Ils revinrent dans la salle où la jeune femme avait réussi à s'échapper. La statue qui lui avait servi d'arme pour sa libération éphémère traînait toujours sur le sol. L'homme déposa délicatement son bagage humain sur le lit à moitié défait dans une pièce juxtaposée. Sans perdre de temps, il se positionna ensuite au-dessus de la jeune borgne puis tenta de lui enlever sa jupe sans le moindre mot. La jeune femme posa ses deux mains sur le torse de l'homme pour l'empêcher de continuer.
- Attends ! Je t'ai menti tout à l'heure. Puis elle détourna le visage sur le côté tout en affichant un air intimidé. Au fait c'est ma première fois alors s'il te plaît … laisse-moi me déshabiller toute seule … Peut-être que cela me rassurerait ! Ça me gêne que tu le fasses à ma place !
L'homme le fixa un moment avant de reculer pour s’asseoir sur le bord de lit. La jeune femme se releva puis commença à défaire la ceinture de sa jupe mais elle arrête brusquement son geste.
- Tourne-toi s'il te plaît ! Cela me gêne que tu me regardes !
Sous le regard insistant de la jeune femme, l'homme obéi à contre cœur, refrénant son envie de lui montrer son autorité en repensant au souhait de la jeune femme d'être bien traitée. Au lieu de continuer à défaire sa jupe, la jeune borgne enleva d'abord la corde qui y était accrochée. Il était impensable que l'homme ne l'avait pas remarqué mais sans doute avait-il jugé que ce n'était pas une arme dangereuse alors pas un seul moment il n'avait cherché à lui en débarrasser. D'une dextérité qui démontrait que ce n'était pas la première fois qu'elle le faisait, la jeune femme réalisa en un temps-record un nœud coulant avant de se débarrasser de sa jupe. Elle coinça ensuite rapidement une partie de la boucle de la corde derrière son sous-vêtement tout en prenant soin que le reste se positionne bien derrière elle pour être à l'abri du regard du Loup blanc solitaire. Puis elle s'avança tout doucement vers l'homme toujours assis au bord du lit pour lui ceinturer d'abord par-derrière au niveau de la taille avec ses jambes maintenant nues avant de lui entourer délicatement le cou de ses bras tout en plaquant son opulente poitrine contre le dos viril. De ses lèvres, elle lui embrassa ensuite délicatement dans le cou. L'homme commença à lui caresser délicatement les cuisses.
- Attends ! J'ai oublié d'enlever mon haut !
La jeune femme défit ses bras mais garda ses jambes autour de la taille de l'homme. Puis, au lieu d'enlever son haut comme annoncé, elle attrapa la corde qu'elle avait coincée dans son sous-vêtement puis sans la moindre hésitation elle passa la tête de l'homme dans la boucle qu'elle avait pris soin de laisser assez grand pour ne pas gêner le passage avant de tirer sur la corde avec ses deux mains alors que ses jambes se serrèrent de toutes ses forces autour de la taille du captif. L'action fut tellement rapide que l'homme n'avait rien vu venir. Celui-ci abandonna les douces jambes qu'il était en train de caresser pour tenter de retenir de ses deux mains la corde qui tentait de l'étrangler. Désespéré, il tenta d'écraser la jeune femme en se laissant tomber sur elle sur le lit mais celle-ci ne lâcha pas prise. Il se releva alors pour aller buter un mur par-derrière mais la jeune femme résista au coup qui n'était pas assez violent pour la faire tomber car l'homme n'avait pas réussi à y mettre toutes ses forces à cause de sa détresse. Il retenta sa chance contre un meuble qui ornait la chambre mais l'impact eut pour seul effet de faire vaciller et tomber quelques affaires sur celui-ci. Parmi les objets qui ornaient l'immobilier se trouvait trois katanas assortis de différentes tailles superposés sur un support prévu à cet effet. Profitant que les armes étaient à porter de ses mains, la jeune borgne tendit alors une, tout en gardant l'autre tirer sur la corde, pour attraper le plus petit sabre. Puis de l'extrémité du fourreau il frappa violemment l'homme au niveau de la tempe. Cette fois-ci, il ne tituba pas mais s'écroula après le choc. La jeune femme se demanda si c'était la corde qui avait eu raison de lui ou bien le coup dans lequel elle avait réussi à mettre toutes ses forces maintenant que la peur avait laissé place à une volonté de vivre au fond de son être. Avec prudence, elle donna un coup de pied dans les jambes de l'homme pour vérifier qu'il était bien inconscient avant de se baisser pour sentir ses pouls au niveau du cou pour s'assurer qu'il était toujours vivant. Elle se surprit à soupirer de soulagement sentant le cœur de l'homme battre toujours à un rythme régulier. Malgré son action de détresse qui aurait pu le tuer, son souhait n'était pas de le voir mourir et ce malgré les misères qu'il lui avait faites endurées. Sans perdre plus de temps et toujours avec précaution, elle retira la corde du cou de la victime et s'attela ensuite à l'attacher avec la même cordelière.
Plus d’une heure s’était écoulée lorsque le Loup blanc solitaire revint enfin à lui pour constater qu’il était pieds et poings liés. Les bras attachés dans le dos, il était adossé contre le meuble avec lequel il avait tenté en vain de se débarrasser de son agresseur. Confortablement assise en tailleur sur le lit, son sabre étrange à porter de sa main droite sur le lit et une assiette de fruits, choses dont elle raffolait, sur ses jambes, la chasseuse de primes fixait le captif d’un regard indifférent tout en mangeant des raisins. Elle avait eu le temps de trouver la sortie, qu’elle avait réussie à débusquer sans mal avec l’esprit tranquille, de chercher son arme, dont la taille lui avait facilité la tâche, et de constater qu’il n’y avait que trois pièces meublées dans l’immense demeure où ils étaient. Le propriétaire semblait avoir vidé toutes les salles ne gardant qu’un séjour, une cuisine qui servait également de la salle à manger, et une seule chambre à coucher, preuve qu’il ne recevait jamais d’invité. Toutes les pièces étaient côte à côte, centrées au milieu du bâtiment.
- Désolée mais je me suis servie dans ta cuisine … Je me demande où est-ce que tu as bien pu trouver des fruits aussi bons dans cette ville pourrie … En tout cas, tu sembles aimer les fruits, chose que nous avons en commun de plus. Tu … - Bon ! On y va !
La jeune femme dont les paroles avaient été coupées nettes interrogea l'homme du regard.
- Au poste de la Marine ! C’est pour ça que je me trouve dans cette situation non ? - D’habitude je dois menacer mes captifs pour qu’ils daignent se déplacer au poste sagement alors que toi, tu te proposes à y être amené !? - Je ne suis pas un mauvais perdant ! Tu as gagné alors finissons-en avec ce tête-à-tête ridicule !
Puis il baissa la tête avant d’afficher un sourire indéfinissable mais qui était loin d’être sadique comme ceux dont la jeune femme avait eu droit durant ses tortures. Chose qui la laissa dans la perplexité totale. Décidément, le Loup blanc solitaire était vraiment un homme étrange qui avait le don de la surprendre.
- Comment ai-je pu être aussi bête pour se laisser avoir par ton jeu de séduction !? … Tu es vraiment une bonne actrice et une femme sans cœur ! Tu as su profiter de la faiblesse que j’ai pour toi pour me faire tomber. Il releva ensuite la tête pour fixer la jeune borgne. Je te croyais vraiment sincère. - Essaierais-tu de me faire culpabiliser ? … Tes sentiments pour moi ne sont qu’illusoires. Tu m’oublieras dès demain alors que je me souviendrais toute ma vie des misères que tu m’as fait subir. - Ça j’en doute fort ! Je m’évaderai rien que pour te retrouver et cette fois-ci je ferai en sorte que tu m’appartiennes définitivement ! … N’éprouves-tu donc vraiment aucun sentiment pour moi ? - Si, celui de dégoût.
Ne souhaitant pas poursuivre la conversation qui commençait à la déranger, la chasseuse de primes se leva pour faire face à son captif après avoir rangé son arme dans son dos. C’était la première fois de sa vie qu’elle cherchait à se défiler mais elle ne tenait pas à discuter plus longtemps avec cet homme qui ne cessait de dire des absurdités.
- Tu as raison, mettons fin à ce tête à tête ridicule !
Avant de quitter la pièce la jeune femme attrapa le sabre tanto avec lequel il avait assommé l’homme. Elle coinça l'arme dans la ceinture de sa jupe. Durant le trajet, le silence s’était installé entre les deux protagonistes. L’homme marchait devant la jeune borgne qui fermait ses pas à une distance d'un mètre. Elle tenait fermement dans sa main gauche le bout de la corde qui liait les bras de son prisonnier alors que sa main droite s’apprêtait à dégainer son arme à la moindre alerte. Elle fixait le dos qui était devant elle qui malgré la situation, l'assurance qui en émanait lui suscitait une anxiété incompréhensible. Alors qu'il allait perdre sa liberté et peut-être se faire martyriser gratuitement, l'homme ne semblait point être écroulé par sa condition. Il gardait la tête et les épaules bien droites et avançait des pas rassurés malgré les liens qui ne lui permettaient que de faire des petits pas. Intérieurement, la chasseuse de primes pria pour que son détenu ne cherche pas à s’échapper car cela la mettrait vraiment en difficulté bien qu'il était attaché. La jeune femme n'était point inclinée à affronter l'homme de nouveau. Au fond, elle avait réellement peur du Loup blanc solitaire et ce non pas à cause de ce qu’il lui avait fait subir mais parce qu’elle savait qu’il était un combattant qu’elle ne pouvait rivaliser. À leur passage, les riverains et piétons cessaient leurs activités pour les regarder.
- Ils sont surement entrain de te prendre pour une héroïne mais fais attention à toi ma belle, beaucoup te considèrent aussi en ce moment comme une ennemie à abattre !
Elle comprenait que très bien le sens des paroles de son prisonnier. Se monter en scène de la sorte la rendait populaire aussi bien auprès des civils innocents que les criminels qui étaient ses cibles. C’était comme si silencieusement elle déclarerait une guerre à ses ennemis hors là elle était une chose qu’elle ne souhaitait guère. Surtout pas dans cette ville pourrie où ses ennemis naturels abondaient. Si seulement elle pouvait rester dans l’anonymat éternellement cela lui arrangerait bien mais c'était une mission impossible si elle poursuivait cette voix qu'elle avait tracée.
La jeune femme appréhendait la traversée des quartiers sensibles mais par chance ils tombèrent sur une troupe de la Marine en vadrouille à peine avait-il quitté l’arrondissement où vivait le Loup blanc solitaire. Comprenant sa situation, mais aussi parce qu’elle était mignonne, quatre hommes les accompagnèrent jusqu’ au poste où elle troqua le prisonnier contre la prime.
- On se reverra ma beauté ! C’est une promesse !
Sa corde qu’elle avait sollicitée auprès des agents dans une main, la jeune femme fixa le dos de l’homme aux cheveux blancs qui s’éloignait. Elle ne regrettait pas de l’avoir arrêté car elle savait oh combien il était dangereux mais étrangement elle n’était pas satisfaite de la situation. Elle ne comprenait vraiment pas pourquoi l’homme s’était laissé faire. Il n’avait émis aucune résistance alors qu’elle était certaine qu’il aurait pu s’échapper de ses mains s'il l'avait désiré. C’était comme s'il s’était livré à la Marine. Peut-être avait-il toujours souhaité qu’on l’arrête ?
- Alors comme ça tu m’as menti jeune fille !
La jeune borgne pivote pour faire face à l’agent qui lui avait fourni les informations sur le Loup blanc solitaire la veille.
- Désolée mais je n’ai pas pu m’empêcher ! - Tu t'en es sortie … presque indemne. Cela m’amène à conclure que tu es une chasseuse de primes sur qui on peut compter.
L’homme avait remarqué sa blessure insignifiante au niveau de son flanc gauche mais il ignorait qu’elle aurait pu mourir au moment même avoir reçu cette entaille, soit à peine quelques minutes de combat contre le Loup blanc solitaire. Si ce dernier n’avait pas commis l’erreur de se laisser dominer par ses sentiments, jamais la jeune borgne n’aurait réussi à le capturer. Elle serait plutôt en train de se reposer dans l’autre monde en ce moment si l’homme n’avait pas eu un faible pour sa personne.
- Vous vous trompez. Je ne suis qu’une faible femme qui a eu de la chance ! |