendre que se laver dans un désert n'était pas la chose la plus facile à faire. Mais de là à se sentir obligé de cracher, tousser, morver et pisser à grand vent dès qu'ils s'en sentaient l'humeur ? Et pourquoi se flatter de leur médiocre ouverture d'esprit ? Comme si c'était un signe de réussite dans la piraterie ? Ce qui était en plus totalement faux, si on en croyait l'histoire criminelle de notre monde. Shanks, Barbe-Blanche et Crocodile n'étaient pas des sages parmi les sages, mais ils savaient lire, écrire, compte et réfléchir. Sans s'arrêter sur le cas extrême de Nico Robin... un bon pirate, fut-il de mer ou de terre, ne pouvait pas se contenter de rire grassement à toutes les blagues vaseuses. Il suffisait encore de regarder le présent : les deux plus grands hors-la-loi d'aujourd'hui étaient Tahar Tahgel et Toji Arashiborei, deux ex-officiers supérieurs de la Marine, et toute révo que j'étais, je restais fille de Marines, et donc reconnaissait une valeur aux galons donnés...
C'était une bonne chose que je ne fusse pas autre chose qu'un papillon, parce que je pense que je les aurais déjà tous tués trois fois avant le lever du deuxième jour. Ma forme animale les protégeait de ma juste colère, mais ne m'épargnait pas d'avoir à endurer le flot continuel de leur bavasserie insipide.
Solomon et moi avions quitté Yuba quelques jours auparavant, accompagnés d'une demi-douzaine d'hommes de différents clans. Ils devaient agir en éclaireurs tout en nous guidant sur le chemin vers Syrdaha. Le but était de repérer les impies alors qu'ils quittaient ou revenaient vers la cité sacrée, et de trouver un moyen de se mêler à eux. Le comment ? Aucune idée. Nous avions convenus que l'improvisation serait le mieux.
Ce fut ainsi que nous prîmes en filature une petite bande d'une vingtaine de pouilleux, clairement en route pour un méfait quelconque. Vu leur armement et le soin – tout relatif – qu'ils prenaient dans leur déplacement, ce n'était pas difficile de comprendre qu'ils préparaient un coup. Cela s'avéra être l'attaque d'une caravane marchande de petite taille – à peine sept wagons et une grosse dizaine d'esclaves traînée derrière un chameau fatigué. Rien ne devrait présenter un défi incommensurable pour ces gredins. Avec le recul, je comprenais que si. Leur force n'était pas dans leur intelligence, mais bien dans leur nombre. Seuls les quelques chefs avaient une bonne vision des choses, et s'ils avaient eu des troupes un temps fut un peu plus dégourdies, nul doute qu'ils auraient mis la région à feu et à sang. Ainsi, ce convoi faisait l'office d'une prise de guerre de choix.
Bon, soyons honnête. Ce raid était pour eux d'une importance capitale. Ce n'était que des chariots de nourritures, ce qui expliquaient la relâche dans la défense assurée par juste cinq mercenaires qui ne m'inspiraient pas plus que ça – mais bon, à ce moment de ma vie, pas grand chose ne m'inspirait quoique ce fut. Cependant, sept fourgons de nourriture, quand on habitait une ruine au beau milieu d'un désert, ça valait bien des trésors. Mais ça, je ne le savais pas encore.
Un rapide conciliabule plus tard, nous passions à l'attaque. Je confiais Nova au bon soin d'un des guerriers des sables, pendant que je fonçais vers les esclaves. Solomon devait s'occuper des gardes, avec perte et fracas. Fracas surtout, mais c'était un domaine où il excellait, comme il me l'avait déjà prouvé. Nous prenions ainsi de court les brigands qui assistèrent donc à l'attaque héroïque de notre maître espion qui, seul contre cinq, prit possession d'un magot pas dégoûtant. Je profitai du chaos pour libérer les esclaves, détruisant à mains nues leur entraves de métal – mine de rien, le rokushiki, ça a du bon – et les adjoignant de déguerpir au plus tôt. Puis je pris ma forme papillon, pour venir me glisser dans la besace de mon ami, qui forcément allait devoir faire face aux gredins. Pour sûr, nous avions leur attention désormais. Enfin, Solomon. Le bonus dans tout ça restait que les innocents commerçants et leurs mercenaires gisaient inanimés dans le sable tassé de la piste par mes bons soins, inanimés et non morts comme l'auraient presque certainement voulu les voleurs.
De ma cachette, j'assistai à la sortie de nos cibles, encerclant Solomon, tentant de l'impressionner et de lui faire rendre son butin en échange de sa vie. Quelques baffes plus tard, mon lépreux préféré était admis dans la bande en tant que recrue, et nous, chariots, bandits, bandeletté et papillon confondus, faisions route vers Syrdaha.
Le voyage fut long, ennuyeux, bruyant – mais je l'avais déjà dit. Les nomades qui devaient nous suivre le faire avec une telle discrétion que même moi je ne pus les détecter. J'aurais pu profiter du froid de la nuit pour me glisser hors de la poche de Solomon pour venir à eux, mais justement, le froid m'engourdissait plus que nécessaire et je me retrouvais toujours à m'endormir. Une ou deux fois, Solomon m'écrasa dans son sommeil, en se retournant, et il comprit vite que ce n'était pas judicieux de ne pas poser son sac à côté de lui. Mes phéromones semblaient être capables de produire en lui les pires cauchemars possibles, car sous cette forme, j'avais une parfaite maîtrise de mes pouvoirs. Hé oui, j'étais papillon après tout.