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Le premier chakra. [Antélog]


Le premier chakra. [Antélog]


En mer, entre le Cap des Jumeaux et Banaro.

Seido D. Noroma.

Reyson D. Anstis.

Izya.

Et pour finir, le dénommé Red.

Même si je suis un être fantastique doté de capacités intellectuelles sans pareilles (et donc d'une mémoire extraordinaire), moi, le grand Lloyd Barrel, n'ai jamais été doué pour retenir les noms des gens que je croise. Sans doute parce que la plupart du temps, ceux qui les portent ne sont que des grosses lavettes qui ne méritent pas d'occuper ne serait-ce qu'une infime partie de mes pensées. Mais ces quatre la (même Seido qui s'était révélé comme étant presque capable de rivaliser avec moi et m'avait mis à mal plusieurs fois durant notre affrontement)... Dire qu'avant ne figuraient sur ma liste que Mizukawa Sutero et Kanbei, et qu'elle vient de tripler de volume... Bah, pas grave. Je suis le grand Lloyd Barrel. J'enfoncerai mon poing dans autant de tronches qu'il en sera nécessaire. Haha... Leur enfoncer mon poing ? Bon, ok pour Seido, c'est largement faisable... Mais pour les autres ? Allons... Je serais même incapable de les voir bouger, alors les toucher ? Et les vaincre ? C'est une vaste blague... Une vaste blague... Comme le pirate que je suis. Réduit à naviguer sur le dos d'une putain de tortue avec pour seule compagnie un borgne inutile, seul équipage que je semble à même de trainer derrière moi. Quel capitaine ! Peut-on vraiment appeler capitaine un type suivi par un seul clampin ? Peut-on vraiment appeler capitaine un type perdu au milieu des eaux d'une mer encore plus vaste que son orgueil... ? Et quel orgueil... Ah, pour sûr... Je me suis ragaillardi après avoir écrasé cet équipage de branquignoles et quand je me suis éveillé pour de vrai, cette fois, au Haki... Et tout ce petit discours sur la force que j'ai craché au visage de cette gamine... Ah, il avait fier allure, le grand Lloyd Barrel ! Il se sentait malin quand il a défié Seido... Et failli perdre. Mais bon, voila, comme il n'avait que "failli", il s'était cru une fois de plus invincible. La destin lui, ou plutôt me, l'avait bien rendu...

Le capitaine Red. Sa posture. Sa gestuelle. Ses paroles. Son sourire. Son chapeau... Bon non, peut-être pas son chapeau. Mais presque tout le reste, sa prestance... Il a les atours d'un roi. Ils sont naturels chez lui. Et légitimes, de par la puissance qui se dégage de lui. De par la puissance qu'il nous a fait ressentir. Ah ça... Mizukawa est fort et prétentieux, c'est indéniable. Mais Red ? C'est le cran au-dessus. Et prétentieux, il a raison de l'être. Il ferait même courber l'échine de Sutero devant lui, sans les mains ni jeu de mots douteux. Et qu'est-ce que je fais au beau milieu de tout ça, moi ? Je m'écrase. Je m'écrase, parce que sinon je me fais écraser. Il faut d'abord que je me l'avoue à moi-même : je suis faible. Ou plutôt, je ne suis pas assez fort. Mais comment est-ce possible ? Qu'est-ce je ne fais pas bien ? Je m'entraîne dur, tous les jours. Musculation, répétition d'enchaînements, méditation... Même sur le dos d'un reptile marin je ne loupe pas un jour, malgré la soif, la faim et la fatigue ! Et pourtant... A chaque fois que j'ai l'impression que les choses ont changé, à chaque fois que je le prouve... Je croise un connard qui prend un malin plaisir à m'encastrer la dure réalité dans les dents ! Sauf qu'ici c'est pas n'importe quel connard, mais le connard en chef, qui m'a balancé sa tirade... Ah... Ses mots...

"Quelque part t'as du bol, j'ai pas envie de m'encombrer avec ce que j'ai gagné. Alors je vais te prêter les affaires que tu viens de perdre pour que tu les emmènes toi même à Armada. Tiens, t'as qu'a suivre le ticket. Et t'as intérêt à pas te perdre en route sinon tes jolis brillants finiront en monture pour mon dentiste. See you, diamond boy !"

Les amener moi-même à Armada, hein bâtard ? Suivre le ticket ? Je regarde ce petit carré de papier dans ma main tourner ni au gré du vent ni à celui de mes tremblements. Armada. La cité pirate qui fait grand bruit en ce moment... Et que tu diriges, Red. Et tu crois sincèrement qu'après l'humiliation que tu as osé faire subir à moi, le grand Lloyd Barrel, je vais me ranger gentiment derrière toi et venir te "donner" ma tortue ? Crois-le ! Tu as eu ta chance de me tuer, et tu l'as loupée ! Et compte sur moi pour ne jamais te la redonner ! Haha... Je délire. S'il veut me retrouver, il me retrouvera. Et s'il veut me tuer, il n'aura qu'à claquer des doigts. Bordel. Je dois devenir plus fort. Bien plus fort. Je tourne la tête de droite à gauche, balayant rapidement les quoi... Vingt mètres carrés qu'on doit avoir sur le dos de cette tortue ? Moins deux qu'Yskino occupe parce qu'il fait la sieste ? Comment suis-je censé me débrouiller pour devenir plus fort ici, sans matériel, sans maître d'armes, sans mannequin à frapper ? Par le jeune ? En demandant que la foudre me tombe sur la caboche pour me remettre les idées en place ? Je ne vais quand même pas rétamer Yskino jusqu'à ce que je sois suffisamment fort ? Non... Il mourrait bien avant...

"Un problème ?", me lance t-il, les bras croisés derrière sa tête qu'il rehausse légèrement pour me répondre, voyant que mon regard se perd vers lui.
"Silence, idiot...", murmuré-je en seule réponse, toujours perdu dans mes pensées.

Réfléchissons encore. Comment pourrais-je m'améliorer ? Développer encore plus mes capacités physiques ? Pas possible. Je ne peux pas m'entraîner plus qu'à l'heure actuelle. Mon fruit du démon ? J'en sais trop peu à son sujet pour le moment pour pouvoir m'en servir à son paroxysme. Je pense en avoir vite fait cerné le fonctionnement, et vu qu'il décuple simplement mes capacités physiques, j'imagine qu'il leur est inhérent. Alors que reste t-il ? Mon Haki ? Sans doute possible. C'est sur ça que je dois travailler. Cette force mystique est puissante. Puissante, et mystérieuse. Bien trop à mon goût. Bien. J'ai mon optique de travail dans la tête. Mais comment ? Comment l'approcher ? Je sais l'activer, c'est déjà bien... Mais la comprendre... Est-ce à la portée de n'importe quel être humain ? Je ne pense pas. Par contre, si c'est bien à la portée de quelqu'un, ce quelqu'un ne peut qu'être l'époustouflant Lloyd Barrel ! Je m'assieds en tailleur au centre du dos de Larbin, et expire un grand coup, me fermant à tout ce qui est extérieur à mon propre organisme.

Je ne sens plus que les battements de mon coeur, qui palpite synchrone avec ma respiration. Ça tape régulièrement dans ma tête au fur et à mesure que le sang irrigue telle ou telle partie de mon corps... Et la réchauffe comme s'il y faisait naître une flamme. Un feu intérieur qui grandit quand j'inspire, et rétrécit quand j'expire. Un flamme douce, une flamme qui ne brûle pas, à la base de ma colonne vertébrale et qui équilibre tout mon être. J'aime à l'appeler la Volonté, car c'est elle qui coordonne le corps et le fait avancer... Tout comme la volonté régit l'esprit et le déplace. Mais ce n'est pas vraiment son vrai nom. Ou du moins, le nom que lui donnait le gourou Tanvir, vieil homme qui créchait sur mon île (un marabout que mon père avait déniché on ne sait où) et qui s'était occupé de perfectionner ma connexion spirituelle avec l'univers des arts martiaux. Lui, tout frêle qu'il était, et affublé de son drap pour seul vêtement et de son fort accent, appelait cette flamme le "Muladhara". La première fois qu'il m'avait sorti ce mot, j'avais cru simplement qu'il avait eu le culot d'éternuer en face de ma glorieuse personne, et de risquer de me contaminer. En même temps, il faut avouer que, même dans la bouche du grand Lloyd Barrel, c'est plutôt moche, alors de celle d'un vieux barbu ayant régulièrement des hallucinations... Bref. Le Muladhara, c'est un concept qui fait partie de ce que son peuple (sans doute primitif) appelle ou appelait "chakras", des points d'énergie au nombre de sept situés le long de l'axe du dos dans le corps et qui constituent des centres spirituels, ou plus exactement des points de jonction des canaux où l'énergie vitale circule. En d'autres termes, il s'agit de points complexes difficiles (même pour quelqu'un aussi exceptionnel que moi) à repérer à l'intérieur de son propre organisme... D'autant que la représentation de la chose diffère selon les gens. Le gourou Tanvir, lui, les visualisait comme des organes immatériels régulant la quantité d'énergie que le corps contenait, et qu'il était nécessaire d'inhiber, sous peine de voir le "vaisseau de chair se détruire". Un de ses comparses dont il m'avait parlé, le gourou Misha, lui, voyait cela comme des bassins dans lesquels l'énergie circulait librement, et qu'il fallait purifier pour qu'elle afflue. Moi, quand j'étais parvenu à les toucher du doigt, les avais vus comme étant des réserves d'énergie quasi-illimitée (quoi de plus normal pour le grand Lloyd Barrel) mais verrouillées, hors d'atteinte. Lorsque je lui avais décrit cette vision, le gourou Tanvir m'avait répondu que chaque personne voyait différemment les chakras car chaque personne était unique... Et que si c'était des verrous que j'avais vu, alors il fallait que les ouvre.

Et, aussi étonnant que cela puisse paraître pour quelqu'un de ma prestance, malgré le nombre croissant de séances de méditation et de concentration que nous avions ensemble, je n'avais jamais réussi qu'à effleurer de la main ces tourbillons de puissance qui sommeillaient en moi. C'était amer en bouche. Et comme je me considérais comme un être parfait qui ne pouvait faire d'erreur, je m'étais dit à l'époque que le type n'était qu'un vieux fou qui racontait n'importe quoi et prenait pour ses chakras les "Atemis" (ou point vitaux de passage de l'énergie dans les arts martiaux). Aussi, je l'avais fait fustiger et congédier sur son île de ploucs par mon père, lui qui osait m'induire en erreur et me faire passer pour un faible. Haha... J'avais presque oublié cette histoire, jusqu'à récemment, pendant mon combat contre l'asiatique au Haki, lors duquel le mien s'était éveillé. Quand l'énergie avait parcouru tout mon être, affluant par torrents pour renforcer mon bras et me permettre de donner le coup final, c'était la première fois que je le sentais.

Le feu qui prenait en bas de mon dos. Et dont la chaleur infusait chacun de mes membres.

Le feu qui me laissait accéder à cette quantité immense d'énergie que je peux désormais faire déferler en moi.

Aucun doute possible : j'avais réussi à ouvrir le premier chakra, le Muladhara. Symbolisant la terre, et dont le kshetram (sont point de résonance) est au niveau des glandes surrénales, ce chakra se débloquait en situation de stress intense, d'après Tanvir. De stress positif, dans mon cas, forcément... Parce que qui dit stress dit peur... Comme si le grand Lloyd Barrel connaissait la peur... Bref. Au rythme de mes respirations, je sens encore et toujours cette flamme se gonfler et s'épuiser au gré des marées d'énergie qui parcourent mon corps. La faire naître avait été une chose... Mais ce n'est pas comme si elle m'était vraiment utile, pour le moment. Après tout, je ne peux pas trop abuser du Haki (et par abuser, j'entends ne serait-ce que m'en servir une ou deux fois) sans en subir des effets secondaires dans tout le corps pendant plusieurs heures... Et comme il m'apparaît clair que cette puissance extraordinaire tire sa force des chakras, et de cette flamme intérieure... La renforcer et la faire brûler plus ardemment encore semble être une toute autre chose... Mais aussi la clé de mes prochaines victoires... La clé ? La clé ! Bien sûr ! Il se peut fortement que ce soit en lien avec le "Svadhisthana", le deuxième chakra, qu'il faut que j'ouvre pour décupler encore plus ma puissance ! Quel brillant esprit de déduction, même dans les temps les plus sombres ! Franchement, vive moi, vive le grand Lloyd Barrel !

Seulement... Comment ouvrir ce verrou ? Parce que c'est bien beau de se dire qu'il faut le débloquer, mais le Svadhisthana se trouve à un tout autre endroit du corps, ne symbolise pas la même chose que Muladhara, et doit sans doute se débloquer autrement... Souviens-toi, Lloyd, souviens-toi de ce que disait le gourou Tanvir...

Bordel.

Impossible de me rappeler de ses paroles tarabiscotées fourbies de métaphores et d'autres allégories. Que faire, alors, putain ? Je ne vais quand même pas passer je ne sais combien de jour sur la carapace de cette tortue à me torturer l'esprit pour attendre qu'une solution vienne ? La carapace... Je passe ma main sur le dos froid de Larbin, et machinalement, pensif, comme à mon habitude depuis quelque jours, je transforme mon doigt en diamant et lui gratte une écaille, toujours la même, comme pour m'aider à me concentrer... Ou faire passer le temps. A force, un sillon peu profond a commencé à s'être creusé. Ça n'a pas l'air de gêner la bête plus que ça, au contraire, remarque... Et je tique. La carapace ! Voila sur quoi je vais m'entraîner ! Je peux aisément la fendre avec mon pouvoir démoniaque... Mais et à mains nues ? Impossible, sans utiliser le Haki ! Je replonge aussitôt dans ma concentration, mêlant à nouveau pulsations pulmonaires et cardiaques, jusqu'à ressentir la flamme brûler... Et la chaleur aller de mes lombaires jusqu'au bout de mon index que je pose lentement sur une écaille du dos de Larbin.

Je la sens. La puissance. Allez, Lloyd. Montre à tous de quel bois tu es fait. Montre à tous que tu es destiné à être le plus grand individu que cette terre n'ait jamais porté. Ressens la flamme. Je déplace verticalement mon doigt dans un crissement aigu. La carapace s'entaille sur une bonne dizaine de centimètres. J'ai réussi. J'ai réussi à propager mon énergie sous la forme du Haki de l'Armement, en puisant dans mon Muladhara et sans recourir au stress. C'est la première étape. Mais juste un trait sur une écaille de tortue géante ? Est-ce la tout ce que le grand Lloyd Barrel peut faire ?

Haha. La bonne blague.

Le reste de la journée s'était écoulé dans un silence qui n'était accompagné que par le clapotis des vagues, le piaillement des mouettes, quelques ronronnement discrets de Larbin et quelques ronflements bruyants d'Yskino, ainsi que le crissement strident de mon doigt contre la carapace de l'animal (Larbin, pas Yskino). Autrement dit, ça a fait beaucoup de bruit. Mais je n'ai rien entendu, étant absorbé, concentré pour que ma flamme ne s'éteigne pas malgré le déclin du soleil. Aussi, ce n'est que lorsqu'il se réveille (Yskino, pas Larbin), et que je vois son ombre étirée par le crépuscule, que je m'interrompt et me relève.

"Tu foutais quoi ?", demande-il éhontément, comme à son habitude. Je soupire.
"Je réfléchissais."
"Ça t'arrive ?"

Cette fois, il ne la vole pas et se prend une belle mandale qui manque de le faire finir à la flotte, l'envoyant face contre carapace. Il reprend en se relevant et en se massant la joue :

"Bordel, ça fait super mal..."
"Bon, c'est pas tout ça mais... Yskino, je crève de faim ! Va donc me chercher quelque chose à me mettre sous la dent !"
"Crois le...", murmure t-il tout doucement, avant de hausser le ton et de s'exciter : "Eh mais putain, t'as tagué le dos de Larbin ?! T'es malade ?!"

Je le refrappe. Du "tag" ? Et puis quoi encore... C'est la démonstration de la puissance que je développe. La démonstration de ce fantastique Haki que je visualise d'une toute autre manière désormais, sachant ce qu'il représente et comment l'aborder... Une démonstration que je ferai également aux noms qui sont écrits sur le dos de cette tortue...

Seido D. Noroma.

Reyson D. Anstis.

Izya.

Mizukawa Sutero.

Red.

Kanbei.


Un spasme me parcourt violemment la main droite, comme si mon index bleui se brisait, et je lâche une plainte étouffée tant la douleur est intense. Bordel, ça ne suffit pas... Mais c'est déjà un bon début. Le commencent d'un voyage au centre de moi-même.

Un Chakra de pleinement ouvert. Plus que six.