Ville de Nanohana, 1625.
Vingt-quatre heures. Vingt-quatre heures étaient passées après que Wallace m’ait annoncé la terrible nouvelle. Nouvelle selon laquelle j’étais dans le collimateur du Gouvernement mondial pour « incompétence ». Drum ne m’avait vraiment pas réussi en fin de compte, vu que les grandes pontes réfléchissaient à l’éventualité selon laquelle je pouvais être écarté du projet du Léviathan. A croire que les médailles reçues et ma récente montée en grade n’étaient que mise en scène. Une promotion sans fondements. Rien que du vide. Et d’une manière ou d’une autre, ça faisait mal, vraiment mal. Depuis que je savais que mon futur était complètement incertain, je broyais du noir. J’avais même imaginé de loin la grande déception de mon paternel. De quoi déprimer, en effet, puisque cet homme était presque tout pour moi. La même nuit, j’avais failli craquer, fondre en larmes, mais de justesse, je m’étais repris et j’avais même eu la force de ramener une belle infirmière dans mon lit. Une forme de consolation quoi. Puis, le jour finit par se lever sur Alabasta, ce qui eut le don de m’apaiser un tant soit peu. Le tout était maintenant de me changer les idées.
C’est dans cette optique des choses que j’avais décidé de m’éloigner du Lev. Plus je serai loin de ce navire et mieux ce serait. J’avais donc erré dans les rues de la ville portuaire de Nanohana pendant un long moment, sans véritable but. Mon air fantomatique, un peu absent, avait frappé plus d’une personne. Aucune de mes admiratrices qui me poursuivaient comme de vraies tarées habituellement, n’eut le courage de m’approcher en voyant ma mine désabusée qui en disait long sur mes états d’âmes. Je devais être vraiment pitoyable. Assez en tout cas pour qu’aucune groupie ne daigne m’adresser parole. D’une manière ou d’une autre cependant, c’était mieux ainsi. La solitude m’allait très bien aujourd’hui. C’était juste ce qu’il fallait pour que je fasse le plein d’énergie. Mon errance dura donc quelques heures. Sans trop m’en rendre compte, j’avais déambulé dans presque tous les recoins de la ville. Jusqu’à ce que le soleil m’insupporte. De quoi me pousser à me réfugier dans la première boutique que je vis. Un petit café moderne qui avait de l’air conditionné et qui contrastait vraiment avec toutes les tavernes qu’on pouvait voir dans les environs.
Une fois à l’intérieur, une serveuse très jolie (et bien gaulée) m’accueillit joyeusement. J’eus un pâle et mince sourire à son égard, avant qu’elle ne m’installe à une table, près de la vitrine. Je commandai alors deux grosses glaces avant de me perdre progressivement dans mes pensées. On aurait dit que j’étais devenu une loque. Une loque humaine. Ce n’était pas glorieux de le dire ainsi, mais le vague reflet de ma mine que me renvoyait la vitrine me forçait à ce constat. Ne pas avoir chialé comme un gosse était le seul mérite que j’avais. J’étais bien conscient que rien n’était encore perdu. Cependant, ce qui me faisait réellement souffrir était le seul fait d’être dans le collimateur des huiles qui semblaient ne pas me faire confiance. Une fois, ça passait, mais deux fois, c’était trop à mon sens. Cette situation montrait à quel point ce gouvernement était pourri et très injuste. Le mal était un peu trop profond, ce qui nécessitait une refonte interne et non pas externe, voire même chaotique, comme celle que prônaient les révolutionnaires. C’était cet idéal-là qui me maintenait toujours dans les rangs et qui me donnait des raisons d’avancer, d’évoluer…
Une demi-heure plus tard, j’étais toujours dans mon coin, à rêvasser et à ne plus bouger. A travers la vitrine, j’observai la rue sans vraiment le faire. A vrai dire, mes pensées étaient ailleurs. Entre temps, mes boules de glace avaient fini par fondre ce qui inquiéta la belle serveuse qui m’avait accueillie et qui n’avait pas cessé de m’observer avec un air très inquiet. Touchée par mon état, celle-ci s’approcha de moi et me demanda si les glaces n’étaient pas à mon gout. Pour ne pas inquiéter cette inconnue davantage, je me dépêchai de régler ma note et de sortir du café. Mais à peine avais-je fait un pas dehors qu’une personne me bouscula violemment et continua son chemin au pas de course. Déséquilibré dans un premier temps, je réussis tout de même à ne pas tomber et j’entendis tout juste derrière moi des voix criardes qui sommaient à celui qui m’avait bousculé de s’arrêter. Calmement, je me mis à suivre du regard le fuyant avant de constater qu’il s’agissait d’une femme. Sa longue chevelure noire de jais, son gros cul bien rebondi et sa manière de courir ne trompaient personne, bien que je doive avouer qu’elle était plutôt rapide.
- « ET MERDE ! HEY VOUS ! VOUS N’AURIEZ PAS PU L’ARR… »
Blanc. Alors que j’observai la fuyarde d’un air vague, j’entendis derrière moi la voix des poursuivants. Et lorsque je m’étais retourné lentement vers eux, cette voix-là s’évanouit aussitôt. L’imbécile qui gueulait m’avait sans doute reconnu, d’autant plus que j’avais mon manteau de haut-officier sur les épaules. C’est à ce moment précis que je distinguai moi aussi lesdits poursuivants. Il s’agissait de gouvernementaux étant donné l’emblème du Gouvernement Mondial cousu sur les poches de leurs vestes. Si certains ressemblaient clairement à des bureaucrates, d’autres avaient plutôt la gueule d’agents du CP. Ces derniers semblaient ne pas être vraiment intimidés, au contraire des premiers qui s’étaient mis à bafouiller des excuses bidons. « Qui poursuiviez-vous ? » Coupai-je instantanément, ce qui déconcerta légèrement l’un des gratte-papiers, avant que celui-ci ne m’annonce clairement qu’il s’agissait d’une mission confidentielle et qu’ils devaient se dépêcher de retrouver la jeune femme. Je haussai alors mes épaules, tandis que les gouvernementaux se remirent à courir dans tous les sens. Cette histoire dite « confidentielle » ne sentait pas bon.
Pour m’en faire une propre opinion, je décidai de chercher cette inconnue de mon côté. S’il s’agissait d’une fugitive, je leur rendrai très certainement service, ce qui ne serait pas un mal. Par contre, l’affaire prendrait un tout autre tournant s’il s’agissait d’une innocente, clairement. Ma recherche dura donc des heures. Des heures à tourner en rond, à éviter la même escouade de gouvernementaux grâce à mon haki encore perfectible. Des heures de recherches vaines… Jusqu’à ce qu’au détour d’une quelconque ruelle, je me retrouvai nez à nez avec la poursuivie. A la vue de mon manteau de haut-officier, celle-ci voulut se retourner et entamer une nouvelle fuite, mais malheureusement pour elle, nous étions dans un cul-de-sac. L’inconnue s’effondra au sol et se mit alors à pleurer, sans doute épuisée par son marathon d’aujourd’hui. Ébranlé par ces soudains pleurs, je m’approchai d’elle -Tout de même précautionneusement, sait-on jamais-, avant de la prendre dans mes bras. Mais au même moment, nous entendîmes ses nombreux traqueurs approcher de notre position. Une situation qui m’obligea à agir sans prendre la peine de réfléchir.
- « Qu’est-ce que vous… ? »
La jeune femme n’eut pas le temps de finir sa phrase, que je l’avais déjà prise dans mes bras avant d’effectuer un bond périlleux qui me permit de franchir l’impasse. Nous tombâmes sur un terrain désert et sablonneux. Sans doute l’une des limites de la ville, puisqu’à perte de vue, s’étendaient des dunes sables. Je plaquai ensuite ma main droite sur la bouche de ma compagne d’infortune pour qu’on ne l’entende pas gémir inutilement. Nous gardâmes alors cette position, tandis que nous distinguâmes les pas et voix des gouvernementaux se rapprocher. Dieu merci, ces derniers ne tardèrent pas dans les environs et continuèrent leur recherche ailleurs. Nous les avions donc semés pour un bon moment. Je relâchai alors la demoiselle qui avança de deux pas et se courba vers l’avant en posant ses mains sur ses genoux. « M… Merci de m’avoir sauvé… » Malgré sa respiration saccadée, sa voix était douce, chaleureuse. J’aurai pu me réjouir, mais je préférai ne pas m’avancer, tant que je ne saurai pas la raison de sa fuite. Mais alors même que je comptais la questionner, la fuyarde se retourna vers moi et me fit un sourire chaleureux. Mais le sourire s’effaça lorsqu’elle put enfin détailler les traits de ma face.
- « S… Salem… P… Pas possible… »
La brune recula de quelques pas, perdit l’équilibre et tomba sur ses grosse fesses, tandis que j’affichai la même mine désabusée…
- « Fiona… »
Autant dire que la surprise était partagée. Vraiment partagée.
Sixième chapitre ; Révélations fracassantes [Solo]
Quelques heures plus tard, dans un hôtel au nord de la ville.
- « Aaaaaaah ! Ce bain m’a fait du bien ! Tu es sûr que tu ne veux pas en profiter, toi aussi ? »
Alors que Fiona sortait enfin de la salle de bain de la chambre d’hôtel que j’avais loué, je fis un non de la tête pour lui répondre. Certes, je suais après toute cette journée passée au soleil, mais je n’avais pas le cœur à prendre un bain. Pas du tout. Et puis, telle que je la connaissais, cette femme pouvait en profiter pour s’enfuir. Ce n’était pas comme si elle ne m’avait pas fait le coup il y a quelques dizaines d’années en arrière. Ouais. Une époque difficile et amère pour moi. Au souvenir de cette période du passé d’ailleurs, je fronçai mes sourcils, mais continuai tout de même de fixer l’extérieur depuis la fenêtre de notre chambre. Nous étions tranquilles dans cette zone, bien loin du tumulte habituel du grand marché et du port de la ville. Une aubaine. Il n’y avait donc pas moyen que ces sales gouvernementaux viennent nous déranger, sauf véritable malchance et encore. Je poussai alors un soupir de soulagement, avant de tirer les rideaux sur les fenêtres de notre hôtel. Tout de même, je m’interrogeais vraiment sur cette course poursuite qui s’était engagée entre les membres du gouv et Fiona. Qu’est-ce qu’elle avait pu bien faire ?
- « Tu es toujours aussi beau, toi ! Je craquerai presque ! »
Avec malice, la jeune femme vint me bâillonner à l’aide de ses frêles bras, non sans plaquer son incroyable poitrine contre mon dos. J’eus alors un sursaut, avant de me mettre à rougir violemment, la mine presque serrée pour le contraste. Oui. Résister au charme de cette demoiselle était chose difficile, tout du moins pour ma part. Et puis, nous étions tombés amoureux l’un de l’autre par le passé, ce qui expliquait bien de choses, puisque habituellement celui qui fait rougir, c’est bien moi. J’essayai de m’extirper de son emprise, mais rien à faire. Elle était pire qu’un chewing-gum. J’eus alors un lourd soupir. Elle me faisait vraiment perdre mes moyens. Je pourrais presque la foutre dans ce lit, mais il y avait plus urgent à faire qu’une partie de jambes en l’air. « On est bien comme ça, non ? » A peine avait-elle demandé mon avis que je finis par retirer ses bras avec force, avant de m’éloigner et d’aller m’assoir sur fauteuil tout près du lit. Cela ne décontenança point pour autant Fiona, puisqu’elle me suivit, histoire de s’installer sur mes genoux, ce qui eut pour effet de m’irriter encore une nouvelle fois…
- « Descends de là. »
- « No waaaaay ! Je suis bien là où je suis ! »
- « On dirait pas que tu étais poursuivie et que tu pleurnichais tout à l’heure… »
- « Heiiiiin ! T’es pas gentil Salem ! Et puis tu sais bien que j’adore t’embêter. On ne me soupçonne jamais ce côté-là, mais je suis toujours d’humeur taquine avec les gens que j’aime ! Et si tu partais te baigner ? Je pourrais même te frotter ton… »
- « Non merci ! » Coupais-je aussitôt.
- « Je voulais parler de ton dos tu sais. Petit coquin. »
- « Et si tu me racontais plutôt pourquoi ces gens te pourchassent ? »
- « … »
- « T’as perdu ta langue ? »
- « C… C’est délicat à dire tu sais… »
- « Hein ? »
- « En fait c’est que… »
- « Crache le morceau ! »
- « J’ai refusé la demande en mariage d’un dragon céleste ! Et depuis, ses hommes me traquent sans relâche ! »
- « T’as vraiment pas mieux comme mensonge ? »
- « Je suis pas une menteuse Salem ! Ah ! Tu sens pas bon toi ! Viens te baigner ! »
- « Non mais lâ… »
Avais-je eu le temps de terminer ma réplique ? Non. Si bien qu’en quelques minutes seulement, j’avais fini par être complètement dévêtu par une furie, avant de me retrouver dans un bain sans rien comprendre. Là encore, gros soupir. C’est dire à quel point j’étais désarmé face aux femmes qui réussissaient à me faire grave craquer. C’était vraiment pas de bol. Vraiment pas. A peine avais-je fini de penser ainsi que Fiona pénétra dans le bain et commença à frotter mon dos en chantonnant une chanson pour enfant que je n’avais jamais entendu. J’aurai pu râler encore, mais je ne fis rien de tel. Sa douceur avait fini par remplacer son humeur taquine, ce qui eut pour effet de m’apaiser. Pis il fallait avouer que ce bain était complètement relaxant. De quoi faire disparaitre la fatigue et la mauvaise odeur que j’avais accumulées. D’ailleurs, je m’étonnai d’avoir un peu oublié mes problèmes. Ceux qui concernaient le Léviathan et les dirigeants du Gouvernement Mondial qui songeaient à m’assigner à un autre poste, autre que celui que j’avais actuellement. Pour oublier ses soucis, rien de mieux que de penser à ceux des autres, faut croire.
- « Qu’est ce qui se passe vraiment pour qu’on te traque comme ça ? »
- « Je te l’ai dit non ? Le noble ! Le noble ! » Répondit-elle, avant de glisser devant moi pour s’installer sur mes cuisses.
- « Déjà, un dragon céleste ne se fatigue pas à demander, Fiona… »
- « Ah bon ? Je ne savais pas ! En tout cas, celui dont je te parle avait été très gentil avec moi ! »
- « Ouais ouais… »
- « Mais… Je te jure mon doudou ! »
- « Doudou ? »
- « Tu n’aimes pas ? »
- « … »
- « Salem… ? »
- « Quoi encore ?! »
- « Ça durcit… »
- « QUOI ?! »
- « Hem… Tu sais, ton… Je le sens sous mes fesses en fait… »
- « TU M’ENERVEEEEEEEEEEEES !!! »
- « Hihi ! Ton corps me dit le contraire, pourtant ! Et puis tu es tout rouge ! Fais-moi un bisou doudou ! »
- « VA EN ENFER ! »
Et sur ces mots, je quittai rageusement le bain. Tout ça sous le fou rire de madame qui n'en finissait plus de me troubler. Dur.
Dix minutes plus tard, dans la même chambre d'hôtel.
- « Tu es toujours fâché ? »
Fiona sortit enfin du bain, après plus ou moins dix minutes. A croire que le premier ne lui avait pas suffi. Je lui portai un regard presque agacé. Elle me rendait non seulement confus, mais elle ne prenait même pas la peine de répondre correctement à mes interrogations. Pourquoi ne devrais-je pas faire de même ? Aussi avais-je fini par afficher une mine boudeuse en croisant les bras et en reportant mon regard ailleurs. Fiona se mit tout de même à sourire, avant de venir s’installer paisiblement sur le grand lit de la pièce cette fois. Elle pouffa de rire et se mit à lisser sa chevelure. Je ne pus feindre le boudeur très longtemps puisque j’avais fini par tourner mon visage vers elle. Je fronçai tout de même mes sourcils pour lui montrer à quel point elle était énervante, mais cela n’effaça pas pour autant son sourire carrément moqueur. Comme d’habitude, je finis par soupirer avant de me prendre la tête dans les bras. Fiona était vraiment une énigme. Insaisissable. Et c’était peut-être ce qui faisait son charme et ce qui m’attirait chez elle en plus de sa beauté et sa bonté naturelle. Pas quelqu’un qu’on devrait chercher comme le faisaient ces gouvernementaux.
- « J’abandonne… T’es pas obligée de me raconter quoi que ce soit… »
- « C’est bon, je vais tout t’avouer. Il serait incorrect de ma part de ne pas te raconter l’histoire après tout ce que tu as fait pour moi aujourd’hui. »
Je levai brusquement ma tête et portai un regard interrogatif à la demoiselle. Si sa phrase aurait pu paraitre suspicieuse, le ton de sa voix ne me trompait pas. Moins joyeux, plus sérieux. De quoi captiver mon attet. Fiona finit par se recroqueviller sur le lit. Elle ferma ses yeux et se mit à dodeliner de la tête comme si elle bougeait au rythme d’une douce musique qui ne sonnait que dans sa petite caboche. Intrigué, je me levai de mon siège pour aller également poser mes fesses sur le lit. Sentant ma présence à ses côtés, la belle brune vint se poser sur mon torse avant de soupirer d’aise. Légèrement surpris par son geste, je finis par me radoucir, avant de me mettre à caresser sa longue chevelure pour la mettre un peu plus en confiance. Mais plus les secondes passèrent et plus ma curiosité grandissait. Je n’allais plus pouvoir tenir longtemps ! Après cinq minutes de silence, je finis par approcher mon visage du sien, craignant qu’elle ne se soit endormie dans mes bras. Cependant, mon air inquiet se transforma vite en un air grognon quand je la vis sourire et rougir en même temps, le tout donnant une sale expression qui me disait clairement : « Tu peux être mignon quand tu veux, en fait ! » Je balançai Fiona de l’autre côté du lit, avant que celle-ci se redresse et ne se mette à rire aux éclats. Rien à tirer de cette meuf…
- « Je suis une native d’Ohara ! »
- « Hein ? »
- « Je suis née à Ohara. O - HA - RA ! Tu ne connais pas cette île ? »
- « Bien sûr que si, mais… »
- « Alors, tu comprends maintenant, mon doudou ? Je suis l’une des rares archéologues de ce monde. »
- « Toi ?! »
J’étais stupéfait. Vraiment. Je m’étais imaginé tous les scénarios possibles, sauf celui-là. C’était fou. Vraiment fou. Mais le pire, c’est que Fiona, elle ne perdait pas son sourire. Je restai bouche bée pendant un bon moment, tout en la fixant d’un air hébété. Pour une surprise, c’en fut une. Je finis par me laisser tomber sur le lit, tandis que ma tête rebondissait sur les coussins. Fiona pouffa de rire, avant d’effectuer le quatre-pattes pour me rejoindre et pour s’installer à califourchon sur moi. Je clignai plusieurs fois des yeux, avant qu’elle ne brise le silence de sa voix taquine : « Tu me hais ? » Je secouai la tête dans tous les sens, histoire de lui affirmer que je ne pouvais pas lui en vouloir pour cela. La tragédie qui datait d’un siècle à propos du Buster Call sur son ile m’avait même choqué lorsque j’étudiais l’histoire de la marine avec ma mère. Bien sûr, je connaissais quelques trucs sur le fameux siècle oublié, les phonéglyphes, les armes antiques… Mais je ne m’étais pas plus focalisé que cela sur ces histoires. Cependant, même si je ne détestais pas la brune à propos de son métier et de ses origines, j’avais néanmoins quelques questions en tête, tout de même.
- « Tu es révolutionnaire ? »
- « Non. Simple civile, mister ! »
- « J’ai entendu parler des rumeurs sur quelques phonéglyphes qui se trouveraient sur ces terres. C’est pour ça que tu es là et que ces chiens du gouvernement te poursuivent ? »
- « On pourrait effectivement croire ça vu que je suis archéologue, mais non. Ce n’est pas la raison de ma venue ici. J’ai arrêté de courir après les phonéglyphes depuis belle lurette maintenant. J’aspire à autre chose. Ces gens qui me poursuivent ont tort, mais leur faire entendre raison serait certainement mission impossible. Tu les connais aussi bien que moi, doudou. »
- « Et quelle est la raison pour laquelle tu te trouves ici ? »
- « Heu… C’est une longue histoire en fait… »
Cette fois-là, il y avait clairement malaise du côté de Fiona. Cette dernière se mit à fuir mon regard, non sans rougir légèrement. Ses yeux trahissaient tout d’un coup une certaine mélancolie. Encore des problèmes ? Il fallait que le je le sache coûte que coûte. C’est dans cette optique des choses que j’avais redressé mon torse, avant de prendre son visage dans mes mains. Mon regard était intense, déterminé. J’étais prêt à l’aider, tout autant qu’elle l’avait fait pour moi par le passé, lorsque j’avais rompu avec ma femme. Mon visage on ne peut plus sérieux motiva la jeune femme qui finit par me sourire, avant de quitter mes pieds. Je commençai à me poser des questions, lorsqu’elle se rapprocha de ses vêtements, se mit à les fouiller, avant de revenir vers moi avec un pendentif porte-photo. Une fois à mes côtés, elle me tendit ledit pendentif avec des larmes aux yeux. Touché par son état, j’ouvris rapidement le pendentif et vis une photo d’une mère et de son nouveau-né. Mère qui n’était autre que Fiona elle-même. J’écarquillai les yeux un moment, avant de finir par lui sourire et lui administrer une petite pichenette sur le front.
- « Alors quoi ? Tu es maman toi ? Mais c’est une merveilleuse nouvelle ! Hein… ? Mais pourquoi tu fais cette tête ? »
- « Fut un moment où j’étais traquée par le gouvernement. Traquée non seulement parce que je suis une archéologue, mais aussi parce que je cherchais les emplacements de phonéglyphes. Comme tous mes ancêtres, je voulais les déchiffrer et percer le mystère du fameux siècle oublié. Il est évident que je ne pouvais pas imposer cette vie difficile à mon enfant. Alors j’ai eu l’idée de l’abandonner… »
- « Tu as fait quoi… ?! »
- « Oui je sais. C’est ignoble. Mais que voulais-tu que je fasse Salem ? Que pouvais-je faire ?! »
Alors que Fiona pleurait de plus belle, je préférai ne rien dire d’autre. De toute façon, étais-je bien placé pour savoir ce qui était bon pour un enfant, moi qui n’en avais pas un seul ?
- « Mais… Au fil des années, j’ai fini par regretter mon choix de vie. Ce siècle perdu était-il plus important que la chair de ma chair ? Bien sûr que non. Alors, j’ai réussi à me faire oublier de mes poursuivants en faisait profil bas et en devenant commerçante. Je n’avais plus qu’une idée en tête : Retrouver cet enfant que j’ai abandonné. Et puis, il y a deux ans, j’ai eu des nouvelles de lui. Ne me demande pas comment, mais toujours est-il que j’avais réussi à le retrouver et à le suivre de loin. Il s’appelle Uriko, il doit avoir 15 ans maintenant et il est devenu chasseur de primes. Dernièrement, son équipage s’est aventuré sur Grand Line et mon intuition de mère m’a conduite sur cette ile où je l’attends depuis un bon moment maintenant. Attends, j’ai une photo supplémentaire de lui. Elle date de deux ans, mais il ne devrait pas avoir trop changé… »
Fiona se dépêcha d’aller prendre une photo et de venir avec. Et lorsque je vis le fameux Uriko, j’eus un sentiment étrange. Une drôle de sensation…
- « Je veux me racheter du passé Salem. C’est la seule raison qui me motive à présent. »
- « C’est tout de même bizarre. Tu n’aurais pas pu le laisser à son père ? Peut-être que ça aurait résolu bien de problèmes, non ? »
La brune se figea à mes dires. Sa mine en était toute déconfite. Comme si une évidence l’avait frappé.
- « N.. Non… Enfin, je veux dire que… »
- « Tu ne connais pas son père ? »
- « B… Bien sûr que si ! »
- « Mais… ? »
- « C… C’est juste qu’il n’y a eu qu’un seul homme dans ma vie… » Dit-elle en fuyant mon regard. « Et cet homme-là… C’est toi Salem… »
La soirée prenait maintenant une toute autre tournure. Une tournure plutôt bouleversante...
- « Tu te fous de moi là… Dis-moi que tu rigoles… »
Fiona n’eut pas de mots. Cette fois-là, on était loin de la femme taquine qui s’évertuait à faire des blagues pour oublier sa propre détresse. Car maintenant que j’y pensais, c’était comme ça que je voyais les choses et pas autrement. La jeune femme finit par se recroqueviller encore une fois, tandis que je quittais le lit où nous étions tous les deux assis. Ce n’était pas possible ! Cela ne pouvait être vrai ! Ce gamin était mon fils ?! Non mais de qui elle se foutait, là ? Cependant, je dus avouer qu’en zyeutant une seconde fois la photo du gosse toujours dans ma main, je ressentis une seconde fois cette étrange sensation d’appartenance. De déjà-vu. Je détaillai encore une fois l’image avant d’écarquiller les yeux devant un fait indéniable : Ce petit avait la même chevelure que moi lorsque j’étais gosse. La même chevelure dont s’était vanté mon père lorsque j’étais moi-même petit. Un détail troublant pour sûr. Je déglutis avant de jeter le pendentif vers Fiona. Nous avions peut-être la même chevelure, mais ce n’était pas pour autant que j’allais accepter d’être son vieux. Je voulais peut-être un enfant, mais pas au point de me ruer sur cette grosse coïncidence, qui en fait, n’était qu’un tissu de mensonges ! Pas moyen ! Aussi avais-je retiré mon peignoir dans un élan de colère, avant d’enfiler mes habits initiaux et mon manteau de haut officier.
- « SALEM ? Où est-ce que tu pars ? Je sais bien que c’est difficile à croi… »
- « LA FERME !! Non seulement je ne veux plus t’entendre, mais je ne veux plus te revoir. Tu viens de me décevoir, une seconde fois... »
- « SALEM ! JE T’EN CONJURE ECOUT… »
VLAN ! La porte s’était refermée derrière moi dans un fracas assourdissant, rompant ainsi la discussion que j’avais avec cette grosse menteuse. Alors que cette dernière s’effondrait sur le lit, totalement en pleurs, je dévalais les escaliers de l’hôtel pour ma part. J’étais tellement furieux, que mon visage retranscrivait clairement mes ressentis. Une telle face déformée par la colère ne manqua point d’effrayer tous les passants qui s’étaient trouvés sur mon chemin. Les pauvres en me voyant débouler comme une furie s’étaient aussitôt écartés de mon chemin. Et c’est ainsi que je quittai l’hôtel dans lequel nous logions en pleine nuit. Plus questions de m’approcher d’une manipulatrice pareille ! Profiter de notre rencontre providentielle pour me vomir une telle information ? Ouais, elle faisait fort quand même ! Putain ! J’avais la rage là. Tellement, qu’arrivé dans une ruelle, j’administrai un sacré coup de poing à un grand arbre, qui ne manqua point de tomber dans un boucan infernal. Ce geste effraya les quelques personnes qui se trouvaient à proximité, avant que celles-ci ne se raidissent sans broncher lorsque je mis à passer mon chemin. Pourquoi ma vie était-elle aussi pourrie ? On m’annonce en coulisses que le GM veut me baiser, mais on vient également m’annoncer que j’ai un gosse de treize piges en vie. Génial ! Vraiment génial !
Maintenant que je m’étais défoulé sur quelque chose, il me fallait oublier. Et quoi de mieux pour oublier ce mauvais épisode que l’alcool ? Très bonne question que voilà. Aussi m’étais-je activement mis à la recherche d’une taverne. N’importe laquelle ferait l’affaire, peu importe qu’elle soit clean ou non. Bientôt, je tombai sur la pépite que je cherchais. Un petit bar à au moins huit rues de l’hôtel que j’avais quitté et tout aussi éloigné du Léviathan. L’endroit parfait pour m’isoler. L’endroit parfait pour m’enivrer à souhait. L’endroit parfait pour m’évader de ce monde trop cruel. Comme quoi, la beauté la force et l’argent ne faisaient pas tout dans une vie. C’est dire que j’étais l’exemple. L’exemple parfait de l’échec. J’exagérais ? Si peu… Une fois sur place donc, je remarquai que l’endroit était limite désert. Un constat auquel je ne m’attendais pas alors que nous étions en pleine nuit. Je partis donc m’installer au comptoir vide, avant de commander un whisky. Une fois assis, la pression s’envola et mon cœur un peu trop chaud se refroidit instantanément. Je m’enfilai un verre. Puis deux. Ainsi de suite jusqu’au dixième. A ce moment précis et sans savoir pourquoi, je me mis à nourrir des regrets, d’un seul coup. Et si ? Et si Fiona ne mentait pas ? Et si ce gosse était le mien ? N’avais-je pas frissonné à la vue de sa photo ? N’avais-je pas remarqué sa chevelure semblable à la mienne ?
Et si j’avais merdé sous l’effet d’une trop forte émotion ?
Ah, que je n’aimais pas ça ! Cette soudaine sensation d’être passé à côté de quelque chose. Comme si au lieu de m’aider à oublier, l’alcool m’avait remis les idées en place. Comme si j’avais compris qu’il me fallait une sérieuse discussion avec elle. La belle situation merdique. Aussi avais-je balancé un billet au barman en le remerciant et en le rassurant sur la monnaie qu’il pouvait garder. Puis je me mis à courir. Courir vers cet hôtel que j’avais quitté sous l’effet d’une colère presque injustifiée. Presque je dis bien. Car une telle coïncidence ne pouvait qu’être difficile à avaler. J’arrivai trois minutes plus tard devant l’hôtel, avant de constater qu’il y avait une foule au rez-de-chaussée. Et lorsque je demandai ce qui s’était passé, le gérant de l’établissement m’avoua, paniqué, que des hommes en noirs avaient enlevé la femme qui se trouvait avec moi. Celle-ci avait voulu me poursuivre, avant de se faire violemment accoster par ces types. A cet instant-là, mon cœur ne fit qu’un bond. Je n’entendis plus le type qui me renseignait puisque je sus automatiquement de qui il s’agissait : Ces sales gouvernementaux ! Ils avaient finalement mis la main sur elle. N’écoutant plus que mon courage et ma volonté d’en savoir plus sur celui qui pouvait être mon potentiel gosse, je demandai la direction qu’ils avaient prise, avant de m’y aventurer au pas de course !
Membre du GM ou pas, ils allaient m’entendre !
Dernière édition par Alheïri S. Fenyang le Mer 11 Mar 2015 - 18:32, édité 1 fois
Une demi-heure plus tard, dans une demeure inachevée et en ruines, à la limite nord de la ville.
- « Retire-lui son bâillon et le bandage sur ses yeux. »
Une fois qu’ils l’eurent posé à terre, l’un des quelques Cipher Pol s’exécuta et retira toutes les entraves sur le visage de Fiona. Celle-ci se mit à tousser puis à crier comme une furie, mais une gifle bien sentie la coupa dans son élan et la dissuada de continuer à hurler. La jeune femme se mit alors à trembler comme une feuille. Des larmes lui piquaient les yeux. Elle se voyait finir en prison, ou pire, assassinée. Les quelques gouvernementaux du groupe se mirent à rire devant sa mine craintive. On aurait dit un animal apeuré, acculé. L’un d’eux saisit sa belle chevelure avec force et tira bêtement dessus, ce qui la fit gémir de douleur. Contrairement à ses collabos, il était plutôt en colère et pas qu’un peu. Il faut dire que si la jeune femme n’avait pas de force, elle savait fuir, au point même de pouvoir semer des membres du CP ; même si ces derniers n’étaient encore qu’en formation. Mais toujours est-il qu’il l’avait mauvaise. Cette journée avait été une belle perte de temps. Et cette pouffiasse n’allait pas en sortir indemne, ce qu’il se promettait intérieurement en la regardant d’un air mauvais, le visage défiguré par la colère.
- « C’est comme on te l’a demandé il y a une semaine ! Si on décrypte ces maudits phonéglyphes, on te laissera tranquille ! Compris ?! »
Le gratte-papier colérique lui lâcha les cheveux, se redressa, épousseta son costume, avant de s’allumer une clope. Le tabac avait l’art de le détendre. Il fallait bien, parce qu’à ce rythme, il finirait par la violenter voire la blesser, ce dont il était pleinement conscient. Alors, il s’éloigna tranquillement du groupe et sortit de la maison inachevée à la limite nord de la ville. Devant lui, que du sable. L’endroit idéal pour séquestrer une personne, faire pression sur elle et l’utiliser. Comme tout bon officiel du Gouvernement. D’ailleurs, à l’idée de percer à jour les secrets de ces blocs énigmatiques, il souriait comme un idiot. Et il se voyait déjà être le Dieu du monde. Après le succès de leur petite magouille, l’homme prévoyait également d’éliminer tous ses collègues sur le coup ainsi que tous les Cipher Pol en herbe, histoire d’être le seul à avoir le monopole des informations qu’ils pourraient découvrir. Pour lui, tout le plan se déroulait comme prévu. Il suffisait seulement de faire preuve d’ingéniosité, de nouer les bons contacts et l’affaire était dans le sac. Sauf qu’au moment où il voulut rentrer, il aperçut une silhouette un peu lointaine.
- « C’est quoi ça… ? »
Au début, il pensait qu’il s’agissait d’une bestiole du désert, vu la taille du machin. Et une bestiole qui bougeait vite, vers sa direction. Faut dire qu’avec l’obscurité qui régnait en maitre et la distance, il ne voyait pas autre chose. Alors, il fit appel à voix haute à l’un des CP qui le rejoint en deux temps trois mouvements. L’officiel lui pointa alors la silhouette massive qui se déplaçait au milieu du désert, vers eux, puis se mit à rire. Pour le CP, c’était une affaire réglé. Il se mit alors à courir en direction de l’inconnu et un combat s’engagea. L’officiel se ralluma une autre clope. Sauf qu’après la troisième bouffée, il vit son homme de main perdre le combat et s’effondrer sur le sable. S’il fut étonné par la défaite de son gars, il le fut encore plus lorsqu’il constata que l’inconnu qui croyait être un animal était en fait un homme. Vu les gestes qu’il avait accompli pour battre son CP, aucun doute possible. Mais vu la taille, cet homme devait faire quatre mètres au moins. Pas de quoi paniquer pour autant. D’une voix forte, il rameuta tous ses subordonnées qui délaissèrent une Fiona ligotée, mal-en-point et en pleurs.
- « Qu’est-ce qui se passe ?! »
- « On a un petit souci. Regardez ce gars, il a vaincu Bill en même pas une minute ! »
Tous les autres combattants furent étonnés, mais n’se dégonflèrent pas. Le paraitre n’était rien dans ce monde. Ce n’était pas un homme de 4 mètres qui ferait peur à des agents comme eux. Aussi se hâtèrent-ils vers lui sous cette pensée commune. Qui plus est, leur supériorité numérique leur donnait de la confiance. Un peu trop d’ailleurs. Puisqu’au bout de quelques minutes seulement, ils furent tous terrassés, à terre. Les officiels se mirent à paniquer. L’un d’eux sortit une arme à feu, la pointa vers leur adversaire et fit feu à plusieurs reprises. Mais rien à faire, l’inconnu évitait les balles et avançait pépère. Pendant ce temps-là, le cerveau de l’opération (le plus colérique) rentra dans la bâtisse inachevée, souleva Fiona qu’il plaça sur l’une de ses épaules façon sac à patates, avant de prendre la poudre d’escampette par la porte opposée qui donnait sur une ruelle de la ville. Mais à peine avait-il fait un seul pas dehors qu’il vit un monstre devant lui. Un monstre et pas autre chose. Des muscles saillants, une longue chevelure sale qui recouvrait tout le visage et un léger grognement qui n’était pas sans lui rappeler ceux des animaux féroces…
- « Que… ? »
Le gouvernemental voulut faire un pas en arrière, mais n’en eut pas la force. La trouille qui le submergeait le clouait sur place, au point même qu’il se fit dessus en claquant des dents et en tremblant comme un malade. Le géant de quatre mètres, quant à lui récupéra le corps qui trônait sur son épaule sans rien dire. Fiona voulut se débattre, mais rien à faire. Son nouveau ravisseur était bien plus effrayant, mais aussi bien plus fort que ceux qui la séquestraient depuis un moment. Au passage, le « monstre » flanqua un coup de poing à son vis-à-vis, de sorte à l’envoyer valser contre deux ou trois murs. Puis il disparut dans la nuit, tranquillement. Fiona, quant à elle, était au bout du bout. Elle voyait se profiler sa mort. Sauf qu’au bon moment, le corps du monstre rétrécit de deux bons mètres, jusqu’à laisser place à un physique plus avenant, plus beau… Le mien. « S-Salem… ? » Suite à son murmure, elle finit par tomber dans les pommes, inconsciente. La fatigue et la peur l’avaient plutôt bien secoué. J’eus un sourire tendre en la regardant, puis, tranquillement, je m’enfonçai dans la ville avec la certitude que les membres du GM ne la poursuivront plus.
Six heures du matin, toujours au même hôtel.
J’avais veillé toute la nuit sur la jeune femme malgré ma fatigue. Mais j’avais surtout passé mon temps à contempler la photo, à contempler son fils… Notre fils… Il avait hérité des yeux de sa mère et de ma chevelure. C’était indéniable. Le frisson que je ressentais à chaque fois que je regardais sa photo ne laissait place à aucun doute. C’était bel et bien mon garçon. Du coup, j’ai pleuré. Pendant près d’une demi-heure et en silence. Je n’avais pas pu me l’expliquer mais mes larmes avaient coulées toutes seules. Puis j’ai appelé le Léviathan, histoire de leur indiquer l’endroit où j’avais laissé les gouvernementaux. J’étais à peu près sûr qu’il s’agissait d’une magouille entre ces gens et qu’ils n’avaient aucun ordre officiel de traque ou de surveillance. Avec tout ce qui se passait ces derniers temps, notamment à Impel Down, les quelques rares archéologues qui existaient étaient le cadet des soucis du gouvernement. Assurément. Du coup, les sanctions tomberaient surement sur ce groupe. De quoi donner un bon moment de répit à Fiona, à la mère de mon… môme. C’était encore quelque chose que j’admettais difficilement… Mais que j’admettais quand même.
- « Salem… ? »
La jeune femme s’était enfin réveillée. Elle bailla, redressa son torse, s’étira longuement, avant de frotter ses yeux comme un enfant pour ensuite m’observer comme elle le pouvait. Même au réveil, elle était super mignonne…
- « Merci de m’avoir sauvé ! » Dit-elle avec un sourire.
J’eus également un sourire, mais je préférai ne pas répondre.
- « Comment tu as su où nous étions d’ailleurs ? »
- « J’ai entendu ta voix de très très loin, grâce à mon haki de l’observation. Il est pas encore fameux, mais ça m’a permis de te retrouver. »
- « Heiiin ? Ça existe vraiment ?! »
- « Eh ouaip ! »
- « Mais c’était quoi cette apparence ? T’étais moche, j’ai eu peur ! »
- « Une capacité qu’on appelle le retour à la vie. J’ai préféré qu’il ne me reconnai…. »
- « Mais c’était moche quand même ! » Reprit-elle, presque joyeusement d’ailleurs.
Mon sourire s’effaça au profit d’une mine grincheuse et d’un grognement. Fiona pouffa alors de rire. Mais lorsque ses yeux se braquèrent sur la photo du gamin entre mes mains, celle-ci redevint silencieuse. Voire même triste. Mais cela ne l’empêcha pas de reprendre la parole pour en parler. Parce qu’elle ne pouvait pas faire autrement.
- « Je sais que c’était soudain et qu’il y a de quoi être en colère, mais je te jure Salem que j… »
- « C’est bon, je te crois. » Coupais-je aussitôt en la regardant avec le sourire. « Il y a des signes qui ne trompent pas. Et puis, il nous ressemble bien. Je suis sûr que son grand-père sera content d’apprendre la nouvelle. »
- « Sa… »
Fiona resta figée pendant un moment, la bouche ouverte, puis elle sauta dans mes bras avant de commencer à chialer dans mes bras. Il n’y avait plus grand-chose à ajouter. Par contre, j’ai dû passer une bonne heure à la consoler, avant de prendre un nouveau bain « forcé » avec elle, jusqu’à ce que l’heure du départ arrive. Le sien à vrai dire. Maintenant qu’elle était débarrassée de ses poursuivants, la jeune femme voulait regagner la capitaine du royaume et reprendre sa couverture de commerçante. Je lui avais même proposé de l’argent, mais elle avait catégoriquement refusé, prétextant que j’avais bien assez fait comme ça. Nous trouvâmes donc une caravane de civils en partance pour Alubarna qu’elle intégra sans aucun problème. Il faut dire que les habitants de cette île-continent étaient plutôt serviables et affables. Mais bien avant qu’ils ne partent, la jeune femme me tendit la photo récente qu’elle avait de notre enfant. « Cadeau. Moi je n’en ai pas vraiment besoin. J’ai déjà le pendentif. » J’hésitai quelques secondes avant de prendre la photo et de la remercier via un sourire. Fiona, elle, se haussa sur la pointe de ses pieds et m’embrassa la joue :
- « J’espère qu’on se reverra et que tu le rencontreras ! »
Puis à l’annonce du départ, elle se hissa sur un chameau et me fit un signe fluet de la main en guise d’au revoir. La caravane finit par quitter la ville. Je la suivis des yeux jusqu’à perte de vue, avant de me retourner vers le port, là où le Léviathan était ancré. Maintenant que je savais que j’avais un enfant dans la nature, la donne changeait carrément. Fiona venait de donner un nouveau souffle dans la vie. Et la recherche de ce gosse était devenue l’une de mes priorités. Je ne comptais pas non plus abandonner le Léviathan et ma carrière dans la marine, mais j’avais quelqu’un qui me motivait à ne pas baisser les bras, à ne pas moisir dans l’abandon. J’étais certain que je le retrouverais un jour. En plus de sa photo, j’avais un nom, un âge et même sa profession. Je pourrais même profiter de mon grade pour lancer un avis de recherche, mais je n’avais pas envie qu’on l’assimile à un pirate ou qu’on sache qu’il était mon fils, ce qui lui attirerait très certainement des ennuis. Des pirates revanchards ou même des révolutionnaires hargneux pourraient en profiter. Le tout était maintenant de faire preuve de patience. Et de profiter de la moindre occasion pour faire mes recherches.