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Respect Existence or Expect Resistance


- On n'est pas assez fort pour les retenir de partir jusqu'à demain, chef.
- Je sais, je sais. Le Cavalier de la Révolution nous a clairement dit de ne rien tenter, des morts inutiles ne serviraient à rien. On ne pourra pas les retenir plus de quelques minutes. Ce qu'il nous faut, c'est six heures.
- Autant dire que ce navire prendra la mer quoi que l'on fasse.
- Oui, malheureusement. Mais il faut savoir faire des choix difficiles, petit.

L'âme rongée par l'impuissance, le groupe d'homme que Kevan observe d'un toit jette l'éponge. La démotivation s'empare peu à peu de la petite ruelle en retrait de l'île festive et illuminant la nuit. Un contraste distinct s'installe entre l'ambiance quelques centaines de mètres plus loin et ici. Quant à Helmet, c'est un sentiment d'hésitation profond qui se propage dans tout son être. Doit il les remotiver ? Non... Ils ont pris leur décision, et un homme ne suffira pas à les faire changer d'avis. Au mieux, ils le suivront sans conviction, résolu à mourir dans tous les cas. Alors, lorsqu'un homme n'a plus rien à perdre, il ne se bat plus avec tout ce qu'il a, sa volonté s'estompe peu à peu. Un homme qui ne craint pas la mort ne craint pas l'échec, et un homme qui ne craint pas l'échec échouera. C'est la peur de cette défaite qui nous rend plus fort, plus hargneux, plus désireux de gagner. Même ceux qui se presseront de dire qu'ils n'ont pas peur de l'échec parce qu'il leur est inconcevable d'échouer un jour se mentiront à eux-mêmes. Leur certitude sur leur réussite est due à la peur constante d'être moins bon un jour.

Mais un homme seul contre un navire comme celui-ci ne suffira pas. Et sa seule présence ne fera que démontrer qu'il ne suit pas sa logique. Quelqu'un d'assez sûr de lui pour se pointer devant cela tout seul est quelqu'un qui ne réfléchi pas à ce qui peut arriver. Et ceux qui ne réfléchissent pas aux répercutions n'ont rien à perdre. Et ceux qui n'ont rien à perdre échouent.
Toutefois, une autre solution existe. Et il y pense. Ce sera laborieux, ça ne sera pas facile, mais ça pourra forcément mieux fonctionner que si il rentrait dans le tas. Héhé.
D'après ce qu'il a entendu, tout semble indiquer que le dit navire est très bien gardé. Très, très bien gardé. Le tout serait donc de s'infiltrer discrètement, saboter le gouvernail, la barre, le mat, les voiles, quelque chose de vital, qui les feraient rester au port quelques heures de plus. Six heures de plus. Pour les immobiliser pendant six heures, ce qu'il faut, c'est bien plus qu'un de ces sabotages. Il faut tous les effectuer. Et là est toute la difficulté de la chose, surtout seul. Alors quoi ? L'hésitation revient. Doit-il les enrôler dans cette mission suicide qui permettrait la survie de la dignité de tous ces hommes, enchaînés comme des animaux dans la cale d'un navire arborant fièrement l'étendard hypocrite et rabaissant du Gouvernement Mondial ?

*No pain, no gain.*

Cette pensée traversant l'esprit du Révolutionnaire, un sourire vient se dessiner progressivement sur son visage, d'un oeil à l'autre. Ses dents apparaissent fièrement, comme annonciatrice de sa décision foireuse d'enrôler des hommes résolus à ne pas agir. Mais le partisan de la Main Noire sait comment raviver la flamme. Il sait parler. Il sait réagir face à un manque de motivation. Il l'a fait pendant de longs moments, à lui-même, lorsqu'il était enchaîné.
Lorsqu'il décide de descendre de son point d'observation, il semble pénétrer dans un autre monde. La lumière du centre n'atteint pas cette partie de la ville. Rien n'atteint cette partie de la ville. Même les hurlements festifs des poivrots ne semblent pas porter jusqu'ici. C'est ce même endroit qui est le plus souvent touché par des débarquements de pirates sans foi ni loi. Ici, la pauvreté fait rage, mais personne n'est dans la rue. Ils sont tous au centre, essayant tant bien que mal d'échapper à leurs soucis.
Mais tout cela n'est qu'une impression. Ce sentiment de ne rien entendre, ce sentiment d'être coincé dans les ténèbres des petites ruelles de banlieue. Une impression crée par la pression montante à l'approche d'une mission aux chances de réussite extrêmement aléatoires.
Maintenant descendu et face aux trois olibrius à l'attitude morne et pathétique, Kevan ne peut s'empêcher d'élargir encore plus son sourire.

- Et si moi, je pouvais vous permettre de les tenir, les six heures ?


    Loth renifla de lassitude. Il se dit que décidément existaient en ce monde des gens bien suicidaires.
    Couché sur le toit d'une maison désaffectée, il avait entendu les propos de ces hommes plus bas. Attaquer ce navire de front lui semblait une idée bien ridicule, mais apparemment tout le monde n'avait pas son sens de la prudence. Ils parlaient d'un créneau de six heures. Retenir le bateau dans ce port pendant ce laps de temps devrait apparemment suffire pour que des gens bien plus aguerris arrivent à la rescousse.

    Des héros, se dit-il. Il détestait les héros.
    Il se relava doucement, redressa ses lunettes sur son nez et fixa le bateau qui mouillait au loin dans la baie. Il était grand, très, c'était un beau modèle de galion, Cerberus de son nom. Il fouilla ses poches et sortit une liasse de feuilles. Éclairé par la timide lumière de la lune, il regardait les plans du navire. Ce n'étaient pas des plans de maître mais juste des espèces de gribouillis, fait de mémoire et payé cher.
    Juste avant de mouiller à Suna Land, le Cerberus entra en collision avec un banc de baleines ce qui occasionna des dégâts au niveau de la coque. Plusieurs charpentiers de l'île furent mis à contribution pour réparer le navire et juste avant le crépuscule, l'un d'entre eux accepta de dessiner contre rétribution, un croquis de ce qu'il avait vu de l'intérieur de la bête.

    "Ne me demande pas ce que je vais en faire, détourne les yeux quand je m'en irai, empoche ton argent."
    Tel était en somme le contrat. Depuis deux heures, Loth mémorisait les dits plans, tout en échafaudant une stratégie susceptible de causer assez de chaos pour lui donner le temps d'agir. Son plan ficelé lui semblait réalisable et pourtant, depuis deux heures, il hésitait. C'était de vies qui étaient en jeu, il n'arrivait pas à se résoudre à tenter le sauvetage d'une seule personne alors qu'une centaine surement reposait dans les niveaux inférieurs de ce navire, entassés comme des sardines dans une boite, sans aucune dignité.
    Machinalement, il agrippa ses poignets et se mit à trembler. L'esclavagisme était la seule chose qui arrivait à le mettre hors de lui. Il comprenait mieux que quiconque ce que devaient vivre et ressentir les gens emprisonnés là, il avait été dans la même situation qu'eux, douze ans plus tôt.

    - Respire un coup. Calme-toi, discipline ton esprit.

    La marche à suivre, il la connaissait depuis qu'il avait fignolé son plan. Pour libérer toutes ses personnes, ils devaient être plusieurs et encore, les gardes armés et entraînés poseraient le plus gros du problème. Cependant, les diversions devraient réussir à les occuper pour la plus part. Loth regarda sa montre, il avait un canevas de trente-cinq minutes pour mettre sa diversion au point. Quelque part dans le centre, deux cargaisons de vivres et de ravitaillements devaient s'ébranler vers le Cerberus. S'il voulait mettre en œuvre son plan, c'était le moment de recevoir de l'aide.
    Il descendit de son perchoir et se rapprocha du groupe d'hommes qui se mit immédiatement en garde.

    - Je viens en paix, dit-il en levant ses mains. Je vous ai entendu parler de saboter ce navire pour qu'il puisse rester à quai pendant les six prochaines heures. Je suis sur l'île depuis plus longtemps que vous, j'ai observé les allées et venues depuis deux jours, j'ai un plan, enfin, disons un début de plan qui pourrait nous satisfaire tous.

    "Nous" ? Le pronom surprit Loth lui-même qui ne s'est pas souvenu l'avoir utilisé depuis belle lurette. Il y avait rarement eu de "nous" dans son langage, juste "lui". Les révolutionnaires, ou pseudo-révolutionnaires, il s'en fichait, semblaient penser de même que lui. Celui d'entre eux qui avait le plus de prestance, un type aux longs cheveux noirs portant une tunique rouge et or s'avança vers lui, et lui demanda plus d'explication. Loth décida de jouer franc jeu, histoire de voir si leurs intérêts pouvaient concorder.

    - J'ai une amie, long-bras comme moi qui est retenue captive sur ce bateau. Je veux la libérer, mais je ne peux me résoudre à la sauver, pas uniquement elle. Je vous propose une alliance de circonstance.

    Qu'est-ce qu'il détestait faire la causette...

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    L'esprit chevaleresque du type face à Helmet ne concorde en rien avec sa mine de hipster refoulé. Face à la virilité purulente du révolutionnaire non content de se retrouver à jouer les pseudos sauveurs faisant des promesses à la limite de l'intenable, le long bras reste de marbre. Mais, ce n'est pas tant qu'il reste de marbre. C'est qu'à l'instar de certains, son visage est face, dénué d'expression. Et quelqu'un d'aussi refoulé ne peut profiter de la vie de la manière qui se doit. Ses mots sont jetés avec précaution et avec une faible intensité sonore. Cette façon de jacter donne l'impression qu'il regrette son action chaque fois qu'il ouvre la bouche. Comme si cela lui fait mal d'avoir une interaction sociale avec quelqu'un.

    Par-dessus tout, voilà que lui aussi, arrive en se croyant d'un niveau tout autre que celui du petit groupe de quatre Révolutionnaires prêts à en découdre furtivement avec la marine. Il leurs propose son aide comme un lion à ses sujets de la savane. Il part du principe que l'on aura forcément besoin de lui, alors que jamais dans le plan imaginé et visualisé par Helmet il n'a été question de la cinquième roue du carrosse. D'où le regard intense que lui jette le lancier barbu. Méfiant et ne voulant pas se faire doubler par un membre du Cipher Pol assez malin aux manières assez viles, il lui tourne autour, inspectant l'homme. S'attardant sur son fessier au passage, puis sur sa nuque, il titube en cercle autour de Loth, tel un prédateur sur son gibier. Jugeant sa personne à chaque observation.

    Mais on ne peut pas savoir si une personne est un membre du CP ou non. Tout simplement parce que ce sont des roulures de premier ordre, et qu'ils sont passés maîtres dans l'art de la dissimulation. Finalement, Kevan est peut être un CP sans le savoir. Des micros sont peut être implantés dans tout son corps sans qu'il ne soit au courant, après s'être fait effacé la mémoire lorsqu'il était gamin. Finalement, toute l'attaque sur son île natale était peut être un énorme coup monté visant à l'infiltrer dans la révolution. Ce qui expliquerait pourquoi il était le seul à ne pas s'être fait débusquer dans les arbres. Au final, ils voulaient peut être réitérer la fabuleuse histoire de Sabo, mais en faisant en sorte que Helmet soit une taupe au sein de la révolution.

    Au final, Helmet pourrait être un chef du Cipher Pol sans le savoir.

    Mais là, son cerveau chauffe. Chauffe beaucoup trop. Merde. De la fumée. C'est quoi, ce bordel ? Ses cheveux brûlent. Merde, l'a trop réfléchi. Y a une flaque d'eau mélangée à de la boue, de la crasse et divers déchets, là-bas. Il se jette tête la première dedans, puis se relève, en faisant genre : Ouais, nickel, qu'est ce qu'il s'passe, bon, on continue ?

    - Ton aide serait la bienvenue, effectivement. Et promis, on n'est pas des CP, et toi non plus. Ou alors, tu le sais pas.
    Non, non, non, t'en es pas un, toi, t'es juste notre aubaine. Tu sais faire les diversions ?


    Là, Helmet lui explique que si ils se font repérer, la garnison de Suna peut débarquer d'une minute à l'autre. Et ça, ce serait pas le pied. Ils sont nombreux, et ils sont forts. Il faudrait donc faire diversion à l'autre bout de la ville avant de commencer l'opération. Ainsi, un détachement plus ou moins grand ira à l'endroit de la dite diversion. Après ça, il faudra une autre diversion. A ce moment là, ils seront désorientés, ils ne sauront pas où aller, et au mieux, leurs forces seront encore divisées par deux. Là, ils frapperont directement aux communications du navire, tout en ayant fait une diversion à proximité de là. Ça réduira leurs effectifs à l'intérieur du bâtiment, puis il faudra s'infiltrer et les réduire au silence. Pas les tuer, non non, détruire leurs escargophones, ou changer la fréquence. Un truc poétique. Un truc beau. Un truc qui en jette. A ce moment là, ils seront sans renforts, et les révolutionnaires pourront agir.

    Agir comment ? Beaucoup de possibilités. Helmet se tourne maintenant vers les trois révolutionnaires.

    - Si on ne détruit qu'un seul moyen de navigation, on prend le risque qu'ils aient une pièce de rechange. Non. Il faut frapper à plusieurs endroits vitaux du bâtiments. Des trous dans la coques, sur la surface immergée ne serait pas une bonne idée. Le but, c'est pas de tuer les hommes, femmes et enfants prisonniers à l'intérieur de la frégate.
    Non, on détraque la chaîne du gouvernail. On détruit aussi le gouvernail lui-même. Ensuite, on fait en sorte qu'ils s'en rendent compte. On fait du bruit sur le pont. Ils montent le gros de leur garnison là-bas. On préviendra alors les personnes qu'ils ont enchaînés qu'on est là. Et qu'on les aidera, d'ici quelques heures.
    Mais il est possible que la marine choisissent de prendre un autre navire. Pour s'assurer que non, quelqu'un devra se faire passer pour un sous off. Si ils décident de faire ça, il faudra libérer les esclaves nous-mêmes, vous comprenez ? Nous mêmes. Et là, on n'aura pas le droit à l'erreur. Des dizaines de vies seront entre nos mains. Je veux dire. Ils ne risqueront plus l'esclavage, mais la mort, et ça vaut aussi pour ton amie, le binoclard.

    Oui, je sais, c'est prendre beaucoup de précautions, mais...

    Est ce qu'on a le choix ?


      Finalement, ils étaient capables de réfléchir, se dit Loth. Ce début de plan lui convenait pas mal et il ne trouva rien à redire, à moins que ce ne fût parce qu'il avait déjà dépassé son quota de mots journaliers.
      Quoiqu'il en soit, ils convinrent d'une rapide répartition des rôles ; Loth décida de s'occuper de la diversion en ville, le type aux longs cheveux noirs -Helmet de son nom- de jouer le sous-officier infiltré. Aux autres incomba la tâche de s'occuper du navire.

      C'était une belle nuit d'été sans lune. Loth et son camarade dont il ignorait tout couraient dans cette venelle sinueuse qui les emmenait tout droit vers la ville. Il ne regardait ni où il allait, ni où il mettait les pieds, il ne laissait juste courir, mécaniquement. Ses pensées étaient ailleurs, à des années-lumières de Suna Land, à une époque pas si lointaine où il commençait juste à regoûter au plaisir de la vie, au plaisir d'être libre.

      Il se souvenait très bien de ses premières semaines dans le monastère des Moines Servites. L'une des premières personnes qu'il avait croisées, l'un des premiers sourires qui avait ensoleillé ses jours nouveaux était celui d'Amandelle. La jeune long-bras était de deux ans sa cadette et avait toujours vécu dans le monastère, élevée depuis bébé par les moines. Elle y avait appris la médecine et son rêve était de débarrasser le monde de toute maladie. Elle avait aussi la foi en la doctrine pacifiste du Grand Maître de l'ordre des Servites. Aussi, Loth se notifia d'agir avec la plus grande prudence. Il n'était pas sûr qu'elle le lui pardonnerait si des gens venaient à mourir durant cette opération visant à la libérer. Elle préférerait surement demeurer esclave toute sa vie que de payer sa liberté au prix de la vie d'innocentes personnes.

      Loth sortit de sa rêverie à la faveur d'une pente raide. Une ombre se profilait, une ombre armée en bandoulière. C'était un des soldats gardant le bateau qui revenait surement d'une ronde. Il décida qu'ils étaient suspects et fit un brusque mouvement pour saisir son fusil d'épaule.

      - Poigne du serpent spectral !

      De sa main gauche dressée telle une tête de serpent prête à mordre, Loth cibla le cou du marine. L'attaque écrasa la trachée du soldat tout en l'envoyant valser. Il s'écrasa puis s'affaissa le long d'un muret, assommé.

      - Il a son compte pour un moment. Je vais prendre son pistolet ça pourrait me servir. Je te devance, Helmet, ciao.

      Il laissa son partenaire dans cette ruelle avec le corps inerte du marine à ses pieds.
      Loth regagna bien assez tôt le brouhaha du centre-ville. Il balaya le panorama qui s'étendait devant lui. Il y avait foule. Des troupeaux de vacanciers et de fêtards soûls ou pas, avides et à la recherche de la meilleure soirée, de la meilleure distraction. Loth détestait la foule et le bruit. La rumeur des milliers de conversations lui parvenait comme d'insupportables et indistincts bourdonnements. Malgré tout, il tenta de se concentrer sur sa mission.

      Quel était le meilleur moyen de provoquer une diversion suffisante pour éloigner le gros des marines du port ?
      Déjà, il fallait les éloigner, du coup, il se mit à marcher, sa position étant beaucoup trop proche du bateau. Le quartier le plus éloigné du port était celui de la fameuse Princess Street, un boulevard pavé entièrement dédié à la restauration et la beuverie. Là, des restaurants aux styles divers, des bars et boites de nuit s'alignaient côte à côte, par dizaines.
      Il atteignit Princess Street, quinze minutes plus tard malgré la cohue épaule contre épaule qui régnait au centre-ville. Il arpenta la rue, bondée là aussi, à la recherche du meilleur moyen de diversion. L'idée lui vint quand il passa devant un établissement de restauration rapide de type oriental. Le chef cuisinait les plats sur une plaque chauffée au gaz devant les clients. Une grosse bonbonne de gaz, assez pour faire beaucoup de bruits, du feu et déclencher l'affolement.


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      On y est. Les deux groupes sont maintenant séparés. L'opération peut commencer. Pour être rondement mené, les marines doivent mordre à l'appât et Helmet doit jouer son rôle sans bavure. Chose improbable pour un homme avec son psyché et son passif. Bourrin dans l'âme et n'assumant pas sa quête de vengeance, il fera sûrement capoter la mission sans s'en rendre compte, et sans pour autant en prendre le blâme. Paraît qu'il est un élément important de la révolution. Paraît qu'il sait des choses. Paraît qu'il a vu des marines faire des trucs pas très jolis, quand il était gosse. Beaucoup de paraît, mais si il est là aujourd'hui, c'est pour une raison, et celle-là, elle semble crédible de raison.
      Bref. Le pas léger, tel un chat s'appuyant sur ses coussinets, il avance en direction de la frégate de transport qui est sensée extradé les prisonniers futurs esclaves. Les rues sont sombres, pas même éclairées par la lune que l'on ne peut apercevoir dans le ciel. C'est à l'aveugle et en se basant sur la lumière du centre-ville que Kevan se déplace. Lance dans le dos, il progresse dans Suna de toits en toits.

      Et après quelques minutes d'intense course, il se retrouve bien vite sur un toit qui est à même d'avoir comme fonction un point d'observation. L'oeil attentif, il observe les marines faisant entrer les nombreux prisonniers ayant été inculpé de façon légale ou non. Ici, y a de tout. Du violeur qui ne mérite en rien d'être relâcher à celui qui se trouvait juste au mauvais endroit au mauvais moment. Ce qu'il y a de bien, généralement, c'est que les criminels de la pire espèce sont dans une cellule spéciale, tous ensemble, en famille de dégénérés. Comme ça, si y a un problème, on sait où mettre le feu en premier, parce que ça fait toujours plaisir d'entendre un pédophile couiner de douleur. Héhé.
      Mais les prisonniers, ce n'est pas le plus important pour Helmet actuellement. Ce qu'il doit voir, ce qu'il doit repérer, c'est le supérieur qui commande le navire. Heureusement pour lui, celui-ci n'est en rien discret, et il le repère bien vite à force de l'entendre aboyer des ordres à tout va en jurant comme un charretier.

      Bien, il est brun, un peu de barbe, tout pareil. Ses vêtements semblent être à sa taille, même si ce sont les médailles qui comptent vraiment. Il n'a plus qu'à observer ses allées et venues pendant un temps, pour savoir exactement où il ira et à quel moment il le fera. De là, il aura un avantage et pourra se poster précisément là où ce sera le plus pratique pour le ligoter et prendre ses vêtements. Allez. On observe. Il est sur le pont supérieur, descend sur le pont inférieur. Il jette un oeil par dessus le bastingage et supervise les entrées de futurs esclaves. Il va à l'avant du navire, observe l'horizon, puis se redirige vers le pont supérieur, situé à la poupe du bâtiment. C'est là que Kevan frappera. Là, des caisses de chargement pourront le cacher. De plus, il pourra se fournir des cordes pour le ligoter sur le navire. Il n'y aura plus qu'à le bâillonner avec l'une de ses chaussettes.

      Ca y est, il quitte le pont supérieur. C'est le moment de se préparer. Kevan descend de son toit puis se dirige vers le navire. Les marines se font nombreux autour du navire. Y monter ne sera pas si facile. Et d'ici, il ne peut plus voir les mouvements du marines. Merde. Si seulement il avait un foutu chrono, ou quelque chose, pour prévoir exactement ses mouvements à la seconde près... Enfin, on dit ça, mais on sait tous que ça ne se passera de toute façon pas comme prévu.

      - Hé, t'es qui, toi ? Dégage, c'est une zone interdite aux civils.
      - Désolé.
      - Merci.
      - Pas pour ça, désolé. Désolé pour ça.
      - Hein ?

      Coup de hampe sur la tempe.



        Vingt minutes s'étaient écoulées depuis que Loth s'était séparé de ses partenaires de circonstances. Sa mission de divertir et d'occuper la garnison en ville pour l'empêcher d'intervenir quand les choses commenceront à chauffer au port se goupillait bien comme il fallait. Après avoir eu l'idée d'utiliser des bonbonnes de gaz comme explosif, il chercha naturellement le magasin qui en fournissait aux restaurants.
        D'une et de deux, il assomma le vieux vendeur puis s'empara de trois bonbonnes qu'il plaça à des endroits différents de la Princess Street où il était. Une ruelle sombre, derrière une benne à ordure et dans l'arrière-cour d'une discothèque. Des endroits déserts mais assez proche des fêtards pour créer un max de panique. Loth s'arma aussi d'un fusil de précision qu'il ramassa sur le corps inerte d'un marine qui faisait sa ronde et qu'il avait attaqué par surprise au détour d'un tournant.
        Il prit position sur le toit d'une maison d'où il avait une vue imprenable sur l'arrière-cour de la discothèque où était placée la première bonbonne. Il n'avait jamais été un bon tireur mais à cette distance, il ne saurait rater cette cible.

        - Bon, c'est parti pour le feu d'artifice !

        Il décocha une balle. S'en suivit une fulgurante explosion dont le souffle brisa les vitres aux alentours. Elle souleva une onde choc suivit de particules de sables, de tôles éventrés, de cailloux qui s’éparpillèrent aux quatre coins cardinaux. De sa position, Loth dû se planquer et se protéger la tête. Force était de constater qu'il avait sous-estimé la violence de la déflagration. De grosses lézardes sillonnaient les murs blancs marbrés de l'immeuble. Malgré la poussière en suspension, Loth perçut les mouvements de la foule hystérique qui cherchait par tous les moyens de quitter les lieux de l'explosion sans chercher à comprendre.
        Il quitta son poste d'observation et se joignit à la foule en psychose. Les gens pleuraient, hurlaient, à tort et à travers. Des gens tombaient, se faisaient piétiner, se relevaient pour piétiner d'autres... Les marines, quant à eux, arrivèrent peu de temps après. Un petit contingent d'une vingtaine d'hommes qui échouèrent lamentablement à rétablir l'ordre parmi des centaines de gens paniquées. Il était temps de passer à la seconde explosion et cette fois-ci, Loth se positionna à une distance plus raisonnable de l'engin.

        Il tira et un gros BOOOOOOOOOOOOOOOOOOOM  se fit entendre. Cette bonbonne était celle derrière le tas d'ordure et elle ajouta à l'attentat l'élément que Loth espérait plus que tout, le feu. Le dépotoir s'embrassa et contamina les bâtisses et restaurants aux alentours. Très rapidement, un gros feu bien orange et exhalant une langue de fumée qui montait déjà haut dans le ciel s'épanouit. La panique s'était accentuée, le brouhaha partout. Plus de marines arrivaient sur les lieux. Mêlé à la foule, Loth les entendit brailler dans leurs escargophones.

        - Allô ! Le QG ? Ici le Sergent Song. Envoyez des renforts en ville, dans la périphérie de Princess Street immédiatement ! Deux explosions à trois minutes d'intervalles ! Il y a un "Bomber" en ville !
        Et où sont ces maudits pompiers bon sang ?!
        beugla-t-il à l'attention d'une recrue tétanisée.

        - Ils sont coincés dans les mouvements de foule ! Même en ville c'est la panique, ils ne peuvent pas avancer, monsieur !

        - Rien à foutre ! Qu'ils bougent leurs culs où le quartier entier partira en flamme !

        - Le Sergent-chef Baluid a ordonné que tous les marines de la base se déploient en ville pour maintenir le calme. Ils formeront sûrement un cordon de sécurité pour les pompiers !

        - Ouais, c'est ça. Dégageons d'ici, trop de fumée.

        Ils s'éloignèrent et Loth les suivit discrètement. Le feu prenait de l'ampleur et la foule avançait déjà vers le centre-ville. Ça devait être un enfer d’embouteillage et de bousculade. Finalement, la troisième explosion était inutile, estima Loth. L'effet escompté était déjà au-dessus de ses espérances.
        Malgré tout, il voulut vérifier le bien-fondé de son jugement en allant voir que la caserne était bien déserte. Évitant les bouchons humains, il progressa de toit en toit, regardant parfois derrière lui où le feu qu'il avait déclenché n'en finissait pas de consumer et de fumer.
        Il atteignit la caserne après une progression sans embûche. Elle était vide de toute âme, à part l'habituel gorille flanqué devant la porte d'entrée, qu'il pleuve ou qu'il vente.

        Bon, il était temps de rejoindre les pseudos révolutionnaires, se dit-il. Et rien ne saurait l'en empêcher... A part peut-être cette silhouette qui le surplombe de son ombre.

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