Des moutons qui volaient dans tous les sens, une odeur qui emplissait les narines, un dédale de nuages vivants et odorants, c’était ça le Sheepball. Un véritable sport qui donnait le sourire.
Noa avait l’impression d’être un athlète. Il louvoyait entre les moutons, se frayant son chemin. Il avait compris la base de ce petit jeu, il devait gagner la confiance des moutons qui d’eux-mêmes attaqueront les adversaires. Il se la jouait alors câlin, doux, il présentait même la photo d’Uriko. Il comprit qu’il avait gagné pas mal de confiance auprès des moutons quand une pluie des animaux s’abattit sur lui et que ceux l’entourant grimpèrent sur lui pour faire une sorte d’armure et le protéger lors de l’attaque.
Un tonnerre d’encouragement à son encontre venait de la part des spectateurs et des commentateurs.
" Regardez-moi ça ! Un nouveau venu de l’île à réussi à obtenir le fameux Sheep Sheep no Power Suit ! C’est du jamais-vu pour une première participation ! Je sens que ce rookie va nous apporter un vrai défi pour ses concurrents ! Oh, mais que vois-je ? Deux participants sortent du tournoi, blessés et assommés ! Qu’est-ce qui s’est passé ?! Ils accompagnaient notre rookie ! "
Noa compris alors que Angra et Septa étaient hors-jeu et ne viendraient sûrement pas l’épauler pour la suite du plan, ce qui compliquait les choses. Pour le moment, il devait se concentrer sur son objectif direct, sortir vainqueur.
Les moutons étaient plus réactifs à Noa qui ne cessait de rigoler s’amuser, tandis que d’autres concurrents commençaient à avoir de la sueur qui perlait et de l’angoisse. Les animaux sentant ce manque de joyeuseté venaient alors s’agglutiner autour de Noa qui était en pleine conversation avec une des bêtes sur l’herbe la plus délicieuse. Cependant, les animaux étaient partagés entre lui et un autre concurrent qui avait à peu près le même nombre de nuages odorants autour de lui que Noa.
Tout allait se jouer entre les deux. Les autres concurrents comprenant que de moins en moins de moutons se rangeaient à leurs côtés, sortir de l’arène, éliminée. Il ne restait plus que Noa et…
" Mesdames et Messieurs ! Nous a-a-avons nos finalistes ! Il s’agit de notre jeune rookie et Sheepman !!! Qui aurait pût penser qu’un étranger viendrait se hisser à cette position ! "
Le moment était venu pour l’offensive finale. Noa se redressa, se mit légèrement de côté, leva son bras et pointa du doigt son dernier concurrent. Les moutons réagirent immédiatement et se jetèrent sur Sheepman tandis que lui faisait pareil de son côté. C’était une vraie bataille, les moutons tombaient de partout en poussant leurs cris, c’était terrible, une vraie guerre. Noa se glissa sous un des moutons resté à terre et le fit se diriger vers son ennemi qui ne le vit pas venir à travers la laine. Il se plaça derrière lui et susurra un mot au mouton qui se rua sur son adversaire, lui percuta les jambes et le fit tomber à la renverse, l’assommant sur le coup.
Le silence plana un instant, avec pour toile de fond que quelques bêlements. Puis tous les spectateurs se levèrent et hurlèrent de joie.
" C’est stupéfiant ! Noa, le rookie, a réussi à remporter la manche !!! Quoi ? Comment ?! Tous les participants restant ont déclaré forfait ?! Sans aucune raison ?! Ce qui fait de…de…Noa le vainqueur du tournoi !!!!! "
Le jeune marine reçut alors un appel sur son Den Den provenant de Angra qui lui soufflait qu’il avait fait flipper tous les autres, le message parasité par plusieurs obscénités et le fait qu’ils allaient se venger de lui, puis plus rien, il devait être retombé dans les pommes.
On conduisit Noa sur l’estrade pour que tout le monde l’acclame puis l’organisateur du tournoi vient le voir et lui tendit une lettre avec à l’intérieur une invitation à sa résidence pour fêter l’évènement. Tout marchait sans problèmes ou presque.
La nuit approchait ainsi que son rendez-vous chez l’organisateur. Quand il arriva devant la bâtisse, Noa ne pût se retenir de penser que vivre dans un tel luxe était malsain. Il s’agissait d’un immense manoir en dehors de la ville, au sommet d’une colline. Tout respirait l’argent et la démesure.
Un Majordome vient lui ouvrir l’immense portail en fer forgé avant de le conduire dans le hall principal, passant par des jardins, des sculptures et une immense porte de bois vernis.
Son hôte vint alors l’accueillir en personne en ouvrant les bras.
" Haaaa voilà notre héros du jour ! Alors, comment te sens-tu après cette victoire assez fulgurante, peut-être même trop…Quel est ton secret ? Hahahaha !
-Seulement un excès d’amour et de la gentillesse !
-Bonne philosophie gamin ! Allez, suis-moi dans le salon, qu’on trinque ensemble ! "
Alors qu’ils étaient en direction du salon, Noa entendit de manière très faible une sorte de bêlement, il allait interroger son hôte à ce sujet avant de se dire qu’il devait avoir passé trop de temps dans cette arène, même si cela le chatouillait un peu de creuser plus, ce qui était impossible pour le moment.
La soirée se passa à merveille, son hôte ne tarissait pas d’éloge à son sujet et sifflait les bouteilles de vin plus vite que son ombre. Noa décida alors de prendre congé.
Tandis qu’il fut escorté vers la sortie par le majordome, il réentendit ce bêlement, mais plus triste cette fois. Il en était alors certain, il se tramait bien quelque chose dans ce manoir.
Une fois le portail passé et le majordome partit, Noa se faufila par-dessus les murs avant de retomber souplement de l’autre côté. L’infiltration allait commencer.
Des gardes patrouillaient autour de la bâtisse, heureusement vu qu’il faisait nuit, il y avait plusieurs zones d’ombre où se glisser quand un garde tournait le dos ou se soulageait. Puis quand il changea à nouveau de zone, une brindille craqua sous son pied. Il se précipita derrière un buisson, se faisant le plus petit possible.
" Qui est là ?!
-T’as entendu quelque chose ?
- J’sais pas, je pense…
-Sûrement, un rat ou une bestiole de ce genre, fait pas gaffe.
-Je vais quand même vérifier… "
Le garde s’approchait dangereusement du buisson puis se stoppa à un mètre, regardant autour, il soupira et retourna à sa ronde. Noa arrêta enfin d’être en apnée, reprenant au fur et à mesure un rythme normal de respiration.
Le reste était plutôt une partie facile, les zones d’ombre augmentaient. Une odeur familière lui parvenait aux narines alors qu’il finissait de faire le tour du manoir, ainsi que les gardes, rendant au final la partie un peu plus ardue et il dut être très patient pour se glisser dans les angles morts.
En suivant l’odeur familière qu’il avait connue dans l’arène, il se retrouva face à une immense grange avec des bêlements à l’intérieur. De la lumière filtrait par les interstices des planches. Il repéra une ouverture qui devait conduire au grenier de la grange et s’y glissa à la force de ses bras et pieds, cherchant des prises où il ne devait pas en exister normalement. Arrivé à hauteur de la fenêtre, il était essoufflé et réussit tant bien que mal à pénétrer l’encadrement en bois, s’écrasant sur les planches qui formaient le grenier. Il prit le temps de reprendre des forces avant de découvrir ce qu’il redoutait, même plus à travers un trou dans le plancher.
Les moutons étaient bien là, mais il manquait quelque chose sur eux. Ils étaient complètement dépouillés de leurs laines. Ils continuaient de bêler tandis que certains de leurs congénères finissaient d’être tondus par des hommes en combinaison étrange. Puis une fois que la laine était tondue, elle était ramassée par d’autres personnes habillées tout aussi étrangement qui venait les frotter contre des coquilles de moules qui en s’ouvrant libéraient une perle qui semblait très précieuse. Puis la laine était jetée dans une sorte de grande installation chimique qui transformait la laine en cette substance que le marine avait découvert plus tôt grâce à l’aide des énergumènes. Il restait cependant un tas de laine qui était soigneusement entreposé dans des cases, sûrement de la réserve.
Il entendit des planches craquer prêt de lui et quand il se releva la tête, il eut juste le temps de voir la crosse d’un pistolet lui arriver sur la tempe, ce qui le plongea dans les ténèbres.
Le réveil était douloureux, il entendait au loin des bribes de paroles, quand il essaya d’ouvrir les yeux, une myriade d’aiguilles se plantèrent dans ses yeux sous forme de rayons lumineux ce qui lui les fit refermer aussitôt. Il fit une seconde tentative, mais plus doucement et réussit à habituer progressivement ses yeux à la lumière.
Il se trouvait dans une pièce qui était loin d’être chaleureuse, sentait l’humidité et possiblement un rat crevé. Une seule source de lumière était présente, représenté sous la forme d’un gros projecteur braqué sur lui. Il tenta de se lever, mais pris conscience qu’il était d’une part assis sur une chaise très inconfortable, dépouillé de son arme, mais en plus ligoté solidement.
Il distinguait des silhouettes derrière le projecteur qui l’observaient et discutaient à voix basse. Quand ils le virent s’agiter sur sa chaise, ils décidèrent d’arrêter leur effet de scène et d’en envoyer un dans la lumière. Il s’agissait de son hôte un peu plus tôt dans la soirée :
" Vous avez fourré votre nez là où il ne fallait pas Mr Lhant.
-Disons que quand j’entends des bêlements désespérés de mouton, je ne peux pas m’en empêcher, je dois voler à leur rescousse.
-Haha ! Surement cette attitude qui vous a permis de gagner !
-Je vous l’ai dit, un excès d’amour et de gentillesse. Sinon, j’ai cru reconnaître les fameuses moules incassables dans la grange. Je comprends mieux pourquoi vous avez une si belle maison comparée aux autres. Pourtant, ça ne s’arrête pas là hein ? Avec le reste de laine, vous faites votre produit bizarre pour les moutons, non ?
-Oooh, Messieurs, nous avons un petit curieux intelligent. Des rires dans le fond se firent entendre. Cependant, tu n’as pas tout compris. Tu as mis les pieds dans une affaire mafieuse mon gars.
-Je comprends mieux les goûts vestimentaires type enterrement maintenant ! Je pensais que vous étiez en deuil. Alors, vous allez me faire des chaussures en béton, c’est ça ?
-Voyons, nous ne sommes pas des barbares, nous sommes un peu plus sophistiqués, on te laisse une chance en t’accrochant uniquement des grosses pierres aux chevilles avant de te balancer en haute mer.
-Charmant. Dernière question avant que je meurs. Vous ne verrez pas d’inconvénients à me dire pourquoi vous garder de la laine ?
-Héhé…Tu sais, le gratin de la Mafia adore ce type de laine, mais aussi la viande de ces moutons qui se vendent à prix exorbitants. Maintenant, je vais prendre congé et laissez mes deux associés derrière moi mettre un terme à ta vie. Vous allez manquer à la Marine…Oh ? On ne vous a pas dit qu’on savait qui vous étiez exactement ? "
Il recula et disparut dans les ténèbres, Noa l’entendit faire quelques pas, ouvrir une porte qui éclaira faiblement quelques secondes la pièce. Il remarqua son sabre posé contre une sorte de meuble, un simple couteau rouillé dans l’autre coin de la pièce, puis la porte se referma avant de voir autre chose. Les deux croquemorts s’avancèrent dans la lumière une fois que leur patron était parti est retroussèrent leurs manches. Il y avait un gorille et un maigrelet. Noa se demanda pourquoi il y avait toujours ces deux types de gars, cela en devenait absurde et n’aidait pas à effacer le stéréotype.
" L’un ou l’autre à quelque chose à compen… "
Il n’eut pas le temps de finir sa phrase que le gorille fit voler son poing dans la figure de Noa, ce qui le fit tomber avec la chaise sur le côté. Le gringalet le redressa en ricanant. Noa cracha du sang et planta son regard dans celui du gorille.
" Ouais, bien un truc à compenser… "
Il se prit un autre crochet, mais il ne tomba pas cette fois, l’allumette le tenant derrière. Il se prit quelques coups dans le ventre, résistant à l’inconscience qui venait l’enlacer. Puis ce fut apparemment au tour du gringalet de venir donner quelques coups. Pendant l’échange, Noa ne laissa pas passer cette occasion. Il se campa sur ses jambes et s’élança tête en avant sur le gringalet. Il lui percuta l’abdomen et partit avec lui vers le sol. La chaise vola en éclats quand il percuta le sol. Notre marine ne laissa pas passer cette chance, sortit de ses liens et roula à temps sur le côté avant qu’un poing ne tombe à l’endroit où il se trouvait une seconde plus tôt par le gros singe.
Noa se précipita vers le couteau rouillé qu’il avait repéré un peu plus tôt. Il le chercha à tâtons dans le coin et saisit enfin la garde, il se retourna pour faire face au nouvel assaut du primate, tandis que la sauterelle se redressait péniblement. Le Grand Frère donna un coup de couteau en avant, mais la lame se détacha de la garde et retomba à terre dans un endroit obscur de la pièce.
Le combat prenait vraiment une tournure désavantageuse pour le serviteur de la Justice. Il se baissa pour esquiver le coup de poing et profita de l’élan de son adversaire et de son poids pour le faire basculer en lui saisissant le bras, faisant ainsi prolongé le coup, le soulever et s’étaler sur le dos comme une vulgaire tortue.
Noa courut alors vers son sabre, mais l’allumette lui barra le passage en écartant les bras, Noa se laissa tomber et glissa entre les jambes de l’adversaire donnant un rapide coup au point faible majeur de tous les hommes. Il avait mal pour lui, mais ça lui apprendra à le frapper alors qu’il était sans défense. Il se redressa et prit son sabre, tandis que le gorille se relevait péniblement. Noa sortit son sabre du fourreau et fit passer la lame sur la nuque du mangeur de bananes.
" Ne bouge pas ou tu y passes. Maintenant dit moi, je suis où ?
-Je ne dirais rien. "
Noa fit glisser légèrement le fil de sa lame sur la nuque, ce qui perler un filet de sang.
" Dernière chance, je suis où ?
-Toujours dans la grange ! Juste au niveau en dessous.
-Où sont mes autres affaires ?
-Dans le meuble.
-Merci pour ta bienveillante coopération. "
Avant que l’autre ne réplique, Noa l’assomma avec sa garde. Il fouilla dans le meuble et retrouva toutes ses affaires, y compris son Den Den Mushi. Il appela grâce à lui la 412ème et leur fit parvenir tout ce qu’il savait et demanda un détachement pour faire une descente, car là, il ne pourrait pas s’en sortir, tout seul, avec tous les gardes à l’extérieur. Il reçut pour ordre d’attendre dans sa position actuelle et la défendre si besoin. Noa leur dit de se grouiller, il avait des hématomes de partout sur le visage et n’avait plus beaucoup de force.
Le détachement de la garnison de tarda pas à arriver et mit tout le monde aux arrêts, il pût alors sortir de sa cachette.
La division avait rassemblé tous les travailleurs de la grange dans un coin et ligoté les gardes ainsi que son hôte.
Noa sourit comme il put ressentant une vive douleur dans tout son visage à chaque fois qu’il essayait, puis repartit avec toute la troupe et les prisonniers.
Il passa un petit séjour en infirmerie, mais au moins il venait de mettre à terre un sacré marché noir d’après son supérieur, Tanuki devrait revenir à la normale. Son supérieur le prévint qu’il risquait d’avoir la Mafia aux fesses, même si ce serait étonnant, car des marchés noirs comme celui-là, elle en détient pleins, mais un homme avertis en vaut deux.
Noa remit son rapport complet par écrit et partit se reposer avant de reprendre bientôt la Mer pour une nouvelle mission.