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Frozen Daïquiri







Je me livre ce soir, m’abandonne, aux pratiques païennes d’une autre ethnie assez frontalière. Au nombre de cinq, des bougies sont disposées autour de moi de sortes à coïncider aux branches d’un pentacle, absent cependant, mais symboliquement aux cinq animaux-totem fondamentaux, contestés par une seconde conception m’incluant, selon laquelle, il n’existe que quatre animaux principaux dont l’aigle parachève la triade “loup cerf tigre” commune des deux camps. Aujourd’hui toutefois, l’ennemi m’invite à souper autour de cinq, la tortue et l’ours s’ajoutant au prix de l’aigle, à la triade “loup cerf tigre” précédemment conjecturée. Pourquoi un changement si soudain, venant d’un moi si sûr pourtant ? La réponse est simple : je n’ai, aucune voix à suivre, aucune étoile. Mon but lui étant clair pourtant, être le plus influent qu’importe les moyens car à défaut d’en avoir. J’ignore comment m’y prendre. Une mythologie raconte qu’une divinité du nom d’Ariane, autrefois mis un objet en fonction, un fil, conducteur au sens propre du terme. Il me fallait ce fil conducteur ; mais par où commencer sachant qu’Ariane n’existe assurément pas, “suivre le fil d’Ariane” n’est qu’une expression familière. Je suis perdu. Regardez-moi, assis à équidistance de cinq mèches sustentées par des bougeoirs gorgés d’alcool. Mon alcool. Mon précieux élixir, sans compter concédé au savoir de mère nature qui m’est encore refusé, laisse mes rêves hors d’atteintes. Ici, je ne parait pas avoir inventer l’eau tiède, non, j’ai plutôt la sensation de faire page blanche, en fait je suis incapable d’écrire un mot sans ligne, d'esquisser ne serait-ce qu’une lettre. Mes mains oscillent, désireuses d’aventures et prêtes à entreprendre, se referment sur le vide, brassent le néant. Mon reflet dans les eaux chaudes du Lac Thérèse me lasse, tant il m’évoque rien. Je me regarde, m’y vois changer de position, prendre appuis sur mes mains apathiques...

Soudain je me lève en sursaut, hors de moi, balaye du pied flammes et bougies. Au diable les animaux-totems ! Les seuls véritables totems sont les quatre états fondamentaux de la matière, méritant d’être vérifiables et figuratifs ; les autres ne sont que charlatans, ils sont inefficaces. Je grogne un bon coup, décide de rentrer au bercail, encore loin du doute qu’à la seconde suivante, je tomberai nez-à-nez avec une créature si redoutée.

Son nom : le porc vapeur, relativement aux fumées qu’émane son corps au contact des températures hivernales ; conséquences thermiques dû à ses inhalations quotidiennes d’eau bouillante, quand l’air froid entre en contact avec sa peau, se produit un phénomène de condensation. Je parlais d’état de la matière avant cela : la condensation est un passage entre l’état gazeux et liquide. Le porc vapeur s’hydrate grâce au lac Thérèse, nous isolant l’un de l’autre en ce moment. Fameuse étendue aqueuse à Boréa, sujet d’une popularité n’ayant d’égal que sa crainte, vis-à-vis des monstres qui la convoitent pour nos même raisons quant à sa séduisante température, pouvant avoisiner les cinquante degrés celsius. Au travers de ses vapeurs, la bête me dévisage, et semble déterminée à en découdre si l’on se réfère à sa mâchoire apparente. Je m’approche d’elle comme qui approcherait un mur, enjambe la neige à pas francs ; à ma vue ses yeux transpirent d’appétit, malgré tout j’avance ma main impudemment, d’un manque de tact abject, droit au groin. “Insouciant” me diriez-vous en méconnaissance de causes, mais dois-je vous rappeler qu’un druide sommeil en moi ? Sincèrement, j'estime mon aisance désinvolte vis-à-vis de la scène, à un tiers résultant du fait que, je sois pompette ; en revanche, l’absence aberrante d’une réaction offensive de la bête, en adjonction aux deux autres tiers d’aisance, découlent de mes privilèges spirituelles de druide. Et vous avez bien lu, le redoutable porc vapeur reste de marbre en dépit de ma prestance. Je le verrais bien en liqueur, ceci dit. Bref je m’arrache d’ici, une énième fois retourne en ville me bourrer la gueule.





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J’arrive au Skell, de son nom complet Skellington, une auberge, se pomponnant fièrement sur sa première place à mon panthéon des bars. Je n’y rentre pas, préfère m'asseoir sous les guirlandes lumineuses qui clignent l’oeil au noël passé... Du rouge, du bleu, du vert ; des flocons blancs dans l’air ; je me réveille, ce n’était qu’un rêve, une chimère. Que vois-je ? Des gens autour de moi. Blouses blanches. Ce sont des chirurgiens. Ils agitent leurs petites mains, manipulent pincettes et ciseaux, entretiennent l'immense point d'interrogation flottant entre les lampes industrielles qui parsèment des murs en bois.
- Mon garçon ! Tu m’entends ?
La plus brève lueur n'enraye la rétine, je plane complètement tant mes veines sont une mine à morphine, au moins la douleur m’est plus soutenable. Je suis ventre ouvert dans un cabanon. Un homme m’opère, dans les règles, et semble être issu du milieu médical au vu du matériel professionnel qu’il emploie, rigoureux, soigné. Une sensation de confiance m’envahit, effectivement naïve, mais j’imagine être entre de bonnes mains. Il me rassure à travers son épaisse barbe blanche, sous ses airs de père noël moderne. Mais ces même lèvres compatissantes vont sans délai avorter mon enthousiasme, le chirurgien m’informe en effet, avoir retrouvé mon corps aux abords du lac en piteux état, inerte et depuis peu dépourvu d’un rein. Je descends aussitôt de mes hauts lauriers, et suite à moult tergiversions avec mon sauveur décide de déserter l’endroit toutes affaires cessantes. On se reverra, merci.

Je suis sobre, cela implique chez moi la sensation d’être écrasé entre deux sous-marins de souvenirs et d’aigreur. Jamais un moteur à aimant m’avait à ce point plombé le crâne. Je rejoins la ville, cette fois pour de vrai, mais sur les nerfs. Mes premiers soupçons se portent sur le réseau Ashura, potentiel véhicule de représailles à mon égard. Je réfléchis cependant, et vient à m’avouer que n’importe qui pourrait m’en vouloir, je n’en ai simplement plus le souvenir, force est de considérer fatales ce genre de répercutions étant donné mon train de vie téméraire. Peu importe. Je m’empresse de trouver une piste, d’ailleurs mes conditions rendent la tâche aisée, bien plus aisée qu’il en faut pour ce genre d’exercice. Je m’en rend compte. La sobriété prend soudain la forme du fil conducteur dont je vous parlais, c’est même une bobine ! De nylon ou de fer, je la sens qui serpente entre mes doigts, à toute vitesse, dans ma tête loin des tonneaux déferlent les idées, un ouragan d’idées, une tempête cosmique. Eurêka, l’envers de cette mascarade me vint comme une évidence : le porc vapeur n’était que mirage, hallucination, ses voiles d’eau opaques n’étaient en fait, que la traduction machinale d’un gaz soporifique bien tangible. Je retrousse chemin sans attendre, retourne sur mes traces chercher le père noël, il sait forcement où trouver un tel gaz anesthésiant, il sait, c’est un médecin à la retraite. Enfin je n’aurais qu’à remonter jusqu’à la source, trouver le vendeur d’un pareil produit pour en tirer des réponses, n’est-ce pas, le secret professionnel sera le cadet de ses soucis devant ma détermination pauvre en mots.

Deux minutes plus tard, se pointe à nouveau mon nez devant le bloc opératoire improvisé, verre en main m’ouvre Saint-Nicolas. Parfait. J'apprécie particulièrement ses airs de vieux marin tatoué, c’est un bon vivant, une bonne poigne, capable toutefois d’y voir au-delà de son rhum. D’ailleurs, il ne fit pas sept tours de langue pour m’accompagner dans ma quête, avec de bonnes sources sous le coude concernant l’arme du crime. Conformément à elles, notre nouvelle coqueluche est mon ancien camarade d’école de chimie, tributaire de l’académie de Jalabert. Et on s’y rend sans attendre.





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Laissez moi m’enfoncer une énième fois dans mes pensées, écoutez. Inutile de préciser mes orientations relatives à la justice actuelle. J’accepte pleinement ma soumission à celle-ci, pas faute d’en être contrains, nul ne l’est, à mon grand regret. Par contre, personne n’échappe à la justice originelle, la sélection naturelle, c’est dans nos gênes, on ne s’en dérobe pas, on nous l’impose. Qui l’impose ? Sans importance ; penchez vous plutôt sur son véhicule, vous voyez, elle régit au moyen de confrontations physiques entre deux êtres. Depuis la nuit des temps les espèces s'entre-tuent, se mutilent, souffrent pour espérer avoir une place dans la chaîne alimentaire. Révolue, l’homme s’impose une sélection next-gen, très similaire à la précédente ; sauf que, lui ne prescrit pas la mort aux faibles, mais les asservis ; il n'exige nul échange de coup, mais un échange de mots, d’argents ou de biens. Nous pouvons aujourd’hui obtenir ce que nous sommes. Le système est parfait, son administrateur n’est pas au point cependant, j’entends, le gouvernement mondiale. Incapable d’agir sur tous les fronts, n’étant pas Dieu, les seuls répréhensibles sont ceux qui refusent de coopérer : les pirates, les criminels, qui continuent à butter pour tenir la dragée haute, ils trichent.

Fanatique absolu du processus de sélection naturelle, je m’engage, à ne tuer que ceux qui lui nuisent, ceux qui m’enroulent une corde au coup, et les tricheurs.

Un tricheur, mon récent agresseur en est un, je vais mettre un thermes à son activité, n’en doutez pas. A ce sujet, j’arrive aux grilles de l’école de chimie, y pratique mon ancien camarade le métier de professeur, c’est ma première piste. Il m’ouvre les portes de sa salle de classe, impudemment, je pénètre dans ces terres fascinantes, partout des éprouvettes lézardent les murs, moi qui suis pourtant habitué à les manipuler me sens étouffé tant elles s’énumèrent au fur et à mesure que j’avance.
- Est-ce que tous vos élèves y ont accès ? A ce gaz.
- Oui, cependant, ce n’est pas un gaz de premier choix en vue des produits que propose le laboratoire. De plus, vos analyses de sang démontrent qu’il s’agit d’éther d’aiselfar, sécrétions d’une plante rare, davantage prisée des botanistes aux chimistes.
- Curieux…
- N’est-ce pas ? Vous devriez rendre visite au chloromancien, il n’est pas aussi dangereux que son alias ne laisse le paraître. Il pourra vous aider. D’ailleurs il te ressemble énormément Melchior. T’es peut-être simplement skyzo, qui sait !

Effrayamment probable, oui, je m’y connais en plante, mon absence de souvenirs est remarquable depuis plus de huit ans, et cerise sur le gâteau : je pense être un druide une fois enivré. Inquiétant, tout colle au personnage, me serais-je volé mon propre foie ? Pour quoi faire ? le vendre peut-être. Non, la simple idée que de vivre avec un seul rein, me procure une pénible sensation d’être handicapé, je ne la refoulerais même pas contre un milliard de pintes d'alcool.

Le père noël me dit ignorer l'existence d’un quelconque chloromancien au sein de l’île, aussi vaste soit elle. Logique. Celui-ci ne vivrait pas en zone urbaine conformément à nos sources, mais dans une ferme adjacente au chemin de fer du winterblade, un segment peu connu des gens exclu du cercle agricole Boréalin. J’imagine savoir de quelle ferme il s’agit, puisque moi-même, avait autrefois pour charge la sécurité de ce train hiémal, sous le blason d’agent policier de fer, la bête noire des pilleurs. Toujours accompagné, je m’achemine vers la gare de Jalabert, Bocande terminus, direction la ferme du chloromancien, un enclos à cochons en somme. Accrochant tout espoir d’obtenir des réponses, un indice, venant d’un homme si similaire à ma personne, j’ai hâte. Les portes du train se referment derrière moi, donnent la main aux moteurs à vapeur, battant les roues au contact du chemin fait à cet effet. Des hommes épuisent une quantité cyclopéenne de charbon, les vapeurs épousent la brume, peu sombres. Oui anormalement limpides, la vapeur éjectée du conduit de cheminée danse dans ces tons, bleus huile, phénomène peu classique. Bleu huile... Attendez, c’est une mascarade ! Je m’empresse de rejoindre la locomotive empêcher un désastre, mais percute les défenses d’un animal s’étant interposé à ma course. Un porc vapeur. Non, ce n’est qu’illusion. Je me roue de torgnoles, priant de pouvoir fuir ces chimères, mais force est d’observer que rien n’en change : je plane. Pourtant, tout rentre en ordre là haut. Bien sur ! Ce gaz, le même qu'au lac, est un outil phare du producteur de cochon, puisque l’un des effets secondaires connu de l’éther d’aiselfar, est l’apparition hallucinatoire de porcs sauvages, particulièrement appréciés des cochons d’élevage ; l’hiver s’étalant sur la moitié de l’année ici, la production de porc est singulièrement peu fructueuse pour ces éleveurs du grand nord. Mais à porté de porcs aussi sexy, les cochons d’élevage entrent aussitôt en période de reproduction, se mettent à tous copuler comme des bonobos. Leur aspect “fumé” n’a d’ailleurs, aucun lien avec les températures du lac Thérèse, c’est juste l’abondante sécrétion des aiselfars.

Un soudain regain d’énergie m’envahit, en sursaut, j’ouvre les yeux et tombe tête-à-tête avec l’extraordinaire, l’illustre chloromancien. Ce type me ressemble comme deux chiennes de goûtes d’eau, c’en est stupéfiant au point de reconsidérer la possibilité d’être encore dans les vapes. Paralysé, je me pince jusqu’au sang, mais rien y fait : c’est la réalité.
Moi sur mes gardes, lui sur les siennes, je ressert mes mitaines, il détache les siennes, je détache les miennes, Il s’avachit dans mes bras. Comme ça. Il me fait un câlin. C’est une blague ? le père noël n’ébauche lui, aucune réaction malgré le ridicule de la scène. Le personnel du train, dans les bras de Morphée, train qui continue de convoyer sans conducteur, mes neurones eux s'échangent du néant, je reste dans ses bras deux secondes, finalement le repousse et me dirige en cabine. L'heure des discutions s'impose, je requiert des explications.

Je chloromancien s’exécute aussitôt, raconte toute la vérité. C’est inimaginable. Il demeure convaincu d’être mon frère ; mon demi-frère exactement. Il s’appelle Syrius Aion, partage mon père, depuis peu jouit d’être sorti indemne d’une incurable maladie des reins, et m'est reconnaissant de l’avoir sauvé, à mes dépens. Pardon, reconnaissant ? Il se moque de qui lui ? Il est content, l’enfant de paysan, mais même la mort ne justifie pas les moyens, quand il s’agit de ma santé physique comme sociale, et maintenant, je vais me lever pour récupérer mon rein. Des tubes métalliques jonchent les lattes, vers lui je brandis l’un d'eux en moins de temps, qu’il n’en faut pour le dire, mais surprise, il riposte en moins qu'il m’en faut pour le voir. Sa supériorité est manifeste, je suis perdant ; même dans le cas échéant l’autre vioc, encore de marbre, m’aurait envoyer valser, étant donné qu’il est de mèche. Jusqu’à preuve du contraire, me voilà dans de sales draps.





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- Vous autres les nobles vous pensez fermement supérieur à nous, le tiers état. Mais voilà, la roue tourne, et maintenant ton erreur te coûte bonbon. (Syrius)
- Vous l’êtes, inférieurs.
- En justifie ta situations ?
- Ahah, ma situations relatif à quoi ? Développe !
- Relatif aux lois de la nature, tu sais, celles auxquelles tu tiens tant.
- C’est de brutalité dont il s’agit ici, pas de supériorité aux yeux de ces lois.
- Aux yeux de ces lois ? Ces dernières ne stipulent elles pas que les faibles meurent ?
- Tu ne comprends rien, les faibles aujourd’hui sont les pauvres, en témoigne qu’à cet instant ta force ne saurait rivalisé à mon argent.
- Je vois, tu comptes peut-être acheter les services d’un capitaine corsaire pour me défaire ?  En rien cela ne te rend supérieur.
- La puissance n’est pas physique, mais matérielle, ouvre les yeux. Les individus forts pouvaient se venter de manger, peut-être, mais à l’état naturelle. Dorénavant la satisfaction s’achète plus facilement qu’elle ne se chasse, et tous les deux savons, que cette satisfaction n’est qu’une marche vers la survie, but absolu des lois de la natures. CQFD
- Tu as l’air… Tellement sûr de toi. Cessons la théorie, démontre moi ta pertinence, passe à la pratique ! Allez, montre moi que tes chances de survies sont supérieures aux miennes.

Qui n’arrive pas à comprendre l’expression “perdre son sang froid” est demandé au wagon immatriculé OG-9, je ne répéterai pas. Les yeux de Syrius s’assombrissent au sens propre, devant moi, comme par enchantement, je crois être témoin d’une étrange magie noire. Au secours. Il empoigne, le manche d’un frêle katana qui pendouille dans son dos, me laissant l’impression d’être à sa merci, désemparé, une puissante angoisse me visse au sol. Un détail cependant m’interpelle, les nuages d’éther passent du bleu métallique, vers un gris bien plus drastique ; j’en conclu les faits : un second gaz s’est joint au bal des spores, ses effets ? anxiété, crise d’angoisse, panique. Sa réputation au titre de “chloromancien” n’avait, jamais eu autant de signification à mes yeux, mêlant sabre et trouble des sens, son style de combat se présente être une authentique arme militaire. Mais pour autant, sa démonstration de force ne lui donne pas raison, et demi-frère ou non, l’homme qui se dresse au dessus des containers, n’est pas légitime. Je vais l’anéantir, le démolir et récupérer mon foie sans diplomatie, j’en suis contrains cette fois. Trêve de précipitation, je n’ai pas main mise sur la situations, toutefois sais que ses intentions ne sont hostiles, puisque lui même stipule m’être redevable. Je me braque :

- Arrête arrête arrête, c’est gagné, tu as gagné, range ton sabre s’il te plaît.
- Je ne suis pas ton esclave, moi.
- Oui. Apprend moi, apprend moi à manier le fer comme tu le fais, apprend moi les espèces de plantes qui trompent nos perceptions, apprend moi.


Si Syrius s’en réjouit, c’est qu’il ignore que l’avenir lui réserve de sombres desseins, pensant ma réaction être le fruit de ses techniques botaniques, loin du doute que je sois réellement déterminé à les apprendre. Son niveau n’est pas tant éloigné du mien, et pourtant, il me suggère une remise à niveau, acceptée. Je n’aurais jamais pensé articuler les mots suivants, mais j’ai un maître dorénavant ; sans rapport avec l’esclavage, celui-ci est maître expert en arts martiaux, et n’est autre que le père noël. Curieux individu, je cerne mal ses intentions ; il prétendait m’avoir retrouvé gisant à même le sol, laissé pour mort, auquel cas il trahirait sournoisement son premier disciple, Syrius, en me remettant sur pieds. Ce dernier, devrait être au courant des imprévus, mais curieusement pourtant, n’évoque pas la moindre référence relative aux évènement du Lac Thérèse, me mène à croire qu’il avait lui-même suscité ma guérison, sans quoi le vieux ne m’aurait pas opéré. Cette version justifie notamment la scène précédente, où il semblait au courant de ma venue ici. Alors dites moi, pourquoi son maître en prétendait le contraire ? Je crois qu’il trompe sa confiance. J’ignore dans quel camp il opère, à qui sont destinés ces jeux de coulisse, malgré tout je reste silencieux ; peut-être est là mon erreur, mais pourquoi se risquer quand tout nous sourit.

Ce soir je crèche à la ferme des deux protagonistes, y voit enfin l’éther d’aiselfar appliqué sur ces cochons auxquels il est destiné. Saint-Nicolas m’explique autour d'un verre, sa provenance et la raison d’être d’un produit si atypique, je m’y intéresse. L’éther de cette plante, résulte de ses intentions d'échapper au prédateur, un champignon, dont se nourrit majoritairement les cochons d’élevages pour sa teneur en protéines. Quand les porcs sont en période de gestation, les mâles s'empressent d’amasser autant de champignons que possible pour satisfaire les femelles. Plus celles-ci mettent bas, plus ces champignons disparaissent, plus l’aiselfar peut jouir de subsistance. Vous l’aurez compris, son éther est un ingénieux mécanisme d'autodéfense, exemple des choses qui entretiennent mon amour à l’égard de la nature, de ses défenses, sa capacité à s’adapter, et de nuire à ceux qui lui font ombre. Je regarde alors le père-noël, lui rétorque que l’aiselfar est effectivement, une plante qui représente parfaitement l’allégorie qui fonde ma philosophie ; parfois la nature emploie la ruse, c’est ce qui m’inspire. Je suis un aiselfar, et commence à être pompette.





Dernière édition par Orion le Dim 1 Nov 2015 - 16:03, édité 6 fois
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Une nouvelle journée d'entraînement commence aujourd’hui, je m’obstine à enivrer mon estomac, verre après verre, m’évitant une nouvelle gueule de bois. Je ne suis pas de ceux, qui après quelques verres, flageolent entre aplomb et sol, se tiennent à un angle presque aigu du plancher, semblant porter tout le poids du monde, prêt à régurgiter leurs boyaux. L’alcool ne me donne aucun fil à retordre, je ne “subis” pas l’ivresse, ne transporte pas mon corps, n’élude pas le relief en tirant sur mes jambes. Non. Pour moi perdre le contrôle n’est pas synonyme de lutte, je reste un enjoué luron envers et contre tout. Si l’on en croit les dires de mon demi-frère, mes abrupts mouvements incontrôlés sont extrêmement trompeurs. Ils véhiculent un aspect aléatoire, involontaire, nous tentent à abandonner nos gardes, rendent naïf. Mon ivresse demeure une légitime alternative aux puissants gaz dont il use, mes adversaires s’endorment à ma vue comme à celle d’un pendule en spiral, paraissant basculer.

Deux semaines d'initiation au combat me suffirent pour passer à l’étape suivante du programme, je peux dorénavant prétendre tenir tête à Syrius, son expérience relative aux âges demeure l’unique donnée nous départageant aujourd’hui. Lui et moi sommes sujets d’une chaleureuse entente, le temps avait dissipé nos conflits d’idéaux. La suite ? Faire front à d’authentiques adversaires, doués de techniques bien abouties, bien que cet univers ne nous soit non plus pas anodin. Compte tenu de nos puissances respectives et assimilées, élaborer un gros coup ne semble en rien farfelu ; le vieux nous envoie parcourir l’île de fond en comble, à l’image et la manière de deux chasseurs de primes inassouvis, décidément résolus à décrocher les têtes du siècle.
Mais après seulement, s’être livrés à un ultime duel nous opposant, Syrius contre Orion ; souplesse contre entourloupe ; fraîcheur contre expérience ; deux demi-frères que tout confond à l’exception d’une couleur de poncho, et d’un chapeau de cow-boy.

Le père-noël disperse ses cochons à l’extérieur de l’enclos.
- A ma gauche, Syrius !
Dit “le poncho rouge” entre ces clôtures, progresse sur le ring en souplesse et tournicotant sa barre de métal avec rigueur, son adresse n’a d’égal que son raffinement.
- Et Orion, à ma droite !
Moi-même. Dit “le poncho bleu” par opposition, un fût sous l’aile. Je manque de chuter en m'emmêlant les pattes tant mon estomac est plein d’alcool, sans grâce, je m’avance au centre de l’espace en traînant mon arme derrière moi. Remarquez le contraste entre nous, son entrée n’est pas aboutie que déjà, je porte un coup effréné dans ses gencives, sans retenu. Les rageux diront “déshonneur”, les plus avisés comprendront la cautèle. Même après plusieurs centaines de duels semblables à celui-ci, Syrius reste incapable de prévoir mes coups. Je garde le fil, riposte, pare le moindre coup ; l’aptitude pédagogue du sommeil semble porter ses fruits. Je suis gagnant, dirige des coups sans semblant à hauteur de ses jambes. L’adversaire se dandine à même mon tube métallique, je suis, le chef d’orchestre de ses mouvements contrains de suivre mes désirs. Toutefois mon endurance me file entre les doigts, le maniement d’une arme aussi imposante semble m’exténuer précocement. Syrius et sa danse du soleil prennent finalement le dessus en thermes d’usure, poncho rouge riposte au moment propice, me fait basculer au sol. Je baisse les bras, déçu. Il n’est pas ardu de me mettre au tapis, étant donné mon état d’ébriété. Pourtant cette fois, je le sens, le gland n’est pas tombé très loin du chêne.

Nos petits duels sont extrêmement équilibrés, à en démentir celui-ci. Je me relève, l’heure est aux adieux. Syrius et moi faisons bagage, car bientôt, nous partirons traverser au minimum Boréa, en quête de criminels primés.





Dernière édition par Orion le Dim 1 Nov 2015 - 16:04, édité 8 fois
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Syrius et moi grimpons de nouveau à bord du couperet d’hiver, glissant sur ses rails comme luge sur verglas, en sens inverse cette fois. Direction Lavalliere. Le titanesque mais unique port de Boréa, décidément, je levais le camp d’un élevage de porc pour un abordage de port, en porte à faux sur notre itinéraire. Dans notre wagon, des armes partout autour de nous, sous nos fesses, dans des box empilés les un sur les autres. Faisant anciennement corps élitique de la Police de fer, responsable du bon déroulement des convoies du Winterblade, je suis naturellement convié à “emprunter” de tels bijoux mécanisés. Comme si ces caisses pleines d’artillerie ne suffisent pas à nous encombrer, je trimbale moi-même deux fûts gorgés d’orge et de houblon à mes soins fermentés, de la bière. Alias binouse.  

J’arrive au quai de gare, Syrius s’est endormi sur sa caisse. J’improvise par conséquent, accoste les sillages à l’instar d’un navire marchand, transporteur de cargaisons, deux tonneaux sous l’aile, une caisse d’armes sanglée sur mes omoplates étayant le sommeil de mon coéquipier. J’aborde un pleutre se tenant en face, un héraut de l’aurore comme on les nomme, ceux-ci sont des vaillants membres de la milice responsable de notre accueil. La prestance qu’il nous propose ici n’est pas sans charme. Il m'emmène effectivement dans une auberge, démontrant ses effets ensorcelants sur les alcooliques du coin, cause d’en être leur inestimable repère. D’ailleurs, les querelles de brigands en son sein n’y sont pas en reste, et s’avèrent être un eldorado des chasseurs de primes, une parfaite case terre pour notre marelle. Je m’y rend aussitôt, enfonçant foule marines et pirates, histoire d’être davantage dans le collimateur de ces derniers, les pirates. Opération aboutie avec succès, puisque en effet, à peine une heure dans la métropole maritime, que déjà toute une ribambelle de ces crevards désireux d'empocher la caisse d’armes sont à mes trousses ; je cours sur les toits, jusqu’à atteindre le seuil de cette fameuse auberge. M’y voilà au bout d’une dizaines de minutes, de passage aux rues les plus craintes, le dos jonché d’un box franchement orné d’un tampon notifiant “(!) armement destiné à la 157e division”, de caractères rouges et notables sur une portée hors de mesure. Un aimant s’approchant d’une plage en limaille de fer. Je suis tout juste arrivé à l’auberge, que déjà le volume d’or analogue aux primes épinglant chaque corps qui m’entoure ici, est aussi lourd que le sommeil de mon demi-frère encore avachi sur la caisse d’armes. Cette dernière est respectivement disputée par ces deux camps, l’un veut les armes, tandis que l’autre en a besoin pour dormir dessus. Inutile de vous préciser qu’une seule question sème le doute en ces lieux : qui va emporter la caisse. Je m’en soustrais, la dépose au sol encore tremblant des jambes prêtes à sauter en sa direction. Enfin Syrius ouvre les yeux, s’étire sans égard à la tension qu’il suscite autour, encore loin, de se douter du sors qui papillonne tranquillement au dessus de lui.

Vous pensez sans doute qu’à son réveil, les pirates environnant la scène se roueraient sur nous avant d’être éliminés un par un. Pourtant, vous comme Syrius ignorez tout de la situation. Rappelez vous des inscriptions “(!) armement destiné à la 157e division” ; ce n’était que le chapitre d’un plan plus vaste et longuement mijoté... Bien tenté Syrius. Mais bientôt, je vais écraser cette barre métallique à l’arrière de ton sale crâne, t’assommer mon coéquipier, avant même que tu ne dégaines ton arme ; et après quoi, chacune des raclures que j’ai corrompu, m’aideront à te ligoter fermement. L’occasion tant courue de récupérer mon foie aux même moyens que toi, ma victime, de force.





Dernière édition par Orion le Dim 1 Nov 2015 - 16:01, édité 4 fois
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Mon plan déjà demeurait efficace, chirurgical, et duveteux sans compter l’aide précieuse d’une connaissance amicalement spécieuse, longtemps sujet à rivalité quoique cordiale, un pirate, un voyou, un adversaire presque logique finalement, le foie ultime : Mina Hable. Sa puissance physique (force) doit égaler celle de Syrius, ce dernier n’ayant pour peu dire, maintenant aucune chance de s’en sortir. Lui et moi partageons étroitement une passion commune, nous marchons sur la même corde : l’alcool est le gouvernail de nos deux vies. D’ailleurs j’en propose une goûte à Syrius, qui les yeux gonflés, prolonge ses étirements de manière excessive, abusée, presque grossière tant il force sur ses phalanges. Sans doute de quoi apeurer ses adversaires, ignorant même l’ombre du prochain dénouement.

Il mêle ses doigts en les croisant, avant de soulever ses deux paumes le plus haut possible, propose à chaque ouïe le carillon des vertèbres qui se disloquent l’une après l’autre de sa colonne. Je profite de l’angle pour lui administrer un malin croche-pied. Il bascule. Ses talons n’atteignent plus la surface du sol, Syrius est en apesanteur à hauteur seulement de quelques secondes, quoique suffisantes pour terminer mon enchaînement. Son corps n’est même pas parallèle au sol que déjà, je lui subtilise agilement la barre métallique qu’il maintient au long de sa hanche dès lors sous la contrainte du vide, pour ainsi conclure en lui engluant son arme au ventre. Mon demi-frère heurte le sol violemment ; la surprise fut mon fer de lance. Il se relève sous le brouhaha des pirates mercenaires, ne marquant aucune attente pour foncer en sa direction, quand soudain un homme vint s’opposer à leur course: le père noël. Il se présente ici comme son sauveur, mais qu’est ce qu’il trafique dans un moment pareil ? Je commence à comprendre, comprendre que ma place prend la forme de celle de l’arroseur arrosé.

Le père noël. J’ignore son vrai nom. D’ailleurs il préfère qu’on le surnomme comme bon nous semble, milite sans raison évidente pour perdre son identité. Son opération semble fructueuse, puisque en effet vous comme moi nous égarons en ce qui concerne son rôle dans toute cette histoire. Il me sauvait d’une blessure au début, prétendant ne pas connaître le responsable qui s’avérera plus tard, être son élève en art martiaux et mon demi-frère, tout bonnement. A ce sujet, tant Syrius que lui ne daignait, à l'instar de deux pêcheurs adjacents démêler leurs fils, me laissant croire qu’en fin de compte ni l’un ni l’autre ne souhaitait en découdre. Ils fermaient respectivement les yeux sur cet accrochage, se bornaient à attendre qu’un poisson morde à l’hameçon en sachant tous deux, qu’ils ne pourraient pas le moment venu tirer sur le moulinet. Seul moi en avait connaissance ; connaissance cependant qu’ils me laissaient croire. En effet, Syrius avait volontairement coupé son fil, pour qu’un poisson se prélassant sur son aise sournoiserie, morde à la vu de ces deux fils emmêlés, loin du doute qu’ils ne le sont pas réellement. Bien heureusement pour eux, ils n’avaient pas confiance en moi, le poisson... Et jusqu’ici leur stratégie de défense est un succès, mais ça, c’était son compté toutefois la présence de Mina Hable. Effectivement les autres pirates étant presque en surnombre pour le barbu hors d’haleine, tentant de sustenter aux assauts de cette horde, son protégé est supposé m’affronter armes égales. Mais il finit la jambe endigué dans ce dernier sous-piège de taille: Mina Hable ; tandis que l’horizon voit ma main lui imposer son entrave. Sur ce coup, l’arroseur arrosé avait son parapluie.





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Nul n’avait su tirer les cartes relatives à la machine Syrius - père noël. Le maître et son premier disciple, au service d’une cohésion tant au combat supérieure à celle de jumeaux siamois karatékas, qu’au stratège de deux jumeaux magiciens ; elle repose entièrement sur la dualité même. Une confiance sans faille. Se dessine alors un tableau assez classique ici : mis de côté puis défavorisé face au cadet, l’élève aîné, malgré les derniers dénouements s’avère finalement être le plus fidèle tandis que le second élève devient, relativement aux doux principes de l’amour fraternel de l’équipe, antagoniste, le traître. C’est moi. D’ailleurs ce n’est pas une position évidente en connaissance de cause, dois-je rappeler qui a commencer par voler un organe à l’autre. En m’intégrant dans leur cercle, ces deux crapules n’avaient rien d’autre en tête que de me ménager sans baisser garde.

Amusé face à la défaite de Syrius, je remarque soudain que le père n’est guère moins habile que Mina pour mettre ses adversaires au tapis. Dans l’action je m’empresse d’empoigner la première arme qui s’offre à mes doigts : une pièce de tuyauterie incurvée en son extrémité, semblable en moindre mesure à celle que manipulait brillamment le célèbre Sabo, disparu depuis la troisième grande guerre. Me voilà déboulant plein gaz vers mon ex-maître en arts martiaux, déjà encombré par l’autre grappe de brigand. Ceux-ci évacuent mon champ de vision au plus bref coup d’oeil, laissent place à une vague de panique s’abattant sur l'adversaire. Ce dernier, pris d’effroi, se décale avec quelques notes d’hésitation, encore sans prévoir qu’en seulement une seconde sa hanche serait dévorée par la cavité de mon tuyau, puis happée du mouvement prompt et sincère de mon bras. Je le soutire ainsi de sa position vers la mienne, ne lui laisse aucune chance de riposter. Bien que son coude aboutisse sa folle course dans mes gencives, je n’ébauche nul expression susceptible de trahir ma détermination, l’ivresse est là la seule chose que je me laisse faire paraître ; c’est ce qui engendre cette allure, à savoir des mouvements incontrôlés et exagérés.





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Oeil pour oeil, dent pour dent. Les coups s’échangent et se rendent entre Mina Hable et Syrius, balle au centre, tandis que j’écrase à plate couture le formateur de ce dernier. Force est de constater que les attaques de mes précédents lui donnaient déjà du fil à retordre, des goûtes de sueurs mielleuses succèdent son habituel regard savant et olympien ; l’élève n’a peut-être pas surpassé le maître, mais sa transpiration puante de crainte est pour moi une victoire aux rares égaux. Suite à ça, il décide de vendre sa dignité contre une pause, le temps pour lui d’appuyer moralement la plaie. J’avorte mon assaut de folle cadence, lui laisse alors reprendre son souffle. Aucun échange de mot ne remplace les coûts. On fait un break, seul les cris de Syrius quelques mètres plus loin viennent s’opposer au silence total. Je reste stoïque devant sa soumission qu’il cherche à effacer se redressant. il ôte son pull, passe sa main sur son front avant d’avaler un océan de salive et de glisser sa main derrière lui pour attraper ce qui s’apparente être une arme à feu, pour enfin ricaner bêtement. Il dirige le canon vers mon visage, tâche d’aligner mon nez rougeoyant en réponse à l’alcool, avec sa visée. Son poignée tremble encore, alors que son doigt pourrait accidentellement glisser sur la gâchette tant il transpire, mais ne flanche pas. Tant pis. Je lui lance un regard d’ivrogne, enfantin, avant de hausser rapidement ma lèvre inférieur et mes deux épaules, en un temps. Je tend mon bras parallèlement au sol en sa direction, puis mon pouce, enfin plie l'annulaire et l’auriculaire de sorte à ce que mon poing adopte la forme d’un pistolet. La scène est absurde mais respecte mon style de combat axé sur l'inattendu. Quand pour d’autres yeux je ne serrais qu’un ivrogne, les siens restent étonnamment impassibles en connaissance du traquenard, effectivement depuis le temps, mon adversaire connaît parfaitement ma science du combat décalée.

(Moi) - Petit papa noël… Quand tu descendras du ciel. Avec… Tes jouets par milliers. N’oublie pas… Hic. Mon petit soulier.
*pchhhhhhh…*


Distrait par la scène, Mina Hable se laisse surprendre et concède à mon demi-frère l’opportunité de l'assommer d’un coup de barre en fer, tandis que succède au son strident émit par un dispositif, une infâme purée de pois qui se décharge autour de moi à l’instar d’une onde. Il tire devant lui, je m'échappe tactiquement. Personne n’était préparé pour ça, je sauve ma peau au prix d’un allié peu négligeable, maintenant au tapis. L’entourloupe ici administré par mes soins, est en fait paradoxalement le fruit d’une bombe chimique conçue grâce aux connaissances de Syrius lui même. Je décide de fuir toutes affaires cessantes, mais c’était sans compter la réactivité de mon demi-frère. Une barre de fer en guise de ligne d’arrivée, ma traître course se termine sur un “la mineur” soigneusement joué par le contact surfacique relatif à mon crâne et la barre de fer. Je suis sonné, néanmoins, je trouve l’occasion de répondre et parviens à riposter. Syrius demande alors à son formateur de rester en dehors de cette querelle, jugeant qu’un combat équitable s’imposait comme une évidence ici pour enfin clore nos deux interminables perfidies n’ayant qu’une fin : mon foie. J’accepte ses conditions.

Le combat commence. J’avance vers lui n’importe comment, mes bras pendouilles et balancent aléatoirement. Non, Syrius ne se laisse pas leurrer, à la place me propose un coup vertical que je pare sans grande difficulté. Je ne cesse d’être impressionné par sa force bien qu'estompée par sa lutte contre Mina, elle se mêle à vitesse et précision ; mes armes face aux siennes ne sont pas légions, mais nul ne saurait nous départager à ce stade. Il frappe, je riposte, le même schéma se répète sans trêve, encore et encore, je lui tiens tête d’une manière qui s’apparente à une chance incroyable. Quiconque assisterait à la scène hurlerait au miracle, “cet homme à vendu son âme au diable” est une remarque récurrente, on se demande, comment un sac à tise tel que moi est capable de riposter sans même regarder devant lui. Chaque mouvement hasardeux que j’injecte au combat semble être involontaire, je suis, le pantin de quelque chose qui vous dépasse. Si la nature dans sa globalité était douée d’intelligence, donc consciente de chaque réaction qui lui font corps, alors le hasard n’en serait plus, n’est-ce-pas ? Vous venez d’imaginer le prodigieux pouvoir du druide…

L'extrémité de ma pièce de plomberie s’emboîte, dans le manche d’un sabre, tombée du récent combat impliquant les pirates armées à mes ordres. Je récupère ce précieux attirail dans mon autre main, et de deux coups consécutifs presque ponctuels, met un terme à la symbiose entre lui, son bras gauche, et enfin sa jambe du même flanc. Ma transe divine s’achève sur cette note macabre, puis sur un silence plus cisaillant encore que ma lame, maculée de ses liens charnelles. Syrius tombe à terre comme une part de flanc, le temps pour moi de récupérer celui qui m’appartient. Un organe contre une potentielle vie, fidèle au principe instauré au préalable, à savoir la loi de talion, je lui délivre le même sort qu’il m’avait réservé ; sa vie est entre les mains du même homme, pour les même raison, mais avec intérêts. L'instant est douloureux en dépit d’une victoire si excitante, la phase descendante de l’ivresse entraîne pour moi comme pour grand nombre une irritabilité surélevée, dans mon cas accompagnée de la possible mort d’un être qui partage le même sang. L’heure est au tourment, tout semble brouillé, le père noël transporte péniblement le corps de son premier élève, le deuil précoce semble pour lui une option plus prometteuse que d’apporter les soins nécessaires à son élève encore avachi dans ses bras. Une situation profitable pour Mina Hable qui siphonne sans retenue mes deux fûts de contenu spiritueux. La brise capture nos moindres sanglots dans ses cages de glaces, tandis que la neige absorbe progressivement les courbes écarlates qui tapissent fraîchement le sol au côté des pirates défigurés. Je me dirige, vers l’un d’eux qui redouble d’effort pour ne serait-ce que bouger un doigt, un pas derrière l’autre raisonnant dans les dunes hivernales. Brusquement je soulève celui-ci par le col avant d’enlever sa vie à coup de poings, devant les yeux de mère nature assistant à la scène, qui j’en suis sûr n’en éprouve que du dégoût.





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Savent qu’aucune gueule cassée gisant au sol n’eût été défait par moi, les membres du premier groupe de charognards, s’affolent vers ma position. A savoir deux chasseurs de primes, un homme et son neveu fraîchement ravi de douze bougies. Ils sont ici pour empocher la caisse, s’approprier la tête des primés encore comateux. D’ailleurs le plus vieux attrape un den den mushi à son effigie, c’est son informateur, et celui-ci réclame un état des lieux au deux arrivants :
- Tes sources étaient fiables Azrael, le vieux griveton respire sur les dents, c’est bien le responsable du massacre des cibles. Avec la cuite qu’il s’est mise, Mina Hable n’est plus un obstacle. Le troisième ? ahahah... lui s’est carrément démerdé pour réunir à lui seul l’état des deux autres loustiques ; c’est une épave ! Mais écoute bien Azrael ahahah… Le dernier remporte la palme d’or dans la compétition des déchets : car il est mort !
L’homme et son interlocuteur se plient de rire, la terrasse du bar passe du drame à l’euphorie, d’ailleurs l’éclat ne m’épargne pas non plus. Mina Hable encore épouse les goulots des lèvres, tandis que nous autres rions à gorges déployées ; même quelques pirates préfèrent dépenser leurs dernières forces pour rire plutôt qu’à essayer de se rétablir. Le père noël cependant ne daigne rire d’une scène si malsaine, dépose le corps de Syrius contre la clôture éternellement recouverte de neige. Il se remet sur pieds enfin. Ces derniers semblant drainer toute son attention vers eux, c’est qu’il nous laisse deviner du moins, sous sa dense crinière mouchetée d’hémoglobine voilant son visage. Mais soudain, il découvre ses yeux jusqu’alors invisibles, replace sa colonne perpendiculairement au sol, coeur serré, avant de gémir comme une hyène malade. On entend ses enjambées qui broient les sous-couches de verglas. Il entame une course de trois secondes seulement, vers ma personne, mais de nouveau s’arrête à mi-chemin. Il se fige, conformément aux hommes des âcres températures défunts, encore bloqués dans leurs cercueils de glace aujourd’hui. Mais lui contrairement aux autres vient tout juste de mourir d’une crise cardiaque, ici. Au beau milieu des lames et des balles, le père noël vient d’être assassiné par le fer du temps. Comme quoi voyez vous, mère nature se montre exigeante parfois. Peut-être estimait elle que sans son intervention, c’est moi qui serait mort de ses mains, j’en doute cependant. Le silence nous impose son régime quelques secondes, mais se voit brusquement renversé par celui des larmes et des pleures, ou plutôt… Des pleures de rire. Le chasseur de primes et son interlocuteur “Azreal” riaient aux larmes déjà, mais là, c’est la cerise sur le gâteau. Après Syrius mort au combat, c’est au vioc de succomber d’une crise cardiaque absurde, juste sous leurs nez. L’homme au téléphone ri à s’en décrocher la mâchoire, celui en face de moi reprend son calme peu à peu, pour couper la ligne enfin. Il passe soigneusement les doigts dans ses cheveux jusqu’à sa nuque, tourne la tête vers son neveu, d’un air impatient…
- 8 090 000 Berrys ! - Hurle ce dernier, le neveu.

C’est la somme des primes de chaque voyou rampant au sol. Le gamin baisse la tête, soulève bravement son poing vers le ciel nuageux, sa fermeture éclaire à son tour carillonne en contact avec sa hanche. Que cache-t’il dessous ? Je l’ignore, mais sais toutefois que plus haut, sommeil une petite graine de génie. Ce gosse est en mesure effectivement, de mémoriser sans compter n’importe quelle donné au simple coup d’oeil. Auquel cas, qui est étiqueté d’une prime au sein des blues, est inscrit comme sur une liste quelque part dans son petit crâne, où qu’il soit. Ces deux guignols vérifient le tableau presque classique du génie et du bourrin écervelé, quoique le premier me paraît avoir plus d’un tour dans sa manche au dépit des apparences. L’oncle lève le pied, commence ses jeux de vautour en nous ignorant complètement, ça malgré notre implication dans son butin. Peu mérité. Il ramasse les corps l’un après l’autre, mort ou vif, sur son épaule mais sous les yeux autoritaires du plus jeune se révélant bien être son supérieure hiérarchique, malgré l’écart de générations. C’est le cerveau. Tandis que l’autre paraissant en être dénué, entasse de manière aléatoire tout ce qui possède deux jambes dans sa charrette ; les morts sur les blessés, les blessés sur les morts, peu importe. A compté du neuvième corps la brute s’approche enfin de Syrius, y défi la brise enfouissant ses mains trapues en quête d’une prise pour soulever l’éventré sans se salir. Inattendu. Ce dernier lui saisit la main en premier, avant de soudain bafouiller ces quelques mots :
- Ne me laissez pas comme ça s’il vos plaît...





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A défaut d’être céleste, de mes mains justice faite n’est pas parfaite, et je regrette déjà mes actes envers mon demi-frère qui certes a mérité ses séquelles, mais non les souffrances qui en résultent. Un retour de bâton peut-être, mais qui toutefois s’est changé en tronc avant son retour ; action légitime aux yeux de mère, mais durement admissible pour moi en tant qu’être humain pourvu de compassion. Vous contemporain avez effectivement tendance à penser qu’un individu sage, et vantant la justice naturelle à celle de l’homme est une bonne personne, bien. Maintenant, imaginez cinq secondes seulement qu’une autre espèce que l’homme, serait aussi prospère que nous à cette époque. Puis dites moi sans sourire, dites moi que leur monde serait plus bon que celui dans lequel nous vivons aujourd’hui. Voyez vous, c’est impossible car nul autre que l’homme a pitié des plus faibles. En tant que fils de mère nature, mais homme avant tout, j’ai pitié de mon demi-frère comme quiconque. Je me dirige alors sans plus attendre vers ce dernier, lui infuse oralement une quantité importante de liquide aux vertus antalgiques. Enfin j’interpelle le chasseur de prime, le plus jeune.
- Hé ! Connaissez vous… Hic, quelqu’un en mesure d’aider mon demi-frère ? Aidez-moi. Si vous m’aidez toutes ces primes sont à vous !
- Tu plaisantes ? Ces 8 090 000 sont déjà à nous… Pourquoi t’aiderais-je ivrogne ?
- D’accord c’est à vous.


Je ramasse la barre métallique en manquant de chuter sur mon demi-frère qui galvanise dans ses draps de poudreuses, fonce tête baissée sur le chariot plein de pirates des deux hommes. Le neveu m’adresse sereinement la parole, sans une note de panique…
- C’est inutile, je vais vous aider, mais à vous d’accepter les risques.
- Quoi ? Quels risques ?

L’enfant soulève son t-shirt de bas en haut, ainsi dévoile une curieuse plaque de métal qui ceinture l’intégralité de son bas ventre. Comme une armure classique, celle-ci est à l’avant pliée en formes de muscles abdominaux, atténuant la disgrâce d’une dizaine de petites trappes parsemées tout atour. Je m’attends à voir l’enfant extirper du matériel médical de ses cachettes, quand soudain, des lames pointues surgissent comme des vipères de part et d’autre. Je reste de marbre tandis que l’alcool me parait décupler la gravité terrestre. Pas de panique me dit-il, car c’est ce à quoi devrait s’apparenter mon frère après son intervention, un cyborg. Mon demi-frère est loin déjà dans le monde des rêves, il n’est donc pas en mesure de donner son avis. Alors j’accepte les conditions sans plus tarder, avant que son sang ne s’écoule davantage, et se fusionne à la neige insensible aux violentes tergiversions humaines. Les heureux gagnants au jeu des primes filent comme deux gueux sur leur carriole bancale au repère familiale. J’espère revoir Syrius à défaut d’y croire, une espérance peu soutenu en vu des traces de sang délinéant la route. Le tableau symbolise mon avenir avec brio, une route, dont l’horizon s'estompe dans la brume, soustrait l’avenir à mes connaissances, me laisse enfin derrière la violence pour seule guide. Ils s’enfouissent dans le brouillard. J’emboîte le pas.

Mon prochain périple attend non loin, cette fois je respecte ma part du marché avec Mina Hable, c’est à mon tour de lui rendre service. Rien d’extravagant, Mina est un pirate avant tout. Je lutte contre la piraterie. Mais il s’agirait ici de travaux non payés, qu’il devait lui-même exécuter autrefois ; là encore un service à rendre, me revenant naturellement par transitivité. De quoi me distraire durant la guérison de mon demi-frère, je retourne entre quatre clôtures, loin des porcs de coup-ci, mais au rude contact des noix de Boréa. Celles-ci sont une ressource superflue pour l’île hivernale, mais conservent toutefois leur importance au coeur de l’assiette des plus nobles habitants de la capitale, depuis plusieurs siècles, et ce malgré leur onéreuse production requérant plus d’une dizaine de main pour briser l’impitoyable coquille qui les enveloppe. Dans les fermes à noix, des hommes chevauchent ce fruit haut de trois mètres. Les plus gros peuvent atteindre dix mètres de diamètre, sous leur intrépide coquille de trois mètres d’épaisseur. Ces fruits secs et incassables font relativement l’apologie du faussée régissant entre les nobles et les autres. Il faut la sueur de dix hommes pour amuser la gueule d’un seul. D’ailleurs, me voilà de l’autre côté du mur social, usant maintenant du marteau à des fins différentes que l’art. Une fois brisée, les géants les plus besogneux recyclent la vie du vêtement boiseux en conservant sa fonction, pour en faire des armures corporelles . C’est pour dire ! Au delà des quais, les noix de Boréa sont même réputées pour être impénétrables.

J’enfile l’uniforme commun, devient un numéro dans une matrice d’ouvriers. Au sein des champs titanesques, j’ai pour tâche d’entamer les plus grosses noix. Relativement à ma puissance physique, je suis parfois habilité à les mettre en morceaux seul. Je pratique ce métier depuis deux mois maintenant, suis payé en récompense de ma productivité sans pareil. En effet, j’échangeais depuis peu le marteau contre ma barre métallique, rendant obsolètes toutes les techniques d’ouverture connue jusqu’à ce jour. L’harmonie qui me mariait à l’outil depuis plusieurs années évolue enfin. En un puissant coup de bâton, je suis à présent capable de briser n’importe quelle coquille des noix qui clôturent l’espace. Je les fissure de manière à occasionner une multitude de lézardes. Les ondes transférées sous la coque déstabilisent les liaisons atomiques internes, le revêtement tombe alors en miette à mes pieds. Apprendre à pêcher plutôt que de donner du poisson, semble toutefois ne pas être une politique acquise au sein de l’entreprise. En m’observant, les ouvriers préfèrent risquer leur contrat avec celle-ci, plutôt que de continuer de bercer leurs collègues en cognant aveuglement ces noix. Ils observent. Les meilleurs apprennent tant bien que mal, mais durant mon séjour leur technique n’effleurera jamais la mienne, vraisemblablement pour des raisons génétiques. Dans les champs, court au nom de “brise-noix” la révolutionnaire capacité de cassage de coquille, plus le matériau auquel elle est administré est solide, plus celui-ci est affaibli. A l’inverse, le brise-noix n’affecte que très peu les surfaces malléables comme la mousse ou le bois, peu sensibles aux craquelures. Moi-même seulement suis capable dans une bien moindre mesure, de fissurer la terre.

Finalement, me voici défait de toutes dettes, mais aussi renforcé par l’effort, même détenteur d’une capacité prometteuse. Il fait beau voir son état physique augmenté en seulement quelques mois. Orion l’ivrogne, sourire aux lèvres, sang  aux joues, alcoolisé sans surprise, je pars récupérer mon frère remis sur pied depuis plus d’un mois aujourd’hui. Il s’entraîne, apprend à contrôler son nouveau corps. Je ne m’étais pas attardé à lui rendre visite plus tôt, car durant ces deux mois éprouvants, j’avais l’obligation de crécher à même les terres de mon lieu de travail.




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Baiburu, Jalabert...

Il y a de ces choses auxquelles nous ne pensons pas, pire encore, nous ne sommes pas sensé y penser, à savoir les mécanismes naturelles comme la mémoire associative. En effet avant d’acquérir l’intelligence, l’espèce humaine n’était pas destinée à soudain imaginer un cours d’eau au simple contact visuel ou sonore du mot rivière, qu’il soit prononcé ou écrit. D’ailleurs, si au mot “bibliothèque” vous imaginez en bonne et due forme cette pièce où l’on étouffe sous les pages rugueuses, des bouquins machinalement agencés en rang, des vieux grimoires convolant en justes traditions, et de chaleureuses colonnes en noyer qui peinent à se faire oublier, soyez affligés de n’avoir jamais mis les pieds à Baiburu, bibliothèque de Jalabert. Ici chaque recoin est synonyme de surprise. On se doute précocement que là où le froid n’est pas sur Boréa, on favorisera une décoration type chalet et feu de bois, fervente. Pour Baiburu le designer avait préféré éviter les sentiers battus, reproduire l’ambiance frigorifiante extérieure, mais en conservant une température d’intérieure classique, évidemment ; il est préférable d’avoir des clients. Les couvertures vernies se reflètent tactiquement dans les édifices de miroirs montées, à l’instar d’un champ de cristal. Syrius et moi avons rendez-vous ici même. En attendant je scrute les encyclopédies et d’autres ouvrages traitant de propriété physiques du tout petit, des interactions atomiques dans un solide dur, pour perfectionner mes techniques brises-noix fraîchement mises au point en me penchant sur le processus de démolitions des liaisons. Et le secret subsiste dans une minutieuse fréquence vibratoire que le tube adapte durant la collision avec la cible, le matériau devient instable malgré les apparences. Cette technique ne saurait être plus fourbe, le trompe-l'oeil n’a effectivement d’égal que les murs de Baiburu. Mais “brise-noix” au dépit de sa dimension burlesque n’est pas un nom assez conforme à son objet, et il n’est pas inadéquat que de faire une référence au responsable de sa création : l’esprit du gorille, m’habitait durant la mission qui m’avait été confiée. C’est là le premier privilège du druide, en compensation d’être un véhicule de mère nature. La fusion spirituelle avec l’esprit du gorille, c’est l’élément qui manquait aux ouvriers souhaitant d’atteindre mon niveau, mais inapte à l’état de transe requit. Alors c’est dit, dorénavant chaque coup relatif à l’affaiblissement de matériaux durs, exigera la transe du gorille et portera le nom de “Gorilla Stance” !

Je gribouillais un brouillon quand ce colosse bondit sur moi pour sévir son manque. Syrius, deux cents kilogrammes de muscles et d’engrenages polis, avachi sur moi.  
- Près pour une revanche frangin !?
Je suis intégralement pardonné, curieusement mon demi-frère avait avalé la pilule. Mieux encore, il prétend sous ses pistons saillants avoir ouvert les yeux grâce à moi, épanoui dans sa nouvelle existence de cyborg. À défaut de ne pas s’être défait de son discours habituel au sujet du pouvoir, stipulant que l’ultime but d’un homme se rapporte à sa force physique, il amène un nouveau détail. Si l’on écoute cet imbécile, il vaut mieux être un robot plutôt que d’être le circuit du sang. Les pièces mécaniques possèdent des propriétés physiques bien plus impressionnantes que n’importe quel entité vivante, encore faut il en être détenteur... J’attire mon adversaire auto proclamé en dehors de Baiburu, suffisamment loin pour ne pas exposer une telle quantité d’histoire aux dégâts collatéraux. Nous voilà déjà face à face, un classique finalement. Notre précédente altercation semble avoir gardée les tensions avec elle puisque nul ose ouvrir le bal, rien avorte mes tics nerveux qui trahissent mon impatience. On commence à taquiner nos membres au moyen d’à-coup désordonnés.
- Je ne me laisserai pas leurrer par tes jeux de jambes hasardeux cette fois, tu n’es pas aussi ivre que tu le fais paraître.  
- Bravo, tu m’as frustré.

Je plante mon tube dans la poudreuse, dégaine sauvagement trois gourdes d’alcool pur avant d’en extraire le contenu plus vite qu’il n’en faut pour le dire. Ses yeux s’écarquillent. J’écrase mes poumons, expire de toutes mes forces, l’air entamé déferle sur son visage à une vitesse folle, l’alcool y est concentré au point de faire tourner la tête au pire des ivrognes. Syrius s’étant mécanisé au détriment d’un quart de son système sanguin, voit la liqueur lui monter instantanément à la tête.
- Gorilla Stance.
Occasion idéale pour m’essayer au broyage de métaux avec la Gorilla Stance, l’esprit du gorille prend plus que jamais possession de mon corps, l’animal impose l’art et la manière à travers un morceau de métal. Mes coups sont principalement portés sur son bras mécanisé, et son tube. Ce n’est pas service à rendre que de préciser le but du processus, affaiblir son armature donc, pour peut-être enfin la défaire. A compter du vingtième coup, son bras démontre plusieurs signes de défaillances, finira par devenir un fardeau pour son utilisateur. Les vibrations sont synonymes de bourreau à l’oeil des rouages d’acier qui, se tortillent au son des chocs, s'entaillent et s'esquintent. Les moins imposantes écachent. Enfin, son arme s’incline puis explose. Le combat s’achève au rythme de mes assauts maladroits mais franchement puissants. Il me regarde, hors d'haleine, étoffe un sourire quelque peu artificiel, aménageant, signant sa défaite toutefois peu significative.




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Syrius. On se demande, en voyant s’exciter un tel loustique, et en connaissance des évènements passés, quelle sombre substance lui tire les fils. Le chasseur de primes en charge de son opération l’avait drogué, sans doute. L’issu du combat semble lui réussir en dépit d’une défaite flagrante, son bras robotique n’est en surcroît plus fonctionnel. Il s’en réjouirait presque. Mon demi-frère ne digère que trop sa soumission, et donne l’impression d’avoir comme “mal loupé” son numéro. Son humeur plus factice, plus machinal, plus automatisé encore que son bras, m’est pénible.
- Ôte moi ce sourire d’imbécile, pourquoi m’as tu offert la victoire ?
- Je ne t’ai en rien offert ce combat, tu t’es bien défendu et tes nouvelles techniques sont impressionnantes. C’est tout Very Happy
- Ahahah.. Hic. Pardon. Ton sourire est encore plus faux que ton corps Syrius.
- De nous deux, c’est moi le plus faux ? Le temps que tu passes à t’enivrer est tel, que la véritable vie t’est inconnue, et te serait insupportable. L’intégralité de ta personne est une farce, même ton talent au combat périrait littéralement  sans ta “précieuse liqueur” de merde ! Ta bouteille et toi êtes comme deux roues dentées, et le pignon, c’est toi !
- Quoi ? Hic... Moi… Un pignon ? Hic.
- Pire encore ! Car c’était sans compter ton pacte avec la nature peu authentique, pour ne pas dire inexistant. Nul autre que moi satisferait à un tel titre. En témoigne mon actuel alias, “le chloromancien”, m’est du pour un talent bien tangible. Tandis que toi, n’a d’aussi tangible que le culot de soutenir ton lien avec mère nature. Ta véritable mère doit être simplement morte.
- Hic… Si tu penses m’énerver avec ça…
- Non, ta sagesse n’a plus rien à prouver Orion. Néanmoins, essaie d’aspirer à mes paroles au lieu d’en avoir vent, pour une fois... C’est la vérité.
- C’est une vérité, certes, mais une vérité relative : affirmer que, sans ton éducation, la vie te serait inconnue, n’est pas mois sensé. En plus, je tiens bien plus l’alcool qu’on ne le pense... Hic.
- Je sais Orion, mais le résultat ne change pas. Je sais, que tu n’es jamais aussi bourré qu’il ne le paraît. Je sais, que tu exploites cette aptitude pour induire les gens en erreur, les faire croire que tu ne contrôle pas ce que tu fais. Je le sais. Mais ta force réelle, elle, est bien faible. Tu as trop tourné ton personnage autour de ce paramètre.
- C’est un pari risqué… Hic.
- Mais pourquoi faire aussi compliqué ? Tu vas devoir endosser ce rôle stupide toute ta vie pour subsister.
- Un ivrogne incompétent, mais chanceux au point d’anéantir les plus puissants criminels de ce monde. Comment ne pas y voir l’oeuvre de Dieu ? Hic... Je veux devenir l’homme le plus puissant, mais que, tous croient au miracle, au fruit du hasard. “Orion le druide n’est qu’un imposteur” ; “Orion n’est qu’un veinard, il est nul, mais il gagne toujours” ; “peut-être est-ce un élu de Dieu” ; ceci est mon dessein… Hic.
- Mais pourquoi !?
- Parce que… Ça fait le buzz… Aahahah… Hic. Allez trève de disputes. Viens boire un verre Syrius ! Si toutefois ton foie de robot assimile l’éthanol…


Nous nous rendons au Skellington, vous savez, le premier bar dont j’avais fait l’éloge avant d’ouvrir les yeux au milieu des scalpels du père noël. De quoi signer une énième fois l’armistice, de surcroît avec le câlin forcé, notre revanche, et finalement, la révision symbolique de son style vestimentaire. En effet, Syrius, jadis vêtu d’un rouge manifestant sa volonté d’être mon flagrant némésis, pris option pour des tons marrons cuire, biaisés d’un fignolage d’appareils high-tech mettant en avant son intention d’être un cyborg. Un casque métallique jonche également sa caboche, dorénavant, seul une ouverture en “Y” laisse au monde un aperçu de son visage. Ses cheveux, par hérédité, comme les miens, sont en panache depuis la cordelette qui les noue fermement. En diverge toutefois la couleur, blanche désormais.




On trinque à la fraternité, pour moi de quoi m’exprimer sur un sujet plus important encore : mon départ de l’île. En effet, les nombreuses fortunes et aventures qui parachèvent le Boréalin se dressant devant un éternel comptoir, moi, n’ont pour cour que lassitude. Aussi l’occasion pour moi, d’apercevoir les eaux chaudes de North Blue, sans iceberg à tire-larigot, puis j’espère, celles sans calme de Grand Line. Ma richesse et mes biens reviennent à Syrius. Je lui concède, mon entreprise, un logement pour sa mère, une ferme pour ses cochons, certain que tout me sera rendu au moment propice. Devant moi, son visage plus que jamais déconfit, se torture entre jouissance et tristesse ; comme deux miroirs côte à côte, reflétant deux paysages littéralement contraires, pour à peine deux degrés d’inclinaisons d’écart. On se convainc qu’il pense, mais ses pensées frôlent le néant. C’est la vie d’un homme qui bascule complètement entre ces chaises grâce à moi, ou, à cause de moi. C’est mon choix. Peu importe, car mon âme est pour l’heure, plus encombrée par mon avenir que par le sien, l’ataraxie ne connaît pas de nuances. Je m’en vais sans adieu, mon majordome s’occupera des paperasses sans broncher, ma nouvelle quête prend racine aux chutes boréales. Lieux saints d’après la culture locale, et je m’arme de blasphème...


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Comme à Boréa, l’on ne trouve aucun navire sur le commerce, un plan intermédiaire s’imposait, évident, quoique l’idée ne vint pas à l’esprit d’elle-même, et mon âme en garde quelques séquelles. Accoster un bateau clandestinement pourrait m’attirer de mauvaises foudres ; nul île atteignable à la nage n’en fabrique ; mon carnet d’adresse lui est lâche en navigateurs ; alors, l’option du radeau maison me parut jusqu’alors être la meilleure. Me parut seulement, car finalement, un intermédiaire vint s’offrir à moi. En fait, il me fallait prendre le problème à l’envers. J’explique. Une puissante garde se tient aux environs des chutes boréales tant celles-ci sont symboliques pour les indigènes. Par ailleurs, qui s’approche sans autorisation des eaux dansantes, se verra bazarder en mer, certes comme un malpropre, mais à bord d’une barque pleine de vivres. Or, cela fait trois jours maintenant que j’attroupe mes forces pour retenir ma vessie. Oui, une indescriptible envie d’uriner contraint mes enjambées… Les chutes, pipi, les chutes, pipi, la barque ; vous saisissez ? Je ne plaisante pas, non. Je n’ai qu’une pensé depuis peu, mon destin n’a qu’une direction. Ma vessie au doux fumet musical des cascades n’aura qu’un mot, et croyez-moi, la vessie d’un alcoolique, flâne à des années lumières de celle d’un pisseur lambda. “C’est deux mondes” comme vous dites. Je vais, littéralement, noyer l’eau sainte de Boréa avec mon urine naturellement fermentée. Je dénoue mes cuisses, atrophiées, inspire un grand coup. Mon ventre me brûle comme jamais. Je me redresse, en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. En sueur je m’élance, avance une jambe, puis l’autre, en conservant toute concentration entre mes cuisses.

Il m’accompagnera jusqu’au bout, l’élan, ancien esprit de l’endurance et la persévérance. J’imagine ses deux cornes jonchées sur mon propre crâne, en avant, je fonce droit sur les chutes, hors d’haleine. Plus rien n’a d’égale importance que de courir ici, si ce n’est d’éviter les murs. Du regard les promeneurs s’essayent à me suivre, stupéfaits, l’un d’eux observe mollement ses crêtes de linge propre s’emmêler avec mon visage. Tandis que mon champ de vision s’embrase d’une explosion de teintes pastelles ; des draps, des pulls, une écharpe, s’invitent au doux balle de tissu et s’accrochent aux miens. Je dépasse fermes et champs glaciaux, chalets puis vallées, agrippant mon sexe des deux mains pour empêcher le drame. Quand enfin, j’aperçois au loin destination. Il semblerait là que personne ne soit de garde, simplement car nul n’osait autrefois pénétrer ces lieux. Après tout, pour quoi faire ? Surement pas y vider ses écluses, du moins pas celles-ci. Me voilà. Au bout de quelques mètres, assistant aux affaissements hydrauliques de la chute, fluides, tandis que dans mes bottes la sueur et le froid ne font pas bon ménage. J’amorce mes premiers pas en direction du bassin récepteur en contre-bas, quand au loin, vient s’ajouter au mien, le chant des semelles miliciennes qui s’enfoncent dans la neige à vive allure.  Ils viennent pour moi, les gardes, interrompus tandis qu’ils sirotaient leur vin soigneusement fermenté, en témoignent leurs lèvres grossièrement recouvertes du liquide violâtre. Du coup, en dépit de mes envies pressantes, je patiente quelques secondes afin d’avoir les miliciens devant moi pour faire disparaître ce supplice. Je me tiens en haut des chutes. Au nombre de cinq, les agents d’élite m’observent outrageusement en contre-plongée, démunis, au point même d’oublier d’ouvrir le feu. Quand finalement, j’hurle à ces arrivants :
- Pas de paniques messieurs… Hic. Il nous rrrr-reste encore du vin blanc !
Je dégaine le tuyau ici, comme promis, pour laisser ruisseler mon incroyable réserve ! Ainsi mon phallus, consumé par le froid déjà, n’est pas consolé par les litres de liquide qui le traverse impétueusement, pour se mélanger aux gouttelettes de bués et enfin, venir s’encastrer dans le bassin d’eau sacrée. C’est un spectacle sans égal que de voir, par ses soins, la transparente pureté se faire souiller.
- Les gars, regardez comme il tangue.
- Il est complètement bourré bordel…
- C’est Melchior Aion, les cordonniers sont les plus mal chaussés visiblement.
- Non, c’est juste un imbécile. J’ai la certitude qu’il a, encore, encore perdu à un de ces stupides paries que les habitués du Skellington ont pour habitude de lancer.

En tergiversant, les miliciens reprennent leurs esprits peu à peu, le temps pour moi, de me vider complètement. L’urine s’écoule, encore et encore ; la douleur est telle que, l’impression qu’un anaconda me pénétrant de bas en haut m’envahit sans prendre de pincettes. Au bout d’une dizaine de minutes de besoins, je finis par descendre d’ici sans broncher davantage. Afin de ne pas perdre crédit, je tente, une fois en aval, résistance factice face aux trois gardiens, seulement de quoi passer pour un authentique délinquant. En effet, je refuse fermement de voir mes efforts tomber à l’eau bêtement, faute d’être, relativement à mes débordements récurrents, connu comme le loup blanc.

Saimiri Spirit.

J’agrippe mon accessoire métallique, puis exécute ma technique en bonne et due forme, à savoir, tacler mes opposants de manière effrénée, sans répit, au niveau des jambes, les obligeants ainsi à danser selon mon grès. Les miliciens s’abandonnent à leurs naissantes vies de marionnettes quelques  secondes. Mais à l’issu, l’un deux parvient à se dérober du manège, m’enfonçant d’une  main de fer, sa cross derrière le crâne. Je m’écroule volontairement, à même le sol de glace, puis absorbe furtivement un liquide soporifique conçu au préalable, le tout, en priant voir l’aube au creux d’une barque toute neuve.

A bientôt, Boréa.




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