Frangine,
Je sais que tu es en vie. Que tu as survécu au défi des océans, à Joe, à plein d'autres choses pour lesquelles je suis pas au courant. J'ai vu ton nom dans un journal ce matin. Ton portrait au garde-à-vous avec d'autres gradés, quelque chose à-propos d'une guerre sur Jaya. Je me doute que tu as du refaire ta vie loin de tout ce que l'on partageait autrefois, loin des souvenirs qui ne sont plus que dans nos cœurs puisque le Grey T. n'existe plus. Tu t'es certainement reconstruit une nouvelle famille, tu étais petite quand j'ai pris la fuite.
Mais malgré tout, je veux que tu saches que je pense toujours à toi ; que je veux que l'on se retrouve.
Tu n'approuveras peut-être pas ce que je suis devenu. Je bois trop, je travaille trop, je gagne peu, je perds beaucoup. Le jeu et les mauvaises habitudes n'ont pas suffi à m'user la santé, mais je n'ai plus la dignité que j'avais à l'époque. En vous perdant, toi et Vaillant, j'ai perdu mes deux principales raisons d'exister. Quand j'ai laissé le Grey T., rien ne s'est vraiment passé comme prévu. J'ai cicatrisé n'importe comment, comme un chien trop gâté par la nature pour mourir les tripes à l'air. Je n'avais plus le sou, c'était Joe qui tenait la bourse. J'étais faible, nourri les vieux du port qui nous donnait parfois des gâteaux secs. J'ai quand même trouvé la force de rejoindre Fuchia à la nage. Les requins n'étaient pas de sortie. Je pensais trouver de l'aide. Tu sais que j'avais des relations, que les gens m'avaient fait des promesses...
Mais lorsqu'ils m'ont vu arriver, titubant, amaigri et sans la moindre marchandise, ils ne m'ont pas accueilli à bras ouverts. Ils m'ont aidé à finir de guérir, et m'ont offert les moyens de quitter la zone. C'est tout. J'ai essayé de travailler dans plein d'endroits différents après ça, comme toi tu as du aussi le faire en ton temps. Mais ça n'a jamais marché. J'étais doué pour le commerce, pour assommer des bandits et tuer des loups ; pas pour obéir à des ordres ou pour suivre des directives fixes. Je suis devenu vagabond, mercenaire, puis chasseur de primes. J'en suis là.
Enfin, j'en étais là jusqu'à cette année. Faut que tu saches, frangine. J'étais infiltré sur Armada, ou plutôt, j'y étais arrivé par accident en me cachant dans la cale du navire de ceux que je traquais. Je pensais les planter de l'intérieur à l'occasion d'une bataille navale, en faisant exploser leur stock de poudre. Mais je m'attendais pas à ce qu'ils jettent l'ancre dans un endroit pareil. Je ne pouvais pas me cacher, alors, je me suis mêlé aux travailleurs du chantier naval. Je me suis fait petit, le temps de trouver moyen de m'en sortir.
C'est là qu'il est arrivé, qu'il a parlé. Il venait de diriger la réparation de son bateau, un cuirassé. Je sais pas comment te dire ça, Petite Flamme, mais ça m'a tout rappelé. Ma vie d'ermite, la gnôle, le Grey T., mes efforts pour rester honnête jamais récompensés autrement que par une bourse donnée par des gars qui nous méprisent. Être toujours dénigré, humilié, vivre en proscrit alors que tu fais du bon boulot, que tu protèges les gens. Ces gens qui vivent peinards dans leurs familles, avec des enfants qui courent dans leurs jambes et qui rigolent, des assiettes propres et pleines à heures fixes, des couvertures douces et des oreillers en plumes.
Ce type, c'était Kiril des Saigneurs des Mers. J'ai embarqué avec eux et j'ai pu fuir Armada, en grande partie parce que sur Grand Line, mon visage est celui d'un inconnu. Je ne sais pas quoi faire, je ne sais pas si je dois suivre ces gars jusque dans la mort ou attendre le bon moment pour les saborder... tu aurais honte de moi. Vaillant aussi. Jamais j'aurais cru avoir à douter de ma force un jour ; mais eux, ce sont des monstres.
Le pire de tout, c'est que le capitaine des Saigneurs n'est plus un corsaire. Et jamais je me serais douté que le chef des mutins, ce serait une tête connue. Tu dois savoir que c'est Joe. Il ne m'a pas capté, j'ai beaucoup trop changé pour ça. Et puis, caché au milieu des recrues, il n'a pas pu me voir. Pour être tranquille, je me suis rasé le crâne. Je lui ressemble, au punk.
Je vais jeter cette bouteille à la mer faute de pouvoir mieux faire. Mais je le ferais aussi souvent que je le pourrais, en la recopiant inlassablement, jusqu'à ce que tu la trouves ; en marquant ton nom, celui par lequel on t'appelle dans le journal, en gros sur le revers du message. Il faut que tu saches. Tu es la seule personne capable de m'aider au-dehors. Je suis désolé de te demander ça, alors même que je viens tout juste de retrouver ta trace...
Je sais que tu es en vie. Que tu as survécu au défi des océans, à Joe, à plein d'autres choses pour lesquelles je suis pas au courant. J'ai vu ton nom dans un journal ce matin. Ton portrait au garde-à-vous avec d'autres gradés, quelque chose à-propos d'une guerre sur Jaya. Je me doute que tu as du refaire ta vie loin de tout ce que l'on partageait autrefois, loin des souvenirs qui ne sont plus que dans nos cœurs puisque le Grey T. n'existe plus. Tu t'es certainement reconstruit une nouvelle famille, tu étais petite quand j'ai pris la fuite.
Mais malgré tout, je veux que tu saches que je pense toujours à toi ; que je veux que l'on se retrouve.
Tu n'approuveras peut-être pas ce que je suis devenu. Je bois trop, je travaille trop, je gagne peu, je perds beaucoup. Le jeu et les mauvaises habitudes n'ont pas suffi à m'user la santé, mais je n'ai plus la dignité que j'avais à l'époque. En vous perdant, toi et Vaillant, j'ai perdu mes deux principales raisons d'exister. Quand j'ai laissé le Grey T., rien ne s'est vraiment passé comme prévu. J'ai cicatrisé n'importe comment, comme un chien trop gâté par la nature pour mourir les tripes à l'air. Je n'avais plus le sou, c'était Joe qui tenait la bourse. J'étais faible, nourri les vieux du port qui nous donnait parfois des gâteaux secs. J'ai quand même trouvé la force de rejoindre Fuchia à la nage. Les requins n'étaient pas de sortie. Je pensais trouver de l'aide. Tu sais que j'avais des relations, que les gens m'avaient fait des promesses...
Mais lorsqu'ils m'ont vu arriver, titubant, amaigri et sans la moindre marchandise, ils ne m'ont pas accueilli à bras ouverts. Ils m'ont aidé à finir de guérir, et m'ont offert les moyens de quitter la zone. C'est tout. J'ai essayé de travailler dans plein d'endroits différents après ça, comme toi tu as du aussi le faire en ton temps. Mais ça n'a jamais marché. J'étais doué pour le commerce, pour assommer des bandits et tuer des loups ; pas pour obéir à des ordres ou pour suivre des directives fixes. Je suis devenu vagabond, mercenaire, puis chasseur de primes. J'en suis là.
Enfin, j'en étais là jusqu'à cette année. Faut que tu saches, frangine. J'étais infiltré sur Armada, ou plutôt, j'y étais arrivé par accident en me cachant dans la cale du navire de ceux que je traquais. Je pensais les planter de l'intérieur à l'occasion d'une bataille navale, en faisant exploser leur stock de poudre. Mais je m'attendais pas à ce qu'ils jettent l'ancre dans un endroit pareil. Je ne pouvais pas me cacher, alors, je me suis mêlé aux travailleurs du chantier naval. Je me suis fait petit, le temps de trouver moyen de m'en sortir.
C'est là qu'il est arrivé, qu'il a parlé. Il venait de diriger la réparation de son bateau, un cuirassé. Je sais pas comment te dire ça, Petite Flamme, mais ça m'a tout rappelé. Ma vie d'ermite, la gnôle, le Grey T., mes efforts pour rester honnête jamais récompensés autrement que par une bourse donnée par des gars qui nous méprisent. Être toujours dénigré, humilié, vivre en proscrit alors que tu fais du bon boulot, que tu protèges les gens. Ces gens qui vivent peinards dans leurs familles, avec des enfants qui courent dans leurs jambes et qui rigolent, des assiettes propres et pleines à heures fixes, des couvertures douces et des oreillers en plumes.
Ce type, c'était Kiril des Saigneurs des Mers. J'ai embarqué avec eux et j'ai pu fuir Armada, en grande partie parce que sur Grand Line, mon visage est celui d'un inconnu. Je ne sais pas quoi faire, je ne sais pas si je dois suivre ces gars jusque dans la mort ou attendre le bon moment pour les saborder... tu aurais honte de moi. Vaillant aussi. Jamais j'aurais cru avoir à douter de ma force un jour ; mais eux, ce sont des monstres.
Le pire de tout, c'est que le capitaine des Saigneurs n'est plus un corsaire. Et jamais je me serais douté que le chef des mutins, ce serait une tête connue. Tu dois savoir que c'est Joe. Il ne m'a pas capté, j'ai beaucoup trop changé pour ça. Et puis, caché au milieu des recrues, il n'a pas pu me voir. Pour être tranquille, je me suis rasé le crâne. Je lui ressemble, au punk.
Je vais jeter cette bouteille à la mer faute de pouvoir mieux faire. Mais je le ferais aussi souvent que je le pourrais, en la recopiant inlassablement, jusqu'à ce que tu la trouves ; en marquant ton nom, celui par lequel on t'appelle dans le journal, en gros sur le revers du message. Il faut que tu saches. Tu es la seule personne capable de m'aider au-dehors. Je suis désolé de te demander ça, alors même que je viens tout juste de retrouver ta trace...
Ton frère, Aimé.