>> Benjamin Landstorm
Pseudonymes : Plusieurs surnoms mais rarement pérennisés. Age: Plus vieux qu'il ne voudrait l'admettre. Sexe : Homme. Race : Il est d'une caste spéciale chez les humains, c'est un marin. Métiers : Navigateur, Cambusier, Maître voilier, Maître calfat, Maître charpentier, Pilote, Quartier maître, Maître canonnier, Maître d'équipage, Canonnier, Second. Groupe : Marin. But : Naviguer, mourir en mer. Fruit du démon ou Aptitude que vous désirez posséder après votre validation : Tout ce qui peut l'aider à naviguer, rien d'autre. Équipement : Un tricorne, une tenue de marin, une bourse avec quelques berry, un sabre d'abordage, une pipe. Codes du règlement : Ce compte est-il un DC ? : Oui, de Rydd Steiner. Si oui, quel @ l'a autorisé ? : Je ne sais plus. |
« Marin tu vois, c’est la plus belle vie du monde. »
Benjamin Landstorm est un marin, sans nul doute. Sa peau burinée par le soleil et le sel est un indice indiscutable démontrant qu'il a passé un temps infini sur le pont d'un navire ; ses yeux fixes et profonds sont les mêmes que ceux de tous les fils de la mer ; ses lèvres souvent sèches accueillent toujours avec joie le bois de sa pipe. Il sent les embruns, le sel, la mer ; tout son être exhale une odeur agréable de grand large. Ses cheveux noirs sont aussi nets qu'un filet de pêche prêt à être jeté à la baille, ses favoris sont larges et recouvrent une grande partie de ses joues dans un imbroglio méthodique. Il a les sourcils plus épais qu'un pont de navire et l’œil azur comme la mer ; sont nez large s'harmonise bien avec un visage semblable à une voile carrée. Bref, Landstorm, ressemble à l'un de ces vieux marins que nous croisons partout.
Du reste, il a le torse d'un ours, puissant et poilu. Ses bras sont larges et musculeux, signe qu'il n'a jamais rechigné à la tâche. Il a les mains caleuses sans que cela ne gêne sa dextérité. En effet, il est toujours un gabier excellent, capable d'attendre les bonnettes en premier. Son pied est ferme et réputé pour ne jamais faillir en mer, on l'a parfois surnommé pied-ferme, pied-marin ; il ne chute jamais, ne vacille pas même face à la plus grosse des tempêtes, dès qu'il est sur un navire, il semble inébranlable.
Benjamin Landstorm, de par ses capacités, ses connaissances, son faciès, dispose d'une aura certaine qui galvanise les autres marins. Il est respecté pour ce qu'il est, dès qu'il est à la barre, tous savent qu'ils peuvent dormir tranquille, le navire arrivera à bon port.
Enfin, Landstorm est reconnu pour son tricorne, qu'il ne quitte jamais et qu'il conserve comme une relique. Mais après tout, c'est sa seule richesse...
Du reste, il a le torse d'un ours, puissant et poilu. Ses bras sont larges et musculeux, signe qu'il n'a jamais rechigné à la tâche. Il a les mains caleuses sans que cela ne gêne sa dextérité. En effet, il est toujours un gabier excellent, capable d'attendre les bonnettes en premier. Son pied est ferme et réputé pour ne jamais faillir en mer, on l'a parfois surnommé pied-ferme, pied-marin ; il ne chute jamais, ne vacille pas même face à la plus grosse des tempêtes, dès qu'il est sur un navire, il semble inébranlable.
Benjamin Landstorm, de par ses capacités, ses connaissances, son faciès, dispose d'une aura certaine qui galvanise les autres marins. Il est respecté pour ce qu'il est, dès qu'il est à la barre, tous savent qu'ils peuvent dormir tranquille, le navire arrivera à bon port.
Enfin, Landstorm est reconnu pour son tricorne, qu'il ne quitte jamais et qu'il conserve comme une relique. Mais après tout, c'est sa seule richesse...
« T’façon je m’en cogne… »
Landstorm a-t-il vraiment un psyché digne d'intérêt ? Pas vraiment, c'est un homme sans véritables ambitions. Il y a sur les mers des hommes qui rêvent de richesse, d'autres d'aventures ; certains nourrissent le rêve de devenir Roi des Pirates, Empereur, Amiral ; d'autres veulent la gloire par dessus tout ; quelques fous se battent même pour la liberté de tous ! Mais non, définitivement, Landstorm n'est pas de ceux-là. Sa seule ambition est de naviguer et de mourir en naviguant. Grâce à ses excellentes capacités, il n'a jamais été bousculé dans ses ambitions. Dès lors, il vit une vie heureuse.
C'est du reste, un compagnon sympathique. Rusé et éloquent, il pourrait tenir une conversation avec de grands intellectuels ; coutumier de la vie des marins, il maîtrise parfaitement l'argot des frères de la côte. Il faut dire qu'il n'est pas homme parfait. Son plaisir de la navigation ne souffre aucune limite, c'est ainsi qu'il n'a jamais rechigné à prendre des postes à la légalité douteuse. Il s'est donc fait une réputation dans le domaine de la contrebande en étant l'un des seuls à ne jamais s'être fait rattrapé par un bâtiment de la marine. Il a parfois participé à des transports d'esclaves, ô le bougre n'aimait pas nécessairement cet ouvrage mais il faut bien vivre, non ?
Et si la majeure partie de ses congénères voue un véritable culte à l'or, il n'est pas de cette race. Pour lui, la vraie richesse c'est le vent courant sur son visage, c'est les voiles qui se gonflent pour emporter le navire, c'est l'air du large, le bruit des vagues. L'or n'est qu'un moyen de subsistance pour lui. Un temps il avait rêvé d'en avoir énormément pour fonder un chantier naval, devenir armateur. Mais les rêves de richesse se sont évanouis avec l'âge de raison. Non, ce qu'il souhaite dorénavant, c'est vivre et mourir sur un navire, comme un vrai enfant de la mer.
C'est du reste, un compagnon sympathique. Rusé et éloquent, il pourrait tenir une conversation avec de grands intellectuels ; coutumier de la vie des marins, il maîtrise parfaitement l'argot des frères de la côte. Il faut dire qu'il n'est pas homme parfait. Son plaisir de la navigation ne souffre aucune limite, c'est ainsi qu'il n'a jamais rechigné à prendre des postes à la légalité douteuse. Il s'est donc fait une réputation dans le domaine de la contrebande en étant l'un des seuls à ne jamais s'être fait rattrapé par un bâtiment de la marine. Il a parfois participé à des transports d'esclaves, ô le bougre n'aimait pas nécessairement cet ouvrage mais il faut bien vivre, non ?
Et si la majeure partie de ses congénères voue un véritable culte à l'or, il n'est pas de cette race. Pour lui, la vraie richesse c'est le vent courant sur son visage, c'est les voiles qui se gonflent pour emporter le navire, c'est l'air du large, le bruit des vagues. L'or n'est qu'un moyen de subsistance pour lui. Un temps il avait rêvé d'en avoir énormément pour fonder un chantier naval, devenir armateur. Mais les rêves de richesse se sont évanouis avec l'âge de raison. Non, ce qu'il souhaite dorénavant, c'est vivre et mourir sur un navire, comme un vrai enfant de la mer.
« La vie ne t'apprends rien... »
- Ton nom ?
- Landstorm. Benjamin Landstorm.
- Le Landstorm ?
- J'savais pas qu'il y avait UN Landstorm.
- Pour sûr, un fieffé pirate.
- Holà patron, si on parle bien du même, ça serait plutôt un simple marin. C'est la marine qui s'méprend...
- Mouais... Je recherche juste un gabier pour l'instant, une demi-solde pour une semaine de travail.
- Je prends.
- C'est au-dessous de tes compétences Landstorm.
- Bah ! Chacun est libre de choisir son sort.
- Très bien, signe là.
Benjamin signa d'une écriture fine et pris aussitôt son congé. Le capitaine fut approché par son second.
- Qui est ce ruffian ?
- Benjamin Landstorm. L'un des meilleurs marins des Blues, sans nul doute.
- Bah tiens !
- Soit par surpris. Il est dans la profession depuis des décennies. C'est une légende dans certains coins des Blues. Certains disent qu'il est né sur un navire ; d'autres qu'il est né de la mer, même si ceux là ont certainement abusé du rhum... Fin' la légende a toujours une part de vérité. C'est un marin de premier choix, un navigateur de tout premier ordre.
- Pourquoi qu'il est pas sur Grand Line alors ?
- Bah le gaillard est pas vraiment taillé pour la bagarre.
- T'as vu les bras ! Des cuissots de bœuf !
- Pas qu'il soit faible, juste qu'il n'a pas envie...
- Et pourquoi qu'il commande pas un navire ?
- C'est assez simple, il est connu comme la baleine blanche dans la profession. Le gaillard a tellement envie de naviguer qu'il accepte le travail quelque soit la solde. En temps normal, un ponte pareil ça coûte le prix d'un navire à entretenir, et ça le vaut ! Mais lui est pas fin commerçant, alors on abuse de la situation. Du coup il a jamais eu assez devant lui pour acquérir ne serait-ce qu'une goélette.
- Il a quel âge ?
- Je sais pas, fait déjà bien vingt ans qu'il s'est taillé une réputation dans le milieu de la contrebande et de la marine marchande. Je peux bien te raconter un peu son histoire, je me suis déjà plusieurs fois rencardé sur ce lascar.
Il a fait ses armes sur un navire marchand comme matelot. C'était déjà à l'époque un fier à bras et un fin connaisseur de la mer. Il a fini par obtenir le poste de timonier et ses capacités faisaient qu'on lui laissait facilement la place de chef par gros temps. Forcément des capacités pareilles ça laisse rêveur. Alors on lui a vite proposé du travail plus rémunérateur, une place sur un navire contrebandier. Mais il a accepté pour l'enjeu de navigation, pour les poursuites. Alors on a vite compris qu'on pouvait lui proposer des soldes de mousses. Depuis, il ne fait que ça, il va de bâtiments en bâtiments sans rester bien longtemps. Il faut dire que la majeure partie des capitaines sentent vite leur légitimité s'étioler avec la présence de Benjamin et il est vite remercié.
- Et vous non capitaine ?
- Par dieu si ! Je lui ai proposé une semaine de boulot sans plus. Après on le jette au premier port venu. Tu verras même sur toi, même sur moi, dès qu'on sera en mer il semble qu'il lui pousse des pouvoirs surnaturels.
- Mais rien ? Voilà vingt ans, voir plus, qu'il navigue et il ne s'est rien passé de particulier ?
- Bah pour le détail il faudra voir directement avec le lascar. J'imagine qu'il tient un pseudo livre de bord, rigoureux comme il est...
Cette histoire débute en mer, sur un brick contrebandier nommé pompeusement « l’intrépide ». Un navire abritant un groupe de marins lourdauds et braillards mais passionnés par la mer et l’aventure. L’intrépide était un de ces bâtiments qui avait vécu son lot d’aventure, il avait une âme et tous l’aimaient pour cela. Alors quand il fallut traverser la flaque, mettre en péril ce navire tant aimé, on fit appel à un pilote de premier choix : Benjamin Landstorm.
Il avait accepté la mission avec joie, notant toutefois que le doublage résineux était très mince et le mailletage médiocre. Mais rien ne pouvait l’empêcher de prendre la mer. Il avait donc embarqué sur le navire en tant que « timonier de luxe », il n’était présent que comme un consultant qui prend la barre lorsque la mer fait le dos rond. C’est donc en pleine mer, sur South Blue, que nous retrouvons l’intrépide et son équipage de fiers à bras !
Benjamin Landstorm fumait tranquillement sa pipe, installé contre le bastingage non loin de la barre. L’homme qui était à la manœuvre pour l’instant était Nathanaël Butcher dit « mâchoire de fer ». Ce capitaine trentenaire, au physique de taureau, ne desserrait jamais les dents et passait pour être l’un des plus dangereux contrebandier de South Blue. Il avait fait fortune en transportant de la dance powder et du bois d’Adam pour le compte de pirates célèbres. Son navire, il l’aimait comme tout vrai marin et il avait voulu le meilleur pour la traversée de la Flaque.
Justement « le meilleur » sortait de sa rêvasserie pour interroger le capitaine. Toujours confortablement calé sur le bastingage, il questionna d’un air faussement détaché.
- Dites moi Capitaine Butcher, où allez-vous ?
- Vers le rocher noir.
- Eh bien, alors, au lieu de courir des bordées qui vous font perdre un temps précieux, pourquoi ne serrez-vous pas tout simplement le vent au plus près ?
- Nous donnerions tout droit sur l’île de la bèche.
- Vous en passerez à plus de vingt brasses !
- Prenez donc la barre Monsieur Landstorm que nous jugions de votre science ! Rétorqua Butcher un poil agacé
Benjamin haussa les épaules, cala sa pipe dans une commissure de lèvres et alla prendre la barre. Il s’assura par une légère pression que le bâtiment était obéissant ; et, voyant que, sans être de première finesse, il ne se refusait pas :
- Au bras et aux boulines vous autres ! dit-il.
Les matelots se mirent aussitôt en mouvement sous l’œil impérieux du Capitaine Butcher.
- Halez ! Poursuivit Benjamin.
L’équipage respecta avec précision les ordres et montra une véritable efficacité.
- Et maintenant, amarrez bien !
L’ordre fut exécuté avec la même précision et la même rigueur quasi-militaire qu’auparavant. Et aussitôt, le brick cessa de courir des bordées et commença à s’avancer vers l’île de la bèche près de laquelle il passa, comme l’avait annoncé Landstorm, en la laissant par tribord à une vingtaine de brasses.
Tout l’équipage salua cette manœuvre à grand renfort de hourras et même Butcher s’inclina, ce qui était déjà beaucoup pour cet homme.
Le reste de la traversée jusqu’à l’embouchure de la flaque se fit sans difficulté. Benjamin avait acquis de la légitimité à son poste, tandis que le Capitaine se trouvait plus confiant après avoir vu son pilote à la manœuvre. On arriva donc jusqu’à l’entrée de la flaque, taillée par la mer à même la falaise. C’était un passage exigüe qui ne laissait pas place à l’approximation. La manœuvre devait être précise et méticuleuse. Benjamin reprit donc la barre.
- Combien de brasses ?
- Dix brasses ! Hurla un matelot à l’avant du navire.
- Bon tout le monde à son poste et laissez vivre.
Benjamin, enivré par le bruit tonitruant des vagues qui s’écrasaient sur la falaise, joua de la barre d’une main de maitre si bien que l’équipage en fut réduit au rang de spectateur. Ils passèrent plein centre de l’embouchure avec une facilité déconcertante.
Aussitôt, Benjamin quitta respectueusement la barre pour là laisser au capitaine. Ils se trouvaient maintenant dans un dédale de caverne particulièrement sombre.
- Il n’y a qu’un seul chemin ici, le courant va faire le travail. Je recommande à un maximum d’hommes de se reposer. Mais gare ! D’ici deux heures nous déboucherons sur une sorte de lac très sombre.
- Eh bien ?
- Eh bien ! La marine rôde parfois et il est facile de choisir le mauvais courant jusqu’au fond de l’enfer !
- On sera vigilant !
- Dans ce cas…
Benjamin alla s’installer à l’arrière du navire pour y somnoler mais fut bientôt rattrapé par Butcher.
- Un petit verre Landstorm ? Demanda le capitaine.
- Eh ! Est-ce que Basara chie dans les bois ?
Et tous deux se dirigèrent vers sa cabine.
Le temps s’égrena rapidement alors que les deux hommes descendaient avec méthode une bouteille de rhum de premier choix. Le brick était probablement sur le lac désormais. Et justement, un matelot frappa à la porte et entra rapidement.
- Avec les compliments de Jack, Capitaine. Il pense qu’une voile est en vue sous le vent.
- Merci, nous montons sur le pont dans un instant.
Et les deux hommes finirent leurs verres avant de remonter.
- Prions pour que ce ne soit que son imagination…
Sur le pont, un noir glacial et un vent fraichissant coupèrent le souffle, après l’atmosphère de la cabine où la chaleur accumulée remontait toujours à la cale. Benjamin fit son apparition à côté de Jack accroupi à la lisse avec sa lunette.
- Où il est ce navire alors ?
- Juste sur notre hanche, monsieur, je crois, dans cette zone éclairée par un brin de rayon de lumière provenant du haut de la caverne. J’ai aperçu une sorte d'éclair, et pendant une seconde j’ai bien cru voir quelque chose virer de bord.
Benjamin attrapa la lunette et d’un œil expert y vit dans ce noir comme en plein jour.
- Capitaine ! Un navire sous huniers, à trois milles de là, filant devant nous sur tribord amures.
- VINDIOU ! C’est bien vrai !
Benjamin s’élança sur le pont d’un pas lourd.
- NAVIRE SUR TRIBORD AMURES, AU PLUS PRES ! LOFEZ ! FERLEZ LES HUNIERS, RATTRAPEZ SON SILLAGE !... Et voyez jusqu’où il nous laissera aller. Murmura finalement Benjamin.
Puis il éleva la voix :
- Tous les hommes à leurs postes pour virer lof pour lof !
Les sifflets et les rugissements du second du bosco réveillèrent l’équipe de quart qui dormait en bas. Quelques minutes plus tard, l’intrépide filait vers le sillage du navire étranger. Dans cette obscurité, ils étaient presque certains d’être invisibles.
La frégate avait le vent à deux points de largue et gagnait régulièrement du terrain, remontant vers l’étranger.
Canons en batterie, lanternes de combat tamisées luisant faiblement sur le pont principal, cloche réduite au silence, ordres donnés à mi-voix. Butcher et Landstorm se tenaient sur le gaillard d’avant, les yeux fixés au travers de la nuit noire. On n’avait plus du tout besoin de longue-vue et une brèche dans l’obscurité leur avait révélé qu’il s’agissait d’une frégate de la marine.
Si Benjamin ne s’était pas trompé, il lâcherait dès que possible une bordée phénoménale. Et avant qu’elle soit revenue de sa surprise, il couperait sous sa poupe, l’assaisonnerait deux, peut-être trois fois, puis s’avancerait sur sa hanche.
On se rapprochait de plus en plus. Plus près, encore plus près. Le cœur de Benjamin frappait contre sa poitrine avec une énergie incroyable.
- Tenez vous prêts aux cargues-pointes des hautes voiles ! Prenez garde à votre amorce !
On s’approcha encore du navire…
- ABATTEZ ! Cria Lanstorm
Les huniers se déployèrent, ils furent bordés en un clin d’œil et l’intrépide fit un bond en avant et se rua sur la hanche de l’étranger.
- HOLA DU NAVIRE ! Qui êtes vous !?
L’intrépide était à portée de pistolet mais on y voyait pas plus loin que le bout du nez…
- Marine gouvernementale ! Déclinez votre identité !
- Mettez en panne, ou je vous coule ! Répliqua Benjamin avec un accent de franchise qui fit peur à l’équipage de marine.
- Allez tous crever en enfer, bande de marins d’eau douce !
La dernière réplique provenait du capitaine de l’équipage marine. Un sergent d’élite à l’air revêche qui n’avait pas l’intention de se rendre si facilement.
- Capitaine à vous de voir.
- FEUX VOUS AUTRES ! ENVOYONS CETTE MARINE DE MALHEUR AU FOND !
Les pièces d’artillerie crachèrent leurs flammes infernales et le navire ennemi sembla hurler de l’intérieur. Benjamin avait jailli sur la barre et pris le parti de prendre de la distance au plus vite.
- Nous l’avons coulé ?
- Peu probable, la coque m’avait l’air sacrément solide et l’officier peu ému par nos menaces.
- Alors ?
- Alors ! Sauve qui peut !
Et en effet, derrière eux, on entendait le sergent délivrant des ordres d’une voix incroyablement puissante.
Soudain, une détonation puis deux, puis dix ! Une bordée venait d’être tirée.
- BORDEE !!!! A plat ventre !
Et comme un seul homme, l’équipage de l’intrépide se baissa tandis que les boulets sifflaient autour d’eux. L’un d’eux vint se fracasser sur le mât de misaine. En un instant il s’effondra sur le pont. Les hommes hurlaient, désorganisés.
- Coupez les voiles ! Livrez moi ce mât à la mer ! Toutes voiles dehors !
Derrière eux, le navire de la marine partait en chasse. Benjamin dirigea le navire vers un courant particulièrement puissant qui sévissait sur le lac.
- On y voit rien Landstorm !
- Fiez-vous à moi.
L’équipage libéra l’intrépide de son mât de misaine, devenu un poids. Alors ils filèrent à une vitesse ahurissante.
- Qu’est ce donc que cela encore ?
- Ce courant est le plus puissant du lac, je l’entends à l’oreille. Nous sommes plus léger, nous filerons plus vite.
- Mais où va-t-il ?
- Vers une mort moins certaine que celle qui nous poursuit capitaine Butcher.
Soudain un vent incroyable se souleva, la flaque avait ses caprices elle aussi. La puissance de ce vent était telle qu’elle semblait capable de rompre le navire.
- Holà ! Hé ! Range à serrer les cacatois et à haler bas de clinfoc !
Le vent venait de rejoindre le navire et semblait vouloir l’emmener par le fond. L’équipage ne tenait maintenant sa cohésion qu’aux ordres raisonnés de Benjamin qui, imperturbable, poursuivait sa manœuvre.
- Bon ! Nous avons encore trop de toile, range à carguer la grand-voile !
En quelques minutes, la grand-voile était carguée et l’intrépide ne marchait plus qu’avec les huniers et les perroquets.
Mais Benjamin fit une moue dubitative.
- Quoi encore !? Demanda le capitaine bouche ouverte comme jamais.
- Nous allons avoir un coup de vent.
- Range à prendre deux ris dans les huniers ! Largue les boulines, brasse au vent, amène les huniers, pèse les palanquins sur les vergues. Hurla le capitaine.
- Ça ne suffira pas… Carguez les huniers !
Et le navira fut entrainé par un courant et un vent impossible alors qu’il était « à sec de voile ». Soudain, la cascade se fit entendre et le navire fut propulsé au delà comme un bouchon de champagne. La chute dans le vide fut longue et ponctuée de hurlements terribles de l’équipage.
Benjamin lui même hurla tandis qu’il tenait fermement la barre.
Le choc du navire heurtant la mer était indescriptible. L’équipage pensa d’abord qu’il avait heurté la terre ferme. Mais Benjamin, qui avait repris ses esprits plus rapidement que les autres, avait foncé vers la cale. Il en ressortit trempé et terrifié.
- AUX POMPES ! AUX POMPES !
Il s’approcha ensuite du capitaine, groggy mais toujours vaillant.
- Une voie d’eau s’est déclarée.
L’équipage était presqu’intact, peu de blessés. Toujours galvanisés par l’action, ils se mirent aussitôt au travail.
Benjamin disparu dans la cale une nouvelle fois. Il avait déjà été maitre calfat sur un navire et pensait pouvoir rendre parfaitement étanche le bois de n’importe quel navire. Mais pour cela, il avait besoin de temps.
Plusieurs heures de travail passèrent, les hommes pompaient et Benjamin ne revenait pas.
- Il est mort pour sûr et nous coulerons dans quatre heures au lieu de deux…
- Mieux vaut mourir maintenant, on ne meurt qu’une fois.
Le capitaine fit preuve d’un sang froid hors norme. Il attrapa une paire de pistolet.
- Le premier qui quitte la pompe, je lui brûle la cervelle ! J’ai un homme en bas qui se bat comme un diable pour sauver vos carcasses !
Une bonne raison est tout ce qu’il faut à un homme pour retrouver du courage. C’est ainsi que tout l’équipage pompa de plus belle.
Finalement Benjamin refit son apparition. Il était trempé jusqu’aux os, la mine sombre. Tous pensèrent « nous sommes perdus ».
- Nous avons deux jours devant nous. Après, il faudra un chantier pour ce navire. La cargaison est miraculeusement intacte…
Mais tout contrebandiers qu’ils étaient, aucun membre de l’équipage ne s’intéressait à la cargaison. Au contraire, petit à petit, une partie de l’équipage commençait à perdre la raison sous l’effet de la peur. L’adrénaline avait quitté les corps et l’inquiétude seule régnait.
- Du calme ! On va sortir de là.
- Vous avez vu où on est ?!
Car oui ! Benjamin, préoccupé par l’état du navire, n’avait pas pris le temps de regarder où ils étaient. C’était une caverne gigantesque, celle-ci parfaitement éclairée. Mais il semblait y avoir autant de chemins possibles que de routes vers Marie-Joa. Les hommes étaient convaincus qu’ils n’avaient survécus jusqu’ici que pour mieux mourir.
Benjamin fut un instant décontenancé par la taille de cette caverne. Butcher, dont la mâchoire ne semblait pas s’être recollée depuis des heures, rassura l’équipage du mieux possible.
- C’est bon les gars ! Benjamin nous a montré qu’il est un de ces marins à qui la mer n’adresse que des bienfaits ! Il va nous trouver une sortie !
Et il lança une œillade implorante à destination de son pilote.
- Deux hommes et une chaloupe à la mer.
En quelques minutes Benjamin tenait le gouvernail d’une solide chaloupe tirée par deux marins musculeux. Il tenta bien d’allumer sa pipe mais son tabac était détrempé, il la rangea donc dans un grognement furieux.
Les hommes effectuèrent des cercles concentriques avec pour point de départ l’intrépide. On entendait l’équipage en grande conversation sur le navire. Beaucoup étaient toujours inquiets mais Benjamin offrait au moins le divertissement et surtout, l’espoir.
Le bal fut refait plusieurs fois puis, soudain :
- Stop !
Les deux marins se stoppèrent net.
- Héhé ! Au navire ! Souquez ferme !
La bonne humeur de Benjamin fit redoubler d’effort les matelots si bien qu’en quelques minutes, tous étaient revenus sur le pont.
- Alors ?
- Alors ! Ce vent vous vous souvenez ?
- Palsembleu si l’on se souvient ! On a failli y rester à cause de lui !
- Et bien figurez vous que nous étions dans une sorte de corridor avant la cascade. La caverne ici est tellement grande que l’appel d’air est formidable. Si bien que tout l’air passe par un petit couloir. Vous suivez ?
- Euh… Pas bien non.
- La grande bourrasque provient de la différence entre le lac supérieur et le lac inférieur. Il y avait un appel d’air formidable à l’endroit de la jonction juste avant la cascade.
- Et bien… ?
- Et bien ! S’il y a appel d’air c’est que nous sommes tout près d’une sortie.
- Mais laquelle !
- Et bien ! J’ai tourné plusieurs fois pour en être certain mais… Celle-ci !
Et il montra une issue en particulier.
C’est un grand bravo que provoqua cet index solide pointé vers la liberté. Et en effet, en quelques minutes l’intrépide retrouvait le soleil et avec cela West Blue.
On retrouva rapidement l’île convenue pour le débarquement et l’on déchargea la cargaison. Les hommes semblaient heureux et avaient oublié la rude traversée. Ils ne pensaient qu'à dépenser la solde en femmes et en alcool.
Vint alors le moment tant attendu de la répartition de cette fameuse solde. Une part non négligeable fut imputée au butin global afin d’assurer les réparations de l’intrépide. Butcher avait retrouvé sa dureté buccale légendaire et distribuait la solde assis derrière une table en bois juste à côté de piles de caisses.
Ce fut bientôt le tour de Landstorm. Butcher lui jeta un petit sac de cuir.
- Y’a pas le compte là !?
- Un quart de ce qui était convenu.
- Quoi ?! Par quelle prouesse ?
- L’idée c’était d’assurer la traversée du navire pas de le détruire en partie !
- Créfieu ! Sans moi l’intrépide coulait dix fois et vos carcasses nourrissaient les poissons.
- Pas d’histoire Landstorm !
L’équipage non loin semblait désapprouver l’attitude du capitaine, mais personne n’osait intervenir. Benjamin haussa les épaules, empocha sa solde, et s’en alla chercher un autre travail au port.
- Et estime toi heureux que je ne m’arrange pas pour que tous les capitaines du port t’interdisent leur bord ! Cria Butcher.
Agacé, Benjamin revint sur ses pas.
- On peut me prendre ma solde. On peut me prendre ma dignité. M’interdire les bars, les femmes, l’or, le gîte. Mais personne, ô non personne, ne m’interdira de prendre la mer. Alors garde ton or et je garde ma liberté.
Et il jeta la bourse qu'il venait de recevoir au sol puis reprit sa route devant un équipage médusé…
Il avait accepté la mission avec joie, notant toutefois que le doublage résineux était très mince et le mailletage médiocre. Mais rien ne pouvait l’empêcher de prendre la mer. Il avait donc embarqué sur le navire en tant que « timonier de luxe », il n’était présent que comme un consultant qui prend la barre lorsque la mer fait le dos rond. C’est donc en pleine mer, sur South Blue, que nous retrouvons l’intrépide et son équipage de fiers à bras !
Benjamin Landstorm fumait tranquillement sa pipe, installé contre le bastingage non loin de la barre. L’homme qui était à la manœuvre pour l’instant était Nathanaël Butcher dit « mâchoire de fer ». Ce capitaine trentenaire, au physique de taureau, ne desserrait jamais les dents et passait pour être l’un des plus dangereux contrebandier de South Blue. Il avait fait fortune en transportant de la dance powder et du bois d’Adam pour le compte de pirates célèbres. Son navire, il l’aimait comme tout vrai marin et il avait voulu le meilleur pour la traversée de la Flaque.
Justement « le meilleur » sortait de sa rêvasserie pour interroger le capitaine. Toujours confortablement calé sur le bastingage, il questionna d’un air faussement détaché.
- Dites moi Capitaine Butcher, où allez-vous ?
- Vers le rocher noir.
- Eh bien, alors, au lieu de courir des bordées qui vous font perdre un temps précieux, pourquoi ne serrez-vous pas tout simplement le vent au plus près ?
- Nous donnerions tout droit sur l’île de la bèche.
- Vous en passerez à plus de vingt brasses !
- Prenez donc la barre Monsieur Landstorm que nous jugions de votre science ! Rétorqua Butcher un poil agacé
Benjamin haussa les épaules, cala sa pipe dans une commissure de lèvres et alla prendre la barre. Il s’assura par une légère pression que le bâtiment était obéissant ; et, voyant que, sans être de première finesse, il ne se refusait pas :
- Au bras et aux boulines vous autres ! dit-il.
Les matelots se mirent aussitôt en mouvement sous l’œil impérieux du Capitaine Butcher.
- Halez ! Poursuivit Benjamin.
L’équipage respecta avec précision les ordres et montra une véritable efficacité.
- Et maintenant, amarrez bien !
L’ordre fut exécuté avec la même précision et la même rigueur quasi-militaire qu’auparavant. Et aussitôt, le brick cessa de courir des bordées et commença à s’avancer vers l’île de la bèche près de laquelle il passa, comme l’avait annoncé Landstorm, en la laissant par tribord à une vingtaine de brasses.
Tout l’équipage salua cette manœuvre à grand renfort de hourras et même Butcher s’inclina, ce qui était déjà beaucoup pour cet homme.
Le reste de la traversée jusqu’à l’embouchure de la flaque se fit sans difficulté. Benjamin avait acquis de la légitimité à son poste, tandis que le Capitaine se trouvait plus confiant après avoir vu son pilote à la manœuvre. On arriva donc jusqu’à l’entrée de la flaque, taillée par la mer à même la falaise. C’était un passage exigüe qui ne laissait pas place à l’approximation. La manœuvre devait être précise et méticuleuse. Benjamin reprit donc la barre.
- Combien de brasses ?
- Dix brasses ! Hurla un matelot à l’avant du navire.
- Bon tout le monde à son poste et laissez vivre.
Benjamin, enivré par le bruit tonitruant des vagues qui s’écrasaient sur la falaise, joua de la barre d’une main de maitre si bien que l’équipage en fut réduit au rang de spectateur. Ils passèrent plein centre de l’embouchure avec une facilité déconcertante.
Aussitôt, Benjamin quitta respectueusement la barre pour là laisser au capitaine. Ils se trouvaient maintenant dans un dédale de caverne particulièrement sombre.
- Il n’y a qu’un seul chemin ici, le courant va faire le travail. Je recommande à un maximum d’hommes de se reposer. Mais gare ! D’ici deux heures nous déboucherons sur une sorte de lac très sombre.
- Eh bien ?
- Eh bien ! La marine rôde parfois et il est facile de choisir le mauvais courant jusqu’au fond de l’enfer !
- On sera vigilant !
- Dans ce cas…
Benjamin alla s’installer à l’arrière du navire pour y somnoler mais fut bientôt rattrapé par Butcher.
- Un petit verre Landstorm ? Demanda le capitaine.
- Eh ! Est-ce que Basara chie dans les bois ?
Et tous deux se dirigèrent vers sa cabine.
Le temps s’égrena rapidement alors que les deux hommes descendaient avec méthode une bouteille de rhum de premier choix. Le brick était probablement sur le lac désormais. Et justement, un matelot frappa à la porte et entra rapidement.
- Avec les compliments de Jack, Capitaine. Il pense qu’une voile est en vue sous le vent.
- Merci, nous montons sur le pont dans un instant.
Et les deux hommes finirent leurs verres avant de remonter.
- Prions pour que ce ne soit que son imagination…
Sur le pont, un noir glacial et un vent fraichissant coupèrent le souffle, après l’atmosphère de la cabine où la chaleur accumulée remontait toujours à la cale. Benjamin fit son apparition à côté de Jack accroupi à la lisse avec sa lunette.
- Où il est ce navire alors ?
- Juste sur notre hanche, monsieur, je crois, dans cette zone éclairée par un brin de rayon de lumière provenant du haut de la caverne. J’ai aperçu une sorte d'éclair, et pendant une seconde j’ai bien cru voir quelque chose virer de bord.
Benjamin attrapa la lunette et d’un œil expert y vit dans ce noir comme en plein jour.
- Capitaine ! Un navire sous huniers, à trois milles de là, filant devant nous sur tribord amures.
- VINDIOU ! C’est bien vrai !
Benjamin s’élança sur le pont d’un pas lourd.
- NAVIRE SUR TRIBORD AMURES, AU PLUS PRES ! LOFEZ ! FERLEZ LES HUNIERS, RATTRAPEZ SON SILLAGE !... Et voyez jusqu’où il nous laissera aller. Murmura finalement Benjamin.
Puis il éleva la voix :
- Tous les hommes à leurs postes pour virer lof pour lof !
Les sifflets et les rugissements du second du bosco réveillèrent l’équipe de quart qui dormait en bas. Quelques minutes plus tard, l’intrépide filait vers le sillage du navire étranger. Dans cette obscurité, ils étaient presque certains d’être invisibles.
La frégate avait le vent à deux points de largue et gagnait régulièrement du terrain, remontant vers l’étranger.
Canons en batterie, lanternes de combat tamisées luisant faiblement sur le pont principal, cloche réduite au silence, ordres donnés à mi-voix. Butcher et Landstorm se tenaient sur le gaillard d’avant, les yeux fixés au travers de la nuit noire. On n’avait plus du tout besoin de longue-vue et une brèche dans l’obscurité leur avait révélé qu’il s’agissait d’une frégate de la marine.
Si Benjamin ne s’était pas trompé, il lâcherait dès que possible une bordée phénoménale. Et avant qu’elle soit revenue de sa surprise, il couperait sous sa poupe, l’assaisonnerait deux, peut-être trois fois, puis s’avancerait sur sa hanche.
On se rapprochait de plus en plus. Plus près, encore plus près. Le cœur de Benjamin frappait contre sa poitrine avec une énergie incroyable.
- Tenez vous prêts aux cargues-pointes des hautes voiles ! Prenez garde à votre amorce !
On s’approcha encore du navire…
- ABATTEZ ! Cria Lanstorm
Les huniers se déployèrent, ils furent bordés en un clin d’œil et l’intrépide fit un bond en avant et se rua sur la hanche de l’étranger.
- HOLA DU NAVIRE ! Qui êtes vous !?
L’intrépide était à portée de pistolet mais on y voyait pas plus loin que le bout du nez…
- Marine gouvernementale ! Déclinez votre identité !
- Mettez en panne, ou je vous coule ! Répliqua Benjamin avec un accent de franchise qui fit peur à l’équipage de marine.
- Allez tous crever en enfer, bande de marins d’eau douce !
La dernière réplique provenait du capitaine de l’équipage marine. Un sergent d’élite à l’air revêche qui n’avait pas l’intention de se rendre si facilement.
- Capitaine à vous de voir.
- FEUX VOUS AUTRES ! ENVOYONS CETTE MARINE DE MALHEUR AU FOND !
Les pièces d’artillerie crachèrent leurs flammes infernales et le navire ennemi sembla hurler de l’intérieur. Benjamin avait jailli sur la barre et pris le parti de prendre de la distance au plus vite.
- Nous l’avons coulé ?
- Peu probable, la coque m’avait l’air sacrément solide et l’officier peu ému par nos menaces.
- Alors ?
- Alors ! Sauve qui peut !
Et en effet, derrière eux, on entendait le sergent délivrant des ordres d’une voix incroyablement puissante.
Soudain, une détonation puis deux, puis dix ! Une bordée venait d’être tirée.
- BORDEE !!!! A plat ventre !
Et comme un seul homme, l’équipage de l’intrépide se baissa tandis que les boulets sifflaient autour d’eux. L’un d’eux vint se fracasser sur le mât de misaine. En un instant il s’effondra sur le pont. Les hommes hurlaient, désorganisés.
- Coupez les voiles ! Livrez moi ce mât à la mer ! Toutes voiles dehors !
Derrière eux, le navire de la marine partait en chasse. Benjamin dirigea le navire vers un courant particulièrement puissant qui sévissait sur le lac.
- On y voit rien Landstorm !
- Fiez-vous à moi.
L’équipage libéra l’intrépide de son mât de misaine, devenu un poids. Alors ils filèrent à une vitesse ahurissante.
- Qu’est ce donc que cela encore ?
- Ce courant est le plus puissant du lac, je l’entends à l’oreille. Nous sommes plus léger, nous filerons plus vite.
- Mais où va-t-il ?
- Vers une mort moins certaine que celle qui nous poursuit capitaine Butcher.
Soudain un vent incroyable se souleva, la flaque avait ses caprices elle aussi. La puissance de ce vent était telle qu’elle semblait capable de rompre le navire.
- Holà ! Hé ! Range à serrer les cacatois et à haler bas de clinfoc !
Le vent venait de rejoindre le navire et semblait vouloir l’emmener par le fond. L’équipage ne tenait maintenant sa cohésion qu’aux ordres raisonnés de Benjamin qui, imperturbable, poursuivait sa manœuvre.
- Bon ! Nous avons encore trop de toile, range à carguer la grand-voile !
En quelques minutes, la grand-voile était carguée et l’intrépide ne marchait plus qu’avec les huniers et les perroquets.
Mais Benjamin fit une moue dubitative.
- Quoi encore !? Demanda le capitaine bouche ouverte comme jamais.
- Nous allons avoir un coup de vent.
- Range à prendre deux ris dans les huniers ! Largue les boulines, brasse au vent, amène les huniers, pèse les palanquins sur les vergues. Hurla le capitaine.
- Ça ne suffira pas… Carguez les huniers !
Et le navira fut entrainé par un courant et un vent impossible alors qu’il était « à sec de voile ». Soudain, la cascade se fit entendre et le navire fut propulsé au delà comme un bouchon de champagne. La chute dans le vide fut longue et ponctuée de hurlements terribles de l’équipage.
Benjamin lui même hurla tandis qu’il tenait fermement la barre.
Le choc du navire heurtant la mer était indescriptible. L’équipage pensa d’abord qu’il avait heurté la terre ferme. Mais Benjamin, qui avait repris ses esprits plus rapidement que les autres, avait foncé vers la cale. Il en ressortit trempé et terrifié.
- AUX POMPES ! AUX POMPES !
Il s’approcha ensuite du capitaine, groggy mais toujours vaillant.
- Une voie d’eau s’est déclarée.
L’équipage était presqu’intact, peu de blessés. Toujours galvanisés par l’action, ils se mirent aussitôt au travail.
Benjamin disparu dans la cale une nouvelle fois. Il avait déjà été maitre calfat sur un navire et pensait pouvoir rendre parfaitement étanche le bois de n’importe quel navire. Mais pour cela, il avait besoin de temps.
Plusieurs heures de travail passèrent, les hommes pompaient et Benjamin ne revenait pas.
- Il est mort pour sûr et nous coulerons dans quatre heures au lieu de deux…
- Mieux vaut mourir maintenant, on ne meurt qu’une fois.
Le capitaine fit preuve d’un sang froid hors norme. Il attrapa une paire de pistolet.
- Le premier qui quitte la pompe, je lui brûle la cervelle ! J’ai un homme en bas qui se bat comme un diable pour sauver vos carcasses !
Une bonne raison est tout ce qu’il faut à un homme pour retrouver du courage. C’est ainsi que tout l’équipage pompa de plus belle.
Finalement Benjamin refit son apparition. Il était trempé jusqu’aux os, la mine sombre. Tous pensèrent « nous sommes perdus ».
- Nous avons deux jours devant nous. Après, il faudra un chantier pour ce navire. La cargaison est miraculeusement intacte…
Mais tout contrebandiers qu’ils étaient, aucun membre de l’équipage ne s’intéressait à la cargaison. Au contraire, petit à petit, une partie de l’équipage commençait à perdre la raison sous l’effet de la peur. L’adrénaline avait quitté les corps et l’inquiétude seule régnait.
- Du calme ! On va sortir de là.
- Vous avez vu où on est ?!
Car oui ! Benjamin, préoccupé par l’état du navire, n’avait pas pris le temps de regarder où ils étaient. C’était une caverne gigantesque, celle-ci parfaitement éclairée. Mais il semblait y avoir autant de chemins possibles que de routes vers Marie-Joa. Les hommes étaient convaincus qu’ils n’avaient survécus jusqu’ici que pour mieux mourir.
Benjamin fut un instant décontenancé par la taille de cette caverne. Butcher, dont la mâchoire ne semblait pas s’être recollée depuis des heures, rassura l’équipage du mieux possible.
- C’est bon les gars ! Benjamin nous a montré qu’il est un de ces marins à qui la mer n’adresse que des bienfaits ! Il va nous trouver une sortie !
Et il lança une œillade implorante à destination de son pilote.
- Deux hommes et une chaloupe à la mer.
En quelques minutes Benjamin tenait le gouvernail d’une solide chaloupe tirée par deux marins musculeux. Il tenta bien d’allumer sa pipe mais son tabac était détrempé, il la rangea donc dans un grognement furieux.
Les hommes effectuèrent des cercles concentriques avec pour point de départ l’intrépide. On entendait l’équipage en grande conversation sur le navire. Beaucoup étaient toujours inquiets mais Benjamin offrait au moins le divertissement et surtout, l’espoir.
Le bal fut refait plusieurs fois puis, soudain :
- Stop !
Les deux marins se stoppèrent net.
- Héhé ! Au navire ! Souquez ferme !
La bonne humeur de Benjamin fit redoubler d’effort les matelots si bien qu’en quelques minutes, tous étaient revenus sur le pont.
- Alors ?
- Alors ! Ce vent vous vous souvenez ?
- Palsembleu si l’on se souvient ! On a failli y rester à cause de lui !
- Et bien figurez vous que nous étions dans une sorte de corridor avant la cascade. La caverne ici est tellement grande que l’appel d’air est formidable. Si bien que tout l’air passe par un petit couloir. Vous suivez ?
- Euh… Pas bien non.
- La grande bourrasque provient de la différence entre le lac supérieur et le lac inférieur. Il y avait un appel d’air formidable à l’endroit de la jonction juste avant la cascade.
- Et bien… ?
- Et bien ! S’il y a appel d’air c’est que nous sommes tout près d’une sortie.
- Mais laquelle !
- Et bien ! J’ai tourné plusieurs fois pour en être certain mais… Celle-ci !
Et il montra une issue en particulier.
C’est un grand bravo que provoqua cet index solide pointé vers la liberté. Et en effet, en quelques minutes l’intrépide retrouvait le soleil et avec cela West Blue.
On retrouva rapidement l’île convenue pour le débarquement et l’on déchargea la cargaison. Les hommes semblaient heureux et avaient oublié la rude traversée. Ils ne pensaient qu'à dépenser la solde en femmes et en alcool.
Vint alors le moment tant attendu de la répartition de cette fameuse solde. Une part non négligeable fut imputée au butin global afin d’assurer les réparations de l’intrépide. Butcher avait retrouvé sa dureté buccale légendaire et distribuait la solde assis derrière une table en bois juste à côté de piles de caisses.
Ce fut bientôt le tour de Landstorm. Butcher lui jeta un petit sac de cuir.
- Y’a pas le compte là !?
- Un quart de ce qui était convenu.
- Quoi ?! Par quelle prouesse ?
- L’idée c’était d’assurer la traversée du navire pas de le détruire en partie !
- Créfieu ! Sans moi l’intrépide coulait dix fois et vos carcasses nourrissaient les poissons.
- Pas d’histoire Landstorm !
L’équipage non loin semblait désapprouver l’attitude du capitaine, mais personne n’osait intervenir. Benjamin haussa les épaules, empocha sa solde, et s’en alla chercher un autre travail au port.
- Et estime toi heureux que je ne m’arrange pas pour que tous les capitaines du port t’interdisent leur bord ! Cria Butcher.
Agacé, Benjamin revint sur ses pas.
- On peut me prendre ma solde. On peut me prendre ma dignité. M’interdire les bars, les femmes, l’or, le gîte. Mais personne, ô non personne, ne m’interdira de prendre la mer. Alors garde ton or et je garde ma liberté.
Et il jeta la bourse qu'il venait de recevoir au sol puis reprit sa route devant un équipage médusé…
Dernière édition par Benjamin Landstorm le Mar 18 Aoû 2015 - 10:32, édité 13 fois