Un véritable panache d'acide liquéfie la glace et dévore le sol, surgissant directement de sous nos pieds, me séparant de Marx et Lénine. Déjà, Staline ouvre l'écoutille du sous-marin pour s'y glisser rapidement. Ça ne va pas du tout, non, pas du tout. Déjà, par réflexe, je me recouvre de haki lorsqu'un véritable humanoïde d'acide boursouflé et bouillonnant fond sur moi pour me délivrer un coup insoutenable. Simplement lui donner la réplique me demande un effort surhumain, à parer un tel choc, je sens chaque os de mon bras se morceler, face à une telle puissance. Je vois déjà une autre poigne couverte d'acide se dresser vers moi, imparable et vicieuse. Soudain, une explosion frappe l'amiral au flanc, l'envoyant bouler plus loin, juste assez longtemps pour me défaire de l'étreinte d'acide qui s'attaquait déjà à ma peau.
C'est Marx, qui, de loin, s'est évertué à user de Chemical Juggling pour me débarrasser de l'emprise de Green Wolf. Sa main fumante, son air faible et fatigué prouve déjà que l'effort s'est révélé bien demandant. Lénine, quant à lui, tente d'évaluer la distance du saut qu'il doit effectuer pour rallier le sous-marin. Une distance qui, avec les assauts de l'amiral, s'avère de moins en moins suffisante.
"Erf…. ça va pas trop là…"
Dark a raison, et je ne peux me résoudre à bondir vers les géants, car déjà un nouveau projectile d'acide fuse vers moi et pulvérise le bloc de glace sur lequel je flottais. Bondissant tant bien que mal, j'atterris sur la coque d'acier avec lourdeur, toujours sonné par le coup de l'amiral. J'ai lu les journaux, à l'époque de la chute d'Impel Down, on dit même qu'il aurait volé un bras au Capitaine Red, si même le chef d'Armada, ni même le Chien Fou, n'ont su rivaliser avec lui, je ne suis probablement pas de la trempe nécessaire.
Lénine ! Marx ! Sautez, y'a pas d'autres solutions !
Les deux pauvres évadés me lancent des regards fatigués et désespérés. Regards auxquels je ne peux répondre car déjà d'autres projectiles d'acide sont décochés, visant cette fois la coque du sous-marin.
Il veut nous envoyer par le fond !
Mes poings se recouvrent de haki et je fonce vers les projectiles pour les détruire en plein vol ! Je sens la morsure corrosive du liquide qui brûle ma peau et pique mes narines. Sans le haki, je n'aurais probablement plus de membres à l'heure qu'il est. Déjà, je sens la force dans mes bras me quitter, ma confiance défaillir, s'il fallait qu'il perce le sous-marin… S'il fallait seulement que la coque ne soit plus hermétique… Ce serait la fin. Et cette fin semble se concrétiser à vive allure, puisque déjà les brûlures sur mes bras m'informent que je ne pourrai bloquer de tels assauts bien longtemps.
Raah… merde…
J'halète et je su à grosses gouttes, malgré le froid. Ma vision se brouille de plus belle alors que je hèle les deux géants pour qu'ils sautent sur le submersible. À travers les glaciers fracassés, les remous de l'eau du hangar et les émanations fumantes de l'acide, j'entraperçois l'amiral Tetsuda qui, calmement, s'avance vers le sous-marin, son bras verdâtre tendu comme une arme à feu.
Marx ! Lénine ! Faites vite !
Lénine tente difficilement de remettre Marx sur pied, mais l'instabilité du bloc de glace sur lequel ils se trouvent n'aide à rien. Ils glissent piteusement et ne peuvent se remettre sur pied !
"Erf, on va quand même pas d'voir les laisser là…"
C'est terminé Double Face. N'envisagez pas de folie supplémentaire.
Il y a un instant un éclair dans les yeux de l'amiral. Une étincelle qui, l'espace d'un instant, me donne l'impression d'une explosion. Puis le tonerre frappe.
Un tonerre comme je n'en avais jamais connu.
La vague de haki royal ravage tout autour de l'amiral avec la véhémence d'un troupeau de buffles en pleine course. Je sens mon cerveau broyé, mes muscles flagellés, mon esprit fracassé. Je titube, déjà en équilibre précaire sur le sous-marin de Staline. Le monde pétille et se fond au noir sous mes yeux, il n'y plus ni haut, ni bas, une nausée terrible me prend. La simple idée de rester debout devient un pénible défi pour moi, un acte irréalisable. Mes yeux ne me transmettent plus que quelques éclairs d'une situation déjà hors de contrôle. Lénine et Marx foudroyés par le haki. L'amiral pulvérisant Lénine sur place, Marx avalé par les flots, entraîné dans une chute mortelle par Green Wolf. Je sens mes genoux ployer et s'écraser contre la coque de métal du submersible. Mon esprit divague alors que Kindachi Tetsuda, lui, depuis un nouveau perchoir de glace flottant, braque un nouveau canon d'acide vers moi. Ils sont morts, la mission a échoué. J'ai trahi, et j'ai échoué.
Une erreur de plus à ajouter au tableau de Double Face ? Une erreur de trop, même ?
"Non. Surtout pas. Parce tu l'auras fait en suivant ton cœur jusqu'au bout, l'ami."
Ah ouais héhé, y'a ça… On a beaucoup perdu ces derniers temps, non ? Notre grade, notre équipage, notre fruit du démon…
"'S'en fout de tout ça. Désormais on peut vivre libre, et toujours je sais que tu garderas un œil sur celle que tu aimes."
T'as bien raison, jamais je la laisserai seule sur les mers.
"Pour ça, 'va falloir sortir d'ici, cependant. Et il te reste bien une arme pour accomplir cette tâche."
Héhé, bien sûr.
"Il te reste Double Face. Double Face et sa volonté de fer."
Tu l'as dit.
L'amiral Kindachi Tetsuda s'avance vers Jenkins, assagit, à genoux, le menton appuyé contre le torse. Le pauvre n'a plus aucun chance de survie, si bien que Green Wolf prend son temps pour bien viser la tête, histoire de faire fondre ce traître et déserteur. Il pourra envoyer le vaisseau de Staline par le fond ensuite.
Je n'ai jamais compris pourquoi on t'as sorti de ce foutu asile de North Blue, Double Face. Tu aurais dû y rester, ç'aurait été un problème de moins pour bien des gens. Allez, ce sera pas une grosse perte pour la Marine…
Oh, tu crois ?
MIDNIGHT BLAST…
Mon poing se fiche dans sa main. Il a vu venir le coup. Les flammes de mon bras font exploser l'acide du sien et lèchent son corps avec ardeur. De quoi le déstabiliser momentanément, le temps qu'un second poing se fiche dans ses côtes. Mon haki mord son flanc et les flammes abîment son uniforme. Il brandit un poing d'acide fumant pour contre-attaquer, mais déjà, deux nouveaux midnight blast s'écrasent contre son torse, de quoi le déstabiliser au point de l'en faire tomber du sous-marin. Je ne lui laisse pas une chance de plus, vais puiser ce qu'il me reste de force dans chacun de mes membres pour me propulser sur lui.
…AVALAAANCHE !
Les poings enflammés fusent comme des météores et s'écrasent dans des claquements sourds sur son corps que je martèle de haki. Des explosions d'étincelles et des gerbes de feu s'échappent des brasiers que sont mes jointures, à chaque frappe. Mes muscles s'engourdissent et hurlent grâce, ma vision se brouille de plus belle, mon corps n'arrive qu'à maintenir cette cadence effrénée alors que je doute pouvoir me tenir debout à nouveau. Mais je ne peux laisser tomber. Je suis Double Face le révolutionnaire, ex-capitaine des Rhinos Storms, guerrier d'Erbaff et nouveau soldat de la liberté.
Et puis bon, si je meurs, Lilou m'en voudra à mort…
Les flammes grillent son uniforme, et lorsqu'il s'encastre dans un bloc de glace, dans une explosion phénoménale, je pompe les derniers échos d'énergie présents dans mon corps pour bondir sur un bloc de glace avant d'atterrir péniblement sur le submersible qui, déjà, gagne les profondeurs du hangar. Je rempe jusqu'à l'écoutille, l'ouvre avec la force du désespoir, puis m'y glisse péniblement alors que les remous et les flots chaotiques immergent complètement le vaisseau. Sauvé.
Sauvé.