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Age Of Empire



[Précédemment : Main Noire]

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[Voici les PNJs utilisés dans ce RP : Les Boréalins et Karl Coldway]




L’officier avance à travers un paysage de désolation. Se frayant un chemin parmi les ruines des bâtiments et les innombrables corps qui jonchent encore le sol, il n’en croit pas ses yeux. Comment une telle chose a pu se produire ici ? Qui ? Pourquoi ?

Son regard balaie lentement le décor planté devant lui. Des cadavres, toujours plus de mort. Des débris, des pierres, des poutres. Même le sol est fissuré, victime de coups toujours plus puissants. La simple vue du résultat des événements qui se sont joués ici l’effraie.

Et il n’est pas le seul.

Dans des locaux de fortunes fabriqués avec des matériaux de récupération, quelques soldats attendent. Survivants, rescapés, ou ayant fui le combat, terrorisés. Mais cette fois, on les pardonne.

Ils n’étaient simplement pas de taille. Ils ne pouvaient pas gagner.

Mais avant de les rejoindre, l’officier subit un spectacle éteint, une nature morte dépeignant un drame récent. Le sang a depuis longtemps coloré la terre d’une teinte pourpre très marquée. Là, un crâne enfoncé, ici un torse, et là un corps percé de dizaines de balles. Beaucoup trop de morts.

Non loin de là, un autre cadavre, mais qui se démarque des autres. Totalement méconnaissable, vidé de ses organes, embroché sur une lance plantée dans le sol. Il n’a plus de tête, et elle ne gît pas à ses côtés. Impossible de déterminer de qui il s’agit. Mais le mort sans tête domine le paysage, s’offrant en spectacle pour qui réussira à soutenir sa présence sans tourner de l’œil.

L’officier résiste.

Puis rend son petit-déjeuner.

L’air matinal est encore empreint des relents de la mort, autant que de l’humidité habituelle de l’île. Cet événement, c’était hier.

L’homme atteint enfin la frêle construction et demande à parler à l’un des rescapés. Ils s’isolent tous deux, et l’officier commence à poser ses questions, cherchant à mieux comprendre. Mais le blessé s’effondre en pleurs, ne parvenant pas à lâcher ne serait-ce qu’un mot.

Demandant de l’aide aux médecins dépêchés sur place, il tente la même chose sur un autre survivant.

- Bonjour Soldat… Je cherche des détails. Pouvez-vous m’y aider ?
- Oui… je vais essayer…
- Bien. Quel est votre nom, Soldat ?
- Sergent Joe O. Bryan…
- Ah, veuillez m’excuser, sans votre uniforme…
- Vous en faites pas, ça n’est plus important. Rien n’est plus important maintenant…

Le sergent prend sa tête dans ses mains, tentant de se contrôler.

- Calmez-vous, Joe. Respirez profondément. Voilà, comme ça.

Il reprend le dessus sur ses émotions.

- Alors, Sergent. Dites-moi ce que vous pouvez. Essayez de me fournir le plus de précisions si vous vous en sentez capable. Toute information est bonne à prendre, même si cela vous paraît superflu. Commencez par le début, je vous en prie.
- Rien n’est superflu…

Il prend une grande inspiration et commence.

- Il est très tôt, ce matin, et c’est le moment où je prends mon tour de garde…

* * *

… Avec les camarades, on n’est pas spécialement fatigués, mais juste un peu blasés du climat qui règne ici depuis une semaine. Une sorte de brume incessante qui empêche de voir la mer. Oh, on peut observer le port, oui, mais plus loin c’est difficile. Comme à notre habitude, on surveille les alentours en discutant. Une manière de passer le temps. C’est pas comme s’il se passe grand-chose ici.

A un moment, on voit quatre hommes dont les silhouettes se dessinent à travers l’épais brouillard. Je ne sais pas pourquoi, mais à ce moment la brume a pris de l’ampleur et nous a caché leur arrivée. Mais maintenant on les distingue parfaitement. Ils se tiennent là, en bas de la caserne principale en haut de laquelle on effectue notre ronde. Nonchalants, ils ne semblent pas agressifs, du moins ce qu’on en pense. Ils nous rappellent plus des joueurs de sports variés : l’un tient une crosse de hockey, un autre une batte, et un troisième a un ballon sous le bras. Quant au dernier, on a du mal à identifier ce qu’il porte : un gros chapeau sur la tête et un autre gros disque dans le dos. Bon, faut dire que la brume complique la tâche.

Les quatre types sont là, à attendre on ne sait quoi. Ils sont extrêmement calmes et fixent tous le port par-dessus leur épaule.

Vous voyez comment est dessinée la zone militaire ? Ici à Lavallière, la zone fait plusieurs hectares. Depuis le port, une large allée mène directement à la caserne principale, bordée de nombreux bâtiments divers, comme des dortoirs, des armureries, ou même la prison. Et tout autour, dans tout le reste de la zone militaire, ce même type de bâtiments répartis en grille régulière. Enfin, évidemment que vous voyez de quoi je parle, c’est l’organisation typique des grandes bases. Bien séparée du reste de la ville de Lavallière.

On n’a pas le temps de les héler pour leur demander ce qu’ils font là que deux autres gars arrivent en trottinant depuis le port, à vitesse modérée, pas de quoi nous affoler. Ils tirent avec eux une boîte de laquelle se déroule un câble, câble qui court sur le sol depuis les quais. Mais encore une fois, le brouillard nous empêche de voir d’où ils viennent précisément.

Là on commence quand même à se poser de sérieuses questions avec les camarades, mais je sais pas pourquoi, on observe bêtement. Et à y repenser maintenant, donner l’alerte n’aurait servi à rien.

Ils commencent à parler entre eux, mais on les entend à peine. C’est quelque chose comme ça, amorcé par le type le plus bizarre qui porte la boîte au câble :

- Haha c’est bon, tout est prêt ! Alors, je peux je peux ?
- Fais toi plaisir, Firebullet.
- Hehe merci Al’. C’est parti pour le feu d’artifice !

Et c’est là que tout commence réellement. L’excité pose la boîte au sol, en retire un cache et dévoile une poignée. Il se place au-dessus, tire la poignée vers le haut, pose son regard vers le port, et redescend brusquement l’actionneur.

Et là…

Une explosion monumentale nous renverse tous, provoquant une onde de choc monstrueuse qui nous assourdit pendant plusieurs secondes. Les camarades et moi, on est tous sonnés par la puissance de la déflagration, on est tous à se plaquer les mains contre les oreilles, tentant en vain de se protéger les tympans d’un acouphène qui les abîme déjà.

Quand on parvient enfin à se relever, on remarque rapidement que la totalité des quais et des navires mouillant au port sont en feu. Et pas un petit feu, non, l’incendie dévastateur qui ne pardonne pas. Certains bateaux sont déjà en train d’amorcer leur descente dans les eaux, et d’autres continuent d’exploser de toutes parts. La luminosité qui s’en dégage passe aisément à travers la brume, et la force à se dissiper pour la remplacer par une épaisse fumée noire qui s’élève vers le ciel.

Et là, la désolation commence.

L’alarme est donnée un peu partout, mais le petit matin et la violence de l’explosion des quais rendent le réveil vraiment difficile pour tous les endormis, donnant du temps à nos nouveaux adversaires. Des camarades à moi, en poste sur le toit de la caserne, mettent le groupe des six individus en joue avec leurs fusils.

Mais avant d’avoir eu le temps de tirer, l’un se fait éjecter par un palet et deux autres se font descendre par des balles. Et juste à ce moment-là surgit le Colonel Earl Grey de l’escalier derrière moi, seul encore vivant en haut.

- Qu’est-ce qu’il se passe, bordel ?

Il est pas comme d’habitude le Colonel, pas de tasse de thé, mal coiffé, et pas son calme usuel. Il se précipite au bord du chemin de ronde pour observer la même scène qui me déchire la rétine depuis quelques instants, jetant au passage un regard inquiet vers mes trois camarades morts.

- J’sais pas Colonel, j’ai pas encore comp…
- EARL GREY !!!

Le type au grand chapeau s’avance de quelques pas en criant et pointe du doigt mon supérieur.

- JE VAIS TE CREVER !!!

Il a pas l’air spécialement content, c’est le moins qu’on puisse dire.

Et, alors que des soldats commencent à surgir d’un peu partout pour se précipiter vers le groupe pour rapidement se faire descendre, celui qui vient de gueuler s’arme de ce que je comprends être deux boucliers et commence à courir vers l’entrée de la caserne. Il est précédé d’un type qui fonce comme un dératé pour balayer d’un revers de bras tous les soldats qui tentent de les arrêter. Il s’arrête pas et rentre directement dans le bataillon qui vient de surgir de la porte, maintenant obstruée.

Alors le mec aux boucliers saute très haut, vers le mur du bâtiment, et donne un coup dans le mur avec une de ses armes. A l’impact, une explosion qu’on ne prêterait pas à un choc d’un bouclier sur de la pierre se produit, et le métal s’enfonce un peu dans la paroi. Puis, deuxième coup, deuxième explosion, et il continue ainsi, grimpant à la force de ses bras directement vers le toit, creusant au passage des prises dans le mur.

La vision apocalyptique des tarés en bas qui déglinguent je sais pas combien de bataillons et du psychopathe qui escalade le mur de la caserne me terrorise tellement que je prends mes jambes à mon cou directement vers l’escalier.

Mais juste avant de l’atteindre, le psychopathe arrive à sa destination, se jette sur le toit et envoie valdinguer le Colonel d’un revers de bouclier avant que celui-ci ait réussi à comprendre la situation.




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* * *

L’officier l’interrompt :

- Attendez, il a tué le Colonel comme ça ?
- Non non ! Très rapidement, il se relève…

* * *


… Et dégaine son épée, puis fonce sur son adversaire. Mais moi je ne cherche pas à comprendre et je descends les escaliers quatre à quatre. Vous m’excuserez hein, mais un type qui démonte un Colonel comme ça, je préfère pas l’affronter. J’arrive donc à l’étage inférieur et j’assiste à un capharnaüm comme j’en avais rarement vu. Les soldats courent dans tous les sens, se saisissent de leurs armes ou de celle d’un autre sans distinction, et se placent aux fenêtres où ils tirent comme ils peuvent sur nos assaillants.

Mais un à un, ils se font dégommer d’en bas par un tireur. Un gros calibre qui répand leur sang partout dans la pièce, atteignant mon visage alors que je suis de l’autre côté. Je panique totalement, mais je veux quand même voir qui provoque ce carnage.

Alors je me place près des fenêtres, essayant de ne pas me faire voir. Le tireur est au beau milieu de la place, barricadé derrière des corps entassés comme des sacs de sable. Il a construit cet empilement tout autour de lui, sur un bon mètre cinquante de hauteur, et il l’utilise pour se protéger. Il tire à tout-va dans les bâtiments autour, descendant ceux qui tentent de l’atteindre depuis les fenêtres. Il les tue à une vitesse fulgurante, et quand il doit recharger il se cache sous son mur de cadavres.

Au-dessus de moi, j’entends le combat entre le Colonel et l’homme aux boucliers. Le plafond tremble de plus en plus fort sous les coups, si bien que j’ai peur qu’il s’écroule.

Je m’éloigne des fenêtres, préférant ne pas devenir la cible du type d’en bas. Et soudain, l’un des murs du côté de la place explose. Ce dingue a tiré avec je ne sais quel canon, mais il est passé au calibre supérieur. Faire plus de dégâts ? Je ne sais pas, mais à entendre son rire de malade, je crois que c’est par pur amusement.

Alors je descends à l’étage inférieur, de peur de me prendre une balle perdue.

Là, j’entends mieux ce qu’il se passe au rez-de-chaussée, encore plusieurs niveaux en-dessous. Selon ce que je distingue au travers du brouhaha ambiant, un homme court partout en renversant tous les soldats. Il monte les escaliers, en descend d’autre, défonce des portes et des murs au passage, et nettoie les coursives de ses adversaires. En tout cas c’est ce dont j’ai l’impression

J’ai beaucoup de mal à comprendre ce qu’il se passe. Mais soudainement, me voilà happé par un type qui me pousse dans une salle connexe. Un Lieutenant de la base, qui a réuni ici pas mal de soldats.

- Bon tout le monde se calme, respirez, reprenez votre souffle les gars.

- On est en situation réelle, ok ? On va pas se laisser faire par des clampins, on va défendre notre base !

Il nous dévisage tous, balayant la vingtaine d’hommes réunis ici. Il nous regarde un à un dans le blanc des yeux, insistant pour qu’on le soutienne du regard.

- On est des soldats de la Marine ! Ici c’est notre base, ce sont nos logements, c’est notre métier ! On ne doit pas se laisser marcher dessus comme ça, faut arrêter de paniquer, d’avoir peur !

- On a été formé à ça, on s’est entraîné. Certes là dehors ils sont vraiment forts, mais on est beaucoup plus nombreux ! On va peut-être presque tous y rester, mais si ça peut permettre aux derniers debout de les achever, pour défendre cette base, alors on le fera !

Il désigne des râteliers partout dans la pièce : on se trouve dans l’armurerie, je ne l’avais même pas encore remarqué tellement j’étais obnubilé par la situation.

- Prenez toutes les armes possibles.

On se dépêche, le Lieutenant nous a redonné confiance en nous. On a la niak, la motivation, l’ivresse et l’adrénaline nécessaires pour remporter cet affrontement. On s’arme, on s’équipe. On est prêt.

- Suivez-moi ! Défendez cette base !

Il ouvre la porte à la volée et sort dans le couloir. Immédiatement, il se fait faucher par l’un de nos assaillants, celui qui court toujours à toutes blindes, distribuant sur son passage des coups d’un étrange ballon hérissé de pointes métalliques. Surpris, on passe la tête par la porte, la peur reprenant doucement le dessus.

Le fonceur a déjà tourné au bout du couloir, on l’entend courir au même étage le long des coursives. Alors, reprenant de la vigueur, on sort tous et on se met en position, tous prêts à l’accueillir.

- L… Lieutenant ?

Un soldat vient de remarquer le corps de celui qui vient de tous nous motiver pour nous battre. Il est au sol, piétiné, le visage écrasé et le corps lacéré. En un instant, le coureur lui avait fait des dégâts mortels. Là on ressent à nouveau la peur et on commence à paniquer, encore. Si bien qu’on ne prend pas garde, et qu’on n’entend pas notre adversaire revenir.

En bout de couloir, il prend un virage serré, marchant à moitié sur le mur, et accélère vers nous, tête baissée. Pas le temps de réagir, on se fait tous heurter de plein fouet par sa charge. Par chance, je suis propulsé dans la pièce d’où on vient de sortir, plutôt que sous ses pieds. Je l’entends continuer à courir, jusqu’à défoncer le mur du fond et sauter depuis notre étage vers le place principale, emmenant avec lui les soldats qui avaient été remotivés l’espace d’un instant.

Je suis à nouveau seul, mais le silence ne daigne pas poindre. Dehors, les tirs continuent, à croire qu’il a une réserve de munition digne d’un trafiquant d’armes.

Et au-dessus… Au-dessus, un craquement fait résonner toute la structure. Au bruit, je devine qu’un plafond vient de céder, amenant les deux duellistes directement au-dessus de moi. Les fondations vibrent à nouveau, jusqu’à ce que la résistance de mon plafond cède à son tour.

Avec la chute de pierres, je vois le Colonel qui tombe, dans la salle où je suis. Je me cantonne à mon coin, me cachant derrière une table, espérant de tout mon cœur ni me faire remarquer ni me prendre un dommage collatéral. Il est mal en point, le Colonel, mais je n’ai ni le courage ni les moyens de lui porter secours. Surtout que son adversaire, l’homme aux boucliers, vient juste de sauter pour nous rejoindre.

Il est assez grand, vêtu d’une armure à plaques de couleur gris-foncé. Sur son dos, une cape d’un blanc éclatant épouse ses mouvements, ondulant au gré du vent que ses déplacements provoquent. Et sur cette cape, un motif d’un noir profond, un symbole.

Une Main Noire.

Et sur l’un de ses boucliers, qu’il tient en main gauche, le rappel de ce symbole. Toujours cette Main Noire.

Le temps semble être arrêté, si bien que j’arrive à bien le regarder. C’est surtout son visage qui m’intrigue, outre son armement et son accoutrement atypiques. Sa peau est blessée de partout, des dizaines de cicatrices refermées depuis plus ou moins longtemps ornent sa figure. Des coupures, des arrachements, toutes sortes de dommages qui ont pu lui être causés.

De l’autre côté de la pièce, le Colonel Earl Grey se relève péniblement. On sent qu’il est mal en point. De son nez coule un léger filet de sang, et son visage est tuméfié par des coups répétés des boucliers de son adversaire.

Mais le Colonel, il ne s’avoue pas vaincu aussi facilement. Aucun des deux duellistes ne dit mot, mais ils semblent se connaître d’une manière ou d’une autre. Se sont-ils déjà affrontés ? Je n’y comprends rien, mais je continue à observer.

Se reprenant en main et resserrant sa prise sur son épée, mon supérieur se lance à nouveau à l’assaut. Il semble avoir repris du poil de la bête, perçant parfois les défenses du manieur de boucliers, pourtant impénétrables à première vue. Les deux combattants se meuvent à une vitesse fulgurante, chacun autant sur la défensive que l’offensive, parant, bloquant, esquivant, déviant et feintant.

Les ripostes semblent encore plus dangereuses que les attaques, ripostes elles-mêmes contournées et suivies d’un assaut encore plus puissant. A ce niveau-là, il ne s’agit plus d’une simple danse martiale, mais bien d’un spectacle comme rarement un homme peut en voir dans sa vie.

Je sens que petit à petit ils fatiguent dans cette passe d’arme, si bien qu’au fur et à mesure, chacun parvient à blesser l’autre de manière superficielle. De nouvelles cicatrices viendront s’ajouter au visage déjà lacéré de l’homme à la Main Noire, et des côtes à réparer viendront compléter le futur bilan médical du Colonel.

Dans cet affrontement, alors que la tension est à son comble, ce que j’espérais depuis le début arrive enfin : l’officier Grey, dans une attaque en profondeur, plante sa lame dans la cuisse de son adversaire, juste à l’endroit où son armure se termine. Alors, dans un puissant mouvement, il éjecte le Colonel, que son attaque a exposé, pour qu’il aille directement s’encastrer dans le mur d’en-face.

A ce moment-là, une unité de soldats franchit la porte, attirée par le bruit du combat. Ils remarquent leur Colonel, encore vivant mais peinant à se relever, et décident de charger l’homme aux boucliers. Ce dernier parvient à extraire la lame dans un râle de douleur et donne des coups à tout-va dans le bataillon. Rapidement, des débris volent dans tous les sens, et je me retrouve expulsé de la salle en même temps que les soldats, victimes des coups à répétition de notre ennemi.

Me rendant compte du peu de temps qu’il a mis à se débarrasser de ses nouveaux assaillants, ni une ni deux, je m’enfuis de là, laissant malheureusement mon pauvre Colonel l’affronter seul. Mais soyons honnête, je serais mort sur le coup.

Je descends donc quatre à quatre les escaliers, espérant trouver des alliés, bien décidé à repousser les autres adversaires, peut-être plus à ma hauteur. Je l’espère.

Arrivé au rez-de-chaussée, je me fais à nouveau happer par une main depuis une salle, qui me jette dedans d’une manière bien plus violente qu’auparavant.

Et là, j’assiste à un spectacle des plus effrayants.

Nous sommes une trentaine de soldats, agglutinés contre les murs de la salle dépourvue de fenêtre. Dans l’encadrement d’une porte qu’il vient de refermer, un homme à la musculature puissante nous barre la route. Des cadavres à la tête explosée, répandant leur contenu par terre, tapissent le sol.

Et, dans la main de l’homme, une batte en bois, teintée d’un rouge écarlate que je commence à bien reconnaître.

- On joue ?




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* * *


En écoutant le Sergent, l’officier est abasourdi.

- Une batte ? « On joue » ? Mais c’est qui ces types ? Entre le premier qui se promène avec deux boucliers, l’autre qui court avec un ballon, et celui qui se fait une muraille de cadavres ! Qu’est-ce qu’ils nous veulent ?
- J’en sais foutrement rien…
- Bon, continuez Joe…
- A ce moment-là, avec les gars on se demande un peu ce qu’il se passe, voyez. C’est pas super courant comme scène de bataille…
* * *


… Nous on sait bien qu’il s’agit d’un ennemi, alors on se regarde tous, et dans un élan général on se précipite sur lui. Je sais pas pourquoi, mais on a retrouvé une certaine bravoure. Sauf que dès qu’on est à portée de sa batte, on se fait exploser. Je vois encore les lambeaux de peau voler à travers la pièce et dessiner des œuvres morbides sur les murs.

Vous vous en doutez, si je suis là pour en parler c’est que j’ai eu de la chance. L’un de ses coups envoie valdinguer un camarade directement sur moi, et je m’écroule sous le poids du corps inanimé. L’homme à la batte commence à construire un amoncellement de soldats, directement sur moi. Je sais pas pourquoi, mais il semble prendre plaisir à les entasser là.

Il ne me remarque pas, et d’un côté je m’en réjouis. Bon, de l’autre côté je suis coincé sous des corps plus ou moins morts, dégoulinant de sang. C’est pas super, je vous l’accorde. Le type fait le tour du tas, regardant chaque crâne défoncé, approuvant ou désapprouvant le résultat.

Tous des psychopathes en fait.

Là-dessous, tous les bruits du dehors sont étouffés. J’ai l’impression d’être dans un cocon et que le temps s’est arrêté. Lentement, je pousse les corps, y mettant toute ma force. Mais ça prend un temps fou. Je n’entends presque rien, je n’ai aucune idée du temps qui s’écoule. Peut-être que ça me paraît infiniment long et que ça ne dure que quelques minutes, ou bien l’inverse.

Je n’en ai aucune idée.

Je me fraie une sorte de chemin, en rampant, grappillant centimètre après centimètre. Un filet de sang glisse le long de mon visage, je panique, de peur d’avoir été blessé sans m’en rendre compte. Après de longues et vaines tentatives, je parviens enfin à toucher mon front de ma main. Effectivement, mon arcade est ouverte, et les frottements avec les cadavres autour de moi ne font qu’amplifier la chose.

Mais bon, j’ai pas tellement le choix. J’ai de plus en plus de mal à respirer, d’une part à cause du poids sur ma cage thoracique, d’autre part certainement à cause de l’oxygène qui commence à manquer. Je suis sous une trentaine de corps, baigné dans le sang, dans une sorte d’igloo hermétique. Le sang environnant pompe tout l’oxygène de l’air pour coaguler, et du coup moi j’en manque.

J’ai beaucoup de mal à réfléchir, et l’idée que je puisse y rester aussi bêtement me terrorise. Ma respiration s’accélère pour tenter de capter plus d’oxygène, mais ça n’y fait rien. J’ai juste l’impression d’être impuissant.

Donnant un dernier coup de poing dans une direction que je ne saurais décrire, je pousse un corps qui tombe de l’amoncellement, en entraînant d’autres. Victoire ! Une petite ouverture est créée, juste de quoi me permettre de respirer un peu mieux. Mais il y a toujours ce foutu poids sur mes poumons qui m’entrave.

Quoi qu’il en soit, en un temps infini je m’extraie enfin de là, en assez mauvais état. Les sons me reviennent difficilement, jusqu’à ce que je me rende compte qu’un bouchon de sang coagulé – pas mon sang, a priori – obstrue chacune de mes oreilles. Je parviens à les enlever et recouvre l’ouïe. Mais ça ne me donne pas beaucoup d’indications sur le temps que j’ai pu passer là-dessous.

J’effectue un rapide check-up de mon corps vérifiant mes blessures, mes os, ma peau… Et je crois que je m’en tire bien, à part l’arcade, qui va me laisser une vilaine trace.

En me dirigeant vers la porte, j’entends de nombreux pas dans le couloir. Vue la quantité, ça ne peut qu’être des soldats. Je prends le risque de jeter un œil, et la vue de tant de camarades, vivants, me rassure. Ils se précipitent à un étage supérieur, disant qu’il y reste encore des armes, que la sortie au rez-de-chaussée est condamnée et qu’il faut monter.

Alors je les suis, parce que je n’ai pas envie de rester seul, et parce que merde, je suis un soldat après tout. Et que faut bien se défendre.

Là-haut, on dévalise pour ainsi dire l’armurerie.

Dans les escaliers menant plus haut, on entend des bruits de ferrailles qui dégringolent. Et là surgit l’homme aux boucliers, recroquevillé, qui dévale les marches contre son gré. On se fige tous, se demandant si on doit aller au-dehors comme on l’a prévu ou si on doit affronter cet adversaire clairement pas de notre niveau.

Mais le Colonel arrive, l’air nonchalant, plus calme que tout à l’heure, descendant posément les marches l’une après l’autre. Evidemment, ça nous rassure, on retrouve enfin notre bon Colonel avec ses manières habituelles ! Préférant la sécurité, on s’écarte un peu, mais on ne peut pas s’empêcher de regarder.

L’officier Grey est salement amoché, mais pas moins combattif. Excellent bretteur, qu’on nous a toujours dit. Et là, on peut enfin le vérifier de nos yeux. Rapidement, l’homme à la Main Noire commence à se redresser, mais est renvoyé au sol par un coup de pied de l’épéiste.

- Vous croyiez pouvoir venir ici comme ça ?

Le Colonel continue d’avancer, donnant quelques coups à son adversaire qui ne parvient même plus à se redresser convenablement, tant son bourreau est rapide.

- Tous nous tuer ?

Coup de pied.

- Nous vaincre ?

Coup d’épée.

- Gagner contre la garnison de Boréa ?

Encore.

- Vous avez déjà perdu aux plaines de Bocande.

Et encore.

- Vous avez déjà perdu en mer !

Et encore.

- Vous allez perdre ici encore !!!

Le Colonel domine, et ça fait plaisir à voir, après la tannée qu’il s’est prise plus tôt. Dans un dernier élan, le type aux boucliers parvient à contrer les attaques de l’officier Grey et le repousse, pour se précipiter dans les escaliers, remontant d’un étage. Sa Némésis le poursuit immédiatement, et les rumeurs d’un combat encore plus intense reprennent au-dessus de nous.

Là seulement, on reprend conscience de la réalité des événements. On a tous eu plus ou moins l’impression de regarder une scène fictive, ça n’avait pas l’air vrai tellement c’était puissant. L’un des soldats gueule à tout le monde de sortir par-là, montrant une ouverture dans le mur effondré. Dans ce genre de situation, il n’y a plus tellement de supérieur hiérarchique dans les hommes du rang. On suit tous la même ligne directrice, et surtout on suit tous celui qui a le plus de charisme et le meilleur plan du moment.

En l’occurrence, le meilleur plan s’avère être le seul.

Alors je suis le flot. Un éboulement nous permet de passer du premier étage directement au sol de la place centrale. Là, le taré aux diverses armes à feu se planque toujours derrière ce qui ressemble maintenant à une forteresse de corps sans vie, plus rouges qu’autre chose.

Mais la place est remplie de centaines de soldats. Beaucoup tombent sous ses tirs, mais beaucoup plus parviennent à avancer, mètre après mètre. Tout le monde fait feu dans sa direction, et rapidement on est tellement nombreux qu’il n’ose plus passer la tête pour nous tirer dessus.

Alors qu’on pensait enfin en tenir un à notre merci, aux quatre coins de la place apparaissent quatre silhouettes. Le batteur, le type à la crosse, le fonceur et un quatrième, dont je n’arrive pas à déterminer les armes. C’est lui qui prend la parole, et sa voix porte facilement à travers le bruit ambiant des coups de feu.

- N’essayez même pas de vous approcher plus près de lui.





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* * *

- Et ils venaient d’où ceux-là ? Je croyais que vous remplissiez la place ?
- On le croyait aussi. J’ai aucune idée du pourquoi du comment…

* * *

… Derrière chacun d’entre eux, des bâtiments en feu, à croire qu’ils y étaient juste avant. Quoi qu’il en soit, on se fait totalement submerger par des attaques croisées.

Le joueur de hockey nous balance des palets à n’en plus finir, assommant un à un mes compagnons, tout en tournant à toute vitesse autour de nous. Il n’a ni patins ni rollers, mais il court comme s’il glissait, sans souci, sans difficulté. Il distribue des coups sur son passage, sans jamais ralentir la quantité de palets envoyés.

Le fonceur est impossible à arrêter. Il trace à pleine bourre à travers nos lignes, une main devant, et l’autre filant des coups de ballon piquant à nos troupes. C’est simple, tous se font dégager sur son passage. Arrivé en bout de course, il se retrouve face à un mur mais ne s’arrête pas pour autant. Il le brise et passe au travers, puis réapparaît de l’autre côté du bâtiment et revient nous charger de plus belle.

Le batteur, lui, semble prendre un incroyable plaisir à nous offrir un traitement spécial. Armé de son jouet préféré, il tente depuis tout à l’heure de tester notre « profilé ». Enfin, c’est ce qu’il raconte, mais nous on pige pas. Pour cela, il essaie de faire voler les soldats et de les faire passer par-dessus le toit du bâtiment d’en face. Malheureusement ça ne marche pas trop, et les pauvres victimes d’un coup de batte déjà démesurément puissant se heurtent à un mur de pierre un peu trop solide.

Et enfin… le quatrième…

C’est atroce. Purement terrifiant. Aucun d’entre nous n’a été formé à ce type de situation, et encore moins à son style de combat. On en a entendu parler, quand on mentionne les agents du gouvernement par exemple, mais le voir à l’action c’est… Bah si ça n’était pas notre adversaire, ç’aurait été un beau spectacle. Mais là je ne suis pas vraiment enjoué d’observer sa prestation.

Il se déplace tellement vite qu’on ne peut le suivre. En un instant plus rapide qu’un claquement de doigts, un soldat s’effondre. Puis un autre, un autre, et un autre. Encore, et encore, et encore. Et encore. On ne comprend rien à rien, on n’arrive même pas à déterminer où il est. Mais tout ce qu’on sait, c’est qu’il marche à travers les ombres et nous tue, un à un.

Alors on adopte des formations, serrées, en cercles fermés, fusils pointés vers l’extérieur. Tous les soldats de la place font ça, il semble que ça soit la seule technique envisageable, et la plus simple à exécuter. On n’a pas de supérieur qui nous donne des autres, ils sont soit morts, soit trop effrayés. Et pour le Colonel, je dirais qu’il est un peu trop occupé pour daigner nous éclairer de sa lanterne. Et je ne le blâme pas, ça dépote sévère dans la caserne.

D’ici on entend clairement leurs passes d’armes, et on passe notre temps à prier pour que ce soit l’officier Grey qui l’emporte. Enfin, prier… C’est vrai qu’on a plus urgent à penser là tout de suite.

Je suis dans le groupe de soldats le plus proche du joueur de hockey, et par la force des choses je crains que ça ne soit lui qu’on doive affronter. Enfin, je crains… Les autres ça aurait peut-être été pire.

Et là, on fait quelque chose dont je me souviendrai tout le restant de ma vie. Notre but, c’est de nous protéger des centaines de palets avec lesquels il nous canarde, ainsi que de sa crosse avec laquelle il nous frappe sans cesse. Alors on cherche de quoi se protéger. La seule chose envisageable, il y en a à foison tout autour de nous. C’est juste que c’est… spécial.

Quoi qu’il en soit, on n’a pas tellement le choix. Mon unité de fortune et moi, on dresse une rangée de cadavres devant nous, en guise de boucliers, et on avance avec. Oui, des boucliers humains. Et franchement, l’idée ne nous plaît absolument pas, mais on n’a pas vraiment envie d’y laisser notre peau.

Je dois avouer que j’en suis malade, d’en être réduit à une telle extrémité. Mais la situation nous y oblige. Il faut qu’on se défende, il faut les repousser.

Petit à petit, on arrive à submerger notre adversaire, on l’entoure, on est tellement nombreux qu’il ne sait plus où donner de la tête. On a déjà essayé de lui tirer dessus, mais il se sert de sa crosse pour dévier les balles. Je ne sais pas comment il fait, mais ça a l’air d’être un bon. Alors on passe à l’arme blanche, on dégaine nos sabres, et on charge, venant de toutes parts autour de lui.

La plupart d’entre nous se prennent une tannée monumentale, mais au final on arrive à le contrôler, en lui sautant dessus, donnant des coups comme on peut sur ce qu’on peut. Ses équipements et protections font bien leur travail et lui évitent une douleur trop grande, mais on sent qu’il est pas dans ses meilleurs jours.

N’étant pas au centre du tas, je jette un coup d’œil au reste de la place. Partout il se passe le même type de scène. Notre nombre important nous permet d’avoir une supériorité quelque part, et on les submerge. Toutes les unités s’entassent sur leur adversaire, bêtement mais simplement. Technique de base, seule efficace dans ce cas de figure.

Sauf qu’on a oublié un détail non négligeable…

Le cinquième homme.

Celui du centre de la place, qui était resté caché derrière ses murailles de corps.

Sous mon regard effrayé, impuissant, je le vois qui se redresse et brandit une arme à feu à répétition. Il la dirige vers les tas de soldats qui commencent à contrôler ses coéquipiers, et il tire, sans s’arrêter.

Et ça fonctionne. De cette manière, il débarrasse ses alliés de leurs adversaires, leur permettant de nous foutre une bonne rouste derrière. Il maintient sur nous tous un feu nourri, nous empêchant de continuer l’assaut.

Notre premier réflexe ? Aller nous cacher dans les bâtiments autour de la place. En fait, on retrouve notre configuration de départ, fuyant tous la place principale.

J’entre donc dans une construction sans même savoir laquelle. A l’intérieur, la lumière ne fonctionne pas, mais je crois reconnaître un entrepôt de matériaux et outils divers. Pas une armurerie en tout cas. Mais ce qui m’inquiète, c’est qu’à un moment, en regardant vers la porte d’entrée, j’aurais juré voir une ombre rentrer à toute vitesse, dans un mouvement presque imperceptible.

Et ma crainte est renforcée par la porte qui se ferme brusquement, et une voix ténébreuse qui se fait entendre :

- Bienvenue dans mon monde…

De faibles lumières rouge s’allument au plafond. Pas assez puissantes pour qu’on s’y retrouve, mais suffisamment pour y voir à deux ou trois mètres, et surtout pour nous foutre la trouille. Quelques soldats se précipitent vers la sortie et tentent en vain de forcer la porte. Mais elle semble condamnée.

Nous voilà tous coincés dans un entrepôt, baignés d’une lumière rouge oppressante, avec un adversaire de taille à l’intérieur. Je n’ai absolument aucune idée de combien on est là-dedans, mais je sais que le nombre ici ne risque pas de faire la différence.

Juste à côté de moi, un soldat s’effondre, raide mort. Je me penche vers lui pour voir un clou planté dans son front.

- Saurez-vous éviter mes pièges ?


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* * *


- Oh, deux secondes… Ce comportement, ça me rappelle quelqu’un, un ancien membre du Cipher Pol, un simple agent en formation, mais j’avais entendu parler de lui… Décrivez-le-moi, Sergent ?
- Euh… Un peu plus grand que la moyenne, la peau noire, le visage assez dur, un regard pénétrant… Bon, j’peux pas trop vous en dire plus hein, pour le peu que je l’ai vu…
- Vous avez parlé de pièges, non ? Et d’un déplacement rapide ?
- Le déplacement, j’aurais plutôt dit une téléportation, on ne pouvait même pas voir ses mouvements !
- Et les pièges ?
- Il a construit un véritable labyrinthe mortel en quelques instants, avec ce qu’il a trouvé dans le hangar…
- C’est bien ce que je pensais…

Adam Lame. Nom de code lorsqu’il était au Cipher Pol : Trap. Au début, il avait bien plu à ses supérieurs, par sa capacité à créer des armes létales à partir de n’importe quoi. Vraiment, n’importe quoi. Mais il n’était pas vraiment raccord avec le protocole, ce qui lui a valu de se faire renvoyer. L’officier avait eu vent de cette affaire et s’y était intéressé, car Adam était natif de Boréa, tout comme lui.

- Continuez, Joe…
- J’aimerais autant pas continuer… Voyez, la suite je préfèrerais l’oublier à jamais…
- Allez, faites un effort, je suis avec vous. Courage.
- Comme vous voulez…
* * *


L’enfer commence.

- AAAAAAaaahh nooooon, noooooooon !!!

CLANG

Un hurlement à déchirer les cieux. Je n’ai aucune idée d’où ça vient, tous les bruits dans l’entrepôt résonnent contre les murs et me reviennent, j’ai du mal à me repérer par rapport aux sons que j’entends. Le bâtiment semble pas mal isolé de l’extérieur, on n’entend qu’une rumeur de ce qu’il se passe au-dehors.

Et dedans… Dedans, tout est silencieux, sauf quand l’un de nous se fait attraper. Ce cri, il aurait foutu la trouille à n’importe qui. Alors imaginez nous, dans notre situation, entendant ça. Et ce bruit, juste derrière, un bruit métallique, je n’ai aucune idée de ce dont il s’agit. Mais l’homme a cessé d’hurler immédiatement, et je ne connais qu’une seule explication à cela.

Comme pour confirmer mes craintes, alors que je marche d’un pas silencieux en frôlant les étagères remplies de matériaux et d’outils, j’aperçois des jambes qui sortent de dessous une poutre en fonte. Une mare de sang croît au fur et à mesure que le corps se vide de son sang.

Il y a d’autres soldats encore avec moi, mais ça ne me rassure pas du tout. Ils font un peu trop de bruit en marchant, et j’ai peur que ça nous fasse repérer.

Dans l’écho général, on entend un nouveau cri, des tirs du fusil, des coups, puis plus rien. Et enfin, le lourd bruit sourd d’un corps qui s’effondre. Derrière moi, l’un de mes camarades jette soudainement ses mains à sa gorge, comme pour retenir quelque chose qui l’étranglerait. Dans un râle étouffé, il est forcé à reculer et disparaît dans l’ombre.

Moi et les trois autres types restant, réflexe idiot, on met en joue la zone noire et on tire, nerveusement. On sait bien qu’on va tuer le soldat, mais on sait qu’on va aussi toucher notre bourreau.

Sortant de la pénombre, le corps plombé de notre compagnon s’effondre devant nos yeux hagards. Immédiatement après, le soldat le plus près de moi se prend lui aussi la gorge et recule dans l’obscurité d’une étagère. Les deux autres soldats laissent tomber leurs armes dans un tremblement psychotique et partent en courant, moi à leurs talons, pas plus courageux.

Les rayons de l’entrepôt défilent à côté de nous, et rapidement je me retrouve en tête de notre trio de fuyards. On tourne presque à tous les embranchements, cherchant notre chemin de manière totalement aléatoire, sans savoir où cela va nous mener. Le fait est qu’on tourne en rond sans s’en rendre compte, mais qu’importe : plus on court, plus on a l’impression qu’on va échapper au danger.

Jusqu’à ce que le soldat qui ferme notre course se fasse happer sur le côté et disparaisse dans un hurlement d’effroi. Plus que deux. On accélère de plus belle, l’autre me dépasse et prend la tête.

Au bout d’une rangée d’étagères, on voit un mec crucifié bien en hauteur, expirant difficilement dans un râle d’agonie. On ne s’arrête pas. Plus loin, un autre corps, cette fois-ci pendu avec du fil barbelé. On continue à courir.

Dans l’écho environnant, on entend un bruit de perceuse, puis un « spluitch » caractéristique. Un bref cri, un corps qui s’effondre. Puis du verre qui se brise, un autre cri, un autre corps. Là, devant nous, dans un coin, un soldat recroquevillé sur lui-même qui pleure, la tête dans les genoux. Cette fois-ci, on s’arrête, considérant que les deux derniers bruits qu’on a entendus sont assez lointains dans le hangar.

Je m’approche de lui, pose une main sur son épaule, et il relève ses yeux ruisselants de larmes vers moi. Je réprime un haut-le-cœur, découvrant qu’il tient dans sa main son autre main, détachée de son avant-bras. Et là, après un « tchac » résonnant, sa tête bascule sur le côté, la tempe percée par un clou.

A nouveau pris d’une panique sans nom, moi et mon compagnon d’infortune reprenons notre course haletante. Dans l’entrepôt, un rire oppressant rythme nos pas, jusqu’à ce que mon camarade se fasse projeter en l’air. Je comprends immédiatement qu’il a mis le pied dans un piège. Le câble, monté sur un système que je suis incapable de voir, le fait rapidement monter vers le plafond. Là, deux lames tenues par un mécanisme viennent prendre son corps comme une paire de ciseaux et le coupent en deux. Les parties de son corps disparaissent alors à mes yeux, et c’est certainement une bonne chose.

Je continue à courir, seul le bruit de mes pas résonne encore dans le hangar. J’ai l’impression d’être seul, mais je sais qu’un psychopathe est là, avec moi, et qu’il me traque, cherchant comment bien conclure sa prestation.

Et, comme pour me donner raison, je trébuche sur un parpaing, pour m’effondrer directement dans un filet métallique. Le piège se referme autour de moi et monte, tracté vers le plafond. Un « clic » sonore entraîne l’allumage de la lumière dans tout le bâtiment, m’aveuglant à moitié. Au fond, j’aperçois mon bourreau, admirant son travail.

Et c’est seulement après que je remarque sur le côté une grosse pierre ronde qui roule doucement dans un canal d’acier. Arrivé en bout de course, la pierre tombe dans une grosse cuillère qui fait balancier, venant activer un engrenage. Une roue, deux roues, trois roues, et je ne les compte même plus. Les efforts se démultiplient pour enfin amorcer un nouveau balancier, dans le fond. Le poids en son extrémité heurte un mécanisme indescriptible. Je suis des yeux ce mécanisme qui avance lentement, pour comprendre qu’il va venir larguer une énorme hache, attachée à un long câble juste au-dessus de moi. Autrement dit, je sais à ce moment-là que je vais me la prendre en pleine poire.

Le mécanisme arrive à sa fin, déclenche le système, et la hache amorce sa chute dans ma direction. Et, à ma grande chance, elle me frôle, pour aller s’encastrer dans le mur juste derrière moi.

- Merde, mal réglé…

J’ai juste le temps de comprendre qu’il vient de foirer son piège final qu’une puissante explosion détruit l’une des parois du hangar, soufflant tout ce qui s’y trouve. Le filet dans lequel je suis retenu prisonnier tombe au sol, me libérant en même temps. Je peine à me relever, sonné par l’onde de choc et la chute. Lorsque j’y parviens enfin, et que j’arrive à m’extraire de l’entrepôt, c’est pour que se dessine devant mes yeux un champ de bataille rendant la zone militaire méconnaissable.

Des ruines, partout, des morts, du sang, des débris, des morceaux de chaire, partout autour de moi. Ça-et-là, des soldats tentent encore de résister. Et, comme par miracle, de derrière un monceau de ruines arrivent plusieurs bataillons certainement alertés dès le début des hostilités. Je ne sais pas combien ils sont, mais leur nombre impressionnant me soulage.

Coincé dans une sorte de prison de débris, je ne peux qu’observer le déroulement des événements.

De l’autre côté de la place surgissent les cinq hommes : le batteur, le fonceur, le joueur de hockey, le tireur fou et l’as des pièges.

Et là, en haut de la caserne qui me fait face, une fenêtre explose. De cette fenêtre, un corps est expulsé. Ce corps, c’est le Colonel Earl Grey, très mal en point. Il est entravé par des liens épais, couleur acier, et ne semble pas pouvoir s’en dépêtrer. Il tombe, suivant la courbe logique de sa chute, pour venir violemment heurter le sol.

A la fenêtre, on aperçoit le manieur de boucliers, fier, droit, qui jette un œil approbateur sur la situation. Des bataillons complets d’un côté, ses alliés de l’autre, des ruines à perte de vue, et son adversaire par terre, emprisonné d’une manière que je ne comprends pas.

Alors il saute, un bouclier en main, l’autre sur la tête. Il arme son bras en arrière, et juste au moment d’atterrir, donne un puissant coup sur le corps du Colonel, qui se cambre sous la contrainte physique. Inconscient, mais peut-être encore en vie.

L’homme à la Main Noire se redresse, regardant ses alliés, et leur esquisse un sourire carnassier. Puis il se tourne vers les nombreuses divisions de la Marine qui ont déjà amorcé leur charge.

Et là, à eux six, ils chargent.


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* * *


- Joe, comment vous avez fait pour survivre à ce qui a suivi ?
- J’vous l’ai dit, j’étais plus ou moins coincé par des décombres. Et, honnêtement, j’avais eu ma dose de combats pour pas mal de temps…
* * *


Les nouveaux bataillons arrivent juste, tout frais, tout neufs, ne sachant même pas ce qui les attend. Leurs six adversaires s’avancent rapidement, déterminés à en finir. Quelques mètres avant le choc, leur leader s’élance en l’air d’un bond, armant son bouclier.

- KIRETSU

D’un coup puissant, il provoque une explosion au sol, qui engendre de multiples fissures, se propageant à travers les lignes adverses. De nombreux soldats, déstabilisés et sonnés par le choc, perdent l’équilibre et s’effondrent, peinant à trouver des appuis stables sur le sol chaotique.

L’instant suivant, les deux camps se heurtent. Je vois des quantités de soldats voler dans tous les sens sous les coups démesurés des six. Les attaques pleuvent, les balles sifflent. Ils sont rarement touchés, mais quand ils n’arrivent pas à esquiver, les blessures ne semblent que superficielles. Parfois, l’un d’eux se fait submerger par la masse d’adversaires, mais il se fait rapidement aider par un autre. Et c’est comme cela qu’ils fonctionnent : veiller sur leurs coéquipiers. Une vraie équipe, solide, soudée.

- AWASE BAORI

Le type à la Main Noire fait jaillir de ses bras un gigantesque arceau ressemblant en tous point à de l’acier. Entourant un bataillon entier de soldats, il resserre le cercle subitement. Sur le coup, je ne comprends pas bien ce qu’il se passe, je ne fais que voir quelque chose d’irréel à mes yeux. L’immense arceau emprisonne tous les soldats qui étaient à l’intérieur, les entravant dans des liens qu’ils ne peuvent briser.

Et il continue ainsi, distribuant des coups et piégeant ses adversaires. J’ai maintenant compris qu’il s’agit d’un fruit du démon, un pouvoir qui le place au-dessus des autres. Et là, plus qu’à tout autre moment, je réalise que la situation est définitivement désespérée.

Ma vision des événements est confirmée par un cri de l’homme aux boucliers.

- Stop !

Il donne un puissant coup de son arme au sol, provoquant une nouvelle onde de choc qui abasourdi tous les militaires.

- Arrêtez-vous !

Sans vraiment savoir pourquoi ils l’écoutent, tous interrompent leur mouvement, dans un camp comme dans l’autre. Des regards ahuris, bouches bée, du côté des soldats, et des regards déçus dans les membres de son équipe. Surtout le type aux flingues, qui jette ses armes au sol dans un grognement de désapprobation.

- C’est vraiment ça que vous voulez ? Donner votre vie pour votre Colonel ?

Il balaie du regard l’assemblée. La place entière est remplie par la Marine, avec en son centre la majorité des corps morts ou gravement blessés, au milieu desquels trône le groupe d’assaillants veillant à ce que leur proie, Earl Grey, reste entre leurs mains.

- Car c’est ce que tous les soldats depuis notre arrivée ont décidé de faire. Et maintenant, ils sont morts !

Il fait une pause. Si le courage pouvait se lire auparavant sur le visage de la plupart des militaires, c’est maintenant la peur et le doute qui y sont flagrants.

- Je ne suis venu que pour Earl Grey. Je ne suis venu que pour le tuer ! Pour me venger de ce qu’il m’a fait par le passé !

Les Marines se regardent entre eux, comme pour se demander ce qu’ils doivent faire.

- Il est naturel que vous le défendiez. Mais maintenant, c’est trop tard. Vous l’avez vu et le voyez encore : ceux qui s’opposent à nous meurent. Et nous pouvons continuer ainsi longtemps. Peut-être à la fin de la journée arriverez-vous à nous submerger. Parce qu’il y aura des renforts. Parce que nous fatiguerons.

Nouvelle pause, pour marquer le coup.

- Mais vous tous, ici, autant que vous êtes. Vous qui êtes présents alors que je parle. Vous qui venez d’arriver en renforts. Vous faites partie de ceux qui n’y parviendront pas, et qui laisseront leur vie sur ce sol pour tenter de nous fatiguer. Vous tous.

Il pointe son doigt sur son auditoire, montrant un à un les hommes.

- Toi. Toi. Toi aussi. Et toi. Chacun d’entre vous. Sans aucune exception. C’est ce que vous voulez ? Mourir, dans l’espoir futile que les suivants y parviendront ? Est-ce pour cela que vous vous êtes engagés ? Pour voler au secours de ce Colonel que vous ne sauverez de toute manière pas ?
- Ne parlez pas trop vite, Kaltershaft.

Earl Grey. Il se tient debout, son épée à la main. Il tremble de douleur, mais il est bien là, face à son adversaire. Il est parvenu à se défaire de ses entraves, je ne sais comment, mais le voilà de retour.

- A l’assaut !

Mais personne ne bouge. Les soldats s’échangent des regards indécis, effrayés à l’idée de la mort, effrayés à l’idée de se prendre un coup de batte, de crosse, une charge violente, un tir mortel ou un surin en travers de la gorge.

L’équipe de celui dont je viens d’apprendre le nom, Kaltershaft, entoure les deux hommes, formant une zone inaccessible pour les soldats. Ils leur font peur, ils les dissuadent de continuer le combat.

- Pleutres ! Couards ! Déserteurs !

Il rage, désespéré par la situation.

- Laissez tomber, Colonel. C’est entre vous et moi.

Grognement de mécontentement de la part de l’officier. Puis les deux hommes s’élancent, recommençant la danse que j’ai déjà pu observer. Mais cette fois Kaltershaft est plus faible sur l’un de ses appuis, victime d’un précédent coup perçant à la jambe. Et Earl Grey est beaucoup moins vif, car fortement affaibli. Il peine à parer, et ne parvient pas à réellement attaquer. Son jeune adversaire esquisse un sourire approbateur tout le long de l’échange. D’une manière, il sait qu’il va gagner. Il le veut depuis longtemps, ça se voit, et il sait qu’il va finalement parvenir à ses fins.

Autour des deux duellistes, personne ne bouge. Ceux qui hésitaient à se lancer sont désormais captivés par le combat.

Plusieurs fois le Colonel parvient à percer la défense de son adversaire, mais ses coups ne présentent pas de danger. La fatigue ? La douleur ? Je n’en sais rien, mais je vois qu’il n’y arrive simplement pas. Il est bon bretteur, excellent même, mais rien n’y fait, il n’a plus la force nécessaire.

Et maintenant, il subit. L’homme à la Main Noire l’entrave aux jambes, puis aux bras. Il le cogne aux articulations avec ses boucliers, jusqu’à ce qu’on entende distinctement le douloureux son des os qui se broient à l’intérieur de la chair. Earl Grey est à terre, plus que mal en point. Un coup. Un autre. Encore. Et encore.

S’éloignant de quelques pas, Kaltershaft récupère une solide lance métallique au sol et la plante dans la terre. Il replace l’un de ses boucliers sur sa tête et saisit sa victime par le col. Il soulève l’homme gravement blessé, lui faisant quitter le sol, et le jette sur la lance, sur laquelle il s’embroche au niveau du ventre.

Sous la violence du choc, le Colonel émet un râle guttural entamant son agonie. Du sang commence à se répandre au sol, tandis que certains de ses organes internes découvrent le monde extérieur. Son corps est toujours entravé aux bras et aux jambes, embroché sur une lance qui ne quitte pas son encastrement dans le sol.

Alors son bourreau recommence ses coups. Aux bras, aux cuisses, aux genoux, aux épaules. Toute zone qu’il peut frapper avec son bouclier se fait sérieusement endommager. Et, à chaque coup, une explosion, comme une détonation provenant de son bouclier. Je ne me l’explique pas, mais ce n’est pas ce qui retient mon attention.

Car, comme tous les soldats présents, je suis abasourdi. Abasourdi par tant de violence, tant de barbarie, tant de haine déversée de cette manière. De la pure atrocité.

Et, pour finir, l’homme à la Main Noire donne de rapides et puissants coups successifs dans la nuque du corps quasiment inanimé de sa victime, qui ne ressemble déjà plus au Colonel Earl Grey. Il frappe, de plus en plus fort. Jusqu’à ce que le cou cède et que la tête se décroche, s’envolant, allant se perdre dans les décombres.

Sans plus de formalité, les six quittent la place. Les soldats leur laissent le passage libre, épouvantés par tant d’inhumanité. Aucun mot, aucun son. Un silence pareil me fait du bien après la bataille, même si j’aurais préféré d’autres circonstances pour la conclure.

Au milieu de la place trône un corps méconnaissable, vidé de ses boyaux, ensanglanté, les os et articulations brisés, et décapité de la manière la plus sauvage qui soit.

Sur cette vision d’horreur, je perds connaissance.


Dernière édition par Alrahyr Kaltershaft le Dim 25 Jan 2015, 12:00, édité 2 fois
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* * *

L’officier, pris d’un doute, passe la tête par la fenêtre du bâtiment de fortune, donnant directement sur les vestiges de la place principale. Au milieu de celle-ci, déjà attaqué par les mouches, le corps empalé, vidé et décapité y trône toujours. Le corps du Colonel. Le corps d’Earl Grey.

Se tournant lentement vers le Sergent, il pointe du doigt l’emplacement du cadavre.

- Oui, c’est bien lui.

Horrifié, l’officier revient s’asseoir. Il bascule la tête en arrière en se passant la main dans les cheveux, troublé. Au loin, son ouïe entraînée l’avertit qu’il est temps.

- Merci, Joe. Merci. Bon courage pour la suite.

Il jette un œil au dehors de la pièce, du côté des infirmiers en charge des blessés.

- Vous êtes entre de bonnes mains. Merci.

D’une manière assez pressée, il se lève et s’éclipse comme il est arrivé, laissant là le pauvre Joe, encore torturé par toutes les images qu’il vient de se remémorer.

Et, alors qu’il disparaît dans la brume au loin, remontant vers le centre de la ville, il se retourne. A l’entrée du frêle bâtiment, un officier de la Marine et plusieurs soldats. Il entend le meneur demander un volontaire pour expliquer les faits en détail.

Dans un sourire satisfait, il reprend sa route. Dans les décombres, l’homme enlève ses atours d’officier de la Marine et les dissimule sous une pile de gravats, reprenant finalement l’apparence du Boréalin type. Vêtements classiques, chauds, épais, en cuir et en laine, le tout dans une teinte sombre marron tirant vers le noir.

Pour évite de se faire repérer, il évite le centre-ville de Lavallière, longeant les murs d’enceinte, droit vers l’entrée principale. Et, une fois celle-ci franchie, il se dirige à sa vitesse vers Bocande.

Cet homme, c’est Karl Coldway. Agent du CP6, infiltré depuis toujours à Boréa. Forgeron de son état, ayant obtenu la confiance de ses semblables, il a toujours réussi à s’immiscer dans les projets de rébellion des Boréalins contre le Gouvernement. Les informations qu’il a pu faire parvenir au Cipher Pol ont entraîné la chute systématique de tous ces mouvements. Et le Teiko d’Alrahyr Kaltershaft en faisait partie.

Les informations compromettantes, c’était lui. Les emplacements des planques, c’était lui. Les noms des rebelles, c’était encore lui. Il a toujours réussi avec brio cette mission d’infiltration sans jamais placer les soupçons sur lui. Et, encore maintenant, il sait rester discret.

Alors qu’il marche, seul, dans la neige Boréaline, il se murmure à lui-même :

- Al’… Pourquoi t’as fait ça, Al’, bordel. T’étais pas obligé d’aller si loin. Faut sérieusement te calmer, Al’…

Enfin, il arrive à Bocande, puis à sa forge. La forge de sa famille, construite il y a des générations, entretenue et améliorée avec le temps. Lorsqu’il était tout jeune, il n’a pas supporté la participation de ses parents dans la révolution, d’où son envie de vendre sa position infiltrée au Gouvernement Mondial. On ne sait pas trop comment il y est parvenu, mais le fait est qu’il est là désormais, au centre d’une vie soi-disant paisible. Personne n’est au courant de sa situation. Ni sa femme. Ni son fils.

Il pousse la porte de sa demeure, puis entre dans la salle principale, servant parfois aux réunions des révolutionnaires, parfois aux grands repas. Il sait qu’il va y trouver un âtre chaud auprès duquel il va pouvoir se poser, et réfléchir à tout ce qu’il vient d’entendre.

Mais, en ouvrant cette dernière porte, il voit six personnes, assises non loin du feu. Près d’eux, une batte, un ballon, une crosse, des couteaux et des armes à feu. Et… deux bouliers.

- Oh… Salut Al’, ça fait plaisir de te revoir. Ça fait longtemps ! Je t’attendais pas !

Karl sourit, d’un vrai sourire. Rien n’est faux dans son attitude, il ne ment pas, ne joue pas. Il est sincère, revoir Alrahyr après tant de temps lui procure un immense plaisir. Mais peut-être d’autres conditions auraient été plus propices.

Quoi qu’il en soit, il est là, et Karl est agréablement surpris. Et pour cause…

- Salut ‘Pa !
-

[Suite : Forger l'avenir]


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