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- * J’aie envie de faire pipi…*
Les balles volent en tout sens. La portion de mur qui leur sert d’abri tombe en morceaux. Quand la mitraille s’attarde trop sur une section précise elle fait voler la briquette en éclat. De vrais passoires les sacs de sables sensés servir d’abris pour les fusiliers de la Marine. L’air est chaud de la course du plomb brûlant. Les blessures saignent à cause des balles et les oreilles aussi, à cause des bruits. Tonnent les canons, crachent les fusils et vrombissent les grenades. La situation sur le champ de bataille se fait de plus en plus claire : les petits bonhommes en bleu et blanc reculent nettement face aux hommes poissons. Peu tiennent encore la ligne, certains hurlent et d’autres jettent leurs fusils au sol. La plupart crève.
Pan dans ta gueule. Boum dans tes tripes. Slack sur ton bras. Engagez-vous, qu’il disait. Maintenant les officiers les exhortent à remonter au charbon, à ne pas laisser les monstre écailleux grignoter du terrain.
Le commandant Paolo Devie se trouve à couvert derrière un pan de muret qui risque à tout moment de s’effriter sous les feux de la mitraille ennemie. À ses côtés demeure prostré un de ses subordonné…un jeune bleu des Blues qui n’avait jamais tenue un fusil vraiment chaud en main de sa vie. Trempé de sang, l’uniforme plutôt écarlate que bleue, le pleurnichard geint en serrant contre lui un petit corps sans vie, à la peau tannée par le soleil. Ici, on appelle ces meurtres d’enfant des… pertes acceptables.
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- * Pourquoi je suis la seule à trouver la bande-son complètement naze ?*
-Cesse tes jérémiades soldats…Nous sommes sous les feux ennemi et elle faut te reprendre…sans quoi tu ne seras bientôt plus qu’un mort sur pattes !
La main du commandant jaillit vers le col du soldat pour l’attirer fermement vers son visage, presque nez contre nez:
-Jette ce maudit corps sur les sacs de sables et empoigne ton fusil, bordel !
Les murs de pierres se dressant encore sur le champ de bataille sont lisses à cause de la continuelle poussière charriée par le souffle des détonations. La chaleur et la lumière jaune du soleil arrivent à se frayer un chemin entre les sommets des maisons en ruines pour venir envahir les rues mêmes. Mais ce n’est pas le bruit qui envahit le plus l’air…l’odeur de chairs carbonisées et les effluves de corps brûlés remplissaient à merveilles leur offices. Une admirable manière de différencier un vétéran d’un bleu. Ces s’arrêtent parfois en plein milieu de leurs courses de déroutes pour venir lâcher un petit demie-litron de vomissures. Quant aux vétérans…soit leurs nez sont habitués, soit l’odeur de la mort ne leur fait strictement plus rien.
L’héroïne se tient à couvert à l’angle d’une maison, le souffle court et apparemment fascinée par une scène qui accapare entièrement son attention. Mauvais pour la survie ici, ce genre de manque de perception…
On est sur au premier coup d’œil que c’est l’héroïne, de toute manière. La coupe de cheveux et la tronche de jolie fille, pour commencer. Pis y’ a qu’une héroïne pour pas succomber avec autant de blessure. Le gars qu’elle quitte pas des yeux se doit être son fiancé. Un truc du genre. Toujours une histoire de tête. Pis de toute façons pourquoi elle le regarderait comme ça, sinon ?
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* Personne peut garder une coupe de cheveux sophistiquée comme ça sur un champ de bataille, faut pas déconner…Ils ont tapé complètement à côté avec cette musique…*
Le jeune marin brun s’adresse à un jeune homme-poisson. Tout juste un adolescent, quoique niveau âge on peut jamais vraiment se prononcer avec eux. Ni la peur ni la détermination de tuer ne sont inscrites sur le visage de cet enfant. Le visage lisse…vide. Un peu écailleux et verdâtre à la limite, mais c’est normal pour lui. Il avance vers le chérinet de l’héroïne, lentement, assez lentement pour mourir deux fois durant cet intervalle, puis il passe sa main sous son écharpe et en tire un pistolet de petit calibre, avec un fut en bois. Sa seconde petite main rejoint la première en poing sur la crosse de l’arme. Le marin ne sait pas comment réagir. Un commentateur sportif se plairait à dire qu’il est out.
-Je te jure que j’ai tout fait pour éviter les enfants…Regarde, je ne suis pas armé. Je ne te ferais rien si tu tourne le dos maintenant et déguerpis !
Trop de souffle haletant, trop d’incertitude dans sa voix…Le p’tit gars de la Marine à les foies de buter un marmouset. Et ses jambes Verrouillées. Ici l’incapacité à tuer l’ennemi est la première source de mort. Le Prince charmant au fusil ne peut que fermer les yeux et les serrer de toute sa force quand une balle siffle et vient enlever un petit morceau de pierre juste au dessus de sa tête. En reculant d’un pas et toujours les yeux fermés, celui qui n’est qu’un jeune engagés volontaire pose sa main contre la pierre brut de la maison
- "J’ai un pistolet", lui lâche l’enfant, étrangement calme.
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- * Ben tiens…pas la peine de le dire après avoir tiré…et zut tiens. Gibbons prend vraiment trop de place. Je peux même pas étendre mes bras sur les accoudoirs… Et l’autre quiche qui ne moufte pas. Mais tire dans la patte du gamin, merde.*
- Je sais petit, je sais. Tu es assez loin de moi pour me tuer trois fois le temps que je t’atteigne. Je me fous que tu le fasses par peur de moi, ou par miséricorde de moi, mais fout le camp !
Le dernier ordre est hurlé. Mais le hurlement ne couvre pas la seconde balle qui fuse et loupe une fois de plus la tête du marin trop fair-play. D’encore moins cette fois ci. Avec une balle de tennis on peut se le permettre, mais avec de la mitraille…ça se discute. Cependant le moment n’est plus aux ordres ou à la merci envers les gamins. Le petit corps est projeté du sol et y retombe , masse informe. La petite silhouette fine fend le nuage de poussière et se dirige sans un instant d’hésitation vers le marin.
L’héroïne. Pour un peu on l’aurait presque oublié. Elle vient d’échanger la vie de son chéri contre un Pan-Pan…et accessoirement la vie du petit homme-poisson. Même pas un homicide. Juste une Fricassée au premier degré.
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- * Je me demande si c’est un homme-sol ou un homme- limande…Bhou, j’ai des shrapnels dans la vessie…Vite, que ça finisse…*
La caresse tendre de l’héroïne s’attarde sur la joue du blondin, ses doigts jouent dans les cheveux noirs. Puis la caresse devient réprimande…la petite main de la jeune femme qui vient d’apparaître se referme sur les cheveux de celui qu’elle vient de sauver. Elle sert de toute sa force, et de sa main libre lui donne une gifle, sèche et directe.
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* Enfin ! Je l’attendais depuis le début cette mandale.*
Elle se hisse sur la pointe des pieds et embrasse avec une sincérité fébrile son amoureux. Les deux jeunes s’essoufflent vite…les baisers des passionnés ne laisse pas la place à la fadeur. Surtout dans un lieu où la mort est votre compagne de tous les jours.
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- * Elle vient de tout gâcher…chiffe-molle va.*
Ce n’est pas dit dans un élan de rage, mais murmuré directement à l’oreille de celui qu’elle aime.
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- * Abricot…sérieusement ? Il mérite de mourir…*
- Non, je ne ferais pas de toi une meurtrière, Cerise. J’ai promis de tuer pour survivre, et sortir d’ici. Je…je t’ai…juré de le faire sans remords ni hésitation pour ne pas tomber là….
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- * S’ils survivent et ont un enfant le monde se verra gratifier d’un petit Prunot. Je le sens bien…bon, c’est fini pour moi. Plus jamais un film de propagande diffusé dans la base…peu !*
Sophie-Laure se lève sous les quolibets des spectateurs qui ne veulent manquer pour rien au monde la scène ou Abricot embrasse et paluche en règle la petite Cerise. C’est toujours une vraie épreuve de sortir d’une rangée de sièges de cinéma quand on est au début assez naïve pour s’installer au milieu. Le milieu c’est la place du mort. Son jeu de jambe lui permet de s’en sortir en vie…maintenant il va falloir que sa vessie lui permette d’ en faire de même jusqu’aux latrines…