Alors. Comment tu t'appelles, encore ?
Craig.
Quel nom sauvage ♥
Sauvage ? C'est Craig quoi. Et vous, z'êtes qui ?
Je suis minière.
...
Je traque les filons de bonheur terrés en chacun de nous, sous plusieurs strates de caillasse !
Vous êtes psy ?
Les copines m'ont dit que ton regard de chien battu leur poignardait vraiment leurs petits coeurs sensibles. Et ça aussi, c'est sacrément sauvage ♥
Et... On va ?
On va parler, mon alevin ! Allez, tip top, résume toi en trois mots !
Première fois qu'la question retentit aussi fort en moi. J'suis quoi ? Tout sauf normal, certain. Mais quoi ? J'ai quoi de plus, ou quoi de moins qu'les autres -à part mon emballage pestilentiel que j'me serais bien déchiré à la cisaille si j'avais pas d'plan plus propre sous le coude- ? Qui peut me dire c'qui fait que mon pire ennemi est le miroir sarcastique, et le regard des autres qui s'abat sur moi comme les marteaux d'une tripotée de juges implacables ? J'ai été monté d'travers ? Frangin s'posait beaucoup de questions sur moi. J'le sais, j'le sens. Il tarissait pas d'éloges sur la purée d'asticots faisandée dans mon crâne, là, qui réfléchit vite, bien, sans laisser croupir l'empathie dans son coin, qui poursuivait la justice même si elle court définitivement trop vite. Un potentiel brut qu'on doit tailler comme le diamant pour le faire briller et en sertir le monde, afin d'le rendre un brin plus beau. Il me savait capable du meilleur, et du pire aussi, parce que l'un n'vient jamais sans l'autre, ils sont fournis dans l'même pack. C'sont ces extrêmes qui déforment l'esprit en l'tiraillant : ça aussi, Tark le savait, mais sa confiance en moi lui drapait la tronche d'un voile opaque : il me croyait incapable de faire le mal, même si le mal guide en secret la plupart de nos actions.
Paumé.... Ombre... Bizarre.
Oh. Comme nous tous ! Je diagnostique donc que tu as besoin... de... repères... de lumières... et de fantaisie.
Il grattouille son carnet, frénétiquement, d'son crayon rose acéré comme un pieu. Le coussin sous mes fesses mute en un parpaing, le dossier du fauteuil en planche cloutée. M'sens douloureusement mal à l'aise. J'ai déjà jamais encadré les psys quand ils se réfugiaient sous leurs costards étroits et leurs binocles comme des culs de bouteille : alors un clodo okama... Car ouais, assurément. Me racler l'intérieur du crâne est un job de clodo plus que de psy. Qui d'autre qu'un clodo ira retourner un dépotoir pour tenter d'y dénicher des trésors ? Job de clodo.
Comment tu te sens, là, de suite ?
Euh. Déboussolé ? J'me fais percer la cervelle par un clo-un travelo.
Percer la cervelle, puis il regarde par le p'tit trou. Ça aussi, ça résume bien son job. Enfoncer les portes de la conscience des gens, c'est quand même s'exposer à s'faire botter l'arrière-train par des traumatismes furax. Faut oser. Il pouffe sous sa barbichette de deux jours, un tapis d'poils sur une peau lisse comme le derrière d'un nouveau-né aplati sous une compresse, son sourire déchire sa sale trogne blême jusqu'aux oreilles.
Il te suffit que d'ça pour te perdre ? Hihihi ♥
J'me sens comme un grand brûlé. La chair à vif, consumée de souvenirs des flammes. Sombre, noir, et émietté, si carbonisé dans des brasiers de haine, de frustration et de rancune que j'me sens tas de cendres grossièrement agglutinées en une créature d'écailles qui se désagrège un peu plus à chaque courant d'air.
Ou bien, j'me sens bonhomme de neige à l'approche du printemps. Glacial et résigné. A laisser un soleil qu'il ne supporte plus peu à peu le dévorer, j'me mire fondre, impuissant.
J'me sens plus moi-même en tout cas. J'ai laissé dégouliner toute ma substance en une longue traînée visqueuse derrière moi. J'étais un marécage ambulant bien avant d'avoir gobé c'fruit, j'me traînais jour après jour au combat en absorbant toute la détresse ambiante. Qu'est-ce que ferait un psy pour moi, à part m'essorer le coeur comme une éponge pour se gaver des idées noires dont il s'est imbibé jusqu'aux ventricules ? On trimbale tous nos fardeaux, j'ai fais trop souvent l'erreur de penser que j'pouvais aider les autres à transporter l'heure. Si bien qu'mes épaules brisés ne savent plus supporter l'poids d'ma culpabilité qui enfle, de jour en jour, qui m'fait avancer voûté.
Le cocktail du stress mêlé à l'air brûlant et saturé d'rosée parfumée me monte à la tronche, en une ivresse nauséeuse. Des vapeurs oppressantes qui m'arrachent des seaux de sueur, qui transforment ma tignasse en une ignoble cascade peluchée. Ma méfiance crie Gare, il essaye p'tete de m'barbifier avec du gaz toxique. Ces enflures l'ont fait une fois, ont brisé la confiance de tout l'monde. Comme un môme avec un marteau au milieu d'un magasin de porcelaine, ils ont été sans pitié envers la fragilité.
Ils sont sympas, tes copains, hein ?
Ouais.
Tu les connais depuis longtemps ?
Depuis Jaya pour la plupart.
Jaya a été un jardin bizarre maculé d'chair ronflante. Sur lequel sont malgré tout parvenus à pousser quelques amitiés, et quelques retrouvailles. C'sont les drôles de rencontres qu'on fait au détour des sordides couloirs du destin, quand on arrive à passer outre la claustrophobie bouffante que procure la sensation d'avancer dans des tunnels étroits que le hasard a creusé à notre égard.
Tu as chaud ? ♥
Euh...
Oh, pardon ! Tu as chaud ?
Ouf, c'est moins louche là, ouais. Oui j'ai chaud.
Je vais t'ouvrir une fenêtre !
Ille s'active, sautille auprès d'la lucarne en forme de coeur puis l'ouvre en grand sans manquer d'écarter ses bras à s'en déboîter les épaules, juste par amour débauché d'la mise en scène. Libérant une lumière tamisée toute droit crachée par un soleil somnolent, escortée d'une farandole de souffles frais, qui s'déversent autour de nous et effraye ce salaud d'arôme ardent. Le mercure s'affaisse donc et le brasier parfumé semble vaincu, bien qu'sous mon crâne, ma cervelle reste une grosse bulle de magma flamboyante prête à éclater.
Ça va mieux ?
Un peu.
Juste un peu, alors. ♥ Un bon marine a tellement de raisons de se sentir mal ! Quelles sont les tiennes, Craig ?
J'ai pas vraiment envie d'les ruminer devant vous.
Les blessures sont toujours là, elles me fascinent tant qu'elles magnétisent mon regard H24. Elles cicatrisent pas, saignent toujours par giclées. Et tenter d'les résorber en les oubliant reviendrait à tenter d'boucher une fracture ouverte avec du coton. C'doux le coton, ça absorbe bien le sang chaud, mais ça résout rien, devient vite niche à infections, qui rappliquent en jappant comme des molosses affamés devant un agneau. Oups ! Déformation professionnelle.
J'vois déjà pas trop pourquoi j'me confierais.
Parce que je vais aller te chercher une gâterie ? Tu aimes les sardines, j'imagine ? ♥
Non. J'vois pas c'qui vous fait penser ç...
Laisse moi deviner... Que pourrait bien aimer un requin...
Salade de fruits.
Oh... J'aurais pas trouvé ! Je vais te chercher ça.
...
... et je ferme la porte ! ♥
Huhu.
Oh. Seul. En tête à tête avec ma tête. Tu t'accroches à mon esprit, Tark, je pense à toi.
Tu te posais des questions. Sur mes silences. Mes regards. Mes crises de honte et de panique. T'as jamais vraiment su ce qui se terrait en moi, embusqué dans l'ombre de mon âme. Et ces temps-ci, cette chose campe sous les projecteurs, sans encore que je n'parvienne à en discerner les contours, car elle est trop immense, trop floue, trop effrayante. Elle se penche sur ma haine, la caresse, la laisse ronronner. Oui, oui, cette haine, ma Bête, le tigre dans le chaton, le requin dans le têtard, elle gronde en moi. Elle gronde d'envie.
Les papillons sociaux, j'aimerais les dégommer au canon. Leur aise. Leur facilité à tisser des liens. La valeur banale qu'ils donnent à l'amitié, le prix ridicule de leur confiance, qu'on s'accapare par de simples sourires, par une pauvre apparence, peu importe qu'elle soit un mirage. M'agace. C'est pas leur faute, j'ai été codé comme ça. Jaloux, triste, insatisfait. J'me fais parfois des amis mais j'sais pas les garder. J'sais tisser des liens mais ils claquent dès qu'on les tend trop. Alors les joyeux fifous dont l'réseau d'francs compagnons s'étend à chacune des îles sur lesquelles ils ont posés leurs p'tits petons conquérants, ils me cognent sur mes nerfs comme sur des touches de piano, leur mélodie d'insouciance et d'amitié me nargue, et me force à dialoguer avec mon insupportable solitude. Et pourtant, aujourd'hui. J'me sens pousser deux ailes de papillon.
Je pourrais devenir quelqu'un d'autre. Meilleur. Mieux taillé pour remporter la course aux ambitions : l'épave morose renflouée deviendra fier cuirassé; et ses canons tonneront à travers le monde, dont la corne de brume se propage comme une promesse de justice à travers les époques.
Ille est parti, l'okama, et il pourrait revenir à tout moment. M'larguant seul, en tête à tête mon désir violent d'attraper un nuage. Rapidement il me tente. Rapidement.
J'entends la nuit roulante pointer à la fenêtre, toujours béante. Elle m'appelle. Elle me murmure des promesses de protection. Dans l'noir, les silhouettes se cousent entre elles. Les ombres s'embrassent et se marient. J'deviendrais qu'une tâche de gris obscur sur un monochrome sombre. Qui pourrait bien pouvoir faire...
ce qu'il veut...
y compris...
prendre le large.
A jamais.
Tout plaquer.
Oublier.
Recommencer.
Tomber, puis rebondir.
Rebondir plus haut que jamais.
Sauter.
Mes palmes sur le cadran d'la fenêtre, mon regard coulissant jusqu'en contrebas. Une chute d'une cinquantaine de mètres, sous la bénédiction d'ma foi. Et de mon logia...
...
Ma première guibolle enjambe le rebord.
Puis ma seconde, fièrement, suit son aînée.
Le vertige séquestré, baillonné, n'enraye pas ma volonté.
Je lâche tout, la gravitation fera l'reste.
Comme une grosse boule de boue qui s'arrache aux griffes du vent.
Comparé aux si légères tentacules de lumière agonisantes du soleil, j'me sens enclume. Sur laquelle rien de bon n'a été forgé jusque là.
Aucune foutue idée d'où aller, pour l'instant, j'me contente de filer en bas en ascenseur express. Les vitres défilent devant moi et j'crois prendre de la vitesse, pour devenir un météore d'écailles visqueuses et de pathos embrasé. J'vais éclabousser l'jardin dans lequel j'vais m'éclater, le souffle commence à m'arracher quelques particules de gadoue en une brume brûnasse.
Cet enculé d'fruit a intérêt à faire son boulot.
Craig.
Quel nom sauvage ♥
Sauvage ? C'est Craig quoi. Et vous, z'êtes qui ?
Je suis minière.
...
Je traque les filons de bonheur terrés en chacun de nous, sous plusieurs strates de caillasse !
Vous êtes psy ?
Les copines m'ont dit que ton regard de chien battu leur poignardait vraiment leurs petits coeurs sensibles. Et ça aussi, c'est sacrément sauvage ♥
Et... On va ?
On va parler, mon alevin ! Allez, tip top, résume toi en trois mots !
Première fois qu'la question retentit aussi fort en moi. J'suis quoi ? Tout sauf normal, certain. Mais quoi ? J'ai quoi de plus, ou quoi de moins qu'les autres -à part mon emballage pestilentiel que j'me serais bien déchiré à la cisaille si j'avais pas d'plan plus propre sous le coude- ? Qui peut me dire c'qui fait que mon pire ennemi est le miroir sarcastique, et le regard des autres qui s'abat sur moi comme les marteaux d'une tripotée de juges implacables ? J'ai été monté d'travers ? Frangin s'posait beaucoup de questions sur moi. J'le sais, j'le sens. Il tarissait pas d'éloges sur la purée d'asticots faisandée dans mon crâne, là, qui réfléchit vite, bien, sans laisser croupir l'empathie dans son coin, qui poursuivait la justice même si elle court définitivement trop vite. Un potentiel brut qu'on doit tailler comme le diamant pour le faire briller et en sertir le monde, afin d'le rendre un brin plus beau. Il me savait capable du meilleur, et du pire aussi, parce que l'un n'vient jamais sans l'autre, ils sont fournis dans l'même pack. C'sont ces extrêmes qui déforment l'esprit en l'tiraillant : ça aussi, Tark le savait, mais sa confiance en moi lui drapait la tronche d'un voile opaque : il me croyait incapable de faire le mal, même si le mal guide en secret la plupart de nos actions.
Paumé.... Ombre... Bizarre.
Oh. Comme nous tous ! Je diagnostique donc que tu as besoin... de... repères... de lumières... et de fantaisie.
Il grattouille son carnet, frénétiquement, d'son crayon rose acéré comme un pieu. Le coussin sous mes fesses mute en un parpaing, le dossier du fauteuil en planche cloutée. M'sens douloureusement mal à l'aise. J'ai déjà jamais encadré les psys quand ils se réfugiaient sous leurs costards étroits et leurs binocles comme des culs de bouteille : alors un clodo okama... Car ouais, assurément. Me racler l'intérieur du crâne est un job de clodo plus que de psy. Qui d'autre qu'un clodo ira retourner un dépotoir pour tenter d'y dénicher des trésors ? Job de clodo.
Comment tu te sens, là, de suite ?
Euh. Déboussolé ? J'me fais percer la cervelle par un clo-un travelo.
Percer la cervelle, puis il regarde par le p'tit trou. Ça aussi, ça résume bien son job. Enfoncer les portes de la conscience des gens, c'est quand même s'exposer à s'faire botter l'arrière-train par des traumatismes furax. Faut oser. Il pouffe sous sa barbichette de deux jours, un tapis d'poils sur une peau lisse comme le derrière d'un nouveau-né aplati sous une compresse, son sourire déchire sa sale trogne blême jusqu'aux oreilles.
Il te suffit que d'ça pour te perdre ? Hihihi ♥
J'me sens comme un grand brûlé. La chair à vif, consumée de souvenirs des flammes. Sombre, noir, et émietté, si carbonisé dans des brasiers de haine, de frustration et de rancune que j'me sens tas de cendres grossièrement agglutinées en une créature d'écailles qui se désagrège un peu plus à chaque courant d'air.
Ou bien, j'me sens bonhomme de neige à l'approche du printemps. Glacial et résigné. A laisser un soleil qu'il ne supporte plus peu à peu le dévorer, j'me mire fondre, impuissant.
J'me sens plus moi-même en tout cas. J'ai laissé dégouliner toute ma substance en une longue traînée visqueuse derrière moi. J'étais un marécage ambulant bien avant d'avoir gobé c'fruit, j'me traînais jour après jour au combat en absorbant toute la détresse ambiante. Qu'est-ce que ferait un psy pour moi, à part m'essorer le coeur comme une éponge pour se gaver des idées noires dont il s'est imbibé jusqu'aux ventricules ? On trimbale tous nos fardeaux, j'ai fais trop souvent l'erreur de penser que j'pouvais aider les autres à transporter l'heure. Si bien qu'mes épaules brisés ne savent plus supporter l'poids d'ma culpabilité qui enfle, de jour en jour, qui m'fait avancer voûté.
Le cocktail du stress mêlé à l'air brûlant et saturé d'rosée parfumée me monte à la tronche, en une ivresse nauséeuse. Des vapeurs oppressantes qui m'arrachent des seaux de sueur, qui transforment ma tignasse en une ignoble cascade peluchée. Ma méfiance crie Gare, il essaye p'tete de m'barbifier avec du gaz toxique. Ces enflures l'ont fait une fois, ont brisé la confiance de tout l'monde. Comme un môme avec un marteau au milieu d'un magasin de porcelaine, ils ont été sans pitié envers la fragilité.
Ils sont sympas, tes copains, hein ?
Ouais.
Tu les connais depuis longtemps ?
Depuis Jaya pour la plupart.
Jaya a été un jardin bizarre maculé d'chair ronflante. Sur lequel sont malgré tout parvenus à pousser quelques amitiés, et quelques retrouvailles. C'sont les drôles de rencontres qu'on fait au détour des sordides couloirs du destin, quand on arrive à passer outre la claustrophobie bouffante que procure la sensation d'avancer dans des tunnels étroits que le hasard a creusé à notre égard.
Tu as chaud ? ♥
Euh...
Oh, pardon ! Tu as chaud ?
Ouf, c'est moins louche là, ouais. Oui j'ai chaud.
Je vais t'ouvrir une fenêtre !
Ille s'active, sautille auprès d'la lucarne en forme de coeur puis l'ouvre en grand sans manquer d'écarter ses bras à s'en déboîter les épaules, juste par amour débauché d'la mise en scène. Libérant une lumière tamisée toute droit crachée par un soleil somnolent, escortée d'une farandole de souffles frais, qui s'déversent autour de nous et effraye ce salaud d'arôme ardent. Le mercure s'affaisse donc et le brasier parfumé semble vaincu, bien qu'sous mon crâne, ma cervelle reste une grosse bulle de magma flamboyante prête à éclater.
Ça va mieux ?
Un peu.
Juste un peu, alors. ♥ Un bon marine a tellement de raisons de se sentir mal ! Quelles sont les tiennes, Craig ?
J'ai pas vraiment envie d'les ruminer devant vous.
Les blessures sont toujours là, elles me fascinent tant qu'elles magnétisent mon regard H24. Elles cicatrisent pas, saignent toujours par giclées. Et tenter d'les résorber en les oubliant reviendrait à tenter d'boucher une fracture ouverte avec du coton. C'doux le coton, ça absorbe bien le sang chaud, mais ça résout rien, devient vite niche à infections, qui rappliquent en jappant comme des molosses affamés devant un agneau. Oups ! Déformation professionnelle.
J'vois déjà pas trop pourquoi j'me confierais.
Parce que je vais aller te chercher une gâterie ? Tu aimes les sardines, j'imagine ? ♥
Non. J'vois pas c'qui vous fait penser ç...
Laisse moi deviner... Que pourrait bien aimer un requin...
Salade de fruits.
Oh... J'aurais pas trouvé ! Je vais te chercher ça.
...
... et je ferme la porte ! ♥
Huhu.
Oh. Seul. En tête à tête avec ma tête. Tu t'accroches à mon esprit, Tark, je pense à toi.
Tu te posais des questions. Sur mes silences. Mes regards. Mes crises de honte et de panique. T'as jamais vraiment su ce qui se terrait en moi, embusqué dans l'ombre de mon âme. Et ces temps-ci, cette chose campe sous les projecteurs, sans encore que je n'parvienne à en discerner les contours, car elle est trop immense, trop floue, trop effrayante. Elle se penche sur ma haine, la caresse, la laisse ronronner. Oui, oui, cette haine, ma Bête, le tigre dans le chaton, le requin dans le têtard, elle gronde en moi. Elle gronde d'envie.
Les papillons sociaux, j'aimerais les dégommer au canon. Leur aise. Leur facilité à tisser des liens. La valeur banale qu'ils donnent à l'amitié, le prix ridicule de leur confiance, qu'on s'accapare par de simples sourires, par une pauvre apparence, peu importe qu'elle soit un mirage. M'agace. C'est pas leur faute, j'ai été codé comme ça. Jaloux, triste, insatisfait. J'me fais parfois des amis mais j'sais pas les garder. J'sais tisser des liens mais ils claquent dès qu'on les tend trop. Alors les joyeux fifous dont l'réseau d'francs compagnons s'étend à chacune des îles sur lesquelles ils ont posés leurs p'tits petons conquérants, ils me cognent sur mes nerfs comme sur des touches de piano, leur mélodie d'insouciance et d'amitié me nargue, et me force à dialoguer avec mon insupportable solitude. Et pourtant, aujourd'hui. J'me sens pousser deux ailes de papillon.
Je pourrais devenir quelqu'un d'autre. Meilleur. Mieux taillé pour remporter la course aux ambitions : l'épave morose renflouée deviendra fier cuirassé; et ses canons tonneront à travers le monde, dont la corne de brume se propage comme une promesse de justice à travers les époques.
Ille est parti, l'okama, et il pourrait revenir à tout moment. M'larguant seul, en tête à tête mon désir violent d'attraper un nuage. Rapidement il me tente. Rapidement.
J'entends la nuit roulante pointer à la fenêtre, toujours béante. Elle m'appelle. Elle me murmure des promesses de protection. Dans l'noir, les silhouettes se cousent entre elles. Les ombres s'embrassent et se marient. J'deviendrais qu'une tâche de gris obscur sur un monochrome sombre. Qui pourrait bien pouvoir faire...
ce qu'il veut...
y compris...
prendre le large.
A jamais.
Tout plaquer.
Oublier.
Recommencer.
Tomber, puis rebondir.
Rebondir plus haut que jamais.
Sauter.
Mes palmes sur le cadran d'la fenêtre, mon regard coulissant jusqu'en contrebas. Une chute d'une cinquantaine de mètres, sous la bénédiction d'ma foi. Et de mon logia...
...
Ma première guibolle enjambe le rebord.
Puis ma seconde, fièrement, suit son aînée.
Le vertige séquestré, baillonné, n'enraye pas ma volonté.
Je lâche tout, la gravitation fera l'reste.
Comme une grosse boule de boue qui s'arrache aux griffes du vent.
Comparé aux si légères tentacules de lumière agonisantes du soleil, j'me sens enclume. Sur laquelle rien de bon n'a été forgé jusque là.
Aucune foutue idée d'où aller, pour l'instant, j'me contente de filer en bas en ascenseur express. Les vitres défilent devant moi et j'crois prendre de la vitesse, pour devenir un météore d'écailles visqueuses et de pathos embrasé. J'vais éclabousser l'jardin dans lequel j'vais m'éclater, le souffle commence à m'arracher quelques particules de gadoue en une brume brûnasse.
Cet enculé d'fruit a intérêt à faire son boulot.
Dernière édition par Craig Kamina le Sam 30 Mai 2015, 10:51, édité 1 fois