Le jour est sur le point de tomber.
Au loin, l’astre vit ses derniers instants de présence sur cette partie du monde. Accoudé au bastingage de la proue du navire récupéré par le prêtre d’Élite Adler. La brise marine me caresse le visage, dissipant un instant la fatigue et la tension des semaines précédentes. Voilà une dizaine de jours que l’on navigue, et les stigmates de mes épreuves subies à Helliday Island sont encore très présents dans mon esprit. Heureusement, mon corps va mieux grâce aux bons soins de l’Évêque Kestrel qui a bien insisté pour me soigner, voire me couver comme un père couvant son enfant. Kestrel a peut-être l’air assez excentrique, il reste un homme qui fait très attention à la santé de ces amis et mettra sa vie au service de leur protection. L’air iodé tiraille légèrement mes dernières blessures. Je caresse discrètement ces blessures, pensant à chacune d’elle. Les coups violents du Baron Noir d’Helliday. Les blessures profondes de Haya, l’ex-Sœur de l’Église de la Juste Violence. A sa pensée, je ne peux m’empêcher d’exprimer un regret. C’est la première personne que j’ai tuée en le désirant. Jusqu’à ce jour, j’ai toujours fait ce qu’il fallait pour rester dans un chemin que j’estime juste. La mort d’autrui n’est pas une solution. Mais par devoir envers mon ordre, je devais effacer cette traitresse. C’était ma mission. Et même aujourd’hui, je savais qu’elle ne pouvait pas être récupérée. Mais ce n’est pas sa faute. Haya avait un vide en elle. Et elle l’a comblé avec ce qu’on lui proposait. Sur Helliday, c’était la gloire en faisant couler le sang sur le sable de l’arène.
-Adri ?
Je me retourne lentement, souriant à l’avance. A un mètre, Uran est venu me voir, m’arrachant sans difficulté à l’errance de mes pensées. Dans le départ d’Helliday, elle a eu l’occasion de partir avec quelques affaires. Parmi elles, une robe blanche, simple, mais éclatante. On dirait un ange. Je lui fais signe de s’approcher et elle s’exécute volontiers. Tout juste suffisamment grand pour passer la tête au-dessus du bastingage, je pose une main sur son épaule pour la retenir en cas d’embardée. La houle n’est pas très forte en cette fraiche soirée, mais on n’est pas à l’abri d’un remous plus fort que les autres. Adler a embauché un équipage de marins particulièrement habile et la traversée s’est pour l’instant déroulée sans anicroche. Le navigateur s’est même débrouillé pour éviter une tempête particulièrement violente. Au loin, on a pu admirer les éclairs s’abattant sur la mer sans penser aux navires potentiellement piégés là-bas. Face aux forces de la nature, on perd quelques notions d’empathie tellement on se perd dans sa beauté sauvage.
-Tu n’as pas froid ?
-Non. C’est bon. Ça ira.
Ma main sur l’épaule m’indique le contraire. Elle frissonne légèrement. Je la ramène de mon côté, la plaçant entre le bastingage et moi, avant de l’enlacer de mes bras puissants, venant courber mon dos jusqu’à poser mon menton sur son épaule. Elle se blottit contre moi, acceptant malgré tout ma protection contre la fraicheur de l’océan. On reste là, immobile, à contempler la mer. La brise seule répond à notre silence commun. Il est bon d’être ensemble. Trop longtemps nous avons été séparées. Trop longtemps j’ai été otage qu’on lui fasse du mal. J’ai enduré bien des épreuves pour pouvoir la libérer. Et Uran a enduré des épreuves tout aussi terribles en attendant mon secours. Je m’en veux, mais en même temps, je suis soulagée. Ma plus grande crainte est que son regard ait changé après cette épreuve. Le premier jour a été un enchainement de réconfort mutuel tandis que mes blessures me faisaient souffrir atrocement. J’avais peur. Puis, j’ai vu que son regard avait gardé sa fraicheur et sa joie de vivre. J’ai été aveuglée par ça. Je n’ai vu que plus tard qu’il y avait quelque chose de change dans sa façon d’être, sa façon de me regarder ; quelque chose à changer en elle. Et je ne sais pas quoi. Plusieurs fois, elle s’est écartée de moi, le regard dans le vague, confronté à des émotions contraires.
J’ai peur de la perdre. J’ai peur de l’avoir perdu, déjà.
J’ai demandé à Kestrel, mais il n’a pas su me répondre. Les enfants, c’est le plus grand mystère du monde, qu’il m’a dit. Il s’en lave les mains. Je sais pourtant que ça le travaille. Toutefois, dans le fond, il a raison. Ce n’est pas à lui de s’immiscer dans notre relation, de la comprendre. Si je ne peux pas comprendre Uran, personne ne le pourra. Par conséquent, j’ai essayé de passer du temps avec elle, de parler de sujets divers et variés, puis de lui laisser le temps d’être seul et de mettre de l’ordre dans ses pensées. Parmi les sujets qui reviennent, il y a ces parents. Sa famille. Celle qu’elle ne connait plus et dont elle ignore s’ils sont en vie ou non. Son ton est maladroit et ses pensées sont chaotiques quand elle parle de ce sujet. Il est évident que ce n’est pas quelque chose de simple pour elle. Je ne la brusque pas. Je réponds quand elle souhaite me parler.
-Adri ? On va encore vers des ennuis ?
Je me mords la lèvre inférieure. C’est vrai. Il y a quelques jours, j’ai réussi à entrer en contact avec Ishii. Il va bien. Il continue sa quête de lutte contre l’esclavage. Il est quelque part, en mer, en route pour Imashung. L’idée est donc de le rejoindre afin de poursuivre la lutte. Qui dit lutte dit danger. Une fois encore, Uran ne sera pas en sécurité. Récemment, je me suis demandé s’il ne fallait pas la confier à Kestrel et Adler. Ils ne participeront pas aux événements sur Imashung. L’Église de la Juste Violence ne peut pas s’impliquer de la sorte. Je suis comme une bannie de l’ordre, j’ai ce droit. Ce serait un grand poids en moins dans mon cœur si je savais Uran loin du chaos des combats, mais une autre question se pose : doit-elle vraiment me retrouver à l’avenir ? Ma vie a été une succession de combat et de danger. Jamais je n’aurais droit à la sécurité nécessaire pour permettre à Uran de vivre dans l’insouciance. La garder avec moi, c’est la forcer à mener une vie que je ne désire pas pour elle. Je pense qu’elle en a conscience et ça doit la travailler aussi. L’Ordre pourrait surement lui trouver un endroit pour grandir en toute sérénité. Elle pourrait même vivre au sein de l’un des couvents de L’Ordre et embrasser, une fois grande, notre cause. Mais c’est un choix qui lui revient. Le choix de sa vie. Je ne peux lui imposer. Je ne peux pas ne pas lui proposer.
-Adri, je…
-Uran.
Je la coupe dans son élan. J’ai eu un mauvais pressentiment. Je ne sais pas si ça venait de mon seigneur, du pouvoir qu’il m’a donné ou bien d’un autre pouvoir dont j’ignore encore l’existence. J’ai préféré prendre les devants. Uran se tait, portant un regard inquiet dans ma direction, les yeux au ciel.
-ça va être dangereux. C’est pour ça que je veux que tu restes avec Kestrel et Adler.
-Rester avec eux ?
-Oui. Tu seras en sécurité. Je ne veux plus jamais que tu aies à souffrir de mes choix.
-Mais… on se reverra ?
Je me mords la lèvre en regardant ailleurs. Derrière, le soleil n’est plus. L’obscurité nous gagne. Ses yeux sont tels des phares dans la pénombre. Aux coins, des cristaux de larmes. Elle sait que la réponse ne la conviendra pas.
-J’ai eu tort de te faire vivre tout ça, Uran. J’ai eu tort. Tu mérites de vivre une vie heureuse. Kestrel te trouvera un endroit où tu pourras t’épanouir.
-On ne se reverra pas ?
-On se reverra, Uran. Mais pas tout de suite. Je viendrais te rendre visite, c’est sûr. Mais il est important que tu vives. Pas que tu survives à mes décisions. Tu comprends ?
-Oui… mais…
-Pas de mais, Uran, s’il te plait.
-Mais Adri !
Elle insiste. Elle résiste. Je la comprends. J’ai été son refuge. Sa grande sœur. Et je lui demande de m’abandonner. Moi-même, je me ne sens pas bien. Je sèche mes larmes avant qu’elle n’apparaisse. Je dois paraitre fort ou sinon, Uran aura raison de ma raison.
-Uran. Tu es un rayon de soleil. Et tu peux être un rayon de soleil pour bien des gens. Quand tu seras grande, je sais que tu feras de belles choses. Et je serais très heureuse de pouvoir t’aider dans ce que tu entreprendras. Je serais extrêmement heureuse de pouvoir être ton amie. Sincèrement.
-Adri…
Elle baisse le regard. Passer de grande sœur à amie, c’est une chose. Je mets de la distance entre nous pour qu’elle puisse mieux partir. C’est indispensable. Je la trahis, un peu. Mais elle comprendra. Elle est forte et intelligente. Uran détourne la tête et se débat un instant pour s’extraire de mon étreinte. Trois pas pour s’éloigner de moi avant de se retourner dans ma direction, ses larmes coulent sur son visage, une fois encore. Une fois encore, je la blesse. Je la blesse pour que je n’aie plus à la blesser à l’avenir. Et elle s’en va, disparaissant du pont, s’enfonçant dans le tréfonds du navire pour cacher sa peine. Je reste là, immobile, acceptant stoïquement la morsure glaciale de la nuit. C’est ma punition pour ses larmes. Et contemplant l’horizon, j’espère que l’avenir ne sera pas aussi noir que les ténèbres qui s’annoncent.
Au loin, l’astre vit ses derniers instants de présence sur cette partie du monde. Accoudé au bastingage de la proue du navire récupéré par le prêtre d’Élite Adler. La brise marine me caresse le visage, dissipant un instant la fatigue et la tension des semaines précédentes. Voilà une dizaine de jours que l’on navigue, et les stigmates de mes épreuves subies à Helliday Island sont encore très présents dans mon esprit. Heureusement, mon corps va mieux grâce aux bons soins de l’Évêque Kestrel qui a bien insisté pour me soigner, voire me couver comme un père couvant son enfant. Kestrel a peut-être l’air assez excentrique, il reste un homme qui fait très attention à la santé de ces amis et mettra sa vie au service de leur protection. L’air iodé tiraille légèrement mes dernières blessures. Je caresse discrètement ces blessures, pensant à chacune d’elle. Les coups violents du Baron Noir d’Helliday. Les blessures profondes de Haya, l’ex-Sœur de l’Église de la Juste Violence. A sa pensée, je ne peux m’empêcher d’exprimer un regret. C’est la première personne que j’ai tuée en le désirant. Jusqu’à ce jour, j’ai toujours fait ce qu’il fallait pour rester dans un chemin que j’estime juste. La mort d’autrui n’est pas une solution. Mais par devoir envers mon ordre, je devais effacer cette traitresse. C’était ma mission. Et même aujourd’hui, je savais qu’elle ne pouvait pas être récupérée. Mais ce n’est pas sa faute. Haya avait un vide en elle. Et elle l’a comblé avec ce qu’on lui proposait. Sur Helliday, c’était la gloire en faisant couler le sang sur le sable de l’arène.
-Adri ?
Je me retourne lentement, souriant à l’avance. A un mètre, Uran est venu me voir, m’arrachant sans difficulté à l’errance de mes pensées. Dans le départ d’Helliday, elle a eu l’occasion de partir avec quelques affaires. Parmi elles, une robe blanche, simple, mais éclatante. On dirait un ange. Je lui fais signe de s’approcher et elle s’exécute volontiers. Tout juste suffisamment grand pour passer la tête au-dessus du bastingage, je pose une main sur son épaule pour la retenir en cas d’embardée. La houle n’est pas très forte en cette fraiche soirée, mais on n’est pas à l’abri d’un remous plus fort que les autres. Adler a embauché un équipage de marins particulièrement habile et la traversée s’est pour l’instant déroulée sans anicroche. Le navigateur s’est même débrouillé pour éviter une tempête particulièrement violente. Au loin, on a pu admirer les éclairs s’abattant sur la mer sans penser aux navires potentiellement piégés là-bas. Face aux forces de la nature, on perd quelques notions d’empathie tellement on se perd dans sa beauté sauvage.
-Tu n’as pas froid ?
-Non. C’est bon. Ça ira.
Ma main sur l’épaule m’indique le contraire. Elle frissonne légèrement. Je la ramène de mon côté, la plaçant entre le bastingage et moi, avant de l’enlacer de mes bras puissants, venant courber mon dos jusqu’à poser mon menton sur son épaule. Elle se blottit contre moi, acceptant malgré tout ma protection contre la fraicheur de l’océan. On reste là, immobile, à contempler la mer. La brise seule répond à notre silence commun. Il est bon d’être ensemble. Trop longtemps nous avons été séparées. Trop longtemps j’ai été otage qu’on lui fasse du mal. J’ai enduré bien des épreuves pour pouvoir la libérer. Et Uran a enduré des épreuves tout aussi terribles en attendant mon secours. Je m’en veux, mais en même temps, je suis soulagée. Ma plus grande crainte est que son regard ait changé après cette épreuve. Le premier jour a été un enchainement de réconfort mutuel tandis que mes blessures me faisaient souffrir atrocement. J’avais peur. Puis, j’ai vu que son regard avait gardé sa fraicheur et sa joie de vivre. J’ai été aveuglée par ça. Je n’ai vu que plus tard qu’il y avait quelque chose de change dans sa façon d’être, sa façon de me regarder ; quelque chose à changer en elle. Et je ne sais pas quoi. Plusieurs fois, elle s’est écartée de moi, le regard dans le vague, confronté à des émotions contraires.
J’ai peur de la perdre. J’ai peur de l’avoir perdu, déjà.
J’ai demandé à Kestrel, mais il n’a pas su me répondre. Les enfants, c’est le plus grand mystère du monde, qu’il m’a dit. Il s’en lave les mains. Je sais pourtant que ça le travaille. Toutefois, dans le fond, il a raison. Ce n’est pas à lui de s’immiscer dans notre relation, de la comprendre. Si je ne peux pas comprendre Uran, personne ne le pourra. Par conséquent, j’ai essayé de passer du temps avec elle, de parler de sujets divers et variés, puis de lui laisser le temps d’être seul et de mettre de l’ordre dans ses pensées. Parmi les sujets qui reviennent, il y a ces parents. Sa famille. Celle qu’elle ne connait plus et dont elle ignore s’ils sont en vie ou non. Son ton est maladroit et ses pensées sont chaotiques quand elle parle de ce sujet. Il est évident que ce n’est pas quelque chose de simple pour elle. Je ne la brusque pas. Je réponds quand elle souhaite me parler.
-Adri ? On va encore vers des ennuis ?
Je me mords la lèvre inférieure. C’est vrai. Il y a quelques jours, j’ai réussi à entrer en contact avec Ishii. Il va bien. Il continue sa quête de lutte contre l’esclavage. Il est quelque part, en mer, en route pour Imashung. L’idée est donc de le rejoindre afin de poursuivre la lutte. Qui dit lutte dit danger. Une fois encore, Uran ne sera pas en sécurité. Récemment, je me suis demandé s’il ne fallait pas la confier à Kestrel et Adler. Ils ne participeront pas aux événements sur Imashung. L’Église de la Juste Violence ne peut pas s’impliquer de la sorte. Je suis comme une bannie de l’ordre, j’ai ce droit. Ce serait un grand poids en moins dans mon cœur si je savais Uran loin du chaos des combats, mais une autre question se pose : doit-elle vraiment me retrouver à l’avenir ? Ma vie a été une succession de combat et de danger. Jamais je n’aurais droit à la sécurité nécessaire pour permettre à Uran de vivre dans l’insouciance. La garder avec moi, c’est la forcer à mener une vie que je ne désire pas pour elle. Je pense qu’elle en a conscience et ça doit la travailler aussi. L’Ordre pourrait surement lui trouver un endroit pour grandir en toute sérénité. Elle pourrait même vivre au sein de l’un des couvents de L’Ordre et embrasser, une fois grande, notre cause. Mais c’est un choix qui lui revient. Le choix de sa vie. Je ne peux lui imposer. Je ne peux pas ne pas lui proposer.
-Adri, je…
-Uran.
Je la coupe dans son élan. J’ai eu un mauvais pressentiment. Je ne sais pas si ça venait de mon seigneur, du pouvoir qu’il m’a donné ou bien d’un autre pouvoir dont j’ignore encore l’existence. J’ai préféré prendre les devants. Uran se tait, portant un regard inquiet dans ma direction, les yeux au ciel.
-ça va être dangereux. C’est pour ça que je veux que tu restes avec Kestrel et Adler.
-Rester avec eux ?
-Oui. Tu seras en sécurité. Je ne veux plus jamais que tu aies à souffrir de mes choix.
-Mais… on se reverra ?
Je me mords la lèvre en regardant ailleurs. Derrière, le soleil n’est plus. L’obscurité nous gagne. Ses yeux sont tels des phares dans la pénombre. Aux coins, des cristaux de larmes. Elle sait que la réponse ne la conviendra pas.
-J’ai eu tort de te faire vivre tout ça, Uran. J’ai eu tort. Tu mérites de vivre une vie heureuse. Kestrel te trouvera un endroit où tu pourras t’épanouir.
-On ne se reverra pas ?
-On se reverra, Uran. Mais pas tout de suite. Je viendrais te rendre visite, c’est sûr. Mais il est important que tu vives. Pas que tu survives à mes décisions. Tu comprends ?
-Oui… mais…
-Pas de mais, Uran, s’il te plait.
-Mais Adri !
Elle insiste. Elle résiste. Je la comprends. J’ai été son refuge. Sa grande sœur. Et je lui demande de m’abandonner. Moi-même, je me ne sens pas bien. Je sèche mes larmes avant qu’elle n’apparaisse. Je dois paraitre fort ou sinon, Uran aura raison de ma raison.
-Uran. Tu es un rayon de soleil. Et tu peux être un rayon de soleil pour bien des gens. Quand tu seras grande, je sais que tu feras de belles choses. Et je serais très heureuse de pouvoir t’aider dans ce que tu entreprendras. Je serais extrêmement heureuse de pouvoir être ton amie. Sincèrement.
-Adri…
Elle baisse le regard. Passer de grande sœur à amie, c’est une chose. Je mets de la distance entre nous pour qu’elle puisse mieux partir. C’est indispensable. Je la trahis, un peu. Mais elle comprendra. Elle est forte et intelligente. Uran détourne la tête et se débat un instant pour s’extraire de mon étreinte. Trois pas pour s’éloigner de moi avant de se retourner dans ma direction, ses larmes coulent sur son visage, une fois encore. Une fois encore, je la blesse. Je la blesse pour que je n’aie plus à la blesser à l’avenir. Et elle s’en va, disparaissant du pont, s’enfonçant dans le tréfonds du navire pour cacher sa peine. Je reste là, immobile, acceptant stoïquement la morsure glaciale de la nuit. C’est ma punition pour ses larmes. Et contemplant l’horizon, j’espère que l’avenir ne sera pas aussi noir que les ténèbres qui s’annoncent.