Huit années plus tôt dans le passé, un jeune officier venait de faire son entrée au sein des rangs de la marine. Sous la protection du vénérable colonel O'Bannon, celui-ci fut rapidement catapulté au grade de lieutenant, dans ce qui était le plus grand rassemblement de marine de tout East blue. Là-bas, il parfaisait encore et encore les bases de l'entrainement intellectuel et physique qui serait à même de faire de lui un redoutable officier de la justice. De part sa nature-même et du statut d'esclave gladiateur dont il avait été extirpé, le jeune officier n'avait attiré jusqu'à présent que peu de sympathie de la part de ses collègues... Sa faculté à se croire supérieur en tout et à la prouver coup sur coup n'aidait évidement pas une éventuelle démarche pour se faire aimer. Démarches qui étaient pour autant inexistantes. Le jeune lieutenant Toji Arashibourei se moquait bien des paroles perfides qui l'entouraient... Ses actes parleraient pour lui, faisant alors taire toutes les médisances.
Pour l'heure, il prenait un malin plaisir à distancer comme à l'accoutumé tous ses collègues, au cour du marathon matinal quotidien. Rapidement il en était arrivé au constat que nul ici-bas n'avait, ni son endurance, ni sa détente. Constat qui le remplissait bien entendue d'une fierté exaspérante.
Pfuu... pfuu... pfuu... Le son régulier de mon souffle emplit le monde où je me trouve, se mêlant au crissement de mes bottes dans la terre battue du sentier d'entrainement où je cours depuis maintenant plus de deux heures. Un rapide coup d'œil derrière moi m'assure que nul autre marine n'a pu tenir ma cadence, me garantissant une nouvelle victoire mesquine sur ces stupides humains qui se croient si supérieurs. Pfuuu.... pfuuu... Au détour d'un bois, j'aperçois au loin la ligne d'arrivée du parcours. Pfuu... pfuu... j'accélère donc la cadence, allongeant mes pas sans me soucier d'économiser mes forces. Mes pieds défilent en rythme devant moi, me lançant à toute vitesse dans la dernière ligne droite.
Soudain, une silhouette passe en courant à côté de moi, me dépassant sans effort avec une vitesse surprenante. Putain mais c'est qui ce connard ?! D'où il croit qu'il peut me battre à la course ? Pfu. Pfu. Pfu ! J'accélère la cadence, me ramenant rapidement à son niveau. Un coup d'œil à cet importun me laisse pas mal de questions en suspend... Aucun uniforme, jamais vu ici... Un jogging de sport entièrement noir, une casquette noire... aucun symbole ni grade... C'est qui ce guss ? Me voyant arriver à son niveau avec l'inertie d'une locomotive lancée à pleine vitesse, l'homme en noir me décoche un sourire compatissant où je perçois une foutue pointe de pitié. Ensuite, comme pour m'humilier davantage, il accélère, creusant de nouveau l'écart.
Raaaah putain ! Si tu crois que j'vais m'laisser distancer connard ! Pfu ! Pfu ! Pfu ! Je lâche tout ce que j'ai ! Crachant mes poumons dans un ultime effort, je parviens à le rattraper une nouvelle fois, mes muscles comme chauffés au rouge ! La ligne d'arrivée n'est plus très loin,, un dernier effort et je le dépasse ! Pfu ! Pfu ! Pfu ! Je commence à voir toute une foule de soldats agglutinés sur la ligne d'arrivée, futurs spectateurs de mon éclatante victoire. J'tai bien eu conn*...!
« Soru ! »
Un simple souffle d'air... c'est tout ce que j'ai pu voir... Il était là, juste à mes côtés... puis la seconde d'après je le voyais disparaître pour se matérialiser sur la ligne d'arrivée... Bor...del... Ahuris, je m'arrête en suffoquant après quelques pas, sans cesser de fixer le salaud qui vient juste de m'humilier. Il n'a pas pu disparaître ?! Non, c'est plutôt comme s'il avait tout à coup accélérer brutalement ! Comment peut-on aller aussi vite ?! Serrant des poings avec rage, je me torture le cerveau à comprendre ce que je n'aurais jamais imaginé quelques minutes plus tôt. Comment putain, comment ? Le vainqueur de la course est quant-à-lui entouré d'une foule de marins admiratifs, dont il se détourne rapidement comme par snobisme, avant de rejoindre un petit groupe d'individus à la même tenue. Tous comme lui affichent cet air hautain et supérieur dont je devrais être le seul à avoir droit ! Mauvais perdant, la rage monte en moi comme la pression dans une marmite trop bien fermée... Les petits regards méprisants qu'ils m'envoient en coin suffisent à me mettre hors de moi !Bien décidé à lui faire alors ravaler sa victoire, je m'élance à grands pas vers lui, le visage crispé par la colère. Bien qu'arrivé il y a peu, toute la base est déjà au courant de mon caractère quelque peu... emporté. Nul ne doute donc du dénouement tragique qui risque de résulter d'une éventuelle altercation. C'est donc tout naturellement qu'à mi-chemin une demi-douzaine de sous-officier de mon bataillon m'interceptent, essayant au mieux de m'arrêter à temps.
« Attends Toji ! Cherche pas l'embrouille avec ces gars, ou bien tu vas mettre toute la section dans la merde. Putain attends.
C'est gars là sont du Cipher Pole ! Le huit si les rumeurs sont exactes. Ils viennent d'arriver à la base dans la nuit, nul ne sait pour combien de temps. Va pas leur chercher des noises Toji... Ces types sont des monstres. »
Le Cipher Pole 8 ? C'est donc ça... J'en ai entendu des belles sur eux et leurs semblables du gouvernement... Des agents d'élites, formés dans les meilleurs centres aux techniques les plus efficaces. Ce Soru par exemple... Voilà qui expliquerait bien des choses... et qui me donne d'autant plus envie d'aller me frotter à eux. Agents spéciaux ou pas, ils vont voir de quoi j'me chauffe ! L'originalité de la nouvelle m'ayant cependant quelque peu calmé, je me relance vers le petit groupe en noir, une lueur menaçante dans les yeux.
« Non mais attends Toji ! »
« Sergent... J'tai demandé de l'ouvrir ? »
« Euh, non mon lieutenant. » me répond-il en se dressant au garde-à-vous.
« Exactement. Oublie pas ça, ça pourrait te sauver la vie un jour. »
Une fois mes « collègues » envoyés paitre, je traverse leurs rangs intimidés avant de me planter devant l'ensemble de ce fameux Cipher Pole 8... Tous me lorgnent maintenant dans le silence le plus total. Je brandis alors une main grande ouverte vers mon rival du jour, dans un simulacre de fair-play et de sympathie. Le sourire jusqu'aux oreilles et le regard perçant, mon air évoque tout d'une souricière prête à se déclencher.