Je n’ai pas quitté mon sabre des yeux.
James est mort.
Si seulement on avait su.
Je suis trempée d’eau, de sel et de sang. Celui des autres et le mien. A empoigner nerveusement mon arme, à espérer avec hargne que je pourrai encore casser des dents et des têtes avec, alors que le Sörloup a jugé bon de m’en coller une dans la gueule. J'ai morflé. Ça pique un peu, au niveau de l’épaule et de la joue. Mais ce n’est rien à côté de ce qui se passe. On a emmené Uriko dans l'auberge où nous avions dormi en urgence. Une balle en plein dans le mille. Les pirates ont voulu jouer au tir à pigeon. Alors, on leur a collé une raclée pour se défouler et pour faire notre travail. Pas grand-chose d’autre à faire, que leur faire bouffer le plancher et leurs dents en pleine mer, à défaut de terre et de poussière.
On se creuse un passage pour rejoindre la péninsule.
Je ne savais plus ce que ça faisait de voir quelqu’un mourir. Un ami, mourir. Pas comme les pirates sur le Cap des Jumeaux. Il a été peut-être sacrément con. Même sacrément salaud envers moi, mais il m’a quand même sauvée il y a un an de ça.
Si seulement on avait su.
James, il avait pas une tête à se la faire péter. Et à en juger par les gueules abattues de ses amis, personne ne comprendra certainement jamais pourquoi il a fait ça.
"On" ce sont les ex-membres de la Team Rocket. On avance, le coeur battant, parce qu'on sait qu'on va battre l'air d'une dernière bataille, une dernière rancœur à soulager qui va faire trembler à nouveau l'île entière.
Entre un gars avec un masque bizarre nommé Akira et un drôle de type à l’air cadavérique qui m’évite depuis qu’il m’a croisée, l’ambiance est sacrément bien plombée. L’samouraï Zegaï est toujours saoul, j’crois même qu’il est comme ça tout le temps. Y’m’met plutôt mal à l’aise à boire régulièrement. Souvenirs de décrépitude et de mort du moi que j’préfère enterrer qui remontent. A côté de ça, t’as le Sören. Je n’avais rien compris aux explications de James et d’Uriko sur lui, et à la première rencontre, il m’a répulsée et fascinée en même temps. Maintenant, il semble tout aussi vide que chacun des membres de l’ancienne Team Rocket. Comme si on leur avait arraché un morceau tout au fond, là, au cœur ou à l’âme. Par contre, ses problèmes de pilosité ne se sont pas arrangés. Ça pousse et ça s’efface, et l’animalité passe encore sur son visage.
Uriko va mieux.
Vague de soulagement, mais silence de mort ou de deuil qui a suivit ça. Dans tous les cas, visualise un cercueil fantomatique qui nous tombe sur le nez sans prévenir. Ça pèse et ça rend les bras ballants. James est mort et on s’y attendait pas vraiment.
Le sol dévasté me passe sous les yeux, avant que le soleil qui commence à descendre en ce milieu d'après-midi m'éblouisse. Alors, j'ai relevé la tête et j'ai contemplé.
On est arrivés. J'm'arrête sans rien dire pour observer l'groupe un peu particulier qui nous fait face au loin.
-Ce sont eux, tes amis ?
J’ai lancé ça machinalement, alors que la réponse se trouve déjà ma question. Dans l’espoir de briser un silence un peu trop lourd, peut-être. Ou alors que la fumée noire et grise qui s’élève par volutes à quelques endroits au loin m’est montée à la tête.
Je sais qu'on va retourner cogner des salopards aujourd'hui. J’irai, je me battrai. Machinalement, toujours. J’ai perdu de ma consistance, de mon âme. J’essaie de garder ma constance avec peine, alors que tout s’émiette peu à peu.
J’ai l’inquiétude qui me ronge.
En vérité, je n’ai pas quitté mon sabre des yeux pour la seule bonne raison qu’il commence à se fissurer. Mais ça, ça ne dit pas. On garde un sourire ou une certaine prestance, et on dit, allez, on y va.
Malgré le fait que je sens que tout va recommencer, comme lorsque je me suis retrouvée face au Lourd Barrel, je ne tremble plus en moi-même. Peut-être parce que j'ai enfin trouvé quelque chose ou quelqu'un à me raccrocher. D'abord, James, par seule envie de partir de cette ruine d'île. Maintenant, Sören et Uriko, et tous les autres, simplement parce qu'ils m'apportent enfin ce que j'attendais du monde : une place et un rôle.
Voir un con, un con mais un ami mourir, pour enfin avoir envie d'aider les autres et ne pas penser à sa petite gueule.
J'ai jeté un regard au loup. Il me suffit d'un signe et je me ferai encore plus violente qu'il n'a pu l'être.
James est mort.
Si seulement on avait su.
Je suis trempée d’eau, de sel et de sang. Celui des autres et le mien. A empoigner nerveusement mon arme, à espérer avec hargne que je pourrai encore casser des dents et des têtes avec, alors que le Sörloup a jugé bon de m’en coller une dans la gueule. J'ai morflé. Ça pique un peu, au niveau de l’épaule et de la joue. Mais ce n’est rien à côté de ce qui se passe. On a emmené Uriko dans l'auberge où nous avions dormi en urgence. Une balle en plein dans le mille. Les pirates ont voulu jouer au tir à pigeon. Alors, on leur a collé une raclée pour se défouler et pour faire notre travail. Pas grand-chose d’autre à faire, que leur faire bouffer le plancher et leurs dents en pleine mer, à défaut de terre et de poussière.
On se creuse un passage pour rejoindre la péninsule.
Je ne savais plus ce que ça faisait de voir quelqu’un mourir. Un ami, mourir. Pas comme les pirates sur le Cap des Jumeaux. Il a été peut-être sacrément con. Même sacrément salaud envers moi, mais il m’a quand même sauvée il y a un an de ça.
Si seulement on avait su.
James, il avait pas une tête à se la faire péter. Et à en juger par les gueules abattues de ses amis, personne ne comprendra certainement jamais pourquoi il a fait ça.
"On" ce sont les ex-membres de la Team Rocket. On avance, le coeur battant, parce qu'on sait qu'on va battre l'air d'une dernière bataille, une dernière rancœur à soulager qui va faire trembler à nouveau l'île entière.
Entre un gars avec un masque bizarre nommé Akira et un drôle de type à l’air cadavérique qui m’évite depuis qu’il m’a croisée, l’ambiance est sacrément bien plombée. L’samouraï Zegaï est toujours saoul, j’crois même qu’il est comme ça tout le temps. Y’m’met plutôt mal à l’aise à boire régulièrement. Souvenirs de décrépitude et de mort du moi que j’préfère enterrer qui remontent. A côté de ça, t’as le Sören. Je n’avais rien compris aux explications de James et d’Uriko sur lui, et à la première rencontre, il m’a répulsée et fascinée en même temps. Maintenant, il semble tout aussi vide que chacun des membres de l’ancienne Team Rocket. Comme si on leur avait arraché un morceau tout au fond, là, au cœur ou à l’âme. Par contre, ses problèmes de pilosité ne se sont pas arrangés. Ça pousse et ça s’efface, et l’animalité passe encore sur son visage.
Uriko va mieux.
Vague de soulagement, mais silence de mort ou de deuil qui a suivit ça. Dans tous les cas, visualise un cercueil fantomatique qui nous tombe sur le nez sans prévenir. Ça pèse et ça rend les bras ballants. James est mort et on s’y attendait pas vraiment.
Le sol dévasté me passe sous les yeux, avant que le soleil qui commence à descendre en ce milieu d'après-midi m'éblouisse. Alors, j'ai relevé la tête et j'ai contemplé.
On est arrivés. J'm'arrête sans rien dire pour observer l'groupe un peu particulier qui nous fait face au loin.
-Ce sont eux, tes amis ?
J’ai lancé ça machinalement, alors que la réponse se trouve déjà ma question. Dans l’espoir de briser un silence un peu trop lourd, peut-être. Ou alors que la fumée noire et grise qui s’élève par volutes à quelques endroits au loin m’est montée à la tête.
Je sais qu'on va retourner cogner des salopards aujourd'hui. J’irai, je me battrai. Machinalement, toujours. J’ai perdu de ma consistance, de mon âme. J’essaie de garder ma constance avec peine, alors que tout s’émiette peu à peu.
J’ai l’inquiétude qui me ronge.
En vérité, je n’ai pas quitté mon sabre des yeux pour la seule bonne raison qu’il commence à se fissurer. Mais ça, ça ne dit pas. On garde un sourire ou une certaine prestance, et on dit, allez, on y va.
Malgré le fait que je sens que tout va recommencer, comme lorsque je me suis retrouvée face au Lourd Barrel, je ne tremble plus en moi-même. Peut-être parce que j'ai enfin trouvé quelque chose ou quelqu'un à me raccrocher. D'abord, James, par seule envie de partir de cette ruine d'île. Maintenant, Sören et Uriko, et tous les autres, simplement parce qu'ils m'apportent enfin ce que j'attendais du monde : une place et un rôle.
Voir un con, un con mais un ami mourir, pour enfin avoir envie d'aider les autres et ne pas penser à sa petite gueule.
J'ai jeté un regard au loup. Il me suffit d'un signe et je me ferai encore plus violente qu'il n'a pu l'être.