[Bonjour, ouverture de mon premier présent ! Bonne lecture !]
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Si je continue comme ça, je vais plus pouvoir me payer mon café bien longtemps. Et si je n’ai plus de café, plus possibilité de chasser correctement. Donc adieu les primes, et la possibilité d’avoir à nouveau du café, etc. Cercle vicieux, quoi. Alors en attendant, je vends mes services en tant que garde du corps sur les navires de commerce qui naviguent à travers les mers des blues. En fait, ça me permet de traverser les villes à la recherche d’informations, de primes, et de tout ce qu’il peut y avoir de bon à dénicher.
Et là, ça fait longtemps que j’ai pas été à la chasse à l’homme, histoire de récolter un bon petit pactole. Le café que je bois depuis plusieurs semaines est atroce, il faut que j’en boive des litres pour qu’il continue à faire effet. C’pas une vie, j’vous jure ! Un jour je vais m’arranger pour me l’injecter en intraveineuse, on verra qui est le plus malin, caféine !
Mais pour le moment, on vogue en pleine mer. Et la mer, j’aime ça. Le calme de l’océan, la douceur de la brise du matin. Et surtout, être payé pour glander. Je suis garde du corps en mer des marchands de ce bateau, et c’est ma seule tâche. La seule chose que je dois faire, c’est les protéger en cas d’attaque de pirates, forbans, et autres bandits. Bien heureusement, ces attaques sont rares, et ceux qui s’en prennent à ce type de navire, aussi ridiculement petit, sont rarement efficaces. Quelques tirs, quelques balles, un ou deux coups de couteaux et l’affaire est dans le sac. On se défend, on récupère les vivres et matériaux intéressants, et on trace.
Ah, et mon autre boulot à bord, c’est d’être au poste de vigie. Un petit parasol, pour éviter les coups de soleil, et tout est bon ! Quand on se fait attaquer – ce qui est, rappelons-le, extrêmement rare –, je n’ai qu’à me mettre en position là-haut, à couvert derrière les pans de bois, à ajuster ma lunette, mon silencieux, et à tirer sur les meilleures cibles avant l’abordage. Puis, au moment fatidique où les assaillants arrivent à bord, ils sont si peu nombreux qu’en un saut sur le pont et une petite distribution de tirs, ils se retrouvent à terre.
Malheureusement, ce type de pirates n’est pas primé, et donc, inutile de rapporter leurs corps blessés – ou morts – à la Marine… Et c’est bien dommage, moi qui vous l’dit !
Donc, mon boulot, il est cool. En plus, ça n’est qu’un contrat en mer : à terre, je peux aller vadrouiller à droite à gauche, libéré de mes obligations. Bon, bien entendu, un tel contrat… Bein la paie que je reçois, je la dépense immédiatement en nourriture, en munitions et en café. Et même, le café m’oblige à creuser dans mes fonds, ce qui les fait diminuer à vue d’œil.
En résumé, faut vraiment que je me trouve une cible, et vite.
Et là, enfin, on arrive sur une île. Enfin, un petit archipel perdu au fin fond des blues, avec juste un petit village. J’vous jure, si là je trouve un criminel primé, c’est vraiment un miracle !
Alors on s’amarre au petit port de pêche, et le capitaine du navire de commerce me congédie. On reste trois jours, qu’il me dit, pendant ce temps-là je peux vaquer à mes occupations. Alors je me rends à la place du village. Bon, en réalité, il me suffit de faire dix pas et j’y suis, à cette maudite place… Le village est tellement minuscule que le port de pêche fait office de centre. Génial.
- Sérieusement Cap’, comment ils font les marchands pour vendre des trucs ici ?
- J’sais pas, mon boulot c’est juste de les amener çà-et-là. Ils paient bien, alors moi, je prends !
Ouais, comme moi, quoi…
- T’as dû remarquer, on passe par pas mal de petites îles comme ça, puis ensuite on va dans une plus grosse. Puis des petites, et rebelote. Ils achètent pas cher ici, et revendent plus cher là-bas. Spéculation, quoi ! Ils sont calculateurs, les malins.
- Tant que c’est pas illégal…
- Bof, ça l’est pas, ça favorise le commerce.
- Ouais je sais, je m'inquiète pas du tout, pas de doute là-dessus.
Et puis, ils sont sympathiques ces marchands. C’est cool d’être payé à rien faire.
Du coup, je scrute le tableau d’affichage public. Il est commun d’y trouver divers avis. Et ici, justement, il y en a ! Miracle !
AVIS DE RECHERCHE
Nom : Creespy Cooky
Description physique : Sexe mâle, petit, roux, yeux marrons, une tache blanche dans la nuque et une autre sur l'oreille droite.
Autres : chapardeur, habitué à faire du mal aux étrangers, mais peut être très gentil et câlin !
Récompense : 1000 berries
Signé : la mère Michelle
- Spoiler:
Ok, un chat... Annonce ridicule !
AVIS DE RECHERCHE
Perdu : Lentille
Description : toute petite, ronde, transparente. Enfin, une lentille quoi !
Autre : quand je l'ai perdue, j'ai dit "j'ai perdu ma lentille !"
Récompense : 1 berry
Signé : Itineris
AVIS DE RECHERCHE
Perdu : Aiguille
Description : Longue, fine, métallique, avec un petit chat au bout pour passer le fil à coudre.
Autre : perdu dans une botte de foin
Récompense : 7 berries
Signé : Geay Perdul A. Bool
AVIS DE RECHERCHE
Perdu : Trio de peluches vertes
Description : Peluches vertes type extraterrestres à trois yeux, vertes, avec des antennes et des vêtements bleus.
Autre : La "pince" les a attrapées !
Récompense : Nous vous devrons, une reconnaissance éteeeernelle !
Signé : Buzz
D'accord, encore un village de barges... Et pas une seule prime à l'horizon ! Bon, bah du coup, je me rends en taverne, histoire d'aller me recharger en café... C'est que mes thermos commencent à être vides !
Du cafééééééééé
La taverne, lieu de prédilection pour les commérages, et pour savoir ce qu’il se trame dans une ville et sur une île. Au moment où j’y entre, un type avec une sale tête, accoudé au comptoir, se tourne vers moi et me dévisage. A l’image d’un vieux western.
- Qu’est-ce que tu fais ici, l’étranger ?
L’ambiance dans la taverne se refroidit instantanément. Tous se taisent, tous me regardent.
- Hmmm.
- T’es sourd, étranger ?
Alors, sans un mot, je m’avance jusqu’au bar. J’ouvre mon grand manteau, et en sors mes quatre thermos, le dernier étant presque vide. Décidément, il est temps de faire le plein. Puis je m’adresse au barman.
- Du café, bien noir et bien corsé s’il vous plaît. Remplissez-moi tout ça et servez m’en un litre de plus.
- Z’avez de quoi payer ? 500 berries le litre.
Merde, j’ai que 1000 berries sur moi… J’enlève donc deux thermos, à mon grand dam.
- Mettez deux litres, juste dans les thermos alors.
Et je lui dépose l’argent. Décidément, ça coûte cher le café.
- J’crois qu’t’as oublié de me répondre, l’étranger.
Oh, il va me saouler longtemps celui-là ?
- Laisse le tranquille, Fred, il consomme.
- Il boit du café. J’aime pas les étrangers, surtout s’ils boivent du café.
La salle continue à me fixer, à l’instar du type louche. Le barman me sert, et je commence à me servir dans l’un de mes thermos. Alors le type se lève et vient se placer derrière moi.
- J’crois que tu m’as pas bien compris, l’étranger.
Je ne bronche pas, continuant à siroter. Ah, que ça fait du bien ! Mes sens reviennent, petit à petit. Encore deux heures et j’allais être en manque !
- Qu’est-ce que tu fais ici ?
*CLIC*
Ah, ça, c’est un bruit d’arme à feu ! Et au vu du silence qui règne dans la salle, et au barman qui s’est soudainement stoppé, ce sale type vient de me pointer son flingue sur la tête.
- Ecoute… Fred, c’est ça ? Ouais, Fred… Je suis sur cette île parce que les marchands avec qui je suis venu m’embauchent pour les protéger en mer. Ils restent trois jours à terre, et moi j’ai quartier libre pendant ce temps.
Long moment de silence. Je continue toujours à boire mon café, petite gorgée par petite gorgée. Je ne sais pas ce qu’il se passe derrière moi, mais j’attends. Après tout, je ne peux qu’attendre. L’homme a l’air suffisamment étrange comme ça.
- Libre ? He, personne n’est libre ici !
- Fred, ça suffit ! Arrête ton délire, pas de ça chez moi !
Le barman semble être habitué. Mais il a une goutte de sueur qui perle sur son front, signe d’un stress évident.
- Soit, je ne suis pas libre, je ne fais qu’attendre.
- Ah bah tu vois, l’étranger, suffisait de demander !
Le Fred va donc se rasseoir, et les conversations dans la taverne reprennent bon train. Le type est dans son coin, et se murmure des choses à lui-même. Alors que le barman est proche de moi, j’en profite pour lui glisser :
- Quel accueil…
- Vous en faites pas, Fred il est un peu dérangé, mais il ferait pas de mal à une mouche.
- Il a pointé son flingue sur moi, hein.
- Bah, ça fait des années qu’il fonctionne pas, vous en faites pas pour ça…
Super. Village de barges.
- J’suis à la recherche de services à rendre, vous auriez pas des pistes ?
- Y a bien la mère Michelle qui a perdu son chat…
Le barman chantonne une petite mélodie.
- Nan mais, vous voyez, je parlais de primes, tout ça.
- Ah, oui, vu votre dégaine, ça correspond mieux oui… Surtout qu’il semblerait que le père Lustucru se serait occupé du chat. Enfin, c’est qu’une rumeur.
- Bon, et donc ?
- J’sais pas. Allez donc voir à la mairie, ils ont peut-être des indications.
- Il y a pas un post de Marines dans le coin ?
- A la mairie, j’vous dit. C’est un p’tit village, tout est au même endroit.
Très petit village, alors.
- En tout cas, moi j’vous dit, il va se passer quelque chose entre Michelle et Lustucru !
J’m’en tape, mon vieux, tu peux pas savoir à quel point je m’en tamponne le coquillard.
Sur ce, je me lève, remercie le barman, emporte mes thermos et pars de la bâtisse.
Bon, soyons clairs, c’est vraiment un petit village. Le port accueille aussi la place principale, sur laquelle on peut trouver la taverne et la mairie, ainsi que les principaux commerçants. La mer s’étend au sud, et depuis cette place partent trois ruelles, dans les droits sens cardinaux, sur une petite centaine de mètres. Autrement dit, pas grand monde. Mais la place donne l’impression d’être bondée, comme si chaque habitant est sans cesse de sortie. Très intriguant.
D’une fenêtre donnant sur ladite place, une femme parle à un homme, situé en bas de chez elle. Celui-ci lui explique que son chat n’est pas perdu, et tralali, et tralala.
Sur mon passage, les gens se retournent, comme si ma présence était problématique. Aux différents commerçants, j’aperçois les marchands de mon navire qui discutent affaire, chacun à leur étale. Ils savent ce qu’ils font, ils mènent bien leur petite entreprise, tant mieux. Je serai payé.
Ne prêtant pas attention aux étranges manies des passants, je pénètre dans la mairie, presque déserte.
- Hep, s’iou plaît ?
- Oui ?
Une petite dame ronde passe une porte et vient me recevoir. Elle m’indique être le maire, et je lui explique ce que je cherche : je suis chasseur de prime, et tout le blabla associé. Malheureusement, elle me dit que rien ici ne vient perturber le calme quotidien… Et moi, personnellement, je trouve ça louche. Alors, en la remerciant, je lui demande de me mener au responsable de la Marine du coin.
- Oh, vous savez, c’est juste un Caporal et quatre hommes hein, rien n’arrive jamais par chez nous !
Allez, mènes-y moi quand même, va ! Du coup je rencontre le bonhomme.
- Eh l’étranger, tu viens pas mettre le boxon hein ?
- Vous en faites pas Caporal, j’suis plutôt du genre à aider à remettre les choses dans l’ordre.
Sa réaction est certainement due à mon attirail… Bof, moi j’y suis accoutumé. J’en profite pour boire une gorgée de café, sentant qu’il est temps. Qu’est-ce que je consomme, moi ! Il fait les gros yeux, me voyant boire cul sec.
- Oh, ça ? Pas d’inquiétude, c’est que du café.
- Vous êtes mal tombé, ici il n’y a rien à remettre dans l’ordre ! Tout baigne !
Décidément… Bon, du coup, vu que la journée touche à sa fin, je vais dormir à bord du navire. Le capitaine est sympa, il me permet toujours de rester là pour la nuit, même si normalement je devrais me démerder seul. Chic type.
Le lendemain matin, j’aborde la journée totalement différemment. Pas de criminel ? Pas de bandit ? Bon, bah il me reste plus qu’à faire de l’aide à la personne.
La journée passe lentement, je me fais chier à un point… Alors, résumons : trois chats secourus du haut d’un arbre, une aide à la réparation d’une charrette dont la roue était cassée, des courses ramassées qui avaient fini par terre à cause des sacs trop fragiles, etc. Enfin, vous voyez le topo : c’est absolument pas le type de vie que je compte mener bien longtemps.
Mais bon, j’ai remarqué qu’à chaque fois, les gens m’invitent à passer chez eux pour m’offrir à boire. Alors, moi, bien évidemment, j’accepte toujours un bon p’tit café ! Et, de cette manière, je passe mon petit séjour à terre à dénicher de quoi manger de façon bien décente.
L’avantage, ici, c’est que les gens sont vraiment sympathiques. Si on cherche un peu de bonté sociale, on la trouvera ici. Et à ce qu’il paraît, les autres îlots de cet archipel accueillent des villages similaires.
Alors, dans ce monde de brutes, il existe encore des petits paradis ? Fascinant. J’aime bien. J’apprécie.
Mais malheureusement – oui, parce que je commençais à apprécier le climat et les gens – nous devons reprendre la mer. J’ai un contrat, et il me donne quand même un peu plus d’argent que l’aide bénévole dans ce village. Allez, en partant, on m’offre même de me remplir tous mes thermos de café ! La belle vie, j’vous dit.
Alors on reprend la mer.
- Alors Cap’, bon séjour ?
- Bof, me suis fait chier. Il se passe rien sur cette île. Et toi ?
- Au début pareil. Mais j’me suis fait des bonnes relations !
- J’ai vu ça, j’ai vu ça. Fais gaffe, tu vas te ramollir !
- Haha, t’en fais pas pour moi !
Le capitaine, je l’adore. C’est un vieux loup de mer, à peu près du même âge que moi. Alors forcément, on s’entend à la perfection, surtout qu’on a la même mentalité sur pas mal de points et qu’on ne risque pas de marcher sur les plates-bandes de l’autre en termes de travail. Chacun son boulot.
Deux jours à voguer vers encore une autre destination, et nous y arrivons enfin. Bon, cette fois, j’avais encore du café : il était d’assez bonne qualité, assez corsé, pour que je n’aie pas à en boire trop. Donc, consommation diminuée, et stock conservé ! Ah, la logistique, j’vous jure.
Nouveau débarquement, nouvelle île, nouvelle ville. Mais bon, j’vous refais pas le topo : je commence par la taverne. Les comptoirs, j’aime bien, on y trouve tout ce qu’il faut, que ça soit en ragots ou en boissons. Bon, je radote un peu, il me semble l’avoir déjà dit, ça.
Bon, allez, j’vais pas tout vous décrire, si ce n’est l’ambiance un peu plus festive ici. Ah, un peu d’ambiance ! Quand j’arrive, bagarre générale. Moi j’aime bien, ça permet de se divertir. Spectacle son et lumière, qu’y disaient. Bon, j’y reste pas longtemps, parce que de toute manière le barman n’a aucune info qui m’intéresse. Sérieux, je vais pas refaire de l’aide aux vieux encore pendant deux jours ? Bon, je file direct à la caserne, un peu plus grande. Un Lieutenant, qu’ils disent, et sa division. Rien de bien folichon.
Cette fois, après quelques minutes de discussion, j’ai une info assez intéressante. Il paraît que dans la région – ici, on parle des îles alentour – il y a un groupe de trois petits mafieux qui s’amusent à terroriser les commerçants d’un peu partout pour leur soutirer de l’argent. Enfin, petit mafieux… Ils ont quand même détruit une vingtaine de commerces en deux mois, tout ça parce qu’on refusait de les payer. Et ils ont chacun une prime de trois millions de berries.
Très intéressant tout ça. Alors moi, ni une, ni deux, je vais parler aux commerçants. Direction la place principale, c’est toujours là qu’on les trouve. Sauf que quand quelqu’un est terrorisé par la mafia, il crache rien. Et quand je dis rien, c’est vraiment rien. Non, tout va bien, tout est en règle ici. Bizarre, pas ce que m’a dit le Lieutenant, mais bon… Je vais quand même pas les torturer.
Allez, j’vous cache pas que cette fois, je me suis vraiment fait chier pendant mon séjour. Bon, j’avais assez de paye accumulée pour me nourrir correctement et me recharger en café, mais bon.
Oh, que ma vie est chiante ! Vivement un décollage !
Et c’est reparti pour la mer, et une nouvelle île. Alleeeeez. Direction la milice, direct. La taverne, on verra après. Bonjour Sergent, patati, patata. Bon, le coup des mafieux est toujours d’actualité, il paraît qu’ils sont en train de faire leur tournée dans plusieurs îles de la zone. Super, ils sont pas loin. Le coup des commerçants ? Ouais, je vais recommencer l’idée. Mais cette fois, plus subtil.
- Bonjour mon bon monsieur, agent spécial Bartimeus Law U. Ether. Vous savez, Law, comme la loi. Pouvons-nous parler ?
Je lui mets ma carte de chasseur de primes sous le nez. Il sait pas ce que c’est, mais ça fait pro. Il y a ma gueule dessus et la marque du gouvernement mondial. Et c’est un papier officiel. Donc ça pète.
- On peut parler au calme ?
Je lui montre sa boutique, et le fait qu’ici c’est pas assez discret. Alors il me conduit derrière, dans son atelier. J’ai choisi un boulanger, parce que c’est souvent une cible facile pour les mafieux, ça. Parole d’expert.
- C’est à propos de quoi ?
- Monsieur, nous observons les lieux depuis pas mal de temps. Il s’avère que vous êtes la cible d’une organisation mafieuse qui vous soutire de l’argent, nous le savons.
- Mais j’ai rien fait de mal !
- Nous le savons, vous êtes victime de cette organisation. Nous cherchons à les arrêter. Tout ce dont nous avons besoin, c’est un témoignage, mais surtout une description physique. Car c’est ce qu’il nous manque.
- Si je parle, ils vont brûler ma boulangerie !
- Ne vous en faites pas, vous êtes placé sous la protection du Gouvernement Mondial.
Eh ouais, c’est faux, mais ça pète. Et ça me permet d’avoir mes pistes, après tout !
Après plusieurs commerces, et toujours la même technique, j’ai pas mal d’indications. Sauf que ces indications, je les aime pas. Parce que les gens qu’ils ont décrit, les trois mafieux, j’ai pas envie de croire que ce sont les gens auxquels je pense. Mais bon… Selon tous ces artisans, ils sont passés dans la matinée. Soit quelques heures avant moi. Alors bon, la coïncidence, j’y crois pas. Et même si j’ai pas envie que mes employeurs soient en fait mes cibles… et bah si, ça risque bien de l’être.
Mais il me faut des preuves supplémentaires. Et ça tombe bien, on reprendre le large. Et quand on prend le large, ils passent peu de temps dans leur cabine, à cause de leur mal de mer. Et ça c’est cool, parce que du coup je peux aller farfouiller dans leurs paperasses. J’en parle pas au Capitaine, pas maintenant. Je trouve que ça foutrait la merde.
Bon, je ne vais pas vous faire un dessin, mais quand dans un livre de comptes on trouve « impôt de tel commerçant, sur telle île » et qu’on voit que tous les petits commerces sont concernés… Enfin, j’ai rarement vu un marchand imposer des commerçants. C’est pas crédible. Surtout que dans ces livres de compte, il n’est mentionné nulle part d’achat de denrées… Les commerçants donnent leurs biens, et c’est ce qui fait office de cargaison.
Donc le capitaine, l’équipage, et moi, on est complices. Ce que j’aimerais pas, c’est que le capitaine soit de mèche. Franchement, ça me plairait vraiment pas. Mais alors pas du tout du tout du tout.
Bon, du coup, je suis à peu près sûr que ces trois marchands-là valent chacun trois millions. Et y a pas à dire, mais neuf millions de berries, ça fait un sacré volume de café. Et j’ai pas envie de m’en passer, surtout que pour une fois, je suis vachement proche de mes cibles sans même qu’elles le sachent.
Et aujourd’hui, on débarque à nouveau sur une île. Et moi ça m’arrange, parce que je ne connais pas le statut du capitaine. Alors autant s’occuper de leur cas sur la terre ferme.
Melchi, Balthi, Gaspi, je vous tiens. Oui, ce sont des noms ridicules. Non, je ne sais pas si ce sont leurs vrais noms. Tout ce que je sais, c’est que ça fait ridicule. Mais ce sont de mafieux, et ils valent cher. Alors c’est pas parce qu’ils ont un nom bizarre que je vais me laisser aller.
Mes « amis », vous vous remplissez les poches en traumatisant des petits commerçants, et donc leur famille. Cela déteint sur la qualité de leur vie, et de leurs produits, qu’ils vendent à leurs clients. C’est peut-être un peu extrémiste, mais du coup ça influe sur les populations. Bon, certes, c’est négligeable. Mais ce qui n’est pas négligeable, c’est l’effet direct sur les artisans, qui n’ont rien demandé à personne. Et moi, j’aime pas ça. En plus vous avez une jolie prime, du coup je vais pouvoir m’en mettre plein les fontes. Et moi, j’aime beaucoup ça.
Mais bon, parce que j’ai le goût de la chose bien faite, et que ça me ferait bien chier de me planter, je commence par aller me renseigner à la caserne locale. Comme d’habitude, quoi. C’est vrai, ils vont pas s’envoler. Ils se sentent en sécurité. Là-bas, encore une affiche des trois gugusses, qui ne représente toujours pas leur tronche. Mais moi, j’ai des bonnes pistes. Là, le Lieutenant en charge me donne des informations complémentaires, se réjouissant que quelqu’un vienne s’occuper de leur cas.
Le document qu’il me tend présente la liste exhaustive des commerces qui ont brûlé à cause de ces zouaves. Et c’est la dernière pierre qu’il manquait à l’édifice de mes pistes pour consolider la voute. La clé, quoi. Car le nom des îles concernées correspond parfaitement à notre plan de route. Autrement dit, ils continuent à passer là où ils ont déjà sévi. Super, les mecs. Très pro.
Le physique, le timing, les localisations. Tout est parfait, je ne risque pas de me planter. Une chance, nous sommes arrivés le soir, la nuit vient donc de tomber. Je vais pouvoir me lancer dans une traque nocturne, mes préférées ! C’est fou comme les gens ont peur du noir, moi j’aime bien ! C’est cool.
- Au feu !!
Un cri se fait entendre, un feu apparemment. Bon samaritain, et me sentant assez concerné étant donnée la nature du problème, je sors de la caserne en même temps que l’unité de Marine. Ce sont aussi les pompiers de la zone, faut comprendre, c’est pas une grand ville.
Je ne vais pas vous faire languir dans un suspens interminable, je vous le donne en mille : ce qui brûle, c’est un commerce ! Je ne m’y serais pas attendu, tiens… Fallait bien que ça arrive, un type refuse de payer, il se fait cramer sa boutique. Un tailleur en plus, pourtant on m’avait dit « My tailor is rich », alors je pensais qu’il aurait l’argent pour payer. Faut croire que ça rend avare. En fin de compte, le pauvre – haha ! – bougre est dehors, impuissant devant l’effondrement de sa petite entreprise personnelle et son stock qui part en fumée. Joli feu, c’est que ça brûle bien le tissu.
Non pas que je me réjouisse du malheur des gens, mais vu le travail que j’essaie d’accomplir pour mettre les primés en prison, même si c’est dans un acte de pur intérêt, je peux bien me permettre un peu d’humour noir. Merde. Vous ne me retirerez pas ma liberté de penser.
Bref, tous sont regroupés ici pour tenter d’éteindre le feu. Et mes mafieux, ils sont probablement pas loin. Mais comme j’aime pas la traque rapprochée quand je ne connais absolument pas mon adversaire, je ne vais pas tenter de jouer les héros. D’ailleurs, j’suis pas un héros – hic ! – et j’ai pas l’intention d’en devenir un – que cela soit dit et répété !
Je me retourne, et je vois que la caserne a un atout qui va me plaire : une tour. Haute, très haute. Et moi j’ai besoin d’une position en hauteur. Tous les soldats sont mobilisés pour éteindre le feu, j’ai quartier libre. C’est bien l’intérêt d’une petite bourgade comme celle-là.
Une fois les couloirs traversés, les escaliers grimpés quatre à quatre, et ma position prise tout là-haut, masqué derrière les hauteurs des fortifications, je monte mon silencieux et ajuste ma lunette. Une lampée de café, je suis prêt. Pouah, il est fort lui, je risque pas de me louper ! Fusil à l’épaule, je scrute le village, calmement.
- Alors… où vous êtes, mes jolis ?
Vu que tout le village est rameuté, s’ils restent à l’écart, cela paraîtra bizarre. Et comme ils n’ont pas l’air idiot, ils doivent le savoir. Donc je devrais les trouver proche du remue-ménage, au moins en train de soutenir moralement ceux qui tentent d’éteindre l’incendie. Histoire d’avoir un alibi.
- Bingo.
Les voilà, mes trois zouaves, toujours collés entre eux, inséparables. Je ne vais pas tirer dans le tas, bien entendu, ça ferait tache.
Soudain, une poutre porteuse cède dans la boutique en flammes, ce qui provoque un écroulement de tout l’étage, dégageant un important nuage de fumée et ravivant les flammes. Immédiatement, le Lieutenant force la population à reculer plus loin, insistant sur le fait que l’incident est dangereux et qu’il vaut mieux que chacun rentre chez soi, en sécurité. Et mes trois mafieux, ils en profitent pour aller à la taverne.
Tout leur trajet, je les suis, pour ne pas louper une miette. C’est à peine s’ils daignent jeter un regard au feu, ils continuent à comploter entre eux. Salopards. De là où je suis, je visualise même une partie de l’intérieur de la taverne, où je peux les observer demander au comptoir la clé d’une chambre.
Aubaine, leur chambre donne sur la place principale, j’ai donc une pleine vue dessus, et eux sur leur œuvre qui continue de flamber. Les voilà accoudés au rebord des fenêtres, s’échangeant des regards et des sourires mesquins.
Et c’est là qu’on va rire. L’un d’eux rentre dans la chambre et s’assied à un bureau, toujours dans ma ligne de mire. Il semble sortir un cahier et y inscrire des notes. Certainement un truc du genre « impôt non payé de la part de… ». Il m’énerve.
Viser… Tirer.
Le bruit du tir, couvert d’une part par le silencieux, et d’autre part par le feu et tout le bazar lié, disparaît dans la nuit. Mais la balle, elle, fend l’air jusqu’à aller transpercer le torse de Melchi, qui s’effondre sur son bureau. La balle ayant sifflé aux oreilles de Balthi, il se retourne vers son compagnon.
Viser… Tirer.
Pas de bol, toi tu l’as prise dans la tête. Tant pis.
Et toi, mon Gaspi, tu viens de capter que tes copains se sont fait descendre ? Tu viens de te retourner à ton tour, mais tu ne perds pas de temps, tu te précipites vers la porte.
Viser… Tirer.
Le bras, a priori. Merde. Va falloir y aller à l’ancienne.
Alors, sans enlever les accessoires de mon fusil, je le balance sur mon épaule et me précipite hors de la caserne, pour me faufiler jusqu’à l’autre bout de la place principale vers la taverne en empruntant au maximum les petites ruelles annexes et les zones d’ombre. J’en profite pour vérifier le chargement de mes deux barillets, et continue ma course, revolvers en main.
Pour le moment, j’ai trois millions qui m’attendent par terre, trois autres sur un bureau, et trois derniers qui gambadent avec une balle dans le bras droit. Arrivé à destination, je fais signe au responsable au comptoir de l’auberge de ne faire aucun bruit. Une brève apparition de ma carte de chasseur de prime lui fait comprendre la situation. Alors je monte les escaliers, sans un bruit, et trouve leur chambre, porte grande ouverte. Une fine traînée de gouttelettes de sang s’en échappe, se faufilant à travers le couloir jusqu’à l’autre bout.
Rapidement, je vérifie la chambre. Balthi, t’es bien mort, et Melchi, tu grommelles quelque chose. Bon, pas envie de m’occuper de deux fugitifs, je sors un couteau que je lui enfonce dans la nuque. Propre – quoique… – et sans bruit. Je chope la clé de la chambre, posée sur le bureau, referme la porte et la verrouille. Des fois qu’on vienne me chaparder six millions.
Puis je suis les traces de sang, jusqu’à un escalier de secours. Prudent mais pas moins rapide, je continue à travers plusieurs ruelles, jusqu’à une forêt. Bah tiens, oui, c’est original ça, aller se cacher dans une forêt quand on est blessé. Typiquement le scénario d’une traque classique, ça.
Sur mes gardes, j’entends quelqu’un bouger. Je m’approche, et je remarque une ombre assise derrière un bosquet. L’ombre se tourne vers moi.
- Pitié, non, pitié, laissez-moi vivre !
- Gaspi, mon bon Gaspi… J’apprécie pas tellement qu’on me mène en bateau ainsi.
- Me tuez pas ! Je vous paierai un million ! Non, deux millions !
- Désolé, tu en vaux trois.
BANG
Je sais, c’est expéditif. Mais je vais pas gaspiller ma salive pour Gaspi. Et puis, sur l’annonce, c’était écrit « mort ou vif ».
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Le lendemain, me voilà à nouveau à bord du navire avec lequel je suis venu. L’histoire a éclaté au grand jour, tout est officiel. Le Capitaine ne semblait pas mêlé à cette affaire, et j’aime bien le vieux loup de mer. Alors je lui fais confiance.
J’ai ramené les trois corps à la caserne, on m’a donné ma récompense. J’avoue que je ne cracherai pas sur neuf millions de berries !
Et, au passage, je suis allé voir dans les affaires de ces messieurs les mafieux. Eh bah les mecs, on s’embête pas dites donc… Six millions de berries en monnaie sonnante et trébuchante. A la caserne, on me dit que ceux-là aussi je peux les garder. Mais le tailleur est présent au moment des discussions, et j’ai pitié de lui. Alors, peut-être bêtement, je lui donne les six millions. Je sais que c’est peu pour tout reconstruire, mais au moins c’est un bon début.
Le capitaine du navire, quant à lui, a récupéré les produits entreposés dans son bâtiment et anciennement possédés par les trois zouaves.
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- Alors, Capitaine, on va où ?
- J’sais pas, une ville un peu plus grande ? Tu vas faire quoi de ton argent ?
- M’acheter du café. Et j’ai un petit projet intéressant…
- Quoi donc ?
- J’te dirai en route !-
[Fin de ce petit RP ! En espérant que vous avez apprécié la lecture !]